République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de M. Gabriel Barrillier, président.

Assistent à la séance: Mmes et MM. Charles Beer, président du Conseil d'Etat, David Hiler, Pierre-François Unger, François Longchamp, Isabel Rochat, Michèle Künzler et Pierre Maudet, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. David Amsler, Jacques Béné, Eric Bertinat, Vincent Maitre et Philippe Morel, députés.

Annonces et dépôts

Néant.

PL 11063-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat établissant le budget administratif de l'Etat de Genève pour l'exercice 2013 (LBu-2013) (D 3 70)

Suite et fin du troisième débat

Le président. Nous poursuivons notre examen du projet de budget 2013 et passons au budget d'investissement par politique publique.

Budget d'investissement (tome 2)

P - ACTIVITES DE SUPPORT ET PRESTATIONS DE MOYENS

Mise aux voix, la politique publique P «Activités de support et prestations de moyens» est adoptée.

Q - ENERGIE

Mise aux voix, la politique publique Q «Energie» est adoptée.

A - FORMATION

Mise aux voix, la politique publique A «Formation» est adoptée.

B - EMPLOI, MARCHE DU TRAVAIL

Mise aux voix, la politique publique B «Emploi, marché du travail» est adoptée.

C - ACTION SOCIALE

Mise aux voix, la politique publique C «Action sociale» est adoptée.

D - PERSONNES AGEES

Mise aux voix, la politique publique D «Personnes âgées» est adoptée.

E - HANDICAP

Mise aux voix, la politique publique E «Handicap» est adoptée.

F - ENVIRONNEMENT

Mise aux voix, la politique publique F «Environnement» est adoptée.

G - AMENAGEMENT ET LOGEMENT

Mise aux voix, la politique publique G «Aménagement et logement» est adoptée.

H - SECURITE ET POPULATION

Mise aux voix, la politique publique H «Sécurité et population» est adoptée.

I - JUSTICE

Mise aux voix, la politique publique I «Justice» est adoptée.

J - MOBILITE

Mise aux voix, la politique publique J «Mobilité» est adoptée.

K - SANTE

Mise aux voix, la politique publique K «Santé» est adoptée.

L - ECONOMIE

Mise aux voix, la politique publique L «Economie» est adoptée.

M - FINANCE ET IMPOTS

Mise aux voix, la politique publique M «Finance et impôts» est adoptée.

N - CULTURE, SPORT ET LOISIRS

Le président. Nous sommes saisis de deux amendements de l'UDC. Le premier concerne la référence 1010533, Nautique - Parc, Plage - CR 06.08 Direction générale de l'eau, et demande de reporter les crédits d'investissement ouverts par la loi 10533. Le second a trait à la référence 2010719, Crédit de programme 2011-2014 - Instruction publique - CR 03.13 Services partagés et logistiques: «Dépenses: -735 000 F». Madame la députée Meissner, je vous cède la parole. Pouvez-vous présenter ces deux amendements en même temps ? (Remarque.) Non ? Très bien, alors commençons par le premier.

Mme Christina Meissner (UDC). Merci, Monsieur le président. Il est clair qu'on dit toujours qu'il faut s'intéresser... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...au budget de fonctionnement, parce que les investissements, comme leur nom l'indique, sont des investissements, et qu'il y a donc lieu de les encourager. Mais il faut aussi y faire attention, parce que quelquefois cela entraîne un certain nombre de coûts ! Pour une ligne de tram, par exemple, il faut ensuite engager des conducteurs de tram, etc. Par conséquent, l'investissement devrait aussi faire l'objet de toute notre attention, parce qu'on finit toujours par avoir des coûts supplémentaires suite aux investissements que l'on fait, et que l'on fait de manière extrêmement grandissante en ce moment dans notre canton, à tel point d'ailleurs qu'on est obligé de les financer en faisant augmenter la dette. (Brouhaha.)

Les deux amendements de l'UDC sont orientés par rapport à deux aspects spécifiques. Pour l'un, il s'agit de reporter la part du crédit d'investissement qui a été prévue au budget 2013 concernant le projet de plage aux Eaux-Vives... (Brouhaha.)

Le président. Permettez-moi, Madame la députée...

Mme Christina Meissner. Ils sont un peu dispersés !

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous arrivons bientôt au terme de ce pensum ! Je vous demande donc de faire preuve d'un peu de patience et de courage, et d'écouter votre collègue. Poursuivez, Madame la députée.

Mme Christina Meissner. Merci, Monsieur le président. Je disais donc que le premier amendement proposé vise à reporter le crédit d'investissement de 48 millions prévu pour la plage des Eaux-Vives, puisque ce projet est encore frappé d'un recours, toujours pendant au Tribunal administratif. Mais même si aujourd'hui le recours était levé - ce qui n'est pas le cas - eh bien les travaux ne commenceraient jamais en 2013, c'est simplement impossible ! Cela étant, il y a lieu de reporter la part du crédit qui avait été prévue pour cette année, parce qu'elle n'a pas de raison d'être dans ce budget, et c'est ce que je vous demande de faire. Mais ça ne préjuge absolument pas de notre adhésion ou non à la plage elle-même, qui est une autre affaire. Il s'agit juste d'avoir une transparence comptable pour cette année.

Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Là encore, rappelons qu'un budget est une autorisation de dépense, pas une obligation ! Il se pourrait - et nous l'espérons très fort - que le tribunal tranche enfin d'ici à deux mois, puisqu'il y a eu au moins trois échanges d'écritures. On devrait enfin arriver au terme de ces travaux, et il y a quelques études relatives à des recherches archéologiques qui sont maintenant à bout touchant, ainsi que des travaux de préparation qui ne devraient pas être freinés, dans l'hypothèse favorable où il y a la levée de ces oppositions. Par conséquent, si on ne dépense pas, vous aurez eu votre gain pour cette année et, si on dépense, eh bien on se réjouit d'inaugurer la plage bien plus vite que prévu !

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous allons voter sur cet amendement de Mme Meissner.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 49 non contre 10 oui et 9 abstentions.

Le président. Nous passons maintenant au second amendement, et je donne la parole à Mme Christina Meissner. (Remarque.) Ah, excusez-moi, c'est notre collègue et ami Florey qui souhaite s'exprimer.

M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Comme il est expliqué succinctement dans le développement figurant sur cette demande d'amendement, le Conseil d'Etat avait déposé un projet de loi - le PL 10829 - proposant d'ouvrir un crédit extraordinaire de 5 400 000 F pour la réalisation d'interventions artistiques le long de la ligne de tramway reliant Cornavin à Bernex - TCOB - puis l'avait retiré, voyant que notre Grand Conseil allait purement et simplement le refuser. Suite à cela, il est intervenu auprès des communes et leur a écrit un courrier dans lequel il indiquait qu'il avait trouvé une solution et qu'il pourrait passer directement l'investissement par le Fonds cantonal d'art contemporain, contournant ainsi la décision du Grand Conseil de refuser cet investissement.

Nous estimons que cela n'est pas correct eu égard à la décision qu'aurait prise le Grand Conseil et nous proposons donc, par cet amendement, de supprimer purement et simplement la dépense prévue pour l'année, soit 735 000 F. En effet, sur le fond, si le Conseil d'Etat a déclaré, par le biais d'un deuxième courrier envoyé aux communes, qu'il s'engageait, via ce fonds, à considérer ce projet comme prioritaire, contournant ainsi nos décisions, nous estimons dès lors qu'il ne sait pas vraiment quoi faire de ce fonds et qu'il désire simplement l'investir dans des projets pour lesquels nous n'avons même pas les moyens d'investir et, comme je le disais, contourner une décision du Grand Conseil. Pour cette raison, si nous voulons être cohérents avec ce que nous allions décider concernant le PL 10829, il convient d'accepter cet amendement et donc de refuser cet investissement qui, aux yeux de ce Grand Conseil, ne sert strictement à rien.

M. Charles Beer, président du Conseil d'Etat. Je dirai simplement quelques mots pour vous préciser, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, que tout ce qui est inscrit dans les budgets, du point de vue du Fonds cantonal d'art contemporain, est scrupuleusement au même montant que les années précédentes, où les variations sont engendrées par la loi qui vient le doter. Je peux donc comprendre quelques mouvements d'humeur mais, en l'occurrence, établir un vote budgétaire sur une question d'un vote conditionnel qui aurait pu, le cas échéant, aller dans votre sens, Monsieur le député, c'est une construction que nous ne saurions bien évidemment pas suivre. Ce qui est le plus important - et ce que tout le monde note - c'est qu'une grosse dépense d'investissement n'aurait pas passé; nous avons donc effectivement décidé d'y renoncer et de réaliser un certain nombre d'objets en collaboration avec les communes, soit exactement dans le même esprit et avec la dotation ordinaire ainsi que des financements privés, répartis sur plusieurs années. Et cela n'est pas directement de la compétence du Grand Conseil.

Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Nous allons à présent nous prononcer sur le deuxième amendement de l'UDC, que j'ai lu tout à l'heure.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 59 non contre 20 oui et 4 abstentions.

Mise aux voix, la politique publique N «Culture, sport et loisirs» est adoptée.

Le président. Je salue à la tribune la présence de Mme Danielle Oppliger, ancienne collègue députée. (Applaudissements.)

O - AUTORITES ET GOUVERNANCE

Mise aux voix, la politique publique O «Autorités et gouvernance» est adoptée.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, les politiques publiques P et Q ayant été votées en début de séance, nous sommes arrivés au terme de l'examen du budget d'investissement par politique publique. Comme d'habitude, je vais interrompre la séance quelques minutes afin que l'on puisse mettre à jour la documentation relative au PL 11063, ce qui nous permettra de voter ce projet de loi dans son ensemble. Je suspends donc la séance et vous donne rendez-vous dans une dizaine de minutes !

La séance est suspendue à 17h16.

La séance est reprise à 17h26.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons nos débats. Vous avez reçu sur vos pupitres la dernière version du PL 11063 tel qu'issu du troisième débat. Comme convenu, j'ouvre la phase des déclarations finales. Je vous rappelle qu'il est prévu cinq minutes par groupe, cinq minutes par rapporteur et cinq minutes pour le Conseil d'Etat, avant le vote final. La parole est à M. le rapporteur de majorité Guy Mettan. (Remarque.) Vous souhaitez vous exprimer à la fin, Monsieur le rapporteur ?

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de majorité. Ecoutez, non, Monsieur le président, je vous remercie ! Je pensais que les groupes s'exprimeraient avant les rapporteurs, mais si ce n'est pas le cas, il n'y a pas de problème. Je voulais simplement vous dire, Monsieur le président, que si je ne méritais pas le titre de rapporteur de majorité il y a quelques heures encore, maintenant j'ai l'impression de pouvoir à nouveau mériter cette appellation... (Exclamations. Applaudissements.) ...puisque, entre 14h et maintenant, soit 17h30, nous avons enfin pu retrouver une majorité.

J'aimerais aussi dire qu'effectivement ce budget a été éprouvant pour tout le monde. Il y avait des enjeux qui ont été importants, chaque parti a pu s'exprimer à leur sujet, et je pense que chacun d'entre eux a cru bien faire en prenant ses positions. Je souhaite en tout cas remercier particulièrement les services du département des finances, pour qui cet exercice aura été extrêmement éprouvant, extrêmement long et extrêmement difficile. Ils ont travaillé pendant de longs mois pour réussir à faire en sorte que notre république soit dotée de ce budget, et je crois que cet effort mérite d'être souligné. Le secrétariat général du Grand Conseil ainsi que le Bureau ont également dû beaucoup travailler pour préparer ces différentes séances, ce qui mérite aussi d'être relevé.

Le budget qui nous est proposé, comme tous les budgets déficitaires, n'est pas idéal: 31 millions, c'est trop pour certains, et pour d'autres ce n'est peut-être pas assez, parce qu'ils auraient souhaité mettre l'accent sur certaines politiques publiques qu'ils jugeaient importantes et qu'ils trouvent sous-dotées à cause des restrictions qui ont été adoptées. Pourtant c'est le meilleur choix possible, et je ne peux que vous engager, Mesdames et Messieurs les députés, à voter maintenant ce budget. Je remercie aussi les différents partis qui ont décidé de soutenir la république.

J'ai été frappé de voir que, lors des dernières semaines, plusieurs personnes m'ont abordé dans la rue pour parler du budget. Ça ne m'était jamais arrivé ! Ça fait douze ans que je siège dans ce Grand Conseil et j'ai été à trois ou quatre reprises rapporteur pour le budget, mais jamais personne - je parle du citoyen dans la république - ne m'avait parlé du budget, parce que c'est quelque chose qui passe au-dessus du citoyen moyen. Il y a certes les lobbyistes qui s'activent, c'est sûr, mais pas le citoyen, or j'ai croisé plusieurs fois dans la rue des gens qui m'ont dit qu'ils espéraient qu'on aurait un budget. Je crois que les citoyens, avec toute cette dramaturgie qui entoure le budget, ont pris conscience de l'importance qu'il y avait à avoir un budget et se sont aussi rendu compte qu'ils voulaient un budget. Contrairement à ceux qui ne vont pas le voter, moi j'ai l'intime conviction que la majorité des citoyennes et citoyens de cette république veulent un budget. Et c'est ce que je vous engage à faire maintenant en l'acceptant.

M. Roger Golay (MCG), rapporteur de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, aujourd'hui on peut constater qu'une majorité de ce parlement, tout comme le Conseil d'Etat, a choisi la facilité plutôt que la difficulté à rétablir des finances saines dans notre canton. Le signal ne sera pas lancé au Conseil d'Etat afin que nous puissions avoir, les années à venir, des budgets et bien sûr des comptes bénéficiaires.

Aujourd'hui, c'est un peu comme le marathonien qui parvient quasiment au terme de sa course et qui s'arrête à trois mètres de la ligne d'arrivée, simplement parce qu'il manque d'énergie et d'enthousiasme pour atteindre l'objectif qu'il s'était fixé au départ de la course. En l'occurrence, on s'arrête sur un déficit de 31 millions, alors que ce n'était pas grand-chose de trouver les économies nécessaires afin de parvenir à un équilibre budgétaire. Malheureusement, ce parlement, comme je l'ai dit au tout début de mon intervention, choisit la facilité, l'oreiller de paresse, et on continuera encore et encore à avoir des déficits. Mais un jour on devra se mettre devant le fait accompli, à savoir qu'il faudra couper dans les prestations de la population, et ces coupes seront très douloureuses, puisque l'avenir n'est pas aussi certain qu'il pouvait l'être il y a encore quelques années.

J'en ai terminé, mais j'invite encore ceux qui sont hésitants au sein du PLR, car je sais qu'ils sont relativement divisés... (Exclamations.) ...à rejoindre les rangs du comité qui préconise le refus de ce budget déficitaire.

M. Eric Leyvraz (UDC), rapporteur de première minorité. Le budget déficitaire va être adopté, dont acte, mais le groupe UDC ne l'acceptera évidemment pas, et nous déplorons cette fuite en avant, avec des dépenses qui ne sont pas maîtrisées ainsi qu'un déficit structurel qui s'installe et perdure - vous dites qu'il est de l'ordre de 100 millions, mais je pense que c'est plus: au moins 150 millions - malgré une dette et des engagements abyssaux. Ce qu'oublie ce parlement, c'est que les factures et les dettes finissent toujours par se payer, et je trouve que dans cet hémicycle il y a le sentiment diffus que les choses finissent par s'arranger, une espèce de croyance selon laquelle, avec le temps, l'inflation mange la dette - bref, que ce n'est pas grave. Eh bien dans le monde normal, auquel l'Etat n'échappera pas, finalement ce n'est pas comme cela que ça se passe ! Et à force de jouer les financiers à la limite de la rupture, le réveil à la réalité sera d'autant plus douloureux qu'il aura été tardif.

L'UDC désire un Etat fort, qui remplit ses tâches régaliennes, or nous avons affaire à un Etat boursouflé, à un Etat qui en fait trop, dans des domaines qui ne le regardent pas directement. Nous devrons passer par une étape de réflexion et de redéfinition du périmètre de son action, sinon nous allons droit dans le mur, comme pour les caisses de pension.

M. Roger Deneys (S), rapporteur de troisième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes sont extrêmement soucieux de la discipline budgétaire, et c'est vrai que, pour nous, voter un budget n'est pas un acte anodin. En même temps, quand on parle d'un budget comme celui-ci, avec un déficit annoncé de 31 millions sur 8 milliards, eh bien on peut se demander si nous faisons courir des risques inconsidérés à la population genevoise ou non. Alors de deux choses l'une: soit on pense que c'est grave, que ce déficit est insupportable, et dans ce cas-là la question non seulement de faire des économies, mais aussi de générer des nouvelles recettes, doit se poser, soit on pense que ce déficit n'est pas forcément réel, n'est pas si important, et dans ce cas-là on peut se contenter de déclarations sur des économies et ne pas envisager de nouvelles recettes.

Nous venons de recevoir les comptes 2012, et l'écart entre les comptes 2012 et le budget 2012 se monte, si on enlève les caisses de pension, à 653 millions de francs. Le déficit dans le projet de budget 2012 s'élevait à 350 millions, et les comptes, quand on retire les caisses de pension, présentent un excédent de 303 millions. Eh bien un écart aussi considérable, Mesdames et Messieurs les députés, c'est aussi la preuve que de chipoter ici pour 31, 40 ou 100 millions n'est pas un exercice très responsable et n'est pas respectueux de la population genevoise, qui a été prise en otage dans ce débat budgétaire.

Maintenant, de nouveau, si la situation est réellement grave, la question des nouvelles recettes doit être envisagée. Pour les socialistes, c'est très clair, un certain nombre de prestations ont été baissées au détriment de la population genevoise, les associations ne peuvent plus exercer leur travail correctement et la fonction publique est mise sous pression en permanence, également parce que ce Grand Conseil vote sans cesse des lois qui compliquent sa tâche. Alors pour nous, les socialistes, c'est très clair: il faut redonner des moyens supplémentaires aux associations, à la fonction publique et aux populations défavorisées souffrant de cette crise, qui ne fait que s'accentuer. (Commentaires.) Certes, nous ne pouvons pas le faire aujourd'hui dans le cadre de ce débat budgétaire, nous le regrettons, nous le déplorons vivement, mais c'est vrai que, entre un budget de droite qui n'augmente les moyens ni des associations ni de la fonction publique, et un budget d'extrême droite qui fait faire des coupes linéaires à tous les services et à toutes les associations, eh bien notre choix est fait. Et faire de la politique, c'est aussi choisir ! Le parti socialiste est un parti responsable, nous l'avons démontré avec la question des caisses de pension publiques. Ce n'était pas notre choix que d'avoir un compromis tel qu'il avait été formulé à l'issue des travaux de ce Grand Conseil, mais en même temps nous avons pris nos responsabilités gouvernementales et nous avons dit que, oui, il faut accepter la fusion des caisses de pension. Car faire de la politique, c'est choisir, c'est chercher à améliorer les choses, mais c'est aussi prendre ses responsabilités entre le pire et l'extrême pire, et dans ce sens-là nous voterons ce budget sans états d'âme.

Pour les socialistes - et je pense que c'est ça qui est important - un budget est en réalité un message de confiance en l'avenir. Prétendre aujourd'hui à Genève, ville riche, ville prospère qui attire les richesses du monde entier, que nous n'avons pas les moyens de voter un tel budget est tout simplement mensonger. Nous voulons changer de majorité cet automne parce que nous souhaitons qu'un budget soit un message d'espoir, pour toute la population ainsi que pour le monde économique. En conséquence, Mesdames et Messieurs les députés, nous voterons ce budget, mais nous voulons changer les choses cet automne. (Quelques applaudissements.)

Mme Christina Meissner (UDC). Mon préopinant a dit que si on n'avait pas eu les caisses de pension, si on n'avait pas eu ceci ou cela, eh bien on aurait eu un budget équilibré, voire excédentaire. Avec des si, vous savez, on peut imaginer bien des choses, mais ce n'est certainement pas une position très responsable et très réjouissante pour l'avenir que de dire: «Si seulement...» Non, c'est une position de vulnérabilité qu'on est en train de prendre, une position d'inconscience par rapport aux défis qui nous attendent, et l'UDC n'a jamais changé de position depuis des années: elle souhaite un budget équilibré, et ce n'est pas pour rien, c'est simplement pour que les enfants ne naissent pas chez nous avec déjà plus de 45 000 F de dette sur la tête, mais plutôt, comme les petits Vaudois, avec seulement 1000 F. C'est quand même plus agréable comme perspective d'avenir.

Le deuxième élément, c'est qu'évidemment nous fonctionnons et nous raisonnons encore comme un canton riche, or les temps ne vont pas pour le mieux. Comme je l'ai déjà dit, il y a de plus en plus de personnes qui se retrouvent au chômage ou à l'assistance publique, nous avons de plus en plus de problèmes - la population est confrontée tous les jours à des problèmes de logement, de sécurité, d'emploi, etc. - et il s'agit pour nous d'avoir une attitude responsable, d'être à l'écoute et d'essayer de montrer l'exemple, or nous ne le montrons pas en votant un budget avec un déficit de 31 millions. En effet, comme M. Golay le disait, et avant lui M. Leyvraz, on est quasiment au bout de la course, il fallait la finir, nous ne la terminons pas en vainqueurs, mais dans l'irresponsabilité. Nous ne voterons donc évidemment pas ce budget et, si vous me permettez de citer le Conseil d'Etat pour conclure, j'aimerais rappeler ce qu'il nous a dit au moment de la présentation des comptes:

«Faire face aux défis à moyen et long terme

D'importants défis attendent Genève, en particulier la réforme de la fiscalité des sociétés et ses conséquences à l'horizon 2017-2018.

Pour pouvoir relever ces défis, le canton ne devra pas se contenter de viser le retour à l'équilibre, mais se donner les moyens de dégager des excédents de fonctionnement au cours des exercices ultérieurs.

La poursuite d'une gestion prudente des dépenses de fonctionnement s'impose de manière durable.

Le niveau global des dépenses d'investissements devra être contenu pour maîtriser l'évolution de la dette et les charges de fonctionnement induites.»

Eh bien, il suffit maintenant d'adopter cette attitude. Il est clair qu'aujourd'hui nous ne la mettons pas en pratique. Nous souhaitons qu'après les élections du 6 octobre nous le fassions, avec peut-être de nouvelles majorités au gouvernement qui prendront leurs responsabilités et qui respecteront aussi la population, afin de lui donner un avenir qui soit stable et durable.

Mme Anne Emery-Torracinta (S). J'ai envie de dire: enfin ! Après tous ces mois de débats, de psychodrames, on arrive enfin à une solution relativement consensuelle qui, M. Deneys l'a rappelé, n'est pas la solution du parti socialiste, mais qui est néanmoins celle que, en tant que parti gouvernemental et parti responsable, nous allons soutenir.

Cela dit, si nous ne sommes peut-être pas d'accord sur les solutions d'avenir, nous serons au moins d'accord sur un constat. J'ai entendu plusieurs d'entre vous parler de la dette et du déficit structurel, alors nous, parti socialiste, n'allons quand même pas nous empêcher de vous rappeler que nous pensons que la baisse d'impôts de 2009... (Protestations.) ...a été un peu excessive, et je me permettrai de remettre en question un élément que j'ai entendu tout à l'heure. (Commentaires. Brouhaha. Le président agite la cloche.) Vous avez dit que les recettes fiscales sont en augmentation; c'est vrai, mais vous oubliez de dire que ce sont les augmentations des recettes fiscales des personnes morales et non pas des personnes physiques, ce qui change quand même singulièrement la donne.

Cela dit, si on veut être responsable par rapport à l'avenir, on va devoir réfléchir aussi bien aux dépenses qu'aux recettes. Alors vous connaissez le parti socialiste, vous savez qu'on a un certain nombre de propositions concernant les recettes, mais je ne vais pas vous les citer ici, car ce n'est pas le but aujourd'hui. Nous aurons également des propositions en matière de dépenses et en matière d'économies, et je pense quant à moi qu'on peut très clairement améliorer l'efficience de l'Etat. Je suis persuadée - et je le vis, en tant que fonctionnaire - qu'il y a un certain nombre de contrôles et de procédures qui sont lourds et qui pourraient parfaitement être allégés. On pourrait aussi commencer ce travail au sein de notre parlement: est-il nécessaire, par exemple, de passer des heures et des heures en commission des finances puis d'ergoter en plénière pour des subventions de 200 000 F ? L'ensemble des contrôles qui sont mis à ce niveau-là n'est-il pas trop lourd, trop lourd pour l'administration, pour le Conseil d'Etat, et bien sûr aussi pour les subventionnés ? On peut se livrer à cet exercice à tous les échelons et, dans tous les services de l'Etat, il y a des économies à faire. Il y a donc des économies à faire au niveau de la proportionnalité de ce qu'on charge, en termes de contrôle, mais il y a aussi des économies à faire en se demandant parfois s'il n'est pas nécessaire et utile de donner un peu plus de marge de manoeuvre aux gens qui appliquent les décisions, ou de confier par exemple des mandats de prestations dans les services, plutôt que de vouloir toujours tout contrôler par en haut.

Donc les socialistes auront des propositions à vous faire en termes d'économies, et nous pensons également que l'un des principaux enjeux de la prochaine législature va être, comme l'a dit Mme Meissner, la question de la fiscalité, puisque nous aurons la réforme de l'imposition des entreprises et que cela nécessitera que le gouvernement genevois soit suffisamment fort par rapport à la Confédération. Je pense que là aussi nous aurons des choses à faire en matière de répartition des tâches entre les cantons et la Confédération, et il faudrait peut-être aussi que certains partis dans ce parlement réalisent qu'ils acceptent sur le plan fédéral des reports de charges qui sont coûteux pour le canton, et qui en définitive plombent nos budgets.

Travailler pour l'avenir, c'est peut-être également se dire que, en matière sociale, il faut arrêter de penser le social comme un coût, mais le voir aussi comme un investissement, et l'un des premiers investissements que nous devons réaliser pour l'avenir, c'est faire de l'emploi une priorité pour notre canton. En effet, quand le taux de chômage à Genève sera dans les normes de la Suisse, eh bien non seulement nous économiserons de l'argent, mais nous aurons aussi rendu la dignité à un certain nombre de nos concitoyennes et de nos concitoyens. Donc ce que j'attends du prochain gouvernement, c'est qu'il travaille autrement, de manière plus transversale, et qu'il se saisisse enfin de ce qui devrait être la priorité de la prochaine législature, à savoir l'emploi. A ces conditions, Mesdames et Messieurs les députés, je pense que nous pourrons regarder l'avenir sereinement, mais ça voudra dire travailler sans tabou, sans tabou sur les dépenses, mais aussi sans tabou sur les recettes, et certainement dans un autre climat que celui que nous avons connu ces derniers mois, tout particulièrement en commission des finances. Ainsi, dans l'espoir que nous serons sereins après les prochaines élections, je vous engage à voter le projet de budget tel qu'il a été amendé tout à l'heure. (Quelques applaudissements.)

M. Charles Selleger (R). Nous nous apprêtons à voter un budget, et ce vote me fait réaliser que, au sein de notre formation, nous avons l'impression à la fois d'une victoire et d'un échec, et que nous ressentons également un espoir.

Alors pourquoi une victoire ? Parce que le renvoi du budget dans sa première version, qui était déficitaire à raison d'environ 300 millions, c'est le fait de notre groupe principalement. Nous sommes arrivés, après des efforts énormes - mais je ne vais pas résumer encore une fois tous les détails - à diviser par dix ce budget déficitaire. Et ça, on l'a fait sans prétériter les politiques publiques que nous avons priorisées et qui étaient privilégiées dans le projet de budget initial, à savoir la sécurité, l'urbanisme, le logement, la solidarité et l'emploi.

Pourquoi un échec ? Parce que c'est toujours un échec de devoir voter un budget déficitaire, alors que nous appelions de nos voeux un budget qui était au moins parfaitement à l'équilibre. J'aimerais à ce propos rappeler que, comme l'a dit M. Deneys, voter un budget à -30 millions peut apparaître comme étant peu important, mais ce qu'il faut considérer, c'est qu'il y a une accumulation de budgets déficitaires et de comptes qui nous a menés à un déficit public insupportablement élevé. Il est du reste plus élevé par tête d'habitant que ce que disait Mme Meissner, puisqu'il se monte à 31 250 F par personne; à l'heure d'aujourd'hui, chaque enfant qui vient au monde naît avec une dette de 31 250 F !

Et finalement pourquoi un espoir ? Parce que cette lutte homérique, qui dure depuis septembre, nous amène l'espoir que notre gouvernement a compris le message, le message que nous voulons absolument aboutir à une diminution des dépenses structurelles de l'Etat et parvenir progressivement à une diminution de la dette publique, et tout cela sans augmentation de la fiscalité. On va déjà devoir augmenter la fiscalité des entreprises étrangères qui sont logées chez nous à cause de nécessités qui nous sont extérieures - on en a parlé avant moi - et nous avons déjà la fiscalité la plus lourde de Suisse. Notre parti sera donc particulièrement vigilant pour empêcher toute autre hausse de la fiscalité.

Mme Emilie Flamand (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les Verts se réjouissent aujourd'hui que les partis gouvernementaux aient enfin réussi, au mois d'avril, à former une majorité responsable pour voter ce budget. Les Verts se réjouissent, mais ils regrettent en même temps ce processus qui a été extrêmement long et pénible, tant pour les députés que pour le Conseil d'Etat et l'administration, qui a dû fournir un travail représentant à peu près le triple ou le quadruple de celui qui est normalement accompli pour un budget.

Je ne me risquerai pas à des métaphores marathoniennes comme certains, car je ne trouve pas cela de très bon goût ces derniers temps, mais j'aimerais au final tempérer un peu le triomphalisme de mon préopinant. Aujourd'hui, si nous sommes proches de l'équilibre, c'est bien parce que nous sommes à fin avril, que nous connaissons les comptes 2012 - que nous avons d'ailleurs déjà commencé à étudier en commission des finances - et qu'il est évidemment plus facile de faire un budget lorsqu'on a des indications extrêmement précises par rapport aux prévisions des recettes ainsi que la connaissance des non-dépensés de l'année précédente, etc. Cependant, je ne suis pas certaine qu'il faudra que nous fassions chaque année le budget en juin, car ça ne me paraît pas être très efficace par rapport à l'Etat. En effet, ces quelques mois passés en douzièmes provisoires ont posé de nombreux problèmes, notamment au niveau de la justice, qui attend désespérément des postes supplémentaires pour pouvoir fonctionner et souffler un peu, ainsi qu'au niveau du DIP où, on le sait, l'organisation de la rentrée se fait maintenant, ce qui implique que le DIP ne peut certainement plus attendre de connaître le nombre de postes dont il disposera pour organiser cette rentrée 2013.

Les Verts espèrent enfin que les prochains exercices budgétaires seront étudiés de façon plus sereine, car le goût du psychodrame que notre parlement a développé ces derniers mois ne contribue certainement pas à améliorer l'image du monde politique qu'ont les citoyens, et qu'entretiennent certains.

M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, une fois n'est pas coutume, je vais vous lire quelque chose: «Le caucus des groupes libéral et radical au Grand Conseil a décidé de s'en tenir à sa stratégie d'un budget équilibré, a indiqué lundi soir le chef du groupe libéral Ivan Slatkine.» C'est un extrait d'un article publié dans la «Tribune de Genève» le 23 avril... (Exclamations. Commentaires.) ...et il s'agit donc d'une déclaration du député ici présent. Je vous lis maintenant un extrait d'un autre article paru dans la «Tribune»: «Le budget 2013 de l'Etat est sauvé et sera légèrement déficitaire. [...] Le parti libéral-radical est redevenu un parti gouvernemental.» Apparemment, avant c'étaient donc des parias !

Puisque vous fustigez depuis maintenant quarante-cinq minutes le MCG et l'UDC, laissez-moi vous dire ceci, Mesdames et Messieurs: en politique on peut faire beaucoup de choses, mais il y en a une qu'on n'a pas le droit de faire, c'est de prendre les citoyens pour ce qu'ils ne sont pas. Et ce soir, Mesdames et Messieurs, vous pouvez tourner la situation comme vous le voulez, mais le fait que le PLR vienne dire que, oui, il accepte un budget déficitaire... Et je vous rappelle qu'il s'agit de 31 millions plus 80 millions provenant de la vente d'un actif, d'un bien immobilier à la CIA, ce qui fait donc 111 millions de déficit, c'est-à-dire plus qu'il y a un mois.

D'autre part, Mesdames et Messieurs, vous avez vu que les quelques amendements déposés par notre collègue de l'UDC, sur la mobilité notamment, ont été refusés par le PLR. Est-ce à dire que nous avons d'ores et déjà aujourd'hui, au mois d'avril, les Vert'libéraux dans ce parlement... (Commentaires. Le président agite la cloche.) ...qui vont plébisciter la politique de Mme Künzler en matière de mobilité ? Eh bien c'est à croire que oui, puisque vous dotez le département de Mme Künzler de moyens supplémentaires par rapport à 2012, et c'est bien tout le problème. Oserais-je vous rappeler que la fondation Wilsdorf qui a offert un pont en est pour ses frais, puisqu'aujourd'hui on fait passer un bus toutes les heures, je crois, et qu'on embête - je suis toujours poli, puisqu'il est 17h55 - toute une population avec ce bus ? Mais ce sont les grands ingénieurs du département de la mobilité qui vous ont concocté cela, et moi je vous le dis, Mesdames et Messieurs qui nous regardez: tous les matins, lorsque vous prenez votre véhicule, que ce soit un deux-roues ou une voiture, eh bien pensez au 6 octobre, afin d'endiguer cette politique complètement ahurissante de l'immobilité à Genève, soutenue en l'occurrence ce soir par le PLR. (Brouhaha.)

Mesdames et Messieurs, je vous le dis: sur le budget 2013, des économies pouvaient être faites, notamment dans ce département qui pollue la vie - et je dis bien «pollue la vie» - de bon nombre de citoyens. En effet, sous le prétexte de la mobilité douce, vous avez créé des embouteillages, Mesdames et Messieurs, qui polluent beaucoup plus que si les voitures passaient ! Vous avez détruit la qualité de vie de bon nombre de citoyens dans les communes suburbaines - Onex en particulier, mais il y en a d'autres, telles que Vernier - à cause de mesures complètement aberrantes, comme le fait qu'on ne puisse plus tourner sur une route. Enfin bref, on ne va pas refaire tout l'historique... (Exclamations.) Mais oui, pleurez, pleurez, les bancs d'en face, nous réglerons nos comptes le 6 octobre au soir !

Mesdames et Messieurs les députés, dans un vote de raison, je vous invite à renvoyer ce projet de budget en commission... (Exclamations. Commentaires.) ...parce que je pense qu'il y a des économies à faire, et je demande au canal historique du parti libéral, qui - je le sais - n'est pas d'accord avec les contraintes qu'il a subies pour accepter ce compromis à la Prévert, de réétudier certains amendements en commission des finances pour arriver à un budget à l'équilibre, ce qui nous évitera d'avoir un frein à l'endettement, parce que nous saurons vous le rappeler à la fin de cette année, lors de la préparation du budget 2014 ! L'Etat va continuer avec sa fuite en avant, et je serai là pour vous rappeler ce que vous avez pris comme position... (Commentaires. Brouhaha.) N'ayez aucun doute, la population saura reconnaître les siens.

Le président. Monsieur le député, il vous reste quinze secondes !

M. Eric Stauffer. Je conclus, Monsieur le président, en demandant le renvoi du projet de budget à la commission des finances. (Commentaires.)

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais donc voter la demande de renvoi de ce projet de budget à la commission des finances.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11063 à la commission des finances est rejeté par 62 non contre 12 oui et 4 abstentions.

Le président. Nous poursuivons notre débat, et je cède la parole à M. Ivan Slatkine.

M. Ivan Slatkine (L). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, c'est un libéral du canal historique qui s'adresse à vous, et je me réjouis de voir que, pour le MCG, le PLR constitue un peu une fixation, ça veut dire qu'on doit lui poser quelques problèmes.

Cela étant, comme on l'a indiqué depuis maintenant de nombreuses semaines, ce qui est important pour le PLR, c'est d'avoir un budget, or jusqu'à présent nous fonctionnions avec les douzièmes provisoires, ce qui est tout sauf constructif. Et à entendre le MCG, il faudrait continuer à travailler avec ces douzièmes provisoires ! Genève aura ce soir un budget, et ce budget reflète les priorités qui sont les nôtres: plus de moyens pour la justice, plus de moyens pour la sécurité, et des moyens suffisants pour la formation, afin de permettre une rentrée scolaire en fonction des volontés populaires.

Grâce au travail de notre groupe, le déficit est passé de -300 millions à -31 millions. Alors, certes, on peut se dire qu'il aurait fallu être à l'équilibre, mais nous sommes un parti responsable, nous savons aussi comment il faut construire des majorités dans ce Grand Conseil, nous assumons nos responsabilités, et sachant que les comptes - sauf événement extraordinaire - seront à l'équilibre, nous pouvons nous satisfaire ce soir d'un budget déficitaire de 31 millions.

Bien sûr, dans l'idéal, il aurait fallu cet équilibre, mais comme je viens de le dire, nous aurons des comptes qui devraient être à l'équilibre, nous n'aurons pas de mécanisme de frein à l'endettement, et l'ensemble de ces éléments nous pousse à accepter ce soir le projet de budget tel qu'il est sorti de nos travaux.

Le président. Merci, Monsieur le député...

M. Ivan Slatkine. Je n'ai pas terminé, Monsieur le président ! (Rires.) Il est certain que Genève est face à de nombreux défis, des défis que l'on va devoir affronter avec courage. La population a accepté la réforme des caisses de pension, avec les investissements nécessaires qu'on va devoir consacrer pour rétablir l'équilibre de ces caisses, le ministre des finances nous a parlé de la réforme de la fiscalité des entreprises qu'il va falloir anticiper, nous vivons dans un environnement international extrêmement instable, où la Suisse se fait fortement attaquer, et je dois dire ici qu'on peut déplorer les actions que mène le parti socialiste au niveau helvétique, au niveau suisse, car en déposant toutes ces initiatives comme il le fait, c'est bien à la prospérité de notre pays qu'il s'attaque.

D'autre part, il va falloir mener des réformes structurelles, on l'a entendu, et le parti libéral-radical va tout faire pour que ces réformes structurelles soient engagées. On est bien conscient qu'elles ne vont pas se faire en claquant des doigts, il s'agit de déposer des projets de lois et de travailler sur des réformes de fond, qui vont prendre du temps, mais nous sommes prêts à mener ces réformes et nous souhaitons qu'elles aboutissent, car il va falloir améliorer le fonctionnement de notre Etat.

Pour l'ensemble de ces raisons, je dirai que, pour nous, le budget 2014 devra montrer des signes clairs de réformes structurelles. Je n'ai pas envie de dire ici que nous ne voterons qu'un budget à l'équilibre, car il faudra analyser le travail qui sera fait, mais en l'absence de signes forts de la part du gouvernement d'engagement de réformes structurelles, il est certain que la position que nous avons aujourd'hui pourrait changer à l'avenir, et je crois qu'il est très important de le préciser. Maintenant, nous demandons des réformes, mais nous sommes un parti responsable et, parce que nous sommes un parti responsable, nous voterons le budget tel qu'il a été amendé ce soir. (Applaudissements.)

M. Serge Dal Busco (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, j'interviens au nom du groupe démocrate-chrétien pour exprimer la satisfaction qui est la nôtre d'arriver, au terme de ce long, très long, trop long débat parlementaire, à l'adoption d'un budget, qui est attendu par notre population - et je rejoins bien sûr pleinement notre ami Mettan, rapporteur de majorité, sur ce point - mais qui est aussi attendu par notre administration, qui est là pour apporter les services sur lesquels compte notre population. Au nom du groupe démocrate-chrétien, je me rallie aussi, en les renforçant, aux remerciements qui ont été exprimés par Guy Mettan à l'administration, et en particulier aux services du département des finances, pour ce surcroît de travail énorme.

La position du parti démocrate-chrétien est connue depuis le début: on ne peut pas se satisfaire d'un budget déficitaire, quel qu'il soit, même s'il est formellement de 30 millions; on ne peut pas s'en réjouir, du moins, on ne peut pas s'en montrer joyeux, mais on ne peut en tout cas pas se satisfaire non plus d'un budget bricolé, comme on a tenté de le faire ici au sein de cette instance pendant de très longues heures. Bricoler, avec une approche tout sauf politique, c'est la négation de la politique, comme l'est le fait de proposer un traitement linéaire au niveau d'une diminution des charges. Je suis fier de la position du groupe démocrate-chrétien, qui n'a pas varié d'un iota depuis le début; nous sommes droits dans nos bottes et nous sommes contents aujourd'hui d'avoir pu rallier à cette position un grand nombre de députés, en tout cas une majorité, pour voter le budget.

Nous avons une dette de 13 milliards, chers collègues, et cette dette n'est pas supportable à long terme. Ce qui nous sauve aujourd'hui, c'est la situation sur le marché des capitaux, avec des taux d'intérêts qui sont faibles, mais il suffit que les choses changent sur ce plan-là pour que nous soyons dans un embarras extrêmement important.

Nous avons un avenir incertain, cela a été dit à plusieurs reprises, parce que l'environnement en général est incertain. Ce qui a fait aujourd'hui et les années passées la prospérité de notre république en termes de conditions-cadres, en termes d'avantages concurrentiels, est gravement remis en cause, et il va falloir s'adapter, que nous le voulions ou pas.

Nous avons également à faire face à d'énormes investissements, des investissements que nous voulons productifs en matière d'infrastructures, mais également en matière de logement; il nous importe d'offrir à ce canton, aux jeunes générations, de quoi se loger, et c'est un objectif que le PDC suit et va poursuivre, il est absolument déterminé à ce sujet.

Les charges de fonctionnement de ce canton ne peuvent continuer à augmenter. Nous devons absolument nous atteler à ce problème. Lors de la prochaine législature, le nouveau gouvernement devra mettre en oeuvre des chantiers de réformes qui sont très importants, et je peux vous garantir que les démocrates-chrétiens - et en particulier ceux qui seront candidats au Conseil d'Etat - vont s'engager à le faire... (Commentaires.) Absolument ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Une voix. Des noms !

M. Serge Dal Busco. Mesdames et Messieurs, il y a des réformes fiscales qui nous attendent et qui sont fondamentales pour assurer la prospérité de ce canton. Selon les décisions que nous allons devoir prendre - et qu'assurément il faudra prendre aussi lors de la prochaine législature - ce sont des dizaines et des dizaines de milliers d'emplois qui sont en jeu, avec évidemment les conséquences que leur perte pourrait occasionner, non seulement en matière sociale, mais aussi au niveau des coûts que cela pourrait engendrer, car c'est également une perte considérable en substances fiscales qui risque de se produire, et donc ça il faut le faire de manière absolument sereine, mais de façon déterminée.

D'autre part, lorsque j'entends certains groupes politiques - dans un déni qui les caractérise malheureusement, et j'aimerais bien qu'on ouvre les yeux à ce propos - prétendre que nous avons dans ce canton un problème de manque, de diminution de recettes ou de recettes insuffisantes, eh bien je voudrais dire que c'est faux: nous avons aujourd'hui largement de quoi faire au niveau de la communauté - à savoir près de 10 milliards entre les communes et le canton - afin d'assurer une prospérité ainsi que des prestations de qualité à notre population.

Et c'est dans cet esprit, Mesdames et Messieurs, qu'il faudra que l'on travaille sérieusement dans ce parlement...

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député !

M. Serge Dal Busco. Merci de me le rappeler, Monsieur le président ! Je vous enjoins donc de voter ce projet de budget tel qu'il ressort de nos débats et de mettre toute notre énergie, au cours des prochains mois et de la prochaine législature, pour attaquer de front les problèmes auxquels cette république fait face. (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

M. Bernhard Riedweg (UDC). Cela fait depuis le 12 octobre dernier, soit cent nonante-quatre jours... (Rires.) ...que nous négocions avec la commission des finances ce projet de budget. Ce travail a coûté des centaines de milliers de francs et perd une grande partie de sa substance, car il est pratiquement trop tard pour que le Grand Conseil et le Conseil d'Etat rectifient le tir.

Nous devons choisir dans quel confort nous voulons vivre. Nous demandons une gestion plus rigoureuse des deniers de l'Etat, Etat qu'il faut redimensionner dans son rôle. Nous sommes une population riche, dans un Etat riche, qui refuse de renoncer aux prestations ou d'en payer le prix. Il y a une incertitude vis-à-vis de la conjoncture, le coût du vieillissement démographique, et une certaine partie de la population qui demande de plus en plus à être subventionnée. Les politiques auront toujours du mal à prendre des mesures d'économies impopulaires. Certains citoyens de notre canton vont devoir réapprendre à vivre en adultes, sans les béquilles de l'assistanat généralisé. Soyons optimistes...

Le président. Il vous reste quinze secondes, Monsieur le député !

M. Bernhard Riedweg. Je n'aurai pas besoin d'autant de temps ! Soyons optimistes, une nouvelle société moins étatisée, plus libérale, finira par émerger des décombres de l'Etat providence. L'accouchement sera difficile, et les convulsions ne font que commencer. (Commentaires. Rires. Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît, Mesdames et Messieurs les députés ! Monsieur Lussi, il ne vous reste plus de temps de parole. Dès lors, je passe le micro à M. le rapporteur de minorité Roger Golay, à qui il reste trois minutes vingt.

M. Roger Golay (MCG), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, il y a quelque chose que je ne peux pas laisser passer, à savoir les propos de M. Slatkine, chef de groupe, qui a informé l'assemblée et bien sûr les téléspectateurs que c'était grâce à eux que le déficit avait diminué de 298 millions à 31 millions... (Commentaires. Le président agite la cloche.) Il faut savoir que le groupe PLR, comme le MCG, avait lui aussi déposé de nombreux amendements en commission des finances, mais que tous ceux-ci ont été annulés par l'amendement général du Conseil d'Etat, ce qui fait que, finalement, c'est le budget du Conseil d'Etat et non pas du parlement que nous allons voter ce soir, avec bien sûr l'amendement général et les quelques mesurettes que le Conseil d'Etat a prises en termes de rationnement au sein de notre administration très grosse, qui mériterait un bon régime. (Remarque.)

Il faut aussi savoir ce qu'a dit M. Deneys ce soir: lui, bien sûr, n'est pas content de n'avoir que 31 millions de déficit, et ce qu'il a annoncé, c'est de nouveau des textes, des projets de lois visant à augmenter les impôts des Genevois pour couvrir les prestations futures. Voilà la politique que ces partis semblent vouloir, mais nous, au MCG, nous combattrons toute hausse d'impôts... (Exclamations. Applaudissements. Des députés scandent un slogan.) Ce que nous voulons, au MCG, c'est être un parti responsable et avoir des finances saines, comme ce devrait être le cas dans un ménage privé, et non pas, tel que cela a été dit, de façon irresponsable comme les groupes PLR, qui maintenant prônent les dépenses et qui viendront dans quelques années nous donner des leçons et dire qu'il faut couper dans les prestations. Et bien sûr ils feront payer à tous les fonctionnaires leurs votes d'aujourd'hui, parce qu'il faudra trouver l'argent quelque part ! Alors un jour on s'attaquera aux mécanismes salariaux de la fonction publique et, à la pointe du combat, il y aura bien sûr le PLR pour nous donner de nouveau des leçons en disant qu'on ne peut pas laisser des budgets aussi déficitaires que ça. On se retrouvera certainement dans quelques années avec ces éléments, mais le MCG rappellera bien sûr au PLR son vote de ce soir. (Exclamations.)

M. Renaud Gautier (L). Monsieur le président, je me contrains - et c'est un exercice difficile pour moi - au silence dubitatif depuis le début de l'après-midi, il fallait donc bien que je trouve une raison pour parler. Et je l'ai trouvée ! Personnellement, contrairement à ce qu'a dit tout à l'heure - et de manière pas très élégante à mon avis - la présidente de la commission des finances sur l'état et l'humeur de la commission, je voudrais au nom de ce parlement, et tout particulièrement de la commission des finances, remercier l'administration qui, il est vrai, a accompli un travail tout à fait remarquable et qui a été extrêmement sollicitée. D'une manière générale, on peut dire qu'elle est aussi responsable - dans le bon sens du terme - du résultat de ce soir, et je pense que l'entier de ce parlement s'associera aux remerciements dus à toutes celles et ceux qui nous ont aidés, et en particulier au département des finances. (Applaudissements.)

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, à tout seigneur tout honneur ! Effectivement, j'aimerais remercier en particulier le directeur du budget qui, avec sa petite équipe, composée de jeunes collaborateurs pour l'essentiel, essaie de mouliner, semaine après semaine, les réponses et les informations dont vous avez besoin, en tentant aussi de simplifier l'information pour que vous puissiez - comme nous, d'ailleurs - vous en servir, parce qu'un budget de 8 milliards, s'il n'est pas organisé, conceptualisé, c'est simplement une liste de milliers et de milliers de dépenses dans laquelle personne ne voit rien.

Je suis heureux que M. Fornallaz ait vécu cette épreuve parce qu'ainsi, comme jeune directeur - je le répète - il a eu un intéressant baptême du feu, dans lequel il a montré depuis deux ou trois ans une capacité à garder son calme, à être aimable avec les députés même quand ils ne le méritent pas... (Exclamations.) ...et à supporter votre serviteur. Vous savez, j'aime bien être sûr de tous les détails, ce qui peut m'amener à téléphoner assez souvent dans la journée - mais jamais la nuit, par contre ! - et je pense que c'est toujours une bonne chose de savoir que, s'agissant de services stratégiques essentiels, la machine fonctionne bien.

Maintenant il y a certains raccourcis historiques que je ne peux tout de même pas - avec d'autres, d'ailleurs - accepter. Ils sont au nombre de deux. Premièrement, Mesdames et Messieurs les députés, le renvoi en commission a eu lieu avant l'estimation des personnes morales, qui a été surprenamment haute par rapport à la précédente - vous ne contrôlez pas, nous non plus - ce qui a déjà fait diminuer le déficit initial d'un gros tiers. Deuxièmement, force est de reconnaître que c'est simplement le suivi d'un certain nombre d'événements - certains fiscaux, d'autres non - qui a fait baisser le budget. En effet, nous avions réalisé les efforts avant de présenter le budget, et les seuls efforts supplémentaires que nous avons vraiment consentis, ce fut entre les deux tours pour compenser l'augmentation galopante des dépenses sociales. Ainsi, c'est plus le moment où est voté le budget que d'autres facteurs qui est déterminant dans cette fonte du déficit.

D'autre part, je pense qu'il faut arrêter de dire que nous sommes le canton, en termes de fiscalité sur le revenu pour les personnes physiques, le plus cher de Suisse. C'est faux ! C'est faux à tous niveaux de taxation, car il y a plus cher que nous - et cela en Suisse romande, d'ailleurs - et c'est faux pour 85% de la population, qui paie moins: 85% des gens ! Du reste, Zurich s'était amusé à faire cette analyse pour montrer que, si on prend vraiment l'ensemble de la population, catégorie par catégorie, et qu'on fait un indice global - c'était le BAK - nous apparaissions au 6e rang des cantons les plus avantageux. En effet, ce n'est pas seulement la question que certains ne paient rien, car si vous êtes en dessous de 250 000 F de revenus, vous êtes effectivement bien traité par rapport aux standards suisses, et mieux traité que le reste de la Suisse romande, j'aimerais que vous le sachiez. Pourquoi ? Parce que, deuxième correction historique, entre les taux d'imposition sur le revenu des personnes physiques d'il y a quinze ans - c'est-à-dire avant les fameux 12% prônés par le parti libéral - et ceux d'aujourd'hui, en ajoutant cette baisse de 12%, la baisse d'imposition sur les familles demandée par Mme Calmy-Rey pour corriger quelques erreurs du projet LIPP et ensuite la récente baisse, cela fait une diminution de 25%. C'est 25% d'imposition en moins par rapport à la situation qui prévalait dans les années 90. Ce n'est pas ahurissant ni insupportable, puisque, pendant la même période, les recettes ont continué à augmenter de 3%, malgré les crises, malgré les baisses d'impôts. Maintenant il y a des limites à tout, et je me permets là de m'adresser à certains: il serait totalement déraisonnable - mais ça ne me concernera plus - qu'il y ait une baisse d'impôts avant celle que nous devrons consentir pour les entreprises locales, et non pas pour les entreprises internationales, qui elles verront leur taux d'imposition monter - c'est la réforme des 13%. D'ici là, nous n'aurons pas les reins assez solides pour supporter quoi que ce soit.

J'en viens maintenant à la question des charges. Il est parfaitement juste qu'il y a encore des économies à faire par la simplification. Jusqu'à présent on a fait à peu près l'inverse: en effet, chaque fois qu'on parle de simplicité, il est vrai que, généralement, c'est un peu plus compliqué qu'avant, mais il y a un potentiel et chaque unité a un potentiel d'amélioration. Cependant, j'ai deux choses à vous dire. J'ai toujours souhaité - même si ça m'a valu des critiques de la part de certains - qu'il y ait une pression qui reste sur l'administration, de sorte qu'elle soit obligée de trouver des solutions. En effet, j'ai enseigné quelques années qu'il n'y avait que deux moteurs au changement: le mimétisme et la nécessité, le mimétisme consistant à faire comme celui qu'on admire ou qui a plus que soi. Alors l'exemple assez classique, dans l'alimentation, c'est que le chocolat s'est répandu par mimétisme, et les pommes de terre par nécessité ! Ce qui ne veut pas dire que les pommes de terre soient mauvaises...

Cela étant dit, si vous mettez trop de pression - et c'est arrivé dans les années 90 - vous faites péter les services ! On a détruit l'administration fiscale pendant les années 90, détruit l'office des poursuites, détruit l'office des faillites, et après il faut des années pour reconstruire. Ces historiques sont bien dans les gènes, et la reconstruction prend généralement dix ans. Il faut donc à tout prix éviter ce type de coupes qui, au motif qu'il faut faire vite et «avoir l'air de»... Car c'est un peu la politique d'aujourd'hui; ce n'est pas tellement le fond de ce que l'on fait qui compte, mais il faut «avoir l'air de»: avoir l'air d'être en faveur des économies, avoir l'air d'être à gauche, et tout ce que vous voulez. Mais quand vous êtes un exécutif, ce n'est pas comme ça que ça se passe, vous devez mettre une pression qui permette aux gens de sans cesse chercher l'innovation, mais sans détruire le fonctionnement du service. Et, Madame Emery-Torracinta, ces possibilités sont limitées, parce que, pour la majorité des gens qui travaillent à l'Etat, il n'y a pas de gains de productivité du type de ceux qu'on peut avoir dans les entreprises. Pour les enseignants, vous n'avez qu'une variable, c'est le nombre d'élèves par classe, donc c'est une détérioration des prestations. Le personnel soignant n'est à ce jour pas remplacé par des machines - c'est possible qu'il le soit un jour, mais ce n'est pas le monde que je souhaite - si bien que, dans un EMS, c'est l'humain qui soigne, et à Genève ce sont effectivement des personnes un peu mieux payées que dans le reste de la Suisse qui font ce travail et qui composent l'essentiel de la fonction publique, une fois qu'on y adjoint les policiers et les gardiens de prison.

Et ça me fait quand même relever quelques incohérences dans le discours: vous nous demandez, Madame la députée Meissner, au vu des problèmes que les Genevois rencontrent, de réduire le budget. Vous mentionnez la sécurité, qui nous a coûté et va continuer à nous coûter le lard du chat, parce que c'est nécessaire et que c'est ce que demande la population, mais rappelez-vous que, lorsqu'on dit qu'on va construire une prison et qu'on se demande si elle offrira 400 ou 500 places, il faut 0,7 gardien pour 1 détenu, parce que les gardiens travaillent quarante heures hebdomadaires alors que les détenus sont là toute la semaine, ce qui fait donc bien plus que quarante heures. (Commentaires.) Souvenez-vous tout de même de cette inertie.

J'en viens finalement au discours sur l'avenir. Il est évident que notre tâche ne va pas être très facile ces tout prochains mois, d'abord parce que nous devons garder une certaine discipline pour les investissements. Nous avons fixé un montant qui est, de l'avis des spécialistes, légèrement inférieur à la norme idéale et qui s'élève à 700 millions d'investissements bruts. Il ne permettra de couvrir, à l'horizon 2022, que la moitié des projets que l'administration, le peuple et vous-mêmes caressez. La moitié ! Et cet arbitrage sera déterminant, puisque nous allons nous limiter au prioritaire.

Deuxième élément: en matière de budget de fonctionnement, évidemment, on va comparer un budget du 15 septembre à un budget d'avril et, comme vous l'avez noté, il y a des événements exceptionnels dans ce que nous votons qui ne se reproduiront pas. Dans le budget 2014, l'objectif est bien sûr le même: s'approcher le plus possible d'un équilibre, mais aussi regarder - et on le fera cette fois non seulement au niveau des comptes, mais également au niveau du budget - où l'on en est hors événement exceptionnel. Ce n'est pas structurel - ça ne signifie pas la même chose, parce que structurel s'oppose à conjoncturel - mais hors événement exceptionnel. Effectivement, le Conseil d'Etat pense qu'il faut agir ainsi - et ce que vous avez cité correspond exactement à ce que nous pensons, Madame Meissner, je vous le dis - mais après il faut choisir la manière dont on le fait. Nous estimons - et c'est ce que j'ai fait, je suis désolé de vous le dire, depuis sept ans - qu'il faut agir sur la tendance longue. Il faut donc le faire année après année, et toujours réduire la croissance des charges. A mon avis, l'objectif consiste quand même à ne pas dépasser 1,5% hors inflation, or ça fait deux ans qu'on n'y arrive pas, parce qu'on est absorbé par des dépenses obligatoires dans le domaine social, et vous le savez. Mais on doit quand même sans arrêt lutter pour y parvenir. Ce n'est pas tout simple, mais il faut le faire année après année, de façon organisée, et j'aimerais à ce propos vous mettre en garde sur un point, qui va d'ailleurs dans le sens - je m'en excuse - de ceux qui vont refuser le budget, à savoir qu'il faut faire attention à la marge d'erreur. Sous la pression des difficultés, nous avons prévu un certain nombre de dispositifs qui visent à corriger cette marge d'erreur. Mais là où l'on pouvait s'attendre, de façon presque certaine, à 200 ou 300 millions de recettes supplémentaires, uniquement générées par les correctifs d'estimation des années antérieures, il me paraît peu probable que vous puissiez tabler sur plus de 150 millions - ce qui n'est déjà pas mal, me direz-vous. Et le fait - je le précise aussi clairement - que nous n'ayons jamais eu de correctifs négatifs depuis l'année 2004 - c'est la dernière fois que l'on en a eu, à cause d'une prévision 2003 qui n'aurait sans doute pas dû être faite - ne prouve pas que demain ou après-demain vous aurez le même chiffre, c'est simplement une approche de probabilité.

Maintenant, je doute, Mesdames et Messieurs les députés, que vous résolviez les grands problèmes de notre république en vous engueulant sur des futilités. Nous avons besoin, sur un certain nombre de dossiers, d'unité, or vous n'allez pas partir d'accord sur la question des statuts. Cette question est vitale et doit être discutée. Le Conseil d'Etat a pris ses responsabilités et l'a bien fait, puisque ça nous permet d'être un interlocuteur crédible à l'égard de la Confédération à tout le moins; nous avons pu être entendus dans les différents groupes de travail, mais de toute façon cette affaire a un prix. Elle a un prix ! Comme aura un prix l'échange automatique d'informations, auquel nous nous attendons depuis deux ans.

Enfin, Monsieur Florey, je comprends que vous voyiez le temps qui passe, parce qu'effectivement, Monsieur le député, l'invective, les raccourcis et les sottises prennent moins de temps que les discours structurés, j'en suis désolé. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes arrivés au terme de ce débat et je vais mettre aux voix le PL 11063 établissant le budget administratif de l'Etat de Genève pour l'exercice 2013, tel qu'issu du troisième débat du Grand Conseil.

Une voix. Vote nominal !

Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) C'est le cas. Nous votons donc à l'appel nominal.

La loi 11063 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix à l'appel nominal, la loi 11063 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 69 oui contre 21 non et 1 abstention. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Loi 11063 Appel nominal

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, «habemus publicae pecuniae rationem» ! (Rires. Applaudissements.) Pour un calviniste, s'exprimer en latin... (Commentaires.) Je remercie en votre nom - cela a été fait, mais je nous associe à ces remerciements - la direction du budget, les services financiers du département des finances, le secrétariat général de votre Grand Conseil, emmené avec maestria par Mme le sautier et M. Koelliker... (Applaudissements.) ...le Conseil d'Etat, et finalement vous toutes et tous, pour la bonne tenue des débats - je le souligne. Je vais enfin pouvoir télégraphier, ou plutôt envoyer un courriel au président du parlement du Land de Berlin, ville dans laquelle nous avons séjourné avec M. le président du Conseil d'Etat et mon alter ego, qui préside le parlement d'un Land qui compte 3,5 millions d'habitants. Celui-ci avait déjà son budget, et j'ai dû lui avouer que nous n'en avions point ! Je lui ai alors dit que je lui ferais savoir quand le parlement de la République et canton de Genève le voterait, et je vais donc pouvoir lui annoncer que nous avons maintenant un budget ! Je vous remercie, et nous passons à présent - je suis désolé ! - au point suivant.

R 727
Proposition de résolution de Mmes et MM. Roger Golay, Jean-Marie Voumard, Thierry Cerutti, André Python, Henry Rappaz, Mauro Poggia, Christophe Andrié, Dominique Rolle, Guillaume Sauty, Marie-Thérèse Engelberts, Florian Gander, Sandro Pistis, Pascal Spuhler, Eric Stauffer : Supprimons les restrictions de circulation à la rue de l'Ecole-de-Médecine : la gabegie ça suffit !

Débat

Le président. Nous traitons maintenant la première urgence, soit la R 727, et je cède ma place à M. le vice-président Antoine Droin.

Présidence de M. Antoine Droin, premier vice-président

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je salue à la tribune M. Yvan Galeotto, ancien député. (Applaudissements.)

Nous entamons à présent le débat, qui est classé en catégorie II - trente minutes. La parole est à M. Eric Stauffer.

M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Vous auriez pu octroyer une petite pause de cinq minutes après le vote du budget, parce que je vois que... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Le président. S'il vous plaît, Mesdames et Messieurs ! Monsieur le conseiller d'Etat, un peu de silence, s'il vous plaît, qu'on puisse poursuivre nos travaux ! Je vous remercie. Reprenez, Monsieur Stauffer.

M. Eric Stauffer. Monsieur le président, je demande formellement une petite suspension de séance de cinq minutes, parce que franchement... (Exclamations. Commentaires.) ...les trois quarts des députés ne sont pas là.

Le président. Vous avez la parole, Monsieur Stauffer, et d'habitude vous savez vous faire entendre !

M. Eric Stauffer. Très bien. Mesdames et Messieurs, comme vous le savez, le Mouvement Citoyens Genevois est intervenu de manière assez virulente pour soutenir la remise en circulation sur le pont... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) C'est assez insupportable, donc moi je vous propose, puisque ça n'intéresse personne, de passer directement au vote, et je reprendrai la parole plus tard.

Mme Christina Meissner (UDC). C'est vrai que, après ce moment de travail intense concernant le budget, il est un peu difficile de se remobiliser pour parler de mobilité. Il s'agit en l'occurrence de rétablir un semblant de bon sens - au lieu de sens uniques - au niveau de la rue de l'Ecole-de-Médecine. Bon sens d'autant plus nécessaire au vu du soutien dont on a bénéficié de la fondation Wilsdorf - et Dieu sait si on lui en doit à Genève - et pas seulement pour la réalisation du pont à la place de la passerelle qui, je vous le rappelle, avait été construite par des militaires, en attendant qu'un jour, peut-être, nous nous résolvions à faire un pont... Cette fondation nous en a offert un magnifique. Les travaux à la rue de l'Ecole-de-Médecine pour accompagner ce pont ont été réalisés. Tout allait très bien. Et tout d'un coup, car ça allait trop bien - c'était probablement l'un des seuls endroits où l'on circulait à nouveau à Genève - il a fallu changer les choses et remettre des sens uniques, histoire que les gens tournent dans le quartier, fassent du bruit, embêtent le voisinage et se retrouvent dans les bouchons - comme d'habitude, me direz-vous. Or il n'est pas acceptable de faire miroiter une solution, de la faire tester par des citoyens, pour finalement leur retirer ce moment de bon sens et de bonheur qu'ils avaient connu à la rue de l'Ecole-de-Médecine. La pétition à ce sujet a eu un succès monumental auprès de tout le monde, et je suis sûre que, s'ils ne l'avaient pas déposée, les pétitionnaires auraient réussi à récolter encore plus de signatures.

Il est temps de cesser de faire et de défaire. S'opposer, mettre et remettre des barrières, on ne fait que ça en matière de mobilité à Genève; on n'arrête pas de défaire et de refaire les choses, c'est inacceptable. L'UDC dit qu'il faut d'abord privilégier la mobilité des citoyens genevois qui se trouvent à Genève et dans Genève, au lieu de mettre les priorités et l'argent sur des infrastructures de déplacement qui servent toujours plus à attirer des gens venant de plus en plus loin ou pouvant aussi s'installer de plus en plus loin. Car on claque l'argent et on fait des lignes royales au moyen de trams, de trains, etc., du côté de la France - que ce soit la Haute-Savoie ou le Pays de Gex - mais au niveau de la circulation urbaine des Genevois, eh bien non, pas de traversée de la rade, pas question surtout de faciliter la mobilité à l'intérieur de la ville, et à la rue de l'Ecole-de-Médecine, au secours, ça fonctionnait trop bien, il fallait absolument que ça cesse... Mme la conseillère d'Etat Künzler ainsi que M. Pagani se sont arrangés pour véritablement bien réussir leur coup. Dans ce cas-là, je ne vois qu'une solution, c'est de leur donner un message clair disant que ça ne va plus et de renvoyer ce texte directement au Conseil d'Etat.

M. Jacques Jeannerat (R). Comme le dit la première invite de cette proposition de résolution, il faut rétablir la circulation automobile dans les deux sens à la rue de l'Ecole-de-Médecine. Il s'agit là certes d'un axe secondaire, mais qui est quand même parallèle à une pénétrante très importante, à savoir la route des Acacias. Mme Meissner l'a dit, on a réalisé un joli pont et maintenant on met cette voie en sens unique, notamment parce qu'il y a un bus qui passe quatre fois par heure. Quatre fois par heure ! J'ai consulté l'horaire des TPG ! Alors je n'ai rien contre la ligne 27, c'est une belle ligne, magnifique, c'est très bien...

En commission des transports, on nous a dit que c'était à titre expérimental et qu'il fallait douze mois pour tirer les conclusions d'une expérience... Mais on n'a même pas attendu sept mois entre l'ouverture du nouveau pont et cette mesure ! Il y a donc deux poids, deux mesures ! Pire encore, on nous a dit qu'on avait fait quinze jours d'étude pour voir si on allait pouvoir aller tout droit ou tourner à droite après la petite rampe qui monte depuis le quai Ernest-Ansermet. Il y a donc deux poids, deux mesures, et j'ai l'impression qu'on se moque un peu du monde ! Madame la conseillère d'Etat, excusez-moi, mais j'ai le sentiment que la DGM a dérapé. Moi je vous demande de remettre de l'ordre dans la maison, car ça ne joue pas.

D'autre part, on nous dit depuis des années - ça fait onze ans et demi que je siège dans ce parlement - qu'il ne faut pas s'inquiéter en matière de circulation, que la Ville de Genève ne peut faire que des recommandations et que c'est l'Etat - la DGM - qui décide... Alors là j'ai l'impression que la DGM s'est mise non pas à genoux, mais à plat ventre devant la Ville ! La Ville demande tout et son contraire, on est contre le pont, pour le pont, etc. C'est la pagaille généralisée, et si le mot «pataquès» n'existait pas, la situation que nous vivons là permettrait de l'inventer ! La pétition, comme l'a dit Mme Meissner, montre qu'il y a un mécontentement non pas seulement des gens qui utilisent cette route le matin, mais également des commerçants et des habitants du quartier.

Le groupe PLR vous invite donc à adopter cette proposition de résolution qui vise à rétablir la circulation à double sens dans cette rue, c'est important !

Des voix. Bravo !

Mme Béatrice Hirsch (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, je ne vais pas répéter ce qu'ont très bien dit mes deux préopinants. Au moins, une chose est sûre, c'est qu'il y a un maximum de mécontents avec cette mesure. Cependant, la commission des transports a déjà étudié en partie l'historique de cette mise en double sens unique sur la rue de l'Ecole-de-Médecine, et le groupe PDC aimerait donc proposer le renvoi de cette proposition de résolution à la commission des transports, afin de pouvoir mener à bien les auditions que nous avons pour l'instant suspendues dans l'attente de cette résolution. Cela nous permettrait de terminer les travaux que nous avons commencés, d'avoir des réponses sur ce qui relève en effet du non-dialogue ou du dialogue de sourds entre la Ville et le canton, et de savoir à quel moment chacun des acteurs de la convention - la Ville, l'Etat et la fondation Hans Wilsdorf - a eu réellement connaissance des plans qui existaient pour le pont et les rues adjacentes. Par conséquent, je vous demande formellement le renvoi à la commission des transports.

Le président. Merci, Madame la députée, je mettrai tout à l'heure aux voix votre proposition. La parole est à M. René Desbaillets, pour une minute.

M. René Desbaillets (L). Alors je vais tâcher de faire vite ! Mais pourquoi une minute ?

Le président. Nous sommes en catégorie II, trente minutes, c'est-à-dire trois minutes par groupe. (Commentaires.)

M. René Desbaillets. Ah, trois minutes par groupe ! Bon, puisqu'on a perdu du temps, il faudra le rattraper, comme dans les matchs de football ! (Brouhaha.)

Pour ceux qui ont lu la presse ces derniers jours, je dirai qu'on a l'impression qu'on a affaire à Calimero-Pagani, à Calimero-DGM, à Calimero-mairie de Carouge et à Calimero-TPG. Ils ont tous voulu bien faire, tellement bien faire qu'ils ont créé une immense gabegie ! Et je crois que, pour les anti-voitures et les anti-mobilité à Genève, ce n'est pas Calimero mais plutôt Pinocchio qu'ils nous ont joué, parce qu'après avoir rétréci la rue des Deux-Ponts, rétréci la route des Acacias et ressenti une certaine jouissance de voir que la passerelle des Vernets allait être démolie, le tour était joué, on pouvait bloquer Genève et empêcher les gens de transiter entre Plainpalais et le futur PAV ! Malheureusement, un généreux petit horloger du coin a décidé de payer une passerelle... Aïe, c'est embêtant, il faut accepter cette passerelle parce qu'en fait ce petit bijoutier, c'est une grande maison qui paie beaucoup d'impôts, qui fournit beaucoup d'emplois et qui fait tourner l'économie genevoise. On doit donc réaliser cette passerelle, mais comment faire pour qu'elle ne soit pas viable ? Eh bien on va déjà rétrécir un peu cette rue de l'Ecole-de-Médecine, en disant qu'il y a trop de bruit dû aux voitures, qu'on a fait des contrôles et qu'il faut donc rétrécir la rue ! Ça, c'est M. Pagani... Cette rue, on la rétrécit, on y fait des terrasses de bistrot et... merde, loupé ! Comme on a interdit de fumer dans les établissements publics, tout le monde est dehors, et voilà donc des pétitions provenant de plein de gens qui disent: «Redonnez-nous des voitures, ça fait bien moins de bruit que les gens qui fument dans la rue ! Et surtout les voitures, elles, vont se coucher à 20h, alors que les autres font du bruit jusqu'à 2h du matin !»

Bon, ça n'a pas l'air de jouer, alors on continue. Ah, ça y est, on a une idée. Maintenant on met moins d'une demi-heure en tram pour aller de Carouge à Cornavin: ça ne va pas, c'est trop rapide ! Il faut changer ça, on ne voit pas la vue ! Mettons donc un bus... Quarante-cinq minutes pour le même prix, profitons ! On visite ainsi le canton de Genève le long de l'Arve. On met donc un bus qui prend quarante-cinq minutes et qui passe sur cette passerelle. Comme on arrive quand même à s'arranger, on va trouver encore une solution: mettons ces deux rues en sens unique, comme ça on est sûr que, quand on vient de Plainpalais et qu'on tourne à droite, on vous renvoie à Plainpalais par la rue des Vieux-Grenadiers, etc. Et quand on vient de l'autre côté - de la région d'Aligros, par exemple, ou de la patinoire des Vernets - on vous oblige à tourner à gauche et vous devez faire le tour. En faisant tourner les gens en rond, c'est comme ça qu'on arrête de polluer à Genève ! On tourne en rond, on n'arrête plus les voitures !

Je crois donc que cette proposition de résolution est le souhait de toute la population genevoise et je vous encourage à la voter - je ne dirai pas à l'unanimité, parce que je ne rêve plus depuis longtemps, mais avec un maximum de voix ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. J'ai réuni un peu trop vite le temps de parole des groupes radical et libéral, alors qu'effectivement ils disposaient chacun de trois minutes. Vous me pardonnerez, Monsieur Desbaillets ! La parole est à M. Mauro Poggia.

M. Mauro Poggia (MCG). Je vous remercie, Monsieur le vice-président. Nous partirons de la prémisse que Mme la cheffe du département sait ce qui se passe à Genève. Si ce n'était pas le cas, ce serait pire encore ! Personnellement, je ne connais pas assez de choses en matière de mobilité pour avoir des idées fausses. Pour moi, la mobilité, c'est d'abord être mobile. Alors c'est vrai que je n'ai pas fait d'études particulières dans ce domaine comme nos ingénieurs de ce service, mais quand on n'est pas mobile, à mon avis, le but n'est pas atteint. Ainsi je crois que, pour la majorité de cette population, la mobilité ça signifie aussi de la fluidité. Or les Verts - que l'on persiste à mettre à la tête de la mobilité de ce canton, comme si l'optimisme prenait le dessus systématiquement sur l'expérience - eh bien ces Verts, qui nous disent qu'ils veulent une fluidité, essaient parallèlement de nous convaincre qu'il faudrait passer par l'enfer pour enfin déboucher - «déboucher», le terme est exact ! - sur le paradis. Et pourtant, ce que l'on voit partout dans cette ville, c'est la création de bouchons, de bouchons systématiques. Or quand on veut essayer d'améliorer la qualité de l'air... Encore une fois, je ne connais pas assez de choses dans ce domaine, mais il me semble qu'un véhicule qui met une demi-heure au lieu de dix minutes pour parcourir trois kilomètres doit polluer davantage ! Donc on aurait tous intérêt à ce que ce soit fluide, tout en rendant évidemment parallèlement nos transports publics attrayants.

Alors - et je le dis à l'intention de ceux qui nous écoutent - si vous voulez que pendant les quatre prochaines années, encore et toujours, Genève soit totalement impraticable, continuez à mettre des Verts au parlement - ces Verts qui n'ont qu'une seule lubie, c'est de bloquer notre canton, parce que c'est à cela que se limite leur programme politique - et vous verrez comment ça ira ! Donc arrêtez de rouspéter quand vous êtes au volant de votre véhicule ou au guidon de votre scooter, parce que vous le voulez bien ! En effet, les gens que vous mettez là et qui font de Genève ce qu'elle est aujourd'hui, c'est vous qui les élisez ! Alors à un moment donné, enlevez le bouchon et qu'on roule ! (Applaudissements.)

M. Hugo Zbinden (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je pense qu'effectivement à Genève il y a 400 000 spécialistes de la mobilité et probablement aussi 400 000 opinions sur la façon dont il faut résoudre les problèmes dans notre canton. (Brouhaha.) Mais ce n'est pas pour autant que l'on estime qu'il est raisonnable de discuter en plénière du Grand Conseil de la question de savoir si 100 mètres de rue à Genève doivent être en sens unique ou non. Le Grand Conseil est là pour fixer les principes. On a adopté un plan directeur des routes, dans lequel on a déterminé par exemple une hiérarchie entre les routes principales et les routes secondaires. La rue de l'Ecole-de-Médecine n'est pas une route principale, il s'agit donc d'une route secondaire de quartier et il paraît par conséquent assez raisonnable qu'on essaie d'y limiter le transit.

Quoi qu'il en soit, si vous insistez pour faire ce qui est à notre avis une erreur de gouvernance, à savoir discuter de ce genre de choses au Grand Conseil, nous vous proposons de le faire en commission, de manière qu'on puisse auditionner la fondation Wilsdorf. En effet, tout le monde dit que cette fondation va être fâchée, etc., mais ce sont des suppositions ! On n'a aucune...

Des voix. Non ! (Protestations. Le président agite la cloche.)

M. Hugo Zbinden. On va les auditionner et on verra comment ça se passe. Je vous demande donc de renvoyer cette proposition de résolution en commission.

Le président. Merci, Monsieur le député. Cette fois-ci, Messieurs Slatkine et Weiss, les trois minutes du parti libéral ont été épuisées. Mais il reste une minute sur le temps des radicaux ! (Commentaires.)

Une voix. Le MCG leur donne aussi un peu de temps !

Le président. Monsieur Slatkine, je vous cède donc la parole pour une minute.

M. Ivan Slatkine (L). Merci, Monsieur le président. Je remercie mes collègues radicaux de m'avoir offert ce temps de parole ! Je serai très rapide, car mon collègue Desbaillets a dit tout ce qu'il fallait, mais j'aimerais juste aussi rappeler qu'il y a un mois nous avons renvoyé une pétition au gouvernement concernant les modifications de trafic au rond-point de Rive et qu'en commission des pétitions on a considéré à une large majorité - une personne s'était abstenue et elle était Verte, bien entendu - qu'il y avait eu un vice de forme puisque la DGM doit consulter le DARES dès qu'on modifie la circulation dans des endroits à zone commerciale. Or qu'est-ce qu'on apprend ? Eh bien que dans le cas de la rue de l'Ecole-de-Médecine, la DGM n'a rien consulté du tout. Donc on ne lit même pas les pétitions qui sont renvoyées au Conseil d'Etat, on s'assied sur la volonté populaire qui est le libre choix des modes de transport et on vient nous dire que, au nom de l'écologie... Mais ceux que vous pénalisez, Mesdames et Messieurs, avec des mesures aussi stupides, ce sont les gens qui sont vos électeurs et qui ont besoin de se déplacer ! J'espère donc, comme l'a expliqué M. Poggia, qu'ils vont prendre conscience de l'aberration de leur vote et que cet automne ils nettoieront ce parlement comme il le faut. (Commentaires.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Roberto Broggini, à qui il reste une minute trente.

M. Roberto Broggini (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais juste rappeler devant ce Conseil que la Ville de Genève a accepté une initiative intitulée «200 rues sont à vous» et que ce qui a été refusé, c'est le crédit de réalisation, mais pas la réalisation de ces 200 rues. Nous devons donc, par respect populaire, trouver des solutions pour réaliser ces 200 rues piétonnes ainsi que pour arrêter la pollution et le bruit, et ça ce sont des obligations fédérales, en plus d'une volonté des citoyens de la Ville. Je tenais à le dire !

Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. J'aimerais commencer brièvement par un petit historique pour remettre les choses en place. Du temps de mon prédécesseur, il y a eu un accord avec la Ville et la fondation Wilsdorf pour qu'il y ait une passerelle mais pas de trafic de transit à cet endroit, et la Ville levait son opposition au sujet du TCOB. Soyons clairs, c'est l'origine de l'accord. Ensuite, il y a deux ans - au moins deux ans, et vous pouvez me faire confiance, je n'ai pas l'habitude de mentir - la Ville a demandé, suite à des réunions, pour lesquelles il existe des PV, cette mesure de circulation et même une disposition supplémentaire, à savoir de mettre à contresens encore une partie du boulevard Carl-Vogt. Nous avons refusé cette mesure, qui était réellement dangereuse, et nous avons dit qu'on pouvait aller de l'avant et effectuer un test pour voir comment limiter le trafic de transit. Sur ce point, tout le monde est d'accord ! Cette rue est une rue inter-quartiers; vous avez voté à l'unanimité le plan du réseau routier ainsi que la hiérarchie, et c'est clairement une rue qui ne doit pas servir au transit. Peut-être qu'une autre mesure serait plus efficace ! Personnellement, je pense qu'elle devrait plutôt se situer vers la rue François-Dussaud, mais en tout cas cela ne doit pas servir à rejoindre l'autoroute par ce biais-là.

Une vraie mesure d'amélioration de la circulation dans ce quartier serait l'élargissement de la route des Acacias, qui aurait deux conséquences très favorables: d'une part de la fluidité pour le tram, qui est actuellement bloqué devant l'université et qui gagnerait quatre minutes - c'est-à-dire, pour M. Riedweg qui aime les chiffres, 500 000 F d'économies annuelles pour les TPG grâce à cette seule mesure - et d'autre part une fluidification des véhicules, car s'il y a des routes secondaires telles que la rue de l'Ecole-de-Médecine, il y a aussi des routes où il faut pouvoir circuler, comme la route des Acacias, qui permet de rejoindre l'autoroute. Qu'est-ce qui empêche de faire cela ? Eh bien la Ville, qui est propriétaire des terrains et des routes, car je rappelle que toutes ces routes sont communales. Ainsi, toutes les mesures de construction qu'on pourrait souhaiter ne sont pas réalisées ! En l'occurrence, cette mesure que la DGM a demandée depuis deux ans est bloquée par le Conseil administratif et le Conseil municipal. Pourtant, cette mesure de fluidification serait une bonne chose, j'invite donc les conseillers municipaux à s'y pencher, car je pense que là on peut trouver une solution. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Quant à la mesure concernant la rue de l'Ecole-de-Médecine, on pourrait se dire, vu l'agitation, qu'il faut tout de suite la lever, mais je pense qu'il faut agir sereinement et prendre le temps de l'étudier encore un mois ou deux, d'avoir des vrais comptages. Eventuellement, on pourra dire qu'il faut la stopper - comme on l'a fait à Troinex, je vous le rappelle. Il y avait une demande de la part de la commune de fermer quatre routes, puis d'en fermer deux, puis de les rouvrir... Je crois donc que les communes doivent aussi réfléchir posément à ce qu'elles veulent et à ce qu'elles demandent, parce que si on lève la mesure à la rue de l'Ecole-de-Médecine et qu'on entend ensuite, comme dans la commune de Troinex: «Mon Dieu, mais vous avez levé la mesure !»... Mais c'était exactement ce qu'ils nous avaient demandé de faire ! On exécute immédiatement leur demande, et ensuite ils protestent parce qu'on l'a fait...

Je crois donc qu'il faut vraiment regarder les choses posément; il est tout à fait possible de lever la mesure, je n'y tiens pas plus que ça et, personnellement, je ne l'ai pas décidée. On voit qu'il y a une mesure qui est possible et qui est demandée par une commune: si elle fonctionne, tant mieux, si ce n'est pas le cas, on la lève, mais je pense que le principal - et j'aimerais quand même insister sur ce point - c'est que cette rue ne doit pas devenir une rue de transit. Et je rappelle - cerise sur le gâteau - que le bus continuera de circuler, parce qu'il n'a rien à voir avec la mesure de circulation ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Donc il faut être posé, il faut réfléchir, et les mesures actuelles sont faites pour que l'on puisse agir sereinement sur des questions de mobilité. J'aimerais rappeler à ceux qui pensent qu'on bloque tout qu'il faut regarder posément les choses ! Il y a des bouchons, effectivement, mais en quatre ans le trafic automobile a augmenté de 10%. (Remarque.) Il y a des frontaliers, mais aussi des gens - comme le disait votre collègue - qui prennent la voiture pour parcourir un kilomètre, même s'ils ne doivent rien transporter ! Effectivement, cela ne va pas pouvoir continuer. Toutes les villes d'Europe ont réalisé des zones piétonnes, toutes les villes d'Europe ont privilégié un centre urbain... (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît, un peu de silence !

Mme Michèle Künzler. ...qui est réservé aux mobilités douces, aux transports publics, au transport de personnes handicapées ou au transport professionnel. Toutes les villes d'Europe l'ont fait, nous sommes simplement les derniers des Mohicans ! (Commentaires. Le président agite la cloche.) Je crois que si vous ne voulez pas de bouchons, il vous faut aussi renoncer à la voiture lorsque c'est possible. (Applaudissements. Commentaires.)

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission des transports, que je vous soumets maintenant.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 727 à la commission des transports est rejeté par 44 non contre 37 oui.

Le président. Cette demande ayant été refusée, nous votons donc sur la proposition de résolution elle-même.

Mise aux voix, la résolution 727 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 53 oui contre 30 non. (Commentaires pendant la procédure de vote.)

Résolution 727

Le président. Je vais mettre fin à cette séance et vous donne rendez-vous à 20h30 pour les prestations de serment. Bon appétit !

La séance est levée à 18h55.