République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 15h, sous la présidence de M. Pascal Pétroz, président.

Assistent à la séance: M. Laurent Moutinot et Mme Micheline Spoerri, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Robert Cramer, président du Conseil d'Etat, Martine Brunschwig Graf, Carlo Lamprecht, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Esther Alder, Bernard Annen, Florian Barro, Thierry Charollais, Roger Deneys, Gilles Desplanches, Jean-Claude Dessuet, Philippe Glatz, Mariane Grobet-Wellner, Michel Halpérin, Jacques Jeannerat, Sami Kanaan, René Koechlin, Christian Luscher, Claude Marcet, Blaise Matthey, Alain-Dominique Mauris, Jean Rémy Roulet, Pierre Schifferli, Patrick Schmied, Pierre Weiss et Salika Wenger, députés.

Annonces et dépôts

Néant.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous prenons notre ordre du jour vert.

PL 9187-A
Rapport de la commission de contrôle de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner la parcelle 2617, fe 54, de la commune de Carouge, pour 2'800'000F

Premier débat

M. Jacques Baud (UDC). Comme cela figure dans le rapport, la vente sur cet objet est de 50% inférieure à sa valeur vénale - soit à la valeur normale de vente d'un immeuble. Ces 50% ne sont pas acceptables. C'est pourquoi nous refuserons la vente de cet immeuble et nous renverrons cet objet en commission.

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Je suis chargée de vous transmettre, au nom du groupe socialiste, quelques réflexions concernant les rapports sur les projets de lois de la commission de contrôle de la Fondation, et ceci en plein accord avec nos collègues rapporteurs, Mme Gobet Winiger et M. Velasco.

Il est apparu, lors de notre dernier caucus, que les rapports de cette commission suscitaient un malaise certain dans notre groupe. Leur contenu succinct nous interroge. S'il y a débat dans cette commission, cela n'apparaît pas dans le rapport; or, nous avons appris par nos commissaires qu'il pouvait y avoir débat. Il n'y a jamais eu de rapport de minorité: c'est étrange ! Est-ce sain sur le plan démocratique ? Comment se satisfaire d'un rapport qui précise que la perte, s'agissant du projet de loi 9187-A, est de 5,558 millions de francs, alors que le prix de vente est de 2,8 millions ? Pourquoi ces chiffres ? Qu'est-ce qui explique une perte aussi énorme que celle de plus de 5 millions - et ce n'est pas la première fois ? Autre remarque sur le même projet de loi: l'immeuble est situé à la route de Saint-Julien, à Carouge. Voilà une indication bien vague...

Notre Grand Conseil et les citoyennes et citoyens de notre République ont droit à une meilleure information sur les travaux de la commission de contrôle de la Fondation ainsi que sur les immeubles et les déficits les concernant. Le groupe socialiste remercie les membres de la commission de tenir désormais compte de ces remarques - qui ne sont pas anodines.

Le président. Merci, Madame la députée. J'ai un petit souci, Madame et Monsieur les rapporteurs. Formellement, le rapporteur unique de ce projet de loi est M. le député Velasco et, sur mon écran, le rapporteur s'affiche simultanément aux places 117 et 118. Si l'on pouvait me préciser quels députés occupent ces places, cela me permettrait de donner la parole à la bonne personne. Vous êtes maintenant quatre à la table des rapporteurs, ce qui ne facilite pas ma tâche... Vous avez la parole, Madame Künzler !

Mme Michèle Künzler (Ve). Les rapports de cette commission sont effectivement succincts. Il y a eu un rapport beaucoup plus long sur un objet qui a suscité un réel débat: il s'agit du bâtiment sis au 79, rue de Lausanne - c'est le dernier objet que vous aurez à traiter ce jour. La perte occasionnée par cette vente est certes élevée, mais je rappelle que la perte prévisible s'élève à 2,7 millions de francs. Il est évident que certains immeubles ont été gagés de manière déraisonnable - et ce n'est malheureusement là pas l'un des pires cas que l'on ait constaté. Je rappelle par ailleurs que l'adresse exacte de l'immeuble concerné et diverses autres données sont toujours publiées dans la «Feuille d'avis officielle». Cependant, si les députés le désirent, on peut faire figurer l'ensemble de ces données dans les rapports de commission, cela ne nous dérange absolument pas.

Il y a déjà eu des rapports de minorité, un projet de loi avait été refusé - c'était d'ailleurs à mon instigation qu'il l'avait été - la vente de cet objet n'a toujours pas eu lieu et ce dernier reste entre les mains de la Fondation de valorisation. Alors, l'objectif de cette Fondation est de vendre. Et si ces rapports sont la plupart du temps acceptés à l'unanimité, c'est parce que nous nous sommes accordés sur l'utilité de la vente ainsi que sur le bien-fondé du prix.

M. Pierre Kunz (R). Je souhaite simplement soutenir les propos tenus par Mme Künzler en rappelant que les amis de Mme Schenk-Gottret peuvent en tout temps déposer des rapports de minorité. S'ils ne le font pas, c'est qu'ils jugent que ce n'est pas nécessaire. Vous pouvez néanmoins les rappeler à l'ordre, Madame !

Quant à la remarque de M. Baud, je suis surpris que ce dernier soit fâché, car son collègue a, en commission, voté en faveur du rapport qui nous est présenté. Mais il est des états d'âme qui, les élections approchant, peuvent s'expliquer...

Je rappelle que la commission élabore chaque année un rapport complet sur ses activités. Vous pourrez là aussi, Mesdames et Messieurs les députés, vous exprimer sur la manière dont vous considérez que la commission travaille.

M. Jacques Baud (UDC). Lorsque je prends une décision, ce n'est pas une décision politique, mais une décision de bon sens !

Mme Véronique Pürro (S). J'aimerais revenir sur les propos de Mme Schenk-Gottret. Lors de notre dernier caucus, nous avons effectivement discuté des rapports de cette commission. Et je crois, à entendre sa réponse, que M. Kunz n'a pas bien compris quel était notre souhait.

Il est vrai que nous disposons en commission - puisque j'en fais également partie - de toutes les informations utiles; nous y prenons toutes les décisions en notre âme et conscience avec, pour chacun d'entre nous, les compétences qui sont les nôtres. Or publiquement, il nous semblait toutefois intéressant que certains éléments soient portés à la connaissance de tous, ce qui n'est pas le cas avec les rapports actuels. Et je ferai plaisir au président de la commission, M. Mark Muller - je suis mal placée pour parler de cela, puisque je n'ai jamais rédigé de rapport et n'en rédige jamais - en estimant qu'il serait néanmoins intéressant que le public dispose d'un peu plus d'éléments que ceux figurant actuellement dans les rapports, cela compte tenu des sommes en jeu et, également, du fait que c'est au contribuable qu'incombe la prise en charge de ces montants. Par souci de transparence, il nous paraissait utile que les rapports votés par notre Grand Conseil et portés à la connaissance du public contiennent davantage d'éléments que ce n'est le cas actuellement. Je précise bien qu'il ne s'agit là que d'un souci de transparence, il n'est pas question de remettre en question la confiance que nos collègues nous témoignent en tant que membres de la commission, puisqu'il me semble que dans le cadre de nos débats nous disposons de tous les éléments souhaités.

Si cette discussion a vu le jour au sein de notre groupe, c'est que la commission a dernièrement eu à traiter un objet important mettant en jeu de très gros montants. Quelques commissaires - dont je fais partie - ont estimé, les sujets et les sommes en jeu étant parfois tels qu'il conviendrait de faire preuve d'un peu plus de transparence envers l'ensemble des députés et de la population.

M. Rémy Pagani (AdG). Nous avons discuté de la politique suivie par la Fondation de valorisation au sein de notre caucus, car une personne s'est récemment indignée - indignation par ailleurs légitime - du fait que, chaque fois que l'on vendait un objet, une somme quasiment analogue devait être épongée par le contribuable. C'est bien le résultat d'une politique scandaleuse - qui, je l'espère, a définitivement vécu durant les années 80 - qui a amené la Banque cantonale à s'engager sur des sommes astronomiques. On a cité l'exemple d'un immeuble qui valait 8 millions de francs et pour lequel la Banque cantonale avait prêté 55 millions... C'est le résultat de cette politique qu'il faut, une fois de plus, dénoncer !

Nous avons donc discuté de cette question au sein de notre caucus et nous ne remettons pas en cause, loin s'en faut, la politique actuelle qui est menée, et notamment le contrôle par notre commission. Après trois ans de fonctionnement, il convient néanmoins de se poser certaines questions. Je vous soumets donc ces dernières, auxquelles les uns et les autres devraient réfléchir.

Le premier point est le suivant: lorsque nous avons créé dans l'urgence cette Fondation, on pensait que l'on épongerait cette immense créance sur un laps de temps d'une trentaine d'années - je me souviens des débats de l'époque - c'est ce qui a prévalu dans les discussions qui ont eu lieu au moment de la création de cette Fondation. Or on s'aperçoit maintenant que l'on se trouve dans un laps de temps beaucoup plus court. De plus, la conjoncture faisant, la tendance est à la séparation très rapide de biens immobiliers. Une telle politique est justifiée, mais elle participe à l'augmentation du prix des loyers. Il est dès lors légitime de se demander comment adopter une attitude plus sociale face à l'impact de ces ventes sur l'ensemble du parc immobilier genevois. En sous-rubrique de cette question, on pourrait se demander s'il ne serait pas possible d'utiliser certains de ces biens immobiliers à d'autres fins, notamment pour du logement social - on a notamment assisté à l'affaire du Carlton...

Cela m'amène à une deuxième considération: si mes renseignements sont exacts, l'Etat n'a, jusqu'à présent, racheté aucun bien à cette Fondation. Je trouve cela extrêmement grave, car on assiste, s'agissant de la location de certains immeubles administratifs, je n'ose pas dire à des «aguillages financiers» mais, du moins, au paiement de loyers extrêmement élevés. Prenons l'exemple de l'office cantonal de la population: on paie un loyer, m'a-t-on dit, astronomique - j'ignore son montant exact - puis l'on rachètera cet immeuble ! On peut également citer l'exemple de l'immeuble Spengler. Le gouvernement fait preuve d'incohérence ! Plutôt que de payer des loyers trop élevés, il ferait mieux de faire un effort significatif pour acheter des immeubles qui serviraient, sur le long terme, à notre administration cantonale ! J'admets que le coût est prohibitif mais, prohibitif pour prohibitif, j'aime autant que ces bâtiments restent au sein de l'Etat plutôt qu'ils ne partent en des mains privées et que l'on paie des loyers exorbitants pour leur location de surfaces !

Ma dernière remarque concerne le logement social. Là aussi, je pourrais vous citer des exemples où, soit la Ville, soit l'Etat ont racheté pour des millions des immeubles - par exemple, pour régler le problème d'un plan de quartier à la rue de Lyon. Et, tout d'un coup, on s'interdit de le faire parce qu'un immeuble ne serait pas suffisamment rentable ?! Prenons le Carlton: j'ai visité cet immeuble, il est vrai que l'on pourrait discuter de la rentabilité stricto sensudes studios. Mais si l'on pense aux 140 places de parking et au lieu communautaire dans lequel pourraient se dérouler une série d'activités lucratives, on est en droit de se demander si l'Etat ne devrait pas acquérir cet immeuble, Monsieur Moutinot ! Il ne suffit pas d'y répondre négativement: il faudrait se dire que, quitte à perdre 1, 2, 3, 4 ou 5 millions de francs supplémentaires, la politique active de défense et d'acquisition des logements sociaux qui, je vous le rappelle, est inscrite dans notre constitution mériterait un effort particulier !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je rappelle à ceux qui l'auraient oublié que nous sommes en procédure de renvoi en commission. Par conséquent, un seul député par groupe peut... (Protestations.)M. Baud a demandé le renvoi en commission ! Je suis navré, mais je dois appliquer la procédure usuelle ! L'AdG, le parti socialiste, le parti radical et les Verts se sont déjà exprimés; ne se sont pas encore exprimés sur le renvoi en commission le parti libéral et le parti démocrate-chrétien. Je passerai par conséquent la parole à M. le député Mark Muller, à Mme la députée Stéphanie Ruegsegger, puis à M. le conseiller d'Etat Laurent Moutinot ! Oui, Madame Schenk-Gottret ?

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Le parti socialiste a pris la parole avant la demande de renvoi en commission. Cela n'entre donc pas en ligne de compte dans le cadre de la discussion sur le renvoi en commission.

Le président. Je vous remercie de me faire la leçon, Madame la députée... Si vous aviez été attentive, vous auriez néanmoins constaté que Mme Pürro s'était exprimée après vous ! Le parti socialiste s'est par conséquent exprimé sur le renvoi en commission. La parole est à M. le député Mark Muller.

M. Mark Muller (L). Ce débat est important et nécessaire. D'ailleurs, nous n'avons pour occasion de nous exprimer sur le fonctionnement de la Fondation de valorisation guère que les projets de lois que nous traitons à chaque séance pour autoriser la vente d'un certain nombre d'immeubles. Je rappelle que c'est uniquement lorsque la Fondation est propriétaire de l'immeuble et que ce dernier est vendu à un tiers que le Grand Conseil doit adopter une loi et que nous avons l'occasion d'en débattre. En revanche, lorsque la Fondation est créancière gagiste d'un immeuble, soit que ce dernier est toujours en main d'un débiteur et que ledit débiteur le vend avec l'accord de la Fondation à un tiers, nous n'avons pas à nous prononcer. Le cas évoqué tout à l'heure par Mme Pürro est, précisément, un cas sur lequel notre Grand Conseil n'aura probablement pas à se prononcer, puisqu'il s'agit d'un immeuble en main d'un privé - en l'occurrence, du débiteur. Ce procédé peut effectivement poser un problème dans les cas où il y a de gros abandons de créances, mais la loi que nous avons votée - sauf erreur, tous partis confondus - lors de la précédente législature ne prévoit pas que ce type d'opérations fasse l'objet d'un contrôle autre que celui de la commission. Il est vrai que la commission dispose d'un certain nombre de prérogatives, même si ces dernières ne consistent qu'à donner un avis - il ne s'agit même pas d'un préavis, mais d'un avis ! - que le conseil de Fondation n'est pas tenu de suivre.

Je dois avouer mon étonnement devant les critiques formulées par l'Alliance de gauche. Cette dernière est, en effet, largement à l'origine de la loi qui institue la Fondation - et, partant, à l'origine de la création même de cette Fondation. Je rappelle en outre que l'un des membres du groupe de l'Alliance de gauche siège au sein du conseil de cette Fondation, qu'il y participe très activement - ce dont je me réjouis - et qu'à ma connaissance il cautionne très largement la façon dont les choses se passent. Cela soulève probablement le problème de la participation d'élus politiques à ce type de conseils de fondation, mais il s'agit là d'une problématique plus large que nous avons déjà évoquée, notamment s'agissant de la BCGe, et sur laquelle nous aurons probablement l'occasion de revenir.

Sur le fond, la loi que vous avez votée - encore une fois, tous partis confondus - a pour unique but d'assainir l'«affaire» de la BCGe et de faire en sorte que cet assainissement coûte le moins possible au contribuable. Je vous rappelle que le parti libéral s'était en son temps montré extrêmement réservé et qu'il s'était opposé à la clause d'urgence - laquelle, et je me réfère là à nos débats d'hier sur la démocratie, n'a pas permis à la population de se prononcer sur une loi qui a eu pour effet d'engager l'Etat à raison de 5 milliards. A l'époque, il existait probablement d'autres moyens que la création de cette Fondation pour assainir la Banque cantonale - par exemple, le canton de Vaud s'y est pris de façon tout à fait différente, puisqu'il a recapitalisé d'un coup sa banque cantonale. Nous avons choisi de procéder à la création d'une Fondation - comme le canton de Zurich, si je ne m'abuse - eh bien, nous devons aller au bout de l'exercice ! En respectant l'esprit de cette loi, qui veut que la Fondation valorise le mieux possible - il s'agit d'une fondation de valorisation ! - ses actifs et les gages qu'elle possède sur divers immeubles en vendant ces derniers au plus offrant. C'est la loi qui le veut ! Si l'on veut modifier ce système, il faut déposer un projet de loi. L'Entente a d'ailleurs déposé un projet de loi pour modifier un certain nombre d'éléments de cette loi, mais pas cet aspect-là. Nous pensons que la Fondation doit, pour l'instant, avoir pour unique objectif de vendre les objets qu'elle maîtrise au plus offrant.

M. Pagani et d'autres estiment que l'on devrait utiliser le patrimoine maîtrisé par la Fondation à des fins de politique sociale - notamment à des fins de politique sociale du logement... On peut en discuter, on n'est pas complètement fermé à cette solution: pourquoi ne pas envisager un certain nombre de pistes ? Il est cependant bien clair que, si l'on s'engage dans cette voie, on ouvre également la porte à d'autres discussions portant, plus largement, sur la politique du logement. Vous devez vous rendre compte que l'on ne va pas accepter tout d'un coup que, pour des motifs de politique sociale du logement, l'Etat reprenne un certain nombre d'immeubles de la Fondation sur le dos des contribuables ! Car il faut être conscient du coût d'une telle opération. Cela devra se faire dans le cadre d'une discussion plus générale sur la politique du logement, et nous mettrons dans la balance certains éléments de la politique du logement actuelle qui ne nous conviennent pas ! Peut-être parviendra-t-on à une solution consensuelle qui permettra à des immeubles locatifs actuellement en main de la Fondation d'être rachetés à des conditions inférieures au prix du marché. Aujourd'hui, la Fondation vend - à juste titre - un immeuble au plus offrant; si un privé offre davantage que l'Etat, la Fondation doit vendre à ce privé. Voilà la situation actuelle ! Il faut s'en tenir là pour l'instant. Cela ne signifie pas que l'on ne puisse pas s'orienter vers une autre solution, mais cela nécessitera une discussion plus globale sur la politique du logement dans le canton.

Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je donne la parole à M. Pierre Kunz.

M. Pierre Kunz. Je renonce, Madame la présidente !

La présidente. Bien, Monsieur le député. La parole est donc à Mme Stéphanie Ruegsegger.

Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC). Je remercie M. Muller de son rappel historique sur la Fondation. Cette dernière a été créée dans des circonstances particulières qui n'étaient guère positives; son travail est délicat et difficile, elle a hérité de mauvais dossiers. Par conséquent, s'il peut arriver que nous réalisions un petit bénéfice lors de la vente d'immeubles, ce n'est malheureusement pas le cas de la majorité des dossiers. On sait d'ores et déjà que la situation dans laquelle s'est trouvée la Banque cantonale coûtera cher au canton - elle lui coûte déjà cher - et que la plupart des dossiers que nous aurons à traiter seront négatifs, car ce sont de mauvais dossiers. Alors, on ne va pas renvoyer en commission chaque projet de loi qui verrait apparaître un résultat négatif parce qu'on risquerait de tourner en rond ! Il faut en revenir à la mission de la Fondation de valorisation qui, comme l'a rappelé M. Muller, consiste à vendre au meilleur prix pour limiter les pertes, et cela dans l'intérêt tant de l'Etat que des citoyens de ce canton. Ces derniers devront de toute façon payer pour l'affaire de la Banque cantonale. Je vous propose de nous en tenir là.

Quant à la réflexion de M. Pagani, elle peut être intéressante, mais elle n'a, selon moi, pas lieu d'être ici, c'est une discussion qu'il conviendrait plutôt d'avoir en commission du logement. Pour mémoire, il n'a jamais été question d'étaler les ventes sur une trentaine d'années, le chiffre qui a toujours été articulé était celui d'une décennie. Il me semble que l'on tient plus ou moins le rythme - il y a des années plus ou moins fastes, mais on tient le rythme !

Le rôle de la Fondation est de vendre au meilleur prix. Si l'Etat, qui est consulté pour chaque dossier, souhaite acquérir un logement - et, à la limite, à un prix plus élevé que ce qu'il ne vaut en réalité ou que ce que l'Etat pourrait débourser - pour faire du logement social, c'est à l'Etat de le faire. Ce n'est pas à la Fondation de se lancer dans ce genre de considérations ! Cette dernière s'en tient au rôle qui lui est imparti par la loi, à savoir vendre au meilleur prix pour l'intérêt des contribuables !

M. Alberto Velasco (S), rapporteur ad interim. Contrairement aux dires du président, Mme Pürro n'a pas pu s'exprimer sur le renvoi en commission. Je le ferai donc au nom du groupe socialiste.

Ce rapport a été voté à l'unanimité en commission; il a notamment reçu l'assentiment du groupe socialiste et du groupe UDC. Par conséquent, nous ne pouvons que refuser ce renvoi en commission !

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Comme son nom l'indique, la Fondation de valorisation a pour but de valoriser un certain nombre d'objets gagés et de créances dont on sait, selon l'estimation initiale, qu'ils coûteront un montant de l'ordre de 2,5 milliards aux contribuables. Dès lors, la tâche de la Fondation consiste bien évidemment à faire en sorte que la facture du contribuable soit la plus légère possible. Le contrôle que vous exercez au travers de la commission et, maintenant, en plénière doit principalement permettre d'éviter que la Fondation n'en vienne, pour une raison quelconque, à brader un objet. Il est vrai que vous devriez également avoir le souci - et c'est le cas - d'éviter que la Fondation ne participe, par des prix trop élevés, à une reprise de la spéculation immobilière.

Dans le cas d'espèce, tous les travaux qui ont été menés montrent que la Fondation remplit tout à fait correctement son mandat, qu'elle a trouvé un acquéreur à un prix correct qui assure une bonne défense des intérêts de l'Etat et des contribuables. Votre commission unanime l'a d'ailleurs reconnu, de sorte qu'il est inutile de renvoyer ce dossier en commission. Cela serait non seulement inutile, mais même dangereux car, si les acquéreurs qui signent des contrats avec la Fondation de valorisation se rendent compte que la procédure parlementaire est floue et qu'elle risque de s'éterniser, vous compliquez la tâche de la Fondation de valorisation, vous prenez le risque que les offres soient plus basses et vous alourdissez ainsi la facture finale à la charge du contribuable !

Monsieur Pagani, je n'admets pas que vous utilisiez le terme d'«aguillage financier» lorsque vous évoquez la manière dont je gère les locations de l'Etat ! Si vous avez des questions précises à me poser à ce sujet, vous pourrez le faire, mais sachez qu'il n'y a aucun «aguillage financier» ! Il est vrai que l'Etat ou des entités publiques n'ont que rarement acquis des immeubles auprès de la Fondation de valorisation. Pourquoi ? D'une part parce que, comme M. Muller l'a rappelé, on est placé sur pied d'égalité par rapport à toute autre offre. D'autre part parce que, dans le cadre de la politique d'acquisition de biens immobiliers, je m'intéresse à deux éléments: en premier lieu, peut-on construire, est-ce qu'il y a une bonne valeur d'usage ? En deuxième lieu, bien entendu, est-ce que le rapport coût - qualité tient la route ? Je ne m'intéresse pas à l'identité du vendeur ! De ce point de vue, il n'y a, je peux vous l'assurer, aucun objet dans le portefeuille de la Fondation de valorisation qui aurait permis de placer par hypothèse l'office cantonal de la population. Si cela avait été le cas, on s'y serait vivement intéressé - mais ce n'est pas le cas !

Le travail de la Fondation de valorisation a été correctement fait; celui de votre commission également. Je vous invite par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser le renvoi en commission et à voter ce projet de loi tel que ressorti de vos travaux !

Présidence de M. Pascal Pétroz, président

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous votons par électronique sur la demande de renvoi en commission formulée par M. Baud. Le vote est lancé.

Mis aux voix, le renvoi en commission est rejeté par 52 non contre 6 oui et 2 abstentions.

Le président. Nous sommes victime d'une petite panne informatique. Je vous lis le message qui s'inscrit à l'écran: «Could not find file GDA. Cannot open file GDA». Cela nous aide beaucoup pour la suite de nos débats... Si quelqu'un souhaite s'exprimer, je le prie de bien vouloir lever la main ! (L'orateur est interpellé.)Mais je ne vois rien sur mon écran ! (Remarque.)Cela ne m'indique pas dans quel ordre les orateurs se sont inscrits ! C'est qui, le 111 ?

M. Christian Grobet. C'est moi ! (Rires.)

Le président. Ah, c'est vous ! Vous avez la parole, Monsieur le député !

M. Christian Grobet (AdG). Je viens de me rendre compte que chaque député se voit attribuer un numéro. Je me demande comment l'on parvient à 111 députés alors que nous ne sommes que 100, mais cela ne fait rien...

M. Muller a fait allusion à un député de l'AdG qui siégeait au sein du conseil de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe. Je tiens à préciser que je n'ai pas été désigné dans ce conseil en ma qualité de député, et encore moins en ma qualité de membre de la formation politique pour laquelle je siège au Grand Conseil: j'ai été nommé dans ce conseil à titre personnel, en fonction de qualifications que le Conseil d'Etat a estimées souhaitables pour y siéger. J'ajoute que c'est sur proposition de la Ville de Genève que j'y ai été nommé.

Je souhaite apporter certains éléments factuels à ce débat. En premier lieu, M. Muller a rappelé que la création de cette Fondation correspondait à une option politique. Au vu de l'expérience acquise, je crois pouvoir dire que l'option technique prise il y a quatre ans en créant cette Fondation - option également retenue par le canton de Berne - a été excellente. En effet, il aurait probablement été impossible pour le canton de Genève de fournir le refinancement correspondant aux provisions qui auraient dû être constituées pour ces 5,3 milliards de crédits - puisque je vous rappelle que les pertes ont été estimées à 2,7 milliards. Si la banque avait conservé ces crédits, il aurait fallu qu'elle bénéficie d'une provision de 2,7 milliards pour respecter les exigences de la Commission fédérale des banques.

En deuxième lieu, la commission de contrôle a pu se rendre compte de l'extrême complexité de ces dossiers. La gestion de ces dossiers aurait plombé le travail de la banque. Cette dernière a été soulagée de transférer ces dossiers à une fondation indépendante afin de ne pas avoir à rechercher des solutions concernant ces créances. Je crois pouvoir dire que la Fondation est motivée et qu'elle a pris ces problèmes en main de manière professionnelle, compétente, et dans le respect des exigences légales posées par ce Grand Conseil.

En troisième lieu, je remercie tant M. Muller que Mme Ruegsegger d'avoir rappelé que la tâche de la Fondation consistait à minimiser les pertes et, si possible, à éviter que ces pertes n'atteignent le taux de risque que nous avons estimé à 2,7 milliards sur la base d'expertises - en nous accordant, il est vrai, une certaine marge de sécurité. On espère que le taux de pertes sera inférieur à 50%, mais on n'est pas certain que cela sera possible, cela dépend évidemment des conditions conjoncturelles.

Mme Ruegsegger a bien fait de rappeler que le canton s'était inspiré de l'exemple bernois pour réaliser ces actifs sur dix ans. Néanmoins, la Fondation dépend évidemment de la politique financière du Conseil d'Etat et de la possibilité pour ce dernier de financer les pertes à la charge du canton. C'est le Conseil d'Etat qui a fixé le rythme de liquidation des actifs sur une période de dix ans. Si, à un moment donné, le Conseil d'Etat pense que ce rythme est trop rapide, il pourra le faire savoir, mais c'est sur cette base-là que la Fondation a été chargée d'accomplir sa mission.

J'ajoute un autre point, dont nous avons débattu hier soir: la cession des 5,3 milliards a dû, bien entendu, être couverte par des prêts - prêts qui ont atteint 5 milliards de francs et pour lesquels l'Etat doit chaque année payer le découvert entre les intérêts débiteurs de ces prêts et les encaissements de loyers par la Fondation. Par voie de conséquence, je signale à M. Pagani qu'il est judicieux que la Fondation ne porte pas trop longtemps ces immeubles car, tant qu'on les porte, l'Etat assume la charge d'intérêts débiteurs non négligeables.

Quant aux moyens de réaliser ces actifs, ils sont très clairs. La Fondation a voulu agir dans la transparence la plus totale. C'est pourquoi aucun objet immobilier n'est vendu sans avoir été mis sur le site Internet de la Fondation ainsi que dans son catalogue, et sans avoir fait l'objet d'annonces dans la presse spécialisée, notamment dans le journal «Tout l'immobilier». En outre, et il s'agit d'une particularité par rapport au secteur privé, aucun objet n'est vendu avant qu'un délai de trois semaines au minimum ne soit échu, et ce précisément pour ne pas donner l'impression que la Fondation puisse favoriser un acquéreur au détriment d'un autre. Compte tenu de ce qui s'est passé à la Banque cantonale, la Fondation s'est fixé pour règle d'être extrêmement rigoureuse dans le processus de vente de ses biens pour qu'à aucun moment on ne puisse la suspecter d'avoir favorisé qui que ce soit. Je le dis d'autant plus volontiers que la Fondation n'a eu jusqu'à présent aucun problème - si ce n'est avec un débiteur qui lui cherche noise avec, il faut le dire, la complicité d'une personne qui se qualifie de journaliste. Dans le «GHI», on nous accuse - et c'est grave - d'avoir commis des faux dans les titres. Le Procureur général a classé la plainte totalement infondée de ce débiteur. La Fondation dispose de pièces permettant de démontrer que cette accusation a été portée de manière parfaitement incorrecte. Mais même dans un cas comme celui-là, voyez à quel point on peut être dénigré !

Je le répète: la procédure que suit la Fondation est extrêmement claire. Ce n'est qu'au terme de trois semaines qu'elle examine si le montant pour lequel l'objet est mis en vente a été atteint. S'il ne l'a pas été, la Fondation contine à le mettre en vente jusqu'à ce qu'un acquéreur soit trouvé au meilleur prix. C'est la raison pour laquelle la Fondation a toujours mis les pouvoirs publics sur pied d'égalité avec les acquéreurs potentiels privés: ces derniers pourraient en effet trouver incorrect que des privilèges soient accordés à certaines collectivités publiques. Je tiens par ailleurs à rappeler que les collectivités publiques disposent d'un avantage: il s'agit de l'exercice d'un droit de préemption. L'exercice de ce droit implique toutefois que la collectivité publique acquiert l'objet en question au montant auquel le particulier était prêt à l'acheter. Cela démontre bien que la Fondation fait en sorte d'obtenir le meilleur prix pour la vente de l'objet en cause.

Comme je vous l'ai dit en aparté, Madame Schenk-Gottret, la Fondation n'y peut rien s'il y a des pertes considérables sur ces objets. On le sait: puisqu'il y a 2,7 milliards de pertes présumées, c'est que l'on subit des pertes sur de nombreux objets. Il est évidemment difficile pour la Fondation de refaire l'histoire de ces objets. Il y a eu, au début de l'activité de la Fondation, des discussions avec la commission pour savoir si son rôle consistait à être une commission d'enquête qui mène des investigations pour savoir comment l'on en était arrivé aux montants des créances qui ont été cédées à la Fondation. Ce n'est visiblement pas la tâche de la Fondation: la loi ne l'a pas prévu. Son travail est déjà particulièrement lourd. De surcroît, la Fondation se heurterait au secret bancaire de la Banque cantonale. Tout ce qui pourrait être fait, c'est de subodorer quant à la manière dont les dettes ont pu atteindre des montants pareils...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !

M. Christian Grobet. Une bonne partie de ces dettes résultent évidemment des intérêts non payés sur un certain nombre d'années - ce qui fait que la dette initiale a souvent doublé rien que par ce que l'on appelle le «moulinage des intérêts».

Je confirme donc que, à moins d'une modification de la loi, la Fondation ne peut faire autrement que de vendre au meilleur prix, sans quoi elle faillirait à sa tâche - et votre Grand Conseil pourrait alors certainement la critiquer à juste titre.

Pour le surplus, rien n'empêche l'Etat d'acheter certains objets. Des pouvoirs publics l'ont fait, quoique peu d'objets aient été susceptibles de l'intéresser. Comme M. Moutinot l'a souligné tout à l'heure, l'Etat et les communes auraient surtout été intéressés par l'achat de terrains non bâtis pour y construire des logements. Or, il n'y avait qu'un terrain important: il s'agit de l'ex-parcelle Blanc de Sécheron, qui a été achetée par la Ville de Genève et qui permettra de construire du logement social. Mais là également, je tiens à souligner que la fondation fait le nécessaire pour que la vente se passe...

Le président. Veuillez conclure, Monsieur le député !

M. Christian Grobet. ...dans les conditions rappelées tout à l'heure. Je termine, Monsieur le président, pour dire...

Le président. Vous avez d'ores et déjà largement dépassé votre temps de parole !

M. Christian Grobet. Il s'agit là d'un débat important ! Je dirai très rapidement encore deux choses. Tout d'abord, la Fondation présidée par M. Barro et dont la mission consiste à acheter des immeubles locatifs a acquis un certain nombre d'immeubles dont les loyers correspondent aux loyers HBM. Démonstration est faite que l'information que la Fondation fournit à l'Etat sur certains immeubles pouvait l'intéresser. J'ajoute, puisque l'on a évoqué les logements étudiants, que la Fondation a également signalé l'intérêt que pouvait présenter l'immeuble sis 15, Glacis-de-Rive, dont les studios vides ont été remis en état et serviront à du logement étudiant. D'autres bâtiments ont été mis à disposition à cette fin pour des étudiants, mais toujours dans le respect des principes que j'ai rappelés tout à l'heure.

La loi 9187 est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.

PL 9191-A
Rapport de la commission de contrôle de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner la parcelle 2117, fe 69, de la commune de Genève, section Plainpalais, pour 5'200'000F

Premier débat

M. Alberto Velasco (S), rapporteur ad interim. Je souhaite simplement indiquer à l'attention de M. Baud que ce rapport a été accepté à l'unanimité - soit avec l'assentiment de votre groupe. C'est tout, Monsieur le président !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Baud.

M. Jacques Baud (UDC). J'aimerais insister sur le point suivant: nous savons fort bien que quasiment aucune vente ne peut générer un bénéfice. On sait qu'il y a des pertes, nous sommes prêts à accepter une perte raisonnable. C'est simplement lorsque cette perte devient déraisonnable que nous y sommes opposés !

La loi 9191 est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.

PL 9214-A
Rapport de la commission de contrôle de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner la parcelle 2308, fe 38, de la commune de Genève, section Eaux-Vives, pour 3'800'000F

La loi 9214 est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.

PL 8875-A
Rapport de la commission de contrôle de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner la parcelle 3343, fo 36, de la commune de Genève, section Petit-Saconnex, pour 3'000'000F

Premier débat

M. Pierre Kunz (R), rapporteur. J'annoncerai deux nouvelles au Grand Conseil: une bonne, puisqu'il y a moins de 30% de perte sur ce dossier; une mauvaise, car ce n'est pas à l'unanimité, mais à l'unanimité moins une abstention que ce projet de loi a été accepté !

Mme Michèle Künzler (Ve). Je me suis effectivement abstenue lors de cette vente, car c'est selon moi exactement le genre d'immeuble que l'Etat devrait racheter: un immeuble simple, situé dans un quartier populaire, qui pourrait très bien servir à du logement social. Je conteste le mode de calcul actuel. Nous nous abstiendrons donc de nous prononcer quant à cette vente et nous reviendrons avec un autre projet de loi allant dans le sens d'un achat plus massif de la part des fondations ou de l'Etat.

La loi 8875 (nouvel intitulé) est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.

PL 9100-A
Rapport de la commission de contrôle de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner la parcelle 4027, plan 33, de la commune Genève, section Plainpalais, pour 120'000F

La loi 9100 (nouvel intitulé) est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.

PL 9101-A
Rapport de la commission de contrôle de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner la parcelle 1533, plan 3, de la commune Genève, section Eaux-Vives, pour 3'600'000F

La loi 9101 (nouvel intitulé) est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.

PL 9182-A
Rapport de la commission de contrôle de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner la parcelle 836, plan 29, de la commune de Nyon, pour 1'670'000F

La loi 9182 est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.

PL 9240-A
Rapport de la commission de contrôle de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner le feuillet PPE 2987 n° 43, de la parcelle de base 2987, fe 16, de la commune de Genève, section Petit-Saconnex, pour 213'000F

La loi 9240 (nouvel intitulé) est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.

PL 9248-A
Rapport de la commission de contrôle de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner la parcelle 1029, plan 19, de la commune du Grand-Saconnex, pour 450'000F

La loi 9248 est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.

PL 9252-A
Rapport de la commission de contrôle de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner la parcelle 5782, fo 28, de la commune de Thônex, pour 950'000F

La loi 9252 (nouvel intitulé) est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.

PL 9253-A
Rapport de la commission de contrôle de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner la parcelle 5783, fo 28, de la commune de Thônex, pour 950'000F

La loi 9253 (nouvel intitulé) est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.

PL 9258-A
Rapport de la commission de contrôle de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner le feuillet PPE 2987 n° 45, de la parcelle de base 2987, fe 16, de la commune de Genève, section Petit-Saconnex, pour 384'000F

La loi 9258 (nouvel intitulé) est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.

PL 9259-A
Rapport de la commission de contrôle de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner le feuillet PPE 140 n° 1 à 42, de la parcelle de base 140, fe 9, de la commune de Genève, section Petit-Saconnex, pour 1'400'000F

La loi 9259 (nouvel intitulé) est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.

RD 527
Rapport annuel de la médiatrice au Grand Conseil concernant la médiation en matière d'information du public et d'accès aux documents (LIPAD) (Année 2003-2004)
RD 534
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur le rapport annuel de la médiatrice 2003-2004

Débat

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Le contenu de ces rapports est très bref, et je pense que c'est voulu. Lors du précédent exercice, nous avions demandé que ces rapports soient renvoyés à la commission législative. Aussi, je requiers à nouveau le renvoi de ces deux rapports à la commission législative.

Le président. Merci, Madame la députée. Nous votons à main levée sur la demande de renvoi en commission législative de ces deux rapports.

Mis aux voix, le renvoi à la commission législative du rapport divers 527 et du rapport divers 534 est adopté.

P 1452-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier la pétition pour un réseau express lémanique
Rapport de M. Ivan Slatkine (L)

Débat

M. Ivan Slatkine (L), rapporteur. Je souhaite simplement procéder à un ajout. Cette pétition n'apporte pas grand-chose, puisque le DIAE suit une politique qui reprend l'ensemble des points mentionnés dans cette pétition. La commission des transports a néanmoins décidé de la renvoyer au Conseil d'Etat afin de marquer son soutien au projet CEVA - il n'est pas nécessaire de rédiger un rapport de vingt-cinq pages sur le sujet. J'espère que le Conseil d'Etat comprendra le message et que ce dernier parviendra jusqu'à Berne, de manière à ne pas trop alourdir le travail administratif du Conseil d'Etat.

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Comme vous l'aurez remarqué à travers les propos du rapporteur, la perception de cette pétition a été très variée au sein de la commission. Il convient toutefois de relever que cette dernière a su trouver une unanimité pour la renvoyer au Conseil d'Etat.

M. Jean Rossiaud (Ve). Comme l'a indiqué le rapporteur, cette pétition demande l'instauration de mesures extrêmement simples, mais extrêmement importantes que le Conseil d'Etat est déjà en train de mettre en oeuvre: trains rapides, trains plus fréquents, parkings relais ou encore création d'une communauté tarifaire. Toutes ces mesures sont déjà comprises dans le projet CEVA, et le fait de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat lui montre que l'ensemble de la commission et du parlement le soutient dans sa politique.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des transports (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées.

P 1191-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier la pétition : Des emplois pour des chômeuses et chômeurs en fin de droit
Rapport de M. Rémy Pagani (AdG)

Débat

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur. C'est bien malgré moi que j'ai rédigé ce rapport, puisque cette pétition a été traitée lors de la législature précédente et que je n'ai pas participé aux débats qui ont eu lieu à son sujet. Il s'agit simplement de classer cette pétition. J'aimerais toutefois soulever un problème relativement important pour les chômeurs actuellement.

Vous l'avez constaté, Genève est le seul canton dans lequel le chômage ne diminue pas. C'est un canton frontalier qui connaît une série de problèmes intrinsèques non seulement au niveau de son développement économique, mais également au niveau de sa politique en matière de main-d'oeuvre. Lorsqu'on a discuté de la nouvelle loi déposée par les partis de l'Entente et l'UDC pour supprimer les occupations temporaires, et dont on débattra en septembre, nos travaux se sont basés sur un «chômeur-type» appartenant à un milieu plutôt défavorisé et se situant dans des classes de salaires relativement basses - hôtellerie, nettoyage, restauration. Aujourd'hui, et le conseiller d'Etat M. Lamprecht en a également fait les frais, la majorité des chômeurs a, bien malgré nous, changé de nature: comme on a pu le constater, ils proviennent des assurances, de l'informatique ou encore des banques. Les occupations temporaires coûtent par conséquent plus cher, et ce à raison d'un dépassement de budget de 26 millions. On y reviendra en septembre lorsqu'il s'agira de faire un sort - le sort que veut la droite ! - aux occupations temporaires.

Toujours est-il que, dans la situation actuelle, la politique visant à élargir les mailles du filet constitue une grave erreur: on devrait, au contraire, resserrer ces mailles compte tenu de la situation à venir - et, notamment, de la concurrence exacerbée sur le marché du travail, concurrence qui a débuté depuis le 1er juin.

J'ai simplement profité de cette pétition pour cadrer les discussions que nous aurons à la rentrée concernant la modification de la loi sur le chômage - discussions dont je me réjouis.

M. Pierre Kunz (R). Comme je n'ai pas non plus participé au débat qui fait l'objet du rapport, je me permets de m'exprimer car, comme disait l'autre: «Je n'y connais rien, mais j'en parle d'autant plus à propos»... (Rires.)

Cette pétition est tout à fait représentative des illusions que notre monde politique a fait naître depuis quelques décennies dans l'esprit d'une grande partie de la population: l'illusion générale de l'état-providence qui serait à même de résoudre, à la place des citoyens et mieux qu'eux, les problèmes économiques qui se posent à eux; l'illusion, notamment, que l'Etat serait en mesure, dans une économie libérale - parce que c'est bien dans ce type d'économie que nous nous trouvons - de créer les emplois attendus par les citoyens et par les chômeurs en particulier; l'illusion surtout, que, grâce aux collaborateurs des offices de l'emploi, de ceux que l'on appelle de manière si inadéquate les «placeurs» - quel terme ! - les chômeurs se verront toujours offrir l'emploi auquel, comme certains l'affirment: «ils auraient droit». Il faut honnêtement le dire - peut-être avec tristesse, c'est peut-être désolant, mais c'est ainsi, et il faut le répéter, notamment aux pétitionnaires: dans notre système économique et dans notre société fondée sur l'engagement et la responsabilité individuelle, l'Etat ne peut qu'apporter des allocations et une aide pratique. Seul celui qui recherche un emploi ou qui veut en changer peut le trouver grâce à son engagement, grâce à ses efforts, grâce à sa volonté. Prétendre le contraire est trompeur pour nos concitoyens. Voilà pourquoi il ne peut être question de donner suite à cette pétition.

Mais, et M. Pagani y a fait allusion, cette pétition met aussi en évidence une réalité de la loi cantonale sur le chômage, à savoir la contradiction essentielle, la contradiction insurmontable, l'incompatibilité entre, d'une part, une mesure de type économique exigeante pour le chômeur - à savoir, l'allocation de retour en emploi, ARE - et, d'autre part, une mesure purement sociale, prétendument subsidiaire à l'ARE selon les pétitionnaires - à savoir l'emploi temporaire. L'expérience de ces sept dernières années confirme sans contestation possible que l'emploi temporaire, qui ne présente aucun intérêt sur le plan de la formation, qui est cruellement contre-productif en termes de réinsertion, mais qui, évidemment, est financièrement très attractif pour les chômeurs, a rendu inopérante l'ARE. Cette pétition le relevait déjà en 1998. La pratique et les experts l'ont prouvé depuis: l'emploi temporaire est un piège favorisant le chômage de longue durée et l'exclusion, comme en témoignent les statistiques cantonales du chômage, dont nous avons reçu les derniers chiffres récemment. Pourtant, les travaux de la commission de l'économie l'ont mis en évidence, certains dans ce parlement veulent maintenir cette incompatibilité, cette contradiction, cette incohérence dans la nouvelle loi cantonale, succombant ainsi à ce que le grand juriste et professeur français Pierre Legendre appelait récemment dans un article du journal «Le Temps»: «L'engrenage gestionnaire des bons sentiments et des concessions sans fin».

En 1997 déjà, les radicaux avaient annoncé l'échec assuré de la loi actuelle, et en particulier des ARE. En dépit des améliorations notables apportées par la nouvelle loi déposée par la majorité en matière de formation et de réinsertion, les radicaux vous prédisent le même échec pour les ARE si les emplois temporaires subsistent dans la loi qui sortira de ce parlement - des ARE qui, améliorés, constituent pourtant, il faut que vous en soyez persuadés, la seule vraie mesure de réinsertion professionnelle. Les ARE sont en outre véritablement formatives puisqu'elles s'étalent, elles, sur un an. Le moment venu, Mesdames et Messieurs, les radicaux vous proposeront donc de supprimer les emplois temporaires.

Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur. Comme d'habitude, M. Kunz fait preuve d'une extrême limpidité - et je le remercie pour la transparence de sa pensée. Il se montre très clair: il pose les choses crûment, et l'on doit se situer par rapport à cette idéologie - car il y a une idéologie derrière son discours, il y a une volonté politique consistant, prétendument, à responsabiliser les individus. Mais, Mesdames et Messieurs les députés, la majorité de nos concitoyens sont des individus responsables ! Ils élèvent des enfants, ils travaillent, ils essaient de vivre convenablement la vie qui leur a été donnée. C'est un peu à tort, j'imagine, que M. Kunz les a accusés d'être irresponsables. Actuellement, les 7,5% de la population active se trouvent au chômage. Cela signifie qu'il y aurait 7,5% d'irresponsables... C'est une erreur de croire cela ! La réalité est tout autre: le système dans lequel nous vivons - système dans lequel on trouve, d'un côté des financiers qui accumulent richesses et argent, de l'autre des individus qui vendent leur force de travail - ne fonctionne malheureusement pas à certaines périodes, puisqu'il met sur le carreau, puisqu'il laisse au bord de la route un certain nombre de personnes qui n'y peuvent rien. Il s'agit là d'une évidence depuis que le système capitaliste existe !

Ce discours infantilisant pouvait encore «passer» lorsqu'on avait affaire à des personnes qui ne disposaient pas forcément de la culture nécessaire pour trouver un emploi, qui n'avaient pas même l'imagination pour envisager de se lancer à leur propre compte. Mais il ne tient plus lorsqu'on a affaire à des gens hyperformés, au bénéfice de dix ou quinze ans d'activité dans le secteur bancaire, dans les assurances, dans l'informatique, et qui se retrouvent sur le carreau parce que des directeurs de multinationales ont décidé, pour une question de stratégie financière, de délocaliser en Chine ou en Inde le système informatique, le téléréseau ou Dieu sait quoi encore ! C'est ainsi que, à Genève, le groupe Helsana, qui est revenu à des bénéfices, délocalise et s'en va voir ailleurs !

Une voix. A Lausanne !

M. Rémy Pagani. Oui, notamment à Lausanne. J'ai pris cet exemple, mais il en existe des tonnes d'autres qui ne me viennent pas forcément immédiatement à l'esprit ! Toujours est-il que les chômeurs qui font les frais de cette logique n'y peuvent rien ! Il est irresponsable de leur faire croire que ce sont des incapables ! Ce n'est pas vrai, et vous le savez très bien: c'est le système que vous défendez qui les a mis sur la paille ! Il est inadmissible de faire ainsi peser cette responsabilité sur leurs épaules ! Ils ne sont pas responsables ! Leur seule responsabilité consiste à «se vendre» sur le marché du travail - et c'est ce que, de manière générale, ils font.

Dans cette situation, il n'y a pas trente-six solutions, Monsieur Kunz ! On peut décider de laisser ces personnes sur la paille - et c'est ce qui se passera en septembre. On laissera sur le pavé ces chômeurs de longue durée qui proviennent du secteur bancaire, qui ont été mis à la porte il y a deux ans et qui se retrouvent en occupation temporaire, puisqu'on ne leur offrira pas les moyens de se donner un nouveau droit au chômage et qu'on leur dira de se débrouiller. Pour ce qui est des femmes, M. Kunz envisage de les renvoyer dans leur «milieu familial»; quant aux autres personnes, elles iront à l'Hospice général. Est-ce cela que vous voulez ?! Pour notre part, nous nous y refusons ! Nous estimons que l'Etat doit pallier les déficiences du système que vous défendez en permettant à ces personnes de se maintenir dans une activité digne ! C'est pourquoi, même si les occupations temporaires sont critiquables - et nous sommes les premiers à penser qu'au bout de six mois les personnes devraient être placées sous condition de formation - nous estimons que les occupations temporaires sont une nécessité, compte tenu de la situation que traverse Genève.

Pour que l'Etat propose des ARE, encore faut-il que des employeurs soient prêts à engager des chômeurs - et non seulement à les engager pour une année en bénéficiant d'une subvention étatique, mais à les engager définitivement ! Or, vous savez comme moi que, encore aujourd'hui, certains employeurs ne sont pas prêts à engager des chômeurs - qui plus est, en fin de droit - pour leur permettre de bénéficier des ARE ! C'est donc un leurre que vous présentez à la population ! Ce leurre consiste à dire que l'on doit absolument voter les allocations de retour en emploi et casser le système d'occupation temporaire, car il s'agit de la seule manière de revitaliser les ARE.

La présidente. Je suis quelque peu effarée au vu du nombre important de députés inscrits, et cela alors que nous sommes en procédure d'extraits... Le Bureau a donc décidé de clore la liste des intervenants; le dernier sera M. Alain Charbonnier. Pour l'instant, la parole est donnée à M. le député Souhail Mouhanna.

M. Souhail Mouhanna (AdG). M. Kunz a commencé par dire que c'était parce qu'il ne connaissait rien qu'il intervenait à propos. J'ai l'impression que M. Kunz intervient souvent à propos d'objets dont il ne connaît apparemment rien... Le discours de M. Kunz est le suivant: non seulement il ne faut rien reprocher à ces entreprises actives dans le domaine industriel ou bancaire qui, en dépit des bénéfices qu'elles réalisent, licencient et transfèrent les charges économiques et sociales sur les collectivités publiques, mais il ne faut même pas que la collectivité assume les responsabilités qui sont les siennes vis-à-vis, précisément, des victimes d'une telle gestion de la part de certaines entreprises ! Cette attitude est complètement dépourvue de tout micron de solidarité ! J'ignore si M. Kunz fait partie de ceux qui n'ont aucun esprit de solidarité ni le moindre résidu de solidarité... Je le regrette car, lorsque M. Kunz intervient, il donne l'impression de croire fortement à ce qu'il dit. Mais qu'allez-vous donc faire de ces gens, Monsieur Kunz ?! De que j'entends et de ce que je lis de votre part, j'ai l'impression que votre idéal en matière de rapports de travail et d'économie est le suivant: que les gens s'entassent dans des camps extrêmement vastes en attendant qu'on les appelle pour gagner quelques sous et, pendant leur attente, qu'on leur serve un peu de soupe... Si telle est la société que vous souhaitez, Monsieur Kunz, les gens que vous voulez parquer dans les camps finiront, un jour ou l'autre, par prendre le pouvoir !

M. Christian Bavarel (Ve). En tant que président de la commission de l'économie, j'aimerais tout d'abord remercier M. Pagani pour avoir rédigé ce rapport alors qu'il ne siégeait pas en commission lors de ce débat.

La vivacité de notre discussion est simplement due au fait que le sujet est d'importance. Ce sujet, que nous retrouverons au mois de septembre, le chômage, concerne des êtres humains - des êtres humains qui se trouvent dans des situations plus ou moins difficiles. La cause du chômage, on peut toujours le dire sous forme de boutade, c'est qu'il n'y a pas de travail... Mais, à un moment donné, il faut déterminer les responsabilités des uns et des autres: est-ce le chômeur qui est responsable de sa situation ou est-ce parce qu'il a été licencié qu'il se retrouve au chômage ? Il faut, sur le plan philosophique, déterminer qui porte cette charge. ll me semblait que, dans une société comme la nôtre, organisée sur le modèle libéral, on devait accepter que les entreprises puissent licencier - ce qui peut, dans certains cas, s'avérer nécessaire pour permettre le développement desdites entreprises - mais que l'on instaurait en contrepartie un filet social et que l'on venait en aide aux personnes mises à l'écart. Nous avons constaté en commission de l'économie qu'il était beaucoup plus difficile de retrouver un emploi après s'être retrouvé un certain temps au chômage, et c'est pour cela que certains soutiens étaient prévus. Or, je constate que nous sommes en train de changer de philosophie: nous entrons dans un système qui cherche à punir les chômeurs, qui cherche à lutter contre les chômeurs - et non contre le chômage ! Je déplore cet état de fait.

Le débat politique est par ailleurs en train de se durcir: il nous entraîne dans un affrontement gauche - droite de plus en plus stérile, ce qui n'est guère constructif pour Genève. J'ai l'impression que nous ne trouverons aucune solution de cette manière et que nous nous dirigeons plutôt vers un affrontement ! Peut-être avons-nous besoin d'un temps d'affrontement pour repartir ensuite sur de nouvelles bases, mais je suis inquiet des événements qui se produisent actuellement dans notre canton.

M. Jacques Baud (UDC). Les chômeuses et les chômeurs sont des êtres humains - des êtres humains qui souffrent. J'en sais quelque chose: j'ai été suffisamment souvent au chômage pour savoir ce que sont cette souffrance et cette angoisse. Ce ne sont pas des pourcentages. J'aimerais que l'on s'en souvienne !

Je souhaite également rappeler la chose suivante: après l'âge de 50 ans, on ne retrouve plus de travail. Cela est dramatique pour beaucoup d'entre nous. J'ai l'espoir que la nouvelle loi que l'on nous concoctera en septembre tiendra compte du fait que l'on a affaire à des êtres humains, et non à des bestioles !

M. Alberto Velasco (S). M. Baud a raison, Monsieur Kunz: après 50 ans, une personne a très peu de chances de retrouver un travail. Et, Monsieur Kunz, vous avez lu la demande formulée par les chômeurs dans cette pétition. Sur plus de 2000 personnes en fin de droit inscrites au Service d'insertion professionnelle, seule une dizaine ont pu accéder aux ARE. Une dizaine seulement ! Vous avez indiqué tout à l'heure que la solution résidait dans les ARE. Je suis d'accord avec vous: il s'agit d'une solution intéressante, puisqu'elle insère ces personnes dans le marché du travail alors que celles-ci en sont bien souvent déconnectées pour une raison ou pour une autre. Mais c'est précisément ce que demande la pétition ! Vous ne pouvez donc qu'être d'accord qu'avec cette pétition !

Votre déclaration, Monsieur Kunz, est conforme à l'idéologie libérale de notre société. Selon cette idéologie, chacun doit se prendre en charge et le rôle de l'Etat se limite à faire la charité. Je ne partage pas cette idéologie: je pense que les individus doivent effectivement faire preuve de responsabilité en tant que citoyens, mais que l'Etat doit également faire preuve de solidarité avec les individus qui n'ont pas d'emploi. Les personnes qui ont un emploi doivent faire preuve de solidarité, et l'Etat doit répondre présent lorsque l'économie est incapable d'offrir un emploi à chacun. La question est là, Monsieur Kunz ! Supposons qu'il y ait, sur le marché du travail, 15 000 places vacantes pour 1000 chômeurs... Il est évident qu'il y aurait là des abus clairs, car il y a une adéquation entre la demande importante du marché et l'offre des personnes sans emploi. Mais c'est l'inverse qui se produit ! L'économie est incapable de fournir un emploi à tous ces gens ! Il y a quelque 12 000 personnes sans emploi et, grosso modo, entre 1000 et 1500 places - parfois 500 - dans notre canton ! Donc, le système économique n'est pas en mesure d'offrir à ces individus la possibilité de préserver leur dignité ! Voyez-vous, Monsieur Kunz, le travail, c'est l'insertion dans la vie, c'est l'insertion dans la société, mais c'est avant tout la préservation de sa dignité ! Le pire qui puisse arriver dans la vie, c'est de devoir vivre à l'assistance sociale ! Et je ne connais pas une seule personne à l'assistance sociale qui soit heureuse de cet état ! (Protestations.)Il est vrai qu'il peut y en avoir quelques-unes, mais il s'agit d'une infime minorité. Toute personne désire un travail !

Vous savez très bien, Monsieur Kunz, que, selon les études qui ont été réalisées, après six mois de chômage - je dis bien après six mois ! - une personne commence à être difficilement plaçable, parce qu'elle perd sécurité et savoir-faire. Et au bout de deux ans, elle ne possède plus l'assurance nécessaire pour assumer un emploi. Que se passe-t-il alors ? Elle dispose de deux possibilités. Elle peut trouver un emploi temporaire cantonal lorsqu'elle arrive en fin de droit. Cet emploi temporaire, qui ouvre un nouveau délai-cadre au bout d'une année supplémentaire, doit servir en priorité - et je vous accorde qu'il y a là des problèmes - à lui donner une nouvelle assurance, à lui donner confiance en ses connaissances, et parfois à lui offrir une autre formation. Si aucun emploi temporaire ne se présente, la seule ressource de cette personne consiste à se diriger vers le RMCAS. Trouvez-vous qu'il s'agit là d'une issue satisfaisante pour des milliers de personnes ? Moi, je ne le pense pas ! Aujourd'hui, le tiers des gens qui sont au RMCAS sont des universitaires ! Ce n'est donc pas une question de formation, c'est qu'il y a véritablement un problème de nombre de places !

Au vu des difficultés de notre économie à créer un nombre suffisant d'emplois, nous ne pouvons qu'accéder à la demande de cette pétition ! Je vous le répète, Monsieur Kunz, nous ne pouvons qu'accéder à cette demande ! Si vous pouviez me démontrer que vous êtes en mesure de placer ne serait-ce que 500 chômeurs, je comprendrais que vous refusiez cette pétition. Mais je ne pense pas que vous soyez capable de réussir un tel exercice. Je vous demande par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter cette pétition afin de préserver la dignité de ces personnes !

Mme Loly Bolay (S). Je regrette que cette pétition ait dormi aussi longtemps à la commission de l'économie. Le rapport aurait dû être fait depuis belle lurette. Cette pétition nous a beaucoup occupés au moment où elle a été soumise à ce parlement et examinée en commission de l'économie. Et là, je souhaite dire deux choses.

En premier lieu, pour parler du chômage, pour savoir ce que cela représente, il faut être passé par là ou connaître quelqu'un qui a été licencié. Je signale par ailleurs que tous les chômeurs licenciés n'ont pas cherché à être au chômage, mais qu'on les y a poussés.

En deuxième lieu, comme l'a relevé mon collègue Alberto Velasco, cette pétition demande le développement des ARE. M. le conseiller d'Etat Carlo Lamprecht avait en son temps reconnu que son département n'avait pas suffisamment mis l'accent sur les ARE et que cela avait été un handicap, puisque l'on s'était très rapidement rendu compte que les entreprises n'avaient pas connaissance de cet outil pour employer des chômeurs et des chômeuses. Comme cela a été dit, les ARE sont des outils de formation extrêmement pertinents pour aider des chômeurs - notamment de longue durée - à retrouver un emploi. Or, encore dernièrement, seules neuf personnes bénéficiaient de ces ARE ! Même M. Lamprecht nous a indiqué que les entreprises n'étaient pas preneuses de ces mesures. Alors, il conviendrait sans doute d'examiner la manière dont ces mesures sont vendues aux entreprises. (L'oratrice est interpellée par M. Meylan.)Mais oui, Monsieur Meylan, c'est ainsi, beaucoup d'entreprises ne sont pas preneuses des ARE ! C'est malheureusement ainsi ! Je tenais donc à rappeler que la pétition qui nous est soumise met précisément l'accent sur cette mesure.

J'aimerais également faire savoir à M. Kunz qu'à l'heure actuelle environ 1 500 personnes ayant dépassé le seuil de 50 ans ont été licenciées dans le secteur bancaire et sont dans l'incapacité de trouver un emploi puisque, comme vous le savez, pour être engagé dans une banque, il faut être titulaire d'un master et parler plusieurs langues - notamment l'anglais, l'espagnol et l'allemand. Or il s'agit de qualifications très pointues pour certaines personnes ayant dépassé le seuil de 50 ans. Quant aux occupations temporaires, que vous décriez souvent à la commission de l'économie, je ferai remarquer que certains services de l'Etat - comme, pour ne pas le nommer, le Palais de justice - ne pourraient tout simplement pas tourner sans ces occupations temporaires !

Mme Nicole Lavanchy (AdG). J'ai entendu Mme la présidente s'étonner qu'autant de personnes souhaitent intervenir à propos d'un rapport se trouvant dans les extraits. Cela n'est, de fait, pas si étonnant pour moi, car je viens de la commission de l'économie, où l'on a terminé de travailler sur un projet de loi qui sera débattu en septembre et où l'on a eu l'occasion de parler abondamment de ces mesures cantonales. On a eu l'occasion d'auditionner d'éminentes personnalités de ce canton, dont des économistes et des responsables d'associations pour chômeurs. Or, M. Kunz a systématiquement tenu le même discours: il s'est bouché les oreilles et il a usé du même leitmotiv. Lorsque j'ai entendu M. Kunz parler, je n'ai pas bronché, mais j'ai entendu mes collègues dire: « Ce n'est pas possible, un tel discours, un tel mépris à l'endroit des chômeurs». Pour ma part, je connaissais déjà la position de M. Kunz, puisque j'ai entendu ce dernier en commission de l'économie pendant au moins quatre mois.

Monsieur Kunz, vous êtes en train d'amener le débat sur la question qui sera discutée au mois de septembre. Vous tirez à boulets rouges sur les occupations temporaires, avec l'idée de supprimer le peu qu'il en reste dans le projet de loi qui sera déposé. Vous avez déclaré que ces occupations temporaires n'étaient absolument pas formatrices. Il est vrai que l'on a constaté que, sous leur forme actuelle, elles ne l'étaient pas. L'Alliance de gauche a toutefois proposé en commission des amendements sérieux pour rendre ces occupations temporaires formatrices, pour les mettre en lien avec une formation. Or vous avez systématiquement envoyé blackbouler nos amendements ! Et vous osez maintenant déclarer devant un public important que les occupations temporaires telles qu'elles seront présentées dans ce projet de loi ne seront pas formatrices et qu'il faudra les supprimer, faute de quoi les ARE ne fonctionneront pas ! C'est de la réduction de pensée ! Vous n'avez pas écouté les personnes qui ont été auditionnées ! Ces personnes éminentes qui siègent sur vos bancs ont déclaré que les occupations temporaires avaient un sens et qu'il fallait simplement les réaménager et leur donner un sens formatif. Vous n'avez pas voulu les entendre, et vous commencez déjà un plaidoyer contre ces occupations temporaires ! Je suis désolée mais, bien que l'on se trouve dans les extraits, je me suis sentie obligée de prendre la parole !

Je tiens à signaler un autre point extrêmement important - sur lequel je ne m'appesantirai pas trop, car il a déjà été évoqué dessus. Qu'allez-vous faire ? Supprimer les occupations temporaires, ne pas faire renouveler le droit aux indemnités fédérales ? Vous allez affaiblir encore davantage le marché de l'emploi ! Vous aurez les syndicats sur le dos - et c'est tant mieux, car je suis de leur côté ! Les conséquences en seront des emplois précaires et mal rémunérés, des conditions salariales déplorables et des gens qui se sentent dans une insécurité professionnelle permanente ! Qu'allez-vous faire ?! Des familles vont s'appauvrir - car tous ne se tournent pas vers l'Hospice général lorsqu'ils n'ont plus d'occupation temporaire. Certains devront vivre avec un seul revenu pour juste atteindre les minima des barèmes ! Des enfants seront touchés, des familles seront précarisées et vont s'endetter ! C'est scandaleux ! Vous participez à la précarisation de la classe moyenne et de la classe ouvrière de ce canton ! Vous savez fort bien que l'Hospice général connaît des difficultés - on en a abondamment parlé dans cette enceinte. Vous savez qu'elle doit faire face à une demande exponentielle. Or, la seule chose intelligente que vous parvenez à faire, c'est de renvoyer une grande partie des chômeurs en fin de droit à l'Hospice général tout en décriant cette institution, en déclarant qu'elle travaille mal, qu'il faut donner de l'argent, etc. ! Vous tenez là un discours extrêmement injurieux à l'endroit des chômeurs !

Je me suis permis de prendre la parole pour ouvrir ce débat qui sera poursuivi en septembre, car il est inacceptable que vous prononciez de telles paroles devant les chômeurs qui nous écoutent - puisqu'ils ont certainement le temps de regarder Léman Bleu ! (Applaudissements.)

Présidence de M. Pascal Pétroz, président

M. Pierre Kunz (R). En premier lieu et à titre de rappel, je soulignerai que les emplois temporaires cantonaux n'existent nulle part ailleurs en Suisse. Et, que je sache, la paupérisation n'est pas plus forte ailleurs en Suisse qu'à Genève. Cela fait bientôt vingt ans que l'on a des emplois temporaires dans ce canton et, je le répète, si on les supprime, ce ne sera pas la paupérisation, Madame Lavanchy - pas plus que ça n'a été la paupérisation dans les autres cantons !

Il y a quelque chose de gênant dans ce parlement: chaque fois que l'on ose exposer sa pensée sans ambages, sans détour, on se fait taxer de fou, d'irresponsable et de méprisant ! Eh bien, aujourd'hui comme il y a dix jours, je vous mets en demeure de retrouver dans le Mémorial, quand il paraîtra, les expressions méprisantes et le terme d'«irresponsable» que vous avez utilisés, Monsieur Pagani - car ils n'y sont pas ! Ce ne sont pas les chômeurs, Monsieur Pagani, qui sont irresponsables, mais nous, les politiciens - et vous en particulier, qui tentez de masquer les réalités économiques, financières et sociales sous vos bavardages qui, eux, sont des leurres et des tromperies !

Monsieur Mouhanna... Je constate qu'il n'est plus là... Mais il m'a demandé ce que je ferais de ces gens-là. Et c'est lui qui prétend que je les méprise ?! Mais il n'ont pas besoin de moi, ces gens-là ! Vous, Mesdames et Messieurs, qui êtes tellement heurtés par mes propos, vous ne songez qu'à rendre plus dépendantes de la collectivité les personnes que vous prétendez défendre ! Moi, au contraire, je me rappelle que les chômeurs sont des êtres humains qui connaissent certes des problèmes, mais qui ont également du potentiel, de la flexibilité, de la résilience et de la volonté - la volonté, notamment, de s'en sortir ! Moi, je sais, Messieurs Pagani, Mouhanna et compagnie, que ces gens-là ne sont pas les zombies que vous nous dépeignez !

Notre société a évidemment le devoir d'aider ces personnes, de les rendre plus capables et plus en adéquation avec les demandes du marché. Et il est également de notre devoir de leur permettre de retrouver leur dignité et leur autonomie. L'emploi temporaire constitue toutefois précisément la mesure la plus contraire à cette ambition ! Votre démonstration l'a d'ailleurs implicitement indiqué, Monsieur Velasco ! Vous relirez dans le Mémorial les propos que vous avez tenus - car ce dernier est tout de même utile à quelque chose... Vous constaterez que vous avez tenu exactement les propos qu'il fallait pour démanteler les emplois temporaires !

Dernière chose, Monsieur Velasco: Genève crée plus d'emplois par habitant que partout ailleurs dans ce pays. Ce qui pose problème, ce n'est pas l'attitude des entreprises; ce qui pose problème, c'est l'inadéquation entre les exigences liées aux emplois offerts et les capacités des demandeurs d'emploi. C'est ce problème qu'il s'agit de résoudre ! Or, contrairement à l'ARE, l'emploi temporaire n'y parviendra pas !

M. Claude Aubert (L). Puisque les extraits sont devenus le lieu où l'on peut exposer nos opinions ou nos idéologies, je souhaite contribuer à ce dossier en rappelant un élément sur un autre plan. On a évoqué le chômage de longue durée et la très grande difficulté à reprendre un emploi. Je vous ferai remarquer qu'il se passe exactement la même chose lors des arrêts maladie ou accident de longue durée - et ce, indépendamment du diagnostic. Tout se passe comme si le fait d'arrêter le travail pendant une longue durée engendrait des effets extrêmement négatifs. C'est pour cela que l'on a attiré l'attention des médecins sur le problème des arrêts maladie. Il est bien entendu qu'à court terme il peut être très utile pour un patient d'arrêter son travail pendant un certain temps. On devient néanmoins de plus en plus conscient des impacts à long terme des arrêts maladie de longue durée. Ce problème n'est pas forcément lié au chômage, mais il est lié à une question beaucoup plus grave: il s'agit de la reprise du travail après une absence. De ce point de vue, ce débat me paraît plus compliqué que le ping-pong habituel auquel se livrent la gauche et la droite.

M. Alain Charbonnier (S). Je suis entièrement d'accord avec les propos de M. le député Aubert. On a constaté le même phénomène en médecine sportive: on ne met désormais plus un sportif en arrêt pendant des semaines, mais on le fait reprendre le plus vite possible. On s'est en effet aperçu que le mouvement, c'était la vie et que, quels que soient leurs problèmes, laisser des gens en arrêt ne constituait pas la solution adéquate.

D'ailleurs, vous vous trompez complètement, Monsieur Kunz, ce n'est pas vrai que l'on tient aux emplois temporaires cantonaux ! Si l'on pouvait s'en passer complètement, on le ferait du jour au lendemain ! Reste qu'aujourd'hui on prend connaissance des chiffres et l'on constate l'existence de chômeurs de longue durée. Qu'est-ce qu'un chômeur de longue durée ? Ce n'est pas une personne qui se trouve au chômage depuis deux jours, depuis deux semaines ou depuis six mois. Dans le cas précis, il s'agit d'une personne qui est au chômage depuis plus de deux ans !

M. Pierre Kunz. Depuis une année !

M. Alain Charbonnier. Depuis plus de deux ans, Monsieur Kunz ! On parle là des mesures cantonales, soit de l'allocation de retour en emploi et de l'emploi temporaire cantonal. Or c'est après deux ans de délai-cadre que ces mesures cantonales sont appliquées. Vous, vous voulez complètement supprimer ces mesures, dites-le franchement ! Vous avez déclaré qu'il fallait supprimer les emplois temporaires cantonaux car il s'agissait de la seule façon de favoriser les ARE... Mais c'est complètement faux, et vous le savez très bien ! Les chiffres nous ont été fournis par M. Lamprecht: il y a eu une cinquantaine d'ARE l'année passée - peut-être un peu plus, selon M. Meylan. Reste que cela ne dépasse pas les cent emplois. Vous rendez-vous compte ?! Cent propositions d'entreprises pour cent chômeurs de longue durée, alors qu'il y a actuellement entre 1600 et 1700 chômeurs de longue durée à Genève ! Commencez par encourager vos partenaires et vos petits copains ! On verra s'ils trouvent 1600 à 1700 places pour offrir à ces chômeurs une chance de retrouver du travail - ce que, je crois, nous souhaitons tous dans cette enceinte !

Une voix. Tu m'embauches ?!

M. Alain Charbonnier. Vous avez également évoqué l'inadéquation des travailleurs et le manque de formation... Très bien ! Mais qu'avez-vous fait pas plus tard qu'avant-hier soir ?! Vous avez retranché 2,5 milliards à la formation professionnelle !

Une voix. 2,5 millions !

M. Alain Charbonnier. Pardon, 2,5 millions ! Cela reste toutefois, à l'échelle...

M. Jean-Michel Gros. 2,5 milliards, ce sera la deuxième étape !

M. Alain Charbonnier. M. Gros déclare en rigolant que ce sera la deuxième étape... C'est révélateur !

Alors, vous n'avez même pas retiré cette pétition des extraits, puisque vous êtes si forts pour avancer rapidement dans tous les domaines... Vous avez estimé que cette pétition sur le chômage était de peu d'importance et qu'il convenait par conséquent de la laisser dans les extraits - car, d'habitude, vous retirez très rapidement tout objet au sujet duquel vous avez le moindre soupçon qu'un débat puisse s'engager...

Nous défendrons au mois de septembre les mesures cantonales dans leur ensemble - emplois temporaires cantonaux et allocations de retour en emploi. Même si le mouvement, c'est la vie, on s'est en effet aperçu que, en dépit de tout ce que vous pouvez nous raconter, l'emploi temporaire cantonal était un instrument de réinsertion pour certains chômeurs de longue durée. Les chiffres figurent dans différents rapports: cette mesure permet de réinsérer 35% des personnes qui en bénéficient dans les dix mois suivants. (Protestations de M. Kunz.)Vous reprendrez vos chiffres, Monsieur Kunz ! Vous ne les lisez pas et vous n'écoutez pas les informations qui nous sont fournies en commission ! Nous soutiendrons donc les mesures cantonales cet automne.

Bien qu'elle date de 1998, cette pétition tombe très bien. Elle est tout à fait d'actualité s'agissant du principal grief des chômeurs: il s'agit de l'inadéquation, non pas des chômeurs, mais de l'office cantonal de l'emploi. Il est dommage que M. Lamprecht soit absent, car il aurait entendu ce que je tiens à dire ici: le principal problème des allocations de retour en emploi, c'est l'inefficacité de l'office cantonal de l'emploi. Ce dernier ne fait pas son travail. Et je me demande s'il mène des recherches pour aider des chômeurs à bénéficier des ARE.

Le président. Merci, Monsieur le député. A ce stade, un petit rappel s'impose. En premier lieu, les points qui sont traités en extraits ne doivent pas être considérés comme n'étant pas importants. Et certains points sont tout aussi importants que ceux non traités en extraits... Si ces points sont en extraits, c'est que tout le monde est d'accord. Alors, la première considération qui s'impose, c'est qu'en règle générale, lorsque tout le monde est d'accord, on ne se livre pas à un débat d'une heure comme celui auquel nous venons d'assister !

En deuxième lieu, je tiens à vous rappeler que la procédure d'extraits est ainsi faite que n'importe quel chef de groupe peut demander qu'un point en soit retiré. Or, Monsieur le chef de groupe socialiste, vous n'avez pas demandé le retrait de cette pétition des extraits. Je pars dès lors du principe que vous êtes parfaitement d'accord avec le traitement de cette pétition en extraits. Je vous redonne rapidement la parole pour me répondre.

M. Alain Charbonnier. Je vous répondrai au point 47 de l'ordre du jour, qui porte sur la procédure des extraits que vous allez tenter d'instituer dans la loi. On vous dira tout le mal qu'on en pense. Effectivement, vu le nombre de députés généralement présents sur les bancs d'en face, on a l'impression que certains considèrent les extraits comme étant des sujets mineurs, et ce n'est pas notre cas ! C'est pour cela qu'en règle générale nous retirons peu d'objets de la liste des extraits.

Le président. Merci, Monsieur le député. Si cela peut vous rassurer, à mes yeux non plus, les extraits ne sont pas des points mineurs - ce d'autant moins que, lorsque je préside, je suis présent... La parole est à M. Rémy Pagani, rapporteur.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur. Je vois mal que vous ne soyez pas là lorsque vous présidez... Et inversement, Monsieur le président. Avant de revenir au sort qui devra être fait à cette pétition, je ferai remarquer à M. Kunz qu'il est facile de se cacher derrière l'artifice intellectuel qu'il utilise pour ne pas bafouer frontalement tous les chômeurs, mais pour le faire indirectement. C'est une méthode un peu facile... Son discours, qui consiste à dire aux chômeurs qu'ils n'ont pas besoin d'être aidés car ils sont suffisamment grands pour se débrouiller, les stigmatise en réalité de manière scandaleuse. Cela revient en effet à dire à tous les chômeurs de longue durée qu'ils n'ont pas pris leurs responsabilités. C'est ce discours-là que nous condamnons ! Vous ne dites évidemment pas explicitement cela: vous dites l'inverse mais, de fait, par la négation, cela revient au même.

Le droit au travail étant un droit fondamental, j'aimerais également répondre à un député qui a relevé qu'à partir de 55 ans, on n'avait plus droit au travail. Je dirai pour ma part encore plus, Monsieur Baud: ce n'est pas à partir de 55 ans, mais de 50 ans que l'on n'a plus droit au travail ! C'est ainsi qu'une offre d'emploi, qui a d'ailleurs été stigmatisée par la «Tribune de Genève», précisait: «Chômeur de plus de 50 ans s'abstenir». C'est dire à quel point le marché du travail exclut les personnes de plus de 50 ans ! (L'orateur est interpellé.)Oui, on y trouvait également la notion de six mois ! On est là devant un drame social, et la manière dont les gens traitent ce drame est scandaleuse ! Pourquoi un drame social ? Prenons l'exemple de la maladie. Je lutte aux côtés des salariés pour qu'ils bénéficient de davantage d'autonomie, et des patrons me tiennent le discours suivant: «On doit restructurer, mais on ne va pas mettre cette personne au chômage, car elle a 50-55 ans; si vous êtes d'accord, on la met à l'AI». C'est ainsi que l'on traite les gens ! Il ne s'agit pas de sportifs de haut niveau, il est question de restructurations qui ont été décidées aux Etats-Unis ou en Angleterre par des centrales financières qui décident de fermer des succursales à Genève ! Alors, on prend toutes les personnes âgées de plus de 50 ans et on essaie de les liquider: on prépare un plan social pour les uns, on met à l'AI ceux qui sont un peu malades... C'est inadmissible ! Voilà le drame social auquel on assiste ! Et vous, vous réagissez à ce drame en tirant encore davantage le tapis sous ces gens pour les faire tomber, puisque, après deux ans de chômage, vous refusez de leur offrir les moyens de se redonner un droit et de se former ! C'est inadmissible ! Mais arrêtons ici la polémique: c'est en septembre que l'on débattra de cette question qui nous divisera fortement.

S'agissant du sort à réserver à cette pétition, j'ai été interpellé quant à l'avenir de ce texte. Dans un premier temps, la commission avait décidé de substituer cette pétition par une motion. M. Didier Thorens, que je remercie ici, a cherché la motion qui devait remplacer cette pétition, mais il n'a rien trouvé. J'ai téléphoné à gauche et à droite pour savoir ce qu'il était advenu de ce texte, mais personne n'a été capable de me répondre. Puisqu'on a vu que cette pétition était tout à fait d'actualité, je vous propose de faire un geste symbolique en la renvoyant au Conseil d'Etat et en demandant à ce dernier de se prononcer sur cette question.

Le président. Monsieur le rapporteur, j'ai un petit souci: vous êtes rapporteur d'une commission qui a décidé, à l'unanimité moins une abstention, de déposer cette pétition sur le Bureau du Grand Conseil. Or vous rapportez devant nous et proposez maintenant le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat; j'ai quelque peine à comprendre ! Je passe la parole à M. le député Gros.

M. Jean-Michel Gros (L). Vous avez exprimé l'essentiel de ce que je voulais dire, Monsieur le président. Il est absolument scandaleux qu'un rapporteur donne un avis inverse à celui de l'unanimité de la commission !

D'autre part, Monsieur Pagani, quels députés, au sein de la commission, avaient été favorables au principe de déposer une motion ? Trois AdG, deux socialistes et un Vert ! Si ces mêmes personnes n'ont pas jugé nécessaire de déposer cette motion, c'est qu'elles devaient avoir de bonnes raisons. Dès lors, nous faire voter le contraire de la décision votée en commission constitue une attitude scandaleuse - mais qui ne nous étonne pas !

M. Alain Charbonnier (S). M. Gros a tout à fait raison, mais l'erreur est humaine. M. Pagani n'a pas agi avec malveillance ! (Protestations. Le président agite la cloche.)Je reprends donc à mon compte la proposition de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur. Je suis rapporteur, mais je n'ai malheureusement même pas été désigné pour faire ce rapport ! Je l'ai fait spontanément, car il nous fallait épurer le travail de la commission. La décision de la commission consistait à déposer la motion sur le Bureau du Grand Conseil, dans la mesure où cette motion était déposée. Mais personne ne sait si elle l'a été, puisqu'on ne l'a malheureusement pas retrouvée - on en a, du moins, pas retrouvé l'intitulé. Dès le moment où cette motion n'a pas été déposée, il me semblait aller de soi que la question du sort de cette pétition restait ouverte.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je vous donne lecture de l'article 172, alinéa 1, du règlement du Grand Conseil: «Après avoir délibéré sur le rapport de la commission, le Grand Conseil statue sur l'une des quatre propositions formulées par la commission». Suivent les quatre propositions: renvoi à une autre commission, renvoi au Conseil d'Etat, dépôt sur le Bureau à titre de renseignement ou classement de la pétition. Le règlement étant clair, je vous fais voter sur la proposition de la commission, à savoir le dépôt de ce texte sur le Bureau du Grand Conseil.

Des voix.Non, on n'est pas d'accord ! (Brouhaha.)

Le président. Lisez votre règlement ! Nous procédons au vote.

Mises aux voix, les conclusions de la commission de l'économie (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.

Fin de séance

Le président. Je lève la séance. Nous nous retrouvons à 17h15. Je vous rappelle que la commission sociale et la commission législative se réunissent maintenant. A tout à l'heure !

La séance est levée à 16h55.