République et canton de Genève

Grand Conseil

Le président. La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Bernard Lescaze, président.

Assistent à la séance: Mme et MM. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat, Martine Brunschwig Graf et Charles Beer, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM.Robert Cramer, Carlo Lamprecht, Micheline Spoerri et Pierre-François Unger, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Thierry Apothéloz, Florian Barro, Janine Berberat, Gilbert Catelain, Erica Deuber Ziegler, René Ecuyer, Pierre Froidevaux, Michel Halpérin, André Hediger, David Hiler, Pierre Kunz, Nicole Lavanchy, Claude Marcet, Alain-Dominique Mauris, Patrice Plojoux, Pierre Schifferli et Ivan Slatkine, députés.

Annonces et dépôts

Néant.

PL 8644-A
Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit d'investissement de 85 millions de francs sur 11 ans (2002-2012) avec subvention pour les études et les mesures d'assainissement des nuisances sonores des routes cantonales et nationales
Rapport de majorité de Mme Morgane Gauthier (Ve)
Rapport de minorité de M. Hugues Hiltpold (R)

Premier débat

Mme Morgane Gauthier (Ve), rapporteuse de majorité. Ce projet de loi nous demande de voter un crédit de 85 millions pour prendre des mesures d'assainissement des nuisances sonores des routes cantonales et nationales. D'un point de vue financier, le coût total des travaux d'assainissement est assuré à 49% par la Confédération. Les objectifs poursuivis par ce projet de loi sont une étude d'un programme pluriannuel d'assainissement des nuisances sonores et la réalisation des mesures préconisées.

Ces objectifs sont louables et ne sont en aucun cas remis en question par la majorité qui a refusé ce projet de loi.

En général, il faut rappeler qu'à Genève près de trente mille personnes sont exposées à des valeurs allant au-delà des valeurs d'alarme, c'est-à-dire 70 décibels le jour et 65 décibels la nuit, et quatre-vingt mille sont exposées aux valeurs d'immission. Ce sont également soixante-cinq bâtiments scolaires, des bâtiments hospitaliers, etc., qui sont concernés.

Les solutions évoquées par le département pour remédier à ces situations sont principalement des mesures constructives, et c'est cela qui a en grande partie motivé le refus de ce projet de loi. Plusieurs points sont à relever à cet égard.

Le premier point est le manque de mesures proposées pour limiter le bruit à la source. Le bruit lié au trafic automobile est déterminé par plusieurs paramètres mentionnés dans le plan des mesures d'assainissement du bruit routier, titre d'une brochure éditée par le Conseil d'Etat en 1998. Les paramètres sont les suivants: le comportement des conducteurs - qui a motivé le groupe des Verts à déposer la motion «Ecodrive» - la densité du trafic, la vitesse, l'état général des véhicules, le revêtement de la chaussée, les pneumatiques, etc.

Donc, comme mesures à la source, nous aimerions qu'un contrôle encore plus sévère de l'état des véhicules et qu'un contrôle systématique de l'émission sonore des véhicules soient introduits.

Quant à la vitesse, il faut savoir que 15% des personnes roulant en véhicule à moteur à une vitesse supérieure aux limitations en vigueur provoquent 30% du bruit lié au trafic. Pour changer cette situation, il faudrait que la police effectue nettement plus de contrôles ou, alors, que les chaussées soient construites de manière à limiter la tentation de l'excès de vitesse.

Par ailleurs, les murs antibruit présentent des impacts tellement négatifs sur notre environnement visuel qu'on ne doit les utiliser qu'avec une extrême parcimonie.

Pour ce qui est des doubles vitrages pour les fenêtres, peut-on demander à une classe d'école ou, encore à des locataires, de vivre les fenêtres closes alors que les bâtiments ne sont pas toujours bien ventilés ?

Ce catalogue de mesures constructives est également désagréable pour les habitants et les usagers des locaux.

Deuxième point à relever: dans l'exposé des motifs figurent la liste des routes ainsi qu'un planning de réalisation. Mais quelles mesures précises sont-elles prévues et à quel endroit ? Nous n'avons pas reçu de réponse à cette question...

En conclusion, de telles mesures ne pourraient être efficaces qu'avec une collaboration rigoureuse entre services de l'Etat, une police plus dure et contrôlant mieux les conducteurs roulant trop vite, des aménagements limitant la vitesse... (Brouhaha.)...un service des automobiles et de la navigation qui contrôle plus rigoureusement le bruit, etc. La sensibilisation au public mérite elle aussi d'être soulignée. Rappelons que plus il y aura de véhicules moteur plus il y aura de bruit et de pollution, c'est évident ! De plus, ce sont la plupart du temps les personnes qui n'ont pas les moyens d'avoir un logement dit «tranquille» qui trinquent, car ces logements sont trop chers. Si le silence coûte cher, les dégâts causés par le bruit sur la santé des habitants coûtent encore plus: ils sont estimés à quelques milliards de francs par an pour la Suisse.

Ce projet de loi ne soigne malheureusement pas la blessure, il propose quelques décibels en moins comme pansement afin d'éviter que la Berne fédérale ne tape trop fort sur les doigts du canton de Genève. Je vous invite donc à refuser ce projet de loi et à demander que ces millions soient mieux utilisés pour lutter contre le bruit à la source. (Applaudissements.)

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, s'il vous plaît ! Monsieur Annen ! Nous poursuivons calmement nos travaux. Monsieur Hiltpold, vous avez la parole.

M. Hugues Hiltpold (R), rapporteur de minorité. Permettez-moi, en guise de préambule, de rappeler que ce projet de loi prévoit un certain nombre de mesures pour mettre en place des revêtements routiers phono-absorbants, des giratoires antibruit, des murs antibruit, des buttes et diverses mesures d'aménagement des espaces urbains.

Il convient également de rappeler que, de nos jours, un quart de la population se trouve exposé à des nuisances sonores trop élevées et que les mesures d'assainissement proposées à travers ce projet de loi concernent directement les habitants.

Le crédit d'investissement proposé par ce projet de loi est de 85 millions, échelonné sur onze ans, soit à l'horizon 2012, dont à déduire une subvention fédérale de près de 41,4 millions de francs, ce qui représente un financement de plus de 43 millions à la charge de l'Etat.

Par ailleurs ce projet de loi répond aux exigences fédérales de l'ordonnance OPB, qui prévoit une mise en conformité, par le canton et d'ici dix ans, des mesures d'assainissement des nuisances sonores.

Les discussions au sein de la commission peuvent se synthétiser comme suit. Premier élément : la majorité de la commission a traité ce projet de loi en l'analysant sous l'angle de la problématique des mesures d'assainissement à la source des nuisances sonores. En effet, étaient préconisées des mesures à prendre en amont par le biais d'améliorations techniques qui diminuent les émissions sonores des véhicules.

Deuxième élément : la minorité de circonstance de la commission a considéré, elle, que le débat de fond sur cette problématique ne devait pas avir lieu par rapport à ce projet de loi, quand bien même elle est intéressante, dans la mesure où ce projet de loi prévoit des mesures concrètes sur l'assainissement d'un certain nombre de tronçons routiers. Enfin, la minorité de circonstance de la commission a regretté que les mesures d'assainissement préconisées par la majorité de la commission soient exclusivement des mesures à la source au détriment de mesures constructives qui sont indispensables en l'état. En effet, ces deux types de mesures ne doivent pas se substituer mais se compléter.

En guise de conclusion, il faut absolument engager les mesures proposées dans ce projet de loi, conformément aux exigences fédérales, et cela pour améliorer la qualité de vie d'un certain nombre d'habitants de ce canton. Enfin, il faut également rappeler que le canton ne peut pas se permettre de perdre la subvention fédérale, valable jusqu'en 2012.

La minorité de circonstance de la commission demande à l'ensemble de ce Grand Conseil de ne pas se tromper de discours en confondant les niveaux d'intervention, c'est-à-dire en traitant exclusivement des mesures à la source au détriment des mesures constructives, au risque d'aggraver la situation somme toute assez dramatique d'un certain nombre d'habitants de ce canton.

En dernier lieu, la minorité de la commission demande aux différents groupes de ce parlement qui ont refusé ce projet de loi en commission - je pense notamment aux Verts, aux socialistes et à l'Alliance de gauche - de reconsidérer leur vote, car il faut être conscients que le refus de ce projet de loi aura des conséquences directes sur la vie quotidienne de nombreux citoyens qu'il faudra justifier. Cette justification au nom d'un principe - aussi bon soit-il - sera délicate, voire indécente.

Compte tenu de ce qui précède, la minorité de circonstance de la commission vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter ce projet de loi.

Le président. La liste des orateurs inscrits est très longue pour un projet urgent : il y a M. Baud, M. Barrillier, Mme Leuenberger, M. Koechlin, M. Barthassat, M. Brunier, ainsi que le président Moutinot. De plus, il y a des amendements préparés. Nous allons donc avancer tranquillement.

Monsieur Jacques Baud, vous avez la parole.

M. Jacques Baud (UDC). 85 millions sur onze ans ! Et pourquoi ? Pour obtenir, par un revêtement dit spécial, moderne, antibruit... (Brouhaha.)Je peux parler, là ? (Exclamations.)

Le président. S'il vous plaît, Messieurs les députés, écoutez l'orateur...

M. Claude Blanc. Un orateur, c'est un grand mot !

Le président. Ce n'est pas parce que c'est vendredi soir qu'il faut s'agiter !

M. Jacques Baud. 85 millions sur onze ans ! Et pourquoi ? Pour obtenir, par un revêtement spécial, moderne, antibruit, une diminution de quelques petits décibels sur nos routes...

Quand j'ai posé la question auxdits spécialistes, pour savoir s'ils avaient une idée de la durée de vie du revêtement en question, il y a tout d'abord eu un grand silence... En fait, ils n'en savaient rien ! Et ils ont fini par répondre qu'ils pensaient, parlant de ce revêtement spécial, qu'il devait en principe durer autant que le revêtement classique... 85 millions pour un «truc» dont on ne sait en réalité pas grand-chose, sinon que cela peut diminuer les nuisances sonores de 2 ou 3 décibels - sur 60 ! - cela fait plutôt «chéro» le décibel ! Ah, j'allais oublier: la Confédération met le paquet en versant une grosse subvention - 49% du total - alors cela justifie de dépenser le fric !

Je vous rappelle que l'argent de la Confédération, c'est aussi celui des contribuables genevois ! Je vous rappelle aussi que les subventions de la Confédération pour ce genre d'objets ne sont octroyées qu'une fois. Ce qui fait que, quand le revêtement devra être changé, ce sont nos contribuables qui devront payer plein pot ! Alors, non ! Deux et trois fois non ! Avec nos milliards de dettes, il n'est que temps d'arrêter le massacre de notre trésorerie ! (Applaudissements.)

M. Gabriel Barrillier (R). Lors du débat d'entrée en matière, le groupe radical avait déjà cité les motifs pour lesquels Genève avait tout intérêt à profiter de la manne fédérale pour assainir une partie du réseau routier. En particulier, en remplaçant les revêtements de chaussée très exposés au trafic par un tapis phono-absorbant.

Mesdames et Messieurs les députés, avons-nous les moyens de balayer, d'un revers de main, une subvention de plus de 40 millions de la Berne fédérale, et cela pour des raisons futiles ? Pouvons-nous passer outre à une obligation légale fédérale au motif que ce n'est pas comme cela qu'il faut faire et que Genève sait mieux que les autres comment lutter contre les nuisances sonores ? Nuisances sonores - vous le savez: toutes les études le démontrent - qui ne vont qu'augmenter et qui incommoderont, bien évidemment, de plus en plus les riverains.

Certes, Mesdames et Messieurs qui soutenez le rapport de majorité, cet investissement sur dix ans, je vous le concède, ne va pas résoudre définitivement tous les problèmes lancinants du bruit, il faut être réaliste ! D'autres pistes ont été évoquées par les opposants à ce projet; certaines de celles-ci méritent une étude approfondie, mais, pour l'heure, il est urgent d'utiliser les progrès de l'industrie routière en matière de revêtement pour alléger les nuisances sonores provoquées par la mobilité croissante de notre population.

C'est la raison pour laquelle le parti radical soutiendra le rapport de minorité et acceptera ce projet de loi. (Applaudissements.)

Le président. Messieurs les députés, j'ai tout mon temps, je vous le rappelle. Je vous signale aussi que certains groupes ayant, semble-t-il, changé d'avis, il y aura une majorité pour ce projet de loi, mais qui n'est pas celle du rapport.

Je donne la parole à Mme Leuenberger.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Merci, Monsieur le président. Bien entendu, nous soutenons le rapport de majorité... (Exclamations.)Eh oui, parce que si nous voulons être cohérents, nous ne pouvons pas demander d'atténuer les nuisances sonores par des mesures cosmétiques - comme des revêtements phono-absorbants, des murs antibruit, etc. - qui coûtent très cher, qui sont bruyantes à mettre en place et qui provoqueront inévitablement des bouchons, sans pour autant agir sur les causes du bruit! Je veux parler du nombre de voitures, de la vitesse, du moteur mal réglé et, surtout, du comportement des gens. Au contraire, de telles mesures rendent les gens encore moins responsables!

Mme Gauthier l'a très bien dit, nous, les Verts, nous voulons d'abord que soient prises des mesures à la source, comme la diminution du nombre de voitures, notamment par des actions politiques, c'est-à-dire mixité travail/logement, encouragement et développement des transports publics et meilleure répartition régionale des emplois. Il faut aussi prendre des mesures de consommation: encouragement d'achat de véhicules moins bruyants et moins polluants - eh oui, Mesdames et Messieurs, qui aimez les quatre-quatre ! - par une politique fiscale encore plus incitative... (L'oratrice est interpellée.)Moi, je prends mon vélo ! ...et par une responsabilité individuelle.

En effet, nous faisons tous plus ou moins de bruit, et nous pouvons tous faire des efforts pour en faire moins. Ainsi, nous arriverions aux quelques décibels en moins gagnés par ce revêtement spécial. Par exemple, en mettant en oeuvre la méthode de conduite «Ecodrive» ou en roulant moins. Ce serait plus judicieux que de gaspiller 40 millions cantonaux et 40 millions fédéraux - qui proviennent tout de même de nos porte-monnaie, Monsieur Barrillier, car nous payons aussi des impôts fédéraux - pour des mesures d'assainissement qui ne tiennent pas compte des causes du bruit et qui n'ont pas d'influence sur le comportement des gens, au contraire! (Applaudissements.)

M. René Koechlin (L). Etant donné qu'il y a une ordonnance fédérale contre le bruit, nous sommes tenus d'y répondre et de nous y conformer.

Les Verts disent qu'il faut prendre des mesures à la source... C'est précisément ce que propose ce projet de loi ! Il s'agit de réduire à la source l'émission du bruit en traitant la surface de roulement des voies de circulation ! C'est un traitement à la source. Il y en a d'autres... D'accord ! Mais c'en est un !

Et je peux vous dire que ce qui nous est proposé là peut paraître coûteux, mais c'est infiniment moins cher que le traitement des façades des immeubles exposées au bruit. De toute manière, ce traitement est également obligatoire de par l'ordonnance fédérale. Alors, si on parvient à réduire les mesures onéreuses qu'il faut prendre sur tous les immeubles exposés au bruit en prenant le problème à la source, c'est-à-dire en traitant la surface de roulement des voies de circulation, c'est une opération intelligente et cohérente au niveau économique.

C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, nous ne pouvons que soutenir le rapport de minorité favorable à ce projet de loi, comme vous l'avez bien compris.

M. Luc Barthassat (PDC). Comme il est dit dans les deux rapports - de majorité et de minorité - ce projet de loi répond aux exigences fédérales de l'ordonnance de protection contre le bruit.

Et il est quand même étonnant de voir que les partis de gauche se sont opposés à ce projet de loi en commission.

Vous, qui avez mené un combat de tous les instants contre le bruit des souffleuses à feuilles et qui, par la même occasion, avez renvoyé à leurs balais tous les jardiniers de ce canton, pour le bien de leurs oreilles et, paraît-il, des nôtres, eh bien, je vous demande aujourd'hui de continuer la lutte - qui n'est sûrement pas finale... Et de voter ce crédit d'investissement favorable à contrer le bruit et favorable aussi à donner du travail à nos entreprises, ce qui n'est pas négligeable par les temps qui courent !

Souvenez-vous, Mesdames et Messieurs les députés, il n'y a pas si longtemps, de la pétition contre le bruit aggravé par le revêtement béton de la route de Chêne ! Eh bien, il y a encore bien d'autres routes de notre canton qui méritent de bénéficier des mesures concernées par ce crédit d'investissement de 85 millions! Ce montant peut certes paraître important, mais, comme cela est également relevé dans les deux rapports, les travaux seront échelonnés sur onze ans et subventionnés en grande partie par Berne. La part cantonale s'élevant à 44 millions, le coût de ces travaux serait supportable compte tenu des mesures proposées.

Mesdames et Messieurs les députés, le parti démocrate-chrétien vous demande donc de soutenir le rapport de M. Hiltpold et de d'accepter ce projet de loi.

M. Christian Brunier (S). Il ressort une chose des diverses interventions qui ont eu lieu jusqu'à présent et sur laquelle nous sommes d'accord: la situation à Genève est tout à fait catastrophique s'agissant du bruit... Je le rappelle, nous sommes en violation totale des normes OPB, nous sommes en violation totale des dispositions contre le bruit qui sont prévues dans la constitution, nous sommes en violation totale de la qualité de vie que nous devons offrir à nos concitoyens et nous sommes en violation totale de la loi fédérale sur la protection de l'environnement !

Je vous livre tout de même quelques chiffres: près de 60% des Genevoises et des Genevois se plaignent des nuisances sonores, dont 42% du bruit de la circulation qui est abusive dans notre canton, n'en déplaise à la majorité de ce parlement.

Les chiffres du DIAE, que nous trouvons d'ailleurs sur le site Internet du département, le montrent clairement: le nombre des protestations de la population par rapport au bruit est passé de cinquante à cinq cents par an, en quelque dix ans. Nous sommes donc aujourd'hui condamnés, Mesdames et Messieurs les députés, à agir... Si nous n'agissons pas, cela sera dommageable pour la qualité de l'environnement, cela sera catastrophique pour les 60% des Genevoises et des Genevois qui subissent des nuisances sonores quotidiennement, mais cela sera aussi, comme je l'ai déjà dit, totalement contraire aux diverses dispositions fédérales, ce qui veut dire que nous nous exposerions à verser des indemnités aux personnes qui souffrent du bruit et à ne plus recevoir certaines subventions fédérales. En effet, des sanctions sont prévues dans les cas de non-respect des normes OPB.

Nous devons donc nous poser une question majeure, ce soir, et qui nous torture un peu tous: faut-il plutôt investir dans la prévention - c'est ce que disent les Verts, notamment le rapport de majorité - ou faut-il plutôt guérir ? C'est un dilemme que nous retrouvons dans bien des domaines, que ce soit en médecine, dans le social, au niveau humanitaire. Je pense qu'il ne faut pas choisir, mais agir sur les deux fronts: aussi bien la prévention que la guérison.

Pour agir sur la prévention, c'est très clair, il faut diminuer la circulation automobile de ce canton. Je sais que c'est un débat important au sein de ce parlement car il y règne la guerre des transports. Je vous donne toutefois certains chiffres: d'ici 2015, la circulation individuelle augmentera de 40% si nous ne prenons pas des mesures draconiennes. Nous devons donc agir sur ce plan. Je sais qu'une majorité du parlement n'est pas en concordance, actuellement, avec nous sur ce point, mais, j'insiste, nous fonçons dans le mur si nous n'agissons pas à ce niveau-là. Si nous ne diminuons pas la circulation d'une manière drastique, d'ici 2015, le bouchon que nous avons tous les soirs en haut de la rue de la Servette ira jusqu'au milieu de Meyrin village ! Nous devons être cohérents sur ce point et trouver des dispositions novatrices pour diminuer la circulation dans notre canton qui est exigu et qui ne permet pas de multiplier les réseaux autoroutiers ou routiers, comme certains le préconisent.

Mais nous devons aussi agir au niveau de la guérison, car trop de personnes subissent des nuisances quotidiennes. Nous avons en effet décidé - et c'est un changement par rapport à notre position en commission, suite au constat de Robert Cramer sur le bruit à Genève - qu'il fallait agir sur tous les terrains, ce qui signifie qu'il faut aussi investir de l'argent pour diminuer les nuisances sonores.

Et c'est également pour cette raison que nous vous invitons à voter ce projet de loi. Même si nous pensons que la priorité ne devrait pas être donnée à des subventionnements sur le réseau routier... (Applaudissements.)...nous soutiendrons ce projet de loi ce soir. (Applaudissements.)

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, un peu de calme. Votre joie fait sans nul doute plaisir à voir et à entendre, mais il ne faut pas s'étonner de la longueur de nos travaux, dès lors que les votes en commission ne correspondent pas à ceux de la plénière et vice-versa.

La parole est à vous, Monsieur Pagani.

M. Rémy Pagani (AdG). Je suis étonné du changement de position, pour ne pas dire la volte-face, du parti socialiste... (Exclamations.)

Le président. Messieurs les députés, veuillez écouter M. Pagani !

M. Rémy Pagani. Sur le fond, je reprendrai un certain nombre d'arguments de M. Brunier ou de la rapporteuse de majorité...

Il faut tout de même mener une réflexion: il s'agit de 85 millions, Mesdames et Messieurs, juste pour changer le revêtement des routes, au lieu d'examiner quelles seraient les dispositions que nous pourrions prendre pour diminuer réellement le trafic de transit ! Je vous rappelle que le trafic de transit, ce sont des personnes qui habitent dans la couronne suburbaine et qui viennent travailler au centre. Nous avons un déséquilibre chronique dans ce canton entre les emplois et l'habitat. Voter ce projet, c'est refuser de réfléchir aux raisons de ce déficit chronique et d'y trouver des solutions. Au lieu de mettre 85 millions pour changer le revêtement des routes - alors qu'on en a déjà changé passablement, ne serait-ce qu'au pont de l'Ecu, ce qui n'a d'ailleurs diminué en rien le trafic autoroutier, au contraire - nous pourrions, comme nous l'avions proposé en commission, prendre des mesures alternatives pour compenser le déséquilibre.

La première mesure alternative qui a été décidée dans les années 95 a été de construire des parkings-relais, pour permettre aux gens de se rendre en Ville de Genève en prenant les transports publics. Si on décidait d'alléger les frais payés par ces personnes pour mettre leur voiture dans ces parkings et utiliser les transports publics en commun, l'investissement serait beaucoup plus intelligent que celui proposé par ce projet de loi. D'autant plus que nous savons fort bien que ce projet de loi ne changera rien au problème de fond, non seulement il ne sera pas résolu, mais il empirera. Cela revient à jeter 85 millions par la fenêtre, ce à quoi nous sommes totalement opposés.

Cela dit, une autre mesure avait été proposée précédemment: créer une bourse qui permette aux gens de procéder à des échanges pour faire en sorte que leur emploi soit plus proche de leur lieu d'habitation. Mais pour créer une telle bourse ou imaginer d'autres solutions, il faut de l'argent. Et l'argent que vous demandez pour ce projet de loi serait, à mon avis, beaucoup mieux investi ainsi! Vous ne faites que proroger un système qui, depuis ces trente dernières années, n'a malheureusement pas satisfait aux normes légales, puisqu'en fait - et M. Brunier a raison sur ce point - toutes les normes légales qui ont été décidées par le parlement fédéral, qui est majoritairement à droite, ne sont pas respectées.

Alors qu'on sait que c'est dans Genève que les nuisances sont les plus graves pour les habitants - même la nuit - les 85 millions de ce crédit ne seront pas utilisés pour diminuer ces nuisances mais pour aménager les routes à l'extérieur de la ville - des tapis roulants, si j'ose dire ! En effet, si vous l'avez bien regardé, ce projet de loi ne concerne pas la rue des Deux-Ponts, le boulevard Georges-Favon, le boulevard Carl-Vogt, la rue de Carouge ou le boulevard du Pont-d'Arve - un des plus bruyants - qui sont des lieux sinistrés au niveau du bruit. Bien que ces lieux mériteraient que des mesures urgentes soient prises pour protéger les habitants, que ce soit par rapport aux fenêtres ou aux bandes roulantes, et que des crédits soient votés immédiatement, ce projet de loi ne prévoit pas d'interventions dans ces endroits, mais à la périphérie de la Ville de Genève...

En conséquence - et contrairement à nos amis socialistes - nous maintenons notre position: ce projet de loi demandant un crédit de 85 millions est complètement inadapté aux problèmes actuels, et il ne propose pas de solutions intelligentes pour répondre aux problèmes à long terme.

Mme Janine Hagmann (L). Comme l'a dit M. Pagani, nous avons des raisons d'être étonnés, mais pas pour les mêmes motifs...

Moi, je suis surtout étonnée de votre position, Madame le rapporteur de minorité... En effet, vous qui faites partie du groupe des Verts, vous refusez des mesures pour améliorer la qualité de vie des habitants ! Il me semble, Madame, que nous n'avons pas été élues pour donner des leçons à la population, mais pour répondre à ses désirs... Et quels sont-ils ? En ma qualité de magistrate d'une commune - d'autres ici peuvent le dire - les gens réclament des mesures d'amélioration de la qualité de vie !

Votre remède à vous est très simple... Comme vous êtes anti-bagnoles, vous voudriez que les gens ne prennent plus leur voiture ce qui résoudrait le problème du bruit... Mais ne rêvez pas !

Il y a quelque temps, nous avons examiné dans cette assemblée une pétition rédigée par une jeune fille qui avait suivi de nombreux cours d'écologie à l'école; elle demandait simplement de supprimer totalement les voitures sur le territoire de Genève et de revenir aux chars... J'espère que vous vous souvenez de cette pétition que nous avions traitée avec beaucoup de sérieux. Mais, s'il vous plaît, soyez un peu réaliste ! La population demande que des mesures soient prises pour rendre la vie un peu plus agréable, c'est tout ! Et toutes les communes aimeraient que les sols des routes cantonales soient recouverts de revêtements phono-absorbants !

Pour une fois qu'un projet de loi nous propose des réalisations concrètes et que nous pouvons obtenir une subvention importante de la Confédération, le groupe des Verts, par votre bouche, nous dit qu'il ne faut surtout pas accepter un tel projet, tout cela parce que les mesures proposées ne vont pas empêcher les voitures de circuler !

Soyons sérieux: nous ne sommes pas là pour agir comme des «marsupilamis» ! (Exclamations.)Je vous recommande donc d'accepter le projet de loi du rapporteur de minorité. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo, Janine !

Une voix. Elle a placé le marsupilami !

Le président. Monsieur Annen, vous avez la parole. Vous renoncez? Bien, je la donne à M. Rodrik qui n'y renonce pas...

M. Albert Rodrik (S). Je ne voulais pas faire votre désespoir, Monsieur le président !

Quand le 1er janvier 1985 sont entrées en vigueur la loi fédérale sur la protection de l'environnement et ses dix ordonnances, il a fallu quatorze ans de travail depuis le vote populaire de 1971... (Brouhaha.)Mesdames et Messieurs ! (Exclamations.)Je répète: quand le 1er janvier 1985 sont entrées en vigueur la loi fédérale sur la protection de l'environnement et ses dix ordonnances, c'est bien qu'il y avait dans ce pays un ist Zustand,une situation donnée de l'état de l'environnement, et il a fallu quatorze ans de bagarres pour que, depuis le vote populaire qui a ajouté un article dans la Constitution, on arrive à une loi fédérale et à dix ordonnances, dont on a dit à l'époque que cinq étaient très urgentes, trois moyennement urgentes et deux pas urgentes, dont l'OPair et l'OPB, parmi les très urgentes. Et cela a bien été rappelé: Genève est la lanterne rouge aussi bien pour l'OPair que pour l'OPB...

Et pendant cinq ans au moins, ce qui était à l'époque le département des travaux publics n'a même pas voulu entendre parler de l'application OPB, tant il était effaré par le coût potentiel de l'assainissement, mais il n'empêche que la jurisprudence étant arrivée, il a bien fallu commencer à appliquer la loi fédérale et ses ordonnances. Et aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, même si nous adhérons complètement à l'analyse du rapport de majorité, nous sommes bien obligés de reconnaître que nous n'avons pas le choix entre la prévention ou l'assainissement. En effet, vu l'état dans lequel se trouve le canton, au terme de vingt ans de loi fédérale plus ou moins appliquée dans le canton, nous n'avons pas le loisir de choisir une solution plutôt qu'une autre ! C'est cela, Monsieur Pagani, le sens du revirement socialiste ! Alors, essayez de comprendre et de ne pas dénigrer !

Nous n'avons malheureusement pas le loisir de faire les choix intellectuels et théoriques auxquels nous sommes conviés. Etant donné la situation de Genève, qui compte un véhicule pour moins de deux habitants, nous sommes bien obligés d'accepter les deux types de mesures.

Et je considère que ce crédit de 85 millions que nous propose M. Moutinot représente à peine le dixième de ce que nous aurons à faire si nous devons véritablement appliquer l'OPB dans ce canton.

De 1985 à 1993, la protection de l'environnement était à la charge du département de l'action sociale et de la santé. Et je sais, moi, quels efforts il a fallu faire pour amener le département des travaux publics à commencer à appliquer l'OPB dans ce canton... On ne voulait même pas en entendre parler ! Mais à juste titre, tant on était effaré devant l'ampleur de la tâche et son coût !

Aujourd'hui, j'ai beau totalement adhérer à l'analyse du rapporteur de majorité, je dis que nous n'avons malheureusement pas le loisir de faire le distinguo entre les bonnes et les mauvaises mesures. Nous devons faire ce que vous avez proposé, Madame, et nous devons faire ce que ce projet de loi propose, et bien d'autres choses d'ailleurs.

Et c'est vrai, Mesdames et Messieurs qui adorez la bagnole, tant qu'il y aura un véhicule pour moins de deux habitants, les factures seront lourdes et nous n'atteindrons jamais les objectifs de la législation fédérale: tenez-vous le pour dit ! Et nous verrons d'autres factures, dans quelques années ! (Applaudissements.)

M. René Koechlin (L). Je rejoins ce qui vient d'être dit: ce débat est un faux débat. Et permettez-moi de faire un parallèle avec un débat télévisé auquel j'ai assisté sur la sécurité routière. Pour les uns, il fallait accroître les exigences lors de l'octroi du permis de construire... (Rires.)De conduire, pardon ! C'est une déformation professionnelle: excusez-moi ! C'est bien du permis de conduire dont je voulais parler ! (L'orateur est interpellé.)Oui, il y a au moins un député qui m'écoutait ! ...pour les autres, il fallait renforcer le contrôle et les mesures de police... Pour d'autres encore, il fallait concevoir autrement les routes et la signalisation routière...

Les interlocuteurs opposaient ces trois thèses, alors qu'elles étaient non seulement compatibles mais complémentaires !

Le débat à propos de ce projet de loi souffre exactement du même défaut. Et sur ce point je rejoins tout à fait M. Brunier - une fois n'est pas coutume, n'est-ce pas ? La majorité en commission oppose les mesures contre le bruit à prendre en amont, à la source, c'est-à-dire la réduction du nombre des voitures, à celles qui sont proposées dans ce projet de loi... Mesdames et Messieurs, les unes et les autres sont parfaitement complémentaires; elles sont compatibles. Il est donc intelligent d'envisager de les prendre et les unes et les autres, dans toute la mesure du possible - pourquoi pas ?

Mais, s'il vous plaît, commençons par celles qui nous sont proposées ce soir et votons ce projet de loi !

Le président. Pas tout de suite, Monsieur le député, car il y a encore de nombreux orateurs inscrits ! Tout d'abord, M. Christian Brunier.

M. Christian Brunier (S). M. Pagani vient de nous donner une leçon d'idéologie... Moi, j'aime bien l'idéologie, mais jusqu'à un certain point... En effet, je rappelle que 60% des gens subissent quotidiennement des nuisances sonores ! C'est la réalité du terrain, ce n'est plus de l'idéologie ou un programme politique à long terme. Il s'agit de sauvegarder la qualité de vie de 60% des gens qui dégustent tous les jours le bruit de la circulation, ou d'autres bruits d'ailleurs. Nous devons agir tout de suite et pas demain ! Si nous n'agissons que dans le domaine de la prévention, il faudra beaucoup de temps avant d'obtenir des résultats, surtout en ce qui concerne la réduction du nombre d'automobiles, d'autant plus que nous n'avons pas la majorité en ce moment. Et pendant ce temps, 60% de la population vont continuer de subir des nuisances. Ces mesures sont donc urgentes, n'en déplaise à M. Pagani !

M. Pagani nous dit encore que certains subissent plus de nuisances sonores que d'autres... Il a raison. Peut-être que le projet de loi n'est pas des mieux ciblés, néanmoins nous ne sommes pas en train de définir le top tende ceux qui dégustent le plus... Et nous ne devons pas refuser de voter ce projet sous prétexte que les mesures proposées ne vont pas soulager les plus touchés par les nuisances sonores. Le but de ce projet de loi est d'améliorer le niveau de bruit dû à la circulation en changeant le revêtement des routes sans faire de catégories parmi les personnes qui subissent le bruit. Il faut simplement lutter contre le bruit en général qui empoisonne la vie des Genevoises et des Genevois.

Enfin, M. Pagani nous donne des leçons en matière de transfert modal... En ce qui me concerne et sur ce sujet, je veux bien prendre des leçons de nombreux députés de ce Grand Conseil, mais pas de M. Pagani ! Excusez-moi, mais l'Alliance de gauche a défendu en commission des transports, il y a encore peu de temps, le fait de détourner la circulation de Meyrin sur la zone industrielle de Vernier, ce qui bloquerait complètement la circulation dans cette commune qui connaît déjà de graves nuisances, en déplaçant toutes les bagnoles qui sont sur l'axe de Meyrin sur Vernier. (Applaudissements.)Je rappelle aussi que l'Alliance de gauche a recommandé le compromis boiteux sur la rue de Lausanne: cela a été refusé, et tant mieux ! La situation nous donne raison aujourd'hui.

Et puis, il y a une chose qui empoisonne le transfert modal: c'est le manque de contrôles des stationnements, entre autres dans la zone bleue. Qui est responsable aujourd'hui de ces contrôles en Ville de Genève ? C'est un membre de l'Alliance de gauche ! Nous n'avons donc pas de conseils à recevoir en la matière des députés de ce parti ! (Exclamations. Applaudissements.)

Le président. Je suis heureux de voir que certaines personnes ont bien mangé et bien arrosé leur repas de ce soir !

Vous avez la parole, Madame le rapporteur de majorité provisoire... Allez-y !

Mme Morgane Gauthier (Ve), rapporteuse de majorité. J'aimerais revenir sur quelques propos tenus ce soir, notamment par M. Barrillier.

Monsieur Barrillier, il faut être réaliste: la source du problème n'est effectivement pas tarie ! Nous nous battons tous les jours pour qu'il y ait moins de voitures, pour qu'il y ait une réelle complémentarité des modes de transports, pour que les cyclistes soient en sécurité dans les rues, pour que les voitures laissent passer les personnes qui traversent la rue avec leurs enfants en les emmenant à l'école et que celles-ci n'aient plus peur de se faire renverser. C'est cela que nous défendons, Monsieur Barrillier ! Mais peut-être parviendrons-nous un jour à être d'accord sur ce point ?

Monsieur Koechlin, vous dites que ce projet de loi répond précisément à une demande de mesures à la source... Mais, pour nous, la source de ce problème ne vient pas seulement du revêtement, mais aussi de ce qui roule sur le revêtement ! Il y a donc plusieurs sources.

Nous parlons beaucoup des sources mais, finalement, cela ne me convient pas tellement de comparer la voiture à une source... Je préfère la source en eau claire et pure !

La prévention contre la guérison... Mais ce n'est absolument pas ce que nous voulons, Mesdames et Messieurs les socialistes ! Nous voulons des solutions novatrices ! Mais peut-on assimiler le fait de changer le revêtement des routes à une solution novatrice ? Absolument pas ! Le futur ne se construira pas de cette manière ! Ce n'est pas en permettant aux gens de rouler avec bonne conscience - puisqu'ils feront moins de bruit - que l'on arrivera à résoudre le problème, ils continueront à rouler de plus belle !

Nous, nous voulons encourager le comportement vertueux. Cela fait rire certaines personnes, la vertu... Il s'agit d'inciter les gens à changer d'état d'esprit, pas de les réprimer, ce qui prend effectivement du temps. Mais, si on ne fait rien, cela ne changera jamais! Et notre rôle est de tirer la sonnette d'alarme, car la République est tout entière dévolue à la voiture, et il faut que cela cesse ! Genève est la seule ville à réagir de cette manière; à Zurich, à Bâle, les choses en vont tout autrement !

Madame Hagmann, peut-être bien que je donne des leçons... Vous parlez de satisfaire les désirs des citoyens... Mais nous sommes là pour faire des lois ! Et la population demande en réalité de vivre mieux, et, vivre mieux, c'est vivre ensemble! Ce n'est pas la somme des individualités qui fait le bonheur commun, ce n'est pas du tout cela! Je suis peut-être idéaliste, mais j'ai été élue pour ça ! En résumé, nous n'avons pas les mêmes notions de ce que sont les sources de ces nuisances ni les mêmes idéaux!

Pour ce qui est de l'avenir, il y a une nouvelle chanson - je suis désolée d'y faire référence - qui dit que les personnes qui prennent les décisions aujourd'hui prennent des décisions qui hypothèquent l'avenir des générations futures... Continuez à polluer, continuez à avoir de tels comportements, et vous verrez ce qui arrivera ! Cela ne va pas !

Et c'est pour changer l'état d'esprit général et pour changer la manière de voir les choses que nous voulons refuser ce projet de loi ! (Vifs applaudissements.)

Le président. Merci, Madame le rapporteur. La parole est à M. Rémy Pagani.

Une voix. Comme nous avec les paysans... (Exclamations.)

M. Rémy Pagani (AdG). Mesdames et Messieurs les députés ...

Le président. Ecoutez l'orateur ! Monsieur Pagani, vous avez la parole.

M. Christian Luscher. Encore ! (Exclamations.)

Le président. M. Pagani ne parle que pour la deuxième fois, et il pourrait encore intervenir une troisième fois... Alors soyez patients !

M. Rémy Pagani. Mais, Monsieur Luscher, vous n'avez qu'à sortir si cela ne vous intéresse pas !

M. Christian Luscher. Je peux aussi me taire !

M. Rémy Pagani. Et aussi vous taire, oui ! Monsieur le président, vous pourriez demander à M. Luscher de se taire !

Le président. Monsieur Pagani, j'ai fait mon devoir. Alors, parlez maintenant, et peut-être convaincrez-vous votre auditoire ! Monsieur Luscher, je n'aimerais pas devoir appliquer l'article 91 ! Monsieur Luscher, calmez-vous ! Et Monsieur Pagani, allez-y !

M. Rémy Pagani. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés... (L'orateur est interpellé.)Monsieur Luscher, s'il vous plaît ! (Exclamations.)

M. Christian Luscher. Je vais me lever et je vais parler...

Le président. Monsieur Pagani, parlez ! (Exclamations.)

M. Rémy Pagani. Allez-y, allez-y, faites-le ! Ayez le courage de le faire, Monsieur Luscher, allez-y ! (Vives exclamations.)Non, non, cela ne me dérange pas du tout, allez-y !

Le président. Messieurs les députés, même si nous sommes vendredi soir, j'aimerais bien que vous vous calmiez !

M. Rémy Pagani. On voit qu'on est vendredi soir et que certains ont déjà...

Le président. Monsieur Pagani, parlez et ne vous laissez pas interrompre ! (Exclamations.)

M. Rémy Pagani. Nous avons étudié ce projet de loi en commission. Ce qui m'a le plus intrigué, par rapport aux chiffres énoncés par M. Brunier d'un air grave et dramatique, selon lesquels 60% de la population subissent des nuisances sonores - oui, Mesdames et Messieurs les députés, 60% de la population subissent ces nuisances ! - c'est que, dans le plan que vous avez sous les yeux - j'espère que vous l'avez avec vous - vous pouvez voir que les artères qu'il est question d'assainir ne sont pas forcément celles qui en ont le plus besoin, par exemple celle qui va de Versoix à la Perle du lac. Et je vous mets au défi de trouver des raisons suffisantes pour assainir cette artère avant d'autres.

M. Claude Blanc. Ce sont des riches !

Le président. Monsieur Blanc, taisez-vous ! (Exclamations.)

M. Rémy Pagani. Monsieur Blanc a tout à fait raison ! Oui, ce sont des riches qui habitent le long de cette route... (Exclamations.)

Le président. Monsieur Vaucher, s'il vous plaît !

M. Rémy Pagani. De ce point de vue, en toute conscience, je pense que, puisque nous devons choisir - et ce choix est dramatique - nous devons choisir les routes qui le nécessitent le plus. Et je ne pense pas que la route qui conduit de Versoix à la Perle du Lac mérite d'être assainie avant certaines autres artères, comme la rue de la Servette. En ce qui me concerne, si je devais choisir, je choisirais sans hésiter d'assainir la rue de la Servette, parce que je pense au bien-être de la majorité de nos concitoyens !

Autre point : il est facile de dire que l'Alliance de gauche et les Verts proposent des solutions à long terme et qu'il faut régler le problème immédiatement... Il ne faut pas nous prendre pour plus bêtes que nous ne sommes, Mesdames et Messieurs... (Exclamations.)J'ai dit «plus bêtes»... (Vives exclamations.)

En effet, nous avons au moins posé une question à l'administration, celle de savoir quelles mesures à long terme elle allait prendre pour rectifier le tir, pour faire en sorte, comme je l'ai dit dans ma précédente intervention, que des solutions de fond soient prises par rapport à la circulation de transit due au fait que les gens n'habitent pas là où ils travaillent. Et nous n'avons pas obtenu le début de la moindre réflexion! C'est bien pour deux raisons, d'abord que les artères choisies ne sont pas celles qui le nécessitent le plus, sur le plan de la gravité des nuisances et du nombre de personnes concernées, et, ensuite, parce que personne n'essaye de résoudre les problèmes de fond à long terme, que nous avons décidé de refuser ce projet de loi. C'est uniquement pour ces deux raisons !

J'espère que vous allez nous suivre, au moins sur le renvoi de cet objet en commission, parce qu'il n'est pas question, en ce qui nous concerne, de voter un crédit de 85 millions sans avoir tenté de résoudre le problème par le bon bout ! Ce projet est un emplâtre sur une jambe de bois, ce n'est certainement pas un remède ! Et on n'aura même pas essayé de guérir le mal à la racine !

M. Sami Kanaan (S). Je trouve que pour un débat...

Une voix. Kanaan en quatre-quatre, Kanaan en quatre-quatre ! (Exclamations.)

M. Sami Kanaan. Monsieur le président, je trouve...

Le président. J'aimerais beaucoup que l'assemblée se calme... Nous allons véritablement devoir prendre un certain nombre de mesures ! (Exclamations.)Monsieur Luscher, je vous prie une dernière fois de bien vouloir reprendre vos esprits ! (Rires et exclamations.)La parole est à M. Kanaan, qui la prend pour la première fois. Allez-y, Monsieur Kanaan !

M. Sami Kanaan. Monsieur le président, j'apprécie vos efforts pour me donner la parole. Je trouve que, pour un débat qui porte sur la réduction des nuisances dues au bruit, nous faisons beaucoup de bruit... Il faudrait déjà appliquer ce crédit à l'assainissement sonore de cette salle.

Plaisanterie mise à part, je suis, bien sûr, tout à fait d'accord avec pratiquement tout ce qu'a dit la rapporteure de minorité, Mme Gauthier. Nous sommes plus que d'accord sur la nécessité d'attaquer le bruit à la source, et tout le travail parlementaire ou extraparlementaire que peuvent faire le groupe socialiste, le groupe le groupe des Verts ou de l'Alliance de gauche porte sur ce point.

Mais nous savons aussi - de même que les Verts, comme l'Alliance de gauche - vu l'ampleur du problème, qu'on ne peut pas se contenter de traiter le problème uniquement à la source, car il faudrait atteindre en Ville de Genève des réductions de trafic de 70%... 70%, Mesdames et Messieurs, de trafic en moins en Ville de Genève pour atteindre les normes OPB, dans le délai légal de 2012 !

M. Claude Blanc. Il faut diminuer les revenus !

M. Sami Kanaan. Si nous pouvions atteindre cet objectif, nous y souscririons immédiatement. Pour toutes sortes de raisons, aussi bien politiques que pratiques et matérielles, nous savons très bien que c'est impossible. Je suppose que personne ne peut contester cette réalité: d'ici 2012, je ne vois pas comment nous pourrions réduire de 70% le trafic en Ville de Genève ou dans l'agglomération...

Ainsi, après avoir évalué la situation - et c'est dommage que ce débat ait lieu ce soir - nous nous sommes rendu compte que seul un cumul des mesures, c'est-à-dire un combat à la source et un combat sur les effets, peut donner une petite chance d'atteindre l'objectif prescrit.

C'est pourquoi nous ne pouvons être que d'accord avec l'argumentation développée par Mme Gauthier. Mais cela n'exclut pas de voter le crédit aujourd'hui. Ce vote est nécessaire car il s'agit d'une mesure à court terme concrète, même sans parler des subventions fédérales, même sans parler des contraintes en matière de dommages et intérêts si nous ne faisons rien. Cette mesure est tout à fait appréciable pour les habitants qui subissent les nuisances sonores! Les discours sur la réduction de moitié du trafic en ville en 2012 n'ont aucune réalité pour eux, et cela ne les aide pas à supporter le bruit.

Nous voterons donc ce crédit comme première étape vers des mesures plus globales.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Les arguments des socialistes sont totalement faux ! Vous dites, Monsieur Rodrik, que nous n'avons pas le choix... Dans ce cas, pourquoi nous soumettre un projet de loi ?

Monsieur Kanaan, ces mesures ne concernent pratiquement pas la Ville de Genève, mais les routes cantonales et nationales en dehors de la ville.

D'autre part, les auteurs de ce projet de loi, c'est-à-dire les gens du département qui l'ont rédigé, m'ont dit que celui-ci est totalement nul et qu'il ne servirait quasiment à rien, que seules des mesures à la source seraient utiles. Ils sont tout à fait conscients qu'ils ne pourront effectuer ces travaux que lorsqu'il y aura des opportunités sur les autres routes, c'est-à-dire qu'ils les commencerons à l'occasion d'autres travaux. Ce qui signifie que cela va prendre un temps infini, au minimum dix ans, et le Grand Conseil n'aura plus aucun contrôle.

Ce crédit de 85 millions est un vote clé en main pour gagner quelques décibels seulement. C'est malheureusement tout à fait insuffisant car cela ne réduira pas le bruit de manière significative. Comme la circulation va augmenter, ce gain de bruit sera tout de suite absorbé, et ce pour un montant de 85 millions tout de même! Il ne respectera pas la volonté populaire qui demande que des mesures à la source soient prises, Mme Gauthier l'a très bien dit - et nous voulons nous en tenir à cette politique. Sinon, nous risquons de nous engouffrer dans une spirale sans fin. Et si les gens qui disent qu'ils sont contre la guerre, pour l'Irak - je suis désolée, mais je tiens à le placer - c'est parce que ce pays attise les convoitises en raison de l'essence ! (Exclamations.)Et si nous, Occidentaux, ne faisons pas d'efforts pour diminuer... (L'oratrice est interpellée.)Je suis contre les quatre-quatre ! Nous devons tous faire des efforts pour diminuer le bruit, il faut donner un signal ! Si on installe des revêtements antibruit, les gens ne vont certainement pas réduire leur vitesse, ils vont accélérer, c'est évident ! On sait très bien que le bruit diminue si la vitesse est réduite. Il faut donc aussi procéder à davantage de contrôles.

Je ne comprends pas les arguments des socialistes, même s'ils ont le droit d'avoir un avis différent. Nous soutenons d'autant plus le rapport de majorité. (Applaudissements.)

M. René Desbaillets (L). On a tout entendu et son contraire, avec plus ou moins de démagogie... Alors, allons-y !

Puisqu'on veut diminuer le bruit, tout le monde est d'accord sur ce point, je propose une nouvelle solution: il faut augmenter les limitations de vitesse, au moins 30 km/h, ainsi le bruit durera moins puisque les voitures passeront plus vite... (Rires.)La fluidité du trafic, c'est cela le progrès !

Pour être sérieux, je pense que les mesures à prendre sont complémentaires, il faut diminuer la source du bruit, mais des mesures techniques peuvent être prise sans gêner la circulation et sans diminuer la vitesse pour faire moins de bruit, notamment avec des pneus plus adaptés, les profils des véhicules, en remplaçant peu à peu les moteurs deux-temps par des moteurs quatre-temps, etc. En effet, l'animateur de sport automobile que je suis sais - et vous aussi, si vous lisez un peu la presse - que les nouveaux prototypes de grands prix motos, moteur quatre-temps, atteignent le 326 km/h dans les lignes droites en faisant moins de bruit que les 500 cm3 centimètres cubes deux-temps d'il y a deux ans. C'est ça le progrès ! Et il faut y croire. Les mesures doivent donc être complémentaires.

Il faut se souvenir que Genève est un petit canton. On peut bien légiférer, réglementer tant qu'on veut nos véhicules genevois, il y aura toujours des Vaudois et des Français ou des camions étrangers qui circuleront ! Et rien de plus facile que de délocaliser ses numéros de plaques pour échapper à des normes qui ne seraient en vigueur qu'à Genève!

Une voix. Bravo, René !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Carlo Sommaruga... qui renonce. La parole est à M. Bernard Annen, qui renonce aussi. La parole est à M. Jacques Jeannerat, qui n'est pas là... (Exclamations.)Il renonce aussi... La parole est à M. Robert Iselin. (Exclamations.)

Des voix. Renvoi en commission ! (Le président agite la cloche.)

M. Robert Iselin (UDC). Je suis très heureux du petit succès que je rencontre au moment où je commence à parler... (Exclamations.)

Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je suis tombé dans cette loi un peu la tête la première, car je ne connaissais pas le problème... Mais je dois vous dire qu'en lisant ces textes on est frappé par l'inefficacité de toute cette histoire... Pour quelques décibels, vous allez dépenser 85 millions... (L'orateur est interpellé.)C'est quand même notre argent après tout ! Dont 40 millions sont fournis par la Confédération ! C'est d'une inefficacité épouvantable... Il y a beaucoup d'autres moyens de réduire le bruit. Et je peux vous dire que l'UDC pourrait même envisager de ralentir le trafic si cela diminue vraiment les décibels... Absolument ! C'est un problème réel que nous devons attaquer sérieusement.

Pour conclure, je souscris pleinement aux propos de Mme le rapporteur, la rapporteure, ou la rapporteuse - je ne sais pas...

Une voix. Rapporteuse ! (Le président agite la cloche.)

M. Robert Iselin. Ce crédit est prévu pour financer des travaux de génie civil et non pour diminuer le bruit à la source !

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, il est 21h30. Il y a très exactement une heure que nous avons entamé ce débat. Je vais donner la parole au vingtième orateur qui la prend. Je constate simplement... (Le président est interpellé.)Je voulais simplement vous montrer comment les choses se passent quand on vous laisse parler... Il semblait que c'était un débat prioritaire, pour lequel se dégageait une majorité... Force est de constater qu'au bout d'une heure de débat deux amendements sont proposés; un vingtième orateur va prendre la parole, sans parler de M. le conseiller d'Etat. Le débat continue... Un troisième amendement vient d'être déposé ! Je vois que le travail de commission est très efficace... Je remercie le chef du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement qui m'avait affirmé avoir une majorité pour ce projet... (Rires et exclamations.)Cette majorité a pour l'instant du mal à se dessiner.

Monsieur Blanc, je vous donne la parole.

M. Claude Blanc (PDC). Il a été dit beaucoup de choses aujourd'hui sur le bruit à la source et les moyens de l'éviter...

En tout cas, tant que nous n'aurons pas trouvé les moyens efficaces pour diminuer la circulation de façon significative, nous sommes bien obligés, comme le disait excellemment tout à l'heure M. Brunier, de prendre des mesures d'urgence pour diminuer l'émission de bruits.

J'aimerais vous inviter, Mesdames et Messieurs les députés, à prendre de temps en temps l'autoroute, notamment sur le tronçon qui passe sous la halle 6. Cette autoroute a été équipée d'un revêtement spécial pour limiter l'émission de bruit. En toute bonne foi, il faut reconnaître, lorsqu'on roule dans le sens Lausanne/Genève sur cette portion d'autoroute, que la différence - j'allais dire, saute aux yeux - saute aux oreilles. (L'orateur est interpellé par M. Dupraz. Applaudissements, rires et exclamations. Le président agite la cloche.)

Le président. Monsieur Dupraz !

M. Claude Blanc. Ce tronçon d'autoroute prouve que les mesures proposées sont efficaces. Pour cette raison, il me semble qu'il faut accepter ce projet de loi.

Pour ce qui est de la diminution du trafic automobile, c'est une autre histoire... Les Verts sont d'accord sur ce point - du moins, Mme la présidente des Verts - s'il y a trop de voitures à Genève, c'est qu'il y a trop d'argent ! Nous sommes une des villes occidentales les plus motorisées... Pourquoi ? (Exclamations.)Parce que nous sommes une des villes occidentales les plus riches, quoi que nous en disions: si nous avons trop de voitures, c'est que nous avons trop d'argent ! (Exclamations.)

Pour ce qui est des solutions à apporter pour y remédier, je vous laisse les apprécier...

M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Vous avez tous reconnu à juste titre que le bruit est l'une des nuisances dont se plaint le plus la population. Et c'est vrai que c'est une nuisance particulièrement désagréable et insidieuse. En effet, on peut toujours fermer les yeux face à un spectacle désagréable, mais il est beaucoup plus difficile de fermer les oreilles quand il y a trop de bruit...

Remarques sur les décibels pour ceux qui ont dit que cette diminution ne serait que de quelques décibels... Le bruit se mesure en décibels selon une fonction logarithmique, de sorte qu'un seul décibel a un impact considérable. Ne méprisez donc pas ces quelques décibels que nous gagnons en prenant ces mesures !

Fondamentalement, il vaudrait mieux qu'il n'y ait pas de bruit, et je suis d'accord sur ce point avec Mme Gauthier. Et la politique mise sur pied par l'OPB est claire: il faut d'abord agir à la source, ensuite sur la voie de propagation et, en dernier lieu, sur les lieux d'immission. Cela tombe sous le sens, et c'est ce que nous essayons de faire en permanence. En l'occurrence, d'ailleurs, on est beaucoup plus sur le terrain de la voie de propagation que sur celui des lieux d'immission. Ce sont donc des mesures que nous devons prendre.

A titre d'exemple, celles et ceux qui veulent refuser ce projet de loi, avec une pureté de logique au demeurant admirable, me font penser à des personnes qui refuseraient des crédits pour soigner une maladie parce qu'elles pensent que ce qui est important c'est de la prévenir... Il est évident que la prévention est primordiale mais, quand la maladie s'est déclarée, il faut bien la soigner. Avec le bruit, c'est exactement le même problème. Fondamentalement, il est certain que c'est à la source du bruit qu'il faut s'attaquer, mais, puisqu'il y a du bruit, il faut le limiter!

Si vous n'acceptez pas ce projet de loi, je ne pense pas que ce soit le cas, nous arriverons à une situation encore pire. Monsieur Pagani et Monsieur Baud, il y a tout de même une chose qui m'étonne de votre part, car, si on ne réduit pas le bruit routier, en 2012, les millions qui vous seront réclamés ne serviront pas à améliorer la situation, il faudra les verser aux propriétaires à titre d'indemnités, lesquels, croyez-moi, n'en feront pas bénéficier leurs locataires ! Alors, si c'est cela que vous voulez, ne pas vous attaquer au bruit pour arriver, en fin de compte, à ce que l'Etat soit obligé d'indemniser des propriétaires privés, je suis navré de vous le dire: c'est une position extrêmement dangereuse, qui ne va pas dans le sens de l'intérêt général !

Je n'ai lu que l'amendement de M. Hiltpold qui réclame un rapport et un suivi régulier... Il va de soi que, dans un souci d'informer votre Grand Conseil et de lui permettre de suivre ce crédit, j'accepte cet amendement. Pour ce qui est des autres amendements, je me prononcerai à leur sujet quand je les aurai lus. (Applaudissements.)

Le président. Monsieur Pagani, vous n'allez pas parler maintenant ? Alors, faites-le brièvement !

M. Rémy Pagani (AdG). Juste pour la forme. Nous ne sommes pas opposés à ce projet de loi. Nous proposons seulement de le renvoyer en commission, et je m'étonne, Monsieur le président, que vous n'ayez pas invité les intervenants à se prononcer sur ce renvoi en commission, que j'ai demandé il y a bien dix minutes ! Alors, qu'on ne se méprenne pas: nous ne voulons pas jeter ce projet de loi à la poubelle ! Nous voulons simplement le renvoyer en commission pour avoir la garantie que l'on cherchera à intervenir sur les effets actuels déplorables du bruit et que l'on se donnera également les moyens d'intervenir à la source, comme l'a très justement dit M. le président du département.

Le président. Monsieur Pagani, et c'est maintenant que vous le demandez vraiment formellement !

Je mets donc tout d'abord aux voix votre proposition de renvoyer ce projet de loi en commission. Nous procédons au moyen du vote électronique. Celles et ceux qui approuvent le renvoi en commission de ce projet de loi sont priés de voter oui, les autres de voter non. Le vote est lancé.

Mise aux voix, cette proposition est rejetée par 50 non contre 24 oui.

Le président. Je mets maintenant aux voix ce projet en premier débat, toujours au moyen du vote électronique.

Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat par 51 oui contre 24 non et 1 abstention.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. Nous allons donc procéder au second débat. J'ai un certain nombre d'amendements. Nous avons d'ailleurs, au cours de l'heure de discussion, gagné - «gagné»... façon de parler ! - sept millions, puisque j'ai maintenant un amendement à 92 millions... Je les reçois à l'instant, et je vois que M. Grobet présente un amendement dès l'alinéa 1. Je vous donne la parole, Monsieur Grobet, pour présenter brièvement votre amendement.

M. Christian Grobet (AdG). Comme cela a été souligné, ce projet de loi institue une inégalité de traitement flagrante dans la mesure où toute la Ville de Genève, qui est la partie du canton qui subit les plus fortes nuisances dues à la circulation automobile, est exclue de ce projet de loi.

Je dois dire qu'il est assez paradoxal, au moment où la droite nous propose une modification de la loi sur les routes, que toute une partie du réseau routier de la Ville de Genève soit transformée en voie d'importance cantonale pour favoriser le trafic de transit. Je constate en effet, d'une part, qu'on veut augmenter la circulation dans un certain nombre de voies de circulation en Ville de Genève pour des besoins cantonaux, comme cela a été indiqué, et, d'autre part, que la Ville de Genève ne profiterait pas de ce crédit, ce qui nous paraît totalement inacceptable. C'est pour cette raison que nous proposons, à l'alinéa 1 de l'article premier, que le crédit s'applique aussi bien aux nuisances du réseau routier cantonal que national. A noter que cela concerne également les autres communes, parce qu'il faut savoir que les routes cantonales s'arrêtent à l'entrée d'une localité et reprennent à l'autre bout. Par voie de conséquence, beaucoup de communes en dehors de la Ville de Genève se trouveront péjorées par ce système.

Par ailleurs, il ne nous paraît pas normal que le canton paye les nuisances du réseau national. Maintes interventions ont eu lieu pour que la Confédération supporte une part importante des ouvrages de protection contre le bruit le long du réseau national et il y a des fonds fédéraux à cet égard. Je dois dire que je suis très étonné que le Conseil d'Etat ait proposé un libellé dans cet alinéa qui, en fait, ferait supporter au canton tous les travaux le long de la route nationale. J'aurais pensé notamment que le département des finances aurait été attentif à cela et demandé, comme cela se fait habituellement, des subventions fédérales. (L'orateur est interpellé par Mme Brunschwig Graf.)Pourtant ça vous concerne directement Madame la présidente ! Je comprends que nouvellement entrée dans le département vous n'ayez pas encore eu le temps de prendre connaissance de ce projet de loi, mais je ne doute pas qu'à l'avenir, comme vos prédécesseurs, vous serez la première à demander que des subventions fédérales soient prévues dans les projets de lois... Notez qu'en l'occurrence il ne s'agit pas d'une subvention fédérale, il s'agit de payer la part cantonale sur le coût fédéral !

Cet alinéa 1 est en tout cas très mal rédigé en ce qui concerne les routes nationales, et c'est la raison pour laquelle nous suggérons de faire un alinéa séparé - j'y reviendrai tout à l'heure - pour ce qui concerne les nuisances du réseau national et de se borner à ce que le crédit supporte la part cantonale de l'assainissement du réseau national. La Confédération doit prendre à sa charge la part qui lui revient.

Mesdames et Messieurs les députés, nous vous proposons de modifier l'article premier, d'une part en retirant le réseau national pour en faire un alinéa séparé et, d'autre part, en prévoyant la couverture des nuisances qui existent sur le réseau communal. Le trafic automobile passe d'une route à l'autre. Et vouloir aujourd'hui séparer, en quelque sorte, les réseaux et distinguer les tronçons de route pouvant bénéficier de cet assainissement, sous prétexte qu'ils sont cantonaux, d'autres tronçons de la même route qui ne pourraient pas en bénéficier parce qu'ils traversent une localité, me semble totalement incompréhensible ! Il faut prévoir, me semble-t-il, que c'est le réseau routier dans son ensemble qui doit être pris en considération.

Le président. J'espère que tout le monde a bien compris. Je vais donner la parole à Mme Morgane Gauthier pour expliquer son amendement car, en réalité, il concerne aussi l'alinéa 1 pour le montant de 85 millions transformé en 92 millions. Ensuite, nous écouterons M. le conseiller d'Etat et nous procéderons au vote de ces deux amendements séparément. Je souhaite que nous puissions avancer. Il y a cinq amendements assez délicats pour ce premier article. Il faut bien suivre le débat, sinon vous n'allez plus rien comprendre. Madame Gauthier, vous avez la parole.

Mme Morgane Gauthier (Ve), rapporteuse de majorité. Dans cette enceinte, j'ai entendu beaucoup de gens dire que les mesures à la source étaient bonnes et qu'elles devaient être complémentaires à d'autres mesures. Comme vous venez d'accepter l'entrée en matière de ce projet de loi, je vous propose d'ajouter 10% de la somme prévue pour les travaux, qui seraient destinés à appliquer des mesures à la source pour accompagner ces mesures constructives. J'ai donc ajouté 6,5 aux 65 millions prévus et j'ai ajusté la TVA, ce qui donne un total de 92 millions. Il me semble que c'est assez clair.

Le président. Je mets d'abord aux voix... Vous voulez vraiment vous exprimer, Monsieur Annen ? Alors, allez-y ! Ensuite, ce sera M. Pagani, puis... Je rappelle à certains députés qu'on ne peut pas intervenir plus de trois fois au cours de ce deuxième débat. Ceux qui veulent intervenir à propos de leurs amendements doivent faire attention car on ne leur donnera pas la parole plus de trois fois. Monsieur Annen, c'est à vous !

M. Bernard Annen (L). J'aimerais simplement faire appliquer le règlement - c'est une déformation, je vous le concède - car nous sommes en présence d'une proposition sans couverture financière. Vous l'avez refusée il y a une semaine, j'aimerais qu'on la refuse aujourd'hui ! (Applaudissements.)

M. Rémy Pagani (AdG). Monsieur Annen, je vais vous rappeler le règlement... Il ne s'agit en l'occurrence pas de dépenses de fonctionnement mais d'investissement !

Pour ma part, je trouve que, si nous voulions vraiment être cohérents, il faudrait prendre ces 6,5 millions sur la somme totale. Et il ne me semble pas pertinent d'augmenter cette dépense. Je me rallie toutefois à ce projet d'amendement... (Exclamations.)...même si je ne trouve pas judicieux d'augmenter encore cette dépense, alors que le rapport indique que sur les 85 millions on ne connaît même pas les détails des autres types d'aménagement, si ce n'est le tracé des routes - on a parlé du revêtement mais pas du reste.

Toujours est-il que nous devons nous déterminer sur le principe, et nous le soutenons, qu'il faut investir dans les mesures à la source. Il n'a jamais été question, lorsqu'on nous a proposé ce projet de loi, de discuter en vue de trouver des solutions pour intervenir à la source. Nous nous rallions donc, sur le principe, à l'amendement de Mme Gauthier, et nous demandons l'appel nominal. Comme cela nos amis socialistes seront bien obligés de se déterminer sur ce point de façon claire!

M. Christian Brunier (S). Monsieur Annen vous étiez excellent quand vous avez rappelé le règlement à M. Müller, la semaine dernière... Ce n'est pas le cas aujourd'hui. Nous ne sommes pas, en effet, dans le même cas de figure puisqu'il s'agit d'une dépense d'investissement !

Néanmoins, nous voulons être cohérents avec ce que nous avons dit tout à l'heure par rapport aux mesures qui doivent être complémentaires, celles qui agissent sur les causes et celles qui agissent sur les effets. Ce projet de loi propose d'agir sur les effets, l'amendement des Verts propose d'agir sur les causes. Nous allons donc approuver avec enthousiasme cet amendement qui nous semble judicieux.

M. John Dupraz (R). Je suis vraiment surpris de voir avec quel entrain le parti socialiste soutient son conseiller d'Etat... Il est vraiment émouvant de voir la traîtrise des siens vis-à-vis d'un bon conseiller d'Etat... (Exclamations.)En ce qui nous concerne, nous estimons que ce dossier... (Rires et exclamations.)

Le président. Poursuivez, Monsieur Dupraz !

M. John Dupraz. Kanaan, il faudra que tu fasses encore un tour de carrousel pour savoir ce que c'est que ce Grand Conseil ! (Rires.)

Je dirai simplement que vous avez travaillé ce projet en commission, et, malgré cela, je constate qu'une fois de plus vous refaites en séance plénière les travaux de commission... C'est tout à fait détestable ! Vous êtes en train de dévaloriser le travail du parlement !

Je crois qu'il faut en rester au projet de loi tel qu'il ressort des travaux de la commission et soutenir le Conseil d'Etat ! C'est le premier rôle d'un parti gouvernemental, que nous redeviendrons bientôt...

Des voix. Bravo !

M. Mark Muller (L). Je dirai juste quelques mots sur les propositions d'amendement déposés par M. Grobet et par Mme Gauthier.

Je pense qu'il faut refuser les amendements de M. Grobet, en tout cas s'agissant de l'alinéa 1. Il n'appartient évidemment pas au canton de financer des travaux sur le réseau communal, et vous le savez bien ! Les travaux sur le réseau communal reviennent aux communes et le canton n'a pas à financer ce type de travaux !

En ce qui concerne la proposition de crédits supplémentaires pour des mesures à la source, je m'associe évidemment à la remarque de M. Annen, s'agissant de la couverture financière. C'est un principe que nous connaissons bien depuis une semaine. Et, vous le savez aussi, c'est un principe qui s'applique non seulement aux dépenses de fonctionnement mais également aux dépenses d'investissement.

En dehors de cela, j'aurais bien aimé savoir ce que vous entendez par mesures à la source... En effet, c'est bien joli de prévoir une somme de 6,5 millions pour ces mesures, mais il faudrait au moins savoir ce que vous voulez faire concrètement avec cet argent !

Le président. La parole est à M. Bernard Annen. Les rapporteurs de majorité et de minorité s'exprimeront à la fin.

M. Bernard Annen (L). Ce débat est clair. Comme cela a été le cas il n'y a pas si longtemps, la minorité utilise des manoeuvres dilatoires. C'est systématique: il faut que nous nous y habituions, Mesdames et Messieurs de la majorité ! Ayez de la patience, c'est l'application de la démocratie ! Et suivant de quel côté on se trouve de la salle, il faut en supporter les effets.

Cela étant, Monsieur Brunier - et ce n'est pas un jugement de valeur de ma part sur vos propos - la loi, à l'article 128, qui est repris de la constitution, stipule : «Pas de dépenses nouvelles»... Alors, je veux bien vous donner un petit cours de comptabilité tout à l'heure - c'est ma profession - une dépense reste une dépense, qu'elle soit d'investissement ou de fonctionnement ! A partir de là, Monsieur Brunier, je crois que l'article 128 s'applique en l'occurrence.

Mesdames et Messieurs les députés, je veux bien admettre que les socialistes veuillent faire un geste, parce qu'ils se sont un peu fait critiquer tout à l'heure quant à leur position... Monsieur Brunier, vous avez été très dur vis-à-vis de M. Pagani, mais je vous donne raison - ce qui ne vous étonnera pas - car je sais que vous êtes un homme intègre, et que vous dites les choses comme elles sont, notamment quand vous pensez qu'elles vont trop loin. Je suis d'accord avec vous. L'UDC qui était contre ce crédit de 85 millions, va a fortiori être opposée à votre amendement. Vous aurez la conscience tranquille, mais je le déplore !

Une voix. Quelle conscience ? (Le président agite la cloche.)

M. Bernard Annen. Cela étant, j'aimerais tout de même dire un mot à nos amis du parti des Verts. J'ai vécu, comme un certain nombre d'entre vous, l'article 160 E de la constitution, sur l'énergie, et Dieu sait que nous avons entendu - pilonnons, pilonnons ! - qu'il fallait respecter la constitution... Mesdames et Messieurs, aujourd'hui je vous dis la même chose: respectez la constitution ! Il y a eu un vote constitutionnel sur le libre choix du mode des transports, alors tenez-vous y !

Mais votre combat n'est pas un combat antibruit, c'est un combat antibagnoles ! C'est franchement inadmissible ! Faites un combat antibagnoles, c'est votre droit, mais lancez une initiative, et peut-être gagnerez-vous... Mais ne contournez pas la loi ! Nous sommes dans un Etat de droit, et nous devons le rester !

Encore un mot sur le respect: je suis d'accord avec M. Pagani. Nous devons nous respecter les uns et les autres. Mais le drame de M. Pagani, son principe, c'est de dire: «Faites ce que je fais mais pas ce que je dis». (L'orateur est interpellé.)Je rectifie...

Une voix. Pour le Mémorial !

Le président. On se calme... La parole est à M. le député Rodrik.

M. Albert Rodrik (S). Je dirai tout d'abord à mon ami John Dupraz que c'est un honneur de soutenir son conseiller d'Etat s'il fonctionne et s'il s'appelle Laurent Moutinot !

Je n'ai pas l'habitude de passer la brosse à reluire, mais de soutenir son conseiller d'Etat, ce n'est pas une tare...

Par ailleurs, vous parlez de rétablissement, vous parlez de je ne sais quelle leçon pseudo-pédagogique de notre ancien président... J'ai dit au début du débat qu'en matière de bruit nous n'avons pas le loisir de faire des choix entre la prévention et la guérison, et que, dans cette optique, l'amendement des Verts a sa logique et sa pertinence. Il arrive malheureusement un peu tard... Il aurait dû être proposé en commission...

Une voix. On n'avait pas la majorité !

M. Christian Grobet. Il n'est jamais trop tard !

M. Albert Rodrik. Et, comme le dit M. Grobet qui a une certaine expérience en la matière: il n'est jamais trop tard... Mais il ne faut pas venir nous dire que nous ne savons pas que faire de l'amendement des Verts ! Mesdames et Messieurs, ce qu'il faut faire en matière de prévention contre le bruit, on le sait, et on le sait très bien ! Cet amendement aurait déjà pu figurer dans le projet de loi, et c'est pour cela, si cela peut intéresser M. Annen qui nous donne des leçons, que nous le soutenons ! Je regrette qu'on ait pu agresser un allié au cours de ce débat, parce que notre position est proche de la sienne, mais nous devons affronter la réalité et la complexité de ce problème, et ce ne doit pas être une occasion de régler nos comptes ! Que cela soit dit ! Je le répète encore une fois, cet amendement est logique, il va dans le sens du droit fédéral... Je vous invite donc à l'accepter.

Et si c'est une question d'argutie, je demande au Conseil d'Etat qui papote de voir si, pour la cohérence et la visibilité intelligente de sa politique en matière de bruit et pour éviter d'autres polémiques, il ne pourrait pas prendre ces 6,5 millions à son compte...

Le président. Monsieur Rodrik, je ne sais pas si le Conseil d'Etat papote, mais en tout cas il barbote en ce moment... (Rires.)Vraiment ce débat n'avance pas. Je suis désolé, Monsieur le président du Conseil d'Etat !

Le Bureau vous propose de clore le débat... Sont inscrits : M. Vanek, M. Hiltpold, M. Gauthier, M. Moutinot et Mme Martine Brunschwig Graf. La parole est à vous, Monsieur Vanek.

M. Pierre Vanek (AdG). Notre collègue Bernard Annen est intervenu tout à l'heure pour rappeler - avec quelle énergie ! - que certains d'entre nous avaient martelé, apparemment de manière pédagogique, puisque cela a produit des effets - la répétition ne plaît peut-être pas toujours, contrairement à ce que dit le dicton latin, mais en tout cas elle entraîne des effets - qu'il fallait respecter la constitution par rapport à l'existence de l'article 160E, anciennement 160C de la constitution, qui portait sur l'énergie, et en tirer des conclusions par rapport aux transports. Peut-être la pédagogie sur la question de l'article 160C, issu de l'initiative «l'énergie notre affaire», devenu 160E de la constitution, était, de la part de ceux qui l'ont entreprise, excessivement axée sur le nucléaire... (Brouhaha.)

Le président. Restez dans le sujet, s'il vous plaît, Monsieur Vanek !

M. Pierre Vanek. ...et M. Annen n'a ainsi apparemment pas retenu le contenu de cet article par rapport aux transports. (Exclamations.)Alors maintenant que la leçon sur le nucléaire est acquise, passons à la leçon sur les transports ! (Exclamations.)

La leçon sur les transports dit ceci, en son alinéa 3, lettre b): «Les objectifs de cet article sont remplis dans le secteur des transports, le fait de favoriser les déplacements... - «favoriser»... c'est ce qui est marqué dans la constitution - (Exclamations.)...en transports publics, à vélo et à pied, notamment sur le plan des investissements et des équipements...». Il faut donc, pour répondre aux désirs de M. Annen, «favoriser» - cela signifie : faire passer avant, faire passer devant, donner plus de moyens, bref, vous connaissez la définition de ce mot - un certain nombre de moyens de déplacement que sont les transports publics, le vélo et le déplacement à pied, cela notamment sur le plan des investissements et des équipements. Il faut favoriser évidemment ces transports. Par rapport à quoi ? Eh bien, par rapport au transport routier privé, à la bagnole, etc. ! (Exclamations.)C'est ce qui est stipulé dans l'article 160E de la Constitution ! C'était dans l'intention du législateur ou, du moins, de ceux qui ont tenu la plume pour écrire le texte de cet article constitutionnel - certains d'entre eux sont dans cette salle ou pourraient y être - et, de ce point de vue, il s'applique aux investissements dont nous discutons. Je crois donc que l'argument de M. Annen était tout à fait pertinent, puisque les transports publics, les vélos... (L'orateur est interpellé.)Félicitations: j'approuve ! ...et le transport à pied émettent infiniment moins de nuisances sonores que d'autres moyens de transport, notamment l'automobile privée.

Je vous demande par conséquent de suivre l'éloquent plaidoyer de Bernard Annen en faveur de l'amendement qui a été proposé par notre collègue Morgane Gauthier...

Mme Morgane Gauthier (Ve), rapporteuse de majorité. Je réponds juste à M. Müller qui demandait quelles étaient les mesures à la source que nous prévoyions... J'ai cité tout à l'heure, dans ma première intervention, le plan des mesures d'assainissement du bruit routier selon l'OPB, article 19, édité par le Conseil d'Etat en août 1998. A l'intérieur de ce document, figure toute une liste de mesures à la source qui peuvent être prises sur le réseau cantonal genevois.

Quant à la couverture financière, je vous propose de renvoyer ce projet de loi en commission pour proposer un amendement dans ce sens.

Le président. Madame Gauthier, demandez-vous formellement le renvoi de ce projet en commission ? Bien! Alors, nous écoutons le rapporteur de minorité, ensuite Mme Martine Brunschwig Graf, puis M. Laurent Moutinot.

M. Hugues Hiltpold (R), rapporteur de minorité. Je me prononce sur la demande d'amendement présentée par Mme Gauthier, sur le principe déjà. Nous sommes à un stade où nous devons nous prononcer sur un projet de loi qui propose des mesures à court terme. Les mesures à la source reposent sur une problématique beaucoup plus vaste. Je suggère donc que le contenu de cet amendement fasse l'objet d'un projet de loi spécifique. Car il me semble que nous sommes en train de régler les problèmes en deux coups de cuillère à pot et que le résultat risque bien d'être tout à fait inadapté. Cela d'autant plus, Mesdames et Messieurs les députés, que l'on parle d'un montant qui a été estimé en dix secondes à 10% du montant total des travaux, 6,5 millions. Je le répète : je demande simplement que ce point fasse l'objet d'un projet de loi spécifique pour que nous puissions étudier tous les tenants et aboutissants qui nous permettront de nous prononcer sur un montant cohérent.

Je vous demande de ne pas souscrire à cet amendement.

Le président. Je passe la parole à Mme Martine Brunschwig Graf qui a souhaité être la première à s'exprimer.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je vais me prononcer sur le plan financier... Je vous signale tout d'abord que le Conseil d'Etat n'a pas l'intention d'accepter des amendements qui entraînent des dépenses supplémentaires, pour des raisons que vous comprendrez aisément..

L'intervention de M. Grobet, si elle est fort habile, est néanmoins très contestable. A cet égard, je dirai deux choses. Monsieur le député, ce projet de loi date du 25 octobre 2001. Il a donc été passé au crible de mon prédécesseur dont vous avez cité les compétences et l'attention. J'ajoute toutefois que la revendication que vous présentez à l'égard de la route nationale - si j'ai bien lu ce projet de loi - porte sur un montant de 1,6 million... N'est-ce pas ? C'est votre préoccupation principale s'agissant du financement de la Confédération. Et tout cela pour un montant retenu pour la subvention des routes de 84 millions au total. Si nous constatons que la Confédération a donné son accord pour un financement de 49% de la totalité de ce montant, vous avouerez qu'il serait pour le moins délicat, sachant que la Confédération est assez prompte à remettre en cause ses participations - surtout par les temps qui courent - de risquer de perdre 41 millions pour obtenir 1,6 million. Mes modestes petits pas au département des finances m'ont quand même fait comprendre que ces sommes n'étaient pas en rapport !

M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Je pense que la proposition d'amendement de Mme Gauthier devrait faire l'objet d'un projet de loi spécifique. On ne peut pas engager 6,5 millions pour des mesures, si habilement décrites soient-elles dans le plan de mesures, sans être un peu plus précis et sans l'intégrer dans le plan d'investissement.

Alors, je vous indique très volontiers que je suis prêt à entrer en matière sur ce point, mais par le biais d'un projet de loi spécifique.

En ce qui concerne les amendements de M. Grobet, il me paraît difficile de subventionner la Ville de Genève qui a sa responsabilité de propriétaire de sa propre voirie et qui est dans une situation financière florissante. Je ne vois donc pas de raison, en l'occurrence, que nous venions à son secours. Mais, entre parenthèses, elle aurait, compte tenu des délais de l'OPB, intérêt à se dépêcher de présenter un projet de délibération similaire à celui qui vous est soumis aujourd'hui.

En ce qui concerne la part fédérale, Mme Martine Brunschwig Graf a répondu.

Pour ce qui est du troisième amendement que vous proposez, à savoir de commencer les travaux d'assainissement par les tronçons de route les plus atteints par le bruit, c'est la logique même, et nous nous efforcerons de la respecter, sous réserve qu'un certain nombre d'autres éléments peuvent perturber cette priorité, éléments qui peuvent tenir à des recours, à la coordination des travaux avec une commune, et que sais-je encore... Vous avez raison sur le fond: il faut commencer à assainir les endroits les plus critiques. Mais inscrire cela dans la loi, c'est un voeu pieux !

C'est pourquoi, et en conclusion, je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser tous les amendements proposés, à l'exception de celui de M. Hiltpold demandant que ce Grand Conseil soit régulièrement tenu informé du suivi de ce crédit. (Applaudissements.)

Le président. Le débat est clos. Je mets donc d'abord aux voix la proposition de Mme Gauthier de renvoyer ce projet de loi en commission. Si celle-ci est refusée, nous voterons sur les amendements. (Exclamations.)Vous retirez votre amendement à 92 millions, mais vous maintenez votre demande de renvoi en commission ? Bien ! Nous mettons au vote électronique la proposition de renvoyer ce projet de loi en commission.

Mise aux voix, cette proposition est rejetée par 54 non contre 21 oui et 5 abstentions.

Le président. Mme Gauthier ayant retiré son amendement à 92 millions, il nous reste donc... (Exclamations.)Le débat est clos sur le...

M. Rémy Pagani. Je peux reprendre l'amendement de Mme Gauthier ?

Des voix. Oui !

Le président. Vous pouvez le reprendre, mais il faut le dire ! Non, vous ne le développez pas: le débat est clos ! Excusez-moi, mais nous sommes en procédure de vote et le débat est clos ! Mme Gauthier a retiré son amendement. Alors, si vous le reprenez, Monsieur Pagani, je le mets aux voix sans plus de discussion ! (Exclamations.)Non, parce que la liste des orateurs a été close. (Exclamations.)Maintenant, Monsieur Pagani, je vous demande de vous asseoir !

Bien, je mets aux voix l'amendement de Mme Gauthier, repris par M. Pagani, portant la somme totale de ce crédit à 92 millions, à l'alinéa 1 de l'article 1. Le vote électronique est lancé.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 44 non contre 31 oui.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, toujours à l'alinéa 1, nous avons un amendement de M. Grobet, que je vous relis: «...d'assainissement des nuisances sonores du réseau routier cantonal et communal qui dépassent les valeurs limites et les valeurs d'alarme de l'ordonnance fédérale contre le bruit.» Il supprime «national» puisqu'il le remet dans un alinéa 3. Le vote électronique est lancé.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 59 non contre 18 oui.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'un amendement de M. Grobet à l'alinéa 3 de l'article 1er. Je vous demande, Monsieur Grobet, dans quelle mesure cet amendement est valable, vu le vote précédent qui est intervenu à l'alinéa 1. Je vous donne la parole.

M. Christian Grobet (AdG). Monsieur le président, j'ai pris note que, pour la nouvelle responsable du département des finances et, semble-t-il, pour le président du Conseil d'Etat, 1,5 million de francs, c'est peanuts... (Réaction de Mme Brunschwig Graf.)Parfaitement, j'ai très bien compris, Madame, ce que vous avez dit ! Le fait d'avoir demandé des subventions en vertu d'une loi précise est une chose. La réalité, et je le sais pour avoir pratiqué la loi fédérale sur les routes nationales, c'est que c'est la Confédération qui paye avec une participation cantonale. Alors, si vous voulez faire abstraction de cette réalité et payer plus que nécessaire, j'en prends note ! Mais, en tout cas, ce n'est, à mon avis, pas comme cela que l'on défend les finances cantonales !

Le président. Bien, nous allons procéder au vote sur l'amendement de M. Grobet, qui consiste en un alinéa 3 nouveau de l'article 1er, dont je vous lis le texte: «Le crédit alloué en vertu de l'alinéa 1 sert à couvrir également la part cantonale d'études et travaux d'assainissement des nuisances sonores du réseau national.» Le vote électronique est lancé.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 58 non contre 21 oui et 2 abstentions.

Le président. Nous passons à l'amendement de M. Grobet qui consiste en un alinéa 4, nouveau, de l'article 1, dont la teneur est la suivante: «Les travaux d'assainissement sont exécutés en priorité sur les tronçons routiers dont les nuisances sonores dépassent les valeurs d'alarme fixées par l'OPB.» Le vote électronique est lancé.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 55 non contre 21 oui et 3 abstentions.

Mis aux voix, l'article 1 est adopté.

Mis aux voix, l'article 2 est adopté, de même que les articles 3 à 6.

Le président. Nous passons à l'article 7, nouveau, «Rapport sur l'avancement des travaux»de M. Hiltpold, rapporteur de minorité, dont la teneur est la suivante: «Le Conseil d'Etat présente un rapport au Grand Conseil sur l'avancement des travaux tous les deux ans. Ce rapport porte sur l'avancement des études, des travaux, l'état des engagements, des adjudications et des paiements sous forme consolidée par objet et par type de travaux, l'état des recettes provenant de la subvention fédérale, le budget pour les deux ans à venir et une évaluation des risques techniques et financiers, une planification des travaux.»

Mis aux voix, cet amendement (article 7, nouveau) est adopté.

Mis aux voix, l'article 8 (ancien article 7) est adopté.

Troisième débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai un amendement déposé par M. Pagani. Monsieur Pagani, je vous prie de l'expliquer car je ne suis pas sûr de l'avoir bien compris...

M. Rémy Pagani (AdG). Je suis assez stupéfait de la prise de position de M. Moutinot s'agissant des mesures actives à la source, puisqu'il reconnaît lui-même que son département, bien qu'un projet ait été distribué en 95, n'en a même pas prévu et qu'il nous charge, nous, députés, de déposer un projet de loi spécifique pour prendre des mesures à la source... Alors que c'est son boulot ! Or ici, tout le monde est convaincu - en tout cas, a tenté de convaincre mutuellement - qu'il faut agir sur les deux plans, à la source et sur les effets. Je trouve donc cette prise de position du département assez extraordinaire !

J'attendais de M. Moutinot qu'il demande aux socialistes de soutenir sa position et, dans le même temps, qu'il défende des mesures d'intervention à la source. Je ne vois pas pourquoi il renvoie cette tâche au parlement... J'espère qu'il prend la mesure de son manquement, parce qu'il me semble que cela découle de sa responsabilité, et qu'il nous proposera rapidement un projet de loi de mesures d'intervention à la source si mon amendement venait à être refusé !

Mon amendement consiste à déduire 6,5 millions, comme demandé par Mme Gauthier, des 65 millions prévus pour les travaux et de les affecter à des mesures à la source pour arriver à un montant total de 85 millions. Ces mesures à la source sont définies dans le document dont nous a parlé Mme Gauthier.

Le président. Ce qui veut dire, Monsieur Pagani, parce que c'est bien ce que j'avais cru comprendre, que vous devez quand même dire à l'alinéa 2 de l'article 1er: «Il se décompose de la manière suivante: 1) travaux: 58,4 - et non pas 65,9; 2) mesures à la source: 6,5, etc.» Ainsi, vous arrivez à un total de 85 millions...

M. Rémy Pagani. Tout à fait !

Le président. Il manquait la première opération, et je ne voyais pas de quel montant vous enleviez les 6,5 millions... Tout le monde ayant compris, je mets aux voix l'amendement de M. Pagani. Le montant total reste inchangé. Seul le montant des travaux est diminué de 6,5 millions, qui seront affectés à des mesures de protection à la source. Nous passons au vote sur cet amendement. Le vote électronique est lancé.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 43 non contre 34 oui .

Le président. Nous allons procéder au vote d'ensemble de ce projet par vote nominal comme cela a été demandé par M. Pagani, toujours au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.

La loi 8644 est adoptée par article.

Mise aux voix à l'appel nominal, la loi 8644 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 45 oui contre 23 non et 11 abstentions.

Appel nominal

PL 8677-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Bernex (création d'une zone de développement 4B protégée et affectée à de l'équipement public) et déclarant d'utilité publique la réalisation d'un bâtiment destiné au Centre d'Action Sociale et de la Santé (CASS) et aux besoins d'autres services communaux

Premier débat

M. Alain Etienne (S), rapporteur. Il s'agit d'un projet de déclassement en vue de la création d'une zone de développement 4B protégée et affectée à de l'équipement public.

En effet, un nouveau centre d'action sociale et de santé doit être construit à Bernex. Un terrain est tout désigné à cet effet, mais il existe un projet de construction de villas qui, pour l'instant, a été refusé par le département. Ce projet de loi demande donc d'introduire dans la loi de déclassement une clause d'utilité publique.

Je vous fais part d'une rectification que je dois apporter à mon rapport. En page 3, j'ai mentionné que la commune de Bernex avait donné un préavis défavorable... En réalité, elle a donné un préavis favorable dans un premier temps. Ensuite, le conseil municipal a demandé, par une résolution adressée au conseil administratif, de déposer un projet de loi pour mettre ce terrain en zone d'utilité publique. Les promoteurs ont alors déposé une demande complémentaire à la commune, et c'est dans ce cadre-là que la commune a formulé un préavis défavorable. Je tenais simplement à préciser les choses.

M. Mark Muller (L). Le groupe libéral a voté en commission contre ce projet de loi pour la raison suivante, et cette position fera - avec le groupe radical - l'objet d'un amendement que je déposerai sur votre bureau. Ce projet de loi prévoit en effet de déclarer une partie du périmètre d'utilité publique dans le but, évidemment, de permettre l'expropriation dudit périmètre s'il y a lieu.

Nous considérons pour notre part que cette mesure n'est pas nécessaire, d'autant moins qu'il nous a été expliqué en commission que les propriétaires étaient disposés à vendre pour permettre la réalisation de cet équipement.

Si nous sommes favorables à la réalisation de ce centre, nous sommes opposés, par principe, aux mesures coercitives du type expropriations. Et c'est dans ce sens-là, Mesdames et Messieurs, que nous vous proposons d'accepter notre amendement

Le président. Monsieur Pagani, rapporteur de minorité, vous avez la parole.

M. Jean-Michel Gros. Encore !

M. Rémy Pagani (AdG). Je suis désolé, mais je fais partie de la commission de l'aménagement, Monsieur Gros ! En l'occurrence, nous avons décidé aujourd'hui de traiter de l'ensemble des projets d'aménagement, alors je dois intervenir à chaque fois... Je suis navré, mais c'est mon boulot !

Cela étant, faut-il rappeler, Monsieur Muller, la procédure utilisée par la majorité de ce parlement jusqu'à maintenant ? Je pense que oui, en tout cas mon collègue Vanek me le demande !

Les mesures d'expropriation, Monsieur Muller, servent à négocier, car la construction de cet EMS est important pour notre canton. Un moratoire a été décidé, qui a été critiqué avec force par les uns et les autres, y compris dans vos bancs et dans les journaux, pour que des EMS soient construits le plus rapidement possible. Pour nous protéger et pour essayer d'avancer dans ce dossier, nous avons décidé de déclarer cet objet d'utilité public. Le but n'est pas d'exproprier qui que ce soit, mais de pouvoir négocier la vente de ces terrains avec les propriétaires sans qu'ils puissent «faire monter la sauce», au point que l'Etat ne serait plus en mesure d'acquérir ces terrains que vous pourriez destiner à d'autres objectifs...

Ce que sous-tend votre demande, c'est effectivement de laisser le libre choix aux propriétaires de vendre à qui ils le désirent. Ils disent aujourd'hui vouloir les vendre à l'Etat, mais, demain, si des offres alléchantes leur étaient faites, ils pourraient changer d'avis. Nous ne faisons que nous prémunir contre cette éventualité. Nous sommes d'accord de payer le juste prix à ces propriétaires, mais nous devons prendre des précautions. Et c'est bien le but de cette procédure. Jusqu'à maintenant, nous n'avons jamais introduit une clause d'utilité publique pour exproprier, mais pour cadrer les transactions, et je vous propose de vous en tenir à ce mode de faire, comme cela a toujours été le cas dans ce parlement.

Mme Michèle Künzler (Ve). Personne ne conteste le bien-fondé de ce projet de loi ni l'intérêt de construire ce centre social dans la commune de Bernex.

Au fond, la discussion porte seulement sur un point purement idéologique: à savoir la clause dite «d'utilité publique», qui fait pousser des hauts cris aux défenseurs des propriétaires, mais, comble du paradoxe, les propriétaires de ces parcelles eux-mêmes demandent cette clause, pour pouvoir saisir la commission de compensation afin de définir un prix !

De toute façon, il nous semble important de voter ce soir ce projet de loi, tel qu'il est sorti des travaux de la commission: sans tergiverser, parce que cela ne sert à rien ! D'autant moins que la clause d'utilité publique a été légèrement amendée, dans le sens qu'on en ferait usage dans une année seulement. Alors, cessons ces discussions !

Le président. Malheureusement, je ne suis pas sûr que vos sages paroles soient entendues, Madame la députée... Car cinq intervenants sont encore inscrits ! Monsieur le député Rodrik, vous avez la parole.

M. Albert Rodrik (S). Je regrette que ni notre collègue, le maire de Bernex, ni M. Unger ne soient là, car j'avais une question à leur poser. Mais peut-être M. Moutinot sera en mesure de me répondre...

Monsieur le président du Conseil d'Etat, l'intervention de notre collègue Muller aurait-elle quelque chose à voir avec la procédure aujourd'hui pendante devant le Tribunal administratif où un particulier a fait opposition à la commune ? La commune a été déboutée à la commission LCI et on attend que le Tribunal administratif juge... Ce dont nous parle M. Muller est-il de nature à donner un «coup de main» à l'initiateur de cette procédure ? J'aimerais bien comprendre la relation entre les deux, et, surtout, je voudrais m'assurer que le CASS de Bernex voie le jour.

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Je serai également assez brève, parce que nous sommes conscients du fait qu'il faut voter rapidement ce projet de loi.

Je déplore toutefois que le groupe libéral - suivi par les radicaux - persiste dans ses positions idéologiques, comme l'a dit Mme Künzler, sur la question de la clause «d'utilité publique». Ils nous reprochent assez souvent d'avoir des positions idéologiques... Il me semble que, ce soir, ce sont eux qui montrent une certaine crispation sur ce point...

J'aimerais aussi préciser - vous l'aurez vu si vous avez lu le rapport - qu'un amendement a été proposé par les PDC proposant une sorte de compromis en repoussant la mise en oeuvre de l'utilité publique une année après l'entrée en vigueur de la loi. C'est un compromis sur lequel nous sommes entrés en matière.

Je vous propose donc de voter ce projet de loi tel qu'il a été voté par la majorité de la commission.

Le président. Merci, Madame. Cet amendement figure dans le projet de loi, et c'est pourquoi nous n'avons pas à le voter aujourd'hui.

La parole est à vous, Monsieur le député Portier.

M. Pierre-Louis Portier (PDC). Je ne veux pas me substituer au Conseil administratif de Bernex, mais je crois avoir une amorce de réponse pour notre collègue Rodrik...

Il s'agit, me semble-t-il, de deux procédures totalement distinctes. En effet, les propriétaires actuels sont devant le Tribunal administratif parce qu'ils contestent la procédure, en ce sens que le département a refusé une autorisation de construire. C'est ce point qui est contesté. Par contre, la clause d'utilité publique serait d'un grand secours pour la commune de Bernex au cas où les négociations d'acquisition viendraient à échouer. A cet égard, le groupe démocrate-chrétien ne changera pas d'avis par rapport à ce qu'il avait exprimé lors des travaux en commission. Comme le groupe libéral et le groupe radical, nous ne sommes pas toujours à l'aise lorsqu'il faut décréter la clause d'utilité publique... En l'occurrence, il s'agit d'un problème important, et nous avons aussi bien entendu les représentants de la commune de Bernex nous dire qu'ils mettraient tout en oeuvre pour négocier à l'amiable l'acquisition de ces terrains et qu'ils entendaient respecter les prix du marché pour que cette affaire se passe dans les meilleures conditions.

Il n'empêche que, si ces négociations venaient à échouer, la commune de Bernex devrait repasser devant le Grand Conseil pour faire décréter la clause d'utilité publique. C'est pour cette raison que - d'ailleurs par la voix des membres du groupe démocrate-chrétien - nous avions à l'époque proposé un amendement un petit peu tiré par les cheveux - nous le reconnaissons - faisant en sorte que l'utilité publique ne serait effective qu'une année après le vote de ce projet de loi.

Petit détail encore en passant: cela fait une année moins deux semaines que nous avons étudié ce projet en commission, soit le 17 avril 2002. Il est quand même regrettable de traiter en plénière, seulement maintenant, des projets de lois aussi importants pour une commune mais également pour toute une région, puisqu'il s'agit du CASS de la Champagne. En l'occurrence, les choses sont retardées par ladite procédure évoquée devant le Tribunal administratif, mais, en admettant que les choses se soient passées différemment, la commune attendrait toujours ! (Applaudissements.)

Une voix. Bravo, Monsieur le maire !

Le président. Vous êtes applaudi par certains, Monsieur le député, mais, enfin, nous sommes tous responsables de la lenteur de nos travaux !

Monsieur le député Büchi, vous avez la parole.

M. Thomas Büchi (R). Le groupe radical, comme le groupe libéral, s'est opposé en commission à la clause d'utilité publique. Il ne conteste pas le bien-fondé de réaliser cet équipement au plus vite, mais il pense que les moyens pour y parvenir en utilisant la clause d'utilité publique pourrait, au contraire, être de nature à retarder le projet, parce que les opposants qui ne sont pas d'accord avec cette façon de faire pourraient prolonger les procédures, aller au tribunal et plus loin encore. Nous pensons donc qu'un arrangement à l'amiable permettrait de débloquer ce projet beaucoup plus rapidement.

De notre point de vue, l'utilisation de la clause d'utilité publique représente une limitation indéniable des droits démocratiques. Mesdames et Messieurs les députés, nous pensons que cette clause doit être utilisée avec beaucoup de parcimonie et seulement dans des cas bien particuliers, et nous y tenons absolument.

En ce qui concerne ce projet, nous nous opposons à l'amendement proposé par les PDC en commission, parce qu'il est alambiqué et à deux vitesses. Il revient à mettre le pistolet sur la tempe des propriétaires, en leur disant qu'on appuiera sur la détente plus tard, s'il y a lieu... Nous ne sommes pas d'accord avec ce mode de faire; ce n'est pas clair ! En effet, vous devez le savoir, la commune a quand même commis un certain nombre de maladresses dans ce projet...

M. John Dupraz. C'est le moins qu'on puisse dire !

M.Thomas Büchi. Notamment, de donner un préavis favorable à la construction des villas du projet initial... Les gens qui voulaient les construire ont notamment entamé beaucoup de démarches et procédé à des études avec des architectes et des ingénieurs... (L'orateur est interpellé.)Non, quand les gens reçoivent un préavis favorable et qu'ils sont encouragés dans leur projet, ils commencent à faire des démarches. Des gens se sont donc trouvés lésés, et c'est pour cela qu'un accord doit être trouvé dans des conditions raisonnables et correctes pour tout le monde. Ce n'est pas seulement le prix d'achat du terrain qui est en jeu !

Monsieur le conseiller d'Etat, je crois savoir que des faits nouveaux sont intervenus dans ce dossier, dont nous ne sommes pas forcément au courant, par rapport aux procédures mises en oeuvre par les opposants à ce projet de loi. Si vous pouviez nous éclairer un peu sur la situation, cela nous permettrait de trancher ce soir en toute connaissance de cause. Autrement, peut-être faudrait-il envisager un renvoi en commission?

M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Première chose, Mesdames et Messieurs les députés, je ne peux pas répondre à la devinette de M. Büchi... J'ai quelques notes avec moi, dont la plus récente date de fin novembre 2002... S'est-il passé quelque chose la semaine dernière ? Si vous le savez, Monsieur Büchi, dites-le, mais je ne suis pas au courant de ce qui s'est éventuellement passé ces derniers jours dans ce dossier !

Le problème n'est pas très compliqué, Mesdames et Messieurs les députés, les représentants de la commune de Bernex nous ont demandé de déclasser ce terrain afin d'y construire le Centre d'action sociale et de la santé de la Champagne. Ce n'est pas nous qui avons été les chercher ! Ils ont demandé que ce déclassement soit effectué en zone 4B, protégée et affectée à de l'équipement public.

A partir de là, il a fallu, effectivement, opposer un refus conservatoire à un projet de villas; un recours a été interjeté et une procédure d'expropriation peut être mise en oeuvre.

L'amendement qui vous est proposé par le parti libéral et le parti radical est très simple: il demande si vous voulez, ou non, que la commune paye ce terrain 200 000 F ou 300 000 F de plus ! Si vous voulez que la commune paye plus, vous acceptez cet amendement; si vous estimez que c'est gaspiller les deniers publics, vous le refusez... C'est aussi simple que cela, le reste, c'est de la littérature ! (Applaudissements.)

Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés .

Le président. Un amendement a été proposé à l'alinéa 1 de l'article 1er, par M. Mark Muller et M. Thomas Büchi, consistant à biffer «et d'un périmètre d'utilité publique, au lieu-dit «Bernex Mairie»» après «équipement public». Je vous soumets cet amendement au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 38 non contre 28 oui et 2 abstentions.

Mis aux voix, l'article 1 est adopté.

Le président. Un autre amendement a été déposé par M. Mark Muller et M. Thomas Büchi, à l'article 2, qui consiste simplement à le supprimer. Je mets aux voix cet amendement, toujours au moyen du vote électronique. Monsieur Grobet, vous vouliez vous exprimer à ce sujet ? Nous sommes en procédure de vote... Bien, M. Grobet ne demandant pas la parole, nous passons au vote. Le vote est lancé.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 37 non contre 28 oui et 2 abstentions.

Mis aux voix, l'article 2 est adopté.

Mis aux voix, l'article 3 est adopté.

Troisième débat

La loi 8677 est adoptée par article.

La loi 8677 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 55 oui contre 7 non et 9 abstentions.

PL 8791-A
Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat approuvant la construction de la route du Bois-Brûlé sur le tronçon compris entre la route de Ferney et la route de Colovrex
Rapport de majorité de Mme Loly Bolay (S)
Rapport de minorité de M. Rémy Pagani (AdG)

Premier débat

Mme Loly Bolay (S), rapporteuse de majorité. Nous avons eu un débat très intéressant concernant l'assainissement des routes, et j'aimerais que l'on garde en mémoire les débats qui ont touché directement la problématique de la construction du tronçon de la route du Bois-Brûlé. Pourquoi faut-il construire ce tronçon, appelé «route du Bois-Brûlé» ?

Vous le savez, le village du Grand-Saconnex est traversé par deux routes importantes, la route de Colovrex et la route de Ferney qui l'asphyxient complètement. Il ne faut pas oublier que la commune du Grand-Saconnex est l'une des plus sollicitées du canton et elle en est pénalisée. En effet, elle souffre du trafic de transit - j'y reviendrai tout à l'heure - et les nombreuses infrastructures qui ont été construites, soit sur la commune du Grand-Saconnex, soit en bordure, notamment toutes les organisations internationales, sans parler de Palexpo, de la halle 6, d'Arena et de toute la zone aéroportuaire. C'est donc une commune très sollicitée! Or, en contrepartie, elle ne bénéficie pas des routes qui auraient dû être construites pour éviter le centre du village...

Comme je l'ai indiqué lors d'un débat, la construction de la route du Bois-Brûlé va grandement simplifier et améliorer la vie des habitants du village; elle ne va pas résoudre tous les problèmes mais la circulation sera extrêmement facilitée.

Une partie de la route du Bois-Brûlé est déjà opérationnelle en raison du parking P 48 dont la mission est d'absorber tout le trafic lié aux grandes manifestations à Palexpo. Ce parking permettra aussi de garer les petits avions puisqu'il est actuellement impossible de les abriter à l'aéroport en soirée. Il ne sera donc plus nécessaire de les faire décoller le soir pour aller se poser dans les aéroports les plus proches, que ce soit à la Blécherette ou en Valais, et de les faire revenir la journée, tout cela par manque de place. C'est donc aussi un problème de circulation!

La route du Bois-Brûlé répond aussi à un problème d'utilité publique, voire de santé publique, on l'a vu tout à l'heure lors du débat sur l'assainissement des routes.

Par ailleurs, et l'étude d'impact le montre très clairement, la circulation sur la route du Bois-Brûlé diminuera d'environ 18 à 20%. C'est-à-dire que les voitures en provenance de France, soit de Collex-Bossy, soit de Pregny, soit de Chambésy, soit de Bellevue, pourront emprunter la route du Bois-Brûlé pour se rendre dans la zone aéroportuaire ou directement sur l'autoroute.

Or que se passe-t-il à l'heure actuelle ? Toutes les voitures en provenance de ce secteur sont obligées d'emprunter la route de Colovrex, de redescendre l'Ancienne Route, de reprendre la route de Ferney pour aller dans la zone aéroportuaire ou pour aller sur l'autoroute. C'est dire que cette route du Bois-Brûlé sera une véritable bouffée d'oxygène pour les habitants de la commune et qu'elle améliorera sensiblement leur qualité de vie.

C'est pourquoi que je vous demande d'accepter ce projet de loi. Je m'exprimerai encore tout à l'heure pour vous faire part de mes remarques au sujet du rapport de minorité de M. Pagani.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. 325 mètres de route pour environ 3,5 millions, soit 11 000 F le mètre linéaire ! C'est ce qui nous est proposé pour résoudre un problème certes grave - il passe environ douze mille voitures sur la route de Colovrex - mais qui ne le résoudra malheureusement pas.

En effet, nous nous sommes aperçus que les chiffres qui nous ont été présentés en commission ne «collaient» pas. Pour la même période un décompte effectué par un département donnait le chiffre de treize mille cinq cents voitures par jour et un autre département arrivait au chiffre de douze mille voitures seulement. Alors qu'en 1998 déjà on pouvait compter treize mille cinq cents voitures ! Inutile de vous dire qu'avec l'augmentation du nombre de frontaliers qui est passé pour la même période de vingt-huit mille à trente-six mille, l'effet induit de cette malheureuse petite route du Bois-Brûlé passerait complètement inaperçu !

Au contraire, certains automobilistes - car avant de prendre sa voiture, on imagine le meilleur parcours à suivre - vont emprunter cette nouvelle route - qu'ils n'utilisaient pas avant - car elle va leur permettre d'accéder directement à l'autoroute - prétendument... L'effet recherché ne sera donc pas atteint, et la circulation sera encore plus importante, y compris dans le village, contrairement à ce qu'affirme Mme Loly Bolay. C'est un appel à plus de voitures parce que, dès le moment où cette route du Bois-Brûlé sera engorgée - elle le sera, bien évidemment, le matin et le soir - les personnes engagées sur la route de Colovrex ne pourront rien faire d'autre, même si le département a mis, comme il l'a promis, un certain nombre de feux rouges pour empêcher les voitures de bifurquer sur le village du Grand-Saconnex, que de passer par le centre du village ! Coincées sur la route de Colovrex, elles préféreront bifurquer en direction du village !

Ce projet ne va donc pas résorber les difficultés importantes du trafic de transit au Grand-Saconnex. A notre avis, il va au contraire les augmenter. Pire encore, il donnera un signe clair que notre République accorde la priorité à la construction d'un petit tronçon de route, pour un coût très élevé, au lieu d'avancer les travaux du tram dont le tracé prévoit de le faire passer par la place des Nations pour arriver jusqu'au Grand-Saconnex.

De ces deux points de vue, d'une part l'"appel d'air", si j'ose dire, que constitue cette belle route sur la Route de Colovrex et, d'autre part, la logique dans laquelle notre canton s'est engagé de manière déterminée à construire des voies de transports publics - notamment celles de la place des Nations qui bien qu'étant abouties sur la place même demandent à être lancées encore à la conquête du Grand-Saconnex - nous allons donner deux signes allant à l'inverse des investissements votés par ce parlement.

C'est pourquoi nous avons rédigé ce rapport de minorité et vous engageons à ne pas accepter ce projet de loi.

De plus - et j'aimerais bien avoir une réponse à ce sujet - bien que n'ayons pas encore voté ce projet de loi, une bretelle d'autoroute a déjà été construite... Le plan qui nous est présenté aujourd'hui est donc faux! C'est étonnant, d'autant plus qu'on nous a dit qu'il fallait davantage de distance pour pouvoir construire une sortie d'autoroute. En l'occurrence, celle-ci a été faite sur à peine plus de 50 mètres. Elle permet d'ores et déjà d'accéder au parking et les gens qui viendront de Bellevue ou de Versoix pourront prendre un bout d'autoroute, sortir sur cette bretelle et rejoindre la route du Bois-Brûlé, ce qui va aussi faire un appel de circulation, mais dans l'autre sens. Je vous demande donc très précisément, Monsieur Moutinot, si vous avez déjà pris des mesures pour appliquer ce projet de loi, avant même que ce parlement n'ait pris des dispositions à cet égard.

M. Louis Serex (R). Je dirai simplement que le groupe radical soutient son amie Loly Bolay !

Mme Morgane Gauthier (Ve). Je crois vous avoir tout dit à propos de ma philosophie concernant les voitures au point précédent. Je ne vais donc pas argumenter dans le même sens.

Je tiens toutefois à rappeler un élément connu : chaque fois qu'une nouvelle route est construite, il est évident que les voitures l'empruntent...

On table actuellement - à mon grand désespoir - sur une augmentation énorme de la mobilité. Que cela signifie-t-il ? Que dans quelques années cette route ne servira strictement à rien et que le Grand-Saconnex sera toujours très engorgé !

C'est pour cela que nous ne soutenons pas ce projet de loi. Par contre, nous soutenons les conclusions de M. Pagani.

Mme Loly Bolay (S), rapporteuse de majorité. J'aimerais juste revenir sur ce qui a été dit par Morgane Gauthier... Je dois dire que je ne saisis pas l'attitude des Verts, même si je comprends leur raisonnement par rapport aux routes.

Je tiens à dire deux choses. Il est prévu sur cette route des pistes cyclables et des trottoirs. Je rappelle qu'il est pratiquement impossible et même dangereux, à l'heure actuelle, pour les habitants du Grand-Saconnex de prendre leur vélo pour aller du centre du village à Collex-Bossy. De plus, le parking P 4, comme je l'ai dit tout à l'heure, a aussi été prévu pour éviter le trafic dans la commune lors des grandes manifestations. Alors, où est votre logique ?

Je signale encore aux Verts que le groupe des Verts du Grand-Saconnex a voté en faveur de ce projet. Il serait donc temps que les conseillers municipaux des communes soient davantage écoutés, car ils connaissent les problèmes et sont à même d'y répondre! D'autant plus que les groupes politiques ont accepté ce projet à l'unanimité. Nous devrions, nous députés de ce parlement, être plus humbles et à l'écoute des personnes qui font un travail considérable dans les communes et connaissent parfaitement les projets qu'ils votent.

Par ailleurs, je rappelle à M. Pagani, rapporteur de minorité, qu'il a lui-même signé la motion 1495 - à l'ordre du jour de notre Grand Conseil, au point 68, avec en annexe «Les douze points du projet de la charte Vision Zéro en résumé». Elle stipule au point n° 1 : «Tous les êtres humains ont le droit de se déplacer dans l'espace-rue, selon leurs besoins et sans crainte des dommages à leur santé.» C'est pourtant la problématique du village du Grand-Saconnex ! Alors, pourquoi réclamer pour certains ce que vous refusez à d'autres ?

A travers ce projet de loi, nous voulons que les habitants du village puissent précisément se déplacer en toute sécurité, ce qui n'est pas du tout le cas aujourd'hui. Trente mille personnes travaillent pour les organisations internationales sur la commune du Grand-Saconnex, dont 60 à 70% habitent sur la rive droite, c'est-à-dire à Collex-Bossy, à Bellevue, à Pregny-Chambésy, et ces personnes sont obligées d'emprunter la route de Colovrex ou l'Ancienne Route pour se rendre sur leur lieu de travail.

Enfin, sur la route du Bois-Brûlé se trouve une zone artisanale, peu accessible et sans aucune visibilité, la construction de ce tronçon permettra de la rendre plus accessible et plus visible.

D'autre part, Monsieur Pagani, vous faites un calcul en mètres linéaires dans votre rapport de minorité... Or, vous savez très bien que le prix d'une route ne se calcule pas en mètres linéaires mais en mètres carrés ! Pourquoi ? Parce que les caractéristiques changent, selon qu'il y a une, deux, trois ou quatre voies, s'il y a ou non une piste cyclable, s'il y a ou non un trottoir ! A titre de comparaison, le tronçon de la route du Bois-Brûlé va coûter 386 F le mètre carré. Pour mémoire, la route de contournement a coûté 2500 F le mètre carré... Je vous laisse donc apprécier ces chiffres ! Il est évident que les coûts différent en fonction des caractéristiques !

Pour terminer, je dirai que le volet «Transports» du plan directeur a justement pour objectif de proposer un concept d'accessibilité au secteur des organisations internationales ! Monsieur Pagani, je crois que vous méconnaissez totalement les problèmes de la commune du Grand-Saconnex ! Moi, j'y habite depuis de nombreuses années. Venez un matin, entre 7h30 et 9h, pour vous rendre soit à la place des Nations soit au centre de la ville, et vous verrez que les routes sont totalement engorgées: une demi-heure à trois quarts d'heure de bouchons !

En conclusion, le rapport RIE sur la route du Bois-Brûlé évalue les impacts éventuels de la nouvelle liaison routière. Ce document qui a été évalué et validé par un services spécialisé, c'est-à-dire le service cantonal d'étude de l'impact sur l'environnement, dépendant de M. Cramer - et je le dis à l'intention des Verts - met en évidence une diminution du trafic sur la route de Colovrex à travers le Grand-Saconnex par un report d'une partie du trafic, quel qu'il soit, sur la nouvelle route du Bois-Brûlé !

Voilà, Mesdames et Messieurs, je crois avoir été assez explicite, et je vous invite encore une fois à accepter le projet de loi 8291. (Vifs applaudissements.)

Le président. Madame la députée, en demandant un peu d'humilité dans cette salle, vous demandez l'impossible !

Madame la députée Lavanchy, vous avez la parole... (Exclamations.)Alors, la parole est à M. le député Droin, qui, lui, est là !

M. Antoine Droin (S). Je suis bien là, Monsieur le président ! Merci, beaucoup !

Mesdames et Messieurs les députés, je ne peux que souscrire aux propos de ma collègue, rapportrice de ce projet de loi...

M. Claude Blanc. «Rapportrice» ?

M. Antoine Droin. «Rapportrice», Monsieur Blanc ! J'ai une question à poser : vaut-il mieux opposer un veto complet sur la construction de nouvelles routes ou vaut-il mieux, quand cela est nécessaire, prévoir un modeste tronçon de route pour soulager un village entier des nuisances des automobiles ?

A la différence d'un autre projet à notre ordre du jour - la traversée de Vésenaz - ce projet de construction de route a un immense impact sur un très grand nombre d'habitants. La région du Grand-Saconnex est vraiment pénalisée, notamment à cause des grands pôles d'attraction tels que Palexpo ou l'aéroport. En conséquence, cette route permet une amélioration des jonctions routières durant les périodes de forte influence, à l'aéroport précisément et à Palexpo.

L'amélioration du trafic de transit permet non seulement de soulager des nuisances les habitants du Grand-Saconnex, mais également d'agir très positivement sur la qualité de l'air.

Notre groupe n'est normalement pas favorable à la réalisation de nouvelles routes. Nonobstant ce nouveau tronçon de 370 mètres - peu de choses par rapport aux 2 kilomètres que les usagers utilisent aujourd'hui - le choix est vite fait entre la consommation d'énergie, les nuisances et le bien-être de la population.

Alors, Mesdames et Messieurs les députés, nous ne pouvons qu'accepter ce projet de loi qui facilite l'accès de Palexpo et de l'aéroport aux nombreux fonctionnaires internationaux et usagers, et qui permet de diminuer fortement les nuisances subies par la population.

M. René Desbaillets (L). Je serai très bref.

Le président. N'oubliez pas, Monsieur Desbaillets, que M. Jean-Michel Gros a un train à prendre !

M. René Desbaillets. Etant donné que M. Jean-Michel Gros habite à 500 mètres de chez moi, c'est bien volontiers que je l'accueille dans ma voiture... (Exclamations.)S'il ose toutefois monter avec moi, qui risque de ne pas respecter les limitations de vitesse ce soir... (Exclamations.)

Le président. Il a trouvé un chauffeur, c'est déjà ça !

M. René Desbaillets. Aux arguments idéologiques des Verts, je ne répondrai pas. Ils ont le droit de les avoir...

Par contre, je contrerai les arguments purement démagogiques et théoriques de M. Pagani ! J'utilise régulièrement ce tronçon, pour des raisons professionnelles, pour me rendre du Mandement jusqu'à la région de Versoix, Collex-Bossy, Sauvergny, etc. Bien que j'étais opposé à l'entrée de la Suisse dans l'Europe, je tiens compte de nos amis français... Car le village du Grand-Saconnex n'est pas le seul à être perturbé par le passage des voitures. En effet, pour éviter le Grand-Saconnex, il faut traverser Ferney-Voltaire. Et nos amis français de Ferney-Voltaire sont aussi en droit de vivre tranquillement et de souhaiter que des mesures soient prises afin d'éviter qu'une multitude de véhicules traversent le village pour transiter de Meyrin à Collex-Bossy.

De plus, vous le savez peut-être, on doit franchir la douane et, selon quel matériau vous transportez dans votre véhicule, vous ne pouvez pas transiter en France pour vous rendre du Mandement à Collex-Bossy et vice et versa.

Cette route du Bois-Brûlé est donc indispensable pour améliorer la fluidité de la circulation entre l'autoroute et Collex-Bossy.

Je suis donc favorable à ce projet, et je soutiens totalement les arguments de notre collègue Loly Bolay.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Mme Loly Bolay use et abuse de cet argument selon lequel nous ne suivons pas suffisamment l'avis des conseillers municipaux...

Je suis tombé - pas par hasard, parce que j'ai l'habitude de fouiller un peu les dossiers que je traite - sur deux études à ce sujet et dont l'analyse diverge totalement, notamment par rapport - et c'est ce qui nous occupe - à l'assainissement de la route qui traverse le village du Grand-Saconnex.

La première étude faite en 1998 - je l'ai mentionnée dans mon rapport - estimait que neuf mille cinq cents voitures passaient sur cette fameuse route qui traverse le village du Grand-Saconnex. Mais je ne pense pas que les conseillers municipaux avaient cette étude sous les yeux pour se faire une idée objective de la situation. L'autre étude faite en 2002 indiquait huit mille cinq cents voitures, soit mille de moins. Car il faut bien évidemment justifier la nécessité de faire ce tronçon de route... Et après on essaye de nous faire croire que la route du Bois-Brûlé va permettre de diminuer sensiblement le nombre des voitures - même si les chiffres donnés divergent entre huit mille cinq cents et neuf mille cinq cents - à cinq mille ou disons quatre mille voiture ! Mais ce qui nous est proposé permettra tout au plus d'abaisser ce chiffre à sept mille voitures, selon les projections pour 2002 ! Or on connaît l'augmentation du trafic de transit due aux frontaliers qui a déjà fait exploser ces chiffres...

De manière très concrète, je ne pense pas que les conseillers municipaux aient eu en main ces deux études pour établir leur jugement clairement. Bien sûr, au premier abord, les gens peuvent imaginer que la réalisation d'une nouvelle route va améliorer la circulation et que les riverains de la route qui va au Grand-Saconnex auront moins de nuisances. Nous prétendons, après avoir étudié ce projet, que cela ne sera pas le cas, puisque l'étude en question établit que la circulation ne va pas diminuer de façon significative: mille, voire deux mille voitures seulement !

L'autre problème - M. Desbaillets a très justement évoqué ce point - est le suivant: les voitures en provenance de Collex-Bossy, par exemple, qui passent actuellement une fois par un trajet et une fois par un autre, emprunteront plus volontiers la route du Bois-Brûlé quand elle sera réalisée, ce qui engendrera une augmentation du nombre de voitures sur cette route et la circulation, de ce fait, sera reportée sur la route en direction du Grand-Saconnex que vous vouliez désengorger. C'est cette logique que nous combattons!

Nous estimons - il faudra malheureusement le redire dix ou vingt fois... - qu'il est beaucoup plus juste et logique de mettre en oeuvre un transport en commun, notamment un tram, et de faire un parking-relais pour inciter les gens qui le peuvent à les utiliser - je ne parle pas, bien sûr, pas des professionnels qui ont du matériel lourd à transporter dans leur camionnette. Un tram permet de transporter soixante personnes à la fois, ce qui est beaucoup plus rationnel et beaucoup moins polluant que soixante personnes qui prennent chacune leur voiture.

Sur le plan technique, Madame Bolay - et non idéologique! - nous estimons que ce projet de loi ne correspond pas aux objectifs visés. Au contraire, les nuisances seront encore plus importantes! Et vous devrez en rendre compte à vos administrés, si vous êtes élue... qui vous reprocheront d'avoir augmenté le trafic sur cette artère.

M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. S'il était possible de soulager toutes les localités du canton du trafic de transit par une mesure à 3,5 millions, nous en serions enchantés !

Il ne faut certes pas attendre des miracles d'un tel projet, mais il a des qualité de délestage d'un certain nombre de zones résidentielles, dont le centre du Grand-Saconnex, qui justifient qu'il soit accepté.

Monsieur Pagani, vous parlez de tram... Personne encore - même si on peut souhaiter que cela vienne un jour - n'a sollicité que le tram n'aille jusqu'à Collex-Bossy et Chavannes ! Or le trafic en question pose problème, précisément, sur cette région! Il faut donc le canaliser et le diriger - comme son nom l'indique - sur l'autoroute de contournement et non pas dans le village du Grand-Saconnex !

Cela dit, vous m'avez demandé si nous avions construit quelque chose d'illégal... A Dieu ne plaise, non, et je ne vois pas à quoi vous faites allusion !

En revanche, il est exact que le début de la route est construit, puisque c'est la route d'accès au parking, et il était parfaitement licite de le construire. Par contre, c'est une route qui n'aboutit nulle part tant que vous ne nous autorisez pas à réaliser la suite de la route du Bois-Brûlé.

Voilà ce que je peux vous dire, en vous invitant à voter ce projet de loi et à rejeter l'amendement figurant dans le rapport de minorité.

Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. Nous allons passer au vote de l'amendement de M. Pagani, qui consiste en un article 2, nouveau. Si l'amendement de M. Pagani était accepté, l'article unique deviendrait l'article 1. Cet amendement se trouve à la page 23 du rapport.

Vous voulez la parole, Monsieur Pagani ? Allez-y !

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. (Exclamations.)Vous allez tout de même me laisser présenter mon amendement, non ! A moins que vous...

Le président. Monsieur Pagani, allez-y!

M. Rémy Pagani. Je rebondis sur l'intervention de M. Moutinot qui tente de faire croire que nous sommes naïfs au point de demander que le tram aille jusqu'à Collex-Bossy... Ce n'est pas du tout ce que nous demandons ! Nous voulons simplement faire en sorte que les personnes en transit - Monsieur Moutinot, je m'étonne que vous caricaturiez ainsi nos propos - en provenance de la France voisine, des frontaliers ou d'autres, n'aient pas le réflexe de se précipiter sur cette nouvelle route mais soient incitées à déposer leur voiture à la périphérie de la ville pour prendre le tram !

Nous estimons donc qu'il serait pour le moins de bon aloi de voter ce projet de loi et de mettre une réserve, afin qu'il soit voté en même temps que le tram irait jusqu'au Grand Saconnex. C'est le but de mon amendement.

Le président. Je mets donc aux voix l'amendement de M. Pagani, dont la teneur est la suivante: «Le présent projet de loi ne prend effet qu'au moment où le Conseil d'Etat aura pris la décision d'engager les travaux relatifs à l'extension de la future ligne du tram reliant la place des Nations au Grand-Saconnex et inscrit les crédits nécessaires à cet effet au budget de l'Etat.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Mis aux voix, l'article unique est adopté.

Troisième débat

Le président. Avant de mettre ce projet de loi aux voix dans son ensemble, je signale quand même à Mme le rapporteur de majorité que, à la page 2 de son rapport, elle annexe au Grand-Saconnex certaines institutions ou bâtiments qui appartiennent soit à la commune de la Ville de Genève soit à la commune de Pregny. L'Ecole de Chavannes se trouve en Ville de Genève et le CICR se trouve à Pregny... Mais c'est un détail !

Une voix. Il faut renvoyer ce projet de loi en commission ! (Rires.)

Le président. Madame Bolay, vous voulez la parole ? Je vous la donne !

Mme Loly Bolay (S), rapporteuse de majorité. Monsieur le président, vous pouvez voir que j'ai écrit: «ou en bordure du Grand-Saconnex» ! (Vives exclamations.)

Le président. Je vois que cette assemblée est particulièrement excitée... Surtout sur mon côté droit !

Mesdames et Messieurs les députés, je mets aux voix ce projet de loi en troisième débat au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.

La loi 8791 est adoptée par article.

La loi 8791 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 50 oui contre 15 non.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je lève la séance.

La séance est levée à 23h10.