République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de M. Michel Halpérin, président.

Assistent à la séance: MM. Charles Beer, Laurent Moutinot, Robert Cramer, David Hiler, François Longchamp et Mark Muller, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: M. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat, ainsi que MM. Jacques Baudit, Marcel Borloz, René Desbaillets, Pierre Losio, Pierre-Louis Portier et Jean Rossiaud, députés.

Discussion et approbation de l'ordre du jour

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons reçu sur nos places le texte modifié de la proposition de motion 1662-I, présentée par MM. Golay, Rappaz et Clairet.

Communications de la présidence

Le président. Le 15 décembre dernier le Grand Conseil avait voté le projet de loi 7945-B, rapport de la commission de la santé chargée d'étudier le projet de loi modifiant la loi sur les établissements publics médicaux (K 2 05). En raison d'une erreur de transmission du service du Grand Conseil - qui n'en est pas coutumier - la loi publiée dans la «Feuille d'avis officielle» le 28 décembre 2005 correspondait à la version du projet de loi 7945-A, au lieu du projet de loi 7945-B.

La commission législative a bien voulu se réunir hier pour examiner ce sujet, et, après avoir pris contact avec ceux de ses représentants qui ont bien voulu m'en informer, le Bureau du Grand Conseil a finalement décidé de faire publier directement un rectificatif dans la «Feuille d'avis officielle», afin de mettre cette publication en conformité avec le vote du Grand Conseil du 15 décembre 2005, à savoir:

«Article 20, alinéa 2: Le Conseil d'Etat désigne le président du conseil d'administration, il le choisit pour la durée de quatre ans parmi les membres de ce conseil. Il peut le reconduire deux fois. Un conseiller d'Etat ne peut occuper ce poste.» Fin de la citation.

Je tiens à souligner que le recours à cette procédure de correction est tout à fait exceptionnel. Il n'est possible que parce qu'il s'agit d'une erreur de l'administration, et de la nôtre. Dans tous les cas où il y aurait une erreur formelle imputable à la députation, nous devrions passer par les procédures plus complexes de correction, pour ne pas risquer d'affecter durablement le rôle du législateur.

Je vous remercie de votre attention sur ce point.

Loi 7945 - Avis rectificatif publié dans la FAO

Correspondance

Le président. Vous avez trouvé sur vos places l'énoncé de la correspondance reçue par le Grand Conseil. Cet énoncé figurera au Mémorial.

Lettre de M. LONGCHAMP François, conseiller d'Etat en charge du département de la solidarité et de l'emploi à propos de la composition du conseil d'administration de l'Hospice général (PL 9575, E 1380, point 31) et de celle de la Fondation René et Kate Block (PL 9590, E 1389 point 40) (C 2165)

Lettre de M. FOLLONIER Jacques à propos de la diffusion de documents issus de la commission de l'enseignement et de l'éducation avant le dépôt des rapports sur le contreprojet à l'IN 121 (avec annexes) (C 2166)

Le président. Des voix se font déjà entendre de manière lumineuse... Monsieur Roger Deneys, vous avez la parole.

M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Je souhaite, lorsque nous aborderons l'initiative 126 «Energie-Eau: notre affaire !», que soit lue la lettre de l'ACME - Association suisse pour le contrat mondial de l'eau - que vous avez reçue. Je vous remercie.

Le président. Cette proposition est-elle appuyée ? C'est le cas. Je vous remercie ! Il en sera fait ainsi. Madame Sylvia Leuenberger, je vous donne la parole.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Je voulais faire la même demande, Monsieur le président. Je me rassieds donc. (Rires.)

Le président. Merci, Madame. Monsieur Jacques Follonier, vous avez la parole.

M. Jacques Follonier (R). Monsieur le président, j'aimerais que vous fassiez procéder à la lecture d'une lettre que je me suis permis de vous adresser.

Le président. Cette proposition est-elle appuyée, Monsieur le député ? C'est le cas ! Madame la secrétaire, voulez-vous bien procéder à la lecture de la lettre évoquée par M. Follonier ? (Applaudissements à la fin de la lecture du courrier 2166.)

Courrier 2166

Le président. Merci, Madame la secrétaire. Le Bureau prendra connaissance de cette lettre à sa prochaine séance et il y consacrera toute l'attention nécessaire.

Annonces et dépôts

Néant.

Interpellations urgentes écrites

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez trouvé sur vos places les interpellations urgentes écrites suivantes:

Interpellation urgente écrite de M. Sébastien Brunny : Rugbyman à l'Assurance-Invalidité : des abus tellement évidents (IUE 246)

Interpellation urgente écrite de M. Claude Jeanneret : L'Etat est-il au dessus des lois ou quelle confiance le Citoyen peut-il avoir envers des documents officiels délivrés par l'Etat de Genève ? (IUE 247)

Interpellation urgente écrite de Mme Carole-Anne Kast : Transfert de charges de la Ville de Genève au canton (IUE 248)

Interpellation urgente écrite de M. Gilbert Catelain : Pour le remplacement de l'indexation des salaires au renchérissement par une prime unique non assurée. Evaluation des économies réalisées en ce qui concerne tant les membres actifs du personnel du Grand Etat que les pensionnés (IUE 249)

Interpellation urgente écrite de M. Roger Deneys : Criminalité économique : politique de classement des plaintes ? (Genève, future république bananière ?) (IUE 250)

Interpellation urgente écrite de M. Pierre Weiss : Emplois temporaires cantonaux : quels sont les critères d'attribution et les effets sur l'emploi ? (IUE 251)

IUE 246 IUE 247 IUE 248 IUE 249 IUE 250 IUE 251

Le président. Conformément à l'article 162D de notre règlement, le Conseil d'Etat, respectivement le conseiller d'Etat interpellé, répondra par écrit lors de la session suivante, à savoir celle de février.

Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons le cours de notre ordre du jour.

PL 9655-A
Rapport de la commission de contrôle de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève à aliéner la parcelle 2660, plan 10, de la commune de Genève, section Eaux-Vives
Rapport de majorité de M. Guillaume Barazzone (PDC)
Rapport de minorité de Mme Michèle Künzler (Ve)

Premier débat

Le président. Nous avons déjà traité tout à l'heure la dizaine de projets de cette commission, à l'exception de celui-ci qui comporte un rapport de minorité. Monsieur le rapporteur de majorité, je vous donne la parole.

M. Guillaume Barazzone (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. La vente couverte par le projet de loi 9655 concerne un immeuble mixte, sis 7, rue de Montchoisy, de quatre étages plus combles sur rez, construit en 1900 et rénové en 1967, sur une parcelle d'environ 300 m2. Vingt-quatre appartements totalisant cinquante-six pièces sont réparties dans cet immeuble. Je précise qu'un restaurant, un magasin et deux arcades sont situés au rez-de-chaussée.

Il convient de préciser aussi que l'état du bâtiment est assez précaire extérieurement et nécessite une intervention lourde, une réfection de l'enveloppe.

Le prix de vente s'est élevé à 4,260 millions et la perte estimée s'élève à 4,943 millions, soit une perte de plus de 53%, ce qui est assez élevé.

Les représentants de la Fondation de valorisation ont confirmé que cet objet avait, selon la procédure ordinaire, été signalé à l'Etat et aux fondations immobilières - qui n'ont pas souhaité acquérir l'objet...

Cette proposition de vente a été acceptée par sept oui, un non - Vert - et une abstention du Mouvement citoyens genevois.

Forte de ce constat, la majorité de la commission vous recommande, Mesdames et Messieurs, d'accepter ce projet de loi ainsi amendé.

J'aimerais encore faire une remarque sur votre rapport de minorité, Madame Künzler. Vous écrivez à la deuxième page, je cite: «Mais, surtout, les citoyens verront avec amertume que, comme ailleurs, on socialise les pertes et on privatise les bénéfices.» Je ne peux vraiment pas vous laisser dire une chose pareille, même si je respecte votre proposition de loi, qui est actuellement à l'étude dans une autre commission, et qui concerne précisément l'acquisition par l'Etat d'éventuels biens immobiliers que vendrait la fondation !

Il faut rappeler que la loi, comme à l'accoutumée, nous impose et impose à la fondation de valoriser un maximum de biens et de les vendre au plus haut prix. Je ne peux donc pas vous laisser dire que nous «socialiserions les pertes» ! Lorsqu'on vend un bien au maximum du prix possible, le contribuable y gagne, puisque, ce faisant, on diminue les pertes ! Je le répète, je ne peux pas vous laisser dire une chose pareille !

Je vous laisserai développer votre position, comme d'habitude. (Exclamations et rire de Mme Künzler.)

Mme Michèle Künzler (Ve), rapporteuse de minorité. Je remercie le rapporteur de majorité de me laisser la parole...

Il me semble important de réagir. Il s'agit peut-être du dernier rapport, puisque le projet de loi concernant les rachats des immeubles de la Fondation de valorisation est actuellement en suspens. Un frémissement se fait sentir du côté du Conseil d'Etat, on constate que les choses bougent... Au fond, je reste quand même persuadée que ces immeubles seraient vraiment utiles pour le logement social pérenne.

Si j'ai écrit dans mon rapport: «on socialise les pertes et on privatise les bénéfices», c'est parce que, en fin de compte, l'acquéreur de cet immeuble aura un objet tout à fait rentable: avec plus de 5,5% net, ce qui est déjà un bon rapport. Et c'est le rendement d'un immeuble qui est important pour l'acquéreur !

En ce qui nous concerne, nous n'avons jamais remis en cause les fondements de la Fondation de valorisation, nous estimons qu'il faut vendre au mieux.

Nous avons en effet déposé un projet de loi pour combler la différence entre le prix du marché et le prix que cela coûtera pour en faire du logement social et nous considérons que ces immeubles, situés en ville, non connotés socialement, sont idéaux pour faire du logement social pérenne. Il faut absolument que les fondations immobilières de droit public puissent les racheter ! Ces immeubles, dont le loyer est tout à fait correct, pourraient avantageusement remplacer certains immeubles HLM dont la construction est très chère et qui sont situés dans des cités à l'extérieur de la ville. C'est pourquoi notre vision de la politique du logement social doit être élargie dans ce sens.

Comme nous l'avons déjà évoqué, nous aimerions bien régler définitivement et en une seule fois le sort de tous ces objets pour éviter d'avoir à chaque fois la même discussion. J'ai l'impression que le débat a avancé, que le nouveau Conseil d'Etat a compris le message et qu'il s'agit peut-être du dernier rapport de minorité... (Exclamations.) Peut-être !

M. Alberto Velasco (S). Je suis étonné qu'un objet de ce type soit traité en plénière... En effet, pas plus tard qu'il y a une semaine ou deux, nous étions à l'assemblée générale des fondations immobilières avec, justement, le chef du département du département des constructions et technologies de l'information, l'ancien DAEL, et le président du Conseil d'Etat. A cette occasion, M. Unger a déclaré très officiellement qu'il fallait faire du logement social au centre-ville, sans construire, en achetant des immeubles déjà existants. J'ai été évidemment tout à fait surpris et intéressé...

Je suis intervenu ensuite pour dire que nous étions tout à fait d'accord avec lui, qu'un projet de loi allant dans ce sens avait été déposé par les Verts, avait été examiné en commission, qu'il se trouvait précisément à l'ordre du jour du Grand Conseil, et qu'il suffirait donc de voter le crédit de 20 millions pour que la fondation puisse acquérir les immeubles en question à moindre coût. J'ai ajouté que cette opération permettrait de réaliser un millier de logements sociaux et que c'était très intéressant par rapport à la somme à débourser.

Ensuite, le président du département - CTI - est intervenu dans ce sens, en disant que ces projets de lois pourraient être intégrés à celui actuellement en discussion dans le cadre du nouveau projet de logement social pérenne, et qu'à ce titre nous pourrions effectivement accepter de suspendre leur traitement. Je lui ai donc fait savoir que le groupe socialiste souhaitait tout de même avoir la garantie que des objets immobiliers de la fondation ne soient plus vendus. En effet, si des objets qui peuvent servir à du logement social pérenne continuent à être vendus, il n'y en aura plus à acheter lorsque le projet en question sera traité en plénière...

Et, aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés, on nous propose à nouveau de vendre un immeuble ! J'espère, Monsieur le conseiller d'Etat Muller, que vous allez nous faire une déclaration à ce sujet, parce que, pour nous, c'est très important. (Commentaires.) Ou M. Hiler, en l'occurrence !

En principe, nous adhérons au fait d'intégrer tous ces travaux dans le cadre plus général du logement social pérenne, mais nous voudrions tout de même avoir l'assurance que les ventes de ces objets vont être freinées. Sinon, il vaudrait mieux demander que ces projets soient mis à l'ordre du jour pour être débattus rapidement.

Mesdames et Messieurs les députés, je vous propose de ne pas voter ce projet de loi et de vous rallier au rapport de minorité, parce qu'il est justement très important d'aller dans le sens des propositions du Conseil d'Etat.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Je confirme à Mme Michèle Künzler que le Conseil d'Etat frémit... C'est exact !

Je confirme également à M. Velasco que la problématique du logement social, du point de vue de sa pérennité et de son emplacement, est en train de faire l'objet de décisions politiques.

Il n'empêche que c'est ce parlement qui, en dernière analyse, décidera, puisqu'il nous faut, dans tous les cas d'espèce une base législative pour agir, qu'il s'agisse du projet de loi déposé pour combler le déficit entre les exigences du logement social et le prix de rachat de cet objet - qui est en effet ajourné - ou qu'il s'agisse encore d'une acquisition d'un périmètre conséquent d'immeubles se prêtant au logement social à l'intérieur de l'agglomération déjà construite. Cela exige - et nous sommes pleinement d'accord au Conseil d'Etat sur ce point - une vue d'ensemble. Il faut mener une politique d'acquisition et une politique dans les zones de développement. Et ces deux politiques doivent se modifier simultanément.

La deuxième étape, si cette décision est prise, consiste à définir un périmètre. Ce périmètre existe - il a été défini et présenté en commission - et une liste a été établie. Or, cet immeuble ne figure pas sur cette liste. C'est la raison pour laquelle il n'y a aucun motif particulier, étant donné l'abondance de ce type de biens - car il y a d'autres périmètres, qui ne figurent pas sur cette liste, qui représentent beaucoup d'immeubles - que le Conseil d'Etat stoppe ces ventes toutes affaires cessantes.

Quoi qu'il en soit, le Conseil d'Etat veut en effet que ce périmètre soit tracé rapidement - mais pas de façon improvisée - et prendre des mesures sur le plan financier pour déterminer quels seront les acteurs qui procéderont aux acquisitions - l'Etat lui-même, la Fondation pour l'habitat coopératif et bon marché, les fondations immobilières HBM, d'autres collectivités publiques ? Ce processus doit être suivi avec ordre et méthode si nous voulons arriver à augmenter le volume de logements construits et à constituer rapidement le socle de logements pérennes. Sinon, nous n'obtiendrions que des résultats ponctuels et symboliques.

C'est pour cette raison que le Conseil d'Etat - même s'il garde tout à fait à l'esprit qu'il est nécessaire et urgent de fixer la politique en la matière sur de nouvelles bases et dans un esprit de consensus - ne vous prie pas aujourd'hui d'interrompre le cours normal des choses concernant cet objet particulier.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant la prise en considération de ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 9655 est adopté en premier débat par 52 oui contre 29 non et 2 abstentions.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 3.

Le président. Le troisième débat est-il demandé ? (M. Roger Deneys répond affirmativement.) Il l'est ! M. Deneys n'étant pas encore conseiller d'Etat, vous me permettrez d'écouter d'abord M. Hiler. (Rires.)

Troisième débat

La loi 9655 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 9655 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 54 oui contre 29 non et 3 abstentions.

Loi 9655

Le président. Je salue la présence à la tribune de trois de nos anciens collègues: Mme Salika Wenger, M. Chaïm Nissim et M. Pierre Vanek. (Applaudissements.)

Nous passons au point 154 de notre ordre du jour, qui est un point fixe.

IN 125
Initiative populaire 125 : Pour une meilleure prise en charge des personnes âgées en EMS
IN 125-B
Rapport de la commission législative chargée d'étudier la validité de l'initiative populaire 125 "Pour une meilleure prise en charge des personnes âgées en EMS"

Débat

Le président. Je demande aux intervenants, s'il y en a, de ne s'exprimer strictement que sur la validité formelle de cette initiative. Le temps viendra, plus tard, au retour de la prochaine commission, d'en examiner le fond. Monsieur Luscher, avez-vous quelque chose à ajouter à votre rapport ?

M. Christian Luscher (L), rapporteur. Une seule chose, Monsieur le président. Bien évidemment, je persiste dans ce rapport au nom de la commission législative, qui a donné un préavis unanime moins une abstention. Il n'y a donc aucune opposition. Cela signifie que rien n'empêche de déclarer cette initiative recevable.

Le président. Comme la coutume le veut, l'initiative doit être examinée sous ses différents aspects formels. Il s'agit de savoir si elle respecte l'unité de la forme. La commission s'est prononcée à l'unanimité moins une abstention par l'affirmative. Je soumets cette question au vote du Grand Conseil. Ceux qui pensent que l'unité de la forme est respectée votent oui, les autres votent non ou s'abstiennent.

Mise aux voix, l'unité de la forme est adoptée par 76 oui (unanimité des votants).

Le président. La question de l'unité du genre se pose à présent. A l'unanimité, la commission nous encourage à la constater. Je vous soumets donc cette question. Celles et ceux qui pensent que l'unité du genre est réalisée votent oui, les autres non ou s'abstiennent.

Mise aux voix, l'unité du genre est adoptée par 80 oui (unanimité des votants).

Le président. Se pose à présent la question de l'unité de la matière, qui a été constatée à l'unanimité par la commission. Je la soumets à vos suffrages. Celles et ceux qui pensent que l'unité de la matière est réalisée votent oui, les autres non ou s'abstiennent.

Mise aux voix, l'unité de la matière est adoptée par 84 oui et 1 abstention.

Le président. Nous examinons à présent si cette initiative est en conformité au droit supérieur; la commission législative est à l'unanimité de cet avis. Je le soumets à vos suffrages.

Mise aux voix, la conformité de l'initiative 125 au droit supérieur est adoptée par 77 oui et 1 abstention.

Le président. Je vous demande un dernier vote pour, cette fois-ci, rassembler tous les autres en une seule main, c'est-à-dire à accepter la validité de l'initiative 125.

Mise aux voix, la validité de l'initiative 125 est adoptée par 80 oui (unanimité des votants).

L'initiative 125 est renvoyée à la commission des affaires sociales.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons maintenant à notre second point fixe de notre ordre du jour, le point 137.

IN 126
Initiative populaire Energie-Eau : notre affaire! Respect de la volonté populaire
IN 126-C
Rapport de la Commission législative chargée d'étudier la validité de l'initiative populaire 126 « Energie-Eau: notre affaire! Respect de la volonté populaire »

Débat

Le président. Je rappelle que nous sommes exactement dans le même cas de figure que pour l'initiative précédente, c'est-à-dire que la commission législative a été chargée d'étudier la recevabilité et seulement la recevabilité de cette initiative. Le débat de fond sur les questions relatives au monopole des énergies aura lieu après, quand l'initiative reviendra de commission. A ce stade, nous ne nous interrogeons donc que sur la recevabilité.

La lecture du courrier adressé par l'Association suisse pour le contrat mondial de l'eau avait été demandée tout à l'heure. Madame la secrétaire, vous êtes prête ? Je vous donne la parole, Madame Bartl. (Lecture du courrier 2160.)

Courrier 2160

Le président. Merci, Madame la secrétaire. Mesdames et Messieurs les députés, comme cette initiative, à la différence de la précédente, pose des problèmes de recevabilité un peu plus complexes, je vais donner brièvement la parole aux trois rapporteurs pour que nous comprenions exactement quels sont les enjeux. Le Bureau a sollicité des groupes la discipline nécessaire pour que les sujets soient traités avec efficacité sur les questions de recevabilité. Je suis persuadé que les groupes suivront du mieux qu'ils pourront cette requête. Monsieur Barazzone, vous avez la parole.

M. Guillaume Barazzone (PDC), rapporteur de majorité. La commission législative, comme à son habitude, s'est interrogée sur la recevabilité de cette initiative. Nous avons tout d'abord examiné les trois conditions de la recevabilité formelle de l'initiative, à savoir l'unité du genre, l'unité de la forme et l'unité de la matière.

En ce qui concerne l'unité du genre, aucun problème particulier n'a été soulevé dans les discussions. Même chose pour l'unité de la forme, puisque la commission, à l'unanimité, a reconnu que cette initiative respectait l'unité de la forme.

En revanche, nous avons longuement débattu de l'unité de la matière. Je ferai un bref rappel de la jurisprudence du Tribunal fédéral à ce sujet. Celui-ci considère que la votation doit porter: «... sur un seul objet ou, à tout le moins, sur des objets étroitement interdépendants, réunis entre eux par un lien réel et objectif.» Or la majorité de la commission a considéré qu'il n'y avait pas de rapport intrinsèque assez étroit entre les différents éléments de l'initiative. A savoir qu'un citoyen favorable au monopole de distribution et d'approvisionnement de l'eau et pas au monopole de l'électricité ou du gaz n'avait pas la possibilité de se prononcer alternativement, d'accepter l'un et de refuser l'autre.

C'est ainsi que, en application de l'article 66, alinéa 2, de la constitution, la commission a accepté à la majorité de scinder l'initiative en trois articles distincts concernant respectivement l'eau, l'électricité et le gaz. Je rappelle que lorsque la commission législative - ou ce Grand Conseil - considère que l'unité de la matière est violée, comme cela a été le cas en commission, deux solutions s'offrent ensuite à elle: soit de déclarer l'initiative nulle soit de la scinder en différentes parties. Pour respecter l'esprit des initiants, la majorité de la commission a estimé qu'il fallait scinder l'initiative tout en gardant le même texte pour chacune des parties, sans en changer ni la lettre ni l'esprit, précisément pour garantir l'esprit des initiants.

C'est dans un deuxième temps que nous nous sommes posé la question, pour chacun des trois articles, indépendants les uns des autres, de la conformité de chacun d'eux au droit supérieur.

S'agissant de l'eau, la commission a considéré à l'unanimité qu'un monopole de distribution et d'approvisionnement de l'eau respectait le droit supérieur.

En revanche, nous avons longuement débattu de l'électricité et du gaz. Je voudrais juste vous citer un petit passage d'un arrêt rendu récemment par le Tribunal fédéral sur les Entreprises électriques fribourgeoises, car les discussions se sont engagées sur cette base. En effet, le Tribunal fédéral, sans se prononcer sur l'admissibilité ou non d'un monopole de droit cantonal, a exprimé ses réserves dans un obiter dictum, je cite: «On peut se demander sérieusement si et dans quelle mesure le canton de Fribourg a la possibilité d'instituer un monopole de droit en faveur de la recourante pour la livraison d'électricité.»

Malgré le fait que le Tribunal fédéral, dans cet obiter dictum, met en garde les cantons sur l'adoption d'un monopole de droit en matière de distribution et d'approvisionnement d'électricité et que, actuellement, une loi est en discussion aux Chambres nationales - la loi sur l'approvisionnement en électricité - la majorité de la commission a considéré qu'il ne fallait se substituer ni au législateur fédéral ni au Tribunal fédéral.

En vertu du principe in dubio pro populo, la majorité de la commission a donc estimé que cette initiative était conforme au droit supérieur dans la mesure où elle concernait un monopole de droit d'approvisionnement et de distribution de l'électricité.

Par contre, en ce qui concerne le gaz, la question s'est posée un peu différemment, puisque la Confédération a une compétence, de par la Constitution, qui n'est pas limitée aux principes. Elle a usé de cette compétence en adoptant la loi fédérale sur les installations de transport par conduites de carburants gazeux. La majorité de la commission a donc jugé que la Confédération avait usé pleinement de sa compétence et qu'il ne restait plus aucune place pour du droit cantonal en matière de monopole pour le gaz. Ainsi, la majorité de la commission a considéré que la création d'un monopole de droit d'approvisionnement et de distribution du gaz ne respectait pas le droit supérieur. La majorité de la commission fait quelques remarques finales à ce Grand Conseil. Elle recommande au Grand Conseil de déclarer nulle la partie de l'alinéa 1 de l'article 158 concernant le gaz, puisqu'elle a jugé cette partie non conforme au droit supérieur. Elle recommande aussi de scinder l'alinéa 1 de l'article 158 en deux volets, sans changer ni la lettre ni l'esprit du texte proposé par les initiants, concernant respectivement l'eau et l'électricité, de façon à permettre aux citoyens et citoyennes de ce canton de se prononcer alternativement sur ces deux volets, mais en même temps. Et, enfin, elle recommande de déclarer chacun des deux volets recevables.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité, pour cet exposé très clair. Je donne la parole à Mme le rapporteur de première minorité, Mme Loly Bolay.

Mme Loly Bolay (S), rapporteuse de première minorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Je voudrais tout de même rappeler que, le 30 septembre dernier, la commission législative de la précédente législature a estimé, à l'unanimité moins une abstention libérale, que l'initiative 126 était conforme. C'est lorsque cette initiative a été traitée dans ce plénum qu'une autre majorité s'est dégagée, renvoyant une deuxième fois cette initiative à la commission législative. Mais le vote sur l'unité de la matière a été très serré, puisqu'il y a eu quatre oui contre quatre non... C'est donc à une majorité très faible que la commission a considéré que cette initiative ne correspondait pas à l'unité de la matière.

Je souligne tout de même que douze mille personnes ont signé cette initiative et que le Conseil d'Etat, dans son excellent rapport, indique qu'elle est totalement recevable.

Celle-ci veut garantir le respect du monopole de service public des SIG en matière d'approvisionnement et de distribution de l'eau, de l'électricité et du gaz. Cette initiative ne propose rien de nouveau: elle confirme et inscrit dans la constitution le monopole de service public des SIG pour ces trois fluides. Cette initiative défend le principe d'une entreprise publique et veut maintenir une égalité de traitement entre les usagers des SIG, en évitant des passe-droits ou une tarification différenciée entre les gros consommateurs et le reste de la population.

La majorité des commissaires a estimé que cette initiative ne respectait pas l'unité de la matière au motif qu'il s'agit de trois fluides différents dont le seul dénominateur commun est le principe de monopole des Services industriels de Genève. Selon le Tribunal fédéral, l'exigence de l'unité de la matière interdit de mêler dans un même objet soumis au peuple plusieurs propositions de nature ou de but différents. Il doit exister entre les diverses parties d'une initiative soumise au peuple un rapport intrinsèque, c'est-à-dire un rapport de connexité qui fasse apparaître comme objectivement justifiée la réunion de plusieurs propositions en une seule question soumise au peuple.

Je rappelle que l'article 66 de notre constitution stipule, en son alinéa 2, que, je cite : «Le Grand Conseil déclare partiellement nulle l'initiative dont une partie est manifestement - manifestement ! - non conforme au droit...».

Nous devons nous demander si les SIG doivent ou non, conserver leur monopole de service public actuel pour les trois fluides et si l'approvisionnement et la distribution de ces fluides répondent à la notion de bien commun. L'excellent rapport du Conseil d'Etat le relève avec pertinence: il existe un rapport suffisant entre les trois fluides pour qu'ils soient intégrés dans la même proposition. Par conséquent, le rapport de connexité est évident. Je vous demande donc d'admettre que l'unité de la matière est réunie en ce qui concerne cette partie de l'initiative et de la voter tout à l'heure.

J'en viens maintenant à la conformité au droit supérieur. Les libéraux et l'UDC - alors que l'UDC, le 30 septembre dernier, avait voté la conformité de cette initiative - contestent la conformité au droit supérieur actuel du monopole public en matière d'électricité alors que d'autres cantons - et le Conseil d'Etat le signale dans son rapport - Fribourg, Vaud, Neuchâtel, ont des dispositions analogues qui n'ont jamais été remises en question.

Par ailleurs, le Tribunal fédéral admet dans une jurisprudence constante que les cantons peuvent créer de nouveaux monopoles, et ce dernier n'a jamais prohibé un monopole de ce type depuis plus de cent ans. D'ailleurs, le Conseil d'Etat l'a relevé dans son rapport !

Quant à la loi sur le marché de l'électricité bis, je vous rappelle, Monsieur Luscher, qu'elle n'a pas été adoptée; elle sera très probablement contestée par le Tribunal fédéral, vous l'avez dit l'autre jour en plénum.

S'agissant de la loi sur le gaz, je rappelle que le peuple l'a refusée en 2002 après avoir rejeté la LME.

Par ailleurs, l'article 1, alinéa 2, de la loi fédérale sur les installations de transport par conduites - la LITC - ne s'applique qu'aux conduites d'une certaine pression: les gazoducs. Or l'initiative 126 ne vise qu'à instaurer un monopole pour la distribution de gaz au moyen de conduites non soumises à cette loi. En d'autres termes, les SIG ne sont pas astreints par le droit fédéral à ouvrir leurs réseaux de distribution du gaz à des tiers, dès lors que leurs réseaux ne sont pas exploités avec une pression suffisante pour être assujettis à la loi fédérale sur les installations de transport par conduites. Il s'agit de l'article 13.

Pour ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de confirmer par votre vote que les trois fluides répondent à la conformité du droit supérieur. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Christian Luscher (L), rapporteur de deuxième minorité. Je rappellerai tout d'abord que notre parlement n'est pas une chambre d'enregistrement des avis du Conseil d'Etat... Par ailleurs, vous vous prévalez de l'avis du Conseil d'Etat, qui trouve l'initiative recevable... Ce n'est pas, en soi, un gage de la réalité de cette recevabilité !

Ceux qui siégeaient au parlement lors de la précédente législature s'en souviendront: l'initiative 119, que le Conseil d'Etat avait trouvée parfaitement recevable, a ensuite été déclarée irrecevable par ce Grand Conseil. Et le Tribunal fédéral a confirmé cette irrecevabilité complète.

Le Conseil d'Etat a également estimé que l'initiative 120 était recevable... Pourtant, ce Grand Conseil l'a déclarée irrecevable et le Tribunal fédéral a confirmé son irrecevabilité - certes partielle - et a sabré la moitié de cette initiative qu'il faudra soumettre au peuple.

Au même titre que notre Grand Conseil n'est pas une chambre d'enregistrement des avis du Conseil d'Etat, il n'est pas une «chambre de sauvetage» des initiatives qui ne sont pas constitutionnelles ! (Exclamations.) Alors, je veux bien...

Le président. J'invite l'assemblée à rester paisible. Elle l'a été jusqu'ici, et je souhaite que cela continue. Je rappelle aux personnes qui se trouvent à la tribune qu'elles ne sont pas autorisées à manifester leur opinion de quelque manière que ce soit, comme elles le savent parfaitement !

M. Christian Luscher. Je vous remercie, Monsieur le président. Je poursuis... Le principe in dubio pro populo est souvent évoqué... J'y suis moi-même très favorable, parce qu'il garantit effectivement le droit d'initiative.

Cela étant, il convient tout de même d'appliquer ce principe avec une certaine mesure pour deux raisons. D'abord parce qu'il faut faire de la prévention générale et empêcher que des initiatives parlant de tout et de rien soient proposées au peuple, puis au Grand Conseil qui doit statuer sur leur recevabilité. Et puis, lorsque l'on a affaire à des initiants qui sont rompus aux arcanes de la législation et à l'exercice des droits populaires, on est en droit - et le Tribunal fédéral l'avait indiqué pour l'initiative 119 - de faire preuve d'une certaine sévérité.

En l'occurrence, parmi les initiants de cette initiative, figurent des députés, anciens députés, conseillers nationaux, qui savent parfaitement bien qu'elle ne respecte pas, en tout cas, en partie - je veux parler du gaz, mais c'est vrai aussi pour l'électricité - le principe constitutionnel. Les initiants se moquent des signataires en leur faisant croire que l'initiative, favorable au monopole des SI, pour le gaz, pour l'électricité, leur permettra de s'exprimer sur ce sujet alors qu'en réalité il est totalement contraire au droit supérieur !

C'est d'ailleurs ce que le Tribunal fédéral avait retenu à propos de l'initiative 119, estimant que le Grand Conseil avait sanctionné à juste titre le fait de déposer des initiatives en sachant pertinemment que certains sujets n'avaient rien à voir l'un avec l'autre, ou qu'un sujet était contraire au droit supérieur, et que les initiants n'étaient pas en droit d'attendre du Grand Conseil qu'il scinde systématiquement des initiatives.

Voilà la raison pour laquelle les libéraux, eux, se sont opposés à la scission. Ils pensent en effet qu'il faut faire de la prévention générale et expliquer clairement aux initiants qu'ils sont les bienvenus devant la commission législative, devant le Grand Conseil, qui analysera avec toute la sérénité voulue la question de la recevabilité, mais que le Grand Conseil est en droit de leur dire que cela suffit, qu'il ne veut plus scinder les initiatives et qu'on les retournera aux expéditeurs quand celles-ci ne sont pas conformes au droit supérieur. C'est ce que nous avons fait pour l'initiative 119, qui avait recueilli au moins autant de signatures que l'initiative sur l'énergie.

Madame Bolay, en disant que cette initiative est conforme à l'unité de la matière, vous jouez un jeu dangereux, car vous risquez de couler l'initiative que vous prétendez vouloir sauver. Il pourrait se passer la chose suivante... Moi, je serais prêt à vous suivre et voter la recevabilité de l'initiative en admettant l'unité de la matière, mais s'il apparaît de manière évidente - comme cela a été le cas pour la majorité de la commission - qu'une partie de l'initiative n'est pas conforme au droit supérieur, nous serions obligés de la déclarer intégralement irrecevable, puisque nous aurions accepté le principe de l'unité de la matière. C'est un problème important, et je pense que, ce faisant, vous tirez une balle dans le pied des personnes que vous prétendez vouloir sauver !

S'agissant de l'électricité, Mesdames et Messieurs les députés, je ne vous demande pas de nous croire - que nous soyons de la majorité ou de la minorité de ce parlement - je vous demande simplement de croire le Tribunal fédéral et la doctrine unanime en la matière ! Vous avez raison, Madame Bolay, il y a cent ans, le Tribunal fédéral s'est prononcé en faveur des monopoles cantonaux... Il y a quarante ans, le Tribunal fédéral a également confirmé les amendes qui avaient été prononcées en Valais pour adultère... C'est fini: les temps ont changé ! Et les temps ont également changé en matière de monopoles !

Et la tendance actuelle, en Europe et en Suisse, va dans le sens de l'abolition des monopoles. C'est déjà le cas en droit européen: j'ai cité la norme dans mon rapport. C'est en train d'être le cas en droit fédéral, et c'est ce que préconise l'intégralité - je dis bien «l'intégralité» - de la doctrine en Suisse. Il n'y a pas un auteur qui va dans le sens de ce que vous dites pour le gaz et pour l'électricité, la question de l'eau étant évidemment réservée puisque nous sommes tous parvenus à la conclusion que cette partie de l'initiative ne posait pas de problème de conformité au droit supérieur. Mais je tiens à votre disposition le seul auteur qui ait analysé en français la question de l'initiative 126: il arrive exactement à la même conclusion que nous, il considère, à part la question de la scission, que cette initiative n'est pas conforme au droit supérieur pour l'électricité et le gaz. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est un auteur qui se fonde sur la loi ! Ce n'est pas un politicien, c'est un docteur en droit !

Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, la raison pour laquelle les libéraux ont considéré qu'il ne pouvait pas y avoir matière à scission. C'est aussi la raison pour laquelle les libéraux estiment que, selon la doctrine unanime, la doctrine du Tribunal fédéral, la tendance en Suisse et en Europe, la partie de l'initiative concernant l'électricité n'est pas conforme au droit supérieur.

J'aimerais faire une dernière remarque, Monsieur le président. J'espère - j'ose espérer ! - que les personnes qui ont affaire avec les Services industriels de Genève dans cette assemblée... (Exclamations.) ... qu'ils soient administrateurs ou employés, auront la décence de ne pas prendre la parole sur ce sujet ! Je vous remercie. (Huées et applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je rappelle que les manifestations d'approbation raisonnables sont permises. Les manifestations de désapprobation sont déjà plus problématiques... (Rires.)

Mesdames et Messieurs les députés, les rapporteurs nous ont fait tous les trois un exposé parfaitement clair de la situation telle qu'ils la perçoivent chacun dans son optique. Je vais à présent donner la parole à chacun d'entre vous. Certains groupes disciplinés n'ont annoncé qu'un seul orateur, d'autres se lancent à plusieurs... Nous verrons bien ! Monsieur Sidler, je vous donne la parole.

M. Damien Sidler (Ve). Les Verts n'ont aucun doute sur la recevabilité de l'initiative 126. Nous ne comprenons pas l'obstruction juridique systématique que le parti libéral tente de faire en renvoyant une deuxième fois cette initiative en commission. Et, surtout, nous regrettons la forme donnée à cette initiative au sortir des travaux de la commission, dans la mesure où c'est par un vote de quatre voix contre quatre qu'elle se retrouve telle que vous l'avez sur votre bureau. Comme l'a signalé M. Barazzone, ce n'est pas une majorité, mais une égalité des voix. Etant donné que douze mille personnes ont signé cette initiative, cette égalité des voix peut sembler bizarre, puisque la question était relativement simple: cette initiative est-elle juridiquement conforme au droit ! Je ne parle pas sur le plan politique, mais juridique...

Nous, les Verts, nous vous demandons par conséquent de ne pas suivre la recommandation de la majorité de la commission de rejeter l'unité de la matière, car, à notre avis, elle est tout à fait réalisée. Pour quelle raison ? Notamment parce que la crise que connaît actuellement l'Europe en matière de gaz, la panne d'électricité survenue l'année dernière en janvier, sont des événements qui induisent certaines réponses et montrent qu'il faut traiter ces fluides de la même façon. Ces fluides sont mal répartis dans le monde, ce qui engendre des conflits régionaux et planétaires. Ils sont abondants, mais ils ne sont pas forcément sous la forme désirée pour pouvoir satisfaire les besoins vitaux et les envies de confort des citoyens.

Les installations qui sont nécessaires pour pouvoir acheminer ces fluides vers les consommateurs impliquent des investissements faramineux. Il faut donc les gérer de façon régulière et les entretenir au mieux pour garantir la sécurité d'approvisionnement. Tout à l'heure une lettre a été lue au sujet de l'eau... On peut y associer en partie l'énergie qui est aussi un besoin vital. Tous ces fluides doivent être traités de la même manière, pour garantir les besoins vitaux des citoyens.

L'unité de la matière est donc respectée. Le Conseil d'Etat l'a écrit dans son rapport... Historiquement, d'ailleurs, le canton a réuni ces domaines en les confiant aux Services industriels depuis fort longtemps. Du reste, la constitution stipule, dans un seul alinéa - l'alinéa 1 de l'article 158 - que: «Les Services industriels ont pour but de fournir dans le canton de Genève l'eau, le gaz, l'électricité et de l'énergie thermique...». Le but est stipulé dans sa forme singulière, autrement dit, le seul but est de fournir tous ces fluides. Pour ces raisons, nous pensons que l'unité de la matière est respectée et nous vous invitons à la soutenir.

S'agissant de la prétendue non-conformité au droit supérieur pour le gaz, l'article 66, alinéa 3, de la constitution stipule, je cite: «Il - le Grand Conseil - déclare partiellement nulle l'initiative dont une partie est manifestement non conforme au droit...». Or, je peux vous lire un texte que vous pouvez trouver sur le site de l'Office fédéral de l'énergie au sujet de l'ouverture du marché du gaz en Suisse. Il y est écrit: «En Suisse, l'accès des tiers aux réseaux de gaz haute pression - donc, supérieure à 5 bars - est réglementé depuis le milieu des années 60 déjà par la loi sur les installations de transport par conduites - la LITC.

L'article 13 de cette loi - sur lequel se basent les rapporteurs de majorité et de la deuxième minorité - oblige, en son alinéa 1, les exploitants des gazoducs haute pression à: «exécuter des transports pour des tiers dans les limites des possibilités techniques et des exigences d'une saine exploitation et pour autant que le tiers offre une rémunération équitable.» Jusque-là nous sommes tout à fait d'accord. Mais ce que dit ensuite l'OFEN sur son site Internet, c'est que: «L'article 13 ne concerne toutefois pas les conduites à moyenne et basse pression... », autrement dit, entre parenthèses, la distribution. Et, par ailleurs, l'énoncé de cet article reste assez flou. Voilà ce qu'on y trouve ! Il est donc clair que la LITC ne concerne pas le réseau basse pression !

Je vous donne un autre exemple. J'ai sous les yeux la carte des gazoducs haute pression en Suisse qui sont soumis à la LITC... Eh bien, le réseau des SIG n'y figure pas ! Il faut donc savoir que le réseau de gaz en Suisse est à trois niveaux: il y a Swissgaz qui règle le transport international et les gros volumes. Ensuite, il y a les distributeurs régionaux qui gèrent la répartition supracantonale. Pour la Suisse romande, il s'agit de Gaznat. Et puis, il y a les distributeurs basse pression qui, eux, ne sont pas soumis à la LITC, sur laquelle vous basez votre argument. Donc, sur ce point aussi, je pense que l'on peut rejeter votre argument et soutenir la conformité de cette initiative au droit supérieur pour le gaz.

Concernant l'électricité et, particulièrement, le rapport de M. Luscher - étant donné que c'est le seul à faire état de la non-conformité de l'initiative pour l'électricité - je vous rappelle que la LME a été rejetée. Je voudrais vous citer le passage d'un texte, écrit par le professeur Weizmann, sur le marché de l'électricité et du droit cantonal - vous pouvez le trouver dans la «Vie économique» de février 2005 - qui considère: «Après le rejet en votation populaire, le 22 septembre 2002, de la loi sur le marché de l'électricité, ce secteur cherche toujours une assise au niveau du droit fédéral. Cela ne signifie pas pour autant qu'il y ait un vide réglementaire, loin s'en faut. Simplement, la compétence de légiférer reste, en la matière, l'apanage des cantons.» Autrement dit, il n'y a aucun doute que l'initiative 126 respecte également le droit supérieur pour ce qui est de l'électricité...

Le président. Il va vous falloir conclure, Monsieur le député !

M. Damien Sidler. Je conclus. Enfin, comme le rapporteur de majorité, M. Barazzone, l'a dit, il n'y a aucun problème en ce qui concerne l'eau.

Nous vous invitons par conséquent à soutenir l'initiative 126, sous la forme déposée par ses initiants, puisqu'elle est parfaitement recevable sous cette forme. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, plusieurs d'entre vous se sont adressés à moi dans les dernières minutes pour me dire qu'ils estimaient que l'article 24 pouvait s'appliquer parce que l'orateur qui vient de s'exprimer serait lui-même employé aux Services industriels. Nous avons eu souvent des débats sur l'article 24... Hélas, son application est restrictive - je dis «hélas» parce qu'elle n'interdit d'intervenir qu'à des gens qui se trouvent dans une situation d'intérêt direct et, donc, en conflit avec les règles de retenue. Cela étant, comme tout le monde le sait dans cette salle, je suis partisan d'une application plutôt élastique dans l'étendue que dans la restriction de ces normes, et j'invite donc chacun à bien réfléchir avant de s'exprimer sur ce genre de sujet. Madame la députée Leuenberger, vous avez la parole.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Merci, Monsieur le président. Tout à l'heure, Monsieur Luscher, vous avez fait un peu d'histoire en vous référant à la jurisprudence fédérale d'il y a quarante ans, d'il y a cent ans... Je vous rappelle qu'en 2002 le peuple a refusé la libéralisation des marchés de l'électricité !

Il me semble qu'il y a un malentendu. En effet, tout à l'heure, M. Barazzone a signalé que le peuple, s'il le voulait, ne pourrait pas se prononcer sur l'eau, l'électricité ou le gaz... Mais l'objectif premier de cette initiative n'est pas que la population puisse se prononcer sur les différentes missions des SIG à propos de ces trois fluides, son but est que la population se prononce sur l'inscription du monopole dans la constitution ! Cette initiative pose une simple question: êtes-vous pour ou contre le monopole, oui ou non ? Actuellement, de fait, les SIG ont le monopole de l'eau, de l'électricité et du gaz, qu'ils distribuent de façon prioritaire aux Genevois, mais ce monopole n'est pas inscrit dans la constitution, et c'est une mission que les SIG remplissent depuis des décennies. Comme le disait hier soir M. Hiler à propos de l'initiative contre le tabac, il faut cesser les embrouilles juridiques; il faut choisir l'option favorable aux initiants, car, de toute façon, en dernier ressort, c'est le peuple qui tranche ! Le but de cette initiative est simplement de confirmer l'existence du monopole de service public que la collectivité a confié aux SIG en l'inscrivant dans la constitution. C'est aussi simple que cela ! Et - comme je l'ai dit, ainsi que Mme Bolay, ainsi que mon collègue - si l'initiative cite les trois fluides, c'est simplement parce que les SIG approvisionnent et distribuent ces trois fluides à la population genevoise. En matière d'eau, il est évident qu'un monopole de droit est nécessaire, car elle est un bien public vital. Pour ce qui est de l'électricité - Mme Bolay en a parlé - Neuchâtel, Fribourg et Vaud ont instauré un monopole sur l'approvisionnement et la distribution, en conformité - bien évidemment - avec le droit supérieur.

Quant au gaz, Monsieur Luscher, la distribution à Genève ne se fait pas par les grosses conduites, qui sont régies par le droit fédéral, mais par des conduites basse pression. Donc, une fois de plus, il y a doute, ce qui ne permet pas d'affirmer qu'il y a non-conformité avec le droit supérieur.

Par conséquent, pour résumer l'esprit des initiants, cette initiative demande que le peuple se prononce sur l'inscription du monopole des SIG dans la constitution, puisque ces derniers exercent de fait ce monopole.

Pour nous, il y a unité de la matière, et nous devons la voter pour respecter le droit d'initiative qui prime sur nos divergences sur la forme.

Par contre, si vous n'êtes pas favorable au monopole, la discussion pourra avoir lieu plus tard, lorsque nous aborderons le fond, mais ce n'est pas l'objet du débat d'aujourd'hui.

Dernier point. Je voudrais juste souligner le vide juridique en la matière au niveau fédéral... La LME bis n'a pas été votée, nous sommes en phase référendaire. Il peut y avoir référendum, et la position des cantons - je l'ai déjà dit il y a un mois, mais je le répète - peut influencer l'Etat. Et si nous luttons dans ce sens, c'est parce que ces fluides sont d'une importance vitale pour l'économie, pour la population, pour la sécurité et pour la planète. Et plus nous donnerons ces énergies vitales en pâture aux marchés publics, plus nous perdrons la capacité de ces fluides, nécessaire pour assurer le bien-être de la population, de l'environnement, de la planète. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Borgeaud... (Un instant s'écoule. Exclamations. Mme Sandra Borgeaud arrive dans la salle.) Madame la députée, la parole vous est donnée... Je préférerais que les députés qui ont l'intention de la prendre restent dans la salle. Vous avez la parole.

Mme Sandra Borgeaud (MCG). Je vous en remercie - et excusez-moi, Monsieur le président. En tant que membre du MCG, je voudrais revenir sur certaines de mes positions lors des travaux de la commission législative sur cette initiative, je vais m'exprimer sur le droit supérieur.

Une chose n'a pas été évoquée. J'ai entendu dire que les initiants savaient pertinemment que l'initiative était contraire au droit supérieur... Ce n'est pas exact ! Les services juridiques de la chancellerie, qui ont examiné attentivement l'initiative à la lumière du droit, ont conclu, eux, dans le sens inverse, comme la quasi-unanimité de la commission législative l'an dernier.

Autre élément: la prétendue non-conformité au droit supérieur actuel du monopole public en matière électrique, alors que Fribourg, Vaud et Neuchâtel ont édicté des dispositions légales analogues et incontestées - alors que la LME bis n'a pas été adoptée par les Chambres et qu'elle sera contestée par un référendum fédéral annoncé, dont personne n'a le droit de présumer l'issue.

Les droits néolibéraux sont invoqués comme un droit supérieur par anticipation. On a le droit d'avoir un avis politique différent à ce sujet, mais on n'a pas le droit de présenter son avis comme relevant du droit avant qu'une loi n'entre en vigueur ! (Applaudissements.)

Mme Anne Emery-Torracinta (S). Je remercie les deux personnes qui viennent d'intervenir et qui ont essayé de recentrer un peu le débat. J'ai en effet l'impression que l'on s'égare et que l'on cherche à connaître le sexe des anges... (Exclamations.)

L'enjeu de la discussion de ce soir, je tiens à le préciser, c'est le respect de la démocratie et des droits populaires ! Certains l'ont signalé, l'article 66 de la constitution cantonale ainsi que l'article 120 de la loi portant règlement du Grand Conseil précisent bien que le rôle du parlement est uniquement d'examiner si une initiative est manifestement non conforme au droit supérieur. Tout est dans l'adverbe «manifestement» !

Or - et Mme Bolay l'a très bien rappelé - lorsque la commission législative, première mouture, c'est-à-dire au mois de septembre, a examiné cet objet, il y avait deux avocats parmi les commissaires, et un seul a émis des doutes... Si cette initiative était «manifestement» irrecevable, il me semble que l'autre avocat s'en serait rendu compte.

Et cela m'amène à un élément qui me semble important: si chaque parlementaire doit consacrer ou faire consacrer des heures de travail à une armada de spécialistes, de juristes, de docteurs en droit, pour faire correctement son travail, il me semble que la fonction de député d'un parlement de milice s'en trouve totalement dénaturée.

Vous l'aurez compris, Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit-là d'une manoeuvre dilatoire dont le but est d'empêcher la population de se prononcer sur le fond de l'initiative. J'avais dit en commission que, lorsque l'on veut tuer son chien, on fait croire qu'il a la rage... Nous sommes exactement dans ce cas de figure: on veut empêcher la population de se prononcer sur un débat de fond dont l'enjeu est pourtant essentiel !

J'avais aussi eu l'occasion, en décembre, de prendre la parole dans ce parlement pour dire combien je crains toujours la méfiance de la population à l'égard de la classe politique, lorsque cette classe politique, en quelque sorte, dénature les droits populaires et que fait ainsi le lit du populisme...

Je vous invite donc à suivre le rapport du Conseil d'Etat, à suivre les recommandations de Mme Bolay, à savoir que l'initiative 126 est conforme quant à l'unité de la matière et, également, recevable quant au droit supérieur. (Applaudissements.)

Mme Michèle Ducret (R). Le groupe radical partage pleinement l'analyse faite par le rapporteur de majorité dans son excellent rapport. Dans ce sens, il soutiendra la scission, et cela dans le respect des droits populaires dont vient de parler Mme Emery-Torracinta, car il faut sauver ce qui peut l'être dans cette initiative.

Nous considérons que tout ne peut pas l'être. Par conséquent, nous accepterons l'article concernant l'eau, nous accepterons l'article concernant l'électricité, mais nous refuserons l'article concernant le gaz.

On a beaucoup entendu l'expression: in dubio pro populo, qu'on a tendance à prendre pour de l'argent comptant... C'est une expression du droit romain qui a été quelque peu pervertie ces derniers temps, mais nous la faisons nôtre. Pour respecter la volonté populaire, c'est-à-dire les personnes qui ont signé cette initiative, nous accepterons sa scission, et nous vous invitons à en faire de même.

Mme Morgane Gauthier (Ve). Je serai brève. Les Verts soutiendront, comme cela a été annoncé, l'excellent rapport de Mme Bolay.

Vous m'avez bien amusée, Monsieur Luscher, lorsque vous avez dit que les temps avaient changé... Les temps ont changé depuis la dernière votation sur les Services industriels de Genève, Monsieur Luscher !

L'argument selon lequel le peuple ne pourrait pas se prononcer de manière distincte sur les trois points mentionnés dans cette initiative «Energie-Eau: notre affaire !» s'applique à presque tous les textes légaux de rang constitutionnel soumis et acceptés par le peuple genevois ces dernières années !

Le vote populaire qui a eu lieu concernant les Services industriels de Genève a consisté, en un seul vote, à accepter trois objets distincts, à savoir la possibilité de développer des activités complémentaires pour les SIG; la possibilité d'exercer des activités à l'extérieur du canton; la possibilité de fournir des services de télécommunication. Et, que je sache, aucun commissaire libéral, aucun député libéral, n'a contesté à l'époque l'unité de la matière !

Il semblerait même que l'initiative «anti-dettes», déposée par les libéraux tout récemment, contienne cinq propositions... Selon votre nouvelle interprétation, il faudrait également la scinder en plusieurs volets.

Les temps ont changé... Cela dépend pour qui, cela dépend pour quoi. C'est vraiment comme cela vous arrange !

En conclusion, procédons simplement, posons la question simplement, suivons l'avis du Conseil d'Etat, proposons un texte compréhensible au peuple, tel qu'il est formulé et tel qu'il a été présenté au paraphe des citoyennes et des citoyens ! (Vifs applaudissements.)

M. Pascal Pétroz (PDC). Le groupe PDC soutiendra les conclusions de l'excellent rapport de majorité de M. Guillaume Barazzone et se prononcera donc en faveur de la scission telle que proposée sur l'admissibilité de l'initiative pour ce qui est de l'eau, de l'électricité, mais pas pour le gaz.

Par rapport à cette scission, je dirai tout de même que je suis étonné de la position de l'Alternative. Parce que nous ne sommes pas - contrairement à ce que pensent certains - en train de devoir faire de la politique. nous devons faire du droit. Et nous devons rester dans le cadre de cette mission. Nous ferons, le cas échéant, de la politique, mais plus tard ! Aujourd'hui, il s'agit de procéder à une analyse strictement juridique.

Puisque, quelle que soit la décision de notre Conseil, un recours au Tribunal fédéral sera vraisemblablement interjeté, il me semble que la sagesse devrait vous conduire à mettre toutes les chances de votre côté au lieu de courir des risques dans le cadre d'une procédure judiciaire. Dans cette optique et en cas de recours au Tribunal fédéral, si vous souteniez la scission en trois parties de cette initiative, vous auriez beaucoup plus de chances d'arriver à vos fins, alors qu'en vous battant bec et ongles contre cette scission vous risquez de perdre vos chances, les chances des milieux que vous représentez. Je vous enjoins vraiment à réfléchir à l'étape suivante, soit à un éventuel recours au Tribunal fédéral, pour savoir ce qui est le plus dans votre intérêt.

Quoi qu'il en soit, Mesdames et Messieurs les députés, nous nous réjouissons de voter sur la recevabilité de cette initiative et de traiter ce qui en restera sur le fond.

M. Alberto Velasco (S). Je serai bref, car effectivement tous les arguments ont été avancés. Je voudrais tout de même dire à mon collègue Luscher que ce n'est pas parce qu'un docteur en droit donne son avis en matière de droit supérieur qu'on doit le croire...

M. Christian Luscher. Ce n'est pas ce que j'ai dit !

M. Alberto Velasco. Vous n'avez même pas donné d'arguments, Monsieur Luscher, vous vous êtes juste référé à l'avis donné par un professeur de droit ! Ce n'est certainement pas un argument valable.

Vous avez prétendu que les initiants avaient eu l'intention de tromper le peuple... Je tiens à vous dire, cher collègue, que les initiants ont simplement constaté que les parlements des cantons romands avaient introduit cette notion de monopole dans leur constitution. Les citoyens de ces cantons n'ont pas été obligés, comme nous, d'aller récolter les signatures. Les parlements de ces cantons, partis de droite y compris - pas seulement les partis de gauche - se sont prononcés en faveur du monopole, de l'électricité en l'occurrence. Cela leur a permis d'éviter de lancer une initiative et de faire voter le peuple. A Genève, malheureusement, la droite n'a pas compris l'intérêt public et le bien commun, et c'est pour cela que nous avons été obligés de nous adresser au peuple, pour qu'il puisse s'exprimer.

Aujourd'hui, nous vous demandons, chers collègues, comme Mme Emery-Torracinta l'a souligné - de permettre au peuple, précisément, de s'exprimer sur cette initiative qui a tout de même recueilli douze mille signatures. Il faut donc donner au peuple la possibilité de se prononcer sur la notion de monopole pour l'eau, l'électricité et le gaz. Il en a le droit, d'autant plus que le monopole, que ce soit pour l'eau, l'électricité ou le gaz, existe de fait depuis des années et des années ! Mesdames et Messieurs les députés, il ne s'agit ici que de codifier dans la constitution un état de fait. C'est tout ce que l'on vous demande !

D'ailleurs, c'est ce que le Tribunal fédéral avait fait savoir aux entreprises fribourgeoises, en leur signifiant qu'elles avaient, de fait, un monopole, mais qu'il ne pouvait pas leur donner raison parce qu'il n'était pas inscrit dans la constitution. Et c'est ensuite, Monsieur Luscher, que ENSA - Electricité neuchâteloise SA - et les entreprises fribourgeoises ont pu bénéficier de l'inscription du terme «monopole» la constitution de leur canton.

Mesdames et Messieurs les députés, je vous enjoins vraiment à suivre le rapport de Mme Bolay et à voter ses conclusions. (Applaudissements.)

M. Olivier Jornot (L). Le célèbre adage in dubio pro populo a été souvent cité au cours du débat... Tout à l'heure, en écoutant M. Sidler s'exprimer, j'avais plutôt l'impression que c'était: «vox populi, vox S.I.» ! (Rires.)

Je ne reviendrai pas sur l'article 24, dont notre président nous a entretenus, si ce n'est pour souligner, à son instar, que l'éthique politique, elle, même si elle n'est pas inscrite dans la loi, devrait s'appliquer d'égale manière à tous...

Toutes sortes de choses fort étonnantes ont été abordées au cours du débat: nous avons appris, notamment, tout sur la haute, la moyenne et la basse pression des conduites de gaz... Mais j'ai envie de vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, que les droits populaires représentent un sujet plus sérieux qu'une affaire d'épaisseur de tuyaux ! Les droits populaires sont une mécanique extrêmement délicate: c'est, surtout, une mécanique qui peut se détraquer. Si l'on n'y prend garde - dans un sens ou dans l'autre, d'ailleurs - eh bien, on s'expose à de grandes déconvenues ! Mesdames et Messieurs, des déconvenues, les autorités genevoises en ont déjà essuyées de nombreuses au Tribunal fédéral lorsqu'elles se sont exprimées sur les initiatives populaires...

A Mme Bolay je dirai que la question de la recevabilité est totalement indépendante du nombre de signataires. Ce n'est pas parce qu'un grand nombre de personnes signent une initiative qu'elle est d'autant plus recevable. J'aurais plutôt tendance à dire que plus nombreuses sont les personnes qui signent une initiative irrecevable, plus nombreuses sont les personnes qui ont été trompées par les initiants. Il n'y a pas de quoi s'en glorifier !

Certains ont invoqué la prise de position du Conseil d'Etat par rapport à cette initiative... M. Luscher a rappelé tout à l'heure les titres de gloire du Conseil d'Etat en la matière et le nombre de fois où ses prises de position ont été battues en brèche, que ce soit par ce Conseil ou par le Tribunal fédéral. Le Conseil d'Etat nous a même habitués - nous en avons encore eu la preuve hier soir - à cette technique subtile qui consiste à déclarer une initiative recevable après avoir démontré, en long, en large et en travers, dans son exposé des motifs, qu'elle ne l'était pas...

Mesdames et Messieurs, au cours du débat, on a même entendu parler de conflits régionaux et planétaires... C'est un sujet fort intéressant quand on aborde, par exemple, la question de l'eau !

Ce soir, les libéraux vous parlent simplement de respect du droit, parce qu'il ne peut pas y avoir de démocratie, de droits populaires, sans respect de l'Etat de droit ! Deux des trois volets de cette initiative sont irrecevables: il ne faut pas que nous donnions ce soir de faux espoirs à ceux à qui l'on a fait croire que cette initiative était capable de produire toutes sortes de miracles ! Par conséquent, indépendamment des éminents mérites du rapport de majorité, le groupe libéral vous recommande de suivre les conclusions du rapport de minorité de M. Christian Luscher.

M. Yves Nidegger (UDC). Je me limiterai - pour trancher d'avec mes préopinants - à la question de la recevabilité formelle de l'initiative pour dire que les monopoles en matière de gaz et d'électricité sont contraires à la constitution et à la loi sur les cartels. Par conséquent, la conformité au droit fédéral doit être niée.

Il nous faudra donc nous prononcer tout d'abord sur la question de l'unité de la matière. En effet, si ce Grand Conseil devait, à tort, considérer cette unité comme réalisée, et ne pas voir problème à ce qu'il y ait de l'eau dans le gaz ou, pire encore, de l'électricité dans l'eau, il faudrait alors considérer la totalité de l'initiative comme irrecevable... (Brouhaha.)

M. Guillaume Barazzone (PDC), rapporteur de majorité. Je voudrais juste préciser que la scission de cette initiative que nous préconisons, contrairement à ce que disent certains, n'est pas une attaque contre celle-ci ! Elle permettra simplement aux citoyens et citoyennes de ce canton de se prononcer alternativement sur trois propositions.

M. Sidler a évoqué la conformité du monopole de droit en matière de gaz... Il me semble qu'il y a eu une confusion en commission: on est parti d'une situation de fait dans le canton, à savoir le monopole des SIG, et on s'est demandé si ce monopole de fait était compatible avec le droit supérieur. Mais ce n'est pas la question qui nous est posée ce soir. La question est de savoir si la loi cantonale qu'on inscrit dans la constitution - une loi constitutionnelle cantonale - est conforme au droit supérieur ! Je le répète: la question n'est pas de savoir si une situation de fait est conforme au droit supérieur.

Mesdames et Messieurs, je regrette pour ma part que ceux qui accusent le rapporteur de minorité, Christian Luscher, et moi-même de faire de la politique en examinant la recevabilité formelle de cette initiative se permettent dans leur rapport et sur quatre pages - n'en déplaise à Mme Loly Bolay - de traiter du fond de l'initiative ! En ce qui nous concerne, nous nous sommes contentés d'examiner la recevabilité formelle de celle-ci.

Mesdames et Messieurs, je vous encourage à suivre les conclusions du rapport de majorité.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Nous avons beaucoup entendu dans cette salle, depuis le début de ce débat, l'adage in dubio pro populo... Eh bien, moi, je ne le dirai pas ! Je ne dirai pas: in dubio pro populo... (Rires.) ... car, dans cette affaire, il n'y a pas de doute ! Il n'y a pas de doute que l'initiative qui vous est proposée est totalement recevable, et sur tous les points ! Il n'y a absolument aucun doute.

En effet, le Conseil d'Etat a examiné, avec l'aide des services de l'administration et de façon extrêmement attentive, le texte de cette initiative. Le résultat de cette réflexion, du reste, vous a été livré et a fait l'objet d'un rapport très complet du Conseil d'Etat. Et aucun membre du Conseil d'Etat, je peux vous le garantir, n'a eu le moindre doute sur l'évidence de la recevabilité de cette initiative !

Du reste, la commission législative n'a pas eu beaucoup de doutes non plus, il y a encore un mois ou deux, lorsqu'elle s'est réunie et qu'elle a rendu son premier rapport. Et puis des doutes ont brusquement surgi, à l'orée des vacances de fin d'année... Peut-être ces doutes étaient-ils liés à certaines certitudes quant à une nouvelle majorité parlementaire ? Mais je m'égare, puisque nous ne devons pas faire ici de politique, nous devons faire du droit... Et, pourtant, nous faisons ici de la politique, parce que nous sommes ici les garants, au fond, de ce que la population puisse déposer des initiatives et, aussi, de ce qu'elle puisse s'exprimer librement. Mais faisons un peu de droit. Finalement, ce que l'on reproche - et les services de l'administration, bien sûr, ont étudié avec une attention accrue les rapports de majorité et de minorité - à cette initiative, ce sont les deux choses suivantes.

La première, c'est qu'elle ne réaliserait pas l'unité de la matière... Et l'on part ici d'une conception extrêmement étrange de l'unité de la matière, qui n'a jamais été préconisée ni par la littérature juridique ni par le Tribunal fédéral. Dès lors qu'il y a deux mots sur une feuille de papier, on parle de deux matières différentes et l'on prétend qu'il n'y a pas unité de la matière ! Ce n'est pas cela, l'unité de la matière !

Lorsque l'on parle de l'unité de la matière, il faut privilégier la notion - je dois prendre des notes, car il s'agit de termes techniques - de rapport intrinsèque et d'unité de but. En d'autres termes, pour déterminer s'il y a unité de la matière, il faut qu'il y ait une certaine connexité entre les éléments en présence. Si cette connexité existe, il y a unité de la matière; si elle n'existe pas, il n'y a pas unité de la matière. En l'occurrence, le Conseil d'Etat n'a aucun doute sur le fait que cette unité est réalisée, puisque ce dont il s'agit, c'est de conférer aux Services industriels un monopole dans ses domaines d'activité. Il y a donc unité de la matière !

Au-delà de cette unité de la matière - je peux l'exprimer différemment - en regardant d'un peu plus près le choix qui a été fait par la commission parlementaire, que vous propose-t-on pour remédier à la prétendue non-unité de la matière ? De réécrire l'initiative ! Procédé extrêmement nouveau ! Procédé jamais pratiqué ! Procédé dans lequel Genève va se montrer très innovante, puisque, bien que cette initiative ait recueilli de nombreuses signatures, le Grand Conseil va la partager en deux... Il va la partager en deux, voire en trois - mais je me fonde ici sur le rapport de majorité qui propose de la scinder en deux - en utilisant le même texte, ce qui montre bien qu'il y a unité de la matière, en changeant un seul mot: le mot «électricité» dans un cas, le mot «eau» dans l'autre.

Je vous livre une autre considération. Quand on innove - mais, là, vous avez travaillé dans la précipitation - il faut aussi réfléchir aux conséquences des innovations ! Et la conséquence de l'innovation - si le peuple, comme il pourrait le faire, vote deux fois oui en faveur de ces deux textes créés par le Grand Conseil... Eh bien, que fera-t-on ? Comment allons nous introduire dans notre constitution ces deux dispositions, qui figureront au même article et qui nous diront deux fois la même chose ? Cela sera extrêmement étrange... Je doute fort que le Grand Conseil choisisse ce genre de solution. Je doute encore plus fort, s'il devait la choisir, que le Tribunal fédéral approuve ce procédé, car ce serait donner le message que l'on peut résoudre de cette manière les questions liées à l'unité de la matière. Etant précisé, bien sûr, qu'il est tout à fait démocratique de vouloir les résoudre - pour autant qu'elles existent ! En l'occurrence, elles n'existent pas ! - par la voie de la scission de l'initiative.

J'en viens maintenant à la deuxième question: la conformité au droit supérieur. Pour examiner la conformité au droit supérieur, je vous propose tout d'abord de lire notre constitution - ce n'est pas une mauvaise lecture... Elle d'autant meilleure que ces dispositions constitutionnelles - rédigées par ceux qui étaient assis sur ces bancs et dont, en l'occurrence, j'ai eu le privilège de faire partie - avaient été adoptées à l'unanimité, à l'époque, par le Grand Conseil. Et elle sont très clairement rédigées, il s'agit de l'article 66, alinéa 3, de notre constitution qui stipule: «Le Grand Conseil déclare partiellement nulle l'initiative dont une partie est manifestement - manifestement ! - non conforme au droit...». «Manifestement non conforme au droit...» ! Pensez-vous vraiment que l'on peut dire d'un texte qu'il est «manifestement non conforme au droit» alors qu'il suscite de tels débats aujourd'hui ? Et qui, de plus, était «manifestement conforme au droit», il y a un mois encore, aux yeux de ceux-là mêmes qui le trouvent maintenant «manifestement non conforme au droit» ?! (Exclamations.) Cela n'est pas très sérieux ! D'autant moins sérieux qu'au fond l'argument que fait valoir la commission pour justifier que cette initiative serait «manifestement non conforme au droit» porte sur une question qui avait été expressément évoquée dans l'avis donné par le Conseil d'Etat sur la recevabilité de l'initiative !

Le Conseil d'Etat vous a indiqué qu'il y avait en effet une législation fédérale à ce sujet, concernant le transport de très grandes quantités de gaz. C'est donc régi par le droit fédéral. C'est précisément ce dont ne parle pas cette initiative qui, je le rappelle, concerne les Services industriels de Genève. Or, comme le disait très justement M. Sidler, les Services industriels de Genève ne transportent pas de gaz à très haute pression: ils ne sont donc pas soumis à la législation fédérale.

Par ailleurs, la mission des Services industriels de Genève n'est pas de transporter du gaz, mais de gérer l'approvisionnement, la distribution. C'est très précisément ce qui figure dans la constitution cantonale: le but des Services industriels de Genève, c'est de fournir du gaz à la population du canton de Genève. Ce n'est donc pas une entreprise de transport de fluides, mais bien une entreprise de distribution. La mission des Services industriels de Genève n'a strictement rien à voir avec le domaine qui est régi par l'article 13 de la législation fédérale !

Mesdames et Messieurs les députés, voilà en substance pourquoi cette initiative est totalement conforme au droit. Et j'ajoute que le fait de reconnaître la totale conformité au droit de cette initiative - je rejoins les propos tenus hier par mon collègue David Hiler - ne signifie pas pour autant que l'on soit d'accord ! En cas de désaccord - c'est du reste le cas du Conseil d'Etat, qui n'est pas d'accord sur un certain nombre de points de cette initiative, qui vous l'a indiqué et qui vous a expliqué pourquoi - on affronte le débat sur le plan politique ! Mais on n'élude pas le débat en essayant de faire disparaître l'initiative par le biais de questions d'ordre juridique, qui en l'occurrence ne se posent pas !

Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat, comme il vous le disait dans son rapport, vous invite à considérer que cette initiative est totalement recevable. Ensuite, lorsque vous l'examinerez sur le fond, nous vous ferons part de nos critiques et nous vous ferons quelques suggestions. (Applaudissements.)

Le président. Mesdames et Messieurs, le débat est clos. Nous allons procéder au vote. Comme il est important, à ce stade de notre effort juridique, de répondre à chacune des questions qui nous sont posées, nous allons suivre le travail effectué par la commission législative. Je vous ferai donc voter sur chacun des points qui sont soumis à votre attention.

Premier point: l'unité du genre - la commission l'a constatée à l'unanimité - je vous la soumets.

Mise aux voix, l'unité du genre est adoptée par 88 oui et 1 abstention.

Le président. Deuxième point: l'unité de la forme - la commission l'a également constatée à l'unanimité - je vous la soumets.

Mise aux voix, l'unité de la forme est adoptée par 88 oui et 1 abstention.

Le président. Troisième point: l'unité de la matière. Comme vous le savez, la commission considère que l'initiative 126 ne respecte pas l'unité de la matière. Par conséquent, si l'avis de la commission est suivi, l'initiative sera scindée en trois parties. Je vous soumets donc l'unité de la matière.

Mise aux voix, l'unité de la matière est rejetée par 47 non contre 36 oui et 6 abstentions.

Le président. L'initiative 126 est donc scindée en trois parties. Dès cet instant, je vais donc vous soumettre la conformité au droit supérieur pour chacun des volets... (Brouhaha.) Monsieur le rapporteur, nous avons terminé les débats ! (Remarque.) Bien, je vous donne la parole !

M. Christian Luscher (L), rapporteur de deuxième minorité. Je voudrais vous faire observer, Monsieur le président, que les libéraux s'opposent à cette scission. Je pense donc que vous devez d'abord nous soumettre le principe même de la scission.

Le président. J'aurais procédé d'une manière un peu différente, en vous soumettant la validité complète ou incomplète à la fin. Mais, si vous préférez que je vous soumette d'emblée la validité de la scission, je n'y vois pas d'inconvénient. Je soumets aux voix de cette assemblée le principe de la scission en trois volets.

Mise aux voix, la scission en trois volets de l'initiative 126 est adoptée par 60 oui contre 26 non et 3 abstentions.

Le président. Le résultat est logique... Nous examinons à présent la conformité au droit supérieur volet par volet. En ce qui concerne le volet de l'eau, la commission a constaté à la majorité la conformité au droit supérieur de ce volet. Je la soumets néanmoins à vos votes.

Mise aux voix, la conformité du volet relatif à l'eau au droit supérieur est adoptée par 78 oui contre 8 non et 3 abstentions.

Le président. Nous abordons maintenant la conformité du volet concernant l'électricité au droit supérieur - la commission l'a constatée à la majorité.

Mise aux voix, la conformité du volet relatif à l'électricité au droit supérieur est adoptée par 61 oui contre 26 non et 2 abstentions.

Le président. Nous abordons maintenant la conformité du volet concernant le gaz au droit supérieur. La commission a considéré que ce volet est non conforme au droit supérieur.

Mise aux voix, la conformité du volet relatif au gaz au droit supérieur est rejetée par 49 non contre 36 oui et 3 abstentions.

Le président. Nous abordons à présent, pour la forme, le chapitre de l'exécutabilité, que la commission n'a pas examiné parce qu'il paraît aller de soi. Je le soumets néanmoins à vos suffrages. Celles et ceux qui estiment que cette initiative est exécutable votent oui, les autres votent non ou s'abstiennent.

Mise aux voix, l'exécutabilité de l'initiative 126 est adoptée par 72 oui contre 13 non et 4 abstentions.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés... (Brouhaha.) Monsieur Luscher, il n'est pas possible de débattre pendant les votes !

Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant la validité d'ensemble de cette initiative. Je rappelle que la portée du rapport de minorité de M. Luscher était de dire qu'à partir du moment où un volet n'était pas valable, l'ensemble de l'initiative ne l'était pas. C'est sur ce point-là que porte le vote d'ensemble. Ceux qui soutiennent la validité d'ensemble de l'initiative 126 votent oui, ceux qui la refusent votent non.

Mise aux voix, la validité d'ensemble de l'initiative 126 est adoptée par 60 oui contre 25 non et 4 abstentions. L'objet est déclaré partiellement valide. L'initiative est scindée en deux volets : eau et électricité. Le volet relatif au gaz est déclaré invalide.

L'initiative 126 est renvoyée à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au point 60 de notre ordre du jour.

PL 9636-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit de fonctionnement au titre de subvention cantonale de 515'000F en 2006 et 2007 à l'association F-Information

Premier débat

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur. Tout d'abord, j'aimerais profiter de cette occasion pour présenter mes excuses au président de la commission car j'ai fait une confusion de prénom - il s'agit bien de Jean-Marc et non pas Jean-Jacques - et pour lui dire toute l'estime que je lui porte.

Je saisis également l'occasion pour affirmer à nouveau que, pour le PDC, le soutien aux associations féminines n'est pas seulement une affaire d'hommes, mais aussi une affaire de... Pardon: pas seulement une affaire de femmes, mais aussi une affaire d'hommes ! (Rires.) Et que c'est un souci partagé par les deux sexes.

En effet, hier soir, en écoutant ma collègue Anne-Marie von Arx-Vernon s'exprimer avec fougue, j'ai eu un petit moment de doute par rapport à mon propre engagement. Elle a presque réussi à me persuader que j'avais voté, en commission, contre le soutien à la subvention au Centre de liaison des associations féminines genevoises, alors qu'en fait j'ai bel et bien voté pour et qu'elle-même n'était pas en commission ce jour-là...

Mais venons-en au fond. Si nous devons aujourd'hui soutenir intégralement cette subvention, et sans coupe, c'est pour les raisons mentionnées dans ce rapport, à savoir que l'Association F-Information ainsi que le Service de promotion pour l'égalité ont déjà beaucoup rationalisé leur fonctionnement sous la houlette de Mme Brunschwig Graf, qui nous en a d'ailleurs longuement parlé en commission au moment de l'examen de ce projet de loi. Par ailleurs, la majorité de la commission a estimé que les prestations fournies par F-Information étaient satisfaisantes et de qualité.

Autre raison: la semaine dernière, pour des motifs tout à fait différents que nous aurons l'occasion d'expliquer le moment venu, la commission des finances a diminué la subvention à une autre association féminine: Solidarité Femmes. Pour cela aussi, il me semble tout à fait inopportun et inélégant de s'attaquer aujourd'hui à la subvention allouée à F-Information. Voilà, Monsieur le président, ce que je voulais dire en préambule.

Mme Elisabeth Chatelain (S). Après une lecture attentive du rapport de la commission des finances rédigé par M. Mettan et du rapport d'activité de F-Information, je voudrais apporter quelques précisions - et j'espère que M. Mettan ne m'en tiendra pas rigueur. Je voulais tout d'abord relever l'erreur dans le prénom du président de la commission des finances; il y a une autre erreur de prénom, il s'agit de Mme «Fabienne» Bugnon - et non pas «Françoise»... Mais ce sont des anecdotes.

Par contre, il y a des modifications un peu plus importantes à effectuer sur le fond et qui nous concernent à propos du vote de ce soir. Par exemple, la liste des professions exercées à F-Information est un peu tronquée dans le rapport. En fait, l'équipe de F-Information se compose de deux juristes, de deux formatrices d'adultes, de trois bibliothécaires, d'une psychologue, d'une travailleuse sociale et de deux secrétaires, ce qui représente au total 5,2 postes répartis sur ces onze personnes. Il est d'ailleurs intéressant de rappeler que la rémunération de toutes ces personnes est la même quelle que soit leur formation de base et que le tarif est de 36 francs brut de l'heure.

Il est aussi très important de savoir que l'activité principale de F-Information, association qui existe depuis vingt-cinq ans, n'est pas seulement l'animation d'un centre de documentation consulté par les étudiants de l'Université. Ce n'est qu'un des trois axes de son travail; et encore, ce centre est ouvert à toutes et tous et pas seulement aux étudiantes et étudiants.

Les deux autres axes sont essentiels: premièrement, il y a des consultations individuelles pour des femmes ayant besoin de conseils dans les domaines juridique, professionnel et familial; deuxièmement, il y a l'animation d'activités collectives de différents groupes et ateliers s'adressant à des populations de femmes précarisées.

Pour rappel, F-Information a fourni en 2004 1500 consultations individuelles, répondu à 2000 demandes d'informations téléphoniques et animé des groupes suivis par 800 personnes. Le centre de documentation est ouvert trente heures par semaine et il y a eu plus de 2200 prêts en 2004.

Cette association répond clairement à un besoin de la population et réalise un important travail de prévention et d'intégration.

Le contrat de prestation qui a été demandé, avec raison, par l'Etat à cette association a fait l'objet d'un long et rigoureux travail. Ce projet de loi est une formalisation de ce contrat de prestation, comme indiqué d'ailleurs très justement dans le rapport de M. Mettan.

Je vous invite donc, Mesdames et Messieurs, à le voter ce soir avec le montant initial de 515 000 F, comme accepté en commission. (Applaudissements.)

M. Pierre Weiss (L). Comme chacun d'entre nous aura pu le constater à la lecture du rapport tout à fait précis - à un prénom près - de M. Mettan, l'ensemble de la commission n'a nullement mis en cause le fondement même de la subvention qui est demandée ici, puisque personne ne s'y est opposé. En revanche, une proposition d'amendement a été déposée, et c'est notamment à ce propos que je pensais intervenir, pour rappeler trois points.

Tout d'abord, la question de la vue d'ensemble sur les subventions versées aux associations féminines... Il a été à peine rappelé par M. Mettan que nous avons eu à en traiter récemment, que nous aurons à en traiter prochainement, et que nous sommes en train d'en traiter ce soir. Il est donc malheureux - pour permettre précisément de comprendre l'importance du soutien apporté par la collectivité genevoise aux très nombreuses associations féminines qui émargent au budget de l'Etat - qu'une présentation collective ne soit pas possible et qu'il n'y ait pas, au fond, une consolidation qui accompagne les rapports à tout le moins lorsque l'une de ces associations est au bénéfice d'une subvention et qu'elle demande une augmentation, comme cela a été le cas hier soir...

Deuxième point. On peut constater, dans le projet qui nous occupe, que l'association en question supplée en quelque sorte à des carences de l'Etat. On nous dit, par exemple, que l'association reçoit de nombreuses personnes qui lui sont envoyées par les CASS, ces derniers ne pouvant pas apporter l'efficace qu'apparemment l'association en question, par ses ressources nombreuses en personnel, est en mesure de fournir. Il ne s'agit évidemment pas seulement d'une aide en personnel mais aussi d'une aide intellectuelle, puisqu'une bibliothèque est ouverte pour les étudiants et les étudiantes de l'Université.

On ne s'étendra pas quant à savoir si les coûts de fonctionnement sont inférieurs à ce qu'ils avaient pu être avant un rapatriement... On relèvera toutefois - et ce sera mon troisième point - que les coûts de fonctionnement ont fortement augmenté. C'est ainsi que si l'on se penche sur le compte de résultat au 31 décembre 2004 tel qu'il ressort du rapport qui a été présenté à la commission, la charge des locaux a passé de 61 000 F à 155 000 F. Evidemment, l'association bénéficie d'un local de 400 m2 pour... Monsieur le rapporteur, combien de personnes y travaillent ? Cinq personnes... (Exclamations.) Donc, 400 m2 pour cinq personnes ! (Brouhaha.) Et puis, les charges administratives ont passé de 88 000 F à 110 000 F d'une année à l'autre et, enfin, les charges de personnel elles-mêmes ont passé de 330 000 F à 453 000 F.

On comprendra, effectivement, qu'il est nécessaire - et c'est dans ce sens qu'il n'y a eu aucune opposition dans notre commission - pour les personnes qui ne trouvent pas auprès des CASS l'attention requise et, aussi, pour les étudiants qui ne trouvent pas à l'Université les documents qui sont indispensables à leur formation, d'augmenter les coûts de fonctionnement de cette association. Toutefois, l'on peut considérer que cette augmentation - le total des charges passe de 879 000 F à 913 000 F d'une année à l'autre - est un peu forte, toutes choses égales par ailleurs. Et c'est pour cette raison - je conclurai ainsi, Monsieur le président - qu'il a été demandé en séance de commission de procéder à une diminution raisonnable de la subvention, soit de la porter à 450 000 F: pour tenir compte, d'une part, des charges de loyer manifestement excessives, mais, aussi, des charges de fonctionnement qui sembleraient pouvoir être réduites.

Compte tenu des efforts demandés à l'administration - et parfois, ce n'est pas facile... (Rires et commentaires.) - il serait étonnant qu'on ne le demande pas, aussi, à une association qui dispose, je le rappelle, de 400 m2 pour cinq personnes ! (Exclamations. Applaudissements.)

Mme Catherine Baud (Ve). Nous avons bien entendu l'opinion de M. Pierre Weiss, qui considère que l'augmentation des charges est «un peu forte», que l'on peut procéder à une «diminution raisonnable»... Ces termes sont un peu flous ! Il s'agit en l'occurrence d'une subvention cantonale qui a été fixée à 515 000 F, et elle ne l'a pas été au hasard ! La diminuer pour la porter à 450 000 F ne rime à rien !

Nous avons voté une loi sur les subventions, il y a peu de temps, qui prévoyait un cadre bien précis, dont l'exigence d'un contrat de prestation. En l'espèce, ce contrat de prestations existe. Là, c'est une question de principe: il me semble tout à fait anormal de punir un bon élève. Cette association répond à un besoin avéré, présente des rapports tout à fait normaux et bénéficie du soutien du Conseil d'Etat, et malgré tout cela on voudrait lui refuser la même subvention que précédemment !

C'est la raison pour laquelle le groupe des Verts soutiendra le projet de loi 9636 en l'état et refusera l'amendement qui vient d'être proposé.

M. Eric Bertinat (UDC). Je voudrais revenir sur plusieurs questions posées par M. David Hiler en commission des finances... C'est une espèce de message que le Conseil d'Etat veut faire passer, et je pense que la plupart d'entre nous le suivrons, nonobstant un certain favoritisme vis-à-vis de quelques associations, de certains groupements...

M. Hiler se demandait quelles sont les missions que l'Etat doit fondamentalement assurer pour la population: quel rôle est le sien et quels services il doit fournir à la population, en fonction des moyens qui sont les siens. Ces services ne doivent être ni luxueux ni, non plus, trop misérables... En quelque sorte, l'Etat doit offrir ses services au meilleur coût.

Cette réflexion induit d'elle-même un ordre de priorités. Et dans cet ordre de priorités, cette avalanche de subventions qui nous tombe dessus - et pas seulement des milieux féministes - doit nous interpeller ! Or elle le doit aujourd'hui, peut-être plus spécialement qu'à l'accoutumée. Je me permettrai d'attirer votre attention sur un article de la «Tribune de Genève» de ce jour, extrêmement pertinent, qui s'adresse aux jeunes adultes qui rencontrent de plus en plus de problèmes dans notre société. En lisant cet article, on ne peut que se rendre compte qu'il va falloir apporter une aide à cette détresse et que cette aide aura un coût.

On en revient donc à la remarque que je faisais auparavant quant à l'ordre de priorités que nous devons déterminer...

Les représentants d'une kyrielle d'associations féminines viennent nous expliquer la valeur de leur engagement, tout le potentiel qu'elles peuvent développer, tous les services qu'elles peuvent rendre; eh bien, l'UDC estime qu'il n'y a pas véritablement une plus-value telle qu'elle est décrite et qui correspond réellement aux besoins financiers exprimés.

Si je prends le cas de F-Information qui nous est soumis aujourd'hui, je relève que l'on parle d'un centre de documentation et de consultations juridiques... Je ne suis pas certain qu'un centre de documentation soit absolument nécessaire aujourd'hui, non seulement par rapport à l'état actuel de nos finances mais aussi de la population... On le voit de manière assez pointue, les chiffres sont plus qu'angoissants dans le secteur psychiatrique; il faudra bien soutenir financièrement ce secteur, et nous ne pourrons pas distribuer de l'argent à tout le monde !

Pour ce qui est des consultations juridiques, vous me permettrez quand même de poser la question suivante: dans la mesure où nous avons déjà beaucoup de juristes à l'Etat; pourquoi n'aideraient-ils pas bénévolement les personnes qui en auraient besoin, ce qui nous permettrait sans doute de faire quelques économies ?

Enfin, pour terminer, je rappellerai que l'Association Solidarité Femmes vient également frapper à notre porte pour demander une subvention de 600 000 F... Afin de faire la part des choses, nous restons, comme l'a évoqué M. Weiss, dans l'attente d'une vision consolidée de toutes ces associations. Nous l'avons dit hier soir et nous le répétons aujourd'hui.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, sont encore inscrits Mme Anne-Marie von Arx-Vernon, Mme Michèle Ducret, Mme Elisabeth Chatelain, M. Roger Deneys et le conseiller d'Etat Moutinot. Le Bureau clôt la liste des intervenants et lève la séance.

Nous reprendrons nos travaux à 20h30 avec la suite de ce débat.

Fin du débat: Session 04 (janvier 2006) - Séance 19 du 27.01.2006

La séance est levée à 18h55.