République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de Mme Anne Mahrer, présidente.

Assistent à la séance: MM. Charles Beer, président du Conseil d'Etat, Robert Cramer, Pierre-François Unger et François Longchamp, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Laurent Moutinot, David Hiler et Mark Muller, conseillers d'Etat, ainsi que MM. David Amsler, Renaud Gautier, Jean Rossiaud et Louis Serex, députés.

Annonces et dépôts

La présidente. Vous avez trouvé sur vos places la question écrite suivante, qui est renvoyée au Conseil d'Etat:

Question écrite de Mme Beatriz de Candolle : Prévention des délits des jeunes par l'information: quand le mémento promis par le Conseil d'Etat sera-t-il distribué? (Q-3623)

Nous reprenons nos travaux avec la suite du débat sur la proposition de motion 1631.

M 1631-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Christian Brunier, Pierre Guérini, Roger Deneys, Ariane Wisard-Blum, Loly Bolay, Jean Rossiaud, Martin-Paul Broennimann, Jacques-Eric Richard, Sami Kanaan, David Hiler, Françoise Schenk-Gottret, Salika Wenger, Laurence Fehlmann Rielle pour une rue du Rhône conviviale consacrée aux piétons, aux transports publics, aux activités commerciales et aux loisirs

Suite du débat

M. François Gillet (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, s'il y a bien un point sur lequel nous pouvons être d'accord avec les motionnaires, c'est le fait que la rue du Rhône n'est pas très conviviale, c'est le moins que l'on puisse dire.

En revanche, concernant les invites de cette proposition de motion - cela a été dit - un certain nombre d'entre elles ont déjà été réalisées, d'autres, comme on nous l'a confirmé lors des auditions, vont l'être dans le cadre des réaménagements liés aux nouvelles lignes de tram, et d'autres, enfin, il faut le dire, sont, elles, clairement destinées à la Ville de Genève.

M. Deneys nous rappelait tout à l'heure l'intérêt de mettre en oeuvre un programme de loisirs et de divertissements visant à rendre vivante cette rue, mais je vois mal comment le Conseil d'Etat pourrait instaurer de telles mesures, puisque ce type d'actions sont clairement du ressort du Conseil administratif de la Ville de Genève !

Cela dit, il est vrai que, en commission des transports, nous sommes habitués à traiter des pétitions ou des propositions de motions qui devraient être étudiées par le Conseil municipal, et là, nous sommes clairement dans un tel cas de figure.

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, je crois que nous sommes obligés - mais ce ne sera pas, je pense, dramatique pour cette rue - de refuser cette proposition de motion. Cependant, il est vrai qu'il y a des mesures à envisager pour rendre cette rue du Rhône plus conviviale, et d'autres propositions devraient donc être étudiées dans ce sens.

M. Ivan Slatkine (L), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, je ne vais pas être très long. J'aimerais simplement dire que l'on a pu entendre Mme la rapporteure de minorité donner quelques éléments avec lesquels la majorité de la commission pouvait être d'accord, mais que, comme le groupe socialiste en a l'habitude, il a déposé cette proposition de motion pour ensuite demander autre chose ! En effet, le texte tel qu'il a été rédigé ne pose pas les questions que vous vouliez adresser au Conseil d'Etat, et c'est la raison pour laquelle la majorité de la commission a refusé cet objet.

Nous vous encourageons donc, Madame la députée, à déposer un autre texte qui poserait les bonnes questions. Une telle proposition de motion serait d'ailleurs certainement approuvée par la majorité de la commission et renvoyée au Conseil d'Etat. Il s'agit donc simplement de traiter les bonnes questions par les bonnes propositions de motions.

Mme Virginie Keller Lopez (S), rapporteuse de minorité. La rapporteuse socialiste se sent un peu seule ce soir ! (Rires. Exclamations.)

Des voix. Mais non !

Mme Virginie Keller Lopez. ...mais ça ne fait rien ! Nous avons effectivement reconnu, dès le début du traitement de cet objet en commission, qu'il posait un certain nombre de problèmes, notamment celui de la compétence. Certaines de ses invites avaient d'ailleurs été assez vite abandonnées en commission, même par le groupe socialiste. Comme l'a dit M. Gillet, l'ensemble des commissaires s'étaient mis d'accord pour reconnaître les nombreux problèmes que posent la circulation et la mobilité dans cette rue du Rhône, et ce que nous demandions - je le répète encore une fois - c'était simplement que cette proposition de motion soit renvoyée au Conseil d'Etat, afin qu'il nous donne des éléments nous permettant d'avancer et de faire d'autres suggestions en faveur de cette rue, comme l'évoque M. Slatkine, et je l'en remercie.

Je vous invite ainsi à renvoyer ce texte au Conseil d'Etat. J'espère que je serai suivie par quelques personnes qui auront pitié... (Rires.) ...par certains Verts qui sont là ! (Exclamations.) Je souhaite donc que vous renvoyiez cet objet, afin que nous puissions obtenir une réponse intéressante du gouvernement.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, je n'ai rien à ajouter aux propos extraordinairement consensuels de M. Slatkine et de Mme Keller Lopez. Au fond, quel que soit le sort - que je crains assez néfaste pour elle - qui sera réservé à cette proposition de motion, le Conseil d'Etat sera de toute façon amené à cautionner ou à proposer un certain nombre d'interventions dans ce périmètre. Nous nous en sommes expliqués en commission, et peut-être aurons-nous la possibilité de le faire devant ce parlement à l'occasion d'une autre proposition de motion !

Mise aux voix, la proposition de motion 1631 est rejetée par 48 non contre 17 oui.

M 1652-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Antoine Droin, Sami Kanaan, Sylvia Leuenberger, Françoise Schenk-Gottret, Morgane Gauthier, Alain Etienne pour un système incitatif pour encourager l'assainissement du parc des véhicules diesel des entreprises régionales et locales de transport
Rapport de majorité de M. Ivan Slatkine (L)
Rapport de minorité de Mme Françoise Schenk-Gottret (S)

Débat

M. Ivan Slatkine (L), rapporteur de majorité. Une fois de plus, je vais essayer d'être bref, car le vote sur cette proposition de motion a été très clair ! Sur quinze commissaires, quatorze ont approuvé une modification de l'invite au Conseil d'Etat. Une seule commissaire s'est y opposée, ce qui explique la présence d'un rapport de minorité.

Vous comprendrez qu'on puisse s'étonner de ce rapport, bien qu'il soit très intéressant et que l'on soit tous sensibles à la santé publique. Mais il est vrai que la commission des transports ne se penche pas spécifiquement sur les questions de santé, et il nous a donc semblé que, pour améliorer le parc de véhicules - bus, camions, etc. - au niveau des filtres et du problème des particules fines, il était plus intéressant d'avoir une approche incitative afin d'encourager les propriétaires de camions à respecter des normes plus correctes du point de vue de ces particules.

Nous avons estimé que l'invite originale de la proposition de motion n'atteindrait pas son objectif, c'est pourquoi la grande majorité de la commission a approuvé l'amendement proposé et le renvoi de ce texte au Conseil d'Etat. Je vous recommande donc de suivre cet avis.

Mme Françoise Schenk-Gottret (S), rapporteuse de minorité. Il me semble que la majorité d'entre vous a la mémoire courte ! En effet, lorsque notre ancien collègue Antoine Droin a déposé cette proposition de motion, la population se trouvait dans un état qui frôlait la panique face aux chiffres du taux de pollution lié aux particules fines. Cela était d'ailleurs abondamment relayé par la presse.

L'audition de l'Association suisse des transports routiers - ASTAG - qui fut intéressante, mais insuffisante, a convaincu les députés d'ajouter une invite à cette proposition de motion. Toutefois, nous ne pouvons nous satisfaire de cette seule invite. En effet, les chiffres fournis par le service des automobiles sont inquiétants: sur les 2253 poids lourds immatriculés dans le canton, seuls 105 présentent une pollution aux particules fines acceptable.

J'ai volontairement joint à ce rapport un certain nombre d'articles scientifiques qui décrivent les conséquences des atteintes à la santé des êtres humains dues aux particules fines: asthme, insuffisance du développement des poumons chez l'enfant, augmentation de la prise de médicaments, hospitalisation accrue des populations particulièrement exposées, infarctus du myocarde, arythmie, cancer des poumons, diminution de l'espérance de vie, etc. La sage OMS estime que 200 000 personnes meurent chaque année en Europe des conséquences de la pollution par les particules fines.

Un filtre coûte 20 000 F et a une efficacité de 95%, selon les chiffres officiels de la Confédération. Une aide du canton à raison de 50%, comme le suggère la proposition de motion, permettrait d'envisager cette dépense de façon plus sereine. L'Office fédéral du développement territorial explique que 3700 personnes meurent prématurément en Suisse à cause de la pollution atmosphérique. Et l'Office fédéral de l'environnement rappelle que, en équipant les véhicules de filtres, on économiserait plusieurs milliards sur les coûts de la santé.

Ce que suggère cette proposition de motion dans sa teneur initiale est une démarche modeste, l'annonce d'une politique des petits pas. Je vous rappelle le contenu de son invite: «à mettre en oeuvre et à participer financièrement à un système incitatif d'équipement en filtres à particules du parc des véhicules diesel de transports régionaux et locaux. Le canton doit prendre à sa charge jusqu'à 50% au plus des frais d'équipement. Cet engagement financier du canton doit être limité à trois années à compter de la transmission de la présente intervention.»

Je vous engage donc à voter la proposition de motion telle qu'issue des travaux de la commission, en y ajoutant l'invite originale que je viens d'énoncer. Ainsi, Genève tracera la voie à la Confédération, dont l'exécutif se montre bien timoré dans sa lutte contre les particules fines.

La présidente. Merci, Madame la rapporteure. Je salue à la tribune notre ancien collègue Jacques-André Schneider. (Applaudissements.)

M. Eric Leyvraz (UDC). Les membres de la commission des transports ont rapidement compris, suite aux auditions des spécialistes, que l'équipement en filtres à particules de véhicules anciens posait des problèmes techniques et financiers insurmontables. Nous allions au-devant d'un échec et nous apprêtions même à apporter une solution contre-productive à une situation dont la gravité, sur le plan de la santé, est évidente.

Vouloir moderniser à grands frais - on parle de plusieurs milliers de francs par camion - un véhicule ancien, souvent techniquement irrémédiablement dépassé et à la consommation bien plus importante que les nouveaux modèles, c'est prolonger inutilement la vie d'un transporteur promis de toute façon à la casse.

La nouvelle invite de cette proposition de motion, adoptée à l'unanimité de la commission moins une voix, présente un système incitatif raisonnable et nous vous engageons donc à suivre les conclusions de la commission en renvoyant ce texte au Conseil d'Etat.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Que tout le monde reconnaisse les dangers des particules fines, c'est déjà un grand pas en avant, mais je pense que l'on doit être plus incisif ! C'est vrai que la commission a trouvé un consensus et, évidemment, on va voter ce texte, mais je dois dire que le rapport de Mme Françoise Schenk-Gottret est excellent et qu'il fait froid dans le dos. Je me dis que les graves dangers pour la santé que représentent les particules fines... Si, par exemple, vous habitez à moins de cent mètres d'un axe routier ou d'une zone très urbanisée, les risques cardio-vasculaires et de cancer sont doublés. C'est vraiment grave !

Sur le plan national, les coûts de la santé représentent 6,7 milliards. En divisant ce chiffre par les vingt-trois cantons plus les deux demi-cantons, cela donne à peu près 300 millions de frais de la santé pour le canton de Genève. Que signifient donc 20 millions pour mettre des filtres à particules sur des véhicules ? Il y a environ 2000 camions qui n'en ont pas, et ces derniers polluent énormément ! Si l'on équipait ces poids lourds qui peuvent encore rouler un certain temps, on ne dépenserait que 20 millions. Mais ensuite, où iront ces camions, Monsieur Leyvraz ? Ils seront envoyés en Afrique, ou dans les pays de l'Est, et ils continueront à polluer. C'est donc notre devoir de les équiper de filtres à particules !

Nous avons le feu vert au niveau des lois fédérales et cantonales, et il existe un plan de mesures 2003-2010 stipulant qu'il faut équiper les véhicules des transports publics de filtres à particules. Nous devons donc voter les deux invites, à savoir celle qui ressort des travaux de la commission et celle dont a parlé Mme Schenk-Gottret, qui demande au Conseil d'Etat de mettre en place un système incitatif concernant ces filtres à particules. Nous n'avons pas le choix ! Pourquoi les propriétaires de véhicules diesel sans filtres à particules auraient plus le droit que nous de respirer un air sain ? Il n'y a aucune raison ! C'est comme la fumée passive ! Allez frotter votre main sur les bords des fenêtres, c'est noir ! Ce sont de minuscules particules qui font vraiment du mal.

Je crois que nous devons montrer l'exemple; 20 millions, ce n'est rien, comparé aux coûts de la santé. Je vous invite donc à voter cette proposition de motion avec l'amendement de Mme Schenk-Gottret. (Applaudissements.)

Mme Virginie Keller Lopez (S). Le groupe socialiste ira tout à fait dans le sens de notre collègue des Verts qui vient de s'exprimer. Nous avons effectivement eu des doutes en commission, parce que nous n'avions finalement qu'un son de cloche, et je dois d'ailleurs reconnaître que la commission a mal joué son rôle, puisqu'elle a refusé l'audition du responsable de la protection de l'air à Genève proposée par Mme Schenk-Gottret. Par conséquent, au lieu d'aller jusqu'au bout de son action, la commission n'en a fait que la moitié. Et si nous n'avions pas bénéficié de l'excellent travail que Mme Schenk-Gottret a fait d'elle-même, en plus de celui qui fut accompli assez faiblement par la commission, nous n'aurions pas eu connaissance des éléments très intéressants qu'elle a joints à son rapport.

D'ailleurs, je vous conseille vraiment de le lire, parce que, comme l'a dit Mme Sylvia Leuenberger, il est édifiant au niveau des coûts et des dangers, et cela nous montre que ce n'est pas le moment de faire des économies sur ces questions-là, et que, lorsqu'on parle aujourd'hui d'environnement, de santé publique et de pollution de l'air, ce sont des atouts qu'il faut mettre de notre côté, mais pas à moitié!

Cela signifie qu'il faut voter l'amendement discuté en commission et sur lequel il y avait un consensus général, et y rajouter l'invite originale, parce que, finalement, ces deux propositions sont complémentaires et vont dans le bon sens. Je vous rappelle par ailleurs qu'il s'agit d'une proposition de motion, c'est-à-dire que, dans le meilleur des cas, elle sera renvoyée au Conseil d'Etat, lequel la mettra en oeuvre le mieux possible et de la manière la plus intelligente qui soit. Mais, de grâce, donnons-lui tous les outils possibles pour lutter contre la pollution de l'air à Genève et ailleurs ! (Applaudissements.)

M. François Gillet (PDC). Le rapport de minorité est effectivement très intéressant au niveau des informations qu'il nous livre, mais je tiens à préciser qu'aucun membre de la commission n'a minimisé les méfaits sur la santé des particules fines et de la pollution de l'air en général. C'est une évidence pour tout le monde et personne ne l'a nié.

En revanche, comme l'a dit M. Leyvraz, inciter à des dépenses importantes sur des véhicules qui, de toute façon, sont dépassés et consomment beaucoup trop par rapport aux véhicules actuels, n'a pas grand sens. Il nous paraît plus utile d'encourager les transporteurs à utiliser des véhicules qui respectent des normes.

Je tiens d'ailleurs à préciser que le groupe démocrate-chrétien est très sensible à ces questions d'incitation à rouler plus propre. Il souhaite également favoriser les moyens de transport respectueux de l'environnement, mais par des mesures incitatives telles que les allégements fiscaux, comme c'est le cas pour les véhicules privés. C'est dans ce sens que la commission a voulu aller et, encore une fois, elle ne minimise pas les méfaits des particules fines que nous reconnaissons tout à fait.

Nous vous invitons donc à voter et à renvoyer au Conseil d'Etat cette proposition de motion telle qu'amendée par la commission des transports.

M. Alain Meylan (L). Mes préopinants accusent la commission d'avoir mal organisé ses travaux. Peut-être bien, mais je vous lis simplement le vote final: la proposition de motion telle qu'amendée est acceptée par deux socialistes, deux Verts, un PDC, deux radicaux, trois libéraux, deux UDC et un MCG, et refusée par une socialiste, auteur du rapport de minorité.

On voit donc bien que le travail a été fait, et correctement, avec des arguments développés par les uns et les autres. Je reconnais que les données apportées par Mme Schenk-Gottret sont tout à fait exactes et intéressantes, mais cette proposition de motion n'est pas le lieu pour en parler.

Il est question de l'efficacité des filtres à particules, mais il est vrai que d'équiper tous les camions de ces filtres entraîne d'autres difficultés. On ne minimise pas le problème des particules, mais il nous faut apporter toute la lumière technique sur la possibilité ou non de munir les véhicules de ces filtres. En effet, équiper ainsi un ancien poids lourd pose d'autres problèmes de toxicité délicats, et il ne s'agit plus simplement de se donner bonne conscience.

On a d'ailleurs auditionné M. Pierre Kunz, adjoint scientifique au service cantonal de protection de l'air... (Remarque.) ...mais ce n'est pas notre collègue, je vous rassure ! Il nous a rappelé que, grâce à l'évolution technologique de ces quinze dernières années, la qualité de l'air s'était passablement améliorée à Genève. il faut quand même le relever avec force.

On peut certes obliger tout le monde à dépenser de l'argent pour équiper ces anciens véhicules, mais je crois que la mesure... Nous sommes d'accord sur l'objectif, qui est d'améliorer la qualité de l'air, nous reconnaissons également tous les méfaits des particules fines, mais nous divergeons sur le chemin pour y parvenir. Nous, au parti libéral, sommes pour inciter, notamment fiscalement, les entreprises à s'équiper de véhicules propres, de façon à avoir là également un avantage par rapport à une démarche volontaire.

L'action est là, les problèmes ne sont pas contestés, mais la proposition de motion ne parle pas de ce genre de difficultés. Il faut par conséquent suivre à cet égard le rapport de M. Slatkine, et le parti socialiste choisira naturellement cette voie. (Commentaires.) Non, le parti libéral, pardon ! (Rires. Applaudissements.)

M. Jean-Marc Odier (R). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe radical suivra... (Commentaires.) Oui, le groupe radical ! Il suivra l'invite telle qu'elle est formulée dans le rapport de majorité.

Les normes européennes évoluent sans cesse et on parvient chaque fois à fabriquer des véhicules plus performants et des moteurs de moins en moins polluants. Il s'agit de normes européennes, je pense qu'il nous faut donc simplement les suivre au plus près !

Vouloir être plus exigeant à Genève que dans le canton de Vaud ou chez nos voisins français va à nouveau causer des désavantages aux entreprises. Vous me demanderez peut-être quelle est l'importance de pénaliser le commerce par rapport aux coûts de la santé... Mais il y a quand même une logique qu'il faut admettre. Imaginez que nous soyons plus exigeants à Genève: qu'est-ce qui empêcherait les transporteurs genevois d'immatriculer leurs véhicules dans les cantons de Vaud ou du Valais, comme d'ailleurs de nombreux particuliers le font actuellement pour d'autres raisons ?

D'autre part, vous demandez dans l'invite, Madame Schenk-Gottret, que l'on suive à raison de 50% le financement de l'installation de filtres à particules sur les moteurs diesel... Il existe dans le parc automobile genevois environ 2000 véhicules qu'il faudrait équiper de ces filtres, qui coûtent environ 20 000 F; globalement, cela équivaut donc à 40 millions pour Genève. Mais qui va payer ? Allez au fond de vos idées ! Qui va financer cela ? Est-ce que vous allez l'inscrire dans le budget cantonal ? Il faut le dire ! Est-ce que vous voulez que l'on finance 20 millions ici, dans le budget cantonal ?

Je pense que l'idée part, je ne dirai pas d'un bon sentiment, mais d'une logique: nous devons prendre un maximum de mesures pour avoir un air pur à Genève et le minimum de nuisances. Mais vouloir être plus exigeant que les normes européennes n'aboutit pas forcément à quelque chose de cohérent.

S'agissant de l'invite et de la solution des allégements fiscaux, je prierai le Conseil d'Etat, si cette proposition de motion était adoptée, de bien lire le rapport. En effet, concernant ces diminutions fiscales qu'il faudrait étudier, il a été dit par la majorité de la commission que nous ne voulions pas qu'ils soient compensés par une augmentation de l'impôt sur les autres véhicules. Nous parlons donc bien d'allégement, et c'est dans ce sens que nous demanderons au Conseil d'Etat d'étudier cette proposition de motion.

Mme Virginie Keller Lopez (S). Les messieurs de la droite qui se sont exprimés n'ont pas bien lu l'invite formulée par Mme Schenk-Gottret. En effet, que ce soit MM. Meylan ou Odier, on a l'impression que, tout d'un coup, on va obliger tout le monde à installer des filtres à particules et que ça va coûter des millions à l'Etat. Or, ce qui est écrit dans l'invite, c'est de mettre en place un système incitatif; c'est donc exactement ce que vous souhaitez, et c'est d'ailleurs aussi ce que propose l'autre invite, que vous avez acceptée à l'unanimité. Je ne vois donc pas en quoi cette invite vous fait davantage peur !

Quant aux coûts et au budget, Monsieur Odier, je veux bien que vous préfériez alourdir les frais de la santé plutôt que ceux de la prévention, mais ça, c'est votre option politique, ce n'est pas la nôtre ! Ce soir, nous choisissons de donner des moyens à la prévention. Nous ignorons ce que cela coûtera, mais nous demandons au Conseil d'Etat d'étudier un système incitatif. Lorsque ce dernier aura élaboré un plan et qu'il nous le proposera sous forme de projet de loi, nous pourrons alors évaluer son coût et prendre une décision. Mais, pour l'instant, nous invitons le gouvernement à étudier ces propositions, afin que l'on se donne tous les moyens pour, justement, ne pas alourdir les budgets santé, mais plutôt les budgets prévention. (Applaudissements.)

M. Alain Meylan (L). En tant que «socialiste»... (Rires.) ...je partage l'avis des deux commissaires de ce parti et suivrai le rapport de majorité de M. Slatkine.

M. Jean-Marc Odier (R). Madame Keller Lopez, je dois vous contredire ! En effet, si vous lisez correctement la page 20 du rapport, la rapporteure de minorité, Mme Schenk-Gottret, dit bien: «Le canton doit prendre à sa charge jusqu'à 50% au plus des frais d'équipement.» Or 2000 véhicules multipliés par 20 000 F au minimum, cela donne 40 millions. Il reviendrait donc 20 millions à la charge de l'Etat. C'est exactement ce qui est marqué dans le rapport, je n'ai rien dit de plus !

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je salue à la tribune notre ancien collègue, et néanmoins mari, M. François-Régis Mahrer. (Applaudissements.)

M. Patrick Saudan (R). Mon intervention sera très brève. Il est dit dans cette proposition de motion que la Suisse entend lutter contre les substances cancérigènes. Mais j'aimerais juste vous rendre attentifs au fait qu'il n'y a actuellement pas de consensus scientifique concernant un lien entre le cancer du poumon et les particules fines. J'en veux pour preuve le dernier rapport sur les causes du cancer, publié en septembre dernier en France, qui examine toutes les études de cohorte. Et le rôle de la pollution et des particules atmosphériques dans la genèse des cancers du poumon y est estimé à 0,83%. Je pense donc que nous devons certes lutter contre la pollution atmosphérique, mais qu'il ne faut surtout pas dramatiser cet enjeu en parlant d'un problème gravissime de santé publique.

M. Gilbert Catelain (UDC). Avant de décider d'un renvoi de ce rapport au Conseil d'Etat ou de la suite à donner à cet objet, j'aimerais que la rapporteuse nous indique comment elle entend mettre en oeuvre cette proposition de motion pour les TPG, qui sous-traitent une partie des lignes dans le cadre d'un accord avec les départements frontaliers et qui utilisent justement des bus relativement vieux. Je pense notamment à la ligne qui relie Thoiry à Blandonnet, dont les véhicules ne sont pas du tout équipés de filtres à particules.

Du reste, qui paiera ? Est-ce le contribuable genevois qui financera l'équipement de bus qui roulent majoritairement sur le territoire français ? Est-ce l'usager ? Ou est-ce l'Etat français ?

Je remercie Mme la rapporteuse de nous indiquer comment elle prévoit de régler l'imbroglio juridique lié à l'équipement de filtres à particules pour ce type de véhicules immatriculés en France.

M. Ivan Slatkine (L), rapporteur de majorité. Je dois dire que je m'étonne un peu de la longueur de ce débat, puisque, dans le fond, nous sommes tous d'accord sur le fait qu'il y a un problème et qu'il faut le résoudre. Cette proposition de motion telle qu'elle nous a été présentée, selon une grande majorité de la commission, n'aurait pas atteint ses objectifs, mais avec l'amendement proposé par une députée Verte, nous sommes parvenus à un consensus général permettant de renvoyer ce texte au Conseil d'Etat. Et ce dernier y répondra ! Nous avons donc, d'une manière très pragmatique, trouvé une solution pour que le gouvernement se prononce sur le sujet. Alors, soyons réalistes, on ne va pas discuter de chiffres pendant quinze ans ! Que ce soient 10 ou 20 millions à la charge de l'Etat, l'autre moitié devra être assumée par les transporteurs. Et, en tant qu'entrepreneur, je me mets à la place de ces derniers et je préfère qu'on m'incite à acheter un nouveau camion qui pollue moins plutôt qu'à installer un système qui ne sert finalement pas à grand-chose.

Par conséquent, la solution telle qu'on l'a trouvée en commission est la bonne, et le Conseil d'Etat y répondra certainement de la meilleure des façons. Arrêtons donc ce débat-fleuve qui n'a aucune raison d'être !

M. Christian Brunier (S). J'aimerais répondre très rapidement à deux interventions. M. Saudan, qui est parfaitement compétent, bien sûr, puisqu'il est médecin, nous dit que les particules fines auraient peu d'incidence sur le cancer. Je pense qu'il fait allusion à l'étude française qui vient de paraître sur les causes du cancer et qui établit des corrélations entre les causes et la maladie. Or, dans cette étude - que j'ai lue - il est précisé que, si les particules ont peu d'influences sur le cancer, elles en ont en revanche sur d'autres maladies, telles que celles qui touchent les poumons. On ne va donc pas commencer à choisir les maladies qui nous arrangent lorsqu'il y a un débat ! De toute façon, ces particules sont un poison et il faut donc les éviter.

Deuxièmement, par rapport à la sous-traitance, M. Catelain nous dit qu'il faut faire attention, et que, si l'on oblige la sous-traitance des TPG à s'équiper de filtres à particules, il va y avoir un problème... Cela pose effectivement toute la question de la sous-traitance, Monsieur Catelain ! Votre parti n'arrête pas de dire qu'elle coûte moins cher que les TPG et certains affirment que, lorsqu'une entreprise est privatisée, elle fonctionne beaucoup mieux... Mais c'est tout simplement parce que l'on ne place pas les gens à armes égales ! En effet, on demande aux TPG de répondre à des normes sociales et environnementales, ce qui est bien, mais c'est aussi logique pour une entreprise publique comme celle-ci, dans la mesure où l'on n'arrête pas de parler de développement durable. En revanche, lorsqu'il s'agit de la sous-traitance, on ferme les yeux sur le social, notamment au niveau salarial, et sur les questions environnementales... Eh bien non ! Je pense que la sous-traitance des TPG doit être soumise aux mêmes normes que celles qui s'appliquent pour ces derniers.

Par conséquent, il est bien entendu que les bus de sous-traitance des TPG doivent être équipés de filtres à particules. (Applaudissements.)

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes pratiquement repartis pour un débat de commission, alors, au risque d'être lourdement didactique, je me dois de vous rappeler un certain nombre de données essentielles qui m'ont été communiquées par le service cantonal de protection de l'air.

La première, et il ne doit y avoir absolument aucun doute là-dessus, c'est que les particules fines sont extrêmement nocives pour la santé. Qu'elles le soient parce qu'elles provoquent telle ou telle maladie importe peu au fond, ce sont surtout les chiffres publiés par la Confédération qu'il faut retenir et, pour une cause de mortalité ou une autre, ceux-ci indiquent que les particules fines ont induit des coûts externes de la santé de 4,2 milliards de francs en 2000, ce qui signifie 3700 décès prématurés par an en Suisse.

On ne parle donc pas d'un fait minime, mais d'un phénomène d'importance, et je remercie Mme Schenk-Gottret de nous l'avoir rappelé de façon très précise et développée dans son rapport de minorité. On ne doit avoir aucun doute à ce sujet !

Maintenant, la question qui se pose, c'est de savoir ce que nous pouvons faire de mieux pour lutter contre ces particules fines. Un certain nombre d'études sur l'efficacité des filtres à particules ont été réalisées, et elles indiquent qu'un tel filtre peut retenir plus de 95% de ces particules, lorsqu'il est installé d'origine. En revanche, s'il est placé à posteriori, il permet de réduire au maximum les émissions de 40%. C'est dire qu'il est donc beaucoup moins efficace et que, en outre, il implique une augmentation de quelques pourcents des oxydes d'azote. Ainsi, si on a le choix, il va de soi qu'il ne faut pas inciter à installer des filtres à particules sur des véhicules, mais plutôt à remplacer la flotte automobile.

C'est pour ces motifs-là que les spécialistes de l'administration trouvent que cette voie doit être privilégiée. En effet, elle est plus efficace au niveau de la qualité de l'air - et on se doit de l'être pour toutes les raisons excellemment rappelées par Mme Schenk-Gottret - et, à l'évidence, c'est celle qui sera le mieux acceptée par les professionnels. Après tout, si l'on veut, par la voie de l'incitation - que ce soit une subvention ou autre - encourager à des modifications de comportement, il faut faire en sorte que les destinataires collaborent à cette démarche. Or là, on voit bien que c'est véritablement la possibilité de l'incitation au renouvellement de la flotte qui sera la plus intéressante, d'autant plus que cela rentre dans un dispositif de mesures qui sont celles de la Confédération, à travers la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations - RPLP. Elle peut également très bien s'inscrire dans le cadre des mesures cantonales que nous connaissons bien et qui sont celles que nous appliquons déjà en matière de fiscalité pour les véhicules automobiles.

Il n'en demeure pas moins que cela ne sera qu'un des éléments de notre dispositif de lutte contre la pollution de l'air, car il y en aura bien d'autres ! Cela passe évidemment par des modifications en matière de politique de la mobilité et également, en cas d'épisode aigu de pollution de l'air, par des dispositifs plus contraignants, comme celui de la circulation alternée. C'est en ce sens que le Conseil d'Etat vous invite à lui renvoyer cette proposition de motion sans l'amender.

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes donc saisis d'un amendement qui consiste en l'invite supplémentaire suivante, qui figure à la page 20 du rapport: «à mettre en oeuvre et à participer financièrement à un système incitatif d'équipement en filtres à particules des véhicules diesel de transports locaux. Le canton doit prendre à sa charge jusqu'à 50% au plus des frais d'équipement. Cet engagement financier du canton doit être limité à trois années à compter de la transmission de la présente intervention.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 41 non contre 29 oui et 10 abstentions.

Mise aux voix, la motion 1652 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 78 oui et 2 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Motion 1652

M 1730
Proposition de motion de Mmes et MM. Guillaume Barazzone, Anne-Marie von Arx-Vernon, Luc Barthassat, Jean-Claude Ducrot, François Gillet, Béatrice Hirsch-Aellen, Guy Mettan, Pascal Pétroz, Véronique Schmied pour des logements et des emplois aux Charmilles
M 1783
Proposition de motion de Mmes Michèle Künzler, Mathilde Captyn, Anne Mahrer : Un Eco-quartier à la Concorde: favorisons une expérience innovatrice de logements à haute qualité environnementale intégrant un processus participatif de quartier

Débat

La présidente. Ces deux objets sont en catégorie II, avec trois minutes de parole par groupe, sans compter les minutes dévolues aux auteurs de ces propositions de motions. Nous commençons par la M 1730.

M. Guillaume Barazzone (PDC). Merci, Madame la présidente, de me donner l'occasion de présenter la proposition de motion démocrate-chrétienne 1730 concernant la zone industrielle de Châtelaine, qui est propriété de la Ville de Genève. Ce texte vise à demander au Conseil d'Etat, d'une part, de changer l'affectation de la zone industrielle et artisanale sur laquelle se situe la parcelle appartenant à la Ville de Genève et, d'autre part, d'adopter un plan localisé de quartier pour ladite parcelle, comprenant notamment des logements locatifs, de la PPE, des logements subventionnés ainsi que des activités économiques et une crèche, sur le modèle du masterplan présenté par le Conseil d'Etat dans la zone de la Praille.

Pourquoi demander au gouvernement de déclasser une zone appartenant à la Ville de Genève, la plus grosse commune de notre canton ? Pour deux raisons: la première paraît tomber sous le sens, dans la mesure où cette zone se situe en plein centre-ville, à côté du futur parc Hentsch, et autour de zones à bâtir et construites. Or il nous semble que cette zone industrielle n'a plus lieu d'être en plein centre-ville. A notre avis, la Ville de Genève devrait d'ailleurs être débarrassée de ce type de zones. En revanche, nous devrions construire davantage au centre-ville, puisque cette zone est totalement desservie par les transports publics. Elle le sera vraisemblablement, dans quelques années, aussi par une gare, espérons-le, puisque la voie CFF passe à côté.

Il existe une autre raison qui nous pousse à donner l'impulsion pour déclasser cette zone, c'est le fait que la Ville de Genève, propriétaire de ladite parcelle, n'a, nous semble-t-il, pour l'instant pas assez fait pour générer à la fois des impôts, de la fiscalité et des emplois dans cette zone qui, je le rappelle, se situe en plein centre-ville.

Déclasser, certes, mais pour quoi faire? Pour remplacer ladite zone par des logements - et nous espérons que le Conseil d'Etat accédera à notre demande - puisque, à ce niveau-là aussi, la Ville de Genève a quelques efforts à faire. Nous souhaitons donc créer des logements sur les parcelles qui le permettent, c'est-à-dire au centre-ville. En effet, avant de déclasser la zone agricole, peut-être doit-on se poser la question de savoir s'il ne faut pas déclasser en premier lieu les zones du centre-ville sur lesquelles il est possible de construire des logements.

D'autre part, nous aimerions créer dans cette région des zones d'activités mixtes, avec des commerces et une crèche, pour que ces quartiers ne soient pas des cités dortoirs mais des zones d'activités, des lieux de vie. Et c'est dans ce sens que le groupe démocrate-chrétien - à l'instar de celui des Verts qui vous présentera sa proposition de motion tout à l'heure - souhaiterait que ce nouveau quartier de Châtelaine et des Charmilles puisse voir l'implantation d'un éco-quartier, comme cela figure dans l'exposé des motifs. Cela constituerait un vrai projet pilote à côté de ce parc Hentsch, car je crois que la qualité de vie de ce quartier, trop souvent délaissé par les autorités de la Ville de Genève, devrait être améliorée.

J'aimerais ajouter encore un mot sur les activités qui ont lieu actuellement dans cette zone. Il faudra absolument que l'on trouve une solution pour reloger les différents exploitants des boulangeries, ainsi que le centre de formation des pompiers, mais il me semble que des possibilités existent dans d'autres communes, et il faut donc absolument valoriser cette zone.

Au bénéfice de ces explications, nous vous invitons à renvoyer cette proposition de motion à la commission de l'aménagement. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)

Mme Michèle Künzler (Ve). Nous cherchions tout à l'heure du concret pour construire des logements, et je crois que nous tenons une solution dans la proposition de motion développée par M. Barazzone, mais bien plus encore dans la M 1783 que je vais vous présenter. En effet, elle n'implique pas de déclasser, ni même, probablement, de faire des plans localisés de quartier, puisqu'il s'agit d'une zone largement urbanisée.

Nous avons la chance extraordinaire de faire un projet innovateur. Toutes les cartes sont dans les mains des collectivités. Il faut donc maintenant absolument produire un pilotage pour ne pas rater cette chance.

Aujourd'hui, on a décerné à Al Gore un prix Nobel pour son intervention par rapport aux problématiques sur le climat, mais je crois que nous aussi devons agir à Genève. Nous avons jusqu'à maintenant pris énormément de retard: nous sommes les derniers à ne pas avoir d'éco-quartiers, nous n'avons pratiquement pas d'immeubles Minergie, nous sommes donc vraiment à la traîne par rapport aux possibilités existantes. Toute l'Europe a pris tout à coup de l'avance ! Nous étions tout à fait compétents, nous possédons des entreprises très expérimentées, mais maintenant il faut pouvoir agir dans un quartier, et celui de la Concorde s'y prête très bien. Vous savez qu'il est bien desservi par les transports publics et que les bâtiments existants - qui sont d'ailleurs à très faible capacité - doivent être démolis parce qu'ils n'ont plus la possibilité d'être rénovés.

Nous pouvons créer plus de 1000 logements à cet endroit, alors maintenant il faut vraiment élaborer un projet innovateur, et je vous invite donc vivement à renvoyer dans un premier temps ce projet en commission, afin de l'étudier rapidement et d'aller de l'avant, parce que, là, nous pouvons enfin créer quelque chose de neuf.

M. Christophe Aumeunier (L). En Ville de Genève, on a construit ces cinq dernières années moins de 100 logements par an. Le déficit en logements y est absolument impressionnant ! On disait tout à l'heure que, dans le canton, on construisait 1200 logements, alors que, dans la ville, on en est à moins de 100 logements. Par conséquent, déclasser une zone industrielle qui se trouve en pleine cité est parfaitement logique ! Comme le relevait le député Barazzone, les activités qui ont lieu dans cette zone industrielle peuvent être replacées ailleurs, voire utilisées dans la mixité parce que, aujourd'hui, dans l'aménagement du territoire contemporain, on parle bien de mixité ! On se dirige vers du tertiaire et vers des activités qui sont de moins en moins nuisantes, en conséquence de quoi il faut effectivement un aménagement du territoire qui soit beaucoup plus contemporain et mixte.

S'agissant de la notion de quartier durable, je crois qu'il faut qu'on se mette d'accord sur le lieu où l'on va établir un tel quartier, parce que nous y sommes tous favorables, il n'y a pas de doute à ce sujet-là ! Il faut donc simplement que l'on choisisse un lieu, car il y a au moins dix ou quinze localisations qui sont proposées. Et pourquoi pas à la Concorde?

Mme Michèle Künzler. Partout !

M. Christophe Aumeunier. Oui, d'accord, partout, Madame Künzler ! Mais qu'est-ce qu'un quartier durable ? Comment fonctionne-t-il ? Quel est son coût ? Est-il vraiment durable ? Nous en sommes au niveau de l'expérience. Vous le savez comme moi, il n'existe en Europe que quelques quartiers durables, et pas plus d'un par pays, à ma connaissance. Or vous voulez en faire plusieurs à Genève. Cela me semble extrêmement ambitieux. Tant mieux ! Mais moi je vous propose des expériences. Je vous suggère en définitive d'étudier soigneusement une localisation et que nous nous accordions sur son choix.

Quant aux contraintes du quartier durable, nous sommes d'accord de les assumer, dès lors qu'il s'agit d'une incitation et que vous trouvez des promoteurs qui acceptent de développer un tel quartier. Je suis convaincu que vous y parviendrez, mais je tiens ici à mettre cette cautèle; il faut que le fait de créer un quartier durable soit une possibilité, et non pas une imposition aux privés.

Cette réserve étant émise, je crois que nous devons renvoyer ces deux propositions de motions à la commission de l'aménagement. (Applaudissements.)

Une voix. Très bien !

M. Michel Ducret (R). Une fois de plus, on va parler de construire la ville en ville ! Depuis le temps qu'on entend prononcer cette phrase, il y a pourtant un certain nombre de réalités qui font que Genève détient un record de friches industrielles inexploitées, notamment en Ville de Genève, et il est grand temps que celles-ci évoluent, bien que certaines aient déjà commencé à être modifiées.

Et en voilà une qui est propriété publique et qui abrite des activités absolument peu valorisantes pour notre collectivité, voire qui sert de dépôt pour les pompiers ou pour les bibliobus de la Ville, alors que ceux-ci pourraient très bien s'accommoder d'autres lieux beaucoup plus simples et moins gourmands en espace.

Il existe effectivement un potentiel nouveau dans l'aménagement du territoire, en ce sens que le mixage entre l'activité et le logement est devenu possible, alors que ce n'était pas le cas il y a une cinquantaine d'années, lorsque nous avons rédigé nos lois et créé nos zones. Face à cette évolution, nous avons un retard législatif, et il faut donc absolument maintenant favoriser la mixité entre activités et logements. Celle-ci est d'ailleurs susceptible de générer également une réduction des besoins en déplacement et participe de cette manière simple à créer des éco-quartiers, ne serait-ce qu'en diminuant ce type de besoins.

Il existe donc cette mixité activités/logements, à laquelle je pense qu'il faut ajouter la dimension culturelle qui manque quelque peu dans les propositions qui ont été faites, notamment sur la rive droite et dans ce quartier des Charmilles. En effet, ce dernier est actuellement complètement sous-doté et sous-évalué à ce niveau-là, et c'est bien dommage.

J'ajouterai qu'il faut aussi parler de mixité sociale. Nous devons absolument éviter de cumuler des logements destinés uniquement aux catégories défavorisées de la population, bien qu'il y en ait un grand besoin, car il ne faudrait pas non plus créer un ghetto social, ce qu'a déjà quelque peu tendance à devenir le quartier des Charmilles.

Enfin, nous sommes favorables - conformément au programme radical récemment approuvé par notre assemblée déléguée - aux éco-quartiers, d'autant plus que, dans le cas présent, il s'agit pour la Concorde d'un projet où ce sont les propriétaires eux-mêmes qui demandent de réaliser un tel quartier. Il n'y a donc pas de contrainte !

Quant à l'éco-quartier qui peut être créé aux Charmilles sur les terrains de la Ville, nous y sommes aussi favorables ! En effet, la Ville de Genève, qui prône l'éco-quartier pour tout un chacun et partout, pourra montrer pour une fois qu'elle est en mesure de réaliser ce qu'elle préconise et demande aux autres de faire.

Pour conclure, il existe des lieux pour créer des éco-quartiers, et les Charmilles en sont un. Nous-mêmes, radicaux, avons fait récemment la démonstration que ceci est possible, par exemple à la pointe de la Jonction, et vous avez pu examiner ce projet qui prouve que nous sommes favorables à cette vision de notre urbanisme.

M. Alain Etienne (S). Le groupe socialiste est assez partagé quant à l'analyse de ces deux propositions de motions. A la séance des chefs de groupe, j'ai en effet exprimé le fait que nous regrettions d'avoir mis ensemble les points 25 et 106, car la proposition de motion présentée par les Verts remporte nos faveurs, alors que l'autre pose davantage de problèmes. Nous voulions donc souligner qu'il y avait une différence d'approche entre ces deux objets et qu'il était dès lors difficile de les traiter ensemble.

Concernant la M 1730, lorsque nous avons étudié en commission d'aménagement le déclassement pour le parc Hentsch, nous avons auditionné la Ville de Genève, et cette dernière, qui est justement concernée par la parcelle touchant ce parc, a exprimé certaines réserves et réticences quant au fait de proposer un déclassement en zone de développement 3, et cela pour diverses raisons. Nous serions donc pour un renvoi en commission de cet objet, afin d'au moins écouter la Ville de Genève et de connaître sa position exacte concernant ce périmètre.

Ensuite, il était question du relogement des artisans de cette parcelle, parce qu'il faut bien se rendre compte que, lorsqu'on déclasse des zones industrielles et artisanales en Ville de Genève, il faut trouver où replacer les artisans qui travaillaient dans ce type de zones. En l'occurrence, la parcelle désignée dans cette proposition de motion comprend un certain nombre d'artisans qui ont été relogés à l'époque, une garantie avait donc été donnée pour les accueillir, et il faut aussi en tenir compte.

Par ailleurs, vous parlez de construire la ville en ville. C'est un concept utilisé depuis des années ! Cependant, moi je ne lis pas «construire la ville en Ville de Genève», mais «construire la ville en ville», c'est-à-dire dans l'agglomération genevoise, qui représente un plus grande territoire que la seule Ville de Genève.

J'en viens donc à vous rappeler notre plan directeur cantonal, qui demande des logements partout et équitablement dans toutes les communes de l'agglomération genevoise. Je me souviens d'ailleurs que la Ville de Genève elle-même s'était engagée à créer 150 logements par année sur son territoire, et c'est ce qu'elle fait lorsque les conseillers municipaux et conseillères municipales votent des plans localisés de quartier et des préavis.

Concernant les quartiers écologiques, le parti socialiste y est bien évidemment favorable, d'autant plus que cela fait appel à la participation des habitants. Pourtant, et c'est très étonnant, lorsque le monde alternatif propose des expériences comme à Artamis, où il y aurait des possibilités de travailler avec les gens qui utilisent cette zone, on ne rencontre pas une effervescence aussi importante. Alors pourquoi n'y est-on pas favorable dans certaines zones, et dans d'autres oui ?

Le parti radical vient de nous parler de la Jonction, et tout d'un coup on s'enflamme pour ces éco-quartiers alors qu'il y aurait quelques réserves à émettre, notamment concernant la M 1783. Vous dites que, dans certaines expériences, ce sont des classes aisées qui se retrouvent dans ces types de quartiers; il existe donc quand même un risque auquel il faut prendre garde.

S'agissant des activités commerçantes, nous sommes bien entendu favorables à une mixité, mais je vous rappellerai que, dans le débat sur Balexert, le risque était que, aux Avanchets, l'extension du centre commercial mène à la fermeture de toutes les épiceries et petits commerces aux alentours. Donc là aussi, nous ne comprenons pas tellement pourquoi, tout d'un coup, il y a une effervescence alors que, dans d'autres secteurs, vous êtes prêts à faire fermer certains petits centres commerciaux qui animent des quartiers.

Je vous rappellerai aussi, par exemple, le cas de Pfister en Ville de Genève. Cette dernière est souvent venue à la commission d'aménagement pour nous demander de faire attention à préserver sur son territoire un certain nombre de zones industrielles par rapport aux rentrées fiscales. Il faut donc prendre tout cela en compte dans notre analyse.

En conclusion, le parti socialiste est favorable au renvoi en commission de ces deux propositions de motions, afin que l'on étudie le pour et le contre.

La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Virginie Keller Lopez, à qui il reste une minute et quarante-six secondes.

Mme Virginie Keller Lopez (S). J'aimerais dire que, de façon tout à fait personnelle, je suis très contente de la proposition de motion présentée par M. Guillaume Barazzone, parce que ce périmètre a effectivement connu bien des soucis en ville. C'est un des seuls projets que le gouvernement de gauche de la Ville avait donné à Pierre Muller, libéral, en lui confiant le mandat de créer une pépinière d'artisans dans ce lieu.

De nombreuses personnes du site de Serono avaient été relogées à cet endroit mais, malheureusement, Pierre Muller n'a pas fait son travail, et on a donc vu cette pépinière d'artisans se transformer en une espèce d'endroit où il y avait effectivement quelques artisans relogés, mais aussi des dépôts, la voirie, les bibliobus, bref, plusieurs choses un peu inutiles qui n'avaient rien à faire à cet endroit-là. Et le groupe socialiste a souligné à plusieurs reprises au Conseil municipal le désastre résultant de ce périmètre, qui offrait pourtant au centre-ville bien des avantages et des possibilités de développement.

Je dis donc trois fois oui à une discussion avec la Ville de Genève sur ce périmètre ! Il y a des choses à faire, des projets à réaliser, et on a déjà pris beaucoup de retard ! A Lausanne, ils ont réussi à transformer tout un quartier industriel en centre culturel, et c'est extrêmement animé, des gens de la ville entière sortent là-bas - je sais que, même à droite, on fréquente les lieux culturels de Lausanne. Genève doit donc aussi être capable de créer de tels lieux en ville ! On a besoin de ces périmètres. Il faudrait notamment y réfléchir dans le quartier de la Praille, parce que là aussi se trouvent des zones industrielles qu'il faudra développer pour pouvoir créer d'autres choses.

Je trouve donc que ce sont de bonnes idées, allons de l'avant et soyons créatifs !

Mme Michèle Künzler (Ve). J'aimerais juste intervenir brièvement. C'est effectivement partout qu'il faudra créer des quartiers durables, parce qu'il est simplement inadmissible de construire de manière non durable de nos jours. Il faut passer du stade de l'expérimentation à la généralisation ! C'est maintenant le moment de construire de façon nouvelle. Ces quartiers durables auront donc des formes différentes, mais j'espère bien qu'ils seront tous durables !

Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). J'aimerais simplement ajouter un commentaire sur notre proposition de motion démocrate-chrétienne. Je crois que, dans notre travail sur le principe d'un éco-quartier dans le périmètre des Charmilles, nous avons une très grande chance, c'est que des artisans et des industriels y aient été relogés. Je les ai rencontrés, et je crois qu'il est extrêmement important de tenir compte de leur avis, parce qu'ils travaillent dans ce lieu et le connaissent; ils seront donc les premiers intéressés à participer au développement de cet endroit comme zone mixte et j'en déduis qu'ils seront également les premiers interlocuteurs lors du travail en commission. Il nous faut donc véritablement prendre en compte leur opinion.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Au fond, les motionnaires proposent tous deux que l'on renvoie leur texte en commission, et c'est une excellente idée. Le Conseil d'Etat, pour sa part, est très heureux de voir venir ces deux objets qui sont loin de s'exclure.

L'un, la M 1783, s'inscrit dans le droit fil de la réponse que le gouvernement avait donnée à la M 1463 portant sur le même périmètre. L'autre revient sur une problématique qui est à peu près identique, à savoir la volonté de voir se développer des quartiers de qualité. Comme le disait à l'instant très justement Mme Künzler, il n'y a absolument aucune raison d'opposer les deux projets ! Il y en a d'autant moins que le terme d'éco-quartier n'est pas une marque labellisée, et qu'on ne sait pas exactement ce qui est reconnu comme étant un éco-quartier, que ce soit par ses habitants ou par des observateurs.

Il y a actuellement sur ce point la volonté de créer quelques labels, qui ne seront sans doute pas inutiles, mais c'est surtout le désir de développer des quartiers de qualité qui doit tous nous animer. Et c'est une idée aujourd'hui très forte, je le constate dans les rapports que je peux avoir avec les communes du canton. Il existe au sein des conseils municipaux une très forte volonté de s'assurer de la qualité des nouvelles constructions, et, si l'on peut expliquer que la façon dont on bâtit s'inscrit dans l'esprit d'un éco-quartier, cela débloque toute une série d'éléments et favorise l'acte de construire. Et en cela, c'est important.

Dans le même temps, nous rencontrons aussi le soutien des milieux immobiliers. Ce matin encore, nous recevions, avec mon collègue Mark Muller, l'Association des promoteurs immobiliers de Genève, qui nous expliquait qu'elle était extrêmement intéressée par l'expérience d'un éco-quartier à Genève, et nous avons discuté de la collaboration qui pourrait s'établir avec l'administration pour essayer de favoriser un tel projet.

C'est donc dire que nous sommes au milieu de préoccupations qui sont à la conjonction de soucis de protection de l'environnement et de la volonté de développer très rapidement la construction à Genève. Il est par conséquent tout à fait sensé que nous débattions de cela en commission et, d'ores et déjà, Mesdames et Messieurs les députés qui avez signé ces textes, je vous remercie de les avoir rédigés.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1730 à la commission d'aménagement du canton est adopté par 69 oui et 1 abstention.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1783 à la commission d'aménagement du canton est adopté par 72 oui (unanimité des votants).

M 1736
Proposition de motion de MM. Eric Stauffer, Henry Rappaz, Claude Jeanneret, Sébastien Brunny : Création d'une commission d'enquête parlementaire sur les responsabilités du Conseil d'Etat dans la débâcle de la BCGe

Débat

La présidente. Cette proposition de motion est également traitée en catégorie II, c'est-à-dire trois minutes par groupe.

M. Eric Stauffer (MCG). La présente proposition de motion n'a pas pour but de faire enfler la polémique sur la débâcle de la Banque cantonale de Genève... (Brouhaha.) ...mais bien au contraire d'établir une fois pour toutes les vrais coupables de cette catastrophe, qui coûtera près de 2,5 milliards de francs aux contribuables de ce canton. Ce texte dévoilera à la population genevoise le courage de ses élus, afin de faire toute la lumière sur ce qui s'est réellement passé durant les années 90 à 95, et qui a conduit ces mêmes élus à voter en 2000 une superprovision de 5 milliards de francs.

Le Mouvement Citoyens Genevois ne se fait guère d'illusions quant à l'issue de cet objet... (Commentaires.) ...au motif que les conseillers d'Etat de l'époque...

Des voix. C'est l'exposé des motifs !

M. Eric Stauffer. ...agissant comme autorité de contrôle, étaient pour certains les mêmes qui administraient ces institutions, et qu'ils ne manquent pas d'appuis auprès du Grand Conseil.

Lorsque l'on sait également que les juges d'instruction et autres autorités du pouvoir judiciaire ont été mis en place par les mêmes partis politiques qui ont fourni les dirigeants de la Banque et ses administrateurs, et qui agissaient par le biais de leurs conseillers d'Etat comme autorité de contrôle, en lieu et place de la Commission fédérale des banques, on peut nourrir quelques doutes quant à la réelle volonté de ce parlement de connaître toute la vérité, rien que la vérité.

Mesdames et Messieurs les députés, de quoi s'agit-il ? Je vais essayer de vous le synthétiser. Pour toutes les banques, l'autorité de contrôle est la Commission fédérale des banques, à l'exception des banques cantonales qui, par dérogation, peuvent déléguer le Conseil d'Etat comme autorité de contrôle. C'est ce qui s'est passé à Genève entre 1990 et 1995.

De 1990 à 1993, l'autorité de contrôle de la Banque cantonale et de la Caisse d'Epargne de Genève était le Conseil d'Etat et, de 1993 à 1995, la BCGe, fusion des deux entités, était elle aussi contrôlée par le gouvernement. Par déclaration volontaire, le Conseil d'Etat de l'époque a demandé le 1er janvier 1995 à la Commission fédérale des banques qu'elle reprenne son autorité de contrôle sur la Banque cantonale.

Nous savons - et vous aussi savez mieux que n'importe quel citoyen genevois - que toutes les affaires que nous traitons actuellement à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation sont - comme on nous le rabâche sans cesse - de vieux dossiers de la Banque cantonale datant des années 90. Et c'est précisément la période ciblée par la présente proposition de motion, qui vous demande de faire toute la lumière sur cette affaire, pour une question de respect envers nos concitoyens. En effet, c'est à ce moment-là que de grands, je dirai, caquelons magiques ont fait sortir ces milliards de pertes, pour arriver, en 2000, à la faillite de la Banque cantonale de Genève, ce qui vous a contraints à voter un crédit de 5 milliards de francs pour sauver cette banque. Depuis lors, la Fondation de valorisation a épongé quelque peu cette dette en vendant les biens, c'est-à-dire les casseroles de la BCG, et, finalement, nous aurons une perte qui avoisinera quand même les 2,1 ou 2,2 milliards.

Je reconnais qu'il va vous falloir du courage pour voter le présent objet... (Rires.) Si certains d'entre vous trouvent ce sujet drôle, Messieurs du PDC...

La présidente. Adressez-vous à la présidente !

M. Eric Stauffer. Je pense qu'un peu de respect vis-à-vis des concitoyens qui devront amortir cette dette sur un siècle ne vous ferait pas de mal ! Mais c'est vrai que lorsqu'on parle du bien-être des citoyens et du niveau des impôts à Genève, ça ne concerne plus personne de ce parlement, ou du moins pas certains groupes...

Je disais qu'il allait vous falloir un certain courage pour adopter cet objet, mais je pense que, sept ans après avoir voté dans ce même Grand Conseil 5 milliards de francs de superprovision, la population genevoise a le droit de connaître toute la vérité, parce qu'in fine c'est bien elle qui va devoir payer la dette résultant de toutes ces opérations.

Aujourd'hui, et c'est aussi à saluer, la Banque cantonale a repris du poil de la bête et elle recommence à renouer avec les bénéfices, puisqu'il y a eu cette superprovision du parlement genevois. La Banque cantonale est donc sauvée, et tant mieux, puisque, malgré ce qui s'est produit, c'est quand même l'un des fleurons de Genève. Cependant, j'estime qu'il est de notre devoir vis-à-vis de la population de faire toute la lumière sur ce qui s'est passé. Et la création de cette commission d'enquête va chercher spécifiquement à établir la responsabilité du Conseil d'Etat. Mais loin de nous, au MCG, l'idée de jouer les inquisiteurs; cette commission n'a que pour but d'exister pendant six mois - peut-être ne faudra-t-il pas plus longtemps - afin de rendre un rapport à ce Grand Conseil et à la population genevoise sur les responsabilités du gouvernement de l'époque.

En outre, ne prêtons pas le flanc aux rumeurs selon lesquelles tout est vérolé, car les juges, les administrateurs et les conseillers d'Etat d'alors étaient mis en place par les partis politiques. N'entrons pas dans cette logique, démontrons à toute la population que nous avons le courage de rétablir la vérité et de tirer des enseignements du passé, afin que ce qui est arrivé à la Banque cantonale serve de leçon pour toutes les générations futures et ne se reproduise jamais.

Je vous invite donc au nom de toute la population genevoise à soutenir la création... (Protestations.) ...de cette commission d'enquête...

La présidente. Il vous faut conclure, Monsieur le député !

M. Eric Stauffer. Madame la présidente, je conclus, mais je trouve vraiment que de mettre en catégorie II des sujets d'une telle importance...

La présidente. Mais je vous ai laissé tout le temps dont disposait le groupe MCG, c'est-à-dire six minutes !

M. Eric Stauffer. Oui, bien sûr... Mais c'est vrai qu'il faudra juste un siècle au contribuable genevois pour amortir cette dette, alors qu'on ne me laisse que trois minutes pour essayer de défendre... (Protestations.)

La présidente. Six minutes !

M. Eric Stauffer. Vous allez voir, Mesdames et Messieurs les députés, vous qui rigolez et qui vous moquez de la population...

La présidente. Ça suffit ! Je vais couper votre micro ! (Le micro est coupé.) Voilà, vous avez même eu trente secondes de plus ! (L'orateur continue à s'exprimer hors micro.) Non, Monsieur le député, ça suffit ! (Huées.) Ça suffit ! On se calme !

M. Eric Stauffer, hors micro. Je ne peux pas accepter de me faire insulter et qu'on me retire la parole !

La présidente. Ça suffit, nous ne sommes pas dans une cour de récréation ! (Applaudissements.)

M. Alberto Velasco (S). Tout d'abord, j'aimerais vous dire, Monsieur Stauffer, qu'il y a une erreur dans votre document: il est écrit 250 millions, mais je me demande s'il ne manque pas un zéro. Je vous laisse donc contrôler ce chiffre.

En outre, en lisant attentivement votre proposition de motion, j'ai émis de sérieux doutes, et je vais vous dire pourquoi. Premièrement, j'ai ressenti de la peur à la lecture de votre texte, sincèrement. En effet, vous mettez en cause les institutions de cette république, vous attaquez le Conseil d'Etat, la justice et, à la fin, vous vous en prenez même à la présidente de la Confédération.

Je me demande quel est réellement l'objet de cette proposition de motion et qui la commandite. En effet, Monsieur Stauffer, que dites-vous dans ce texte, oui, que dites-vous ? Vous demandez, cher collègue - et c'est incroyable - de disculper la direction et l'administration de la Banque cantonale et de charger le ou les conseillers d'Etat précédents. C'est quand même incroyable ! Vous êtes en train de dire à ce parlement que les directeurs et l'administration de la Banque cantonale n'ont rien à voir avec la débâcle, et que ce sont les conseillers d'Etat précédents et, le cas échéant, la présidente de la Confédération qui seraient responsables de tout. Soit ! Mais alors il y a une contradiction dans votre document ! En effet, vous dites au point 6 que la BCG a, de 1992 à 1995, manqué de diligence vis-à-vis du Conseil d'Etat parce qu'elle ne l'a pas informé de sa situation, alors que c'était sa mission de le faire.

Ensuite, vous affirmez que le Conseil d'Etat est responsable parce que, ayant eu des informations de la Banque cantonale, il n'a pas pris en charge la question. Alors, Monsieur Stauffer, de deux choses l'une ! Soit la Banque cantonale n'a pas informé le gouvernement, et par conséquent ce dernier ne savait pas ce qu'il en était. Et si c'est le cas, il ne pouvait donc pas prendre de mesures, ce dont vous l'accusez pourtant ! Soit... La BCGe aurait informé le Conseil d'Etat, mais vous n'avez aucune preuve, et il faudrait nous tenir au courant des raisons pour lesquelles il n'aurait pas agi.

Par ailleurs, vous le dites très bien, la Commission fédérale des banques avait la responsabilité du contrôle à partir de 1995. C'est vrai, or cela vous ne l'avez pas lu, Monsieur ! Il y a eu une commission d'enquête dans ce parlement, qui a travaillé pendant environ deux ans, et dont faisaient partie des députés de tous les groupes. Le problème, c'est que le Conseil d'Etat était convaincu que la surveillance de la Banque cantonale était, à partir de 1995, du ressort de la Commission fédérale des banques, c'est vrai qu'il y a eu cette difficulté, seulement...

La présidente. Il va falloir conclure, Monsieur le député !

M. Alberto Velasco. Mais cette proposition de motion est suffisamment grave pour qu'on lui donne la réponse nécessaire !

La présidente. Oui, mais il vous faut conclure !

M. Alberto Velasco. Et ce qui s'est passé, Monsieur, c'est qu'à un moment donné la Commission fédérale des banques a annoncé qu'il fallait prendre des mesures. Et le Conseil d'Etat et ce parlement ont agi comme ils le devaient. Alors, Monsieur Stauffer, vous dites que la Banque est sauvée. Mais croyez-vous qu'elle l'a été comme ça ? En effet, si on l'avait mise en faillite, il aurait fallu payer plus de 3 ou 4 milliards à cause des garanties qu'elle avait. Et elle a été secourue parce que le Conseil d'Etat de l'époque et notre Grand Conseil...

La présidente. Votre conclusion, s'il vous plaît !

M. Alberto Velasco. ...ont pris leurs responsabilités. Alors prétendre aujourd'hui dans cette proposition de motion que tous les conseillers d'Etat et les autres organes concernés n'ont rien fait, je trouve que ce n'est pas très correct ! Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste ne votera pas cette proposition de motion. (Applaudissements.)

M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion date du 22 janvier 2006, elle parle d'un trou de 4 milliards, alors qu'on en est aujourd'hui à environ 2,2 milliards.

Vous demandez la création d'une commission d'enquête parlementaire, mais c'est complètement inutile ! Ce n'est pas notre travail, et la justice encaisse... (Rires.) ...heu, la justice enquête depuis des années. Elle encaissera peut-être plus tard !

Une voix. Ce n'est pas si faux !

M. Frédéric Hohl. Des procédures sont en cours, il faut donc laisser la justice faire son travail, c'est pourquoi le groupe radical va bien évidemment refuser cette proposition de motion.

M. Olivier Jornot (L). Je m'apprêtais à vous confesser une certaine lassitude par rapport à cette proposition de motion, parce que nous avons déjà eu une commission d'enquête parlementaire sur le sujet de la Banque cantonale, que le MCG nous a déjà proposé plusieurs fois d'en créer de nouvelles, que chaque fois nous avons refusé, et que nous avons également rejeté régulièrement diverses propositions dans le même domaine, que ce soit lié à la Banque cantonale ou à la Fondation de valorisation. Or, finalement, en lisant l'exposé des motifs - ou plus exactement en entendant tout à l'heure l'auteur de la proposition de motion nous l'énoncer - je me suis dit qu'il y avait du bon dans ce texte. Et même de l'excellent ! Je lis: «[...] les conseillers d'Etat de l'époque agissant comme autorité de contrôle étaient pour certains les mêmes qui étaient administrateurs de ces institutions et ne manquent pas d'appuis auprès du Grand Conseil.» Je ne sais pas si cela vous dit quelque chose ?

Des voix. Oui ! (Rires.)

M. Olivier Jornot. Je poursuis: «[...] les mêmes partis politiques qui ont fourni les dirigeants de la banque et ses administrateurs, et qui agissaient par le biais de leurs conseillers d'Etat comme autorité de contrôle en lieu et place [...].» J'ai rarement lu un plaidoyer aussi efficace en faveur de la dépolitisation des conseils d'administration ! (Applaudissements.) Même hier soir, Mesdames et Messieurs les députés, je n'ai pas entendu plaidoyer plus vibrant en faveur des trois projets de lois sur la gouvernance !

Alors j'aimerais simplement dire à ce Grand Conseil qu'il est en effet nécessaire de séparer toutes ces casquettes. Et qu'il est important, comme nous l'avons fait pour la Banque cantonale, de mettre de l'ordre dans les conseils d'administration de nos établissements publics autonomes. Par conséquent, il faut rejeter cette proposition de motion et voter les trois projets de lois à la prochaine occasion. (Applaudissements.)

M. Pascal Pétroz (PDC). Le groupe démocrate-chrétien ne votera pas cette proposition de motion. Ce n'est bien évidemment pas pour contester le fait que la débâcle de la Banque cantonale est un scandale, mais parce qu'on nous ressasse sans arrêt les mêmes choses depuis des temps immémoriaux.

Qu'il me soit d'ailleurs permis ici de rappeler qu'une commission d'enquête parlementaire a déjà été créée. Elle a enquêté sous la majorité de l'Alternative - il y a donc déjà de nombreuses années - sur la débâcle de la Banque cantonale de Genève et a abouti à un certain nombre de conclusions ayant notamment débouché sur la création de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale. Parallèlement à cela, des procédures pénales ont été diligentées à l'encontre des anciens organes de la Banque cantonale de Genève et une action civile a été menée contre le réviseur.

Il y a quelques mois déjà, nous avons eu l'occasion de nous prononcer sur une proposition de motion du Mouvement Citoyens Genevois, qui demandait également la création d'une enquête parlementaire sur la BCG. Nous avions alors essayé dans cette enceinte d'expliquer aux auteurs de ce texte que ce qui devait être fait l'avait été, que des procédures étaient en cours et que, par conséquent, soumettre des propositions inutiles n'était pas forcément adéquat.

Cette proposition de motion a donc été balayée. Elle a obtenu le score extraordinaire de 7 ou 8 voix, mais c'est vrai qu'il est toujours un peu difficile de savoir combien de députés font partie de ce mouvement... Il y a donc eu le score extraordinaire de 8 voix et, maintenant que le Mouvement Citoyens Genevois a vu sa proposition de motion précédente retoquée, plutôt que de tenir compte des échecs de ce type de projet, eh bien, on l'a mis à la porte, il revient par la fenêtre !

Or maintenant, ce nouveau projet ne consiste plus en une commission d'enquête parlementaire chargée d'investiguer sur la débâcle de la Banque cantonale de Genève, mais sur la responsabilité des conseillers d'Etat de l'époque dans le cadre de cette débâcle. Très franchement, la différence est totalement incongrue et, pour les motifs qui ont conduit ce Grand Conseil il y a quelques mois à rejeter avec vigueur le texte précédent, il appartient à ce parlement d'en faire de même ce soir, et j'espère que ce sera le résultat du vote final.

M. Gilbert Catelain (UDC). Le MCG n'a pas été mêlé au scandale de la BCG, et l'UDC non plus, puisqu'elle ne figurait pas dans le conseil d'administration de cet établissement. Le MCG a sans doute tout intérêt à exploiter ce filon, bien que je ne sois pas sûr que ce parti soit l'auteur exclusif de cette proposition de motion. En effet, cette dernière est probablement le fruit non pas uniquement du seul MCG, mais également d'un membre de l'UDC qui a incité le MCG à rédiger ce texte.

M. Stauffer a récemment fait des déclarations à Madrid sur la manière dont le MCG s'est constitué, mais nous savons, au sein de l'UDC, qui tire les ficelles à ce niveau-là. Les projets que l'on ne peut pas faire passer au sein de l'UDC, on les soutient via le MCG. (Protestations.)

Mais ce n'est pas l'intérêt de cette proposition de motion - parce qu'elle présente bien un avantage - qui nous place face à un choix: celui de faire confiance au pouvoir judiciaire - bien que les lenteurs de ce dernier montrent qu'on a effectivement du souci à se faire quant à un jugement possible des auteurs de cette déconfiture - ou faire confiance à une commission issue de ce parlement. Or la question est de savoir si cette commission sera objective, et qui la composera, puisque la majorité des partis qui la formeront devront à la fois essayer de trouver la vérité et défendre les membres du conseil d'administration de la BCG.

Entre les deux choix, je crois qu'il n'y a pas à hésiter. Le seul pouvoir indépendant capable d'enquêter sur la BCG, qu'on le veuille ou non, ce n'est pas une commission issue de ce parlement, qui ne sera pas indépendante, mais bien le pouvoir judiciaire. En réalité, le seul intérêt de cette proposition de motion réside dans le fait que nous devons effectivement dépolitiser les conseils d'administration, et je suis heureux que M. Stauffer l'ait enfin compris ! J'espère d'ailleurs que le MCG tiendra le même langage en novembre, lorsque nous devrons voter les projets de lois sur les TPG et les SIG.

Le deuxième intérêt de ce texte, c'est de montrer que, finalement, un établissement bancaire n'a rien à faire avec l'Etat, qu'il doit être privé et que nous devons donc couper les ponts entre l'Etat et la gestion des affaires bancaires.

Pour tous ces motifs, je vous propose de ne pas voter cette proposition de motion. Merci. (Applaudissements.)

La présidente. Merci, Monsieur le député. Monsieur Marcet, je ne peux pas vous donner la parole, parce que le temps dévolu à votre parti est épuisé.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Le premier élément que je dois relever, c'est que l'exposé de cette proposition de motion est factuellement faux. En effet, s'il est exact qu'il y a eu un certain nombre de modifications quant à la surveillance des banques dans la période précédant et suivant 1995, ce qui est absolument certain c'est que jamais le Conseil d'Etat n'a eu la compétence d'exercer un contrôle sur la situation des provisions suite à la diminution des valeurs de gages et de la solvabilité des débiteurs.

Avant et après la fusion, c'est exclusivement la Commission fédérale des banques qui a eu cette compétence, et elle l'a exercée par l'intermédiaire des réviseurs des établissements qu'ont été la Caisse d'Epargne et la Banque hypothécaire, et qu'est la Banque cantonale. Et c'est précisément contre ces réviseurs et la Commission fédérale des banques, parce que le Conseil d'Etat estime que ces organes ont failli à leur devoir, que la République et canton de Genève est actuellement en train de plaider. C'est donc dire que la prémisse sur laquelle s'appuient les invites de cette proposition de motion est erronée, et que ce texte doit par conséquent être rejeté. On pourrait même s'arrêter là.

Mais vous me permettrez tout de même d'ajouter deux considérations. D'abord, on a jugé tout à l'heure utile de relire les premiers alinéas de l'exposé des motifs, ce que je regrette vivement, car ces lignes mettent très clairement en question la séparation des pouvoirs, jettent l'opprobre sur les juges d'instruction et autres autorités du pouvoir judiciaire, et je trouve que cela est indigne de notre parlement.

Ma deuxième remarque - que j'avais déjà faite à l'occasion d'une précédente proposition de motion portant à peu près sur le même thème - c'est que l'on peut réellement se demander à qui bénéficient ces rideaux de brouillard que l'on essaie d'envoyer. Aujourd'hui, la Chambre d'accusation est en train d'examiner les actes finaux de la procédure d'instruction, avec la perspective que d'ici la fin de l'année ou le début de la suivante, le Procureur général puisse prendre ses réquisitions, c'est-à-dire rédiger l'acte d'accusation de façon à renvoyer en jugement ceux qui sont aujourd'hui concernés pénalement.

Or pensez-vous vraiment qu'il est particulièrement malin, dans cette situation-là, d'offrir des échappatoires à des gens qui ont fait l'objet d'une longue instruction pénale, pour qu'ils puissent ensuite se prévaloir devant une autorité de jugement du fait que, par hypothèse, cette instruction n'aurait pas été suffisamment bien menée, et qu'elle doit être complétée par une seconde instruction qui serait éventuellement, à la suite de cette proposition de motion, menée par notre parlement ? Je pense véritablement que c'est là rendre un très mauvais service et à notre république et à nos institutions, et je vous invite donc bien sûr à refuser cette proposition de motion. (Applaudissements.)

Mise aux voix, la proposition de motion 1736 est rejetée par 76 non contre 7 oui.

M 1740
Proposition de motion de Mmes et MM. Hugo Zbinden, Michèle Künzler, Ariane Wisard-Blum, Roger Deneys, Christian Brunier, Emilie Flamand, François Thion, Lydia Schneider Hausser, Catherine Baud, Elisabeth Chatelain : Compensons les émissions de CO2 liées au transport aérien

Débat

La présidente. Cette proposition de motion est elle aussi traitée en catégorie II, c'est-à-dire trois minutes par groupe.

M. Hugo Zbinden (Ve). Cette proposition de motion est motivée par trois constats: d'abord, le changement climatique est bien réel, et vous connaissez tous les conséquences dramatiques qui nous attendent. Ensuite, l'aviation contribue d'une manière très importante à l'effet de serre. Si on ne prend en compte que les émissions de CO2, les avions produisent 10% du total de ce type d'émissions en Suisse.

De plus, les avions émettent non seulement du CO2, mais aussi d'autres polluants, et ils provoquent en particulier un effet que vous connaissez tous, à savoir les traces de condensation qu'on aperçoit dans le ciel. Vous voyez très bien le matin que le ciel est encore bleu, puis les avions arrivent et ce dernier commence à se voiler gentiment. A première vue, on pourrait penser que c'est bien, que cela va réduire les irradiations du soleil, et par conséquent la température de la terre, mais c'est faux, car ce voile diminue davantage, face à la radiation thermique, la rémission de la terre. Vous savez tous que, lorsque la nuit est claire et sans nuages, il fait froid le matin et que, à l'inverse, si le ciel est couvert, la matinée est chaude. Eh bien, c'est exactement par ce phénomène que l'impact des avions va bien au-delà de l'effet des émissions de CO2, et si l'on prend en compte ces effets, la contribution de l'aviation au réchauffement climatique constitue 20% voire 30% de toutes les émissions.

Le troisième constat, c'est que le trafic aérien est en forte progression. Le nombre de passagers à l'Aéroport de Genève a doublé en dix ans, et a passé de 5 à 10 millions par année. Pour août 2007, on a constaté une augmentation de 16% par rapport à août 2006. Du reste, il est évident que l'Aéroport de Genève et le Conseil d'Etat se félicitent de cette augmentation des passagers, parce que cela rapporte de l'argent à la caisse de l'Etat et permet d'organiser quelques fêtes, mais malheureusement il faut aussi voir le revers de la médaille. C'est donc un problème.

Forts de ce constat, que vous propose-t-on ? Nous vous suggérons que les émissions de CO2 liées aux voyages des employés de l'Etat et des établissements publics autonomes soient compensées, c'est-à-dire qu'on achète des certificats à des entreprises privées, comme Myclimate, qui s'engagent à investir cet argent dans des mesures d'économie d'énergie ou de production d'énergie de manière durable et renouvelable. Ces économies d'énergie sont souvent réalisées dans le tiers-monde ou dans les pays où il est possible d'économiser beaucoup en dépensant peu d'argent.

Dans notre texte, nous proposons également une alternative, c'est-à-dire qu'on pourra aussi utiliser cet argent pour soutenir des projets d'économie d'énergie en tant que canton. Cela coûtera un peu plus cher, mais ainsi les investissements restent au canton. Ce n'est d'ailleurs pas une idée nouvelle, un certain nombre d'institutions l'ont déjà adoptée, comme l'Office fédéral de l'énergie, quelques facultés à l'ETHZ, l'Université de Saint-Gall ou la Ville de Lucerne. Il faut dire que cette compensation des émissions est assez à la mode. Aujourd'hui, vous pouvez acheter des tee-shirts qui sont compensés, ou passer la nuit dans un hôtel et compenser vos émissions, et la Coop a récemment annoncé qu'elle allait compenser toutes les émissions liées au transport aérien des fruits. Evidemment, ces compensations sont une manière de rassurer les consommateurs, on veut éviter que le client, qui devient de plus en plus responsable, se culpabilise et se prive de ce genre de petits plaisirs. Donc, effectivement, c'est un peu dangereux.

Toutefois, le but de cette proposition de motion n'est pas du tout d'apaiser la mauvaise conscience des fonctionnaires qui voyagent en avion, mais de les sensibiliser. Et le fait qu'ils soient obligés, chaque fois qu'ils se déplacent par les airs, d'acheter ces certificats qui coûtent 5 ou 10% du prix de leur billet va les sensibiliser un peu. Mais il est aussi clair - et on l'a écrit dans l'exposé des motifs - que ce n'est pas pour autant que l'on aimerait augmenter les budgets de voyages. Je pense surtout à l'université, où c'est un problème récurrent...

La présidente. Il vous faut conclure, Monsieur le député !

M. Hugo Zbinden. Oui, j'arrive, j'arrive ! (Rires.) Puisque je suis bernois, je devrais avoir un temps de parole un peu plus long ! Bref, à l'université, il y a franchement du tourisme dû aux conférences, et l'on pourrait très bien réduire un peu le nombre des vols.

Pour conclure, je vous invite donc à soutenir cette proposition de motion et à la renvoyer au Conseil d'Etat, pour qu'on puisse sensibiliser les fonctionnaires et la population genevoise à ce problème, et qu'on prenne le leadership dans la protection du climat à Genève.

La présidente. Je vous rappelle que nous sommes en catégorie II, c'est-à-dire que chaque groupe dispose d'un temps de parole de trois minutes.

M. Eric Stauffer (MCG). Il est quand même assez cocasse de voir le groupe des Verts... C'est le quatrième ou cinquième texte parlementaire qui traite ce soir de problèmes écologiques, de Minergie, et c'est assez extraordinaire de voir votre engagement, alors que votre ministre ici présent, pour tout ce qui concerne la pollution ambiante, notamment celle qui est liée aux Cheneviers, fait vraiment pâle figure... (Brouhaha.) ...or là, que tous les citoyens genevois soient pollués quotidiennement, ça, ça ne vous pose aucun problème ! Alors on serait très curieux de voir la réaction de votre conseiller d'Etat par rapport, notamment, au four rotatif qui ne répond pas aux normes antipollution...

La présidente. Nous traitons du transport aérien, Monsieur le député !

M. Eric Stauffer. Oui, justement ! Vous savez, les Cheneviers sont juste dans l'axe d'atterrissage des transporteurs aériens, et donc toute cette fumée et ce mélange entre les Cheneviers, les avions et j'en passe... Vous voyez, Mesdames et Messieurs des Verts, quand on veut être cohérent en matière de politique écologique, il ne faut pas uniquement en parler, il faut aussi agir ! Et quand le peuple genevois vous fait confiance en plaçant un magistrat de ce parti... (Remarque.) ...dans l'exécutif, il faut également qu'il agisse ! Il ne doit pas seulement prononcer de beaux discours et se rétracter lorsqu'on vient le mettre en face de ses contradictions !

Je terminerai en disant que je me suis emporté parce que, vous qui êtes censée assurer la bonne tenue des débats, vous n'êtes malheureusement pas intervenue quand je me faisais insulter par l'un de mes collègues alors que j'avais la parole ! (Protestations.) J'en ai terminé !

M. René Desbaillets (L). Il est évident que le groupe libéral ne niera pas les considérants de cette proposition de motion, puisque nous savons bien que le problème des émissions de CO2 est réel sur notre planète. Toutefois, nous considérons que l'invite sert en quelque sorte à se donner bonne conscience à moindre coût, puisque la proposition qui nous est faite ne va pas diminuer d'un gramme les émissions de CO2 sur terre, en tout cas pas dans notre pays. Nous estimons par conséquent que cette proposition de motion intervient en raison de l'approche des élections. On parle de cela, on veut lutter contre le CO2... (Protestations) ...mais, dans les faits, il n'y a aucune diminution de ces émissions.

Alors permettez-moi de vous dire que, si l'on veut véritablement diminuer le CO2, il faut être conscient de ce que l'on fait réellement, notre main droite ne doit pas ignorer ce que fait la gauche, et il convient surtout d'éviter les aberrations telles qu'il y en a actuellement sur notre planète, et particulièrement en Suisse.

J'aimerais vous citer en exemple l'expérience que j'ai vécue ces deux dernières années: comme tout viticulteur, je rajoute un peu de sucre, notamment dans le Chasselas, afin de mieux l'équilibrer... (Exclamations.) La loi nous y autorise, alors nous l'appliquons ! Mais là n'est pas le problème. L'année passée, je commande quelques centaines de kilos de sucre, et que reçois-je ? Du sucre français ! (Exclamations.) Elaborant des AOC genevoises et étant titulaire du label «Genève Région – Terre Avenir», mon premier geste fut de téléphoner au fournisseur pour lui rappeler mon label et lui dire que je souhaitais au moins du sucre suisse, si ce n'est pas genevois. Or, que m'a-t-on répondu - et je précise que je suis remonté jusqu'à la direction de l'Union suisse des paysans ? Qu'il faut éliminer les réserves de guerre de la Suisse ! Alors voilà, nous, viticulteurs, éliminons les réserves et faisons tourner les stocks de guerre.

Puis, cette année, j'ai évidemment recommandé un peu de sucre... (Rires.) ... et mon fils me dit: «Papa, tu es efficace, on a reçu du sucre d'Aarberg !»

La présidente. Monsieur le député, sur le transport aérien !

M. René Desbaillets. J'étais donc tout content de recevoir du sucre d'Aarberg, et ce nom figurait en gros caractères, mais en regardant ce qui était écrit derrière, j'ai lu: «Origine: Thaïlande» ! (Rires. Applaudissements.) Alors voilà comment on lutte contre le CO2 en Suisse ! On ferme les sucreries helvétiques, on demande aux betteraviers de laisser leurs terres en jachère, alors que 850 millions de personnes crèvent de faim, et on nous fournit du sucre de Thaïlande ! Est-ce ainsi qu'il faut lutter contre le CO2 ? Nous devons donc réagir contre cela, et ne pas mettre de taxes pour avoir bonne conscience. (Applaudissements.)

M. Eric Leyvraz (UDC). Chers collègues, je suis désolé mais, comme viticulteur, je vais devoir vous parler de cette proposition de motion. Voilà un texte plein de bonnes intentions, mais difficilement applicable, et je suis gentil.

Rappelons d'abord des faits généraux. Les problèmes de trafic aérien échappent aux cantons, car ils sont du ressort de la Confédération. Il existe des accords internationaux, des aéroports contenant des terrains binationaux, etc. Donc, si des mesures doivent être prises, elles le seront seulement au niveau des Chambres fédérales. La Commission européenne veut inclure en 2012 les émissions de CO2 de l'aviation dans le système communautaire des quotas. Cela concernera tous les vols partant et arrivant dans l'Union européenne. Il faut donc discuter d'un régime d'émissions sur le plan international, et sous les auspices de l'Organisation de l'aviation civile internationale, car si les vols intérieurs de l'Union européenne sont couverts par le protocole de Kyoto, il n'en va pas de même pour les trajets internationaux. Et, pour mémoire, l'aviation produit environ 2% des émissions de CO2.

Mais revenons à la proposition de motion. L'Etat n'a souvent pas d'autre choix que de faire voyager ses employés en avion pour gagner du temps. Or, si l'on veut faire un calcul juste des émissions imputées à l'employé, il faudrait diviser celles-ci par le nombre de passagers de l'avion et déduire l'énergie qu'aurait induite un transport différent, en train par exemple. Mais tout cela est loin d'être réaliste, entraînerait un surplus inutile de travail - et par conséquent d'énergie - et induirait des coûts supplémentaires pour un Etat qui cherche désespérément à retourner à l'équilibre.

Cette proposition de motion est donc le fruit du travail de gens sympathiques, mais qui, là, se nourrissent franchement d'illusions, raison pour laquelle le groupe UDC rejettera malheureusement ce texte.

M. Michel Forni (PDC). Voyager en avion ou en train peut amener à des comparaisons, mais aussi à des réflexions. Et cela coûte cher non seulement sur le plan financier mais également en termes d'émissions de gaz, notamment carbonique. Or le consommateur, c'est-à-dire le voyageur, peut remédier à ce problème par différents procédés, qui vont du système de compensation, tel qu'il est présenté dans cette proposition de motion, à d'autres alternatives, par exemple le choix éclairé. Je vous signale d'ailleurs que dans certaines sociétés de transport, par exemple la SNCF, on vous propose un éco-comparateur, c'est-à-dire un logiciel qui calcule le prix, la durée et le nombre de kilogrammes de CO2 émis dans l'atmosphère, et qui permet de choisir votre type de voyage - train, voiture, avion de ligne - et ensuite de vous engager.

Il existe également d'autres possibilités de voler en tant que citoyen responsable, par exemple en adhérant à un programme déjà développé par quelques compagnies et qui vise l'antiréchauffement. Ce dernier est proposé par certains moyennant un supplément du prix du transport, par d'autres par le biais d'avions plus convenables et économes, et par d'autres, enfin, en reportant simplement la taxe sur le prix payé par le passager.

D'autre part, il faut souligner une certaine forme d'inefficacité dans la gestion des transports, qui contribuent, notamment par les retards à l'atterrissage, à consommer et à développer du CO2.

Il existe également d'autres risques, comme celui de payer plusieurs fois des taxes incitatives ou coercitives mais, de toute façon, le bon problème n'est pas traité, puisque ce qu'il faudrait en réalité, c'est l'avion propre. Cet avion propre est déjà un phénomène lourdement étudié; il fait probablement appel à des réductions du poids, mais surtout de la facture de carburant, offre davantage de sièges et dégage moins de CO2. Il privilégierait aussi les biocarburants alternatifs, face notamment au kérosène.

Par ailleurs, il faudrait éviter de détruire l'effort réalisé par certaines compagnies, qui tentent de concilier la responsabilité sociétale et sociale, et qui offrent déjà des programmes de compensation inclus dans le prix du voyage.

De plus, n'oublions pas que ce type de proposition de motion, même si elle est pavée de bonnes intentions, intervient dans une nouvelle bataille des valeurs et peut apporter une forme d'incohérence entre une liberté ordonnée - c'est-à-dire régulée par une conduite parfois répressive dans le choix du voyageur - et, d'autre part, le concept de «progrès maîtrisé», qui peut aussi apporter des interrogations morales sur le rythme du voyage, l'autonomie du voyageur et la liberté de circuler.

Pour toutes ces raisons, et en gardant à l'esprit que le progrès n'est pas uniquement une entreprise individuelle mais bien une aventure collective, le PDC propose, face à cette dualité, le renvoi de cet objet à la commission de l'environnement.

M. Patrick Saudan (R). Le groupe radical est plutôt en phase avec la philosophie qui sous-tend cette proposition de motion. Toutefois, je n'ai pas tout à fait les mêmes chiffres que M. Zbinden. En effet, les émissions de CO2 générées par le transport aérien oscillent entre 0,9%, selon les statistiques officielles norvégiennes, et 3%, selon les statistiques officielles américaines. Mais peu importe, vous avez raison, le trafic aérien est en augmentation et représente 10% du total des transports.

J'aimerais également dire que cette proposition de motion est quand même un peu inaboutie, dans la mesure où nous aurions aimé savoir combien de trajets aériens sont effectués chaque année par les employés de l'Etat et les entreprises qui s'y rattachent. De plus, nous aurions souhaité connaître le pourcentage de ces vols qui pourrait être remplacé par une alternative ferroviaire. Et, dans ce cas de figure, si c'est par convenance personnelle que l'employé choisit l'avion, qui doit payer la compensation climatique: l'Etat ou l'employé ?

C'est pour répondre à toutes ces questions que le groupe radical propose également de renvoyer cette proposition de motion à la commission de l'environnement. (Applaudissements.)

Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Il me semble que de taxer tout le monde n'est pas la vraie solution. En effet, la population en a marre d'être inquiétée par l'Etat pour tout et rien, et il existe d'autres manières de faire de l'écologie. Eduquer les gens dans leur quotidien, par exemple. Il y a beaucoup à faire dans ce domaine, et ça ne leur coûte rien, au contraire, ils économisent.

D'autre part, c'était peut-être au moment où les compagnies low cost ont commencé à fleurir qu'il aurait fallu agir. Car vous n'êtes pas sans savoir que, aujourd'hui, on peut partir en week-end pour moins de 100 F !

Vous dites aussi que Genève est une ville internationale, qui doit accueillir les touristes; certes, mais je ne vois pas comment les voyageurs venant d'Asie, d'Australie ou d'Amérique vont arriver jusqu'à chez nous ! Peut-être à la rame ? Mais alors, à mon avis, ils changeront d'idée de destination...

Par ailleurs, vous ne pouvez pas systématiquement trouver des solutions uniquement dans l'argent et les taxes. L'argent ne fait pas le monde, même si, malheureusement, c'est ce que tout le monde croit ! Je pense que si les gens comprenaient que c'est l'intelligence humaine qui doit gouverner le monde et non l'argent, ce serait bien, et on arriverait enfin à reprendre les choses en main. Hélas, je crois que c'est utopique, et je ne serai d'ailleurs pas là pour le voir, mais l'espoir fait vivre !

Pour ces raisons, je refuserai cette proposition de motion ainsi que son renvoi en commission, parce qu'il reste encore une autre question, un passage du texte que je n'ai pas bien compris: pourquoi est-il demandé de voyager de temps en temps en classe économique au lieu de la classe affaires ? Excusez-moi, mais il me semble que tous les passagers sont dans le même avion ! Ils ne voyagent peut-être pas dans la même classe, mais partent bien du même endroit pour se rendre dans le même lieu ! Ils paient certes leur billet d'avion plus cher, mais je vous promets qu'ils ne vont pas arriver avec l'avion coupé en deux ! Je ne comprends donc pas le sens de cette phrase !

En conclusion, arrêtez de toujours taxer, taxer, parce qu'on en a marre ! On n'a plus les moyens, et aujourd'hui, même avec un travail décent à 100%, il reste encore des gens qui doivent être assistés. Alors permettez plutôt aux touristes de venir dépenser leur argent dans notre pays, pour que cela puisse un peu renflouer les caisses de l'Etat. Et trouvez d'autres moyens pour faire de l'écologie !

Mme Lydia Schneider Hausser (S). Le trafic aérien est effectivement sûr et de moins en moins onéreux pour les clients. Il est également vrai que le volume de ce trafic augmente et, avec lui, l'utilisation du kérosène, et donc la pollution de notre atmosphère. Par conséquent, les mécanismes présentés dans cette proposition de motion, tels que compensation ou utilisation parcimonieuse de l'avion, doivent peut-être encore être complétés pour se révéler vraiment efficaces sur le terrain.

Mais en tous les cas, ces mécanismes sont une prise de responsabilité, une démarche pédagogique permettant à terme un équilibre environnemental meilleur. A l'Etat, ils viendront s'ajouter à d'autres dispositifs qui, au début, paraissaient peut-être un peu inaboutis ou risibles - tels que le recyclage de papier, la mobilité douce dans les services, etc. - mais qui ont petit à petit pris de l'importance. En effet, maintenant, plus personne ne rit ou trouve insensé de récupérer le papier, et je pense que, pour les avions, les transports, il faut fournir des efforts en commençant par les services de l'Etat, et en espérant que cela puisse ensuite se généraliser dans toute la république.

Pour l'ensemble de ces raisons, nous soutiendrons le renvoi de cette proposition de motion au Conseil d'Etat ou en commission de l'environnement.

La présidente. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Roger Deneys, à qui il reste une minute et vingt-cinq secondes.

M. Roger Deneys (S). Merci, Madame la présidente, ce sera amplement suffisant !

M. Desbaillets a mis le doigt sur un vrai problème, à savoir la question de la réalité des coûts pour les transporteurs aériens. En effet, ces derniers ne paient actuellement pas de taxes sur les carburants, ce qui leur permet de créer des entreprises low cost et de faire de l'avion un moyen de transport plus concurrentiel que tous les autres existant aujourd'hui. Et c'est bien cela le problème ! C'est la raison pour laquelle on peut trouver du sucre de Thaïlande, encore que, Monsieur Desbaillets, j'aimerais insister sur le fait que certaines parties de France sont plus proches d'ici que le canton d'Argovie ! Il est donc préférable d'acheter du sucre français provenant peut-être d'une région très rapprochée que d'en faire venir du canton d'Argovie ! (Protestations.) C'est une question économique !

Par ailleurs, j'ai calculé, par rapport au prix d'un voyage Genève-Montréal - 6000 km aller-retour - le coût de la compensation pour un fonctionnaire qui va étudier un dossier au Canada: cela revient à 71 euros supplémentaires sur son billet d'avion. Comme on sait bien que ce n'est pas tous les jours que des fonctionnaires se rendent là-bas, il s'agit de frais modestes. Il semble donc raisonnable de ne pas interdire cela et de voir la réalité des coûts.

Je vous invite par conséquent à soutenir cette proposition de motion, ou à la renvoyer en commission si vous estimez que c'est utile, mais le Conseil d'Etat pourrait tout à fait s'en occuper directement, vu les montants en jeu. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo, Roger !

La présidente. Merci, Monsieur le député. Madame Flamand, je suis désolée, mais le temps de parole des Verts est écoulé... (Protestations.) Mais j'applique le règlement. (Commentaires.) Alors, il faudra rediscuter de notre loi ou présenter des amendements, parce que telle que je l'applique, chacun a disposé de son temps de parole. Et les Verts étant les auteurs de la proposition de motion, ils ont eu six minutes, même six minutes et vingt-cinq secondes !

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Bien sûr, je ne m'exprimerai pas maintenant sur l'incinérateur des Cheneviers, puisque ce sujet interviendra un peu plus loin dans notre ordre du jour, mais je me réjouis, lorsqu'on en discutera, de pouvoir vous convaincre que c'est l'un des incinérateurs les plus propres d'Europe.

En revanche, je parlerai de cette proposition de motion, dont, si j'ai bien compris, le renvoi en commission a été demandé par le groupe radical, et assurément de façon fort opportune. En effet, si vous décidez de renvoyer ce texte en commission, ce sera notamment l'occasion d'affiner un certain nombre de chiffres mentionnés dans cette proposition de motion au sujet des effets du trafic aérien, qui ne sont pas négligeables. En 1998, alors que l'utilisation des avions était moins importante qu'aujourd'hui, le trafic aérien représentait déjà 13% des émissions totales de CO2 du pays. Evidemment, ce chiffre a augmenté, et ces 13%, si l'on se rapporte au critère de la «société à 2000 watts» dont on parle beaucoup, représente déjà 500 watts d'énergie fossile, cela vaut donc la peine de s'y intéresser.

Au-delà de cela, on pourrait se pencher sur bien d'autres sujets en matière de trafic aérien et, notamment, sur toutes les substitutions possibles. On pourrait par exemple se demander à partir de combien de kilomètres on décide qu'on peut prendre l'avion, ou dans quelles circonstances il faut se déplacer par d'autres moyens, par exemple en train, dont les émissions sont nettement inférieures.

Toutes ces raisons m'amènent, au nom du Conseil d'Etat, à dire que nous n'avons rien contre un renvoi de ce texte en commission. Toutefois, si vous souhaitez nous le renvoyer directement, c'est bien volontiers que nous y répondrons.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1740 à la commission de l'environnement et de l'agriculture est adopté par 74 oui contre 8 non.

M 1741
Proposition de motion de Mme et MM. Eric Leyvraz, Philippe Guénat, Antoine Bertschy, Gilbert Catelain, Olivier Wasmer, Sandra Borgeaud : Genève, capitale de l'environnement, à la pointe des technologies nouvelles

Débat

La présidente. Comme les précédentes, cette proposition de motion est traitée en catégorie II, avec trois minutes par groupe.

M. Eric Leyvraz (UDC). Je vais vous proposer une bouffée d'air pur pour terminer cette session.

Des voix. Ah !

M. Eric Leyvraz. Nous en avons bien besoin, n'est-ce pas ? Quand j'ai trouvé, il y a une année, sur un site italien, une explication de l'utilisation des produits photocatalytiques pour dépolluer l'air, cela m'a paru vraiment extraordinaire. En creusant le sujet, j'ai appris qu'une église avait été construite à Rome sur ces principes. Grâce à l'effet autonettoyant de ces produits, elle est restée, sept ans après, aussi blanche et immaculée et blanche qu'au départ.

Une voix. Et vive le blanchiment !

M. Eric Leyvraz. L'idée de neutraliser des pollutions automobiles ou de chauffage là où elles sont émises est remarquable. Il faut souligner le fait que ce produit reste actif année après année. C'est en effet le propre d'un catalyseur de permettre une réaction et de se retrouver libre après cette dernière: il n'y a donc pas de saturation.

Le projet européen PICADA pour l'étude de la photocatalyse a été un succès. Je vous ai donné une explication succincte du mode de fonctionnement de ces produits dans l'énoncé de la motion. On peut simplement constater que le produit actif est une matière abondante largement utilisée dans différentes industries, sans toxicité pour l'homme ou l'environnement, c'est-à-dire que l'on ne crée pas un nouveau problème en essayant d'en éliminer un premier; on ne se retrouve pas avec un déchet d'utilisation dont on ne sait que faire.

Nous avons réuni à Genève, avec mon collègue Guénat, le 16 mai 2007, des représentants d'entreprises du bâtiment et les inventeurs italiens qui sont venus de Rome pour présenter leur technologie. L'intérêt a été très grand et j'ai le plaisir de constater qu'une entreprise genevoise est maintenant en discussion pour représenter ces produits en Suisse. Il s'agit de la maison As Media. J'étais présent en septembre à l'inauguration du premier tunnel au monde entièrement revêtu d'une peinture photocatalytique avec éclairage optimisé: le tunnel Umberto 1er, qui passe sous le Quirinal à Rome. Ce sont 9000 mètres de peintures photocatalytiques ! Vingt-cinq mille voitures par jour empruntent quotidiennement ce tunnel: les premiers résultats vont tomber dans quelques jours, et l'on se réjouit de les avoir !

La souplesse de ces produits est extrême: on peut les utiliser avec le béton, le crépi, les peintures. Ils sont aussi efficaces à l'intérieur des maisons. Leur pouvoir de nettoyage de l'air est extrêmement élevé, puisque, dans des conditions optimum, un mètre carré de peinture peut dépolluer 200 mètres cubes d'air ! Je viens de recevoir un rapport technique sur 12 000 mètres carrés de blocs photocatalytiques qui ont été posés dans une rue de Bergame... Les oxydes d'azote dans cette rue ont baissé de 30 à 66% en un an ! Il semble donc intéressant d'utiliser cette technique pour des bâtiments publics, des peintures de façades.

L'Etat doit montrer sa volonté d'emprunter la voie du développement durable; il doit également examiner la possibilité que la prochaine Maison de l'environnement soit une vitrine de ces nouveautés intelligentes. Je vous demande donc de bien vouloir accepter cette motion et de la renvoyer à la commission des travaux, où se discuteront les dépenses liées à cette Maison de l'environnement.

Mme Janine Hagmann (L). Quel beau titre ronflant que celui de cette motion: «Genève, capitale de l'environnement, à la pointe des technologies nouvelles» ! Le jour où Al Gore reçoit le prix Nobel, Genève veut être la capitale de l'environnement ! Il faudra pédaler un peu, Mesdames et Messieurs, pour rattraper Al Gore.

Quoi qu'il en soit, dépêchons-nous de renvoyer cette motion à la commission des travaux ! Soyez honnêtes, Mesdames et Messieurs: qui a compris quelque chose à la formule qui figure en haut de la page ? Moi, je vous avoue ne rien avoir compris ! Par conséquent, je serais très contente d'étudier de quoi il s'agit à la commission des travaux.

En fait, pour arriver à être la capitale de l'environnement, nous devrions copier l'Italie... Je pense que cela ne va pas être facile !

On nous dit que l'église Dives in Misericordia, construite à Rome, a gardé, six ans après, son éclatante blancheur du début... Si je me souviens du latin que j'ai appris - je me le rappelle mieux que les formules qui sont en haut de la page - Dives in Misericordia veut dire: riches en miséricorde... Riches, nous ne le sommes pas, mais, la miséricorde, nous l'avons ! Nous avons toujours beaucoup de compassion pour les maux d'autrui.

Par conséquent, dépêchons-nous de renvoyer cette motion en commission pour pouvoir étudier toutes ces merveilles, qui nous permettront d'être la capitale de l'environnement !

La présidente. Merci, Madame la députée. A quelle commission, voulez-vous la renvoyer ?

Des voix. Aux travaux  !

La présidente. Bien, au travaux. Monsieur le député, Michel Forni, je vous donne la parole.

M. Michel Forni (PDC). Ce projet de motion développe une intéressante découverte: la photocatalyse et suggère de l'utiliser en Suisse. Il faut relever que l'un des inventeurs de ce procédé vient de recevoir le prix Nobel de chimie, il y a quarante-huit heures, pour le même type de réaction.

Cette synergie fait donc appel à une application dans le traitement de l'air grâce au titane. Certes, la formule chimique est un peu difficile à comprendre, mais je vous rappelle que cette application existe déjà, puisqu'on la retrouve dans l'aéronautique, dans les sous-marins nucléaires, dans les piercings, dans les prothèses dentaires. Il y a donc déjà une bonne biocompatibilité. L'intérêt dans ce cas serait d'encourager son utilisation dans le domaine de la construction et, surtout, que cette méthode soit le fer de lance contre la pollution, notamment contre les polluants atmosphériques - comme cela a été dit - y compris les nitrites et les dioxydes d'azote.

Concilier progrès, protection de l'environnement et développement économique peut aussi permettre d'envisager, de rêver, d'autres projets insolites. Il est évident que le plus efficace, c'est encore de modifier le comportement. Et l'image d'une Genève «suisso-genevoise», ville écologique optant pour un développement durable reste intéressante; elle pourrait séduire également les gens de la Genève internationale.

Etant donné que l'efficience est la clé du développement moderne et que les ressources sont devenues rares, les entreprises doivent maximiser leurs performances, non seulement techniquement vis-à-vis de la communauté financière, mais aussi envers l'homme et son environnement, notamment dans la capture et le stockage du CO2.

Ce produit existe sous deux formes: le goudron - qui est déjà développé par les Japonais et qui entraîne, il faut le dire aussi, un surcroît d'environ 20 à 30% du prix traditionnel - et le béton purificateur d'atmosphère. Cela permettrait de redorer le blason de notre propreté helvétique et de supprimer des pics de pollution en utilisant la compétitivité et la diversification des entreprises genevoises au service du développement durable.

C'est la raison pour laquelle le groupe PDC vous recommande de transmettre cette motion à la commission des travaux ou de l'environnement... Plutôt, aux travaux.

Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Comme vous pouvez le constater, cette motion a été déposée par des députés de l'UDC... Ce qui ne m'a pas empêché de la cosigner ! (Commentaires.) Pour la simple et bonne raison que c'est le texte qui m'intéresse et non pas le parti ou la personne !

Je me suis également rendue à Rome, où j'ai eu la possibilité de constater par moi-même l'efficacité de ces produits... Mesdames et Messieurs, la voilà, votre solution, puisque vous vous plaignez de la pollution des avions ! Utilisons cette méthode, même sur les voitures: cela résoudra pas mal de problèmes ! Et il ne sera plus nécessaire de taxer davantage les avions !

Je trouve par ailleurs qu'il faudrait respecter ceux qui veulent que Genève devienne la capitale de l'environnement, au lieu de faire de l'ironie. Même si ce n'est qu'un voeu pieux, rien n'empêche d'essayer ! (L'oratrice est interpellée par M. Roger Deneys.) Exactement, Monsieur Deneys ! J'ai refusé la précédente, parce que cette motion apporte justement la solution à la précédente ! Mais, comme cette motion provient de l'UDC, je sais déjà quel sera le sort qui lui sera réservé: vous allez la refuser parce que l'idée ne vient pas de vous ! On connaît le clivage gauche - droite: il ne va malheureusement pas cesser aujourd'hui ! (Rires. Commentaires. La présidente agite la cloche.)

En outre, quand on peut se référer à des réalisations à l'extérieur à nos frontières, il faut les examiner sans oeillères. Il faut essayer de trouver des solutions en suivant, justement, les bons exemples. Il ne faut pas toujours être chauvins et dire que nous sommes les meilleurs ! D'autres peuvent aussi nous donner des conseils, et nous devrions les écouter de temps en temps.

Pour toutes ces raisons, je souhaite que cette motion soit, pour commencer, renvoyée à la commission de l'environnement - car c'est, me semble-t-il, tout d'abord un problème d'environnement - et, pourquoi pas, avec le préavis de celle-ci, à la commission des travaux ensuite.

M. Pablo Garcia (S). Dans cette motion, l'UDC nous propose un projet qui, de prime abord, peut paraître très intéressant... On y parle de dépollution de l'air en milieu urbain, un moyen de capter et d'éliminer une partie de l'oxyde d'azote, réduisant ainsi les pics de pollution. Ce procédé est basé sur le dioxyde de titane; c'est une nanosubstance qui se rapproche des particules ultra fines. C'est important de s'en souvenir pour la suite. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)

Mais, j'ai mené une recherche un peu plus poussée, et j'aimerais vous soumettre quelques points d'interrogation... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) En effet, ces technologies sur les matériaux de construction et de revêtement ont été menés sous la supervision d'un consortium regroupant plusieurs sociétés, dont GMT Construction, qui fabrique et commercialise les produits dérivés de ce procédé; Millennium Chemicals, qui s'occupe des revêtements des voies de circulation - toujours sur la base de ce procédé - et, enfin, Italcementi, qui est spécialiste dans les ciments et les matériaux de construction. Il n'est donc pas étonnant que la commercialisation de ces produits ait commencé dès 2005. Pourtant - comme l'a souligné une personne qui a parlé avant moi - des projets-tests sont encore conduits en Europe, notamment un projet qui est conduit par le Conseil général des Hauts-de-Seine et qui ne prendra effet, avec les premiers résultats, que le 20 octobre de cette année.

L'expérimentation est donc en cours. Mais cela, vous ne voulez pas le savoir, Messieurs les députés de l'UDC, car, pour vous, le temps presse. A une semaine des élections nationales, cette motion est un écran de fumée... (Exclamations.) ...pour cacher le désert de vos politiques et de vos propositions en matière d'environnement ! (Applaudissements.)

C'est une action bien maladroite, car, d'après l'exposé des motifs, vous préconisez une application immédiate dans les bâtiments publics, comme les hôpitaux et les écoles... Si vous aviez pris le temps de vous plonger dans le rapport du professeur Kevin Dreger, du Laboratoire national américain sur les effets sur l'environnement et sur la santé des particules ultra fines, vous sauriez qu'il y a encore de sérieux doutes quant à l'impact sur la santé de ces particules ultra fines, notamment dans les poumons et sur l'épiderme ! Dans votre précipitation, vous avez par conséquent omis le plus important: toute avancée technologique doit être mesurée à l'aune des effets sur la santé publique et à partir du principe de précaution ! Cela a dramatiquement été constaté avec le scandale lié à l'amiante ! Mais personne n'est dupe, ni dans ce parlement ni parmi la population ! Personne n'est dupe sur vos gesticulations pseudo-écologiques de la dernière heure ! (Brouhaha.)

Les socialistes soutiennent l'innovation et la recherche sur les matériaux non polluants. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Voilà pourquoi ces nouvelles technologies nous intéressent, mais pas au prix du principe de précaution et de la santé de nos concitoyens ! La seconde invite de votre motion est prématurée; elle ne peut par conséquent pas obtenir notre soutien ! (Applaudissements.)

M. Eric Stauffer (MCG). Je ne rejoins pas le point de vue des socialistes, pour la simple et bonne raison que toute nouvelle technologie mérite d'être étudiée en commission. (Rires. Exclamations.) Cela mérite que l'on demande des expertises et les comptes rendus existants sur ces procédés et d'en rendre rapport. Ensuite, nous verrons bien ! En ce qui nous concerne, nous soutiendrons le renvoi en commission de cette motion.

On parle beaucoup d'environnement ce soir, et, comme l'a dit notre conseiller d'Etat Robert Cramer, nous allons traiter un autre problème lié à l'environnement - c'est un objet qui se trouve un peu plus loin dans l'ordre du jour - et qui lui aussi - c'est marrant: quelle coïncidence ! - a trait à l'Italie... Mais de la mafia italienne, ce qui n'est pas tout à fait pareil ! (Commentaires.)

Toutefois, on peut douter que notre conseiller d'Etat soit au courant, puisqu'il ne connaît même pas le salaire du président des SIG, comme il s'en est ouvert aujourd'hui dans la «Tribune de Genève» ! (Commentaires.) Nous nous réjouissons, Monsieur le conseiller d'Etat, d'aborder ce point en séance plénière.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Nous serons bons joueurs, Monsieur Leyvraz: nous accepterons le renvoi en commission de cette motion tout en sachant très bien que la méthode préconisée dans cette proposition représente, malheureusement, un transfert de pollution. En effet, le bilan écologique global du ciment est plutôt catastrophique. Par ailleurs, le rutile, dont vous parlez dans votre motion, est un métal rare. Et le ciment, c'est vrai, représente 6% du CO2 au niveau mondial. Il vaut bien mieux utiliser le bois. Ce procédé a une action d'autonettoyage des façades plus que de dépollution. De plus, cela a un coût et cela consomme de l'énergie.

Quoi qu'il en soit, pour avoir toutes les explications possibles en la matière - et je m'abstiendrai de lire tout ce que j'ai trouvé sur Internet - nous accepterons le renvoi de cette motion en commission. Nous y obtiendrons certainement toutes les informations utiles pour savoir si cette technique vaut la peine d'être utilisée.

M. Georges Letellier (Ind.). Je vais être un peu clément à l'égard de mon ex-parti... (Exclamations.)

Une voix. Lequel ? (Rires.)

M. Georges Letellier. ...bien que ce projet, de faire de Genève la capitale de l'environnement, ait été lancé par moi-même, lorsque j'ai monté le Mouvement blochérien genevois avec M. Jovanovitch. Voilà, pour la petite histoire !

Maintenant, j'aimerais quand même exprimer mon étonnement - je n'ai pas de bretelles, mais si j'en avais elles seraient dans mes chaussettes - de voir qu'un parti comme l'UDC, qui défend l'idée d'une Suisse indépendante forte, neutre, patriotique, se permette de faire de la publicité pour des produits étrangers ! (Exclamations.) Cela ne passe évidemment pas ! D'autant moins que l'EPFL a développé des procédés à base de vernis autocatalytiques, ainsi que CIBA Spécialités Chimiques, par exemple. Beaucoup d'industries suisses qui fabriquent des vernis sont capables de faire ce genre de produits.

Pour ma part, je trouve qu'il faut donner la préférence à des sociétés suisses avant de faire de la publicité pour les Italiens ! Cela suffit avec les déchets de M. Brunier ! (Rires.) Il faut quand même s'accrocher ! Parce que nous avons besoin de travail chez nous ! Nous avons besoin de monter des usines. (Brouhaha.) Messieurs les socialistes, peut-être que cela ne vous intéresse pas, mais, moi, cela m'intéresse en tant qu'entrepreneur ! (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Nous parlons un langage différent ! Je ne critique pas ce que vous avez dit...

La présidente. Monsieur le député, adressez-vous à la présidente et parlez en face de votre micro ! Merci !

M. Georges Letellier. Ai-je besoin de micro, Madame la présidente ? (Exclamations.) J'en ai besoin ! C'est un peu une boutade à l'égard de mes collègues de l'UDC, mais j'aimerais qu'ils renvoient ce projet en commission pour faire une enquête et mettre des produits suisses à la place des produits étrangers. C'est tout !

M. Gilbert Catelain (UDC). Je voudrais juste rappeler deux choses à M. Lopez... (Exclamations.) ...qui ne connaît peut-être pas M. Leyvraz... (Rires. Commentaires. Exclamations.) Pardon... Il s'appelle comment ? Garcia. Pardon, Monsieur Garcia ! Excusez-moi ! (Exclamations.) ...donc, qui ne connaît pas M. Leyvraz et qui n'a pas non plus d'expérience dans le domaine de l'environnement, alors que M. Leyvraz pratique l'agriculture biologique depuis vingt ans et qu'il a été sensibilisé à toutes les questions écologiques.

L'écologie, on le sait bien, n'est pas une question de parti: c'est une question de sensibilité ! Ce n'est pas parce que l'on est de gauche que l'on est écologiste: on peut être écologiste et être à droite ! Monsieur Garcia, je vous prie de reconnaître à M. Leyvraz son expérience dans le domaine, étant donné qu'il produit des vins biologiques depuis plus de vingt ans - au moins ! Il aura certainement l'occasion de vous le dire.

Vous évoquez le principe de précaution... Je suis étonné qu'en tant que pro-européen vous fustigiez la politique européenne. Je suis toutefois heureux de vous l'entendre dire ! Effectivement, l'Europe n'est peut-être pas aussi précautionneuse que nous... C'est en tout cas le message que vous avez fait passer.

Je rappelle aussi que les expériences qui ont été conduites à Rome, et notamment ce tunnel qui a été inauguré début septembre, ont reçu le soutien de toute la municipalité de la Ville de Rome. Et c'est en raison de ce soutien politique que ces expériences et ces travaux ont pu être réalisés ! Sans ce soutien politique, notamment des partis de gauche de la ville de Rome, jamais - jamais ! - ces sociétés n'auraient pu mettre en oeuvre ces expériences. Mais ce n'est parce qu'il y a un partenariat avec des entreprises de construction qu'il faut remettre en cause les travaux qui ont été effectués et qui apportent un plus pour la population, puisque les émissions ou la teneur de matières polluantes dans l'atmosphère ont diminué de 40 à 60% ! (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)

Voilà, je voulais simplement rétablir les faits et permettre à ce parlement de prendre une décision en toute connaissance de cause.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Monsieur Leyvraz, il vous reste cinquante-cinq secondes, je vous passe la parole.

M. Eric Leyvraz (UDC). Merci, je serai très rapide. Je vous dirai, Monsieur Martinez... (Rires.) Monsieur Garcia ! Excusez-moi, ça tourne au gag, je suis désolé ! (Exclamations.) Laissez-moi parler ! (Applaudissements.) Donc, je vous dirai que j'exploite depuis quinze ans le plus grand domaine viticole bio de Suisse. Alors ne dites pas que cette motion est électoraliste, elle a été déposée au mois de février ! Si j'arrive exactement une semaine avant les élections, c'est vraiment que je suis très fort...

Et puis, je vous rappelle aussi que c'est la troisième motion que je dépose concernant l'environnement. C'est dire que c'est un sujet qui me tient à coeur. Alors, s'il vous plaît, ne dites pas que c'est électoraliste !

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Comme l'a dit très justement Mme Hagmann, nous sommes en présence d'une technique scientifique assez complexe... (Rires.) C'est la raison pour laquelle il me semblerait adéquat, plutôt que de débattre en commission sur les différentes sortes de ciment, sur les problèmes environnementaux que pose la photocatalyse et d'autres questions de ce genre, de renvoyer directement cette proposition au Conseil d'Etat. Les services de l'administration, d'après une note que j'ai sous les yeux, sont intéressés d'étudier ce procédé, souhaitent faire rapport au Grand Conseil, souhaitent même - si j'ai bien compris - proposer que nous fassions une expérience pilote dans ce domaine à Genève.

En effet, ce procédé offre un certain nombre de potentialités pour lutter contre la pollution de l'air ou, en tout cas, pour permettre que certaine particules qui se trouvent dans l'air restent accrochées sur les murs au lieu de se déposer sur les poumons des gens. Cela vaut donc vraiment la peine que l'on essaie de creuser cette motion.

Pour cela, il me semble préférable que l'administration, dans un premier temps, examine cette motion et fasse rapport au Grand Conseil. Si ce rapport vous convient, vous l'accepterez. Si vous souhaitez l'approfondir, nonobstant ce que l'on a dit tout à l'heure, vous pourrez toujours poursuivre la réflexion en commission. Mais, je n'ai pas l'impression, à ce stade, que les débats en commission vont beaucoup nous avancer.

Je suggère donc d'aller dans le sens du motionnaire et de renvoyer directement cette proposition au Conseil d'Etat. (Applaudissements.)

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je dois tout de même vous soumettre la première proposition, c'est-à-dire le renvoi à la commission de l'environnement et de l'agriculture.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1741 à la commission de l'environnement et de l'agriculture est rejeté par 71 non et 2 abstentions.

La présidente. Je vous soumets maintenant l'autre proposition de renvoi, à la commission des travaux.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1741 à la commission des travaux est rejeté par 70 non et 1 abstention.

La présidente. Je vous soumets enfin le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.

Mise aux voix, la motion 1741 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 52 oui et 18 abstentions.

Motion 1741

La présidente. Je vous rappelle, chers collègues, que le séminaire sur la RPT - réforme de la péréquation financière et de la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons - aura lieu lundi 15 octobre à 11h30, dans cette même salle. Je vous souhaite une très belle fin de semaine.

La séance est levée à 22h55.