République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de Mme Anne Mahrer, présidente.

Assistent à la séance: MM. Laurent Moutinot, Robert Cramer, David Hiler et Mark Muller, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat, Charles Beer et François Longchamp, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Guillaume Barazzone, Pierre Ducrest, Jean-Claude Ducrot, Christiane Favre, Sophie Fischer, Philippe Guénat, Michel Halpérin et Pierre Schifferli, députés.

Annonces et dépôts

La présidente. La question écrite suivante est renvoyée au Conseil d'Etat:

Question écrite de Mme Anne Emery-Torracinta : Qu'en est-il de l'indexation des prestations d'assistance ? (Q-3612)

La présidente. Nous reprenons le cours de notre ordre du jour.

PL 9866-A
Rapport de la commission de contrôle de gestion chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi d'application dans le canton de Genève de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (E 3 60)

Suite du premier débat

M. Eric Stauffer (MCG). Je voulais intervenir à propos des amendements dont nous avions parlé avant cette pause festive. Je vais également répondre à M. le député Jornot sur l'argumentaire qu'il a développé et faire état d'une discussion que nous avons eue en dehors de ce parlement. Effectivement, il faut que la loi évolue et je crois qu'il y a un consensus général à ce sujet. Nous savons aujourd'hui que, dans l'application de la loi telle qu'elle est inscrite, le créancier et le débiteur ne se «causent» pas. Ils ne peuvent donc pas trouver un terrain d'entente pour valoriser au mieux les objets saisis, ce qui a pour corollaire le fait que, bien souvent, les gens se présentent aux ventes aux enchères des OPF pour y réaliser de bonnes affaires... S'ils n'y réalisaient pas de bonnes affaires, il n'y aurait personne aux ventes aux enchères.

Partant de là, il faut donner la possibilité à un débiteur de valoriser lui-même ou, plutôt, inscrire ce principe dans la loi. On sait en effet - les différents intervenants l'ont dit - que le débiteur a cette possibilité, mais qu'elle n'est pas inscrite dans la loi. Et il faut que cela soit une systématique, il faut que le débiteur soit informé qu'il peut lui-même réaliser ou tenter de réaliser au mieux les objets qui sont saisis en remboursement des montants dus. C'est quelque chose qui tombe sous le sens, quelque chose de logique.

Je répondrai aussi à l'argumentaire que M. Jornot a développé en reprenant la formulation de notre amendement MCG-Verts, qui parle d'«une valorisation supérieure à l'estimation». Peut-être que M. Jornot, par méconnaissance des pratiques des OPF, ne le sait pas, mais quand un huissier des offices des poursuites vient, il fait une évaluation. C'est-à-dire que, pour un téléviseur ou un autre objet, il établit un prix arbitrairement bas pour lancer le système des ventes aux enchères si la réalisation d'actifs est demandée par le créancier. C'est pour cela que l'on retrouve des objets aussi bon marché à la vente aux enchères.

Partant de ce principe, et en inscrivant cela dans la loi comme le veut l'amendement, le débiteur pourrait par ses propres moyens essayer de valoriser au mieux les objets saisis et donner ainsi un montant supérieur au créancier. Il y a donc un intérêt pour le créancier comme pour le débiteur, et cela tombe sous le sens.

Voilà ce que je voulais dire, simplement pour conforter ceux qui auraient eu encore une hésitation. C'est vrai que cela peut poser un léger problème par rapport au droit supérieur, néanmoins c'est comme cela qu'on fait évoluer une loi dans le bon sens.

M. Claude Jeanneret (MCG), rapporteur. Je ne veux pas revenir sur les propos de M. Jornot. C'est dommage que, quand nous sommes en plénière, les gens qui n'ont pas participé à l'étude et aux séances de commission se permettent des interventions qui sont complètement hors sujet.

Premièrement, il n'a jamais été question... (Brouhaha.) ... de dire que notre proposition était contraire au droit fédéral, puisque même la réponse du collaborateur scientifique de l'Office fédéral de la justice dit bien: «Nous vous laissons juges, cependant, de l'utilité de donner au débiteur la possibilité de proposer un acheteur.» Cela prouve bien que ce n'est pas du tout contraire au droit fédéral ! Je dois dire que, quand on a des débats qui sont faussés avec des interprétations erronées, on ne peut pas aller très loin.

J'aimerais simplement relever une chose: on se rappelle que des débiteurs n'ont pas reçu de réponse de l'office depuis plus d'une année et que nous avons des objets qui traînent dans leur réalisation. Par exemple, dans une société, un parc informatique, en une année, par l'obsolescence, peut perdre plus de 50% de sa valeur... Et que l'on oublie de vouloir le réaliser tout de suite, c'est une méconnaissance d'une réalité économique qui est aberrante ! (Brouhaha.)

Je trouve que les débats actuels ne sont pas du tout en relation avec le message que nous avons voulu transmettre. Ce message a pour but la réalisation rapide des biens. (Brouhaha.) Je pense sincèrement que la personne qui est dans un secteur économique peut avoir des relations qui permettent de réaliser rapidement l'objet. On n'a jamais dit qu'il fallait le vendre au moindre prix, on a toujours dit qu'il fallait le vendre à un prix supérieur à l'estimation. On n'intervient donc pas dans la valeur. Je rappelle simplement que les créanciers ont le droit de surenchérir à l'offre.

Cela veut dire qu'on demande simplement un message clair et net de la part du Grand Conseil à l'office des poursuites et faillites d'accélérer la procédure et le travail.

Je ne veux pas intervenir dans ce que pourrait être la modification de la structure de l'administration. Parce que supprimer la direction tout en conservant les personnes, en nous disant que ces dernières ne peuvent pas aller sur le terrain parce qu'elles sont dans la logistique... Eh bien, j'aimerais savoir ce que représente la logistique dans un ensemble où l'on doit être sur le terrain ! Cela dit,... (Brouhaha.) ... ça me semble absolument aberrant !

La seule valeur ajoutée de ce projet de loi, c'est l'alinéa 3 de l'article 7, c'est-à-dire: «Messieurs, faites votre travail d'une manière plus rapide, prenez toutes les dispositions qu'il faut pour agir rapidement et éviter que l'on perde de l'argent.» J'aimerais rappeler une chose: l'argent va être perdu non seulement pour le débiteur, mais aussi pour le créancier et pour les impôts ! En effet, quand un créancier perd de la créance, eh bien, elle est déductible fiscalement ! On est donc en train de faire perdre de l'argent à l'Etat en refusant simplement de voter une incitation à agir rapidement.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Ce projet de loi du Conseil d'Etat vise en premier lieu à la suppression de la direction générale réclamée à la fois par la commission de contrôle de gestion, par l'autorité de surveillance et par l'inspectorat cantonal des finances. Je dois, à ce stade, dire que la personne de la directrice générale n'est pas en cause, qu'elle a accompli son travail avec compétence, dévouement, efficacité et diligence. Mais la structure qui a été voulue en son temps - et qui a été utile, notamment pour favoriser le déménagement - s'avère aujourd'hui de l'avis général ne pas être particulièrement efficiente, dès lors que nous avons en réalité une triple tête: les deux préposés et la directrice.

C'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat vous a proposé par ce projet de loi de supprimer la direction générale. En commission, cette proposition n'a suscité aucune critique. Monsieur Jeanneret, vous faites observer qu'un certain nombre de postes de la direction générale subsisteront, c'est exact, parce que c'est de la logistique. Il se trouve que, dans la logistique en question, il y a le courrier entrant et sortant, et il y a les ressources humaines qui ont une importance majeure. Ce genre de services, dont l'importance n'est pas à sous-estimer, doit subsister, mais, bien entendu, sous l'autorité des deux préposés.

A l'occasion de l'examen de ce projet de loi, vous avez, Mesdames et Messieurs les députés, décidé de modifier quelque peu les règles en matière de vente de gré à gré. C'est l'article 7, alinéa 3, que vous avez introduit. La formulation telle qu'elle ressort des travaux de votre commission n'obtiendra pas l'aval de l'autorité fédérale, qui est requis en matière de législation d'exécution de la loi fédérale sur la poursuite de dettes et faillites. Il est vrai - M. le député Jornot a eu des arguments tout à fait convaincants - qu'il n'est pas particulièrement indispensable, ni même souhaitable, de légiférer en la matière. En effet, en toute hypothèse et en tout temps, le débiteur conserve bien entendu la faculté de proposer un acheteur pour un bien.

Vous avez voulu à l'époque que cela soit indiqué dans la loi. Si telle doit être votre volonté, je vous prie de bien vouloir suivre l'amendement du Conseil d'Etat, qui, lui, répond aux réquisitions de l'Office fédéral de la justice; qui, lui, est conforme au droit fédéral. La position du Conseil d'Etat consiste à dire que cet article 7, alinéa 3, ne sert à rien, mais que si vous souhaitez l'adopter pour plus d'affirmation de votre volonté, alors il vaut mieux que vous votiez l'amendement du Conseil d'Etat.

En ce qui concerne le deuxième amendement, celui qui porte sur la convocation de l'autorité de surveillance, je suis absolument navré, mais l'autorité de surveillance est un tribunal, inscrit comme tel dans la loi sur l'organisation judiciaire. Et tous les tribunaux, dans tous les pays du monde, ont toujours été convoqués par leur président. D'imaginer qu'il faille donner à des juges, par hypothèse en conflit avec leur président, la capacité de convoquer le tribunal, c'est un aérolithe complet dans le monde juridique que nous connaissons.

A cela s'ajoute pour les auteurs de cet amendement que, de toute façon, l'autorité de surveillance a l'obligation de se réunir. Par conséquent, le président a l'obligation de la convoquer. La règle que vous introduisez, donnant aux juges le droit de demander à leur président de les convoquer, n'a de sens que dans une association, dans une société, dans une fondation, où le président n'a pas l'obligation de convoquer, ou dans un parti dont la direction ne voudrait pas suivre la base et qu'il faudrait contraindre de convoquer les militants. Mais, dans un tribunal, cela n'a rigoureusement aucun sens ! On n'imagine pas pour la cour d'assises de prévoir qu'elle est réunie sur la demande du président de la cour d'assises, subsidiairement de trois magistrats de la cour ! Cela ne peut pas être ainsi !

Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande un vote clair sur le corps de ce projet de loi, qui était, une fois encore, la suppression de la direction générale afin de favoriser l'efficience des travaux des OPF. Je vous suggère de renoncer à légiférer à l'article 7, alinéa 3, tout en étant prêt à accepter que vous le fassiez sur la base du texte déposé par le Conseil d'Etat, et je vous demande de rejeter la proposition d'amendement à l'article 11, alinéa 4.

Mis aux voix, le projet de loi 9866 est adopté en premier débat par 70 oui (unanimité des votants).

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1, alinéa 2 (nouveau) à 4, alinéa 1 (nouvelle teneur).

La présidente. Nous arrivons à l'article 7, alinéas 2 et 3 (nouveaux). Nous sommes saisis d'un premier amendement consistant à abroger l'alinéa 3.

M. Olivier Jornot (L). Brièvement, je félicite le rapporteur pour sa défense fougueuse du projet de loi sorti des travaux de commission, et je suis navré d'avoir l'outrecuidance de dire deux ou trois choses sur ce projet de loi en dépit du fait que je n'aie pas participé aux excellents travaux de la commission !

Vous ne pouvez pas dire, Monsieur le rapporteur, que la seule plus-value de ce projet de loi est votre amendement. Les plus-values de ce projet de loi, c'est d'abord l'accélération des procédures qui va résulter de la modification de l'article 7, alinéa 2, quant à l'estimation, et ce sont les économies budgétaires que va réaliser l'Etat en supprimant des doublons liés à la direction générale. Cela permettra de réaffecter les postes à d'autres besoins, logistiques ou non.

Vous avez dit tout à l'heure, Monsieur le rapporteur, ou, plus exactement, vous avez secoué le chef - pas celui du département, mais le vôtre - en disant que non, il n'était pas possible aujourd'hui au débiteur de trouver des solutions avec l'office ou avec des créanciers intéressés à acquérir des biens saisis. C'est faux: ces possibilités existent, elles sont même extrêmement variées. Les débiteurs peuvent trouver des solutions. Que ce soit un petit débiteur qui s'est fait saisir un objet auquel il tient et qu'il peut très bien faire racheter par une connaissance, ou que ce soient de gros débiteurs, qui doivent trouver des solutions négociées avec beaucoup de créanciers, respectivement avec l'office. Il n'est pas nécessaire, c'est ce que je disais tout à l'heure, de mettre dans la loi un mode d'emploi sur la manière de s'arranger entre créanciers et débiteurs.

Il y a une chose, Monsieur le rapporteur, sur laquelle je partage pleinement votre avis et que je soutiens absolument, c'est la nécessité impérative de faire en sorte que les offices accélèrent la réalisation des biens saisis. Nous sommes tous d'accord avec cela ! Les retards accumulés en la matière sont absolument inacceptables. L'article 7, alinéa 2, c'est-à-dire la suppression de l'obligation de recourir à des spécialistes pour inventorier les biens, va aller dans ce sens pour une amélioration notable concernant les réalisations.

Pour le reste, il faut, malgré les contraintes budgétaires, malgré les difficultés, faire en sorte que les offices aient les moyens de travailler, aient les moyens de résorber les retards qui sont les leurs en matière de réalisation des biens. C'est un point sur lequel je suis parfaitement à l'unisson avec vous, mais, de grâce, ne nous dites pas que cet article 7, alinéa 3, que vous avez fait introduire permettra d'atteindre cet objectif. Au contraire: il apportera une perturbation dans le travail des offices !

Je vous incite, Mesdames et Messieurs les députés, à choisir la voie qui a été principalement défendue par Monsieur le Conseil d'Etat, à savoir la voie de l'abrogation pure et simple de cet article 7, alinéa 3. C'est la voie la plus simple, à la fois pour se conformer au droit fédéral et pour accélérer la réalisation des biens saisis.

M. Claude Jeanneret (MCG), rapporteur. Je crois que cela mérite une réponse. Quand j'entends ce que j'entends, je suis un tout petit peu déçu ! Je tenais mon excellent collègue Jornot pour quelqu'un faisant des analyses objectives et sensées et je suis navré de le contredire.

Quand on me dit qu'il y a des économies à réaliser sur la nouvelle structure, je dis non ! Les employés sont conservés, à juste titre d'ailleurs, mais on fait de la logistique en gardant le même nombre de personnes sur le terrain. Si l'on m'avait dit: «Monsieur Jeanneret, les dix-sept personnes qui sont supprimées à la direction on les emploie à améliorer la situation sur le terrain... », j'aurais dit: «C'est bien.»... Mais faire de la logistique...

Je vais vous dire une chose. En matière militaire, la logistique, c'est de préparer la troupe, de l'emmener, de la transporter, de la préparer sur le terrain, de prévoir des choses... Expliquez-moi comment dix-sept personnes peuvent améliorer quelque chose pour une troupe déjà connue qui a très certainement déjà une logistique ! Je doute que cela soit possible. Il n'y a donc pas d'économie de budget, contrairement à ce que vous dites. Donc, vous ne connaissez pas le sujet. Je me permets de le dire, parce qu'il n'est pas normal d'introduire des éléments qui sont faux dans un débat qui devrait être correct.

La deuxième chose est que, contrairement à ce que vous dites, je pense qu'il faut permettre aux débiteurs d'être actifs et de présenter des acquéreurs qui offrent quelque chose d'intéressant pour tout le monde. Puisqu'au moment où il y a une offre, automatiquement on doit mettre les créanciers en relation; et si quelqu'un veut offrir plus, il le fait. L'avantage, c'est qu'on accélère la procédure.

Contrairement à ce que vous dites, ce n'est pas en laissant l'administration évaluer des objets, parce que ce serait trop cher ou trop long de le faire d'une autre manière, qu'on va accélérer la procédure. La procédure doit être accélérée par le fait que toutes les personnes concernées par la faillite doivent être actives. Et notre amendement veut cette solution. Ce n'est pas une question de pratique ou de non-pratique, aujourd'hui, cette pratique est appliquée. Ce que l'on veut, c'est que si demain des personnes de l'administration changent, cette pratique soit toujours appliquée. En l'introduisant au niveau de la loi, nous avons simplement une permanence, une continuité dans l'action. C'est ce que nous voulons.

Et nous voulons surtout adresser, tant au Conseil d'Etat qu'à l'office des poursuites et des faillites, un message clair et précis: «Messieurs, prenez toutes les dispositions qu'il faut pour que nous allions vers une résolution rapide de tous ces cas, et non pas de laisser pas traîner des réalisations pendant plusieurs années, ce qui fait que tout le monde perd de l'argent.» J'insiste, cet alinéa 3, contrairement à ce que vous dites, n'est pas inutile. Il est incitatif, et c'est beaucoup plus important que n'importe quel article de loi !

M. Jacques Follonier (R). Moult personnes ont parlé ce soir de l'office des poursuites et des faillites, et je dois dire que j'ai de la peine à comprendre l'attitude de M. Jornot. Ce n'est pas juste de dire qu'un débiteur pourrait magouiller et arranger lui-même la vente. Cela n'a pas de sens par rapport à ce qui est indiqué dans cet amendement. Je trouve que ce serait un peu tromper les députés qui écoutent ce débat que d'avoir cette vue unilatérale de quelqu'un qui voudrait nous faire croire ceci, nous mettant face à d'innombrables magouilles qui auraient pu avoir eu lieu. Je crois que ce serait dommage.

Cet amendement, il est vrai le Conseil fédéral nous a dit qu'il n'était pas parfait, mais le Conseil d'Etat nous a proposé aujourd'hui un amendement qui correspond parfaitement à ce que nous pouvions souhaiter. Je crois donc qu'on peut voter l'amendement du Conseil d'Etat, puisqu'il a eu l'intelligence et, je dirai...

M. Eric Ischi. La sagesse !

M. Jacques Follonier. ... la sagesse - merci de me le souffler aussi bien ! - d'élaborer cette loi avec un amendement qui tienne debout.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, vous vous prononcez sur l'abrogation de l'alinéa 3 de l'article 7.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 38 non contre 36 non et 3 abstentions.

La présidente. Nous nous prononçons maintenant sur une deuxième proposition d'amendement, présentée par le Conseil d'Etat, concernant également l'article 7, alinéa 3. Le voici: «Article 7, alinéa 3 (nouvelle teneur). Tant que la vente n'est pas intervenue, le débiteur a la faculté de proposer à l'office un acheteur dont l'offre doit être conforme à la valeur de marché des actifs à réaliser déterminée en application des alinéas précédents.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 79 oui (unanimité des votants).

Mis aux voix, l'article 7, alinéas 2 et 3 (nouveaux), ainsi amendé est adopté, de même que l'article 10, alinéa 3 (abrogé).

La présidente. Nous sommes saisis d'une proposition d'amendement présentée par MM. Eric Stauffer et Claude Jeanneret à l'article 11, alinéas 1 et 2 (nouvelle teneur). Vous l'avez tous reçu, le voici: «Article 11, alinéa 1 (nouvelle teneur). La commission de surveillance siège en plénum notamment pour exercer la surveillance générale des offices lorsque sa présidence l'estime nécessaire ou 4 membres de la commission de surveillance ainsi que pour statuer en matière disciplinaire et édicter des directives. Elle élabore son règlement interne. Pour délibérer valablement, la commission ne doit pas siéger en l'absence de plus de deux membres.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 65 non contre 8 oui et 4 abstentions.

Mis aux voix, l'article 11, alinéas 1 et 2 (nouvelle teneur), est adopté, de même que les articles 12, alinéa 2, lettre g (nouvelle teneur) et 13, alinéas 3 et 4 (nouvelle teneur).

Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que les articles 2 et 3 (soulignés).

Troisième débat

La loi 9866 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 9866 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 79 oui (unanimité des votants).

Loi 9866

PL 9116-A
Rapport de la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat chargée d'étudier le projet de loi de Mme et MM. Gilbert Catelain, Jacques Baud, Robert Iselin, Caroline Bartl, Jacques Pagan, Pierre Schifferli, Claude Marcet modifiant la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux (B 5 05) (Suppression de l'obligation de domicile)
Rapport de majorité de M. Jean-Michel Gros (L)
Rapport de première minorité de Mme Loly Bolay (S)
Rapport de deuxième minorité de M. Jean Spielmann (AdG)

Premier débat

M. Jean-Michel Gros (L), rapporteur de majorité. Juste quelques remarques concernant le rapport de majorité. Je voulais tout d'abord attirer votre attention à la page 18 du rapport qui comprend une annexe assez intéressante, puisqu'elle constitue un résumé de l'historique de la jurisprudence du Tribunal fédéral quant à l'obligation de domicile. A cette page-là, vous pouvez observer que le Tribunal fédéral qualifie l'obligation de domicile de sérieuse limitation à la liberté d'établissement.

C'est ce qui peut expliquer que le système de dérogation que nous connaissons actuellement prend une ampleur telle qu'il n'est justement plus possible de parler de dérogation. Il devient en effet de plus en plus difficile pour l'Etat de trouver un intérêt public réel à cette limitation. Lors des différents recours - vous pouvez l'observer, toujours en page 18 - le Tribunal fédéral reconnaît une prépondérance de l'intérêt privé à accorder des dérogations.

Il est intéressant de noter - comme la question sera sûrement évoquée, je m'en doute - que l'intérêt fiscal invoqué lors du refus d'une dérogation n'est pas relevant. Le TF va jusqu'à qualifier le motif de limitation pour des raisons fiscales de «plutôt mesquin» au fait qu'il fait ne doit pas entrer en ligne de compte. Je voudrais aussi souligner, chers collègues, que toutes les personnes responsables des ressources humaines à l'Etat qui ont été auditionnées sont en faveur de l'abrogation ou, en tout cas, d'une profonde modification de l'article 15 de la LPAC. Et ceci que ce soit dans le petit Etat, à l'instruction publique, à l'Hôpital ou à la police.

Cette éventuelle limitation à la liberté de domicile doit être laissée à la gestion courante des ressources humaines, donc à des règles internes. Il me paraît aussi important de dire que, depuis les travaux de la commission, la situation a quelque peu changé. Plusieurs opposants à ce projet de loi, et notamment la minorité de la commission, étaient hostiles à ce projet de loi parce qu'ils le voyaient lié au projet de loi 9275 de l'Entente. Aujourd'hui, nous voudrions le lier au projet de loi du Conseil d'Etat visant à un assouplissement de certaines conditions régissant la fonction publique.

Ce projet de loi a fait l'objet de négociations avec les syndicats de la fonction publique et a obtenu un accord. Ajouter un article concernant l'assouplissement de l'obligation de domicile sera dès lors plus acceptable pour les opposants.

Enfin, j'attire l'attention du Grand Conseil sur le fait que la commission n'a pas accepté l'abrogation pure et simple de l'article 15, comme le voulaient les auteurs du projet de loi. La commission a simplement inversé le principe de l'obligation de domicile assortie de dérogations en une liberté d'établissement assortie d'exceptions en fonction des devoirs de service à accomplir. C'est ce changement de philosophie que la majorité de la commission vous demande d'accepter.

Quant à l'amendement présenté par le MCG, j'y reviendrai si nécessaire, Madame la présidente, lors du deuxième débat.

Mme Loly Bolay (S), rapporteuse de première minorité. Le rapport de minorité qui se trouve dans ce rapport, je l'ai déposé en 2004. Il est clair que la suite des travaux depuis 2004 ne reflète plus aujourd'hui les débats qui se déroulent à l'heure actuelle à la commission ad hoc. Il sera effectivement difficile de prendre position sur un texte qui sera peut-être caduc par le projet de loi qui a été déposé par le Conseil d'Etat.

Cela étant dit, j'aimerais rappeler que la Constitution fédérale donne effectivement la liberté d'établissement. L'article 45 de cette Constitution précise que la liberté d'établissement peut être limitée par des restrictions fondées sur une base légale suffisante si elles répondent à un intérêt public prépondérant et respectent le principe de proportionnalité. C'est d'ailleurs le cas de l'article 15 de la loi B 5 05, avec les dérogations.

La jurisprudence reconnaît l'existence d'un intérêt public à l'obligation de résidence d'un fonctionnaire non seulement lorsque la nature du service l'exige mais aussi en raison des liens qui peuvent se créer entre le fonctionnaire et la population, liens qui sont mieux garantis lorsque l'intéressé habite au sein de la collectivité de l'employeur de droit public. Or, malgré la ou les critiques qu'on peut formuler à l'endroit de cette jurisprudence, le Tribunal fédéral admet que ces conditions sont en principe réalisées dans le cas d'un fonctionnaire de l'enseignement ou dans celui des fonctionnaires de police... c'est l'arrêt du Tribunal fédéral 103 LA 455.

Cette jurisprudence a précisé que l'obligation de résidence n'était pas seulement justifiée par des impératifs de service tels que la rapidité ou les interventions du corps de police, mais aussi par la préoccupation d'intégrer l'agent public dans la population de la commune en lui permettant de participer à la vie publique de cette communauté. C'est pour nous l'exercice d'un devoir citoyen qui implique le fonctionnaire dans la vie de la cité.

Même si nous, socialistes, sommes très attachés aux libertés individuelles, nous considérons qu'effectivement la question de l'intérêt public est pertinente, tout comme la liberté d'établissement, et nous estimons que l'intérêt public est ici prépondérant. Toutefois, j'aimerais dire que le parti socialiste considère qu'à l'heure actuelle il faut apprendre à vivre en tant qu'agglomération régionale.

Des voix. Ah !

Mme Loly Bolay. Nous pensons que la région doit se faire, cette région franco-valdo-genevoise doit se faire ! Tout à l'heure, M Cramer nous a parlé des problèmes de circulation... Je rappelle que Genève est engorgée par le trafic de transit et qu'il faut trouver, avec la région, avec la France, avec Vaud, les conditions nécessaires pour que cette situation ne perdure pas ainsi. Mais il faut également trouver des réponses au niveau de l'environnement et au niveau fiscal. Je rappelle qu'avec la France Genève a un accord, qui a une échéance. Je rappelle aussi que les Bâlois et les Tessinois n'ont pas le même principe que nous de taxer les frontaliers et je rappelle encore que les Vaudois ne paient pas d'impôts sur Genève. Et si nous faisons la région, nous devons trouver réponse à toutes ces questions-là - le parti socialiste est très attaché à cette question de région.

Pour l'instant, Mesdames et Messieurs les députés, je vais conclure ici. Je prendrai tout à l'heure la parole si nécessaire, lorsque nous parlerons de l'amendement du MCG.

M. Mario Cavaleri (PDC). Quelques éléments ont déjà été indiqués, mais je vais les reprendre sur un plan un peu plus détaillé. Au moment où nous parlons d'un projet d'agglomération, on ne peut plus se cantonner à un minuscule microcosme genevo-genevois par rapport à une norme qui est totalement dépassée. On a connu une époque où il y avait des dérogations par rapport à certaines demandes. Et qui dit dérogation dit arbitraire. Il faut relever que le Conseil d'Etat, dans le cadre des discussions qu'il a eues avec les représentants de la fonction publique, ne s'y est pas trompé, puisque des propositions ont été faites, M. Gros l'a rappelé il y a un instant.

En ce qui concerne le groupe démocrate chrétien, nous sommes convaincus que, par exemple, la question liée à la proximité des agents de la fonction publique ne se cantonne plus à la rue du Stand, à la rue de l'Hôtel-de-Ville, mais à un périmètre où les gens circulent, habitent, échangent. Par conséquent, nous sommes confrontés à une situation avec laquelle nous devons faire ! Et pourquoi devons-nous faire ? D'abord pour une raison essentielle: comme, depuis dix ans, nous avons été dans l'incapacité - crasse, dirai-je - de construire réellement les logements dont nous avons besoin, nous avons vu, en effet, partir un certain nombre de contribuables, dont des fonctionnaires, à l'extérieur des frontières genevoises. Ce serait de l'hypocrisie aujourd'hui de vouloir maintenir une disposition, quand bien même elle pourrait être justifiée, et elle l'est, pour les emplois qui exigent une proximité immédiate et un temps de réaction minimal, par exemple pour l'exercice de la force publique, ce qui implique effectivement une domiciliation la plus proche possible des centres des opérations. Mais pour le reste et pour la majorité des agents de la fonction publique - bien sûr, je mets sous ce générique les femmes et les hommes qui travaillent dans l'administration - la proximité, finalement, elle s'exerce d'abord au travail. S'il y a des prolongements nécessaires en dehors des heures de travail, elle s'exerce aussi. Mais, quant à être domicilié sur le territoire genevois, tant et aussi longtemps que nous ne pourrons pas offrir des conditions d'habitat sur notre territoire, nous serions vraiment mal par rapport à une norme qui imposerait cette obligation. Ne serait-ce qu'au seul principe de cette obligation, on ne peut pas l'accepter.

La région, voyez-vous, si on veut la réaliser, il faut peut-être une fois pour toutes qu'on sorte de notre petite mentalité de Genevois pour embrasser enfin la destinée européenne ! Cela ne plaira pas à certains et à certaines, mais ce n'est pas important, c'est une réalité, et elle est incontournable ! Moi je vous demande très franchement de suivre le projet et d'abolir cette norme qui date d'un autre siècle... Même pas du précédent, mais du dix-neuvième ! Alors, soyons résolument orientés vers l'avenir et acceptons de lever cette cautèle, de manière à aller de l'avant et à pouvoir conforter le Conseil d'Etat par rapport à ses discussions avec les représentants de la fonction publique, afin de régler au moins ce problème-là ce soir. (Applaudissements.)

La présidente. Le Bureau vous propose de clore la liste. Sont encore inscrits: M. Eric Stauffer, M. Alberto Velasco, Mme Michèle Künzler, M. Yves Nidegger et M. Pierre Kunz.

M. Eric Stauffer (MCG). On peut remercier M. Cavalieri, futur gouverneur de la région française... Pour les départements, c'est assez fabuleux ! Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes aujourd'hui le 1er décembre, demain aura lieu la Course de l'Escalade... Je pense que si nos ancêtres vous entendaient ils se retourneraient dans leur tombe ! (Brouhaha. Protestations.) Vous êtes en train de sacrifier le dernier bastion qui restait la fierté des résidents genevois, c'est-à-dire l'Etat ! Bien sûr, nous ne pouvons pas empêcher les fonctionnaires - et telle n'est pas l'intention du MCG - d'aller s'établir en France. Par contre, Mesdames et Messieurs les députés, cela induira un effet miroir ! C'est-à-dire que les Eurofrontaliers pourront venir travailler dans nos administrations sans autre forme de procès.

J'aimerais quand-même vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, qu'ici nous avons tous assisté - enfin, ceux qui étaient concernés par le sujet - au séminaire relatif à la région, la fameuse région franco-valdo-genevoise... Nous y adhérons, mais encore faut-il s'en donner les bases. Lors de ce séminaire, Mesdames et Messieurs, Madame la présidente, on nous a donné quelques chiffres: les chiffres du chômage genevois ! Qui est au niveau du chômage européen, c'est-à-dire supérieur à celui aux Etats-Unis ou au Japon. Pour vous donner un corollaire, Mesdames et Messieurs, sachez que Genève détient le record suisse du taux de chômage et que les départements de l'Ain et de la Haute-Savoie ont le taux de chômage le plus bas de France ! Et aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, vous venez nous dire... Vous venez dire aux concitoyens résidents genevois de tous horizons: «Ouvrons l'administration à toute l'Europe !» Chose pour laquelle - bien évidemment, tout le monde l'aura compris - nous n'avons nullement la réciproque, ne serait-ce qu'en France. Parce qu'il est vrai, Monsieur Cavalieri...

Une voix. Cavaleri !

M. Eric Stauffer. ... que la frontière naturelle entre la France et Genève est plus longue que notre frontière avec le canton de Vaud. Mais, Monsieur Cavalieri, vous comme moi,...

Une voix. Cavaleri !

M. Eric Stauffer. ... nous avons un passeport... (Brouhaha.) ... rouge...

La présidente. Monsieur le député, vous vous adressez à la présidence, s'il vous plaît !

M. Eric Stauffer. Avec plaisir ! Donc, nous avons, tout comme vous, Madame la présidente, un passeport rouge à croix blanche, et nous devons respecter les résidents de ce pays, d'où qu'ils viennent,... (Brouhaha.)

M. Louis Serex. T'étais où à l'Escalade, Stauffer ? (Remarques.)

M. Eric Stauffer. ... pour autant qu'ils viennent partager la vie des Genevois. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Alors nous, au Mouvement Citoyens Genevois, nous avons planché sur quelque chose qui serait la voie du milieu. C'est vrai qu'on fait un constat d'échec de ces deux dernières décennies en matière de logement à Genève. C'est vrai que c'est intolérable ! C'est vrai qu'à Genève on a voulu construire des logements à coups de règlement alors qu'une pelle et une pioche auraient suffit... (Protestations.) C'est vrai qu'aujourd'hui il y a une carence dans le logement. Partant de ce principe-là, Mesdames et Messieurs les députés, nous devons nous développer et nos pauvres Genevois résidents ne trouvent plus de logements... Mais ce qui ne va pas - et nous, Mouvement Citoyens Genevois, défendrons ce dernier bastion avec toute notre énergie - ce qui n'est juste pas concevable, c'est que l'Europe entière puisse accéder à nos administrations ! Cela doit être réservé aux résidents. (Commentaires. Protestations.)

Nous avons proposé un amendement, Madame la présidente, qui devrait normalement convenir à tout le monde...

La présidente. Monsieur le député, nous viendrons ensuite aux amendements,...

M. Eric Stauffer. Bien sûr !

La présidente. ... pour l'heure, nous n'en sommes pas encore là.

M. Eric Stauffer. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Je terminerai par vous dire, parce qu'il est important de le savoir, qu'à Genève 75% de secteur tertiaire sont pris par ce que l'on appelle la région, c'est-à-dire les Eurofrontaliers. Il faut encore savoir qu'il y a une différence de salaire de 75% ! C'est comme si on venait dire aujourd'hui à nos résidents genevois: «Si vous allez à Annecy travailler dans l'administration, vous gagnerez 75% de plus.» C'est humain, ils le feront ! C'est pourquoi le législatif est là: pour veiller aux intérêts de ses résidents, notamment genevois.

Alors, Mesdames et Messieurs les députés, je n'ai pas été élu comme député du département de l'Ain ou de la Haute-Savoie - ou encore de l'Europe - j'ai été élu, comme mes collègues du Mouvement Citoyens Genevois, député de la République et canton de Genève, et j'en suis fier ! Vive la République, vive l'Escalade, vive le MCG ! (Rires.)

Une voix. Et vive la Mère Royaume ! (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)

La présidente. S'il vous plaît ! S'il vous plaît, j'aimerais que l'on se calme ! Je vais passer la parole à M. le député Alberto Velasco.

Une voix. On va s'en aller !

M. Alberto Velasco (S). Je regrette que M. Stauffer, sur un sujet aussi délicat et important, verse dans le populisme. C'est vraiment dommage, parce que vous allez biaiser le débat ! Il y a des choses que j'aurais aimé défendre, que...

Une voix. Alberto, laisse couler !

M. Alberto Velasco. ... je ne pourrai plus défendre... (Remarques.) ... puisque vous avez abordé le débat par un côté populiste très gênant. Néanmoins, chers collègues, je dois dire que c'est quand même très cocasse... Ce projet de loi, par qui a-t-il été déposé ? Par l'UDC ! Parti nationaliste qui prône les valeurs nationales et anti-étrangers ! Et parti qui prône d'aller habiter à l'étranger... Ensuite, ce projet de loi a été déposé par un ou deux fonctionnaires, notamment un fonctionnaire de l'administration... C'est quand même extraordinaire ! De plus, cette personne habite de l'autre côté de la frontière. Je dois dire quand même que pour le contexte de ce projet de loi, c'est déjà pour le moins cocasse.

Parlons du projet. Comme l'a dit... (L'orateur est interpellé.) Non, ces choses-là doivent être dites parce qu'il faut être cohérent ! Si ce projet était venu des libéraux, il y aurait eu cohérence totale, mais de la part de l'UDC c'est extrêmement cocasse. Je dois dire que le rapporteur de majorité a raison quand il dit que le contexte a changé. A l'époque, au moment où ce projet de loi a été discuté en commission, il y avait votre projet de loi de démantèlement de la fonction publique. Et quand les syndicats sont venus en audition devant notre commission, ils ont dit clairement que ce projet de loi - donc le projet de loi de l'UDC - faisait partie d'un contexte dans lequel on souhaitait déstabiliser la fonction publique. Ils l'ont donc refusé. Néanmoins, ils ont déclaré des éléments qui me semblent importants. Les syndicats disaient que l'obligation de domicile incitait les fonctionnaires à vivre sur leur lieu d'activité, afin de connaître le contexte social dans lequel les lois doivent être appliquées. Chose importante aux yeux du cartel. Et c'est vrai... Je considère que la moindre des choses, c'est que les fonctionnaires de la République - qui sont appelés à appliquer des lois, des recommandations administratives, des règlements - connaissent bien nos administrés et le contexte dans lequel s'appliquent ces lois ! C'est pour cela que nous, socialistes, souhaitons mettre un bémol à ce projet de loi.

Si je devais, moi, travailler dans la commune de Chamonix, eh bien, il serait intéressant que je connaisse le contexte de Chamonix ! Parce que Chamonix n'est pas comme Carouge, et qu'en tant que commune Chamonix a d'autres considérations... Alors, j'irais habiter à Chamonix. M. Cavaleri nous a donné une raison pour laquelle ces gens iraient habiter à la frontière: les logements sont moins chers. C'est vrai, Monsieur Cavaleri, mais pas n'importe lesquels ! Ce que j'ai constaté, c'est que les gens qui vont habiter de l'autre côté de la frontière ne vont pas habiter dans un HLM, ceux-là restent ici. Et ce sont des personnes qui se construisent des villas qui vont habiter de l'autre côté de la frontière. C'est vrai qu'une villa de l'autre côté de la frontière coûte moins cher qu'une villa ici... Par conséquent, on veut le beurre et l'argent du beurre !

Chers amis, je pense que cela ne s'adresse pas à tous les Genevois et à tous les fonctionnaires. Non, Mesdames et Messieurs les députés, je ne pense pas que les fonctionnaires à faible revenu ont tendance à habiter de l'autre côté de la frontière, ce sont plutôt ceux qui ont les moyens de s'acheter des maisons.

Mesdames et Messieurs les députés, parlons de la région. Mme la députée Loly Bolay, rapporteure de minorité, a dit que notre parti éprouvait certaines réticences s'agissant de la région. Mais jusqu'où va la région ?! Je peux vous dire qu'aujourd'hui des gens habitent Londres et travaillent à Genève... Les prix des billets d'avion sont tels que, par exemple, cela coûte moins cher de faire un aller et retour Genève-Londres que d'aller à Chamonix et de revenir... Alors, jusqu'où va la région ?! Jusqu'à Nyon ? Dijon ? Annecy ? Notre parti ne s'est jamais opposé au fait que des Français viennent travailler chez nous. Jamais ! Mais là, on fait un pas supplémentaire: on dit que les fonctionnaires, chargés d'appliquer les lois, peuvent habiter de l'autre côté de la frontière, et on ne donne pas de limite ! C'est grave, ça... (Brouhaha.) Je trouve, Mesdames et Messieurs les députés, qu'en ne fixant pas de limite on risque de voir l'administration perdre tout lien avec cette République. Moi je ne dirai pas, comme vous: «Vive la République !». Cela, c'est autre chose, et je n'en suis pas là, Monsieur Stauffer. Mais, Mesdames et Messieurs les députés, si l'on avait défini ce qu'on appelle «la région», disons la région limitrophe pour les fonctionnaires genevois, eh bien, j'aurais peut-être voté ce projet de loi. Mais en l'état, vu les dérives de ce projet de loi, vu ses origines et le contexte dans lequel il a été proposé, il me semble difficile de le voter.

Par conséquent, notre groupe l'a refusé en commission et nous le refuserons en plénière. Certains députés socialistes pensent s'abstenir pour des raisons qui leur sont propres, mais en général notre groupe refusera ce projet de loi pour les raisons que je vous ai exposées.

Mme Michèle Künzler (Ve). Je pense que face à ce problème il faut avoir des principes clairs et simples, il n'y a pas besoin de refaire toute la République et toute la région. Il y a une liberté fondamentale qui est mise en cause, c'est la liberté de résidence. Je pense que c'est une liberté fondamentale et qu'il faut tout faire pour qu'elle soit respectée. C'est cela qui doit être le principal argument.

On voit que dans l'administration il faut faire des contorsions incroyables pour quand même justifier l'obligation de résidence... On perd un temps fou à essayer de justifier une obligation de résidence, qui sera de toute façon déboutée par le Tribunal fédéral. En fait, il n'y a pas vraiment d'obligation de résidence, à part dans la loi. En réalité, il faut l'abroger. Il faut juste maintenir, comme c'est le cas actuellement, l'obligation pour certaines personnes en raison de fonctions bien précises. Ces conditions seront déterminées par le Conseil d'Etat. Je crois qu'il faut en rester là. Votons ce projet de loi, c'est tout ce qui nous reste à faire.

M. Yves Nidegger (UDC). J'aimerais remercier le rapporteur de majorité pour son excellent rapport, qui m'a beaucoup passionné... (Rires.) ... et fustiger bien sûr Mme la rapporteure de minorité pour son rapport moins bon. (Rires.) C'est un peu une querelle des anciens et des modernes, au fond.

Une voix. C'est quoi, les modernes ?

M. Yves Nidegger. C'est justement cela: la liberté d'établissement dont parlait Mme Künzler, comme toutes les libertés, d'ailleurs, et tous les droits fondamentaux, peut être restreinte à condition d'avoir une base légale, un intérêt public, et de respecter la proportionnalité. Il fut un temps où les distances étaient moins grandes, la crise du logement moins aiguë, et l'esprit de clocher plus fort. De sorte que cette restriction pouvait apparaître, avec les questions fiscales en plus, comme constituant des motifs suffisants pour porter atteinte dans une certaine mesure à cette liberté.

Il se trouve que la jurisprudence du Tribunal fédéral dont a parlé Mme Bolay beaucoup évolué. Aujourd'hui il est devenu totalement insoutenable et arbitraire de s'accrocher à cette base légale - qui n'est qu'un élément restant du tout - parce que l'intérêt public a disparu, soluble qu'il est dans l'arbitraire et dans l'hypocrisie, et parce que la proportionnalité n'y est pas non plus. Je me baserai simplement sur le caractère hypocrite de la situation actuelle. Prenez le cas d'un couple de fonctionnaires - cela peut arriver - Monsieur étant fonctionnaire genevois et Madame fonctionnaire vaudoise, les deux cantons appliquant la même règle qu'à Genève. Où le couple se domiciliera-t-il ? Nulle part. Ou en France. Ou encore, il devra faire deux demeures séparées, voire se divorcer... La situation est évidemment idiote.

Deuxième - mais il y en a des dizaines - exemple d'hypocrisie: vous avez cette obligation de domicile dans l'article 15 LPAC et dans l'article 121 LIP, et puis, vous n'avez rien dans la loi sur la police. J'anticipe un peu le débat qui va revenir, mais - pour des raisons que je n'arrive pas vraiment à comprendre - le MCG, qui propose de maintenir l'obligation de domicile, ne suggère pas de modifier la loi sur la police. Je m'interroge sur les motivations de cet oubli, qui a peut-être des causes sociologiques... (Rires. Commentaires.) ... ou socioprofessionnelles.

Troisième hypocrisie: nous avons un système de règles qui prévoit une dérogation. Tout le monde bénéficie de la dérogation à condition de la demander, de sorte que, finalement, dire que la dérogation devient la règle et la règle la dérogation revient à cesser de parler faux et de vivre dans un tissu de non-dits qui est bien évidemment malsain.

Finalement, de quel intérêt public peut se prévaloir un Etat qui a été incapable de construire ou de permettre la construction de logements en nombre suffisant, au point que sa population doit aller dans les cantons voisins ou en France ? L'intérêt public premier, c'est que l'Etat puisse disposer de serviteurs de l'Etat, de fonctionnaires, y compris de policiers, et que ceux-ci puissent habiter quelque part. A partir de là, l'intérêt public prépondérant, c'est évidemment de laisser chacun habiter où il voudra.

Les fonctionnaires fédéraux se heurtent à ce problème depuis vingt ans ou plus. Des quantités d'argent d'origine fédérale ont d'ailleurs été investies dans des fondations qui ont construit des logements en grande quantité dans les années 1970 et 1980, afin de permettre à l'administration fédérale d'avoir sur le territoire genevois des employés qu'elle devait d'ailleurs aller recruter en Valais ou dans le canton de Fribourg. Eh bien, Genève est dans une situation semblable, sauf qu'elle est incapable de loger ses fonctionnaires ! Dès lors, cessons d'être hypocrites, regardons les choses en face et abrogeons l'article 15 de la LPAC.

M. Pierre Kunz (R). Que de grands mots, que de parades, que d'anachronismes ! A la lecture des rapports relatifs au projet de loi 9116, on note qu'en commission on n'a pas hésité, pour justifier son opposition à ces textes, à invoquer, qui les libertés fondamentales, qui les libertés individuelles. Pour les opposants de 2004, à qui s'ajoute ce soir le MCG, il a aussi été question de ce qu'on appelait à l'époque - on n'a pas osé utiliser ces termes, mais on a dit la même chose - «la nécessaire immersion du fonctionnaire dans la cité», «le devoir citoyen du fonctionnaire d'habiter Genève». Ce soir, au moins partiellement, je le répète, on nous raconte les mêmes choses, on part sur les mêmes envolées, avec en plus la lutte anti-frontaliers de M. Stauffer qui veut résoudre ainsi les problèmes du chômage genevois. Alors on s'interroge ici: comment peut-on tenir simultanément des propos comme ceux-là et se déclarer les défenseurs inconditionnels de la région et de l'Europe intégrée ? Comment ici, en 2007 bientôt, peut-on continuer à tenir des discours sur la base de ces sornettes protectionnistes, Monsieur Stauffer ?

Lors des débats en commission et dans les rapports de minorité, ceux qui s'opposaient - je pense qu'ils s'y opposent toujours - à l'abolition de l'obligation de domicile ont beaucoup invoqué, et invoquent ce soir encore, le nécessaire règlement préalable des problèmes d'aménagement et de logement... J'aimerais profiter de souligner - comme l'ont déjà fait MM. Cavaleri et Nidegger - qu'on peut se demander comment les auteurs de ces propos peuvent argumenter ainsi. En effet, depuis trente ans, ils n'ont cessé de batailler vigoureusement et avec succès pour empêcher Genève de grandir, pour rendre la zone agricole intouchable, pour corseter sévèrement la construction de logements dans notre canton et pour, en fin de compte, obliger le quart de la population active de ce canton à aller habiter, qui en France, qui dans le canton de Vaud.

Mesdames et Messieurs, l'heure est tout simplement au réalisme ! Le réalisme nous invite à assumer les conséquences de cette politique désastreuse que nous avons suivie depuis une trentaine d'années et que, nous l'avons compris, le gouvernement, avec l'aide de gens un peu plus orientés vers notre nouveau siècle, a décidé de mettre sur pied. En l'occurrence, il s'agit tout simplement de donner à l'Etat les moyens, comme cela se fait dans le secteur privé, d'engager les gens, en France, qu'il ne trouve pas à Genève. Monsieur Stauffer, l'Escalade, c'est une grande fête populaire, mais, de grâce, cessez de faire de la démocratie genevoise une mascarade comme celle que vous nous avez faite maintenant ! (Brouhaha.)

Une voix. Bravo !

M. Pierre Kunz. Il s'agit effectivement ce soir, Monsieur Stauffer, de faire vivre la République ! Et pour cela, il ne s'agit pas de créer des postes fictifs pour placer des chômeurs qui, malheureusement, habitent ce canton. Il s'agit de trouver en France, tout simplement, les compétences professionnelles que les chômeurs genevois n'ont pas. Et le projet de loi 9116, Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur Stauffer, chers amis du MCG, va dans le bon sens. Ainsi, les radicaux vous invitent vraiment à le voter sans aucune arrière-pensée. (Applaudissements.)

La présidente. La liste était close... (La présidente est interpellée.) Monsieur Stauffer, je crois que vous n'avez pas été vraiment mis en cause... (Commentaires.) Vous avez été cité, mais vous n'avez pas été mis en cause !

M. Pierre Weiss (L). Le mot «anachronique» a été utilisé tout à l'heure. C'est vrai qu'au Moyen-Age le serf était attaché à la glèbe; au XXIe siècle, le fonctionnaire genevois est obligé, en tout cas en théorie, de demeurer dans le canton, d'y habiter ou d'y donner une adresse. La chose n'est plus tenable, elle ne respecte pas un certain nombre de libertés fondamentales. En d'autres termes, ceux qui s'opposent aujourd'hui à cette modification sont des conservateurs; ceux qui y sont favorables sont des réformateurs. Il y a d'un côté ceux qui veulent le maintien d'acquis, même au détriment de ceux pour qui ils disent se battre; il y a de l'autre côté ceux qui veulent offrir de nouvelles libertés à nos citoyens, dont font partie les fonctionnaires.

Ce projet de loi, au demeurant, propose un certain nombre de mesures de prudence. Il propose en particulier à son article 15 de restreindre cette liberté lorsque lever l'obligation de résidence porterait préjudice à l'accomplissement des devoirs de service. Voilà qui me semble une bonne chose.

Ce projet de loi est aussi un projet de loi réaliste. Il l'est non seulement eu égard à la crise que connaît le marché du logement, mais aussi parce qu'un nombre croissant d'exceptions sont accordées par l'office du personnel de l'Etat pour tenir compte de circonstances multiples, y compris des unions qui se font avec des personnes qui habitent dans d'autres cantons ou de l'autre côté de la frontière. Et je ne parle pas de ceux qui, avec ces horaires particulièrement légers - une trentaine d'heures par semaine - travaillent pour la fonction publique et habitent, qui en Valais, qui dans le Jura, dans certains cas, et pourraient ainsi vivre honnêtement dans le domicile d'où ils sont ressortissants.

J'aimerais terminer par un point: l'argument fiscal n'est pas pertinent. Et pour deux raisons: d'abord parce que le Tribunal fédéral ne le reconnaît pas; ensuite parce que, si l'on met en cause les fonctionnaires qui iraient s'établir de l'autre côté de la frontière, en France voisine, eh bien, précisément par le biais de l'imposition à la source, le canton de Genève n'y perd rien du tout !

En d'autres termes, Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, je vous incite à voter pour un projet de loi de réforme, qui nous a été proposé sans arrière-pensées par l'UDC à qui il ne faut pas faire de procès d'intention en la matière. J'en remercie les auteurs. (Remarques.)

M. Jean-Michel Gros (L), rapporteur de majorité. Très brièvement, Mesdames et Messieurs les députés, je renonce totalement à essayer de convaincre M. Stauffer, ses vieux démons sont revenus à la surface, et je crois que, quoi que je puisse ajouter ici, à cette table des rapporteurs, il ne pourra pas être convaincu. A preuve même, l'amendement qu'il nous présentera en deuxième débat, qui vise non seulement à maintenir l'actuel article 15, mais encore à le renforcer par une totale interdiction pour les gens domiciliés en France de travailler dans le secteur tertiaire de la fonction publique. C'est-à-dire y compris pour les Suisses, puisqu'il n'y a pas que des étrangers qui habitent à l'étranger, il y a bien entendu également des Suisses. Je renonce donc à convaincre M. Stauffer.

Ce qui me fait par contre un peu plus de peine, c'est que, avec d'autres arguments, certes, le groupe socialiste en arrive à la même conclusion. Je voulais dire quelque chose à M. Velasco, parce que je pense qu'il a mal lu le texte final auquel est arrivée la commission: oui, Monsieur Velasco, des limites sont posées et c'est une volonté expresse de la commission qui a amendé le projet de loi original. Je vous le dis simplement, le Conseil d'Etat peut imposer une obligation de résidence dans le canton de Genève si l'éloignement du domicile porte préjudice à l'accomplissement des devoirs de service. Alors, vos affaires de Chamonix, voire de Londres... Evidemment, on peut faire confiance au Conseil d'Etat pour se demander si l'enseignante d'Hermance peut habiter Londres ! C'est une question qu'on pourrait se poser... Mais occupons-nous déjà des problèmes qui existent et n'en inventons pas de totalement utopiques !

Je voulais encore ajouter ceci: Monsieur Velasco, vous savez que nous abrogeons également l'article 141 de la loi sur l'instruction publique, qui oblige actuellement un enseignant de l'école primaire à habiter dans la commune où il enseigne. C'est aussi un article qui n'est plus appliqué du tout. Alors, je vous pose la question, Mesdames et Messieurs du groupe socialiste: est-ce qu'une enseignante de Perly-Certoux a moins de contacts avec sa commune si elle habite St-Julien-en-Genevois que si elle habite Céligny ? A Céligny, elle mettra une heure pour aller à son école, à Perly, alors qu'à St-Julien elle peut presque venir à pied.

Je crois que vraiment, si l'on veut jouer la carte de la région, ce petit pas mérite d'être franchi ! Et je vous demande sincèrement, Mesdames et Messieurs du groupe socialiste, d'adhérer à ce projet de loi. Et si vous avez lu, en conclusion de mon rapport, que je parle des «forces ultra-conservatrices», je n'avais pas l'intention de vous mettre dans le lot. Mais au moment où nous siégions, il y avait encore l'Alliance de gauche parmi nous, et c'est d'elle que je parlais. De ces gens pour qui, je cite: «même une absence de liberté constitue un acquis» - et même une absence de liberté fondamentale! Pour eux, ces acquis ne doivent pas être chamboulés par cette nouvelle loi. Et tout est acquis, même les absences de liberté ! Je trouve ce raisonnement totalement absurde et je vous demande de changer d'opinion pour cette loi. (Applaudissements.)

La présidente. Je vous remercie, Monsieur Gros. La parole est à Mme Loly Bolay, rapporteure de minorité.

Mme Loly Bolay (S), rapporteuse de première minorité. Merci beaucoup, Madame la présidente...

M. Eric Stauffer (hors micro). J'ai été mis en cause... (Exclamations.) ... je ne peux pas tolérer... (Protestations.)

La présidente. Monsieur Stauffer, pour l'instant, nous écoutons Mme Loly Bolay ! (Brouhaha.)

M. Eric Stauffer. C'est contraire au règlement du Grand Conseil, Madame la présidente, j'ai été mis en cause cinq fois ! (Protestations. Brouhaha.)

La présidente. Vous interviendrez lorsque vous présenterez votre amendement ! Pour l'heure, nous écoutons Madame la rapporteure Loly Bolay.

M. Eric Stauffer. J'accepte, mais ce n'est pas conforme au règlement !

La présidente. Je vous remercie ! Madame Bolay, vous avez la parole.

Mme Loly Bolay. J'aimerais brièvement répondre à M. Kunz concernant l'aménagement du territoire. J'aimerais quand même vous rappeler, Monsieur Kunz, qu'il y a les recours des particuliers contre les déclassements. Aussi et surtout, vous le savez très bien, il y a la résistance des communes, de vos communes ! Il y a beaucoup de communes qui, à chaque fois qu'on leur demande de construire, ne veulent pas d'appartements, surtout pas des appartements sociaux, devant leurs fenêtres... Enfin, Monsieur le député, le déclassement de la zone agricole est déjà prévu dans le plan directeur cantonal que le parti socialiste a toujours soutenu.

Pour revenir à M. Weiss, c'est vrai, Monsieur Weiss, que le Tribunal fédéral dit que l'argument fiscal n'est pas pertinent. Mais je vous rappelle quand même - et je ne parle pas des frontaliers parce qu'ils paient des impôts à Genève - tous ceux qui iront habiter en Valais... On sait que la grande majorité des policiers sont valaisans. Plus tous ceux qui vont habiter le Jura ou Neuchâtel et qui ne paieront pas d'impôts sur Genève ! Est-ce que vous savez évaluer la perte fiscale que cela va engendrer ? (Brouhaha.) Et c'est ma question: avez-vous imaginé la perte fiscale ?

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Ce débat, un vendredi soir, lorsque les héros commencent à être un peu fatigués, n'en a pas moins été intéressant et je souhaite qu'il permette une appréciation un peu plus en phase avec la réalité d'aujourd'hui que le débat de 2004. Premier point: l'Etat a besoin de connaître les règles qu'il doit appliquer. Il convient donc qu'il tranche. Ce soir, votre parlement doit donner la réponse, chacun l'attend dans l'administration. Le résultat du doute actuel - parce qu'un projet de loi voté en commission, ce n'est pas tout à fait rien - fait qu'en somme nous n'avons plus aucune doctrine générale à l'Etat de Genève et qu'il convient de sortir de cette situation.

Deuxièmement, il y a des choses justes qui ont été dites et j'aimerais insister sur le fait qu'elles ne sont pas forcément contradictoires. Oui, l'obligation de domicile, du point de vue du Tribunal fédéral, ne peut pas être liée à des questions fiscales. Je crois qu'il faut trancher cela définitivement. Même si on peut tous l'avoir en arrière-pensée, il faut se discipliner et se dire que cela ne peut pas être un critère.

Troisièmement, le critère d'éloignement géographique, c'est-à-dire de proximité, est très relatif, puisqu'à l'évidence le fait de passer d'une rive à l'autre, par exemple, dans notre canton, est souvent beaucoup plus long que de passer du canton de Vaud au canton de Genève ou de France en Suisse. Mais ceux qui ont invoqué les autres considérants du Tribunal fédéral n'en ont pas moins raison. Au-delà de la proximité géographique, il y a quand même un certain nombre de professions dont on peut attendre des personnes qui les exercent qu'elles connaissent la société dans laquelle elles travaillent. Il ne s'agit pas des fonctionnaires en général. Et c'est là que la loi est importante. Cela ne peut pas s'appliquer à tous les groupes. Pour la majorité des métiers, cela ne pose aucun problème que ceux qui travaillent dans la fonction publique habitent, qui dans le canton de Vaud, qui dans la région voisine. Mais pour certains métiers - je crois qu'il faut suivre encore une fois la sagesse du Tribunal fédéral - cela peut avoir un sens. D'autant plus que la notion de frontalier, dans deux ans, va être très extensible.

Je ne suis pas sûr que pour certaines fonctions - le Conseil d'Etat a réfléchi et nous allons vous donner les pistes qui sont les nôtres - nous puissions aussi simplement admettre qu'elles soient exercées par des personnes dont le domicile principal est, par exemple, à Paris, qui se rendent à Genève, y restent pendant la semaine et repartent... Dès 2009 le cercle est élargi, rappelez-vous ! Donc, je ne suis pas sûr que ces personnes puissent, aussi facilement que certains ont l'air de le penser, occuper des rôles avec une interface avec le monde politique. Je ne suis pas sûr que des cadres dirigeants, même au niveau opérationnel, puissent être totalement étrangers à ce qui se passe dans notre canton, au jeu de la démocratie semi-directe, à vos jeux politiques, à nos contraintes politiques, à la vie de l'opinion. C'est tout de même important, excusez-moi de vous le dire, que les grands pontes d'un domaine aient de temps en temps le retour de Mme Michu... Cela fait aussi partie de la démocratie, de la démocratie suisse en particulier.

C'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat peut parfaitement vivre avec la loi que vous vous apprêtez à voter ce soir, sans modification, mais il tient à vous dire, après un premier tour de discussion, qu'il examinera de très près quatre catégories: d'abord, les cadres supérieurs - nos managers, si vous voulez, la notion de cadre à l'Etat de Genève étant encore pour quelque temps un peu floue - et surtout ceux qui ont des relations avec le monde politique; ensuite, nous pensons que la police doit aussi faire l'objet d'un examen, de même que les assistants sociaux et une partie, au moins, du corps enseignant. Voilà les pistes qui sont les nôtres.

Nous pouvons agir avec votre loi par voie réglementaire. Ce ne sera pas le critère du fisc, ce ne sera pas un critère de pseudo-éloignement, parce que nous savons tous quoi en penser. Ce sera un critère uniquement en fonction du droit fédéral tel qu'il a été cité pour sa deuxième partie.

J'ai franchement l'impression qu'avant quelques dérapages dans le débat général tant M. Gros que Mme Bolay nous ont donné les deux facettes d'une vérité. Cette vérité, c'est en fait celle de la sagesse du Tribunal fédéral. Bien sûr, demain, il y aura d'autres modifications... Le monde bouge ! L'agglomération sera mieux structurée, peut-être aurons-nous des pouvoirs plus larges en termes d'assise géographique... Mais pour le moment, ce projet de loi - si vous comprenez bien l'interprétation qu'en fera le Conseil d'Etat, interprétation très soigneuse, selon les critères que je vous ai donnés - représente une clarification qui permettra aux gens des ressources humaines de travailler et qui permettra de sortir d'un arbitraire de plus en plus important quant au caractère des décisions.

Je vous remercie donc de faire bon accueil à la loi telle qu'elle est aujourd'hui et de bien prendre acte de la volonté du Conseil d'Etat. (Applaudissements.)

Mis aux voix, le projet de loi 9116 est adopté en premier débat par 59 oui contre 12 non et 6 abstentions.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

La présidente. Nous sommes saisis d'un amendement à l'article 15 de l'article 1 souligné. Cet amendement est présenté par le MCG: «Obligation de domicile (nouvelle teneur). 1) Les membres du personnel occupant une fonction permanente et qui sont au bénéfice d'un engagement de durée indéterminée doivent avoir leur domicile et leur résidence effective dans le canton de Genève. 2) Une personne domiciliée à l'étranger ne peut être engagée au sein de l'administration cantonale, que cela soit pour une durée indéterminée, temporaire ou fixe, dans le secteur tertiaire, notamment pour des fonctions d'ordre administratif, dans les services techniques ou tous autres secteurs d'activité ne requérant pas de compétences particulières à forte valeur ajoutée. 3) Le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration concerné peut accorder aux fonctionnaires des dérogations de domicile afin de tenir compte de la propriété d'immeubles antérieure à l'engagement, de résidences secondaires qui deviendraient la résidence principale, de l'acquisition du logement grâce aux fonds provenant de la prévoyance professionnelle (LPP), de contraintes familiales graves, du taux d'activité réduit ou de la fin prochaine des rapports de fonction, le tout à l'expresse condition que l'éloignement du domicile ne porte pas préjudice à l'accomplissement des devoirs de service. 4) Le Conseil d'Etat peut déléguer la compétence d'accorder les dérogations prévues à l'alinéa 3 à l'office du personnel. 5) Sont réservés les cas des fonctionnaires exerçant leur activité dans un établissement situé hors du canton.»

M. Eric Stauffer (MCG). Je tiens à vous rappeler avec fermeté mes propos d'auparavant. J'ai été mis en cause cinq fois de manière nominative... (Exclamations.) Je ne vais pas épiloguer là-dessus. De toute façon, nous savons très bien que les partis de droite, à part défendre quelques lobbyings immobiliers, sont bien...

La présidente. Là n'est pas le sujet, Monsieur le député !

M. Eric Stauffer. Oui, Madame la présidente, mais... (Brouhaha.)

La présidente. Sur votre amendement ! (Exclamations. La présidente sonne la cloche.)

M. Eric Stauffer. Madame la présidente, nous restons sur l'amendement, bien entendu, mais vous admettrez quand même que j'ai été mis en cause et que vous ne m'avez pas donné la parole. Bref, je trouve encore une fois qu'effectivement les extrêmes se rejoignent - si tant est que nous étions à l'extrême droite... Notre seule préoccupation, c'est le citoyen ! Résident genevois ! (L'orateur est interpellé.) Mais apparemment, le souci des partis de droite, c'est la région... (La présidente interpelle l'orateur.) ... et les citoyens français !

La présidente. Monsieur le député...

M. Eric Stauffer. Il faut le dire, Madame la présidente, et avec énergie !

La présidente. Ecoutez-moi juste une seconde ! Je vais vous faire une suggestion: exprimez-vous d'une manière calme et sur un ton plus doux, et je suis sûre que plus personne ne se permettra des remarques. Je vous en remercie.

M. Eric Stauffer. Oui, bien sûr... (Remarques.) Mais écoutez, Madame la présidente, le bruit qu'il y a... (Applaudissements. Chahut.)

M. Eric Stauffer. Donc, je disais que le Mouvement Citoyens Genevois est vraiment pour la défense des résidents de ce canton. Encore une fois: nous sommes des élus de la République et canton de Genève, pas des départements de l'Ain et de la Haute-Savoie.

Pour en revenir à l'amendement, comme l'a dit très justement notre excellent conseiller d'Etat David Hiler - qui, il n'y a pas si longtemps, a connu quelques déboires avec Berne en raison de la péréquation intercantonale, puisqu'à cause du calcul des frontaliers, Genève va devoir payer nonante millions à la Confédération... Mais cela, c'est encore un détail dans l'équation, c'est vrai que cela n'intéresse pas nos collègues de la droite, Madame la présidente Verte ! Cela étant, il est à souligner aussi que, comme l'a relevé très justement notre collègue Alberto Velasco, c'est bien l'UDC qui a déposé ce projet de loi, Madame la présidente ! C'est quand même incroyable. Mais c'est vrai que, dans ce parlement, les trahisons deviennent légion...

Alors, Madame la présidente, notre amendement est le suivant: nous demandons de réinstaurer l'article 15 concernant l'obligation de domicile. Je vais vous le lire, il est relativement court. Cela vaut la peine que nos concitoyens... (Protestations.)

La présidente. Monsieur le député, nous avons ...

M. Eric Stauffer. Madame la présidente, je ne vais pas le lire, mais j'invite tous nos citoyens à se rendre sur le site «mcge.ch» ... (Protestations.)

La présidente. Non... Non !

M. Eric Stauffer. Il faut que la population sache, Madame la présidente... (Exclamations. Brouhaha.) ... qu'il y a des partis qui défendent la population de ce canton ! (Chahut.) Il faut que les gens le sachent.

La présidente. Monsieur le député,... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ... je croyais vous avoir fait une suggestion. Apparemment, vous n'en tenez pas compte.

M. Eric Stauffer. Je voulais revenir sur l'amendement, mais il y a du bruit, Madame la présidente, et... (Exclamations.) Vous voyez, cela recommence !

La présidente. Je crois que vous avez très largement parlé de l'amendement...

M. Eric Stauffer. Non ! Non, je n'en ai pas donné la teneur. Je ne vais pas le lire, mais en donner la substance.

La présidente. Donnez-en la substance, puis je le ferai voter. (Remarques. Brouhaha. La présidente agite la cloche.)

M. Eric Stauffer. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, chers concitoyens qui nous écoutez, voici ce que nous proposons: il faut que le principe de la loi, pour la fonction publique... (Plusieurs députés chantent le «Cé qu'è lainô».) Vous voyez, Madame la présidente, ils veulent fêter l'Escalade ! Vive Genève... (La présidente agite la cloche. Suite du chant.) ... vive la République et vive le MCG !

La présidente. Je suspens la séance ! Cinq minutes de suspension de séance ! Je compte la reprendre dans le calme et la sérénité.

La séance est suspendue à 21h55.

La séance est reprise à 22h.

La présidente. Nous reprenons nos débats. Mesdames et Messieurs les députés, je vous signale que nous avons encore trois urgences à traiter. Souhaitons de ne pas dépasser les 23h... A vous de voir la manière dont vous intervenez ! Monsieur Stauffer, donnez-nous des explications concernant votre amendement, s'il vous plaît !

M. Eric Stauffer. Je vais être bref. Tout le monde a retrouvé son calme. Quelle est la teneur de l'amendement du Mouvement Citoyens Genevois ? Dans le principe, il faut que tout fonctionnaire soit résident sur le canton de Genève; mais évidemment que nous ne voulons en aucun cas pratiquer la discrimination envers nos concitoyens résidant à Genève. En matière de logement, les constats d'échec des gouvernements successifs font qu'il est normal qu'une famille genevoise puisse aller s'établir dans la région, parce qu'elle y aura une qualité de vie meilleure qu'à Genève. C'est malheureux à dire, mais c'est la triste réalité... Partant de ce principe, qu'avons-nous voulu ? Je vais être très bref, Madame la présidente: une personne domiciliée à l'étranger ne pourra être engagée au sein de l'administration. C'est le principe de base. Pourquoi ? Parce que dans l'administration il faut, comme l'a très bien rappelé M. le conseiller d'Etat David Hiler, aller au-delà de ce raisonnement et il faut que les cadres, les managers de l'administration, puissent avoir un contact avec Mme Michu du quartier des Eaux-Vives... Sinon, ils pourraient prendre des décisions qui ne sont plus en corrélation avec la volonté du peuple.

Donc, une personne domiciliée à l'extérieur du canton ne pourra être engagée au sein de l'administration - que cela soit pour une durée indéterminée, temporaire ou fixe - ni dans le secteur tertiaire, notamment pour des fonctions d'ordre administratif, ni dans les services techniques ou dans tout autre secteur d'activités ne demandant pas de compétences particulières à forte valeur ajoutée. Cela veut dire que nous ne fermons pas la porte à quelques cerveaux dont l'administration aurait besoin et qui feraient défaut sur le marché local. Encore une fois, cet amendement est équilibré et fait appel au bon sens citoyen.

Ensuite, les exceptions... Effectivement, il ne faut pas vivre dans l'hypocrisie - et cela aussi, le Mouvement Citoyens Genevois l'a relevé. Je cite: «Le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration concerné peut accorder aux fonctionnaires des dérogations de domicile afin de tenir compte de la propriété d'immeubles antérieure à l'engagement, de résidences secondaires qui deviendraient la résidence principale...». C'est aujourd'hui le cas de beaucoup de fonctionnaires. Donc, nous ne voulons pas pénaliser ces gens !

Voilà, Madame la présidente, en quoi consiste vraiment, en résumé, l'amendement du MCG. Et voilà pourquoi on vous demande, Mesdames et Messieurs, pour la responsabilisation et pour la protection de nos résidents genevois de tous horizons, de soutenir cet amendement.

Je terminerai, Madame la présidente, en disant que ces messieurs dames nous ont fait entendre un très beau chant. Mais, de l'Escalade, malheureusement ils ne se souviennent plus que des paroles ! Demain, vous allez fêter l'Escalade et je crois que vous ne savez plus ce que cela veut dire ! (Protestations.) Vive Genève, vive la République, vive le MCG ! (Huées.)

La présidente. Monsieur le député, s'il vous plaît, pas de provocation ! Le Bureau a décidé de clore la liste. Sont encore inscrits: M. Cavaleri, M. Weiss et M. Velasco.

M. Mario Cavaleri (PDC). Madame la présidente, vous me permettrez d'apporter quelques remarques sur l'amendement à l'article et aux divers alinéas. En préambule, je voudrais juste dire, pour répondre à la question de la fiscalité, que si l'on suivait le raisonnement qui précédait le deuxième débat cela reviendrait à dire aussi qu'il faudrait exiger que seules les personnes résidentes à Genève puissent toucher leur rente de leur caisse de prévoyance... Cela ne tient pas la route, cette histoire de résidence liée à la fonction publique !

J'en viens à quelques commentaires sur l'article 15, premier alinéa. Evidemment, si l'on voulait que les fonctionnaires qui exercent une fonction permanente puissent habiter Genève, il faudrait, à la limite, revenir aux pratiques d'antan ! C'est-à-dire les logements de fonction. Vous vous rappelez que la Confédération, au niveau des douanes, des CFF, de la Poste, construisait pour loger le personnel... Y a-t-il finalement une volonté de loger les collaboratrices et collaborateurs de la fonction publique ? Je ne pense pas. Je vous rappelle simplement que dans de tels cas on a vu, en d'autres endroits, à quels abus cela peut conduire, à quelles rentes de situation cela peut conduire, et à quels privilèges... Je ne pense donc pas que ce soit dans l'intention de nos collègues du MCG de mettre à disposition des logements de fonction. Parce qu'autrement ce premier alinéa est tout à fait inapproprié.

Quant au deuxième alinéa, concernant les personnes domiciliées à l'étranger, cela a déjà été dit mais je le répète, cela voudrait dire que même les Suisses - les bonnes Suissesses et les bons Suisses - ne pourraient pas habiter ailleurs que sur le canton de Genève ! Vous vous rendez compte de la portée de ce deuxième alinéa ? Vous faites dans l'ostracisme, excusez-moi de vous le dire ! Madame la présidente, vous transmettrez à nos collègues du MCG.

Troisième alinéa... Finalement - si je veux suivre le raisonnement du MCG - on ne prête qu'aux riches: à ceux qui sont propriétaires, d'accord; à ceux qui ont des résidences secondaires aussi. Cabanes de jardin, peut-être aussi ? On ne sait pas où cela peut aller... Franchement, ce n'est pas très sérieux !

Et puis, la fin de ce troisième alinéa... Là, on peut être d'accord, mais il y a encore une restriction. Vous dites: «... à l'expresse condition que l'éloignement du domicile ne porte pas préjudice à l'accomplissement des devoirs de service.» Où est la limite ? C'est Lausanne ? Yverdon ? Berne ? Finalement, cela ne nous gêne pas que nos conseillères et conseillers nationaux aillent à Berne pratiquement tous les jours de la semaine. Là, l'éloignement n'est pas si grand, n'est-ce pas ? Mais s'il s'agit de fonctionnaires, alors c'est tout à fait impossible. Eh bien, je ne comprends pas le sens de ce troisième alinéa.

Finalement, vous voulez globalement revenir à des pratiques d'antan - je l'ai déjà dit tout à l'heure - et, franchement, ce n'est pas nécessaire. Je crois que tous les arguments ont déjà été développés et, au nom du groupe démocrate-chrétien, je vous engage vivement à refuser cet amendement et à voter le projet de loi tel qu'il vous a été présenté. (Applaudissements.)

M. Pierre Weiss (L). Je crois qu'il est tout simplement temps de passer au vote. Notre vote sera la meilleure des réponses à ce que nous avons pu entendre ce soir en tant que citoyens de Genève.

M. Alberto Velasco (S). Je voudrais quand même relever que je regrette ce qui s'est passé tout à l'heure, parce que je crois que le droit de s'exprimer doit être garanti à tous les députés, quel que soit le groupe auquel ils appartiennent. Mesdames et Messieurs les députés, ce qui s'est passé tout à l'heure est choquant - et l'huissier qui siège dans ce Grand Conseil depuis vingt ans m'a dit qu'il avait rarement vu cela.

Concernant l'amendement, Mesdames et Messieurs les députés du MCG, il est intéressant... Il présente des aspects assez complexes quand même, par exemple l'alinéa 2... Nous ne pouvons pas l'accepter tel quel. C'est dommage parce qu'il aurait peut-être été opportun de discuter de cet amendement en d'autres occasions. En l'occurrence, mon groupe ne pourra pas le soutenir, parce qu'il y a des éléments difficiles à prendre en considération.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 63 non contre 7 oui et 2 abstentions.

Mis aux voix, l'article 15 (nouvelle teneur) est adopté.

Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que les articles 2 et 3 (soulignés).

Troisième débat

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous faire voter... (Remarques.) Oui, Monsieur Velasco, je vous donne la parole. (Exclamations.)

M. Alberto Velasco (S). Merci de me permettre de parler au troisième débat. J'ai trouvé importante la déclaration du Conseil d'Etat tout à l'heure, parce qu'effectivement le Conseil d'Etat met un bémol à l'application de cette loi. Il était nécessaire de reconnaître quand même qu'un fonctionnaire n'a pas la même mission qu'un travailleur du secteur privé; il a quand même des responsabilités de proximité envers le citoyen.

Chers collègues, n'oublions pas ce qui s'est passé à Saint-Jean avec ce mouvement des habitants de Saint-Jean et la poste. C'est significatif ! Que nous ont montré les habitants de Saint-Jean ? Que l'administration à proximité c'était important pour eux. Eh bien moi j'en tire une conclusion également importante: il faut éviter les dérives. C'est très facile de voter des lois dans ce Grand Conseil, mais c'est beaucoup plus difficile d'en évaluer les conséquences pour les citoyens. Et il est effectivement important que les fonctionnaires soient près des administrés - c'est pour nous très très important.

D'autre part, j'aimerais dire au groupe UDC que ce n'est quand même pas l'UDC qui est pour l'Europe ! Vous êtes contre l'Europe ! C'est nous qui sommes pour l'Europe, Mesdames et Messieurs ! Il faut que ce soit clair, et vous faites constamment une campagne contre l'Europe ! Alors, venir ici nous donner des leçons à l'occasion de ce projet de loi, c'est inadmissible ! Parce qu'il y a un élément important: oui, Mesdames et Messieurs, les syndicats avaient raison, ce projet de loi a été mis en place avec, pour objectif fondamental à terme, de démobiliser la fonction publique, c'est clair et net ! Et les syndicats l'avaient dit à l'époque... A terme, c'est cela.

La présidente. La liste est close. Sont inscrites encore deux personnes: M. Stauffer et M. Weiss.

M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais juste que vous preniez conscience du vote qui va avoir lieu dans quelques minutes dans cette enceinte. Je n'aimerais pas, par un accès de gravité, aller au-delà - et parfois mes propos peuvent dépasser ma pensée...

Une voix. Ah ! (Brouhaha.)

M. Eric Stauffer. ... mais j'aimerais quand même que vous soyez conscients des effets que cela va produire sur le quotidien des Genevois. Je pense encore une fois que nous devons tous - en dehors des clivages gauche-droite qui ont tant fait de mal à cette République ! - penser au bien être et à la qualité de vie de nos concitoyens. Aussi, Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi est prématuré ! Monsieur le conseiller d'Etat l'a dit; Monsieur Velasco l'a dit.

Nous vous rappelons que le Mouvement Citoyens Genevois est pour une région franco-valdo-genevoise, nous l'avons dit et répété, mais encore faut-il s'en donner les bases ! Pas plus tard qu'il y a quinze jours, Mesdames et Messieurs, vous avez voté à l'unanimité de ce parlement une motion MCG qui mettait en exergue... (Protestations.) ... les problèmes entre Genève, les PME genevoises... (Brouhaha.) ... et les PME françaises. Aussi je vous demande, Mesdames et Messieurs les députés...

La présidente. Adressez-vous à la présidente !

M. Eric Stauffer. ... je vous demande d'avoir le bon sens citoyen de refuser aujourd'hui ce projet de loi et de le réintroduire quand ce sera le moment. C'est une question de bon sens, c'est une question de respect vis-à-vis de nos concitoyens et de nos résidents genevois. Donc, je vous le demande, j'insiste, avec tout le calme et le respect qui est dû à chacun d'entre vous. Il est temps de s'occuper de nos résidents ! Ajournez ce projet de loi, refusez-le maintenant, rien ne vous empêche de le redéposer dans quelques mois, quand la situation sera plus claire. C'est ce que nous vous demandons, nous, le Mouvement Citoyens Genevois.

M. Pierre Weiss (L). Madame la présidente, je demande l'appel nominal.

La présidente. Etes-vous soutenu ? (Appuyé.)

La loi 9116 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix à l'appel nominal, la loi 9116 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 59 oui contre 13 non et 5 abstentions.

Loi 9116 Appel nominal

PL 9591-A
Rapport de la commission fiscale chargée d'étudier le projet de loi de MM. Jean-Michel Gros, Mark Muller, Pierre Weiss modifiant la loi sur les droits de succession (D 3 25) et la loi sur les droits d'enregistrement (D 3 30) (Exonération des personnes liées par un partenariat enregistré)

Premier débat

M. Olivier Jornot (L), rapporteur. Comme vous le savez, le 1er janvier prochain, entre en vigueur sur le plan fédéral la loi sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe. Cette entrée en vigueur prochaine du PACS fédéral, comme on l'appelle parfois, a entraîné dans notre canton le dépôt du projet de loi dont il s'agit de traiter ce soir.

En fin du rapport... unique, puisqu'il n'y a pas eu de rapport de minorité, j'appelais de mes voeux le dépôt rapide d'un projet de loi du Conseil d'Etat portant sur l'ensemble des autres aspects non fiscaux de mise en place à Genève du partenariat enregistré fédéral. C'était le 22 août. J'ai été entendu quelques mois plus tard, puisque le projet de loi vient d'être déposé, mais - chose probablement unique dans les annales de notre République - le Conseil d'Etat a pris un règlement d'application de la loi d'application de la loi fédérale alors même qu'il n'y a pas encore de loi d'application de la loi fédérale. Il fallait le faire ! Mais enfin, au moins à partir du 1er janvier prochain, cela donnera une base légale à un certain nombre d'aménagements rendus nécessaires par le droit fédéral.

De quoi s'agit-il ici, Mesdames et Messieurs ? Il s'agit de se souvenir que la loi fédérale sur le partenariat enregistré va avoir pour effet, parmi mille autres choses, d'assimiler sur le plan fiscal les partenaires enregistrés aux couples mariés. En matière d'imposition directe, cela aura pour conséquence pour un certain nombre de ces contribuables, par le régime d'addition des revenus et des fortunes, une augmentation de leur fiscalité directe.

Pour les auteurs, en l'occurrence libéraux, de ce projet de loi, il s'agissait d'apporter en quelque sorte le complément qui s'imposait face à cette augmentation possible ou en tout cas probable de la fiscalité: un complément dans le domaine des successions. En effet, contrairement à ce qui a parfois pu être dit ici ou là, ce projet de loi n'est pas rendu nécessaire par la loi fédérale d'harmonisation fiscale, parce que les cantons restent totalement maîtres dans le domaine des droits de succession. Il s'agit simplement - dès lors que, dès le 1er prochain, encore une fois, les partenaires enregistrés seront traités sur le plan du revenu et de la fortune comme des couples mariés - de les traiter également comme des couples mariés sur le plan du droit successoral.

Lors de l'examen du projet de loi, il est apparu qu'un certain nombre de points de détail relativement complexes se posaient. D'abord: est-ce qu'il fallait, de manière générale, chaque fois que le terme de «couple marié» apparaissait soit dans la loi sur les droits de succession soit dans la loi sur les droits d'enregistrement, comprendre que les partenaires enregistrés étaient assimilés ? A cette question, la commission a répondu oui.

Une deuxième question, encore plus technique, se posait. Il s'agissait de savoir si, lorsqu'il y a dissolution d'un partenariat, l'attribution des biens qui en résulte devait, comme celle qui résulte d'un divorce, donner lieu à imposition. Et la réponse, à nouveau, par souci d'égalité de traitement, a été oui. En commission, ce projet de loi a été approuvé à l'unanimité, sous réserve d'une abstention.

Je terminerai en signalant que la loi que la commission a votée prévoit une entrée en vigueur simultanée avec la loi fédérale, c'est-à-dire au 1er janvier prochain. Comme vous le savez, puisque nous touchons à la matière fiscale, il est nécessaire dans l'intervalle que le peuple s'exprime par le biais du référendum obligatoire. Il convient néanmoins de laisser cette date d'entrée en vigueur, qui permettra de régler sous l'empire du nouveau droit les cas qui se seront, dans l'intervalle, produits à partir du 1er janvier prochain. Je vous recommande donc, Mesdames et Messieurs, d'approuver ce projet de loi.

M. Yves Nidegger (UDC). Malgré l'heure tardive, permettez-moi de vous exposer en quoi je ne partage pas l'enthousiasme du rapporteur de commission et pourquoi je regrette qu'il n'y ait apparemment pas eu dans le rapport - on peut le chercher, mais c'est en vain - de véritable débat sur cette question. Le rapporteur l'a dit tout net et franchement: rien dans la loi fédérale sur le partenariat enregistré n'oblige Genève à réviser sa loi fiscale en matière de successions et de donations. C'est bien parce qu'il est considéré qu'il s'agirait là d'une nécessité que ce projet de loi a été déposé - dans la hâte, me semble-t-il - et que le débat est escamoté.

Parce qu'au fond le Conseil d'Etat va déposer un projet plus vaste qui touche aux questions d'application. La question fiscale n'est qu'un aspect. Il n'y a pas que cet aspect dans la loi fiscale et il n'y a pas de raison de se précipiter par mimétisme là-dessus. Les transferts de patrimoine par donation ou par succession entre personnes appartenant à un partenariat enregistré doivent-ils être exonérés ou non ? C'est une question de société, c'est une question politique, c'est donc une question qui mérite débat. Je vous rappelle que ce fut une question politique très longuement débattue que celle de savoir si les successions en ligne directe, les transferts de patrimoine au sein des familles devaient être exonérés ou non, de même que ce fut un très long débat que celui de la question du partenariat enregistré au niveau fédéral. Il n'y a pas d'obligation: il ne s'agit pas d'un toilettage juridique qui se fonderait sur le seul principe d'égalité de traitement. Il y a un débat à avoir sur cette notion et ce débat ne s'est pas fait.

Permettez-moi de m'inquiéter pour la santé de mes chers collègues des bancs d'en face, que l'on a connus pugnaces, âpres au gain dès lors qu'il s'agissait de recettes fiscales, ce qui est normal. Des recettes fiscales qu'on abandonne aujourd'hui, ce qui n'entre pas dans votre logique, mes chers collègues, puisque la crise que nous traversons est, selon vous, une crise des recettes. Or il n'est pas question de faire à quiconque ce que vous appelez d'ordinaire «des cadeaux fiscaux». Et il est encore moins question d'en faire à des ménages qui - statistiquement et de par leurs caractéristiques - sont sans doute ceux qui appartiennent à la catégorie qui a le moins besoin de cadeaux fiscaux.

Tout le monde connaît, pour ceux qui ont fait un peu de marketing, cette catégorie qu'on nomme par le terme anglais épouvantable de «dinks» double income, no kids, qui désigne ces ménages où il y a deux revenus et pas de charge d'enfants. Tous les opérateurs de marketing les connaissent parce que ce genre de ménage dispose après le paiement de ses charges fixes d'un disponible affectable à des achats onéreux supérieur à celui de tous les autres types de ménages - supérieur à celui des ménages où il y a deux revenus et des enfants, des ménages où il y a un seul revenu parce qu'il n'y a qu'une seule personne et pas d'enfants et, évidemment, des ménages où il y a un seul revenu et des enfants.

Des cadeaux fiscaux, donc, à un type de ménage qui, statistiquement, est celui qui en aurait le moins besoin... Je m'étonne de cette absence de pugnacité. A croire, chers collègues, que vous êtes tombés dans le guet-apens d'un triumvirat - on peut l'écrire comme on veut - d'un triumvirat libéral que l'on a connu beaucoup plus inspiré ou mieux inspiré en d'autres circonstances.

Car enfin, chers collègues libéraux, en ouvrant ce débat, vous remettez en cause un acquis pour les familles qui fut l'exonération des droits de succession, c'est-à-dire la transmission du patrimoine. L'Etat a admis qu'il y avait un intérêt public, et pas seulement privé, à ce qu'une maison ou une entreprise passe des parents vers les enfants, d'un conjoint vers l'autre en cas de décès ou de donation, sans que l'Etat se serve d'une part trop large, au risque de devoir perdre l'entreprise ou le toit familial. L'Etat a estimé que ce n'était pas simplement un intérêt purement égoïste et privé qui dictait cela, mais que la transmission des entreprises, la transmission des patrimoines familiaux, la transmission du logement - et Dieu sait si la crise est grave dans notre canton - revêtait au fond un intérêt public.

Remettre en cause, pour autant que nos collègues de gauche soient en forme, ce que vous avez acquis de haute lutte avec l'aide de toute la partie conservatrice de cet hémicycle, ce n'est peut-être pas la décision la plus judicieuse. C'est vrai, certains d'entre vous, libéraux, et parmi vos caciques les plus bruyants, avaient combattu à l'époque cette idée au nom du fait qu'il n'y aurait de mérite qu'individuel et que toute transmission sociale ou familiale heurtait quelque part les principes libéraux les plus purs. Or l'Etat, dans cette circonstance, a estimé au contraire qu'il s'agissait de reculer de trois pas et de regarder le sujet fiscal famille et non plus, pour ce type de transfert, le sujet fiscal purement individuel.

Et ce qu'il reste, puisque ce n'est pas le droit fédéral qui le dicte, ce serait ce principe d'égalité de traitement qui conduirait à ce que ce projet de loi soit adopté. L'égalité de traitement, c'est cette obligation de l'Etat de traiter de façon semblable les situations semblables, avec l'obligation corollaire de traiter de manière différente les situations différentes.

Dire que, en toute circonstance, en commençant par la fiscalité lorsqu'elle est avantageuse pour les intéressés, un couple appartenant à un partenariat enregistré doit être assimilé à un couple marié, ce n'est pas faux: c'est absurde. Absurde comme le serait une critique d'art qui viendrait vous dire que la Joconde, c'est 329 482 petits points de peinture posés les uns à côté des autres sur une toile de la Renaissance... Ce serait peut-être bien calculé, mais cela n'aurait strictement aucun sens par rapport à ce que la Joconde est face à l'histoire de l'art. Tout comme venir dire qu'un homme et un homme, c'est la même chose qu'une femme et une femme, et que les deux sont encore la même chose qu'un homme et une femme mariés avec des enfants, parce que dans chaque cas il y a deux êtres humains, ce n'est pas faux mathématiquement, mais cela n'a aucun sens.

Par rapport à ce que les sociétés entretiennent comme rapports particuliers avec les familles, familles dont les sociétés savent bien...

La présidente. Il va falloir conclure, Monsieur le député !

M. Yves Nidegger. ... qu'elles leur doivent leur survie - je conclus, Madame la présidente. Je rappelle qu'en Suisse, et malgré l'évolution des moeurs, sept enfants sur dix sont élevés par des couples mariés et que ce type de ménage porte dès lors l'essentiel de la charge qui assure demain. Par conséquent, il est naturel que l'on considère cela autrement que l'on considère des arrangements de nature privée destinés à faciliter la vie de deux personnes seules. Il n'y a pas d'urgence à accepter ce projet de loi, parce qu'il y aurait urgence à débattre de l'ensemble du domaine...

La présidente. Il faut conclure, Monsieur le député...

M. Yves Nidegger. Je terminerai en disant que l'aspect financier n'a pas été examiné, alors qu'il ne s'agit pas d'une dépense mais de renonciation à recette, ce qui reviendra exactement au même au niveau du déficit...

La présidente. Non, non, il faut conclure !

M. Yves Nidegger. Alors je termine en deux phrases, constatant que l'égalité de traitement n'est pas très respectée selon que les idées soient de gauche ou de droite... Je rappelle que tout projet de député qui peut engendrer ce genre d'effet sur le budget doit comporter son volet financement. Il n'y en a pas et je demande par conséquent le renvoi à la commission fiscale pour examiner cette question pour le présent projet de loi.

La présidente. Un renvoi à la commission fiscale ayant été proposé, une personne par groupe peut s'exprimer sur ce dernier.

M. Roger Deneys (S). Les socialistes ont soutenu ce projet de loi en commission et ils continueront à le soutenir ici en séance plénière, notamment parce que, pour nous, il est très clair que toute minorité doit être respectée. Il n'y a pas de raison qu'une minorité soit traitée différemment, à partir du moment où la Confédération garantit des droits et des devoirs pour une certaine catégorie de la population.

Cependant, sur le fond, les socialistes étaient opposés à la suppression des droits de succession, qui est, disons-le, une erreur funeste compte tenu des finances de notre canton. Même si, sur le fond, on peut envisager des aménagements, à l'époque ce n'était pas le moment. Aujourd'hui, ce n'est toujours pas le moment, mais, puisque le peuple a décidé de supprimer ces droits de succession, nous en prenons acte et nous sommes en faveur de cette égalité de traitement. Parce qu'il s'agit bien d'une égalité de traitement, contrairement à ce qu'a dit M. Nidegger...

La présidente. Sur le renvoi en commission, Monsieur le député...

M. Roger Deneys. J'y arrive, Madame la présidente, j'y arrive. Pour nous, socialistes, ce qui posait problème, et ce qui pourrait mériter un renvoi en commission, justement, c'est le fait que ce projet de loi ne traite pas de la même manière une autre catégorie de la population non négligeable: les couples non mariés avec ou sans enfants, qui ne sont pas dans le partenariat enregistré.

Tous ceux qui sont pacsés au niveau genevois ne sont pas traités de la même façon par ce projet de loi, parce qu'actuellement le régime genevois ne prévoit pas de régime fiscal particulier pour les couples enregistrés dans un partenariat genevois. Cela, pour nous, ce n'est pas acceptable non plus ! Il y a des gens qui ne veulent pas se marier pour des raisons diverses et variées, et c'est tout à fait respectable. Et il n'y a pas de raison de les traiter différemment des couples de même sexe enregistrés au niveau fédéral.

Pour nous, socialistes, un renvoi en commission pourrait être utile pour examiner si l'on peut étendre cela au régime genevois, même si fondamentalement, en fait, c'est plutôt le régime genevois de partenariat enregistré du PACS genevois qui devrait être modifié. Donc, cela pose problème pour nous: même si, sur le fond, nous soutenons tout à fait les objectifs de ce projet de loi, il n'y a pas de raison de traiter différemment les couples enregistrés au niveau fédéral que les couples mariés.

M. Jean-Michel Gros (L). Le groupe libéral ne s'associe pas à la demande de renvoi en commission fiscale pour la simple et bonne raison que le débat a eu lieu. Le débat a eu lieu en commission, et, si M. Nidegger ne le sait pas, c'est qu'il n'a assisté qu'à une seule de ces séances consacrées à ce thème, et cela comme remplaçant. A preuve qu'il s'est prudemment abstenu lors du vote d'ensemble, et c'est pourquoi le rapporteur s'est cru autorisé de dire que ce projet a été accepté à l'unanimité de la commission.

Par ailleurs, si vous refusez comme nous le renvoi en commission, je vous signale que le groupe libéral, et pour cause, acceptera ce projet de loi, puisqu'il en est l'auteur !

M. Nidegger a parlé d'égalité de traitement. Cela a été évoqué et M. le rapporteur a bien signalé qu'il y a égalité de traitement dans ce domaine, puisque la loi fédérale - même si elle ne connaît pas de loi d'application cantonale pour l'instant - s'appliquera d'office au 1er janvier au canton de Genève en matière de fiscalité directe et qu'ainsi les partenaires enregistrés verront leurs revenus s'additionner comme pour un couple marié. Il convient donc, par égalité de traitement, de les exonérer aussi des droits de succession, comme le peuple l'a voulu  Le peuple a voulu à deux reprises les traiter comme des conjoints, par la loi fédérale, et exonérer des droits de succession les familles. Ainsi, c'est une véritable égalité de traitement de penser maintenant à l'exonération des partenaires.

Petite note à l'égard du Conseil d'Etat, s'il nous entend dans les coulisses: il est amusant que la loi d'application sur le partenariat enregistré ne soit pas encore en vigueur, puisque le Conseil d'Etat a traîné pour déposer ce projet, mais que, par contre, dans la «Feuille d'avis officielle», vous avez pu voir publier le Règlement d'application de la loi d'application cantonale. C'est assez rare de voir un règlement publié avant même que la loi d'application soit en vigueur... Elle n'était même pas encore passée en commission. C'est une curiosité... Si jamais le Conseil d'Etat m'entend, peut-être qu'il pourra nous répondre à ce sujet.

Bref, comme nous sommes dans un débat de renvoi en commission, j'abrège, Madame la présidente, parce que je vois que vous commencez à hocher. Donc, nous refuserons le renvoi en commission et nous accepterons cette loi.

Mme Michèle Künzler (Ve). C'est vrai que nous étions opposés à l'abrogation des droits de succession, en tout cas dans le cadre de la famille, et pour favoriser le droit des donations, pour favoriser la transmission plus rapide des biens, parce que nous savons que les droits de successions péjorent actuellement la transmission des biens, qui interviennent beaucoup trop tard.

Par contre, nous avons toujours été d'accord pour l'abrogation des droits de succession dans les cas de conjoints, puisque c'est la même génération. Et il faut une égalité de traitement avec les couples pacsés. Pour nous, la discussion a eu lieu en commission, c'est maintenant le moment de voter, et je refuse d'aller encore une fois en commission.

Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Pour le parti démocrate-chrétien, il est évident qu'il n'est pas nécessaire de renvoyer ce projet en commission, étant donné que le travail a été fait. Bien évidemment, au nom d'une égalité de traitement à laquelle nous sommes très attachés et au nom d'une égalité devant le droit quel que soit le choix de vie et l'orientation sexuelle, nous remercions le parti libéral d'avoir proposé ce projet de loi, et nous le voterons.

M. Hugues Hiltpold (R). Le groupe radical ne s'associera pas à la demande de l'UDC de renvoyer ce projet en commission. Il ne s'agit pas, comme l'a demandé M. Nidegger, de traiter de la question financière, puisque celle-ci a déjà été abordée en commission fiscale. Pour cette simple raison, nous ne soutiendrons pas le renvoi en commission.

Je crois qu'il nous faut voter ce projet de loi, qui règle un principe d'inégalité de traitement qui existera dès le début de l'année prochaine, puisque, vous le savez tous, cette loi a été votée par le peuple au mois de juin 2004 dernier. Il nous faut ce soir concrétiser de façon que cela entre en vigueur au début de l'année prochaine.

La présidente. Je vais repasser la parole à M. le rapporteur... (Remarque.) Monsieur Catelain, votre groupe s'est déjà exprimé sur le renvoi en commission, il n'est donc pas nécessaire de reprendre la parole.

M. Olivier Jornot (L), rapporteur. J'aimerais tout d'abord dire quelques mots des suggestions de M. Deneys, parce que, comme l'ont relevé un certain nombre d'intervenants dans ce débat, la situation des partenaires selon le droit genevois et celle des futurs partenaires selon le droit fédéral se distingue complètement d'un point de vue fiscal, puisque le premier partenariat n'a pas de conséquences fiscales alors que le second en a. Ce qui fait que, si l'on avait dans ce projet de loi inclus les partenaires de droit cantonal, on les aurait évidemment favorisés sans contrepartie, ce qui n'aurait pas été juste.

J'aimerais simplement vous dire que le débat sur le partenariat cantonal aura lieu, comme vous le savez, dans le cadre du projet de loi du Conseil d'Etat, qui propose de le maintenir, alors que c'est un avis qui n'est pas forcément unanimement partagé.

J'aimerais ensuite confirmer ce qui a été dit par plusieurs interlocuteurs: le débat a bel et bien eu lieu en commission. Il a eu lieu de manière complète; si cela n'a pas pris des dizaines de séances, c'est parce qu'il est apparu absolument évident à tous les interlocuteurs que l'assimilation qui était faite par ce projet de loi était en effet nécessaire.

J'aimerais terminer en disant à M. Nidegger qu'il a un débat de retard: les grandes tirades cryptohomophobes dont il nous a gratifiés tout à l'heure, on les a déjà entendues dans le débat sur le partenariat fédéral. Et le peuple suisse a tranché en acceptant ce partenariat, ce qui signifie qu'il ne faut pas se tromper de débat. On n'en est plus là aujourd'hui !

Je vous recommande, Mesdames et Messieurs, de ne pas renvoyer ce projet de loi à la commission fiscale.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 9591 à la commission fiscale est rejeté par 55 non contre 8 oui et 3 abstentions.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous faire voter sur... (Remarque.) Oui, Monsieur Catelain ? (Brouhaha.)

M. Gilbert Catelain (UDC). Avant la prise en considération de ce projet de loi, j'aimerais quand même revenir sur le Règlement de ce Grand Conseil, que le Bureau est chargé de faire respecter. Tout projet de loi qui prévoit une dépense nouvelle - dans le cas présent, par augmentation de la dette - doit envisager une recette correspondante. Régulièrement, ce Grand Conseil s'est retrouvé dans l'illégalité, cela nous a même été reproché les années précédentes par les différents conseillers d'Etat en charge des finances, et ce projet de loi ne prévoit pas de recette correspondante. En ce sens, il est illégal.

J'ajouterai que les partis de gauche, qui s'apprêtent à voter l'entrée en matière de ce projet de loi, ont invoqué l'égalité de traitement, la défense des minorités. Je crois comprendre - mais j'ai peut-être mal interprété - que M. Deneys, à l'avenir, défendra toutes les minorités, également les 10% les plus riches de ce canton, qui paient des impôts en proportion nettement trop élevée... (L'orateur est interpellé.) En ce sens, c'est inégal et j'espère qu'il viendra avec un projet de loi qui prévoit une égalité devant l'impôt pour l'ensemble des citoyens, avec un taux uniforme, et que le parti démocrate-chrétien ne viendra pas simplement avec une allocation familiale à deux-cents balles, mais avec une vraie politique fiscale pour les familles avec enfants.

Je vous invite donc à ne pas prendre en considération ce projet de loi.

La présidente. Je précise juste qu'il ne s'agit pas dans ce cas-ci d'une dépense nouvelle, mais d'une recette en moins.

Mis aux voix, le projet de loi 9591 est adopté en premier débat par 63 oui contre 8 non et 1 abstention.

La loi 9591 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 9591 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 63 oui contre 8 non et 1 abstention.

Loi 9591

M 1722
Proposition de motion de Mme et MM. Pierre Weiss, Fabienne Gautier, Edouard Cuendet, Jean-Michel Gros, Ivan Slatkine, Olivier Jornot, Pierre Ducrest, Francis Walpen, Christian Luscher, Marcel Borloz, Alain Meylan concernant l'introduction du nouveau certificat de salaire

Débat

M. Pierre Weiss (L). Le département des finances a permis que de nombreuses facilités soient apportées aux entreprises lors de sa collaboration avec certains cercles. Je ne serai pas plus précis, je laisserai le chef du département peut-être en dire davantage.

Concernant l'introduction du nouveau certificat de salaire, celui-ci, normalement, à partir de 2007, devrait toucher chacun d'entre nous, non seulement sur le plan fédéral, mais également sur le plan cantonal. Nous sommes aujourd'hui le 1er décembre, il est important que les contribuables, qu'ils soient des personnes physiques ou des entreprises, sachent, si vous me passez l'expression, à quelle sauce ils vont être mangés par le fisc l'an prochain. Il en va de la prévisibilité de l'activité économique; il en va aussi, d'une certaine façon, du revenu de nos concitoyens et des entreprises, puisque, comme chacun le sait, ce nouveau certificat de salaire va se traduire par un grand sourire, ou en tout cas un demi-sourire, de M. Hiler, dans la mesure où il va augmenter ses recettes et diminuer l'argent qui va rester à chacun d'entre nous.

Voilà la raison pour laquelle, dans un strict but d'information, il nous a semblé utile de déposer cette proposition de motion, à laquelle je vous prie d'accorder une écoute favorable et que je vous suggère de renvoyer au Conseil d'Etat. D'ailleurs, peut-être celui-ci pourra-t-il nous donner dès ce soir une réponse qui nous satisfera et nous renseignera tous.

Mme Michèle Ducret (R). Il semble que les cantons aient perdu le long combat qu'ils ont mené contre le nouveau certificat de salaire. Je le regrette personnellement. Vous savez, comme l'a souligné M. Weiss qui vient de parler, que nouveau certificat de salaire égale: frais augmentés pour les entreprises ainsi que difficultés de mise en service de ce nouveau certificat de salaire; et aussi, je le rappelle à tout hasard, augmentation certaine des revenus des salariés, donc augmentation de leurs impôts. Effectivement, M. Hiler aura de quoi sourire, puisqu'il va engranger des recettes fiscales supplémentaires.

Le certificat de salaire a aussi, à mes yeux, un défaut assez rédhibitoire, c'est qu'il est le fruit d'une bande de joyeux fiscalistes qui, s'étant réunis, se sont dit: «Unifions le certificat de salaire de façon que, dans toute la Suisse, tout le monde soit imposé de la même manière !». Ce qui me dérange, c'est que ce n'est pas une autorité reconnue par notre Constitution qui a décidé de cela, mais simplement un petit groupe de personnes qui n'est investi d'aucune autorité... (L'oratrice est interpellée.) Un quarteron, me dit-on !

Je vous informe que le groupe radical soutiendra tout à fait la motion du parti libéral sur ce point et qu'il estime que toutes les réponses que le Conseil d'Etat pourra nous donner sur cette question seront les bienvenues.

M. Roger Deneys (S). Pour le groupe socialiste, j'aimerais juste relever le fait que les intervenants sont soit des représentants des syndicats patronaux, soit des représentants de la Chambre de commerce. On voit bien qui s'exprime à ce sujet, ce sont des représentants des milieux traditionnels conservateurs patronaux... (Exclamation.) ... qui se sont opposés dès le départ à ce nouveau certificat de salaire pour une raison très simple, c'est qu'il introduit une transparence supplémentaire en matière de déductions diverses et variées... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)

Certaines déductions pourraient mériter un regard un peu plus critique, notamment dans le domaine de la formation continue. Peut-être que cela demande une considération particulière, mais en même temps, c'est vrai que toutes les pratiques patronales traditionnelles - et j'en sais quelque chose, étant moi-même petit patron - sont de caractère, en général, à accorder des avantages divers en nature, qui sont en fait... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ... une injustice fiscale notoire par rapport à d'autres salariés.

Je pense qu'il faut d'abord relever le fait que les milieux patronaux ont tout fait pour saboter l'introduction de ce nouveau certificat de salaire et n'ont pas travaillé dans un esprit constructif. Je trouve assez fort de café que l'on nous propose, le 1er décembre 2006, d'examiner cette motion en urgence, alors qu'en fait on sait très bien que nous aurions pu discuter sur des bases beaucoup plus constructives bien plus tôt. Parce qu'il y a certaines déductions qui, précisément, méritent éventuellement d'être traitées autrement au niveau fiscal. Mais, on le relève séance après séance à la commission fiscale, un franc est un franc, et il n'y a pas de raison de traiter différemment une voiture de fonction, des frais de déplacement ou des frais de formation qu'un salaire de base ! Et dans ce sens-là, les socialistes refuseront cette motion.

La présidente. Sont encore inscrits: M. Renaud Gautier, M. Pierre Weiss, Mme Michèle Ducret, M. Eric Stauffer, M. Claude Jeanneret et M. le conseiller d'Etat David Hiler. La liste est close.

M. Renaud Gautier (L). Je suis, comme le préopinant, un employeur, je ne fais pas partie de la FER ni de la Chambre de commerce et d'industrie...

Une voix. C'est une erreur !

M. Renaud Gautier. Peut-être ! Quoique... Ce que je voulais dire ici, c'est que je m'étonne du discours des socialistes. C'est objectivement un acte citoyen qui est fait: aujourd'hui, les patrons d'entreprises réclament une position claire du Conseil d'Etat, parce que la plupart des patrons genevois ont dû mettre en place un système nouveau et complexe par rapport à une loi qui va entrer en vigueur le 1er janvier. Appeler de nos voeux aujourd'hui que le Conseil d'Etat se détermine, ce n'est pas du tout essayer de tricher sur ceci ou cela. C'est, bien au contraire, aller dans le sens d'une décision qui n'a pas été prise à Genève mais sur le plan fédéral: s'aligner - c'est tout à fait citoyen - sur ces décisions-là et savoir officiellement aujourd'hui, si je peux m'exprimer ainsi, à quelle sauce nous serons mangés en 2008. Il est important que le Conseil d'Etat ait aujourd'hui un message clair vis-à-vis des employeurs, privés ou publics.

Il faut donc soutenir cette motion et attendre encore quelques instants avant de connaître la position ferme et précise du Conseil d'Etat.

M. Pierre Weiss (L). Dans mon intervention précédente, j'avais voulu, par souci de sobriété et pour permettre à ces débats de se dérouler le plus vite possible sur cet objet, compte tenu de son importance, être le plus allusif possible. L'un d'entre nous - qui est d'ailleurs à la tête d'une association patronale fantoche... (Protestations.) ... regroupant peut-être une petite dizaine d'entreprises - a considéré qu'il était utile de mettre en cause le travail que l'on appellerait aujourd'hui «citoyen» d'un certain nombre d'associations qui, elles, regroupent pour l'une 16 000 entreprises et 160 000 travailleurs et, pour l'autre, quelque chose comme 1600 entreprises et 75 000 travailleurs. (Brouhaha.) Je laisse par conséquent le poids des nombres répondre de la remarque qui a été faite.

Effectivement, nous avons à coeur l'intérêt des entreprises et de leurs collaborateurs. Parce que nous avons lutté contre une opération qui était menée par un quarteron de fonctionnaires fédéraux ignorants des réalités des entreprises ! Nous avons lutté contre une prise de pouvoir de l'administration sur le pouvoir politique, y compris le pouvoir du Conseil fédéral et des Chambres fédérales, contre des manoeuvres subreptices qui étaient menées à Berne et dont on se rend compte aujourd'hui qu'elles auront des conséquences dans la vie concrète, non seulement des entreprises mais également des collaborateurs. Nombre de prestations qui sont reçues par les collaborateurs se verront ainsi imposées. Et je m'étonne que le parti socialiste, qui se veut défenseur des travailleurs en général et des employés des classes moyennes en particulier, refuse de soutenir une motion qui se veut uniquement soucieuse de l'information à donner à la population ! A la population, toutes catégories comprises. Qu'il s'agisse des indépendants, qu'il s'agisse des entreprises et, évidemment, de leurs collaborateurs. Il y a là une nécessité de transparence de la part de l'Etat !

Sur le plan de l'introduction du nouveau certificat de salaire, Mesdames et Messieurs les députés, il faut savoir que de tous les cantons suisses il y en a un, par exemple, qui a repoussé à 2008 la date de l'introduction du nouveau certificat de salaire; il s'agit du canton de Zurich. D'autres ont mis certaines conditions, je pense par exemple au canton de Lucerne ou au canton de Soleure. Je ne vais pas détailler, à moins que vous ne le souhaitiez... (Exclamations.)

La présidente. Il est onze heures moins cinq, Monsieur le député, je vous remercie !

M. Pierre Weiss. Non, je ne vais pas le détailler ! Néanmoins, en ce qui concerne le canton de Genève, il n'y a pour le moment, sauf si vous allez sur le site «www.fer.ch»... (Rires. Huées.) ... aucune source...

La présidente. Monsieur le député !

M. Pierre Weiss. Non, Madame ! Je remplis bêtement une fonction citoyenne d'information. (Brouhaha.) Il n'y a aucune source autre que le site que je viens de vous indiquer qui renseigne les entreprises, y compris celles qui appartiennent à l'association fantoche dont je faisais état tout à l'heure... (Exclamations.)

La présidente. Modérez vos termes ! Modérez vos termes... (M. Pierre Weiss poursuit son intervention alors que la présidente s'exprime. Brouhaha.)

M. Pierre Weiss. . ... nous donner le nombre de membres de l'association en question, j'en serais heureux, et je pense que M. Deneys pourra peut-être nous en dire davantage... (Remarques.) sur son association...

La présidente. Il va vous répondre, c'est sûr !

M. Pierre Weiss. Je m'en réjouis ! Et c'est la raison pour laquelle, Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, à onze heures moins cinq, je considère qu'il est utile de voter en faveur de cette proposition de motion. (Quelques applaudissements.)

Mme Michèle Ducret (R). Je ne voudrais pas prendre la défense des associations que M. Deneys m'accuse de défendre, j'ai de bonnes raisons pour cela. Ce qui m'étonne tout de même dans cette question, c'est que les principales victimes du nouveau certificat de salaire, ce seront les salariés ! Alors, je pensais naïvement que vous défendiez les salariés... Je vois qu'en réalité vous ne les défendez pas, puisque vous acceptez très volontiers que leur revenu augmente et que, par conséquent, leurs impôts augmentent !

M. Eric Stauffer (MCG). Même si, avant, nous n'étions pas d'accord avec une certaine droite, maintenant nous allons l'être avec elle. Pourquoi ? Parce que nous sommes, encore une fois, hors du clivage politique et nous voulons améliorer la qualité de vie de nos concitoyens.

En effet, ce nouveau certificat de salaire impliquera que l'ouvrier ou l'employé qui, par exemple, reçoit un cadeau après vingt ans de bons et loyaux devra l'inclure dans sa déclaration d'impôts... Il va devoir s'acquitter d'impôts sur un cadeau d'entreprise, après vingt années de bons et loyaux services, ce qui n'est pas tolérable ! Si nous votons des lois, c'est pour qu'elles soient appliquées, pas pour qu'elles soient contournées. Or pour un ouvrier ou un employé qui irait à un repas de fin d'année, eh bien, si l'on voulait appliquer le droit, son patron devrait diviser la quote-part par le nombre de participants et compter ce gain en nature dans le nouveau certificat de salaire... Ce n'est pas tolérable, ce n'est pas concevable.

C'est la raison pour laquelle le groupe Mouvement Citoyens Genevois, toujours dans l'esprit d'améliorer la qualité de vie de nos concitoyens, s'opposera à ce projet.

M. Claude Jeanneret (MCG). Le groupe MCG ne peut pas être d'accord avec ce nouveau certificat de salaire. Nous soutiendrons donc la motion déposée par le groupe libéral. Je qu'il faut le dire, c'est un certificat de salaire qui va accabler le travailleur de nouveaux impôts et, surtout, compliquer l'administration des petites entreprises. Je dis bien «des petites», parce que pour une grande entreprise ce n'est pas important d'avoir un peu plus ou un peu moins d'administration - je pense aux indépendants, avec peut-être un ou deux employés... C'est absolument intolérable ! On est arrivé à subir le diktat de quelques fonctionnaires fédéraux qui n'ont rien à voir avec la question, si ce n'est de rapporter de l'argent d'une manière, je dirai un peu déplacée, et en accablant vraiment le salarié.

C'est la raison pour laquelle nous, Mouvement Citoyens Genevois, qui défendons avant tout le citoyen, sommes contre ce certificat de salaire. Et ce certificat de salaire a quelque chose d'inique pour les citoyens, qu'ils soient employés ou employeurs: on est en train de chercher à prendre des impôts sur tout ce qui est le fonctionnement d'une entreprise ! C'est la raison pour laquelle nous soutiendrons cette motion.

Une voix. Très bien !

La présidente. Monsieur Roger Deneys, je vous redonne la parole, puisque vous avez été mis en cause.

M. Roger Deneys (S). Tout d'abord, j'aimerais remercier M. Gautier pour ses propos très pondérés et ses explications. C'est vrai que la première invite, qui demande de fixer la date d'application du nouveau certificat de salaire, revient en fait à dire à quelle sauce les entreprises seront mangées. C'est tout à fait raisonnable et nous pouvons, bien entendu, être d'accord là-dessus.

Cependant, la suite de la motion, qui demande d'accorder des dérogations, nous pose évidemment davantage de problèmes. Je pense que tout le monde doit être traité de façon égale. (Brouhaha.) C'est pourquoi je pense que le MCG se trompe: toutes les entreprises et tous les citoyens ont un intérêt majeur à ce que la transparence fiscale soit la même pour tout le monde. On sait très bien que dans certaines entreprises, les primes, les voitures de fonction, etc., sont un moyen de réaliser des revenus annexes qui sont défiscalisés. Ce n'est pas équitable pour les salariés. (Brouhaha.) Et ce n'est pas acceptable sur le fond ! Cela doit être fait dans une transparence fiscale normale.

Ensuite, Madame Ducret, je suis heureux d'apprendre que les syndicats patronaux et la Chambre de commerce défendent les salariés. Je l'apprends aujourd'hui ! Je ne l'avais pas encore remarqué... Mais c'est une bonne nouvelle. On verra pour la suite...

Et pour répondre à M. Weiss, je suis peut-être à la tête d'une petite association, je suis un membre du comité, d'une dizaine de personnes. Mais ce qu'il y a de sûr, Monsieur Weiss, c'est que moi, je suis un patron, un vrai patron, et je ne suis pas un salarié du milieu patronal depuis des années... (Protestations.) J'ai créé des emplois, Monsieur Weiss, et je le fais depuis des années ! (Applaudissements.)

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Je vais faire miens quelques sages propos du député Jornot dans l'un ou l'autre des débats. Ce n'est pas le lieu ici de discuter si l'on veut un nouveau certificat de salaire ou pas; ce n'est pas à nous de le décider, c'est décidé ! Certains regretteront la manière dont les choses se sont passées, mais maintenant nous devons l'appliquer. La réponse, je vous la donne immédiatement. Elle n'a jamais varié du côté de l'administration fiscale cantonale. Comme l'ensemble des cantons suisses, à l'exception de Zurich - cela a été dit - et de Lucerne...

Une voix. Et de Soleure !

M. David Hiler. Soleure, c'est un peu différent. Nous allons effectivement appliquer pour l'exercice fiscal 2007 ce nouveau certificat de salaire. Exercice fiscal 2007 ! Ce qui signifie que d'ici à 2008 effectivement, chacun, du côté des entreprises, des employeurs d'une façon générale, et des employeurs publics également, doit se mettre en situation de pouvoir donner les informations utiles pour répondre, ma foi, à des obligations fédérales. Cela nous paraît encore un délai raisonnable.

Les milieux professionnels, comprenez ceux qui font les déclarations d'impôts, savent tout cela. Les entreprises, je le souhaite, le savent aussi, puisque, contrairement à ce qui a été fait dans les autres cantons suisses, l'administration - à son initiative, je tiens à le souligner - a cherché un partenariat avec les organisations représentatives précisément des entreprises de ce canton.

Pourquoi un partenariat, et quel est le gain ? Pour les entreprises, c'est la possibilité d'avoir un règlement type qui évite à des milliers d'employeurs de devoir construire eux-mêmes un règlement - ce qui serait du gâchis, vous êtes bien d'accord. C'est aussi l'intérêt de l'administration fiscale cantonale qui, par le biais de ce partenariat, va s'épargner de vérifier pièce à pièce des milliers de règlements d'entreprises. Et c'est en partie grâce à ces petits efforts constants qu'on peut continuer à taxer avec le même nombre de taxateurs de plus en plus de déclarations chaque année, avec bien sûr un élément de complexité supplémentaire au niveau technique.

Donc, tout est en place, Mesdames et Messieurs les députés ! En revanche, je veux bien admettre - et je l'ai dit aux auteurs de la motion - qu'il y a là un signal pour l'Etat de Genève et pour l'administration fiscale cantonale en particulier. Nous ne devons pas, en termes de communication, nous contenter de parler avec les fiduciaires, de parler avec la FER - pour ne pas la citer - mais nous devons donner une information plus nette, plus générale, par le biais du site internet de l'Etat de Genève, par le biais de la «Feuille d'avis officielle», et cette information doit être récurrente.

Il y a un type de dérogation qui existera pour le premier exercice, c'est lorsqu'il s'agit, sur le plan formel, de collaborateurs qui quittent une entreprise et à qui il faut délivrer pendant l'exercice 2007 un certificat. Dans ce cas-là, l'ancien formulaire pourra être utilisé, sur la forme. Mais sur le fond, évidemment, les directives qui ont force de loi devront être respectées, même si certains regrettent la manière dont les choses se sont passées.

Par ailleurs, l'année 2007 - mais l'année 2006 déjà - a été l'occasion de soulever toute une série d'interprétations: qu'est-ce qu'un salaire «en nature» ? - si je puis m'exprimer ainsi, sous forme de voiture ou sous forme de toute autre sorte de chose - et qu'est-ce qui ne l'est pas ? Comme un repas partagé en fin d'année, pour reprendre un exemple qui vient d'être donné. Dans certains cas, qu'est-ce qui est vraiment de la part de l'employeur une manière de rendre la fonction plus attractive ? Et qu'est-ce qui, pour le salarié, n'est manifestement - si je peux le dire ainsi - qu'un droit d'aubaine ? C'est-à-dire qu'on lui offre une possibilité qui n'est pas forcément liée à la fonction. Ce serait le cas, par exemple, d'un enseignant dans une école privée, dont les enfants peuvent suivre l'enseignement dans l'école privée en question... Tout cela, c'est de la micromécanique. C'est de la micromécanique qui doit suivre le droit, avec une toute petite marge d'interprétation.

Mais oui, Genève, pour cette fois, ne sera ni à l'avant-garde ni en retard ! Nous serons avec le gros wagon des cantons suisses: première bonne nouvelle ! L'administration est prête; le règlement négocié avec la FER est aussi un travail d'excellente qualité; nous avons même réussi à être le canton le moins bureaucratique dans l'application de cette norme. Réjouissons-nous !

Le Conseil d'Etat vous invite à accepter cette motion, ce qui nous permettra à mi-année de faire le point de la situation. Le message est compris: communiquer mieux. Nous allons nous y mettre tout soudain, de sorte que, régulièrement maintenant, on rappelle les nécessités. C'est donc un excellent accueil que le Conseil d'Etat fait à cette motion, même s'il ne partage pas quelques points d'analyse de l'un ou de l'autre dans cette enceinte. (Applaudissements.)

Mise aux voix, la motion 1722 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 49 oui contre 12 non et 5 abstentions.

Motion 1722

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, un commentaire avant de nous quitter: nous devrions très sérieusement réfléchir aux horaires de nos sessions, notamment à celles qui reprennent à 20h30. Je vous souhaite un excellent week-end.

La séance est levée à 23h.