République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 8h, sous la présidence de M. Eric Leyvraz, président.

Assistent à la séance: MM. François Longchamp et Laurent Moutinot, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. David Hiler, président du Conseil d'Etat, Robert Cramer, Pierre-François Unger, Charles Beer et Mark Muller, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. David Amsler, Caroline Bartl Winterhalter, Sébastien Brunny, Maurice Clairet, Jacques Follonier, Mariane Grobet-Wellner, Virginie Keller, Anne Mahrer, Yves Nidegger, Jean-Marc Odier, Henry Rappaz, Ariane Reverdin, Louis Serex, Damien Sidler, René Stalder, Alberto Velasco et Daniel Zaugg, députés.

Correspondance

Le président. Vous avez trouvé sur vos places l'énoncé de la correspondance reçue par le Grand Conseil. Cet énoncé figurera au Mémorial.

Détermination du Grand Conseil sur le recours de M. ARDITE Jean-Luc et Mme PEYSSON Anne-Marie contre la loi 10121 modifiant la loi sur la police du 19 février 2009 (transmis à la Commission judiciaire et de la police) (voir correspondance C 2789) (C 2800)

Courrier de M. SEYDOUX Laurent, conseiller administratif de la commune de Plan-les-Ouates, concernant le projet de modification des limites de zones n° 29711-529-517 "Les Cherpines" et "Les Charrotons", Confignon/Plan-les-Ouates (transmis à la Commission de l'aménagement pour information) (C 2801)

Réponse du Grand Conseil à l'écriture du 5 juin 2009 des recourants dans la cause A/3626/2008, recours de Mme Christodoulidis et autres contre la loi 10189 du 13 juin 2008 modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Thônex (création d'une zone de développement 3 et de zones de bois et forêts au lieu-dit "Les Communaux d'Ambilly") (copie transmise à la Commission de l'aménagement) (voir correspondance C 2704, C 2724, C 2726, C 2733, C 2735, C 2762, C 2749 et C 2795) (C 2802)

Arrêt du Tribunal administratif du 28.07.2009 concernant le recours de M. GAILLARD Etienne contre la loi n° 10005 du 24 avril 2008 modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Cartigny (création d'une zone de hameaux et d'une zone de développement 4B protégée au lieu-dit "La Petite-Grave") (transmis à la Commission d'aménagement) (C02664 et C02687). (C 2803)

Arrêt du Tribunal administratif du 28.07.2009 concernant le recours de M. BOCION Jean-Jacques contre la loi n° 10005 du 24 avril 2008 modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Cartigny (création d'une zone de hameaux et d'une zone de développement 4B protégée au lieu-dit "La Petite-Grave") (voir C 2665, C 2666, C 2686, C 2778 et C 2781) (transmis à la Commission d'aménagement) (C 2804)

Lettre de M. SEREX Louis, du 7 août 2009, annonçant la démission de son mandat de député le jeudi 27 août 2009. (C 2805)

Invitation du Tribunal fédéral au Grand Conseil à se déterminer sur le recours de SolidaritéS et consorts contre la décision du Grand Conseil du 17 juin 2009 déclarant invalide l'IN 142 "Pour le droit à un salaire minimum" (transmis à la Commission législative) (C 2806)

Transmission par le Tribunal administratif de l'écriture du 14 août 2009 des recourants dans la cause A/3626/2008, recours de Mme Christodoulidis et autres contre la loi 10189 du 13 juin 2008 modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Thônex (création d'une zone de développement 3 et de zones de bois et forêts au lieu-dit "Les Communaux d'Ambilly") (copie transmise à la Commission de l'aménagement) (voir correspondance C 2704, C 2724, C 2726, C 2733, C 2735, C 2762, C 2749, C 2795 et C 2802) (C 2807)

Communication par le Tribunal fédéral de la prise de position du Conseil d'Etat dans le recours de M. TURRIAN Marc contre la décision du Conseil d'Etat du 5 janvier 2009 (voir correspondance C 2770, C 2779, C 2783, C 2794 et C 2798) (C 2808)

Lettre de Mme PREMET-RIEDER Francine au Grand Conseil à propos de l'insécurité sur la plaine de Plainpalais - Jeux du "Bonneteau" (C 2809)

Courrier de M. CLERC Damien, Secrétaire général de la Fondation pour la promotion du logement bon marché et de l'habitat coopératif (FPLC), transmettant au Grand Conseil le rapport d'activité 2008 de la Fondation (transmis à la Commission du logement pour information) (C 2810)

Transmission par le Tribunal administratif d'un recours du 12 août 2009 déposé par GAZNAT SA (c/ Me Kasser, Lausanne) contre la décision du Grand Conseil du 15 mai 2009 (loi 10431) (transmis à la Commission d'aménagement) (C 2811)

Annonces et dépôts

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, la commission de contrôle de gestion nous informe qu'elle désire renvoyer à la commission des affaires communales, régionales et internationales l'objet suivant:

Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la gestion du Fonds d'Equipement Communal pour l'exercice 2007 (RD-765)

PL 10520
Projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève, en liquidation, à aliéner le feuillet PPE 6289 n° 25 de la parcelle de base 6289, plan 82 de la commune de Genève, section Cité, soit un appartement de 4 pièces sis rue Samuel-Constant 1

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe.

PL 10521
Projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève, en liquidation, à aliéner le feuillet PPE 6289 n° 34 de la parcelle de base 6289, plan 82 de la commune de Genève, section Cité, soit un appartement de 4 pièces sis rue Samuel-Constant 1

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe.

PL 9931-B
Rapport de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur l'exercice des droits politiques (A 5 05)

Premier débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons maintenant au point 14 de notre ordre du jour.

M. Didier Bonny (PDC), rapporteur de majorité. Je rappelle tout d'abord que, dans l'attente du vote par la population genevoise du projet de loi constitutionnelle - le PL 10013 - sur l'introduction du vote électronique, le PL 9931 qui nous occupe ce matin avait été renvoyé par le Grand Conseil à la commission des droits politiques. Cette dernière l'avait adopté le 9 mai 2007, à une courte majorité. La population genevoise ayant voté à 70% en faveur de cette introduction le 8 février dernier, la commission des droits politiques a pu reprendre ses travaux afin de modifier la loi régissant les droits politiques en conséquence. Il est à noter que ces deux projets de lois avaient, entre le 20 décembre 2006 et le 9 mai 2007, fait l'objet de quinze séances de commission. C'est la raison pour laquelle le projet de loi 9931 a été traité en une seule séance à l'occasion de son deuxième passage en commission. Les propos de la rapporteure de minorité alléguant que ce projet de loi a été traité par la commission «par-dessus la jambe» sont donc tout à fait inappropriés !

Je rappelle ensuite que les objectifs de ce projet de loi sont, d'une part, la mise en place d'une commission électorale centrale permanente en remplacement des contrôleurs nommés par le Conseil d'Etat et, d'autre part, l'introduction du vote par internet. Si le premier objectif de cette loi - la commission électorale - n'a guère suscité de débat, il n'en a pas été de même pour le vote électronique, qui est un moyen de vote complémentaire limité aux votations.

Le système du vote par internet est strictement séparé des autres systèmes de l'administration. Le bien-fondé de cette manière de faire a été confirmé lors du dernier test d'intrusion. Le système subit une batterie de tests avant chaque scrutin, qui aboutit à une certification interne. Le système est ensuite figé pour la durée de l'opération. Les tests d'intrusion sont effectués par des tiers, car il est nécessaire de se mettre en situation, notamment en cas d'attaque soudaine ignorée par le CTI. Le premier amendement de la minorité visant à ajouter «notamment au moyen de tests d'intrusion effectués par des tiers» est donc parfaitement inutile !

Le système est également audité régulièrement au moins une fois tous les trois ans. La minorité souhaiterait que ce délai soit ramené à deux ans mais, comme cela a été relevé en commission, la société Ilion, lors de son audition, avait préconisé une période de trois ans, car elle correspond à ce qui se fait en matière de certification et qu'il faut trois ans pour pouvoir analyser les résultats. Le deuxième amendement de la minorité doit donc, lui aussi, être rejeté !

En conclusion, si le risque zéro n'existe pas, force est de constater que, pour la très grande majorité de la commission - seule la rapporteure de minorité s'est opposée lors du vote final - les garanties qui ont été données sont largement suffisantes. C'est la raison pour laquelle je vous invite, au nom de cette majorité, Mesdames les députées, Messieurs les députés, à soutenir ce projet de loi tel que voté par la commission des droits politiques.

Mme Emilie Flamand (Ve), rapporteuse de minorité. Vous l'avez compris, il ne s'agit pas ici de refaire le débat de fond sur le vote électronique: nous en avons déjà longuement débattu. C'était il y a une année exactement, lors de la session supplémentaire du mois d'août 2008.

Le 8 février dernier, la population s'est prononcée, à une large majorité, en faveur du vote électronique. Cela dit, il convient de noter la procédure pour le moins étrange qui a été suivie au sein de notre parlement. En août 2008 - il y a donc une année - la majorité de notre hémicycle décidait de renvoyer le bébé au peuple, à savoir d'adopter une loi constitutionnelle autorisant le vote électronique, le but étant que la population se prononce sur le principe.

Le projet de loi 9931 avait alors été renvoyé en commission, chacun des intervenants spécifiant bien qu'il serait réétudié après le vote populaire, une fois que la population se serait prononcée sur le principe, afin d'avoir une loi d'application qui corresponde à tous les critères de sécurité. Or, en février dernier, la commission des droits politiques, dont la composition avait pourtant fortement changé depuis les premiers travaux sur le vote par internet, a traité en une seule séance, quasiment sans questions ni débat, ce projet de loi !

Les Verts ont proposé deux amendements visant à améliorer la sécurité. Je vais vous les présenter maintenant pour éviter d'avoir à intervenir à nouveau en deuxième débat.

Le premier vise à ajouter dans la loi: «notamment au moyen de tests d'intrusion effectués par des tiers». Il est vrai, comme l'a précisé le rapporteur de majorité, que cela correspond à la pratique actuelle. Cela dit, accepter cet amendement permettrait de fixer dans la loi le fait que le CTI n'est pas seul responsable des tests de sécurité, et l'intervention de tiers garantirait une certaine indépendance dans le contrôle du système.

Quant au second amendement, il ramène la durée entre deux audits de trois à deux ans, ce qui nous paraîtrait plus judicieux. Certes, Ilion nous avait dit qu'en général les audits s'effectuent tous les trois ans mais, à notre avis, dans le cadre du vote électronique qui est une étape importante du processus démocratique, il serait important d'être plus strict que pour le reste des opérations informatiques de l'Etat.

En outre, ces amendements auraient entre autres le mérite de rassurer les citoyens qui sont inquiets et méfiants vis-à-vis du nouveau système de vote électronique. Le représentant de la chancellerie, M. Warynski, avait d'ailleurs indiqué, lors de la séance de commission, que ces amendements ne posaient aucun problème à la chancellerie. Malgré cela, ils ont été balayés par des commissaires pressés, visiblement peu soucieux de se pencher sur la sécurité du processus démocratique, malgré un rapport peu rassurant de la même société Ilion, que nous avions reçu fin 2008.

Aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous demandons d'accepter ces amendements pour montrer votre attachement à un exercice aussi sûr que possible de la démocratie !

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Gautier... Pardon, à Mme Gautier !

Mme Fabienne Gautier (L). Je vous remercie, Monsieur le président. Ce n'est pas la première fois que vous me confondez avec M. Gautier, mais je suis bien Mme Fabienne Gautier !

Le président. Je suis désolé, Madame: j'ai mal regardé ! (Commentaires.)

Mme Fabienne Gautier. Mesdames et Messieurs les députés, en février 2009, les citoyennes et citoyens de ce canton se sont prononcés à une large majorité... En effet, comme cela a été dit, plus de 70% de la population genevoise a accepté l'introduction du vote électronique et son inscription dans la constitution genevoise. Le peuple genevois, lui, ne craint pas, comme certains députés de cette assemblée, l'insécurité des résultats, le piratage ou le «phishing» - pour utiliser un terme du jargon informatique. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) D'autres cantons ne craignent pas non plus le vote par internet car, oui, Mesdames et Messieurs les députés, ils font confiance au système du vote électronique mis en place par Genève: ils s'y intéressent et songent à l'introduire dans leur propre canton !

A mon grand plaisir, je constate que Mme le rapporteur de minorité, Emilie Flamand, suite au vote plébiscité par la population genevoise, revient à de meilleurs sentiments, puisqu'elle propose des amendements - ils figurent dans le rapport de minorité - pour pouvoir accepter ce projet de loi. Mais, comme l'a indiqué le rapporteur de majorité, M. Didier Bonny, tous les contrôles sont déjà prévus dans le projet de loi tel qu'il est présenté aujourd'hui. La commission des droits politiques n'a donc pas jugé nécessaire de les améliorer, dans la mesure où elle a encore reçu des informations qui l'ont convaincue que toutes les mesures nécessaires en matière de sécurité seraient prises pour pouvoir introduire définitivement le vote électronique dans notre système de vote.

En fait, il reste à l'assemblée ici présente à accepter le PL 9931, qui est un excellent projet de loi, pour avancer dans le sens de la modernité que représente le vote par internet. Et je suis certaine que le vote électronique est un moyen d'améliorer la participation démocratique et qu'il facilitera - cela ne fait aucun doute - le vote des Suisses à l'étranger. C'est pour cela que je vous recommanderai de voter le projet de loi 9931 tel qu'il vous est présenté aujourd'hui.

Le président. Merci, Madame la députée Fabienne Gautier ! La parole est à M. Jeannerat.

M. Jacques Jeannerat (R). Il faut relever deux faits par rapport à ce projet de loi. Le premier - il a été évoqué par plusieurs députés - c'est le oui cinglant des Genevois: 70% d'entre eux souhaitent pouvoir voter par internet.

Le deuxième, c'est que, au fil des tests qui ont été effectués dans les communes, des sondages ont été réalisés auprès des personnes qui ont utilisé le vote par internet. Et il faut savoir que pratiquement toutes ces personnes se sont déclarées enchantées par ce procédé. Je pense donc qu'il faut aller de l'avant ! Les Genevois veulent le vote par internet !

Et puis je rappellerai que l'article constitutionnel que nous avons voté il y a quelques mois permet au Conseil d'Etat, si par malheur des hackers devenaient trop puissants et parvenaient à entrer dans le système, de délaisser, la veille d'un scrutin, la possibilité de voter par internet. Tout a été prévu, tant dans l'article constitutionnel que dans le projet de loi issu de la commission des droits politiques, et je pense qu'il serait inutile d'entrer en matière sur des micro-amendements déplaçant quelques virgules de ce projet de loi qui, je le répète, a été bien rédigé ! Le groupe radical vous invite par conséquent à l'accepter sans le modifier.

M. Régis de Battista (S). Le parti socialiste salue la venue de cet outil informatique, le vote électronique, qui va favoriser les débats démocratiques dans notre république. Le résultat - cela a déjà été dit: 70% de la population a voté pour - montre que ce nouveau moyen est nécessaire. Il représente également un espoir dans la lutte contre l'abstentionnisme, qui est malheureusement toujours grandissant. Il faut vraiment avoir à coeur de résoudre ce problème, afin que les débats démocratiques se fassent au mieux avec la société civile.

Les débats à la commission des droits politiques se sont particulièrement bien déroulés, et le parti socialiste vous recommande d'accepter ce projet de loi comme l'a fait la majorité de la commission.

Je ne vais pas parler des amendements présentés par le parti des Verts, car il s'agit effectivement d'amendements cosmétiques... Je le dis en toute amitié !

En conclusion, le parti socialiste vous recommande d'accepter ce projet de loi.

M. Philippe Guénat (UDC). L'UDC a déjà eu l'occasion de s'exprimer longuement sur ce projet de loi, lorsque nous avons traité le PL 10013.

Je tiens juste à rappeler aujourd'hui que, pour nous, UDC, le principe du vote par internet est fort utile, spécialement pour la cinquième Suisse, c'est-à-dire pour les Suisses de l'étranger, qui ont trop peu souvent le temps d'effectuer leur vote, cela pour des problèmes législatifs.

Malheureusement, nous ne pensons pas que cette nouvelle possibilité de vote mise à la disposition de la population engendrera un engouement débordant, comme certains le prévoient, et qu'elle incitera les nombreuses personnes qui ne votaient pas hier à voter aujourd'hui. Nous avons en effet remarqué que les personnes qui votaient par correspondance sont les mêmes qui votent par internet, et que celles qui ne votaient jamais n'ont toujours pas voté par internet !

Par ailleurs, nous avons toujours émis de sérieux doutes concernant la fiabilité du système proposé, et ces doutes ne sont pas le fruit de purs préjugés idéologiques. Ils sont basés sur des malaises apparus durant les auditions concernant le système de sécurité.

Pourquoi sommes-nous si pointilleux, à l'UDC, sur la sécurité du vote électronique ? Vous savez bien que nous, UDC, sommes les précurseurs de la sécurité ! (Rires.) Merci de le reconnaître ! Nous savons qu'il n'y a aucun risque pour une votation dont l'enjeu serait communal ou cantonal, car elle n'intéresserait pas les vrais hackers au service d'une nation tierce. En revanche, il n'en serait pas de même si notre pays - je parle d'un vote national - devait se prononcer sur la question de son adhésion à l'OTAN ou à l'Europe telle qu'on la connaît maintenant ! Je vous rappelle que les Lituaniens en ont fait récemment la terrible expérience, et pourtant l'enjeu ne portait que sur la relocation d'un monument aux morts vieux de soixante ans !

Alors, c'est vrai, comme l'ont dit plusieurs de mes collègues, le peuple genevois a voté massivement en faveur de l'introduction du vote électronique. Il l'a accepté, mais il ne nous a pas donné pour autant un blanc-seing pour faire n'importe quoi ! Et nous, à l'UDC, nous tenons à tirer la sonnette d'alarme quant à la sécurité de sa mise à jour. En effet, nous ne pouvons pas accepter que seul le CTI soit habilité à tester le système, qui plus est à des intervalles bien trop longs - trois ans - comme cela est indiqué dans ce projet de loi ! D'autant que nous savons très bien que tous les six mois de nouvelles technologies voient le jour, qui pourraient changer l'accès de sécurité de ce système !

C'est la raison pour laquelle nous demandons - je vais terminer, Monsieur le président, votre regard est explicite... - que des tests d'intrusion soient également effectués par des sociétés tierces et que les audits soient prévus au moins tous les deux ans - et non pas trois ans ! Si ces propositions devaient être adoptées, nous, députés de l'UDC, soutiendrions ce projet de loi. Si tel n'est pas le cas, nous le refuserons... Pour l'instant !

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Dans le discours de Saint-Pierre, le Conseil d'Etat s'était engagé à innover en matière administrative et d'organisation de l'Etat.

Ce projet de loi a été déposé au tout début de la législature. Il a fait l'objet d'examens attentifs par votre commission et votre Grand Conseil. Puis, dans un souci démocratique, compte tenu de l'importance du sujet, vous avez rédigé une disposition constitutionnelle, qui a permis au peuple de se prononcer.

Nous sommes par conséquent maintenant dans la phase d'exécution de la volonté populaire. Il s'agit, comme vous le savez, de renforcer l'éventail des possibilités qui permettent aux citoyennes et citoyens de s'exprimer et, ainsi, de favoriser la participation la plus élevée possible aux opérations électorales.

Il va de soi que la sécurité est un souci prioritaire dans ce dossier. Nous ne pouvons pas nous permettre qu'il y ait des intrusions dans ce système, et les dispositifs votés par votre commission et repris dans le rapport de majorité sont parfaitement adéquats.

A ce propos, je vous signale qu'un certain nombre de cantons ont d'ores et déjà déclaré leur souhait de profiter du système genevois, et des accords ont été conclus avec certains d'entre eux. Cela prouve le succès et le dynamisme de l'administration genevoise, qui a réussi, pendant cette phase test autorisée par la Confédération, à mettre au point un système de qualité.

C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie de voter le texte tel qu'il est issu des travaux de votre commission et tel qu'excellemment rapporté par le rapporteur de majorité.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant la prise en considération du projet de loi 9931.

Mis aux voix, le projet de loi 9931 est adopté en premier débat par 41 oui contre 5 non et 12 abstentions.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 39 (nouvelle teneur) à 57 (nouvelle teneur).

Le président. A l'article 60, nous sommes saisis de deux amendements proposés par la minorité. Le premier consiste à ajouter à l'antépénultième phrase de l'alinéa 6: «notamment au moyen de tests d'intrusion effectués par des tiers».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 33 non contre 25 oui et 4 abstentions.

Le président. Je vous soumets maintenant le deuxième amendement proposé par la minorité à l'article 60. Il s'agit de remplacer, à l'avant-dernière phrase de l'alinéa 6, «trois ans» par «deux ans».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 37 non contre 26 oui.

Mis aux voix, l'article 60 (nouvelle teneur, avec modification de la note) est adopté, de même que les articles 61 (nouvelle teneur, avec modification de la note) à 192 (nouvelle teneur).

Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).

Troisième débat

La loi 9931 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 9931 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 44 oui contre 8 non et 15 abstentions.

Loi 9931

PL 10000-B
Rapport de la Commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil chargée d'étudier le projet de loi de MM. Roger Golay, Henri Rappaz et Thierry Cerutti modifiant la loi sur l'exercice des droits politiques (A 5 05) (Transparence et financement des partis politiques)

Premier débat

M. Pablo Garcia (S), rapporteur de majorité. Le projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui est de ceux qui marquent une législature... Il montrera la détermination des partis politiques à réformer des pratiques et des façons de faire qui n'ont plus leur place dans un Etat de droit !

La commission des droits politiques vous soumet aujourd'hui son travail: une oeuvre de compromis dans laquelle chacun des partis composant cette majorité a fait un pas sur le chemin d'une solution négociée et mutuellement satisfaisante. Cette tâche, Mesdames et Messieurs, ne fut pas aisée, et l'on se souvient des déboires du projet de loi 8831 portant sur le même sujet en 2004, qui a échoué en raison d'une volte-face de dernière minute du parti démocrate-chrétien, lequel, après avoir voté pour ce projet en commission, l'a finalement retiré.

Mais aujourd'hui, en 2009, nous avons enfin une chance d'aboutir à des résultats concrets, et je tiens à saluer le travail de compromis du parti démocrate-chrétien, du parti socialiste, des Verts et du MCG.

Ce projet de loi est composé de trois volets complémentaires et équilibrés. Que demande-t-il ? Dans le premier, il fixe les montants de financement des partis politiques représentés au Grand Conseil à raison de 100 000 F, plus 7000 F par siège.

Le second volet concerne la transparence du financement des partis, une transparence des comptes et une interdiction des dons anonymes ou sous pseudonymes.

Enfin, le dernier volet a trait au plafonnement des dépenses électorales des partis politiques.

Ce projet de loi est donc important, car il permet une véritable régulation budgétaire des partis qui touchent des allocations publiques de façon indirecte - puisque le reversement d'une partie des jetons de présence des députés se pratique naturellement dans plusieurs partis - mais aussi une normalisation des rapports entre bailleurs de fonds et formations politiques.

Mesdames et Messieurs les députés, la suppression des dons anonymes est une nécessité. Genève n'est pas une république bananière ! Et nos partis politiques n'ont rien à cacher ! Les dons anonymes appartiennent à un passé révolu: ils correspondent à des pratiques qui n'ont pas leur place dans une république moderne, une république transparente, une république de droit !

Cette tradition obscure de financement politique conduit à empêcher le bon fonctionnement de notre vie démocratique. En effet, les dons anonymes portent en eux, qu'on le veuille ou non, les marques de la suspicion propres à jeter le discrédit sur la classe politique. C'est dans cette opacité, Mesdames et Messieurs, dans cette latence du monde politique à vouloir légiférer sur son propre comportement que les racines du populisme trouvent un terreau fertile.

Pourquoi la majorité de la commission des droits politiques a-t-elle souhaité aller plus loin et introduire les notions de plafonnement des dépenses de campagne dans ce projet de loi ?

L'explosion des dépenses électorales, la course à la maximisation de l'image conduisent à une recherche toujours plus effrénée de financements supplémentaires des partis. Cette collusion entre bailleurs de fonds et personnel politique expose le système démocratique à d'éventuels dysfonctionnements qu'il convient d'anticiper. Il est d'ailleurs étonnant - si vous me permettez de le dire - de constater que les partis de droite comme les radicaux, les libéraux, l'UDC, ne veulent pas profiter de cette loi qui leur procure l'indépendance, la marge de manoeuvre et la liberté nécessaires à l'expression de leur pensée politique ! Il n'est pas si loin le temps où l'UBS participait au financement des partis de droite, jusqu'à l'aveuglement, jusqu'à la complaisance par rapport à des pratiques qui ont conduit à la crise que nous vivons et dont nos concitoyennes et concitoyens paient aujourd'hui le prix fort ! (Exclamations.)

Mesdames et Messieurs, si l'on admet le financement partiel des partis politiques par des deniers publics, il va de soi qu'un contrôle démocratique doit pouvoir être exercé via des mesures de transparence et la canalisation des dépenses électorales. On a raison de dire que la démocratie n'a pas de prix... Toutefois, les campagnes électorales des partis politiques ont un coût en constante augmentation. Selon l'Institut de hautes études en administration publique, les partis politiques genevois ont dépensé en 2005, lors de la dernière campagne électorale, en moyenne plus de 600 000 F chacun ! Ce qui place le canton de Genève en première position des cantons où les dépenses de campagne sont les plus chères par électeur. Cela correspond à 13 F par électrice ou électeur ! On comprend aisément que la recherche de fonds complémentaires est une nécessité pour les partis politiques !

Mesdames et Messieurs, le plus parfait des systèmes politiques peut engendrer ses propres dysfonctionnements, parmi lesquels le bradage des idées au profit de la course à l'espace publicitaire. Nous ne considérons pas que la liberté d'expression, la liberté d'information se résument au nombre d'affiches format mondial, tout couleur, papier glacé, encarts publicitaires et spots radiotélévisés, bref, à une simple question de marketing politique ! Une campagne électorale a surtout besoin de débats de qualité, de l'échange de projets et d'idées !

Il est difficile, Mesdames et Messieurs, d'imaginer que le bien public puisse passer par des limitations à l'expression et à la consommation publicitaire des partis politiques, mais les citoyens sont en droit d'attendre de leurs partis politiques et de leurs élus certaines exigences de responsabilité, de courage, de clarté et de transparence ! C'est pourquoi je vous demande de suivre la majorité de la commission des droits politiques et de voter ce projet de loi.

Mme Fabienne Gautier (L), rapporteuse de minorité. Le projet de loi 10000, tel que déposé il y a déjà plus de deux ans, voulait à l'origine assurer la transparence tout en protégeant les partis politiques du contrôle de l'Etat. Mais, tout au long des travaux de la commission, ce projet de loi a été complètement dénaturé, d'où le retrait de la majorité des signataires de ce projet, y compris du parti démocrate-chrétien. Finalement, Monsieur Garcia, ce projet de loi n'est qu'un projet du MCG !

Le projet de loi 10000, tel qu'on peut le lire aujourd'hui, introduit le contrôle de l'ICF de manière non coordonnée. Dans une démocratie, il est évident que le contrôle des partis politiques ne peut pas fonctionner ! Il me plaît également de noter que la majorité de la commission a chassé le contrôle de l'ICF de l'article 29A... En revanche, on le retrouve à l'article 29B, on ne sait pas par quel miracle ! L'ICF est en effet chargée de vérifier les comptes de campagne.

Ce projet de loi introduit la limitation des frais de campagne mais, en même temps, il prévoit tellement d'exceptions que cela devient grosso modo une limitation de frais d'affichage ! La définition des frais de campagne entraînera de facto toutes les difficultés que l'on peut imaginer.

Par contre, l'on note que les publications régulières des partis, associations ou groupements ne seront pas comptabilisées, quel que soit leur volume. Autrement dit, on pourra diffuser douze «tout-ménage» - je prendrai «Le Nouveau Libéral» comme exemple - pendant une campagne électorale sans que cela soit comptabilisé dans les frais de campagne. De la même manière, les associations patronales et, pour d'autres camps, les syndicats pourront arroser la population sans que cela soit comptabilisé dans lesdits frais de campagne. En conclusion, cette loi sert uniquement à limiter les frais d'annonce dans la presse et les affichages sur les bus.

Je relève encore que la Confédération est en train d'introduire la déductibilité des dons en faveur des partis politiques, car elle estime que lesdits partis sont d'intérêt public.

Je soulignerai également que, pour les libéraux, ce projet de loi n'a aucune légitimité dans la situation économique dans laquelle nous nous trouvons, contrairement à ce que vous pouvez penser, Monsieur Garcia ! Nous sommes aujourd'hui dans une situation économique difficile, et nous estimons que l'Etat a actuellement d'autres priorités que d'augmenter les subventions des partis politiques, à savoir notamment apporter son soutien à l'économie et au social, ce qui est plus utile ! C'est pour toutes ces raisons que les libéraux ont retiré leur signature du projet de loi: ils ne le trouvent plus adéquat, et ils le refuseront !

M. Roger Golay (MCG). Nous aurions très bien pu intituler le PL 10000 «le projet de loi Castorama» car, en matière de bricolage, on ne pouvait pas faire mieux !

Il faut savoir que ce projet de loi visait un financement des partis politiques pour améliorer le rôle civique du canton, puisque ce sont les partis politiques - vous le savez tous - qui financent les référendums, les pétitions, les initiatives, etc., et que cela a un coût ! Et la plupart des partis politiques, surtout les derniers nés, les petits partis, n'ont pas toujours les moyens de régater avec les partis de la droite économique. Ce projet de loi avait donc un but louable, car il défendait l'égalité de traitement entre les partis.

Je vous rappelle que ce projet de loi a été proposé par toute la droite, le MCG y compris, et il me semble intéressant de relever quels étaient les signataires de ce projet... On trouve Hugues Hiltpold, Pierre Kunz, Michèle Ducret, Marie-Françoise de Tassigny, Olivier Jornot, Guy Mettan, Gabriel Barrillier, Pascal Pétroz, Jean-Michel Gros, Roger Golay, Henry Rappaz, Anne-Marie von Arx-Vernon, Thierry Cerutti, Véronique Schmied, Pierre Weiss, Michel Forni et Eric Leyvraz, notre président. Par conséquent, tous les partis de droite ont proposé un financement des partis politiques !

Par la suite, la gauche n'a pas voulu entrer en matière en raison d'un manque de transparence du financement public aux partis politiques - ce qui est louable... Un large consensus entre les socialistes, le PDC, le MCG et les Verts ayant été trouvé, ce projet de loi a ensuite été accepté, malgré le refus de la droite économique - les libéraux et les radicaux - qui s'est retirée dès qu'il a été question de transparence... Et si la droite s'est retirée, ce n'est pas en raison de la situation économique du canton, c'est uniquement parce qu'elle ne voulait ni transparence ni plafond de dépenses pour les campagnes électorales, à savoir 300 000 F pour une campagne de type cantonal et 60 000 F pour une campagne de type municipal. C'est pour ce motif qu'elle s'est désolidarisée de ce projet !

Ce projet de loi est aussi intéressant à un autre titre... Tout à l'heure, j'ai cité le nom de M. Weiss, président de la commission des finances, qui nous a fait un véritable réquisitoire sur les comptes de l'Etat, en particulier sur le département des institutions, dont les comptes étaient opaques et devaient donc être rejetés. D'ailleurs, il ne les a pas approuvés, en raison d'un manque de transparence selon lui. Mais, curieusement, ce même M. Weiss se retire de ce projet de loi parce que l'on demande plus de transparence en matière de financement des partis politiques ! Tous les rats ont donc quitté le navire, à l'exception du MCG ! Nous pouvons tout de même nous poser des questions quant aux positions du président de la commission des finances sur ce point. A mon avis, M. Weiss n'est pas si blanc que cela ! (Rires.)

Par conséquent, nous soutiendrons ce projet de loi, qui vise une égalité de traitement pour tous les partis politiques. Comme je l'ai dit au début de mon intervention, il a un rôle civique, et je pense que si l'on veut continuer à avoir une politique démocratique dans ce canton, il est nécessaire que les partis politiques puissent obtenir quelques fonds de l'Etat pour continuer leur mission.

M. Fabiano Forte (PDC). Monsieur le rapporteur de majorité, je vous remercie de mettre à l'honneur le groupe démocrate-chrétien de si bon matin ! Mais permettez-moi de vous faire connaître quelques éléments de réflexion de notre groupe.

Vous avez parlé, Monsieur le rapporteur de majorité, de pratiques... Je voudrais bien connaître lesquelles ! Vous avez parlé d'opacité... Je voudrais bien savoir comment c'est possible, dès lors que la loi impose aux partis politiques de remettre au service des votations et élections l'ensemble de leurs comptes et la liste nominative de leurs donateurs !

Vous avez également parlé tout à l'heure, Monsieur le rapporteur de majorité, de la suppression des dons anonymes... Mais la loi nous interdit d'ores et déjà les dons anonymes, puisque nous devons fournir la liste nominative des donateurs ! Si vous voulez supprimer les dons anonymes, il faudra que vous proposiez également de le faire pour les associations syndicales, par exemple l'ASLOCA, dans la mesure où, vous le savez, vous pouvez vous rendre à un guichet de la poste pour faire un don anonyme à des associations caritatives ou syndicales. Il y a là une égalité de traitement, et si vous voulez être cohérent, il faudra donc aussi supprimer cette possibilité.

Vous avez parlé d'explosion des dépenses... Mais, cher collègue, il faut intégrer le coût de la vie dans ce constat ! Il est normal que les dépenses électorales augmentent, parce que les entreprises qui travaillent pour les partis politiques - les imprimeurs, les agences de communication - adaptent leurs prix au coût de la vie. Il ne faut pas oublier cet élément ! Quant à votre moyenne de 600 000 F - je me permets de vous le dire - je serais heureux que le parti démocrate-chrétien genevois puisse avoir un tel budget pour battre campagne aux mois d'octobre et novembre !

Tout cela pour dire que nous allons proposer à ce parlement de renvoyer ce projet en commission pour retravailler cette loi et aboutir à un consensus de l'ensemble du parlement. En effet, notre collègue Roger Golay a parlé de Castorama, et il est vrai que cette loi a été faite de bric et de broc.

Pour le moment, Monsieur le rapporteur de majorité, je dois vous dire que le groupe démocrate-chrétien préfère baisser la fiscalité des familles plutôt que de favoriser les partis politiques, dans une situation économique particulièrement dure pour les PME de ce canton et pour les chefs d'entreprise, qui connaissent tous les mois - le 25 du mois - le syndrome du paiement des salaires, dans une période où l'argent a de la peine à rentrer dans les caisses des entreprises. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, nous sommes saisis d'une demande de renvoi de ce projet à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil. Peuvent prendre la parole les rapporteurs - durant trois minutes - et le Conseil d'Etat. Monsieur Garcia, je vous laisse la parole.

M. Pablo Garcia (S), rapporteur de majorité. Comme je l'ai dit dans mon introduction, ce n'est pas la première fois que ce projet passe devant notre parlement. Cela fait douze ans - trois législatures - qu'il est soumis sporadiquement à notre Conseil, et il me semble qu'il faudrait que nous arrivions à trouver une solution ce soir. J'ai encore espoir - un mince espoir - d'y arriver. Peut-être les débats vont-ils permettre aux différents groupes qui vont se positionner maintenant de changer d'avis...

Je pense donc que ce n'est pas une bonne idée de renvoyer ce projet en commission. Il est temps d'avoir un vote décisif sur cette question.

Mme Fabienne Gautier (L), rapporteuse de minorité. Monsieur le président, je ne soutiendrai pas le renvoi de ce projet de loi en commission, pour la simple et bonne raison qu'il y a déjà été renvoyé une fois ! Le rapporteur de majorité dit que cela fait une douzaine d'années que nous traitons ce sujet... Je n'irai pas si loin: je parlerai uniquement du projet de loi 10000 ! Je salue les propos tenus par M. le député Forte, mais je ne vois pas la nécessité de renvoyer cet objet en commission, car je ne sais vraiment pas ce que nous pourrions retravailler dans ce projet de loi, d'autant qu'il a déjà été tellement dénaturé.

C'est pour cela que nous ne soutiendrons pas le renvoi de ce projet de loi en commission.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole n'étant pas demandée par le Conseil d'Etat, je vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, de vous prononcer sur cette demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10000 à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil est rejeté par 58 non contre 8 oui et 2 abstentions.

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Je déplore aussi la position du PDC qui a tergiversé à moult reprises... Finalement, il a soutenu ce projet, ce qui a permis de faire un rapport de majorité et d'avoir un projet cohérent, mais il avait refusé, à l'époque, qu'on en débatte en urgence. Et, maintenant, il utilise des manoeuvres dilatoires pour renvoyer encore une fois ce projet en commission. Je trouve que le PDC manque un peu de colonne vertébrale, dans ce débat en tout cas !

Je vous rappelle quand même que nous avons déjà discuté de ce projet il y a une dizaine d'années et, à l'époque, certains radicaux et PDC avaient plus de courage ! Je me permettrai de citer les paroles de M. Bernard Lescaze, notre ancien collègue - qui jouit d'une certaine autorité dans plusieurs domaines - lequel disait ceci: «Il est vrai qu'aujourd'hui les partis politiques, en raison, peut-être, de la plus grande difficulté à recevoir certains dons - déjà à l'époque ! - sont plus favorables non seulement à cette transparence, mais également au plafonnement des dépenses. A titre personnel, je regrette d'ailleurs que ce projet n'ait pas prévu d'ores et déjà la possibilité d'introduire un plafond...»

Donc, en 1999 déjà, on parlait de plafonner les dépenses de campagne des partis politiques, mais nous avons tergiversé pendant dix ans. Finalement, ce projet, malgré ses quelques défauts, a au moins le mérite de présenter trois conditions qui sont liées: l'interdiction des dons anonymes, la transparence et le plafonnement des frais de campagne, ce qui, à mon avis, devrait être une condition pour le financement des partis politiques. En effet, certains voudraient le beurre et l'argent du beurre - d'autant que les banques ne répondent plus forcément présent pour financer certains partis de droite, dont peut-être le parti libéral - et ils recherchent auprès de l'Etat des financements pour les campagnes électorales, mais sans contrepartie.

Nous, socialistes, pensons qu'il faut avoir une véritable cohérence et un minimum d'égalité de traitement entre les partis, et que les campagnes électorales ne se résument pas à un simple marketing politique, à coups de campagnes publicitaires. Enfin, il faut offrir à l'électeur un vrai débat politique. Ce serait le gage d'une bonne démocratie et d'un meilleur fonctionnement des institutions.

Pour l'ensemble de ces raisons, les socialistes vous recommandent d'accepter l'entrée en matière de ce projet de loi et de soutenir les propositions qui ont été faites. Depuis dix ans, nous n'arrivons à aucun résultat, alors, s'il vous plaît, essayons d'avoir un peu de courage et de cohérence !

Mme Catherine Baud (Ve). Comme c'est curieux, toutes ces volte-face depuis plusieurs années ! Curieuse aussi la position des PDC, qui étaient d'accord de soutenir la transparence, de soutenir le financement, et qui ont changé d'avis ensuite ! Maintenant, ils demandent le renvoi en commission de ce projet ! Bref, on ne sait vraiment plus où on en est !

Les Verts sont cohérents: ils ont toujours été favorables à un financement clair des partis, et pour la transparence ! D'ailleurs, je vous rappelle que le titre de ce projet de loi est le suivant: «Transparence et financement des partis politiques». Le mot «transparence» est en premier mais, maintenant, la transparence, vous n'en voulez plus ! Alors vous pouvez donner toutes sortes de raisons, dire qu'il est actuellement difficile de procéder à de tels financements dans un contexte de crise, que l'Etat a d'autres priorités... Que, bien sûr, la transparence, ce serait bien, mais que, tout de même, c'est compliqué à mettre en place... Finalement on fait un pas en avant et deux pas en arrière: c'est vraiment affligeant !

Quant à nous, les Verts, nous restons fidèles à ce que nous disons depuis toujours et sommes cohérents: nous affirmons que le financement des partis va de pair avec la transparence et vice versa, tout simplement ! Je tiens d'ailleurs à préciser à ce titre que nous avons, au sein du parti des Verts, des comptes tout à fait clairs, que nous les ouvrons de manière publique et que cela ne nous pose absolument aucun problème. Je ne vois donc vraiment pas pourquoi les autres partis ne pourraient pas en faire autant ! Ce n'est vraiment pas compliqué: si on n'a rien à cacher, les choses sont tout à fait simples !

En conséquence, nous soutiendrons bien entendu ce projet de loi tel qu'il a été voté lors des travaux de la commission, sans aucune modification, et nous espérons fortement que le vote d'entrée en matière sera positif. (Applaudissements.)

Mme Michèle Ducret (R). J'ai fait partie des signataires de ce projet de loi, comme l'a rappelé opportunément un préopinant. Je trouvais que c'était un excellent projet de loi, convaincue que la démocratie passe par le financement des partis politiques. A mon avis, il faut soutenir la pluralité politique: c'est une institution dans notre pays, mais ce n'est pas le cas dans d'autres pays du monde. J'avais souligné cela dans mon rapport de minorité, lors du premier retour de ce projet en séance plénière. Malheureusement, ce qui est ressorti des travaux de la commission la deuxième fois n'était pas le beau bébé que nous vous avions envoyé, mais une sorte de petit Frankenstein... (Rires.) ...que nous ne reconnaissons plus du tout ! Nous ne pouvons évidemment pas élever ce petit Frankenstein: c'est impossible ! D'ailleurs, il est destiné à disparaître en raison des modifications qui lui ont été apportées. Il ne tient pas debout, et nous ne pouvons pas le soutenir !

Mesdames et Messieurs, vous l'aurez compris: nous allons refuser ce projet de loi tel qu'il est ressorti du deuxième tour des travaux de la commission.

M. Philippe Guénat (UDC). Mes collègues de l'UDC et moi voulions vous féliciter, Monsieur le président, pour votre teint... Nous sommes heureux de voir que vous avez passé d'excellentes vacances !

Soyons plus sérieux ! Après avoir, avec plusieurs autres partis, fait un effort particulier pour contrôler les subventions, après avoir essayé de réduire le train de vie de notre Etat, demandé et obtenu des réductions fiscales, L'UDC a aussi combattu une certaine idée de «fonctionnariat mammouth». Toutes ces propositions, l'UDC les a pleinement soutenues avec ses collègues, mais voilà que le parti démocrate-chrétien s'allie une fois de plus avec la gauche et le MCG: il arrive la bouche en coeur et demande de faire des partis politiques des salariés de l'Etat en voulant qu'ils soient complètement financés ! Non, nous ne voulons pas devenir des fonctionnaires d'Etat ! Voilà pourquoi les partis de droite ne veulent pas d'un financement des partis politiques !

Comment voulez-vous pouvoir être objectif envers un Etat qui vous paie ? Pour l'UDC, un parti politique est un parti qui a le soutien du peuple et qui en est le reflet. Un parti politique ne peut donc exister que si sa base est tangible. C'est pourquoi le soutien financier d'un parti politique doit venir de sa base, des cotisations et de certains dons que feraient des personnes qui se sentent complètement en phase avec les idées de ce parti.

Il est normal de voir les partis de gauche et le MCG mendier à toutes les portes pour recevoir des subventions... Ce sont des spécialistes ! (Commentaires.) Mais il est regrettable qu'un parti comme le PDC, qui a régné sur la politique genevoise des années durant - et sans partage... (Rires.) - se trouve aujourd'hui si décalé par rapport à son propre électorat que ce dernier ne se retrouve plus dans son parti girouette et l'abandonne ! Je vous rappelle que le PDC, par le biais de Mme Leuthard, vient de proposer, afin de plaire aux banques qui lui avaient coupé les vivres, que la Confédération alloue un budget de 2 millions de francs suisses pour faire de la promotion des banques suisses aux Etats-Unis... On croit rêver !

Par conséquent, Monsieur le président, le groupe UDC s'oppose à tout financement des partis politiques par l'argent de l'Etat ! L'argent de l'Etat représente l'argent de nos impôts: il doit être utilisé pour diminuer notre dette fiscale, il doit être utilisé dans des projets sociaux, mais il ne doit pas servir à financer des politiciens ! Ainsi, l'UDC est défavorable à tout professionnalisme de la fonction de député, comme le souhaiteraient la gauche, le MCG et le PDC: nous sommes des miliciens, et miliciens nous resterons !

M. Olivier Jornot (L). Permettez-moi de revenir à quelques principes qui guident - ou qui devraient guider, selon moi et selon les libéraux - la conduite à adopter en matière de rapports entre l'Etat et les partis politiques.

Le premier de ces principes est dicté par la Constitution fédérale en son article 34, qui garantit le libre exercice des droits politiques. Cette disposition constitutionnelle, Mesdames et Messieurs, est d'une importance cardinale, parce qu'elle signifie que l'Etat ne peut pas réglementer comme il l'entend, en faisant tout et n'importe quoi, la façon dont les partis politiques et les citoyens peuvent intervenir dans le débat politique. Cette disposition constitutionnelle a généré une jurisprudence très abondante du Tribunal fédéral, qui n'a jusqu'à présent jamais - je dis bien jamais - accepté qu'un canton puisse limiter les frais de campagne électorale.

Le deuxième principe, Mesdames et Messieurs, est cher aux libéraux: il consiste à dire que, pour que la démocratie fonctionne, il faut que les partis politiques soient totalement indépendants et ne soient pas des succursales de l'Etat. Nous sommes dans notre rôle de parlementaires, les militants des partis sont dans leur rôle de militants, des agents de la volonté populaire et, en aucun cas, des représentants de l'Etat ! Cela signifie que l'Etat doit être extrêmement précautionneux lorsqu'il cherche à codifier l'activité des partis, à la contrôler ou, comme c'est le cas ici, à empêcher ces derniers de travailler et de faire ce qui est leur raison d'être, à savoir faire campagne.

Ce sont les deux principes qui, selon nous, doivent guider notre appréciation d'un projet de loi tel que celui qui nous est soumis aujourd'hui.

Comme vous le savez, nous étions parmi les signataires, et non seulement parmi les signataires, mais parmi les rédacteurs de ce projet de loi dans sa version initiale. En effet, nous étions d'accord de donner un coup de pouce pour le financement des partis politiques en échange d'un rétablissement d'une véritable indépendance de ces partis vis-à-vis de l'Etat. C'est la raison pour laquelle le projet de loi initial, tout en maintenant l'obligation pour les partis politiques de donner la liste des donateurs, confiait le contrôle de leurs comptes et de leurs listes non pas à l'Inspection cantonale des finances, mais à des réviseurs indépendants. C'est pour cela que nous estimions que ce projet de loi apportait une véritable amélioration à la situation actuelle.

Malheureusement, la commission l'a complètement dénaturé en créant une situation kafkaïenne... A ce propos, peut-être vous souvenez-vous de ce que les pays voisins ont vécu lorsqu'ils ont introduit des règles limitant les frais de campagne: ils ont eu des débats absolument byzantins pour savoir si telle ou telle activité, si telle ou telle dépense devait être incluse dans les frais de campagne plafonnés.

Deux possibilités s'offrent: soit on est totalement exhaustif et, dans ce cas-là, il faut mettre en place une armée de fonctionnaires pour contrôler les dépenses et déterminer la manière de les comptabiliser. Par exemple, comment faut-il comptabiliser dans les comptes de campagne le fait que votre nom est mentionné dans le journal d'un syndicat ou d'une organisation tierce ? Soit on choisit une vision plus «libérale» - et je mets toutes sortes de guillemets autour de ce mot - et, dans ce cas, c'est la solution choisie par la commission qui s'applique, c'est-à-dire que les frais de campagne sont limités mais que, comme certains de ces frais ne peuvent pas être contrôlés, l'on peut faire ce que l'on veut. Inutile de dire que cela n'a plus ni queue ni tête !

En définitive, Mesdames et Messieurs les députés, le projet de loi tel qu'il est sorti des travaux de la commission est mauvais sur le fond et sur la forme. Il est mauvais sur le fond parce qu'il limite la démocratie en empêchant les partis de faire leur travail de conviction et parce qu'il réintroduit le contrôle de l'Etat sur les partis politiques par le biais de l'intervention de l'Inspection cantonale des finances. Et il est mauvais sur la forme parce que - ma collègue Michèle Ducret l'a dit avec beaucoup de justesse - il est le produit de l'activité du Dr Frankenstein... En effet, on l'a rapiécé en ajoutant des amendements d'un projet de loi précédent sans remarquer certaines incohérences flagrantes, comme le fait de confier à deux organismes différents le soin de contrôler, d'un côté, la comptabilité des partis et, de l'autre, le niveau de leurs frais de campagne.

Il faut donc, Mesdames et Messieurs les députés, que notre parlement torde le cou à ce projet de loi ! Et je vous indique d'ores et déjà que, s'il devait être adopté, je serais le premier à aller récolter des signatures dans la rue pour le référendum ! (Rires. Exclamations. Applaudissements.)

M. Pierre Weiss (L). M. Golay, la mine gourmande, citait mon nom, comme il aime d'ailleurs à le faire dans la petite publication qui lui sert d'instrument de campagne - je veux parler du journal de son syndicat - et je l'en remercie. A l'aube des élections, faire de la publicité à un député libéral est toujours une bonne chose, même quand cela vient de M. Golay ! (Commentaires.)

J'aimerais simplement rappeler ici qu'il y a, en matière de transparence, de grandes différences entre l'argent public et l'argent dépensé par le secteur privé pour le secteur privé. Nous sommes redevables de l'argent public, ou plus exactement de l'argent dépensé par le public et venant du secteur privé - y compris l'argent dépensé par le secteur public en faveur de la police et de ses heures supplémentaires, Monsieur Golay, dont la clarté est évidente à tous ! Qui demande la transparence des comptes du WWF, par exemple ? Qui demande la transparence des comptes de telle autre organisation associative ? Qui demande une transparence totale sur la provenance de l'argent du parti socialiste ? Ce dernier pourrait-il nous jurer, la main sur le coeur, que jamais - au grand jamais ! - une banque ne lui a versé quelques picaillons, comme dirait mon collègue Gautier ? Je n'en suis pas certain !

Mesdames et Messieurs les députés, sachons distinguer argent public et argent privé, et osons dire à M. Golay qu'il n'est que le Dracula de l'argent des contribuables ! Le Dracula de la Transylvanie subcarpatique doit être affamé: on ne doit plus lui donner de sang !

M. Alain Charbonnier (S). Effectivement, ce projet de loi fait suite à de nombreux autres projets de lois qui ont été déposés à la fin des années 90, je crois. Puis, au début des années 2000, un projet de loi concocté par l'Alternative, le PDC et les radicaux englobait pour la première fois les trois volets: plus de transparence, la limitation des frais de dépenses électorales et le financement des partis politiques.

Et quel parti a voulu à l'époque ajouter le financement des partis politiques - qui n'avait pas été demandé jusque-là ? C'est le parti radical, Mesdames et Messieurs les députés ! C'est bien le parti radical qui a insisté - au sein du groupe qui travaillait sur ce projet de loi - en expliquant que si la transparence était plus grande, si les frais de campagne électorale étaient limités, il fallait que le financement des partis soit clair et fixé dans la loi, ce qui n'est pas le cas actuellement. Les libéraux, les radicaux et le PDC disent maintenant que c'est une horreur, que l'Etat ne doit pas s'ingérer dans les partis politiques, que les partis politiques sont privés et qu'ils ne doivent pas être financés par l'Etat...

Mais, Mesdames et Messieurs les députés, comment les choses se passent-elles aujourd'hui ? Soyons honnêtes: la plupart de nos jetons de présence financent directement nos partis, dont certains, ici, ne fonctionnent que grâce à ces jetons ! Sans ces derniers, les partis politiques ne pourraient pas faire de propagande ! Alors, ayez le courage de reconnaître que nous sommes déjà financés, d'une façon directe, par les pouvoirs publics, par les contribuables, et cessez d'être hypocrites sur ce point, comme le sont les PDC et les radicaux ! En effet, depuis une dizaine d'années, ils présentent sans arrêt des projets de lois sur ce sujet mais, au dernier moment, ils retirent leur signature, pour les faire capoter. Et évidemment, la population croit qu'ils sont favorables à la transparence, à la limitation des dépenses électorales et à un financement des partis politiques clair et net, fixé dans la loi, équitable pour tout le monde. En réalité, les députés reçoivent des jetons de présence, qui font l'objet d'une cuisine interne aux partis, et les groupes politiques bénéficient tous d'indemnités, je le rappelle, ce qui est bien un financement. Soyez honnêtes: reconnaissez que, d'une certaine manière, vous trahissez la population lorsque vous prétendez être opposés au financement des partis, alors que vous touchez de l'argent public ! C'est de l'hypocrisie et une tromperie vis-à-vis de la population !

Pour ce qui est de la transparence, je comprends très bien que vous y soyez opposés. Vous jouez le même jeu que pour le financement: vous déposez un projet de loi qui demande plus de transparence mais, en fin de débat, comme aujourd'hui, vous vous opposez à ce même projet de loi ! Parce qu'il vous dérange, bien sûr ! M. Jornot s'insurge en disant qu'il est insupportable d'avoir deux organes de révision différents dans la même loi... J'en tombe des nues ! Combien de fois nous avez-vous expliqué qu'il fallait que les organes de révision privés puissent aussi avoir un oeil sur les comptes - de différentes associations, par exemple ! Et vous ne vous gênez pas pour corseter les associations, petites ou grandes - à travers la LIAF, par exemple, dont vous avez été les initiateurs du projet de loi - ce qui les oblige à faire des efforts énormes en termes financiers et en termes d'énergie pour pouvoir être, elles, transparentes. Et ce que vous exigez des autres, vous refusez bien sûr qu'on vous l'impose ou de vous l'imposer à vous-mêmes, car il vous est difficile - c'est évident - d'expliquer à la population les dons que vous recevez constamment de certains secteurs économiques de notre pays !

En ce qui concerne les frais liés aux campagnes électorales, cela vous pose un gros problème que l'on vienne mettre le nez dans vos affaires. Il est toujours difficile de chiffrer et cela pourrait poser problème de vérifier de façon très précise ce qui se passe en termes de frais de dépenses électorales mais, sur ce point aussi, soyons honnêtes: il est facile de voir quels sont les partis - tout le monde le sait ici - capables de mettre certaines sommes et quels sont ceux qui ne le peuvent pas.

A ce propos, lors des débats sur les frais de campagne électorale que nous avions eus au début des années 2000, nous avions fait venir des publicitaires à la commission. Et ceux-ci avaient reconnu que la somme engagée pour la publicité - même si le contenu reste très important, bien entendu - était les trois quarts du temps primordiale. Par conséquent, il est une fois de plus tout à fait hypocrite de déclarer qu'il serait trop compliqué d'exercer une surveillance dans ce domaine ! Si c'est cela, refusez ce projet de loi: la population prendra acte de votre position par rapport à la transparence, à la limitation des dépenses électorales, et au financement des partis politiques qui, je le rappelle, sont déjà financés par les pouvoirs publics, quoi que certains puissent dire et faire croire à la population !

M. Eric Stauffer (MCG). Ce projet de loi est extrêmement intéressant... En effet, il va démontrer à la population qui, au sein de cet hémicycle, défend véritablement la transparence et qui prône l'opacité et les magouilles !

Aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés, vous êtes face à vos responsabilités dans vos groupes respectifs ! Voulez-vous vraiment la transparence pour que la population puisse savoir qui finance vos partis et quels lobbies vous défendez ou voulez-vous continuer à prôner l'opacité ? Le vrai enjeu de ce projet de loi, c'est la transparence ! Nos collègues de l'UDC se sont faits les avocats du diable en expliquant qu'il fallait maintenir l'opacité... Je les comprends: en 2005, ils ont touché 400 000 F d'un certain M. Mizrahi, d'une société offshore du Moyen-Orient ! Cela explique la prise de position de l'UDC, pour le moins ambiguë, sur l'affaire libyenne ! C'est ainsi que les choses fonctionnent. Et je crois même - mais je n'ai pas toutes les garanties sur ce point, car je n'ai pas eu le temps de contacter la chancellerie avant de prendre la parole - que l'UDC a dû aller jusqu'au tribunal parce que l'ICF demandait la transparence des comptes et que l'UDC avait refusé de donner les noms de ses donateurs. Eh bien, que la chancellerie se rassure, il suffira de lire le Mémorial pour connaître le nom du donateur, puisqu'il a été divulgué ce jour !

Ensuite, le député Jornot vient nous expliquer qu'il faut défendre la transparence, mais qu'il ne faut pas faire tout et n'importe quoi: il convient que le pouvoir politique soit indépendant de l'Etat ou du Conseil d'Etat. Monsieur le député Jornot, «indépendance» ne veut pas dire «opacité et magouilles» ! Et, comme tout le monde le sait, la vérité ne se trouve pas dans les «Jornot» mais, cela, je l'avais déjà dit ! (Exclamations.)

Monsieur Weiss, vous traitez M. Golay de Dracula des Genevois... Vous n'êtes effectivement pas le Dracula des Genevois: pour moi, vous êtes le Benito des Genevois ! (Exclamations.) En effet, vous prônez un ultralibéralisme qui a montré ses limites et qui a démontré à quel point vous pouvez être hypocrite vis-à-vis des Genevois, en préconisant la libéralisation des sociétés, les salaires indécents, etc. J'en veux pour preuve l'affaire des Services industriels... (Exclamations.) ...où, avant Daniel Mouchet, qui gagnait 440 000 F pour un poste à 40%, c'était un libéral qui occupait cette fonction, mais cela, évidemment, la population genevoise ne le savait pas ! (Commentaires.)

Vous le voyez, Mesdames et Messieurs les libéraux, Mesdames et Messieurs du PDC, il faut de la transparence: il faut que la population sache comment les deniers de l'Etat sont utilisés, qui finance quoi et comment ! Cela me paraît tout à fait nécessaire !

Et je terminerai en reprenant les propos de l'un de mes collègues socialistes qui, s'adressant au PDC, disait que ce parti manquait de colonne vertébrale... C'est vrai ! Mais, pour avoir une colonne qui tienne, il faut un cerveau à son sommet, et ça, définitivement, ça manque au PDC !

M. Fabiano Forte (PDC). Ce matin, on parle beaucoup de transparence dans ce parlement... Au point qu'on a l'impression que cette transparence n'existe pas. Eh bien, j'aimerais inviter les différents collègues qui se sont exprimés sur ce sujet à relire l'article 29A de la loi sur l'exercice des droits politiques; il est intitulé: «Transparence» ! Vous trompez le peuple en disant que la transparence n'existe pas, elle est déjà prévue par notre législation !

Le parti démocrate-chrétien, à l'instar des Verts, présente chaque année son bilan, son compte de pertes et profits et sa liste de donateurs nominative. Il est prévu par la loi que chaque citoyen de ce canton peut se rendre au service des votations et élections pour consulter l'ensemble des comptes des partis politiques... Je vous invite donc à le faire, et cessez de nous chanter une fausse messe: la transparence existe ! Vous trompez le peuple ! (Commentaires.)

En ce qui concerne la colonne vertébrale du parti démocrate-chrétien, je tiens à rassurer mes collègues: elle se porte très bien ! A un moment donné, il faut faire preuve de raison... Tout à l'heure, en entendant mon collègue de l'UDC - qui s'est d'ailleurs absenté - j'ai pensé à une chanson de Léo Ferré, un artiste que j'aime beaucoup, intitulée: «Ni dieu ni maître»; en effet, il ne veut entendre parler de personne ! Mais il y a une différence entre Léo Ferré et mon collègue, c'est que l'on connaît très bien son dieu, son maître et son financier !

En conclusion, Monsieur le président, nous refuserons cette loi.

M. Roger Deneys (S). Je dois dire que j'ai été particulièrement choqué tout à l'heure en entendant les propos de M. Guénat... Prétendre qu'octroyer un financement public aux partis politiques transformerait les élus en fonctionnaires étatiques est particulièrement malhonnête ! Il est bien clair qu'un élu est d'abord responsable devant ses électeurs et son parti. A partir du moment où la collectivité publique ne lui impose pas de cahier des charges, il ne sera pas un fonctionnaire de l'Etat: il n'aura donc jamais de comptes à rendre à l'Etat ! Et ce serait - en tout cas par rapport à aujourd'hui - une situation bien plus saine et bien plus claire.

En effet, en réalité nous avons déjà des fonctionnaires politiques dans ce Grand Conseil ! Il y a bien entendu M. Weiss, mais il n'est pas le seul ! Il faut savoir que certains députés sont des lobbyistes à plein temps de l'économie, des banques ou des assurances-maladie, que ce soit dans ce Grand Conseil ou aux Chambres fédérales. C'est très clair - on l'a bien vu avec l'affaire de l'UBS - des partis comme les démocrates-chrétiens ou les radicaux sont alignés couverts devant les positions de l'UBS simplement parce que leur financement dépend de cette banque ! Et c'est la même chose avec les assurances-maladie: tous les partis de droite ont des représentants dans les conseils d'administration des assurances-maladie, et quand il faut réformer les coûts de la santé, c'est tout simplement impossible, et ce sont les citoyens de ce pays qui paient ! Voilà, la réalité ! Les partis politiques de droite sont pieds et poings liés: ils ne sont pas libres de prendre position dans un sens ou dans un autre, car ils sont aux ordres de certains lobbies économiques. Mesdames et Messieurs, même pour la liberté de pensée des partis de droite, il serait nettement plus sain de leur garantir un financement équitable, transparent et public ! Ce serait sain pour vos idées; ce serait sain pour la démocratie !

Mesdames et Messieurs les députés, l'indépendance des partis politiques n'est pas liée à l'Etat, mais à la source de leur financement, et comme l'Etat représente tout le monde, tout le monde y contribue. Le fait que tous les partis puissent exister est sain pour notre démocratie.

Par conséquent, Mesdames et Messieurs, je vous invite à entrer en matière sur ce projet de loi qui, du reste, a aussi été déposé - et, d'ailleurs, j'en suis assez surpris - par les PDC, qui n'ont pas l'air de reconnaître leur enfant ! (Applaudissements.)

M. Roger Golay (MCG). J'ai trouvé les propos de notre collègue de l'UDC, M. Guénat, très intéressants... Il a en effet déclaré, je cite: «Nous ne voulons pas devenir des fonctionnaires d'Etat !» Je suis tout de même surpris par ces paroles, car nous savons bien que chaque parti politique représenté au Grand Conseil - et cela, depuis la nuit des temps - touche chaque année des indemnités - M. Charbonnier l'a évoqué - en fonction du nombre de députés. Il s'agit d'une somme quasiment identique par groupe politique, sans parler des jetons de présence, bien sûr.

Dès lors que M. Guénat refuse d'être salarié de l'Etat, Monsieur le président - puisque c'est à vous que je dois m'adresser - l'UDC renonce-t-elle... Monsieur le président, si vous voulez bien me prêter attention: je m'adresse à vous, puisque c'est la règle dans ce parlement ! Je disais donc: l'UDC renonce-t-elle dorénavant à ses indemnités annuelles, comme le laisse supposer M. Guénat, ou est-ce une hypocrisie de plus de l'UDC ?

Mme Emilie Flamand (Ve). Je voulais revenir sur certains propos et corriger quelques inexactitudes. M. Weiss s'est exprimé sur le WWF et prétend que les associations n'ont aucun compte à rendre... Tout d'abord, le WWF, l'ATE, ainsi que les nombreuses autres associations environnementales ne sont pas subventionnés par l'Etat: ces associations vivent des cotisations de leurs membres. Et détrompez-vous, lorsque des associations participent à des campagnes de votation, elles doivent rendre des comptes ! En effet, toute association qui donne un mot d'ordre, une brochure, ou qui demande un emplacement d'affichage doit transmettre ses comptes de campagne au service des votations. Donc le contrôle existe, et il est même assez strict.

Ensuite, j'aimerais également répondre à M. Guénat, qui allègue que les partis de gauche viennent mendier... J'ai cru mal comprendre, mais je crois que nous avons tous entendu la même chose ! Ce projet de loi a pourtant été déposé par la droite, y compris par l'UDC ! Ce projet demandait un financement, et vous étiez tout à fait d'accord sur ce point ! C'est seulement lorsque nous avons commencé à parler de transparence et de plafonnement des dépenses que vous avez réagi et refusé ce projet de loi ! Comme l'a évoqué ma collègue Catherine Baud tout à l'heure, nous regrettons bien évidemment la volte-face du PDC, alors que ce sont les commissaires de ce parti eux-mêmes qui ont proposé les amendements ayant permis d'obtenir une majorité dans la commission.

Cela dit, nous constatons que le PDC n'en est pas à une contradiction près, puisqu'au niveau fédéral, c'est sur proposition d'Urs Schwaller, candidat au Conseil fédéral parmi tant d'autres, que le Bureau du Conseil national, y compris les libéraux-radicaux, a demandé que la Confédération augmente sa contribution aux partis de plus de 3 millions par an.

Mais les errements et les hésitations des autres partis ne doivent pas nous faire oublier notre point de vue. Nous sommes favorables au financement et à la transparence des partis politiques - au cours de la précédente législature, nous avions déjà déposé un projet de loi dans ce sens - qui doivent bien sûr aller de pair. Et nous pensons qu'avec la LIAF et les fortes contraintes que nous imposons à de nombreuses associations, la moindre des choses serait d'appliquer le même genre de contrôle à nous-mêmes, c'est-à-dire aux partis politiques ! Je vous encourage donc à voter ce projet de loi. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. C'est au tour des rapporteurs de s'exprimer... Vous préférez prendre la parole à la fin ? Très bien ! Monsieur Jeanneret, c'est à vous.

M. Claude Jeanneret (MCG). Cette loi, comme toute loi, peut avoir des qualités ou des défauts. Mais sa qualité première, c'est de vouloir la transparence, ce qui permet de connaître l'origine du financement des partis.

Il semble que le débat a un peu dévié... Actuellement, le PPP - partenariat public-privé - est très à la mode. Eh bien, je pense que les partis politiques peuvent donner un très bon exemple de ce que cela représente ! Nous avons une fonction publique et une fonction de représentation du peuple qui est utile: nous effectuons un travail, et il est normal qu'il soit rétribué. L'Etat contribue à notre organisation, nous en avons la preuve: le service du Grand Conseil est tout de même financé par les impôts ! Chaque parti - comme l'ont dit très justement mes collègues - reçoit une indemnité, et personne, jusqu'à présent, ne s'en est offusqué ! Alors il n'y a rien d'extravagant à demander que l'on change quelque peu le jeu, que la transparence soit obligatoire concernant l'origine des fonds - pas la présentation des bilans, ce n'est pas la même chose - et que l'Etat finance davantage les partis. De toute façon, ce financement est utile, puisque les partis sont utiles à la vie de notre république ! A mon avis, c'est donc la transparence qui gêne certains partis...

Juste pour la petite histoire, je trouve quand même bizarre que notre collègue M. Weiss parle de transparence à tout-va, demande qu'il y en ait à gauche et à droite mais que, lorsqu'il s'agit de sa rémunération à l'université, il n'en est plus question du tout ! En effet, il demande des augmentations de budget, dans une opacité totale, alors qu'il s'occupe de l'université dans le cadre de commission pour le contrôle de budget. Pour ce monsieur, la transparence n'est donc importante que lorsque ça l'arrange !

Je vous en prie: cette loi est très bonne, et je crois qu'il faut l'approuver, raison pour laquelle je vous encourage vivement à la voter !

Le président. Merci, Monsieur le député. Le Bureau décide de clore la liste. Doivent encore prendre la parole: Mme Borgeaud, M. Catelain, M. Bertschy, M. Stauffer, les deux rapporteurs et le conseiller d'Etat. Madame Borgeaud, vous avez la parole.

Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Merci, Monsieur le président. On voit bien que nous sommes en période électorale... Il n'y a plus beaucoup d'arguments politiques, mais on entend des critiques ciblées, des gens qui citent des noms pour se faire bien voir ! Je vois que rien ne change, et je suis contente de ne bientôt plus participer à cette hypocrisie générale qui dure depuis quatre ans !

En ce qui concerne le projet de loi 10000, je ne vois pas en quoi la transparence en matière de financement des partis politiques peut déranger puisque, comme cela a déjà été dit, nos jetons de présence sont payés par les impôts. A ce propos, je suis vraiment dégoûtée de payer des impôts pour entendre les commentaires de certains députés !

Quoi qu'il en soit, le peuple a tout à fait le droit de savoir d'où vient l'argent des partis, à quelles fins il est utilisé et de quelle manière: cela fait partie de la démocratie !

En outre, je trouve assez lamentable - pour rester polie - de voir que bon nombre d'entre vous se retirent maintenant de ce projet de loi alors qu'ils l'avaient signé ! C'est trop facile ! Moi je constate les faits: au départ, vous étiez tous favorables à ce projet mais, après réflexion, j'imagine que vous préférez cacher certaines choses... Vous ne voulez plus que les financements soient rendus publics, et vous retirez votre signature... Peut-être aussi que certaines personnes qui vous sponsorisent à grands coups de billets de 1000 francs veulent rester dans l'anonymat ! C'est sans doute la raison pour laquelle la plupart d'entre vous ont retiré leur signature ! Nous savons très bien comment les choses se passent en politique, depuis la nuit des temps, et ce n'est certainement pas maintenant que cela va changer !

En ce qui me concerne, je voterai ce projet de loi, parce que je trouve qu'il est tout à fait normal que le contribuable sache pour qui il paie les impôts, pour quelle raison et de quelle manière ! A voir comment les choses se passent dans ce parlement, je suis navrée de le dire encore une fois: cela ne donne plus envie de payer des impôts pour financer vos jetons de présence !

M. Gilbert Catelain (UDC). Je vais essayer de ne pas être trop long... Je voudrais juste rectifier des propos qui ont été tenus au sein de cette assemblée. Le groupe UDC n'a jamais soutenu, en tant que tel, ce projet de loi ! (Remarque.) Même si, effectivement, notre président, seul, en tant que député libre - parce qu'il y a encore une certaine liberté de parole et de pensée dans notre parti, contrairement au MCG où les députés votent en bloc... (Rires.) - s'est laissé abuser par ce projet de loi qui lui paraissait séduisant, car tous les partis connaissent des problèmes de financement à un moment donné. Et ce n'est pas parce qu'une fois l'UDC a bénéficié d'un don très généreux que cela se reproduit chaque année ou à chaque législature: ce n'est pas le cas ! Quoi qu'il en soit, sur le fond, notre président a reconnu qu'il s'était laissé abuser par ce projet de loi quelque peu dangereux et, finalement, il ne le soutient plus. Il aurait peut-être dû demander le retrait de son nom...

Au niveau de la transparence, je dois dire que je suis heureux de la leçon que nous donne M. Stauffer ! Et je serais tout à fait favorable à ce que les députés présentent leurs propres états financiers et indiquent quels sont les revenus qui leur permettent d'acheter des Goldwin, des motos, des 4x4 ou de partir en vacances à la Jamaïque alors qu'ils sont aux poursuites... (Rires.) Je suis tout à fait pour !

M. Eric Stauffer. C'est une attaque personnelle !

M. Gilbert Catelain. Je suis favorable à ce que chaque député fasse preuve de transparence avant de demander aux autres députés - respectivement aux groupes - de le faire, d'autant qu'elle existe déjà ! En effet, comme cela a été dit, elle est dans la loi: chaque parti doit présenter ses comptes de campagne ! L'Etat a donc un regard sur les comptes des partis, et il n'y a pas de raison d'aller plus loin ! Le groupe UDC est pour l'indépendance, pour le respect de la sphère privée ! Finalement, M. Stauffer nous démontre clairement pourquoi il faut refuser ce projet de loi: c'est parce qu'il va l'utiliser pour mettre en pâture les noms des donateurs ! Ce qu'a fait M. Stauffer est totalement scandaleux ! De quel droit peut-on mettre en pâture les noms des donateurs, alors que donner de l'argent ou ne pas en donner est un acte purement privé ?! (Commentaires.) L'UDC est favorable au respect de la sphère privée: elle défend le secret bancaire; elle défend la place financière, car la place financière - et vous le savez très bien, Monsieur Stauffer - ne vivra que si l'on respecte la sphère privée !

Par ailleurs, on constate que le MCG souffre effectivement d'un grave déficit de financement... On peut comprendre que ses idées ne soient pas partagées par tous et que le parti connaisse des difficultés de financement, mais ce n'est pas une raison pour faire le procès des autres partis qui, eux, arrivent à obtenir - avec une certaine difficulté, il faut quand même le reconnaître - un financement. C'est malsain, et nous ne soutiendrons pas ce projet de loi pour ce motif.

Et puis, un amalgame a été fait entre les jetons de présence, qui servent à indemniser les députés qui font des sacrifices sur le plan professionnel, et le financement des partis... Ce sont deux questions totalement différentes: on ne peut pas les lier ! (Exclamations.) Du reste, celui qui veut refuser ses jetons de présence peut le faire. De toute façon, vous savez très bien, Monsieur Golay, que ce sont les partis qui décident de la répartition des jetons de présence entre le député et son groupe - respectivement son parti. De facto, le financement des partis existe déjà, et il n'y a pas de raison d'aller plus loin !

Le groupe UDC est donc favorable au statu quo, au maintien d'une subvention égale pour chaque parti telle qu'elle existe aujourd'hui. Et je ne vois pas très bien pourquoi M. Pablo Garcia militerait avec tant d'ardeur pour que l'Etat finance les affiches homophobes de l'UDC, par exemple ! Ou, demain, les affiches anti-frontaliers du MCG, qui sont prêtes à l'impression ! Cela poserait un problème à l'Etat et au citoyen contribuable de financer des programmes qui ne sont pas forcément éthiques ou qui pourraient heurter la moralité publique.

Finalement, nous sommes favorables au maintien de l'obligation de présenter les comptes de campagne telle qu'elle figure aujourd'hui dans la loi. On ne voit pas l'intérêt d'aller plus loin ! A partir du moment où un groupe connaît des difficultés de financement, il doit se remettre en question: il ne doit pas demander à l'Etat ce qu'il ne trouve pas ailleurs. En fin de compte, c'est la règle de l'effort qui doit s'appliquer pour assurer la survie d'un groupe politique: nous pensons qu'il vaut mieux faire l'effort de chercher un financement plutôt que de recevoir un financement sans faire d'effort !

M. Antoine Bertschy (UDC). Je vais essayer d'être bref... L'argent et la politique, Mesdames et Messieurs, on en parle dans tous les pays, et on en parle beaucoup ! Mais, si l'on regarde ailleurs, on constate que chez nous, pour finir, les choses ne se passent pas si mal que ça: il n'y a pas de grands scandales avec notre système... (L'orateur est interpellé par M. Deneys.) Non, Monsieur Deneys, il n'y a pas de scandales chez nous, contrairement à ce qui peut se passer en France, même à l'époque où il y avait un gouvernement socialiste au pouvoir ! (Remarque.) Même à l'époque où les socialistes étaient au pouvoir en France !

L'amalgame entre la modeste rétribution que nous touchons en tant que députés et le financement des partis n'est pas pertinent. Libre à chaque député, à chaque parti, de s'organiser comme il le veut avec les jetons de présence ! Quoi qu'il en soit, il est inexact de prétendre que c'est l'Etat, par le biais du système utilisé, qui finance les partis politiques. Non, Monsieur Charbonnier: ce sont les députés, avec le défraiement, qui reversent aux partis politiques une partie de leurs jetons de présence, ce qui est sensiblement différent ! Il n'y a pas de versement direct !

J'aimerais revenir sur les propos absolument inacceptables de M. Stauffer, qui estime que c'est une bonne chose de balancer... (L'orateur est interpellé par M. Stauffer.) ...à la vindicte populaire le nom d'un citoyen sans que celui-ci puisse se défendre ou répondre...

M. Eric Stauffer. Transparence !

M. Antoine Bertschy. Monsieur le président, je trouve ce mode de faire absolument scandaleux de la part de quelqu'un qui prétend défendre les Genevois... Non, il ne défend pas les Genevois: il balance leur nom à la vindicte populaire ! Mais c'est peu étonnant de sa part, lui qui nous rappelle à chaque intervention qu'il a fait une chose en quatre ans: baisser le salaire d'une personne ! Voilà le résultat qu'il a obtenu en quatre ans de Grand Conseil !

Pour en revenir au sujet qui nous occupe - et cela vous a été dit par Me Jornot - ce projet de loi est mauvais: c'est la raison pour laquelle l'UDC le refusera !

M. Eric Stauffer (MCG). Il m'appartient de répliquer, après cette intervention pour le moins désastreuse de l'UDC...

Monsieur Catelain, votre président... Excusez-moi, le président du Grand Conseil, premier citoyen genevois, membre de l'UDC - en tout cas aux dernières nouvelles - a signé ce projet de loi pour la transparence ! Toutefois, on a bien compris, Monsieur le député, que vous ne voulez pas de cette transparence, et pour cause ! En effet, ce donateur - M. Mizrahi, je l'ai déjà cité - a fait un petit don à l'UDC de 400 000 F - vous l'avez confirmé, et je vous en remercie - et l'on pourrait se demander d'où provient cet argent... J'ai indiqué qu'il provenait de quelques sociétés offshore pour le moins douteuses du Moyen-Orient et, d'ailleurs, l'ancien président de l'UDC était l'administrateur de ces dites sociétés offshore qui ont eu quelques démêlés avec la justice... Il faut simplement que les gens le sachent ! Ce n'est pas de la vindicte populaire: c'est de la transparence ! Mesdames et Messieurs les députés de l'UDC - excusez-moi, Messieurs, puisqu'il n'y a que des hommes - vous êtes des élus du peuple, et vous devez agir dans la transparence: point, terminé, à la ligne !

La chancellerie sera certainement très intéressée de savoir si ces 400 000 F sont bien rentrés dans les comptes de l'UDC - cela aussi, c'est public: c'est sur le site internet de l'Etat - car cette somme n'y figure pas ! Il serait donc tout à fait utile que vous puissiez vous justifier auprès de la population, mais aussi de votre électorat qui, on le sent, commence à fondre comme un glaçon au soleil, tant vous cumulez les bourdes les unes après les autres !

Mesdames et Messieurs les députés, je vous le répète: la transparence est une nécessité ! En tant qu'élus du peuple, nous avons le devoir et l'obligation de la pratiquer vis-à-vis de ceux qui nous ont portés au pouvoir.

Tous ceux qui s'opposeront à ce projet de loi, je l'espère, seront sanctionnés lors des élections du 11 octobre. Car, il faut le savoir, vous ne voulez pas la transparence: vous souhaitez maintenir l'anonymat des dons, pour que la population ne sache pas quels lobbies vous défendez ! Comme l'a dit très justement l'un de mes collègues - socialiste, me semble-t-il - tout est vérolé: il y a des administrateurs de caisses maladie qui siègent au parlement, qui sont payés grassement, et personne ne le sait ! (Exclamations.) Cela veut dire, en termes clairs, que la politique est viciée dès le départ ! Si les dépenses de campagne électorale pouvaient être plafonnées et les partis financés équitablement, eh bien ce serait le meilleur qui gagnerait et non celui qui a le plus d'argent !

C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, je demande le vote nominal pour ce projet de loi.

Le président. Etes-vous soutenu, Monsieur le député ? Oui, c'est le cas !

Mme Fabienne Gautier (L), rapporteuse de minorité. Je reprendrai tout d'abord les propos tenus par le rapporteur de majorité, M. Garcia, qui trouve que les partis politiques doivent réformer des pratiques et des façons de faire qui n'ont plus place dans notre Etat de droit... J'aimerais savoir ce que le rapporteur de majorité fait du respect de la démocratie en disant cela !

Par ailleurs, je rappellerai - M. le député Jornot en a parlé - l'article 34 de la Constitution fédérale, qui stipule ceci à l'alinéa 1, comme vous pouvez le lire dans mon rapport de minorité: «Les droits politiques sont garantis.» Mais où sont les droits politiques dans ce que vous proposez, Monsieur Garcia ? Puis, alinéa 2: «La garantie des droits politiques protège la libre formation de l'opinion des citoyens et des citoyennes et l'expression fidèle et sûre de leur volonté.» Il est donc bien évident que les droits politiques doivent inclure le droit de faire campagne ! Et ce n'est pas en limitant les frais de campagne que nous arriverons à garantir ce droit, le respect des droits politiques et l'information, dans l'intérêt des citoyens et des citoyennes !

Vous parlez également du contrôle des partis politiques qui doit s'exercer... Mais c'est bien ce qui se fait actuellement, puisque la loi en vigueur demande la transparence, que les bilans soient déposés ainsi que la liste des donateurs ! Donc la transparence existe bien, et cela a été rappelé par le député Forte.

Vous avez parlé des dépenses... Il m'amusera de noter au passage que vous avez oublié de dire que le parti qui dépense le plus actuellement pour ses frais de campagne - je parle des dernières campagnes - c'est le parti socialiste ! Il faut le savoir: c'est en effet le parti socialiste qui dépense le plus pour ses frais de campagne ! (Commentaires.) Nous disposons des statistiques, et cela a été relevé !

Monsieur le député Deneys, vous qui évoquez les lobbies économiques, vous oubliez de parler de toutes les personnes ici qui travaillent dans des associations complètement subventionnées par l'Etat ! Où sont les lobbies, Monsieur Deneys ? Je rigole en vous écoutant ! Je pense que les lobbies sont bien répartis tant du côté de la gauche que de la droite de ce parlement, mais n'oubliez pas de les citer !

Je n'ajouterai plus rien: je pense que tout a été dit... Je ne reviendrai donc pas sur d'autres propos qui ont été tenus dans ce parlement. Tout ce que je vous recommande, c'est de refuser ce projet de loi qui n'est plus adéquat !

Le président. Merci, Madame la rapporteuse de minorité. Monsieur Losio, la liste est close ! La parole est à M. Garcia.

M. Pablo Garcia (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Comme je l'ai souligné plusieurs fois lors de mon intervention, la question du financement des partis politiques, de la transparence de ce financement et de la limitation des frais de campagne est souvent revenue dans les débats du parlement, que ce soit sous la plume de la droite - on le voit avec ce projet de loi - ou sous la plume de la gauche lors des précédents projets de lois.

Cela démontre un intérêt clair et une préoccupation de l'ensemble des partis politiques. Pourtant, aucun de ces projets de lois n'a jamais abouti pour des questions de bataille partisane, d'opportunité et de circonstances politiques.

Aujourd'hui, notre législature touche à sa fin, et il me semble que le moment est venu de nous retourner un instant pour voir ce que nous avons accompli et quels ont été nos manquements. Malheureusement, ce projet de loi risque d'en faire les frais. En effet, si nous ne réagissons pas collectivement pour trouver une solution satisfaisante pour tous, nous n'avancerons pas dans nos débats en la matière.

Il est quand même étonnant de constater que nous n'arrivons pas à faire ce que nos voisins ont réussi à accomplir... Il faut rappeler qu'au Tessin les frais de campagne sont limités. Il faut aussi rappeler que plusieurs pays européens comme la France, la Belgique et la Grande-Bretagne ont fait le pas d'une plus grande moralisation du monde politique en limitant les frais de campagne. Leurs exigences démontrent que les dysfonctionnements existent, que tout système peut être évidemment amélioré et que certains us et coutumes ou traditions liés au financement des partis politiques créent aujourd'hui des problèmes et jettent souvent le discrédit sur le monde politique.

Mesdames et Messieurs les députés, les partis politiques dont nous sommes issus sont les mieux placés pour répondre efficacement aux dangereuses dérives, car nous sommes les rouages de cette machine, et il convient que nous intervenions. Malheureusement, je crains qu'aujourd'hui ce ne soit pas le jour pour cela...

La collectivité publique ne peut se résoudre à participer au financement des partis politiques - ce qui est le cas aujourd'hui, de façon indirecte - sans garde-fous, parmi lesquels se trouve la mise en place de mesures de transparence et de plafonnement des frais de campagne. L'un ne va pas sans l'autre ! On parlait de «bébé Frankenstein», mais si ces trois volets ne sont pas inclus dans un projet de loi, celui-ci est tout simplement boiteux et inefficace.

Monsieur Catelain, vous m'avez interpellé car vous ne comprenez pas pourquoi je militerais pour que l'UDC puisse coller des affiches, disons, «limites»... Je vous répondrai que j'ai envie que l'Etat participe au financement des partis politiques de manière neutre et impartiale, pour vous permettre de mener ce genre de campagne et de tenir ce genre de propos sur la place publique, parce que chacun en a le droit ! C'est l'indépendance qui doit être garantie par les deniers publics !

Aujourd'hui, que nous reste-t-il à espérer de ce parlement ? Je crois, hélas, que nous n'arriverons pas au bout de cette question... Elle reviendra très certainement ces prochaines années dans le débat - je peux vous le garantir - car je crois que le citoyen a le droit de savoir que ni le parlement, ni les élus, ni les partis politiques ne sont à vendre !

Voilà pourquoi je vous encourage à voter en faveur de ce projet de loi !

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. L'argent et la politique forment un couple maudit, particulièrement parce qu'il lui est impossible de divorcer... Et les règles que vous vous proposez d'adopter consistent précisément à tenter de moraliser ce couple maudit...

Dès lors qu'il a été dit - et à juste titre - que l'Etat devait être extrêmement prudent en termes d'intervention dans la vie des partis, le Conseil d'Etat observe une prudente réserve dans le traitement de ce projet de loi.

Mais le Conseil d'Etat entend tout de même vous rappeler un certain nombre de principes qui sont essentiels. Il faut que la vie politique soit transparente, notamment dans ce rapport maudit entre l'argent et les partis. Il faut aussi que le financement des partis politiques et des activités politiques soit modéré et décent. Vous vous souvenez probablement de la situation extraordinairement embarrassante pour M. Darbellay à propos des dons, des subventions de l'UBS. S'il y avait eu, à ce moment-là, un minimum de règles, on aurait évité ce psychodrame qui touche, par essence, tous les partis, car les citoyens ne font pas beaucoup de différences entre les politiciens, vous le savez. Pour eux, les politiciens sont tous des tricheurs...

Il faut aussi très certainement aider les partis. Pour quelle raison ? Pas pour en faire des fonctionnaires d'Etat ! Toutefois, si les seuls acteurs du débat sont les lobbies, le risque évident est que plus personne ne prenne en compte l'intérêt général. Les lobbies sont utiles: certains sont puissants, d'autres pas, mais ils défendent toujours des intérêts particuliers, alors que vos partis - nos partis, Mesdames et Messieurs les députés - ont toujours une vision générale de l'intérêt public et du bien commun. C'est ainsi - le Tribunal fédéral l'a rappelé à réitérées reprises - que les partis politiques participent de manière essentielle à la démocratie.

Vos exigences - j'allais dire de «pureté politique» - rendent l'adoption de règles praticables difficile, et il est vraisemblable que, dans cette matière particulièrement délicate, les règles parfaites n'existent pas. Mais ce n'est pas une raison, au fond, pour ne rien faire... Il convient, comme l'a dit M. Garcia, par le biais de ce projet de loi - ou, cas échéant, si c'est nécessaire, par un autre - de fixer un certain nombre de règles de transparence, de décence quant aux montants et de financement normal de la vie politique de notre république.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant la prise en considération du projet de loi 10000.

Mis aux voix à l'appel nominal, le projet de loi 10000 est rejeté en premier débat par 41 non contre 34 oui.

Appel nominal

RD 765
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la gestion du Fonds d'Equipement Communal pour l'exercice 2007

Le rapport du Conseil d'Etat RD 765 est renvoyé sans débat à la commission des affaires communales, régionales et internationales.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, avant de lever la séance, je rappelle aux membres de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil qu'ils sont attendus à la salle de l'Auditeur pour discuter rapidement de la compatibilité du remplaçant de M. Serex. Je vous propose une pause jusqu'à 10h05.

La séance est levée à 9h45.