République et canton de Genève

Grand Conseil

No 4/I

Vendredi 26 janvier 2001,

nuit

La séance est ouverte à 20 h 45.

Assistent à la séance : Mme et MM. Guy-Olivier Segond, Gérard Ramseyer, Martine Brunschwig Graf, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

La présidente donne lecture de l'exhortation.

2. Personnes excusées.

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance : Mme et M. Carlo Lamprecht, président du Conseil d'Etat, Micheline Calmy-Rey, conseillère d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Bernard Annen, Michel Balestra, Anne Briol, Nicolas Brunschwig, Christian Ferrazino, Alexandra Gobet, Michel Halpérin, René Koechlin, Armand Lombard, Alain-Dominique Mauris, Pierre Meyll, Stéphanie Ruegsegger et Alberto Velasco, députés.

3. Annonces et dépôts:

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

La présidente. Sont parvenues à la présidence deux propositions de motions :

M 1387
de Mmes et MM. Philippe Glatz (DC), Luc Barthassat (DC), Claude Blanc (DC), Hubert Dethurens (DC), Henri Duvillard (DC), Nelly Guichard (DC), Pierre Marti (DC), Etienne Membrez (DC), Michel Parrat (DC), Catherine Passaplan (DC), Pierre-Louis Portier (DC), Stéphanie Ruegsegger (DC), Janine Hagmann (L), Marie-Françoise de Tassigny (R), Bernard Lescaze (R), Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG), Esther Alder (Ve), Christine Sayegh (S) Dominique Hausser (S), Jacqueline Cogne (S) et Christian Brunier (S) demandant l'étude d'un éventuel assouplissement des exigences techniques imposées par les autorités compétentes aux structures d'accueil de la petite enfance. ( )  M1387
M 1388
de Mme et MM. Michel Parrat (DC), Michel Ducret (R), Pierre Vanek (AG), Jean Spielmann (AG), Nelly Guichard (DC), John Dupraz (R) et Pierre Ducrest (L) pour une réalisation rapide des projets de tramway, en site propre, en Ville de Genève. ( )  M1388

M. Jean Spielmann (AG). Madame la présidente, je demande que la seconde motion soit distribuée et débattue en même temps que les motions 1384 et 1385 que nous avions décidé de traiter ce soir.

La présidente. Il est donc proposé que cette nouvelle motion concernant le tram 13 soit traitée en même temps que les points 72bis et 72ter que nous allons aborder maintenant. Y a-t-il des oppositions à cette manière de faire ?... Ce n'est pas le cas. Il en sera donc fait ainsi.

M. John Dupraz (R). Madame la présidente, j'aurais dû intervenir au point «Discussion et approbation de l'ordre du jour». Il s'agit en fait de réparer un oubli concernant le point 62 : puisqu'il a été remplacé par le projet de loi que nous avons discuté et approuvé avant la pause, j'annonce que nous retirons le projet de loi

PL 8434
de Mme et MM. Jean-Marc Odier, Bernard Lescaze, John Dupraz, Marie-Françoise de Tassigny, Louis Serex et Hervé Dessimoz modifiant la loi 8255, du 30 novembre 2000, autorisant l'octroi à la Fondation de droit public pour la construction et l'exploitation de parcs de stationnement d'un droit de superficie au-dessous du domaine public cantonal, pour la construction d'un parc relais P+R Genève-Plage, dans le port de la Nautique, au quai Gustave-Ador et instituant des mesures favorisant les transports publics ainsi que des restrictions de circulation au quai Gustave-Ador et à la rue des Eaux-Vives afin de réduire les nuisances provoquées par le trafic automobile. ( )PL8434

Mme Christine Sayegh (S). Madame la présidente, j'annonce également que, vu le vote du projet de loi 8445, nous retirons le projet de loi

PL 8435
de MM. David Hiler, Christian Grobet et Dominique Hausser autorisant l'octroi à la Fondation de droit public pour la construction et l'exploitation de parcs de stationnement d'un droit de superficie au-dessous du domaine public cantonal, pour la construction d'un parc relais P+R Genève-Plage, dans le port de la Nautique, au quai Gustave-Ador et instituant des mesures favorisant les transports publics ainsi que des restrictions de circulation au quai Gustave-Ador et à la rue des Eaux-Vives afin de réduire les nuisances provoquées par le trafic automobile. ( )  PL8435

La présidente. Je vous remercie. Il est pris acte de ces retraits.

c) de propositions de résolutions;

Néant.

d) de demandes d'interpellations;

Néant.

e) de questions écrites.

Néant.

M 1384
4. a) Proposition de motion de Mme et MM. John Dupraz, Roger Beer, Marie-Françoise de Tassigny, Bernard Lescaze et Jean-Marc Odier demandant la participation de l'Etat de Genève à la médiation concernant le tram à la rue de Lausanne. ( )M1384
M 1385
b) Proposition de motion de MM. Pierre Ducrest et Etienne Membrez invitant le Conseil d'Etat à promouvoir une circulation cohérente à la rue de Lausanne. ( )M1385
M 1388
c) Proposition de motion de Mme et MM. Michel Parrat, Michel Ducret, Pierre Vanek, Jean Spielmann, Nelly Guichard, John Dupraz et Pierre Ducrest pour une réalisation rapide des projets de tramway, en site propre, en Ville de Genève. ( )M1388

EXPOSÉ DES MOTIFS

La construction du tram 13 à la rue de Lausanne est actuellement bloquée par un recours auprès du Conseil fédéral, dont ce dernier n'est pas prêt de débattre.

Afin de trouver rapidement une solution acceptable pour les différentes parties, la Ville de Genève a initié une médiation, comme le confirmait un article de la Tribune de Genève du jeudi 14 décembre 2000 (p. 27).

Lors de la séance du Grand Conseil du même jour, le député John Dupraz a interpellé le Conseil d'Etat afin de lui demander s'il entendait participer à cette médiation. Dans sa réponse, le Conseil d'Etat n'a fait que décrire la situation actuelle et a déclaré refuser de participer à la médiation.

Selon nos informations, la Ville de Genève et le TCS ont trouvé un accord concernant la réalisation du tram en site propre (1 voie pour le tram et 1 voie pour les voitures dans chaque sens). Il nous semble donc déraisonnable que le Conseil d'Etat bloque l'avancement des travaux, en refusant d'adhérer à cette solution de compromis.

Il faut encore rappeler que la demande de concession octroyée par l'Autorité fédérale prévoyait la réalisation du tram en site propre (!) et que le projet cantonal (3 voies au total) a été modifié après l'enquête publique !

Le Parti radical, pour sa part, s'est clairement prononcé pour l'objet accepté lors de la médiation. Ainsi les conseillers municipaux radicaux de la Ville de Genève ont déposé une résolution dans ce sens, et les députés en font de même au Grand Conseil avec une motion.

Nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver un accueil favorable à cette motion.

Proposition de motioninvitant le Conseil d'Etat à promouvoir une circulation cohérente à la rue de Lausanne

EXPOSÉ DES MOTIFS

Il est de notoriété publique que le projet de tram 13 à la rue de Lausanne subit des blocages de réalisation qui sont loin d'être abandonnés voire levés par les instances auxquelles les recours afférents ont été soumis.

Le projet présenté, trop complexe et coercitif à l'encontre des usagers autres que le tram et inadapté à une voirie limitée en largeur, a suscité une levée de boucliers qui va au-delà d'une réaction partisane.

Pendant ces vaines querelles, la population ne bénéficie pas de ce qu'elle serait en droit d'attendre : la fluidité du trafic, la possibilité d'atteindre son lieu de travail, soit en transports publics ou privés performants, les commerçants riverains pâtissants de cet état de fait.

Il est temps de trouver une solution pour sortir de cette impasse.

Le projet du TCS, avec son tram en site propre, est cette solution et il convient de la saisir.

Il faut savoir parfois trouver le consensus qui permet d'aller de l'avant surtout que le projet bloqué retarde lui-même les autres réalisations que sont les parkings-relais prévus le long de la ligne du tram 13.

En vous remerciant de l'attention bienveillante que vous prêterez à ce bref exposés des motifs, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à accueillir favorablement cette proposition de motion.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le développement des réseaux des transports publics à l'horizon 2006 doit être réalisé conformément à la loi sur le réseau des transports publics (H 1 50). La population genevoise s'est prononcée à de multiples reprises et très clairement en faveur du développement des transports publics. Malheureusement la construction du tram 13 à la rue de Lausanne est bloquée par des recours auprès du Conseil fédéral, et l'on ne sait pas dans quels délais une réponse définitive sera donnée à ces recours. De plus, rien ne garanti que la réponse du Conseil fédéral permettra la réalisation rapide du projet contesté, d'autant plus que ce dernier n'est pas identique au projet ayant obtenu la première approbation.

Pour trouver rapidement une solution acceptable pour les différentes parties intéressées, la Ville de Genève a pris l'initiative de lancer une médiation entre les parties intéressées. Qu'un terrain d'entente à été trouvé entre la Ville de Genève et les auteurs des recours. Un accord est intervenu qui prévoit la réalisation dans chaque direction de la ligne de tram en site propre, d'une piste pour les voitures et d'une piste cyclable. De même une solution acceptable à été trouvée à la Place Cornavin.

Face aux perspectives positives ouvertes par un tel accord, il est incompréhensible que le Conseil d'Etat refuse de participer à une telle médiation et soit, en définitive, responsable du blocage de l'avancement des travaux.

Au bénéfice de ces explications, nous vous demandons, Mesdames et Messieurs les députés, de manifester très clairement votre volonté de trouver une solution négociée en adressant directement cette motion au Conseil d'Etat pour lui demandé de participer à cette médiation et ainsi contribuer à trouver une solution permettant de répondre aux besoins de la politique des transports voulue par la grande majorité des citoyennes et des citoyens de notre canton.

Débat

M. Pierre Ducrest (L). Ces motions sont présentées dans le but d'éviter tous les blocages qui, actuellement, font que les transports sont un problème qui n'est jamais réglé à Genève. Il est de notoriété publique que les transports à Genève posent des problèmes et surtout ne se développent pas. A qui la faute ? On pourrait pérorer, mettre la faute sur tel camp ou tel camp, mais il y a un moment, Mesdames et Messieurs, où les citoyens qui nous regardent voudraient une solution.

Si d'aucuns dans ce parlement sont d'accord avec le transfert modal, avec la pluralité des moyens de transports, il s'agit d'être cohérents dans l'application des mesures à prendre sur certaines voies du domaine cantonal, notamment pour les véhicules des transports publics, pour les véhicules privés, pour les vélos, pour les motos, et même pour les piétons. De même, il faut avoir une certaine cohérence, lorsqu'on dit vouloir soutenir le petit commerce, voire le commerce et l'économie en général, en offrant aux usagers des moyens de transport adéquats.

En l'occurrence, nous parlons du tram 13 sur la rue de Lausanne, dont les blocages défrayent la République, et nous constatons, sur la route des Acacias, un blocage similaire. Le cas de la rue de Lausanne est un cas d'école. D'un côté, il y a la place Cornavin et, de l'autre, la montée sur la place des Nations. Entre les deux, il y a d'hypothétiques parkings à exécuter, soit le parking de Sécheron et le parking de l'OMC. Or, actuellement, nous constatons un refus populaire de la Ville de Genève concernant la place des Nations, des tergiversations concernant le parking de l'OMC - bien que le canton ait signé un accord prévoyant sa construction - des atermoiements concernant le parking de Sécheron - on l'a vu lors de la garantie à accorder à la Fondation des parkings - enfin, il y a le tram que d'aucuns disent vouloir réaliser.

Je rappelle qu'au début du siècle nous avions un réseau de trams fort performant puisqu'il était le meilleur du monde. Qu'en est-il actuellement ? Des villes voisines, telle Nyon, développent les tramways, on parle souvent dans cette enceinte du tramway de Strasbourg, mais qu'en est-il des tramways genevois ? On a construit, au forceps, la ligne 13, du rond-point de Plainpalais jusqu'à la gare Cornavin ; on a construit, après une sorte de hold-up moral, le tram 16, de Bel-Air jusqu'au boulevard Georges-Favon, mais qu'en est-il de la rue de Lausanne ? Nous constatons des blocages importants, qu'un enfant de 10 ans comprendrait en regardant les plans. En effet, chaque fois que l'Etat décide de réaliser une liaison de tram entre un point A et un point B, il veut tout mettre dans ses plans : le DAEL élabore des plans coercitifs où, à force de rajouts, à force de vouloir plaire à celui-ci et à celui-là, il finit par bloquer tout le projet. A force de blocages, il n'y a pas de tram, il n'y a pas de liaison entre les différentes lignes, il n'y a pas de cohésion avec les parkings qui permettent le transfert modal et, en plus, il n'y a pas de finalité au projet, puisqu'actuellement la boucle prévue à la place des Nations n'existe pas, si ce n'est sur plan et encore !

Maintenant, il faut en finir, Mesdames et Messieurs les députés ! Il faut être sérieux avec les deniers du peuple. Le peuple demande des mesures cohérentes. Il demande que les transports publics soient performants, mais il demande aussi que les gens puissent choisir d'aller en voiture ou par un autre moyen à leur travail, qu'on ne les en empêche pas en prenant des mesures coercitives en faveur de tel ou tel modèle de transfert modal, de tel ou tel modèle de transport. Or, à la rue de Lausanne, on veut réaliser une ligne de tram, mais en même temps on veut bloquer les voitures, on veut prendre une mesure pour celui-ci, une mesure pour celui-là, et finalement on n'arrive jamais à quelque chose de concret.

La commission des transports a réussi, autre cas d'école, à trouver un consensus autour de la liaison La Praille-Eaux-Vives. Heureusement, car autrement nous partions sur le TCSP, avec des promesses françaises dont on ne savait pas si elles seraient tenues, avec d'autres problèmes, en se chamaillant entre les tenants du ferroviaire en voie normale et ceux du ferroviaire en voie métrique... Le cas de la rue de Lausanne ressemble étrangement à ce cas-ci et il s'agit donc d'arriver à un consensus dans ce parlement.

En l'état, il y a des bruits de négociations entre la Ville de Genève, ou certains de ses représentants, et le DAEL, responsable des plans du tram de la rue de Lausanne et, partant, du tram des Acacias. D'un autre côté, un organisme qui s'appelle le Touring Club suisse section genevoise a élaboré un plan qui, somme toute, serait tout à fait à même de débloquer la situation. Sans allonger, je dirai simplement que, lorsqu'il y a un blocage et qu'une possibilité de déblocage apparaît, il convient de se mettre autour d'une table et de trouver une solution qui permette d'avancer. La solution proposée par le TCS permet d'avancer dans un premier temps. Vous me rétorquerez que certaines concessions fédérales sont longues à obtenir, que ceci, que cela..., mais rappelez-vous que, pour le moment, il y a blocage et recours au Conseil fédéral.

Souvenez-vous de «Tout doux les Pâquis», ce plan dont certains ont rappelé qu'il a été inauguré samedi dernier : en réalité, ce n'est plus le même plan. «Tout doux les Pâquis», à l'origine, prévoyait des stops aux quatre angles des carrefours, des mesures coercitives comme des gendarmes couchés et que sais-je encore... Pour finir, une solution a été trouvée, mais dix ans après ! Voulez-vous encore attendre dix ans pour le tram 13 ? Nous, nous ne le voulons pas. Les députés qui ont signé ces motions veulent débloquer la situation ; c'est pourquoi nous vous demandons, Mesdames et Messieurs les députés, d'accueillir favorablement ces motions et de les renvoyer au Conseil d'Etat.

Mme Anita Frei (Ve). Les Verts s'opposent aux trois motions présentées ici et réitèrent leur soutien au projet officiel d'implantation du tram 13 à la rue de Lausanne.

Tout d'abord, nous protestons contre la pseudo-médiation mise en place par la Ville de Genève pour amener le TCS à retirer son recours auprès du Conseil fédéral. En effet, une médiation implique la participation de toutes les parties concernées. La médiation dont la motion radicale vante les mérites ne recouvre en fait que des tractations plus ou moins secrètes avec le TCS, qui excluent par exemple les associations regroupées au sein de la Coordination transports, les habitants, les commerçants, avec qui, rappelons-le, le projet du Conseil d'Etat a été élaboré. D'ailleurs, tant le Conseil d'Etat que les TPG ont refusé de prendre part à ces négociations illégitimes.

Que penser de cette démarche à sens unique, sinon qu'elle sert les intérêts des seuls recourants, lesquels ne se sont pas privés de brandir la menace d'un référendum au cas où le Conseil fédéral ne leur donnerait pas raison ? A ce stade du processus, la médiation n'est pas crédible, elle s'apparente au chantage. Surtout, elle retarde et compromet gravement un projet longuement discuté, négocié, concerté, y compris avec les autorités de la Ville de Genève, qui en ont approuvé le principe.

Si on construit à grands frais un parking d'échange et une ligne de tramway, c'est bien pour réduire significativement le nombre de véhicules entrant dans la ville, pour se rapprocher un peu des normes OPAir et OPB que Genève viole allègrement année après année. Il faut arrêter de croire qu'on peut avoir le beurre et l'argent du beurre, soit plus de transports collectifs sans diminuer le nombre d'automobiles circulant sur les routes genevoises. L'espace public n'est pas indéfiniment extensible. Si on construit un tram, c'est bien pour qu'il y ait moins de voitures et plus de place pour les formes de mobilité douces.

Le projet officiel d'implantation du tram 13 à la rue de Lausanne s'inscrit dans un plan global et cohérent de report modal, avec un P+R à Sécheron et une place Cornavin qui devient un véritable interface des transports. Il permet d'améliorer considérablement les qualités de vie et de travail sur la rue de Lausanne, aujourd'hui sans doute une des voies urbaines les plus invivables de Genève. Mais voilà, pour atteindre les objectifs de report modal et de réhabilitation de la rue de Lausanne, il a fallu renoncer au site propre intégral pour le tram au profit d'une solution mixte : en direction de Lausanne, une voie de tram en site propre et une voie réservée à la circulation automobile ; en direction de Cornavin, une voie partagée entre tram et voitures. Cette solution n'est pas une lubie, elle est pratiquée notamment à Berne, à la Seftingenstrasse, une des artères pénétrantes en ville de Berne, où le trafic, autrefois fort congestionné, a gagné en fluidité grâce au site mixte et grâce à une gestion pertinente des feux.

La solution du tram en site propre préconisée par le TCS, que les diverses motions qui nous sont soumises voudraient voir reprise, a été étudiée et rejetée en raison de ses nombreux inconvénients. L'emprise au sol se fait au détriment des cyclistes et des piétons, qui n'ont plus droit qu'à une portion congrue : un trottoir réduit à 1,40 m à l'endroit le plus étroit, même pas la place pour croiser avec une poussette ! Elle induit aussi une cohabitation dangereuse avec les voitures pour ce qui concerne les vélos. Pour le trafic automobile, le site propre induit une fluidité artificielle, qui provoquerait immanquablement des embouteillages encore pires que ceux que nous connaissons à la place Cornavin, qui doit enfin retrouver une vocation largement piétonne. Enfin, la solution du tram en site propre diminue les surfaces dévolues au parcage, rendant difficiles, voire impossibles les livraisons et le stationnement de courte durée liés au commerce, que la droite souhaite tant !

La solution mixte est peut-être politiquement incorrecte, mais c'est très certainement la meilleure pour la rue de Lausanne et pour le report modal. Le projet officiel d'implantation du tram à la rue de Lausanne, approuvé par l'Office fédéral des transports, permet la coexistence des modes de déplacement, tout en favorisant les activités commerciales le long de la voie, avec des places de stationnement, rappelons-le, pour autocars devant les hôtels et des arrêts pour livraisons qui n'empiètent pas sur la circulation automobile. C'est là la fluidité que tout le monde souhaite apparemment. Elle représente en plus un véritable partage de l'espace public - ce que vous appelez complémentarité et que nous appelons partage - où tous les modes de déplacement trouvent leur juste place.

Hélas, la qualité de vie des habitants et commerçants riverains ne semble guère compter pour le TCS et ses partisans. Les partisans de l'égoïsme automobile exigent le site propre intégral à la rue de Lausanne, car ils refusent de partager l'espace public avec les autres acteurs de la ville. Comment expliquer sinon qu'à la route des Acacias le même TCS défende une position diamétralement inverse, refusant le tram en site propre, parce que cela implique la suppression d'une voie de circulation pour les automobiles ? Derrière le recours du TCS se profile l'enjeu du réaménagement de la place Cornavin, où le trafic automobile de transit doit être réduit au profit des transports collectifs, pour que cet espace sinistré devienne enfin une véritable place digne de Genève.

Entrer en matière aujourd'hui sur les exigences du TCS, c'est céder au chantage du référendum, c'est retarder encore le développement des transports collectifs dans notre canton, c'est priver Genève d'espaces publics de qualité, c'est vider le report modal de son sens. C'est pourquoi le groupe des Verts vous invite à rejeter les trois motions et à laisser le Conseil fédéral statuer sur le recours du TCS. (Applaudissements.)

M. John Dupraz (R). Après le credo écolo pour les transports publics, pour les vélos, et anti-bagnole, je dois dire que comme déclaration de guerre, s'agissant de la complémentarité des transports, on ne peut pas faire mieux !

J'aimerais tout d'abord faire un rappel. Le réseau de trams de ce canton était un des plus performants, comme l'a dit un des préopinants, mais à l'époque, tous partis confondus - les Verts n'existaient pas encore : ils nous auraient peut-être rendu service à l'époque, alors qu'aujourd'hui ce sont plutôt des grains de sable dans les rouages ! - à l'époque, tous partis confondus, de la droite à la gauche, on a décidé de supprimer le réseau de trams pour faire de la place aux voitures. Nous avons commis là une irrémédiable erreur et aujourd'hui nous reconstruisons ce que nous avons démantelé il y a trente-cinq ans.

Dans notre proposition de motion, nous faisons référence à l'article constitutionnel 160A. Si vous voulez être complète dans votre exposé, Madame la Verte, ou Madame la représentante des Verts, il faudrait préciser qu'un des maillons essentiels du plan des transports publics qui a été concocté et qui est en train de se réaliser, c'était le projet de traversée de la rade, qui n'existe plus... (Commentaires.) Vous dites que c'est très bien, mais il faut voir les conséquences ! Vous n'avez pas de bagnoles, vous les Verts, vous roulez dans les voitures des autres ! Robert en sait quelque chose : il n'a pas de permis, ce sont les autres qui le conduisent ! C'est génial, il n'a jamais de problème, il n'a pas besoin de place pour circuler en voiture : il roule dans celles des autres ! (Commentaires.) Le partage, oui, mais partager, c'est une fois je donne, une fois je reçois, ce n'est pas toutes les fois je reçois ! Vous avez une façon de partager qui frise l'égoïsme...

Actuellement, le projet officiel défendu par le Conseil d'Etat, à tort à mon avis, et qui fait l'objet d'un recours, prévoit une diminution de la circulation automobile de 60%. Mesdames et Messieurs, je connais assez bien ce quartier puisque, du fait de mes activités politiques et de défense professionnelle, je prends souvent le train pour Berne. Pour accéder au parking de Montbrillant, sous la poste, ou au parking CFF, cela va très bien, mais pour en sortir, c'est la croix et la bannière. Il y a cinq ou six feux, des chicanes, etc., et si on aménage le tram tel qu'il est prévu, je me demande si le parking de Montbrillant sera encore utilisable.

Les différents auteurs de ces motions poursuivent le même but, soit le dialogue. Nous constatons que le tram se construit sur le territoire de la Ville de Genève et que cette commune - il ne suffit pas de se gargariser à tout bout de champ avec l'autonomie des communes - son exécutif et son Conseil municipal, n'en déplaise aux Verts et aux socialistes, constitue une large majorité pour un processus de médiation. Peut-être ce processus n'est-il pas parfait, peut-être faudrait-il inviter d'autres partenaires ; nous n'y sommes pas opposés, mais ce que nous n'acceptons pas, c'est que le Conseil d'Etat s'entête et ne veuille pas discuter. Cela n'est pas acceptable, parce que, encore une fois, ce tram se réalise sur le territoire de la Ville de Genève. Prétexter que, si on participe à la médiation, il y aura des problèmes, que les projets vont être retardés parce qu'il faudra refaire une enquête publique, persister dans cette voie, c'est la pire des choses, car dans ce cas rien ne se fera. En effet, pensez-vous que la Ville de Genève va voter les crédits pour les aménagements nécessaires, si le projet accepté ne lui donne pas satisfaction ?

Je m'étonne que le Conseil d'Etat ne fasse pas preuve de plus de souplesse, de plus d'entregent, de plus d'esprit de dialogue... (Commentaires.) Oui, le dialogue a eu lieu, mais il y a cinq ans ! Depuis, une majorité de gauche siège au Conseil administratif et il semblerait que cette majorité de gauche n'est plus d'accord avec ce que les précédents magistrats de gauche avaient décidé ! Je n'y peux rien, je constate ! C'est pourquoi nous demandons au gouvernement cantonal de bien vouloir passer à table, non pour déguster le champagne ou partager un bon repas, mais pour discuter de ces projets, parce que, s'il maintient sa position et son refus de discuter, rien ne va se réaliser !

Mesdames et Messieurs les députés, au nom du groupe radical, je vous demande instamment de voter ces trois motions et de les envoyer au Conseil d'Etat. Et j'espère que parmi les conseillers d'Etat - qui en ce moment rient et qui se gaussent..., cela fait plaisir de les voir rire comme cela ! - les quatre magistrats qui ne sont pas directement concernés par ce projet regarderont ce que font les trois autres, qu'ils s'intéresseront aussi à ce dossier et qu'ils inciteront leurs collègues à faire preuve de plus d'esprit de dialogue et d'ouverture vis-à-vis de la Ville de Genève. Voilà notre souhait.

C'est dans un esprit de conciliation que nous déposons ces motions ; nous vous demandons de les approuver, afin que la Ville de Genève trouve une solution avec tous les partenaires pour la construction de ce tram 13, qui nous est cher et auquel nous tenons.

M. Etienne Membrez (PDC). L'idée qui est derrière ces propositions de motions - car c'est à cela qu'il faut en revenir - est de remettre en marche un processus bloqué depuis bientôt deux ans et qui risque de l'être encore quelque temps, si on en croit les propos tenus par le Conseil fédéral qui a le dossier en mains depuis le mois d'août dernier.

En accusant réception d'une missive plaidoyer que lui adressait le comité de soutien du tram 13, on a pu lire dans la presse que ce même Conseil fédéral avait pris soin d'indiquer que la matière lui paraissait fort complexe sur le plan juridique. Et elle l'est effectivement, depuis la notion de projet de grande importance requise par la jurisprudence du Tribunal fédéral, en passant par l'absence d'itinéraires de remplacement suffisant à la suite du rejet d'une traversée de la rade, jusqu'à l'application de certaines lois, voire la violation de principes de notre Constitution fédérale, pour ne citer que ce qu'on a pu lire ou entendre sur le sujet. Tout cela, Mesdames et Messieurs les députés, pour dire que la procédure en cours comporte de grosses inconnues, alors qu'une solution, mise en oeuvre et acceptée par la Ville de Genève, est susceptible d'être exploitée pour débloquer le tout.

L'idée est donc, sans entrer dans les détails, de demander au gouvernement de reconsidérer certains paramètres du projet, tels que le site propre pour le tram, une meilleure sécurité du trafic par la séparation des modes, une optimalisation de l'exploitation du tram, avec une vitesse commerciale améliorée, en vue de déboucher tous ensemble, comme M. Dupraz vient de le dire, vers une réalisation nouvelle et commune. Il me semble qu'il s'agit là d'une chance à saisir, en mettant tous les atouts dans la balance, d'une volonté politique à manifester pour sortir véritablement de l'impasse.

Personnellement, je ne partage pas la crainte de voir fuser de nouvelles oppositions, pour la simple et bonne raison qu'en cas de succès d'une telle concertation il ne pourra plus y avoir dans l'opposition que ceux qui sont véritablement contre le tram, les seuls qui pourraient encore, pour l'instant, logiquement et normalement se manifester. Mais, avec un tel accord, il n'y aura plus d'opposition. Je saisis ici l'occasion de rappeler que, parmi les opposants, il y avait des commerçants !

Mesdames et Messieurs les députés, au nom du PDC et pour tous ces motifs, je vous invite à voter ces propositions de motion et à les renvoyer au Conseil d'Etat.

M. Jean Spielmann (AdG). La proposition de motion que nous déposons vise effectivement à trouver une solution rapide, de sorte que ce ne soient plus les recourants et les avocats qui aient du travail, mais ceux qui construisent les lignes de tram ! Aujourd'hui, il s'agit de trouver une solution pour un projet sur lequel on a déjà beaucoup trop discuté.

Il faut quand même relever ici la responsabilité que portent ceux qui se sont opposés dès le départ et qui ont mis des bâtons dans les roues de ce projet de construction de lignes de tram. Mais le problème de fond aujourd'hui, c'est : que souhaitons-nous construire à la rue de Lausanne et comment aller de l'avant ? Nous avons essayé, depuis le mois d'octobre, de réunir, au sein de la gauche alternative et des Verts, un groupe qui pourrait commencer à discuter et à chercher des solutions intelligentes, car nous avions constaté que le projet tel qu'il se présente aujourd'hui ne correspondait plus à ce qui avait été prévu initialement - c'est-à-dire un tram en site propre - et que la mixité posait problème, non seulement aux différents urbanistes, mais aussi et surtout à ceux qui utilisent les transports publics. Est-il vraiment intelligent de dépenser des millions pour construire un tram allant de la place des Nations à la gare, s'il se trouve pris, sur toute la rue de Lausanne, dans l'encombrement de la circulation entrant en ville de Genève ? N'est-il pas plus intelligent de construire un tram en site propre, permettant d'assurer à ce dernier fluidité et rapidité de circulation ? D'autant que la mixité pose des problèmes de sécurité importants en ce qui concerne les cyclistes. Nous avons eu l'occasion de traiter une pétition à ce sujet, les membres de la commission ont même pu conduire un tram pour se rendre compte de la situation. Or, aujourd'hui, le projet officiel prévoit, sur la partie entrante de la rue, la mixité entre tram, vélos et voitures.

C'est, en l'occurrence, le motif principal de notre opposition à ce projet et de notre volonté de trouver une solution négociée. Dire que cette négociation est illégitime et que les TPG refusent d'y participer, c'est un peu fort, pour ceux qui connaissent bien le dossier. En effet, les TPG eux-mêmes, par la voix de leur directeur, du personnel et du conseil d'administration - quand il n'avait pas encore passé sous le joug du Conseil d'Etat - avaient décidé de participer à la négociation, pour trouver une solution intelligente sur la rue de Lausanne, soit la mise en site propre. C'est ensuite que le Conseil d'Etat a demandé au conseil d'administration des TPG - puisqu'il contrôle cet organe - de revoir sa position et de refuser de participer à une telle médiation, ce qui a été fait, à mon grand regret.

Quelle est la situation aujourd'hui ? Des recours sont déposés et le Conseil fédéral devra trancher. Va-t-il trancher en faveur du projet officiel ou non, personne ne peut le dire, même si ces derniers temps l'Office fédéral des transports semble avoir la volonté de réaliser des lignes de tram en site propre et de donner des concessions en favorisant le site propre, parce qu'il se rend compte que toute autre solution est bâtarde et pose des problèmes.

Du pont de la Coulouvrenière vers la gare, il y a aujourd'hui une mixité entre le tram et les voitures, mais la différence fondamentale avec la rue de Lausanne, c'est que les voitures ont deux pistes, c'est-à-dire qu'elles peuvent se décaler sur la piste de droite et qu'elles ne bloquent pas forcément la ligne du tram, s'il y a un encombrement. Le deuxième élément fondamental au niveau de la sécurité, c'est que les vélos n'empruntent pas la ligne de tram, puisqu'ils circulent normalement sur la droite de la chaussée, avec beaucoup moins de risques que dans le cas d'une mixité complète, sur une seule piste, entre tram, vélos et voitures. Le problème de la sécurité est, à mon avis, le problème principal qui motive notre volonté d'entrer dans cette médiation.

A cet égard, comme nous l'avons dit dans notre motion, dans l'exposé des motifs et dans les considérants, participer à cette médiation ne veut pas dire accepter le projet du TCS et renoncer à tout le projet officiel. Cela veut simplement dire entrer en discussion et faire valoir les positions du Conseil d'Etat et des TPG, dans une solution négociée qui permette à tous les intéressés d'avoir satisfaction. Nous l'avons dit également dans notre motion : il est tout à fait légitime et normal qu'une telle médiation se fasse aussi avec ceux qui ont été à l'origine du projet, avec toutes les associations intéressées, et je suis persuadé qu'il y a là une opportunité, une chance à saisir pour trouver une solution négociée qui mette un terme aux recours et qui permette enfin de construire cette ligne de tram, pas seulement celle de la rue de Lausanne, mais aussi celle des Acacias.

Il a été dit tout à l'heure qu'il fallait aller jusqu'au bout de notre volonté de construire ce tram. Or, dans le fond, notre volonté est de donner la priorité au tram par rapport aux voitures. Quant à moi, je considère qu'il est effectivement nécessaire de construire des trams pour favoriser le transfert modal, pour permettre aux gens de choisir un autre mode de transport que la voiture, mais pour favoriser le transfert modal il faut que les transports publics soient attractifs. Si vous descendez la Servette en voiture tous les matins et que vous vous rendez compte que des bus vous dépassent sans arrêt, un jour ou l'autre l'envie peut vous prendre d'emprunter le bus pour descendre en ville, au lieu de votre voiture. A la rue de Lausanne, ce pourrait être la même chose, si le tram était en site propre.

En revanche, si certains veulent utiliser la construction de lignes de tram pour empêcher la circulation des voitures, ils ne doivent pas oublier qu'ils bloqueront peut-être les voitures, mais que les voitures bloqueront aussi le tram. Et si elles bloquent le tram, elles ne le bloqueront pas seulement à la rue de Lausanne : en effet, le tram a cette particularité que, si on le bloque à un endroit, tout le circuit se retrouve bloqué !

Aujourd'hui, la solution intelligente est de s'asseoir à la table des négociations avec l'ensemble des partenaires. Le TCS a déjà fait, dans la première partie de la médiation, une série de concessions importantes, tant en ce qui concerne la rue de Lausanne qu'en ce qui concerne la place Cornavin et on peut donc espérer arriver à une solution. Nous nous devons d'aller discuter et je ne comprends pas le Conseil d'Etat qui continue à s'entêter et à mandater des juristes pour essayer de gagner juridiquement. En définitive, il gagnera peut-être juridiquement, mais dans cinq ou six ans ! Alors, ne vaudrait-il pas mieux trouver aujourd'hui une solution qui débloque le projet de tram 13 à la rue de Lausanne et qui ouvre des perspectives positives pour l'ensemble du réseau de trams que nous voulons construire à Genève ? 30 millions de francs sont votés à cet effet chaque année dans ce Grand Conseil, mais en quatre ans de nouvelle majorité on n'a pas encore dépensé un franc pour des trams !

Il est de notre responsabilité aujourd'hui de cesser ces recours et ces disputes stériles et de trouver ensemble une solution. Berne ne pourra qu'approuver une position qui sera partagée par tous et cela permettra de mettre fin à cette guerre des transports. Je crois que c'est aussi pour cela que la population nous a élus. Pour notre part, nous avons fait un choix clair : nous voterons pour que le Conseil d'Etat participe à cette médiation.

M. Michel Ducret (R). J'aimerais rappeler que l'avant-projet initial de développement du réseau de tramway à Genève - ce qui veut dire cette ligne de la rue de Lausanne comme toutes les autres extensions du réseau de tram - prévoyait un site propre, ou du moins un site réservé, de manière à atteindre l'efficacité, grâce à une bonne vitesse commerciale, laquelle n'est actuellement pas atteinte - et une bonne sécurité, notamment en ce qui concerne les cyclistes et la conduite même des trams. Je rappelle que la distance de freinage n'est pas la même pour un cycliste, pour une voiture ou pour un tram. Ce sont finalement la sûreté et la crédibilité des transports collectifs qui sont en cause.

Le Conseil municipal de la Ville de Genève s'était prononcé il y a quelques années en faveur de la construction des extensions du réseau de tramway aux normes dites «de métro léger», avec une bonne accessibilité pour les handicapés. Le projet finalement mis à l'enquête est différent. Il est différent, Mesdames et Messieurs, j'aimerais le rappeler ici, à la demande de la Ville de Genève elle-même ! Et avec le défaut suivant : pas de site propre dans le sens entrant en ville, c'est-à-dire quand les usagers sont pressés, avec une vitesse commerciale insuffisante et des cyclistes qui sont ramenés sur les voies au droit de chaque arrêt. Ceci, et notamment l'aspect vitesse commerciale, n'est pas très important quand on considère le trajet à parcourir de la place des Nations jusqu'à Cornavin, mais cela devient beaucoup plus grave le jour où cette ligne sera prolongée jusqu'au Grand-Saconnex : plus la distance est grande, plus la vitesse commerciale devient un élément important pour l'attractivité des transports collectifs.

Aujourd'hui, on a affaire à des oppositions, à des recours. Il y a un problème de délai, et, si le projet est accepté tel qu'il a été déposé à Berne, on va au référendum municipal annoncé contre les crédits de travaux. En l'occurrence, un référendum municipal n'est pas un acte illégitime, comme je l'ai entendu tout à l'heure; par contre, je vois mal comment des associations qui, en principe, sont pour le développement des transports collectifs combattront un référendum qui défend un tram en site propre ! Le résultat de tout cela, ce sera de nouveaux délais et un risque sérieux de refus. Le Conseil administratif de la Ville de Genève l'a compris et en a tiré les conséquences, en renonçant à son propre projet pour se rallier à un projet qui, au fond, n'est que très légèrement modifié en ce qui concerne le tramway lui-même : seuls les aménagements de surface sont différents.

Le groupe radical, comme d'autres, s'inquiète du retard que prend sans cesse le développement du réseau de transports collectifs à Genève, seule solution qui, lue dans la complémentarité des moyens de déplacement, permet d'espérer une stabilisation, voire une diminution des nuisances automobiles et une meilleure utilisation de l'espace urbain pour tous.

Se tromper est certes humain, mais persister est diabolique, dit-on. Le magistrat municipal en charge du dossier l'a bien compris ; il a reçu l'appui du Conseil administratif dans son ensemble et, la semaine passée, du Conseil municipal de la Ville de Genève pour l'ouverture de cette médiation. Dans cette enceinte, ceux qui, hier, défendaient l'autonomie communale en matière d'aménagements urbains routiers ont-ils déjà changé d'avis ? Vingt-quatre heures plus tard, pensent-ils que la commune n'a plus rien à dire sur les aménagements urbains ? Il y a là quelque chose d'illogique.

En l'état, que risquons-nous à accepter cette médiation ? Au bout du compte et au pire, les délais seront les mêmes ! Quant au risque d'un référendum lancé par les associations d'habitants contre la construction du tramway, Mesdames et Messieurs les députés, j'ai peine à y croire. D'autant plus qu'accepter la médiation n'impose pas au Conseil d'Etat de renoncer formellement à la procédure en cours qui est à l'examen au Conseil fédéral. Par contre, et c'est le plus important, l'impact de cette médiation sur l'avenir de l'extension du réseau sera déterminant.

Finalement, les trois propositions de motions qui vous sont faites ce soir n'ont qu'un but : celui de réaliser cette ligne au plus vite, y compris les parkings de dissuasion qui doivent accompagner le développement du réseau de transports publics.

M. Dominique Hausser (S). M. Dupraz a raison quand il dit que ce sont des décisions parlementaires qui ont amené au démantèlement du réseau de tramway dans le canton de Genève, voire dans la région. Et j'aimerais juste rappeler ici que c'est à une voix d'écart que ce parlement a refusé, dans les années soixante, de supprimer le tram 12.

Depuis 1970 environ, le parti socialiste, soutenu ensuite par d'autres, a clairement dit qu'il était nécessaire de développer les transports publics et de bloquer l'extension des voiries visant au «tout à la voiture», au «tout au transport motorisé privé», non pas pour limiter la liberté des conducteurs, mais pour répondre à un objectif fondamental qui est le maintien et l'amélioration de la qualité de la vie en milieu urbain particulièrement. Depuis une dizaine d'années, il existe une ordonnance fédérale sur le bruit et une ordonnance fédérale sur la pollution de l'air que nous devons respecter, au niveau cantonal. Cela implique un certain nombre de mesures favorisant le transfert modal du transport motorisé privé vers le transport public, le vélo, la marche...

Le projet de tram 13 à la rue de Lausanne, comme les extensions côté Acacias, Grand-Saconnex, Meyrin, Annemasse, de type tram ou train, est inscrit depuis une dizaine d'années dans un projet de transports collectifs adopté par le Conseil d'Etat, qui s'est appelé TC 2000, puis TC 2005, et qui a connu un certain nombre d'évolutions. Or, depuis huit ans, on n'a vu aucun des développements qui étaient inscrits dans ce projet. On n'a vu qu'une succession d'oppositions et une succession de débats, tenus soit dans des cercles privés, soit dans ce Grand Conseil, soit de manière publique. L'aménagement de la place Neuve faisait partie de ce plan de développement des transports publics, c'était le résultat d'une négociation qui avait été apparemment accepté par tous les partenaires à la table ronde : pourtant, un référendum a été lancé et la guerre des transports, comme vous l'appelez, qui devait être enterrée à l'issue du débat sur la place Neuve, existe toujours !

Aussi, je m'étonne quand j'entends certains aujourd'hui soutenir le principe d'une médiation avec le Touring Club suisse, sur un projet qui provient uniquement des milieux défenseurs des automobilistes, sans que l'ensemble des partenaires s'asseyent autour de la table et alors qu'on est en fin de processus. A cet égard, je vous rappelle que les processus de réalisation de transports publics sur rail traînent très longtemps, puisqu'il faut demander des autorisations à Berne. C'est d'ailleurs une procédure qu'on pourrait éventuellement un jour revoir : les transports sur rail locaux ou régionaux doivent-ils systématiquement obtenir une autorisation fédérale ? C'est un débat qui mériterait d'être repris.

Cela dit, le projet qu'on appelle aujourd'hui le projet du Conseil d'Etat est le résultat de longues négociations, c'est un projet qui a été discuté sur ses aspects philosophiques ou de politique générale et sur ses aspects techniques. Et quand on me dit aujourd'hui que le site propre est préférable au site mixte, je ne peux pas suivre cet argument, car la démonstration a été faite que le mélange autos et tram peut avoir des avantages, y compris en termes de fluidité. Par ailleurs, il faut savoir qu'avec le projet du Touring Club suisse, à certains endroits de la rue de Lausanne, le trottoir ne fait plus que 1,40 m. A titre d'illustration, à la rue des Deux-Ponts, au niveau de l'arrêt des bus, la largeur du trottoir est de 1,80 m et tout le monde le trouve beaucoup trop étroit, parce que deux ou trois personnes qui sortent ou entrent dans un bus, ou qui se promènent avec une poussette n'arrivent même pas à croiser. C'est dire qu'il y a un certain nombre de difficultés qui doivent être envisagées au cas par cas, situation par situation. Quand certains disent que le projet du Conseil d'Etat ne prévoit pas de site propre pour les vélos, c'est un pieux mensonge. Si, sur un petit secteur, il y a mélange des voies voitures et vélos, ce n'est pas le cas sur l'ensemble de la rue. Nous ne nous trouvons pas dans une situation où la piste cyclable se trouverait sur la voie réservée au tram.

A ceux qui disent qu'il est important de se remettre autour d'une table ronde pour négocier et discuter, je répondrai que, quand les négociations sont menées en amont, nous y sommes extrêmement favorables. En termes de démocratie participative, je suis favorable à ce que l'ensemble des acteurs concernés, citoyens, lobbies, groupes X ou Y, participent à la préparation d'un projet. En revanche, une fois entré dans le processus décisionnel, c'est aux institutions de prendre le relais. Il est donc malvenu aujourd'hui de vouloir recommencer une négociation, alors même que le Conseil fédéral doit, dans de très brefs délais, prendre position sur le recours du TCS. Du reste, si la prise de position du Conseil fédéral n'est pas encore connue, ce n'est peut-être pas tout à fait un hasard : c'est sans doute parce que certains, aussi dans cette enceinte, ont laissé croire qu'il y avait une véritable négociation, qui aboutirait à un compromis...

Aujourd'hui, nous avons tout intérêt à aller de l'avant, pour le respect de la procédure, pour le respect de la démocratie et pour réaliser le plus rapidement possible le développement des transports publics. Un jour, en commission, les TPG nous ont dit que pour poser 100 m de rail, y compris les voies aériennes, ils avaient besoin de quarante-huit heures. En l'occurrence, en termes de réalisation, dès l'instant où l'autorisation est donnée, la réalisation peut donc être très rapide, indépendamment évidemment des considérations d'ordre oppositionnel. Mesdames et Messieurs de l'Entente, vous êtes extraordinaires : cela fait plus de quinze ans que, chaque fois qu'il y a une proposition de développement des transports publics, vous vous ingéniez à trouver des moyens pour ralentir les procédures... (Protestations.) ...et aujourd'hui vous faites exactement la même chose !

Mesdames et Messieurs les députés, une fois de plus, ces motions ont juste été déposées pour empêcher le développement des transports publics !

M. Antonio Hodgers (Ve). Les invites, les considérants de ces motions, et même les propos que tiennent leurs auteurs m'ont surpris.

S'agissant de l'aspect procédure, on parle ici d'une médiation en cours, mais pour qu'il y ait médiation il faut que les deux parties en acceptent le principe. Aujourd'hui, les deux parties sont, d'un côté, le TCS et consorts et, de l'autre, le Conseil d'Etat et les TPG. Or, ces deux dernières instances - là, je contredis M. Spielmann - n'ont jamais accepté le principe d'une médiation. Il n'y a donc pas de médiation en cours, sauf celle à laquelle certains veulent faire croire et à laquelle, comme l'a dit très justement M. Hausser, ils ont fait croire les services juridiques du Conseil fédéral, obtenant peut-être que le Conseil fédéral retarde encore de quelques mois sa décision. Donc, Mesdames et Messieurs, aujourd'hui il n'y a pas de médiation en cours, mais une simple tentative, de la part de certains milieux qui sont évidemment concernés par le sujet mais qui, en termes juridiques, n'ont pas compétence en la matière.

Les auteurs des motions parlent aussi de dialogue. Nous sommes tous pour le dialogue, mais celui-ci a été engagé de longue date par le Conseil d'Etat et a abouti à la proposition qui est aujourd'hui la proposition officielle. Dans ce sens, il est effectivement étrange de demander d'engager le dialogue en toute fin de procédure, alors qu'il ne reste vraiment que la dernière étape à franchir pour obtenir l'autorisation de construire ce tram 13. Nous sommes pour le dialogue, mais, Monsieur Ducrest, même un enfant de 10 ans vous le dirait : le dialogue doit avoir lieu en début de procédure et pas quand les décisions les plus importantes ont été prises et que le dossier a été transmis aux autorités fédérales !

Quant aux menaces, ou disons aux risques de référendum que certains soulignent, ils font partie du jeu démocratique. L'Etat a les moyens de mettre en oeuvre sa politique et si certaines personnes, au niveau de la Ville de Genève, choisissent de lancer un référendum et de refuser les 35 millions de travaux qui sont à la charge de la Ville, eh bien l'Etat devra faire autrement et utiliser les moyens légaux dont il dispose pour que la commune s'acquitte de ses obligations.

J'en viens au deuxième aspect, celui des transports. D'abord, je confirme ce qu'a dit M. Hausser et ce qu'a aussi dit M. Stucki, directeur général des TPG. Peut-être M. Ducret et M. Spielmann, qui sont administrateurs, n'étaient-ils pas présents ou particulièrement concentrés à ce moment-là de la séance, mais, suite aux études faites par les TPG, la direction de cette entreprise a dit clairement n'avoir pas de préférence, en ce qui concerne ce tronçon, s'agissant du site propre ou du site mixte. Les deux solutions ont des avantages et des inconvénients. L'inconvénient principal du site propre à la rue de Lausanne, aux yeux des TPG, c'est que celle-ci est une rue marchande, qu'il y a beaucoup de livraisons le matin et que, pour ne pas bloquer la circulation des voitures, il est certain que les camions et voitures de livraisons s'arrêteraient sans cesse sur les voies du tram, ce qui le ralentirait beaucoup plus que dans le cas d'une voie en site mixte. Cela pour vous dire qu'il n'y a pas de doctrine absolue en matière de site propre et qu'il faut voir de cas en cas. Dans ce cas-ci, les TPG ont estimé que les deux solutions étaient équivalentes.

J'en viens à l'aspect qui dépasse les TPG et qui est celui du transfert modal. Je ne serai pas long, car cela a été dit plusieurs fois : pour favoriser le transfert modal, il ne faut pas juste mettre des bus. Il faut également aménager la rue, de manière que les gens soient incités à prendre plus le bus et moins leur voiture. En l'occurrence, l'Etat a une politique claire : l'objectif politique, en ce qui concerne la rue de Lausanne, est bien évidemment de faire en sorte que celle-ci ne soit plus une pénétrante, ne soit plus une rue de transit, mais qu'elle devienne à terme une rue de quartier, où les gens peuvent tranquillement traverser la rue sans voir passer des voitures à 60km/h. Cet objectif-là est clairement inscrit dans le plan de circulation 2005 et, dans ce sens-là, le transfert modal doit se promouvoir de manière active. La proposition de médiation ne contient pas ces éléments-là.

Pour conclure, je répéterai que notre groupe n'est pas opposé à une discussion avec les partenaires associatifs en ce qui concerne les transports. Encore faut-il l'avoir au bon moment et, surtout, que ces négociations et ces discussions n'aboutissent pas, pour l'Etat, à un renoncement à sa politique des transports, fixée démocratiquement par le parlement et le gouvernement, respectivement par la population dans certains cas. Je vous remercie donc de refuser ces trois motions.

M. Laurent Moutinot. En 1999, le quart des passagers transportés par les Transports publics genevois l'ont été sur les lignes de tram : la 12, la 13 et la 16. C'est ici l'occasion de rendre hommage aux cheminots qui, jour après jour, transportent leurs passagers dans une circulation difficile.

Les trois motions qui vous sont proposées traitent grosso modo de la même problématique, mais soulèvent passablement de questions différentes. Le Conseil d'Etat constate tout d'abord qu'il y a un temps pour discuter et un temps pour décider. S'agissant de la rue de Lausanne, toutes les décisions ont été prises, elles ont été confirmées par le département fédéral compétent et nous attendons une décision du Conseil fédéral, qui ne saurait tarder. Ce nonobstant, nous avons rencontré le Touring Club suisse en novembre pour, dans le cas de la branche Acacias, essayer de prévenir, dans toute la mesure du possible, les difficultés en amont. Il en est résulté un certain nombre de conversations, sous l'égide de M. Gérard Ramseyer, et les parties à cette discussion sont convenues de demander une prolongation du délai à l'Office fédéral des transports, de sorte que d'ici fin avril, dernier délai, on puisse se mettre d'accord sur la branche Acacias.

En ce qui concerne la rue de Lausanne, sur le fond, tout le monde est d'accord pour dire que le seul paramètre pertinent qui module la circulation automobile privée, c'est le réglage des feux de la rue de Lausanne et de l'avenue de France et, au-delà du réglage, la capacité de ces carrefours. Quel que soit le concept retenu, ce sont les feux et la capacité des deux carrefours qui déterminent la circulation.

Sur le fond toujours, le site propre a de toute évidence des avantages, notamment pour les cheminots, pour qui il est plus facile de conduire en site propre que de se battre dans la circulation. Mais souvenez-vous de la Terrassière : à la Terrassière, il y avait à l'origine un site propre et une seule voie montante. Or, à chaque fois qu'une voiture s'arrêtait - pour de bonnes raisons : laisser descendre un handicapé, effectuer une livraison, que sais-je - il y avait blocage. On a donc dû raboter le site propre, pour en faire un site protégé. Et vous voudriez, à la rue de Lausanne, refaire cette erreur. C'est une erreur qui est contre-productive, parce qu'à la rue de Lausanne il y a des besoins multiples, qui sont le passage du tram, celui des véhicules automobiles privés, des cyclistes, des piétons et des livraisons, qui sont extrêmement nombreuses à cet endroit. De ce point de vue là, le projet officiel marie le mieux ces impératifs et c'est surtout celui qui permet de s'approcher le plus des normes OPAir et OPB.

Nous avons reçu une avalanche de courrier de la Ville de Genève pour nous demander de nous joindre à cette médiation. A notre sens, il n'est effectivement pas question de se joindre à une médiation qui ne comprendrait pas tous les acteurs. Par contre, le Conseil d'Etat est évidemment ouvert à discuter d'un certain nombre de choses, nous l'avons dit au TCS, en particulier en ce qui concerne l'aménagement de Cornavin. Nous avons donc écrit le 17 janvier au Conseil administratif de la Ville de Genève, pour le rencontrer aujourd'hui 26 janvier. Nous avons reçu, le 23 janvier, un mail du Conseil administratif nous informant que cette rencontre n'était pas possible parce que M. Ferrazino et M. Tornare sont au Brésil...

M. Claude Blanc. Ils auraient dû aller à Davos, c'est plus près ! (Rires.)

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. J'ai, Mesdames et Messieurs les députés, le plus grand respect pour les qualités de Christian Ferrazino et de Manuel Tornare. Mais si le Conseil administratif souhaite rencontrer le Conseil d'Etat et qu'il n'y ait plus personne à la Ville lorsque MM. Ferrazino et Tornare ne sont pas là, j'avoue que cela me plonge dans un abîme de perplexité... (Brouhaha.) Cela dit, nous recevrons le Conseil administratif quand il aura le temps...

Mesdames et Messieurs les députés, parmi ceux qui réclament cette médiation, il y a, j'en suis persuadé, une grande majorité de personnes qui pensent sincèrement qu'elle est capable de débloquer la situation. Mais je sais aussi qu'un certain nombre de partisans de cette médiation attendent de celle-ci qu'elle plombe définitivement le projet de la rue de Lausanne, sachant que cela fera ressortir d'autres oppositions et que cela obligera le retour de la procédure au niveau de l'enquête publique. Une fois encore, j'ai le plus grand respect pour ceux qui pensent sincèrement que cela peut débloquer la situation, mais ils font fi du fait que d'autres ne sont manifestement pas sincères.

En l'occurrence, la difficulté - c'est la remarque de Jean Spielmann qui m'y a fait penser - c'est que les deux motions comportent une différence majeure. L'une demande que nous nous rallions à la solution TCS. L'autre, M. Spielmann l'a dit, demande de faire discuter tout le monde. C'est notablement différent. M. Spielmann a raison quant au principe - il faut faire participer tout le monde - mais les discussions de ce dernier quart de siècle montrent qu'en matière de transports les accords unanimes et respectés sont rares et qu'à quelques semaines ou quelques mois d'une décision du Conseil fédéral, ouvrir une négociation est un risque majeur. Sur toutes les autres lignes de tram, on le fait et on le fera, mais, pour reprendre l'exemple de la branche Acacias, les divergences actuellement portent sur le fait de savoir si le tram doit passer par la route des Acacias, par l'Ecole-de-Médecine ou par la rue des Noirettes ! Il est assez difficile, sauf à faire des zigzags, de dessiner un tracé cohérent entre des positions pareilles !

A ce stade-ci, Mesdames et Messieurs les députés, s'agissant de la rue de Lausanne, nous n'entendons donc pas modifier le projet, nous n'entendons pas négocier autre chose que le nombre de véhicules qui peuvent y passer et l'aménagement de Cornavin. Nous sommes en relation avec le Touring Club suisse sur ces deux points. En ce qui concerne les Acacias, Lancy et toutes les autres lignes, nous sommes suffisamment en amont pour discuter avec tout le monde, y compris avec la Ville de Genève.

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de rejeter les trois textes qui vous sont proposés. (Applaudissements.)

La présidente. Nous passons au vote de la première motion...

M. Michel Ducret (R). Madame la présidente, nous demandons l'appel nominal. (Appuyé.)

M 1384

La présidente. Bien, nous passons donc au vote de la motion 1384. Celles et ceux qui l'acceptent répondront oui, et celles et ceux qui la rejettent répondront non.

Mesdames et Messieurs les députés, nous n'entendrons pas les réponses, s'il y a toujours autant de bruit dans la salle. Vous avez souhaité un appel nominal, alors je vous demande un peu de silence !

Cette motion est adoptée par 47 oui contre 28 non et 4 abstentions.

Ont voté oui (47) :

Florian Barro (L)

Luc Barthassat (DC)

Roger Beer (R)

Jacques Béné (L)

Janine Berberat (L)

Claude Blanc (DC)

Bernard Clerc (AG)

Anita Cuénod (AG)

Jeannine de Haller (AG)

Marie-Françoise de Tassigny (R)

Gilles Desplanches (L)

Jean-Claude Dessuet (L)

Hubert Dethurens (DC)

Erica Deuber Ziegler (AG)

Daniel Ducommun (R)

Pierre Ducrest (L)

Michel Ducret (R)

John Dupraz (R)

Henri Duvillard (DC)

René Ecuyer (AG)

Magdalena Filipowski (AG)

Jacques Fritz (L)

Pierre Froidevaux (R)

Jean-Pierre Gardiol (L)

Luc Gilly (AG)

Gilles Godinat (AG)

Nelly Guichard (DC)

Janine Hagmann (L)

Yvonne Humbert (L)

Bernard Lescaze (R)

Pierre Marti (DC)

Etienne Membrez (DC)

Jean-Louis Mory (R)

Geneviève Mottet-Durand (L)

Vérène Nicollier (L)

Jean-Marc Odier (R)

Danielle Oppliger (AG)

Catherine Passaplan (DC)

Pierre-Louis Portier (DC)

Jean Rémy Roulet (L)

Myriam Sormanni-Lonfat (HP)

Jean Spielmann (AG)

Walter Spinucci (R)

Micheline Spoerri (L)

Pierre Vanek (AG)

Olivier Vaucher (L)

Salika Wenger (AG)

Ont voté non (28) :

Esther Alder (Ve)

Charles Beer (S)

Dolorès Loly Bolay (HP)

Christian Brunier (S)

Fabienne Bugnon (Ve)

Nicole Castioni-Jaquet (S)

Alain Charbonnier (S)

Jacqueline Cogne (S)

Jean-François Courvoisier (S)

Pierre-Alain Cristin (S)

Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)

Régis de Battista (S)

Alain Etienne (S)

Laurence Fehlmann Rielle (S)

Anita Frei (Ve)

Morgane Gauthier (Ve)

Mireille Gossauer-Zurcher (S)

Mariane Grobet-Wellner (S)

Dominique Hausser (S)

David Hiler (Ve)

Antonio Hodgers (Ve)

Georges Krebs (Ve)

Louiza Mottaz (Ve)

Véronique Pürro (S)

Jacques-Eric Richard (S)

Albert Rodrik (S)

Christine Sayegh (S)

Françoise Schenk-Gottret (S)

Se sont abstenus (4) :

Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)

Philippe Glatz (DC)

Cécile Guendouz (AG)

Michel Parrat (DC)

Etaient excusés à la séance (13) :

Bernard Annen (L)

Michel Balestra (L)

Anne Briol (Ve)

Nicolas Brunschwig (L)

Christian Ferrazino (AG)

Alexandra Gobet (S)

Michel Halpérin (L)

René Koechlin (L)

Armand Lombard (L)

Alain-Dominique Mauris (L)

Pierre Meyll (AG)

Stéphanie Ruegsegger (DC)

Alberto Velasco (S)

Etaient absents au moment du vote (7) :

Thomas Büchi (R)

Juliette Buffat (L)

Hervé Dessimoz (R)

Christian Grobet (AG)

Rémy Pagani (AG)

Louis Serex (R)

Pierre-Pascal Visseur (R)

Présidence :

Mme Elisabeth Reusse-Decrey, présidente

La motion est ainsi conçue :

Motion(1384)demandant la participation de l'Etat de Genève à la médiation concernant le tram à la rue de Lausanne

M 1385

Mise aux voix, cette proposition de motion est rejetée.

M 1388

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Motion(1388)pour une réalisation rapide des projets de tramway, en site propre, en Ville de Genève

M 794-B
a) Motion de Mmes et MM. Fabienne Bugnon, Vesca Olsommer, André November, Robert Cramer et Max Schneider concernant le renforcement des activités de l'Académie internationale de l'environnement. ( -) M794
 Mémorial 1992 : Développée, 3497. Renvoi en commission, 3502.
 Mémorial 1993 : Rapport, 1245. Adoptée, 1274.
M 1244-A
b) Motion de MM. Charles Beer, Pierre Vanek et David Hiler concernant l'Académie de l'environnement. ( -) M1244
 Mémorial 1998 : Développée, 6149. Adoptée, 6151.
M 1271-A
c) Motion de Mmes et MM. Caroline Dallèves-Romaneschi, Jeannine de Haller, Marie-Françoise de Tassigny, Erica Deuber Ziegler, Marie-Thérèse Engelberts, Véronique Pürro, Charles Beer et David Hiler sur le bilan de l'Académie internationale de l'environnement. ( -) M1271
 Mémorial 1999 : Développée, 1790. Adoptée, 1802.
M 1245-B
d) Motion de Mmes et MM. Jeannine de Haller, Marie-Françoise de Tassigny, Erica Deuber Ziegler, Marie-Thérèse Engelberts, Nelly Guichard, Janine Hagmann, Bernard Lescaze, Armand Lombard, René Longet et Françoise Schenk-Gottret concernant le regroupement d'instituts universitaires genevois. ( -) M1245
 Mémorial 1998 : Développée, 7613. Renvoi en commission, 7621.
 Mémorial 1999 : Rapport, 6136. Adoptée, 6156.

5. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur les objets suivants :

Débat

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Je me bornerai à parler de la partie du rapport qui concerne la motion 1245. Un certain temps s'est écoulé depuis le dépôt de cette motion, qui se voulait consensuelle, et l'on attendait avec patience, et impatience, les résultats de la création du Réseau universitaire international de Genève. C'était le prix à payer après la mort programmée de l'Académie internationale de l'environnement. Nous sommes en 2001 et en possession seulement d'un rapport intermédiaire frustrant sur ce Réseau universitaire international de Genève. Que fait-on de ce pôle d'excellence de l'environnement que devrait être Genève en fonction de sa vocation internationale ? Que fait-on des sommes que l'on allouait à l'académie pour la réalisation des programmes du Réseau universitaire international de Genève ? Quelle part du contenu de ces programmes sera dévolue à l'environnement et au développement durable ?

Aussi, nous demandons que se réalisent rapidement ces programmes que l'on nous promet dans le rapport intermédiaire, et qu'un rapport définitif nous soit donné tout aussi rapidement. Sinon, nous serions en droit de douter de l'existence d'une volonté politique de poursuivre les activités de l'ancienne Académie internationale de l'environnement, dans les domaines de l'environnement et du développement durable.

Mme Martine Brunschwig Graf. Mesdames et Messieurs les députés, je ne crois pas que vous soyez en droit de douter de la volonté politique du gouvernement, s'agissant de la mise en place du Réseau universitaire international de Genève, et ce pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, comme vous le savez certainement, la mise en oeuvre de ce réseau a demandé, sur le plan juridique et vis-à-vis de la Confédération, du temps, que nous aurions certainement pu utiliser différemment. Entériner la fondation, pour des raisons juridiques et des exigences liées aux fondations internationales, a pris un peu de temps. Deuxièmement, le Conseil d'Etat a dû intervenir auprès de la Confédération pour s'assurer que celle-ci allait bien respecter les engagements financiers qu'elle avait pris, afin d'assurer un budget correct à ce réseau. Troisièmement, il s'agissait d'engager un directeur exécutif, qui a été engagé il y a deux semaines maintenant. Quatrièmement, il s'agissait de mettre au point la procédure d'appel d'offres, qui va être lancée ces jours, si ce n'est déjà fait. Cinquièmement, il a été donné un mandat à l'un de nos anciens professeurs d'université les plus éminents, le professeur Raffestin, pour suivre et présider le comité scientifique qui, autour du développement durable, va présider au choix des projets.

Aussi, Madame la députée, je ne crois pas que vous puissiez en quoi que ce soit mettre en doute la volonté politique du gouvernement. Si l'Académie de l'environnement a fermé ses portes, vous en avez l'explication dans ce rapport et de façon circonstanciée. Pour ce qui est de la mise en place du réseau, on peut dire aujourd'hui que les éléments techniques, financiers, administratifs et de procédure sont enfin en place. Je précise que, dans l'intervalle et dans les domaines les plus importants, il y a déjà eu un certain nombre de réflexions qui devraient permettre aux projets d'être déposés dans de brefs délais.

Comme je l'ai dit, il y a parfois des embûches de nature juridique et financière, qui ne sont pas ici le fait de notre canton. Je le rappelle : une fondation internationale relève de la juridiction fédérale et il est donc important que les acteurs puissent participer pleinement. Mais je crois pouvoir dire que nous avons été honnêtes, puisque, dans le cadre d'une réponse à d'autres motions, nous avons tenu à vous faire un rapport intermédiaire pour vous annoncer notre intention de vous faire un rapport plus complet, sur la base de projets qui auront été choisis.

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport. 

M 1378
6. Proposition de motion de Mmes et MM. Marie-Françoise de Tassigny, Philippe Glatz, Nelly Guichard, Roger Beer, Mariane Grobet-Wellner et Alexandra Gobet concernant les mesures de soutien scolaire et parascolaire pour les enfants et les adolescents à QI élevé ou «surdoués». ( )M1378

EXPOSÉ DES MOTIFS

Quel que soit le modèle pédagogique choisi, un principe d'épanouissement voudrait que l'on distingue les besoins scolaires spécifiques des enfants dit « surdoués » de ceux ayant un QI dans la moyenne. L'attention qui leur sera portée bénéficiera aussi aux autres élèves car il a été observé qu'en retour, ces élèves pouvant en entraîner d'autres, c'est le niveau de réussite aux examens de toute une école qui peut augmenter (DES 1992).

Quelles que soient les définitions de l'intelligence et les modèles pédagogiques relatifs, il convient d'intégrer la quantification de l'intelligence la plus répandue dans le monde en intégrant la notion de QI dans les programmes scolaires genevois. Cela permettra alors de bénéficier directement de l'apport considérable d'études scientifiques déjà pratiquées à ce sujet.

Si tous les élèves surdoués étaient reconnus, environ 3000 situations seraient signalées à Genève. La reconnaissance des enfants « surdoués » par les enseignants à partir de certains traits de personnalité (plus grande curiosité, caractère autodidacte, ennui à l'école…) et de leur mode d'apprentissage représente une marque d'équité entre enfants, en particulier envers ceux provenant de milieux moins favorisés dont les parents sont parfois moins sensibilisés à la surdouance, et par conséquence une meilleure prévention de l'échec scolaire.

Pour autant, un haut QI ne se voit pas forcément lors d'un entretien psychologique ou par un comportement en classe car des enfants très intelligents (QI à 200) peuvent même mimer les comportements de cancres en refusant l'école ou en s'enfermant dans la solitude (Gross 1992). Or ce QI n'est pas de pratique courante dans les services compétents à Genève. En le devenant et en l'effectuant notamment à la demande des intéressés ou de leurs familles, on éviterait l'écueil de formuler de faux préavis négatifs. En rendant libre la pratique de ce test au coût d'environ 250 F en pratique privée, on donne au système scolaire la possibilité de prendre plus facilement conscience des différences entre enfants sans discriminer ceux dont les parents ont des revenus modestes.

Les surdoués pensent et apprennent différemment des autres enfants. Cela signifie qu'ils ont des stratégies générales propres, incluant la planification, le contrôle et l'évaluation. Ces différences provoquent pour eux une plus grande souffrance psychologique : comprenant vite, ils deviennent inattentifs dès qu'un professeur répète les connaissances à apprendre au point de se mettre dans un état de rêverie et de perdre en définitive le fil du discours. Il existe des techniques dites « d'entretiens guidants » assurés par les enseignants permettant à ces élèves d'utiliser et d'organiser leurs propres capacités autodidactes sans les « étouffer » dans un modèle d'enseignement (Wertsch 1990).

Les filles « surdouées » font facilement l'objet de discriminations entre élèves car on leur reproche de ne pas être assez « féminines » (Freeman 1983). Ceci est responsable d'un taux de troubles dépressifs supérieur aux garçons. Les conseils personnalisés donnés par des enseignants formés à la notion de surdouance aident ces jeunes filles à renforcer leur estime propre et à mieux s'accepter (Arnold et al. 1994).

Comme les autres enfants, les surdoués doivent aussi affronter de vrais défis intellectuels. Fonctionner en permanence à un niveau intellectuel inférieur au sien peut être cause de stress supplémentaire (Freeman 1995). Même s'il ne mentionne pas le cas des « surdoués » et qu'il ne concerne pas toute la scolarité, le projet de programme d'enrichissement scolaire à la carte contenu dans le Projet de réforme de l'enseignement primaire est déjà appréciable. Mais il convient d'offrir des enrichissements scolaires aux élèves qui en font la demande durant toute leur scolarité et non pas seulement au cours de l'enseignement primaire. Pour en faciliter l'accès, il convient également d'organiser des campagnes d'information envers les parents, les élèves et les enseignants quant à la liberté de réaliser jusqu'à deux sauts de classe si les facultés personnelles d'assimilation le permettent.

Parfois, la meilleure possibilité d'enrichissement de l'enseignement est encore apportée par les parents qui connaissent finalement mieux que quiconque la spécificité de leurs enfants (Freeman 1991). En étant soutenus matériellement par la mise à disposition de locaux et financièrement par un budget de fonctionnement, les groupes d'entraide de parents pourraient apporter un soutien nécessaire aux enfants à moindre frais pour le Département de l'instruction publique.

Trop peu est encore connu actuellement de manière fiable sur la qualité des tests de dépistage de la surdouance tels qu'ils sont pratiqués par l'entourage des enfants (on ignore par exemple combien d'élèves ils ne dépistent pas), sur la nature des différences d'intelligence entre enfants surdoués (car le QI n'a pas pour objet de décrire les « hautes » formes d'intelligence) et sur l'efficacité à long terme des modèles pédagogiques spécifiques. De telles voies de recherches devraient être encouragées et soutenues par le DIP.

En espérant que vous ferez bon accueil à cette motion qui détermine l'avenir de notre société, nous vous demandons, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer cette motion à la Commission de l'enseignement et de l'éducation.

Débat

Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Cette motion a pour objectif de mettre en oeuvre des soutiens scolaires de différents types pour les enfants surdoués. Vous me direz : pourquoi aider les enfants surdoués ? Il s'agit en fait de soutenir des enfants ayant une grande soif d'apprendre et une intelligence qui permet de nourrir cet intérêt. A l'instar des enfants ayant des difficultés scolaires, nous nous devons de nous préoccuper de cette catégorie de la jeunesse - environ 3000 enfants à Genève - car, si nous ne le faisons pas, ces enfants peuvent dépérir et même devenir des cancres. Quel gâchis ! Il en va aussi de l'égalité de traitement : donner des moyens aux surdoués, tels qu'on en donne à ceux qui ont d'autres potentiels. De plus, nous devons être attentifs à ces enfants qui ont la chance d'avoir un QI supérieur : peut-être demain seront-ils les Nobel de Genève !

Premièrement, les enseignants sont actuellement démunis pour le signalement de ces enfants, dérangeants ou, pour certains, passifs. Deuxièmement, il serait indispensable d'offrir à ces enfants des programmes d'enseignement différents. Toutes ces spécificités devront être étudiées par la commission de l'enseignement et de l'éducation. Nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de soutenir cette motion.

Mme Janine Hagmann (L). Cette motion est assez intéressante, car il est beaucoup plus habituel, dans cette enceinte, de parler des élèves à problèmes que des surdoués. Encore qu'on puisse se poser la question : un surdoué n'est-il pas aussi un cas quelque peu problématique ?

Les considérants de la motion indiquent que 3% à 5% des enfants sont surdoués, ce qui veut vraisemblablement dire qu'adultes ils vont le rester. Dans cette enceinte, il n'y aurait donc que 4% à 5% de gens surdoués ! Il faudra peut-être que les députés, qui ont facilement un complexe de supériorité, se posent des questions sur leur quotient intellectuel... (Exclamations.) Trêve de plaisanterie, je me réjouis d'étudier cette motion en commission, car je doute personnellement qu'il y ait vraiment 3000 élèves dans la scolarité obligatoire qui montrent des qualités de surdoués.

Je voudrais rappeler que toutes les réformes qui se mettent en place tendent à individualiser l'enseignement. Dans l'idéal, évidemment, aucun enfant ne devrait s'ennuyer à l'école. Dans l'idéal toujours, l'enseignement doit donner une formation équilibrée, qui englobe les savoirs, les savoir-faire et les savoir-être. Un enfant au quotient intellectuel supérieur éprouve peut-être d'autres difficultés relationnelles, physiques, ou manque de sens artistique... Il me paraît vraiment important que la «surdouance» figure dans les phases d'élaboration des projets pédagogiques et de recherche, mais il faudra étudier si la pratique de détection des quotients intellectuels n'offre pas des inconvénients et n'amène pas à des ghettos.

Par expérience, je sais que les parents ont souvent tendance à estimer que leurs enfants sont surdoués. Il est bon que cette motion soit renvoyée à la commission de l'enseignement, comme l'a demandé Mme de Tassigny, car nous pourrons voir, à cette occasion, si le DIP est capable de prendre les dispositions nécessaires pour faciliter la tâche des enseignants avec tous les élèves de leurs classes.

La présidente. La parole n'est plus demandée. Je mets aux voix le renvoi de cette motion en commission.

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission de l'enseignement et de l'éducation. 

M 1213-A
7. a) Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Françoise Schenk-Gottret, Fabienne Bugnon, Alain Etienne, Christian Ferrazino, Laurence Fehlmann Rielle, Alain Vaissade, Rémy Pagani et René Ecuyer concernant le projet d'aménagement du territoire sur la région de Genève Sud. ( -) M1213Rapport de Mme Geneviève Mottet-Durand (L), commission d'aménagement du canton
Mémorial 1998 : Développée, 3097. Renvoi en commission, 3104.
Rapport de M. René Koechlin (L), commission d'aménagement du canton
M 1377
b) Proposition de motion de Mmes et MM. Fabienne Bugnon, Hervé Dessimoz, Hubert Dethurens, Alain Etienne, Laurence Fehlmann Rielle, Luc Gilly, René Koechlin, Georges Krebs, Pierre Meyll, Geneviève Mottet-Durand, Rémy Pagani, Pierre-Louis Portier, Françoise Schenk-Gottret, Walter Spinucci et Olivier Vaucher concernant l'aménagement du territoire de la région Rhône-Arve dite de Genève Sud. ( )M1377

Sous la présidence de M. Rémy Pagani, la Commission d'aménagement s'est à nouveau penchée sur la motion 1213, en présence de Mme et MM. Georges Gainon, chef de la division de l'information du territoire et des procédures, Jean-Daniel Favre, chef de la division de l'aménagement cantonal et régional, Sophie Lin, chef du service du plan directeur et Jean-Charles Pauli, juriste au DAEL.

Le premier novembre 2000, la commission a procédé à l'audition d'une délégation des auteurs de l'étude « Genève Sud durable » notamment afin que par elle ces derniers fassent part de leur appréciation des projets et autres propositions élaborées par le département en regard de ladite étude. La principale conclusion que l'on peut tirer de cette audition conforte la nécessité urgente de planifier l'aménagement du secteur Rhône-Arve - ou secteur Sud - de façon cohérente et concertée. Car les infrastructures routières, autoroutières et ferroviaires dont il est ou sera doté dans un avenir plus ou moins proche y entraîneront une croissance accrue de la demande d'implantation des activités et des personnes. Le projet d'urbanisation de cette région du canton doit par conséquent être élaboré en priorité, comme s'évertue à le répéter depuis des lustres le chargé du présent rapport et co-auteur du projet de loi sur les ZAP (zones d'aménagement prioritaire), encore pendant devant la commission; un travail qui doit nécessairement impliquer les communes et les citoyens.

A l'issue de ses travaux, la Commission d'aménagement, constatant la pertinence des questions que soulève la motion 1213 d'une part, et la difficulté d'autre part de savoir en quoi les études menées jusqu'à ce jour, notamment par le DAEL, y répondent, a décidé de rédiger une nouvelle motion invitant le Conseil d'Etat :

à examiner dans quelle mesure le projet de concept d'aménagement cantonal du territoire, voté par le Grand Conseil, l'élaboration en cours du plan directeur ainsi que les études menées tant par le DAEL que par les communes concernées, répondent aux invites et préoccupations exprimées dans la motion mentionnée ci-dessus ;

à présenter au Parlement un rapport qui relate le résultat de cet examen.

Tel est le texte de la motion qu'en conclusion de ses travaux, la Commission d'aménagement soumet à vos suffrages en souhaitant, Mesdames et Messieurs les députés, que vous lui réserverez un bon accueil. Nous vous recommandons de refuser la motion 1213 et de la garder à titre de référence et d'accepter la motion 1377.

(M 1377)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Les raisons qui motivent la présente motion sont formulées dans le rapport de la Commission d'aménagement chargée d'étudier la motion 1213. Nous vous prions par conséquent de bien vouloir vous y référer au moment d'examiner le texte qui vous est présentement proposé.

Proposition de motion(1213)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :

- l'importance d'un aménagement du territoire cohérent et répondant à des objectifs sociaux, environnementaux, économiques et culturels ;

- la difficulté croissante à mettre en oeuvre des politiques en matière d'aménagement du territoire compte tenu des découpages institutionnels, qui ne correspondent plus aux découpages fonctionnels ;

- la pertinence et l'importance de la notion de développement durable comme approche de l'aménagement du territoire ;

- l'étude Genève Sud Durable, consistant en une application des principes du développement durable à l'aménagement du territoire et portant sur le territoire de six communes genevoises situées entre l'Arve, l'Aire et la frontière franco-suisse ;

invite le Conseil d'Etat

à développer un projet d'aménagement du territoire visant à mettre en application les principes d'action de l'étude Genève Sud Durable :

• une approche intercommunale des questions d'aménagement du territoire ;

• la nécessité d'un rééquilibrage de l'urbanisation entre les quartiers pour retrouver une mixité sociale et fonctionnelle à l'intention des personnes dont la vie quotidienne se déroule dans le quartier ;

• l'articulation des localisations des futures zones de logement, d'emplois, de commerces et de services aux infrastructures de transports publics pour susciter un report modal et éviter d'avoir à construire de nouvelles routes, conformément à la motion 1196 ;

• le lancement d'un concours en vue de la création d'un concept d'aménagement pour l'ensemble du périmètre Bachet de Pesay-La Praille. L'objectif est de créer un pôle d'agglomération cohérent dont l'accessibilité est axée sur les transports publics ;

• la création d'une entité bocagère et la réalisation d'un réseau agro-écologique de l'Aire à l'Arve.

Débat

M. Alain Etienne (S). Tout d'abord, j'aimerais saluer une nouvelle fois ici le travail accompli par le groupe qui a élaboré l'étude «Genève Sud Durable», comprenant des partis politiques dont les Verts et les socialistes, ainsi que les associations de protection de la nature, le WWF et des habitants réunis au sein de la Fédération d'associations d'habitants de Genève Sud. Ce travail remarquable se voulait être une réflexion approfondie sur le développement durable, en quelque sorte le premier Agenda 21 local à Genève.

Cette étude a fait l'objet d'une motion qui a été déposée par des députés de l'Alternative, le 24 avril 1998. C'est cette motion qui a été étudiée par notre commission.

J'aimerais maintenant dire que je suis assez surpris du contenu du rapport de la commission rédigé par le rapporteur, M. Koechlin. Alors que nous avons travaillé à la rédaction d'une motion, je pensais que M. Koechlin allait nous relater les travaux de la commission. Mais rien ou pratiquement rien n'est dit sur nos travaux et je le regrette.

Pourtant nous avons eu deux auditions très intéressantes, celle des communes genevoises concernées par le projet, à savoir Carouge, Plan-les-Ouates, Lancy, Troinex, Veyrier et Bardonnex, ainsi que les auteurs de l'étude de Genève Sud Durable.

Lors de nos travaux, nous avons pu évidemment reparler du stade de la Praille et de son centre commercial, ainsi que de la fameuse étude «Praille-Bachet» qui a fait l'objet d'un concours et dont la présentation nous a été faite le 31 mai 2000.

Nos travaux ont donc servi à reconnaître que l'étude Praille-Bachet n'est qu'une réponse partielle à la motion 1213, que le stade de la Praille, et son centre commercial, était un élément nouveau dans la reconnaissance de cette centralité et qu'en fait l'étude de Genève Sud Durable prend en compte un territoire beaucoup plus large.

Certes, les associations ont été consultées suite à l'étude Praille-Bachet et le département a tenu compte dans une certaine mesure de l'étude de Genève Sud Durable. L'étude mettait aussi l'accent sur l'importance de l'intercommunalité en matière d'aménagement du territoire. La réponse du Conseil d'Etat devra nous permettre d'en savoir plus sur les aménagements projetés sur la route de Saint-Julien, dont notamment ce Grand Médiateur dont on ne sait pas encore vraiment à quoi il correspond. Et puis il y a ce grand parc des Communes-Réunies, cette grande idée de faire bénéficier les habitants d'un grand espace de détente, mais je me demande si cette grande idée pourra résister longtemps à d'autres impératifs...

La question fondamentale pour toute cette région est certes les transports et la circulation. Cette séance de la commission a permis d'entendre plusieurs avis et de reparler de la fameuse voie Cottier. La commune de Carouge a pu nous confirmer ses inquiétudes par rapport aux problèmes de circulation qui voient le jour dans ce secteur. Nous avons aussi appris par exemple que Plan-les-Ouates a remis à ciel ouvert un ruisseau là où la route interquartier devait passer. Son maire nous a affirmé que si celle-ci devait se faire elle devrait donc passer ailleurs.

Et puis, surtout, il faut replacer toute cette réflexion par rapport aux discussions que nous avons eues sur le concept de l'aménagement cantonal que nous avons voté. Il s'agit maintenant de savoir dans quelle mesure celui-ci répond à la motion 1213. C'est ce que nous demandons au Conseil d'Etat en lui renvoyant cette nouvelle motion.

Est-ce que par exemple l'entité bocagère sera préservée ? Est-ce que les pénétrantes de verdure identifiées par le nouveau plan directeur permettront de pérenniser les caractéristiques du paysage de la campagne genevoise ? Est-ce que certains quartiers de Lancy-Sud pourront être dédensifiés comme le demande Genève Sud Durable ? L'important étant de rééquilibrer l'urbanisation entre les quartiers. Est-ce que l'intercommunalité deviendra réalité ?

Tout cela, nous aurions pu le lire dans le rapport de M. Koechlin mais, en l'absence de ces considérations, je tenais à vous donner ces quelques éléments. Je regrette d'autant plus ce rapport que M. Koechlin n'a pu s'empêcher de donner un éclairage partisan, en profitant au passage de faire de la publicité pour son projet de loi concernant les ZAP, comme il les appelle, les «zones d'aménagement prioritaires». Je ne vais pas ouvrir le débat aujourd'hui car nous l'aurons certainement un autre jour, mais je constate encore une fois que, lorsque l'on parle à M. Koechlin de développement durable, il voit instantanément et uniquement des projets d'urbanisation. Le nouveau plan directeur cantonal, que le parti libéral n'a pas soutenu sous la forme de son concept, permettra d'éviter un nouveau rectangle d'or dans cette région.

Permettez-moi donc de zapper et de vous reparler de la motion 1377 qu'il s'agit de renvoyer au Conseil d'Etat afin qu'il nous présente un rapport. Le débat n'est donc pas clos, nous aurons l'occasion de reparler du développement de cette région.

Le parti socialiste vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, face à l'unanimité de la commission, à voter la motion 1377 en remplacement de la motion initiale.

La présidente. La parole n'est plus demandée. Conformément à ce qui a été décidé par le Bureau et les chefs de groupe, je mets tout d'abord aux voix la motion 1377.

M 1377

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Motion(1377)concernant l'aménagement du territoire de la région Rhône-Arve dite Genève Sud

M 1213-A

Mise aux voix, cette proposition de motion est rejetée. 

M 1375
8. Proposition de motion de Mmes et M. Christian Brunier, Françoise Schenk-Gottret et Laurence Fehlmann Rielle pour un tunnel du Mont-Blanc moins dangereux et moins polluant. ( )M1375

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le 24 mars 1999, l'opinion publique découvrait le drame qui venait de se dérouler dans le tunnel du Mont-Blanc. L'horreur était au rendez-vous. 39 morts étaient dénombrés.

Quelques jours plus tard, on découvrait avec consternation que la sécurité de ce lieu était fortement déficiente.

Immédiatement, sous les pressions médiatiques et populaires, les Autorités françaises et italiennes annonçaient qu'elles allaient prendre des mesures vigoureuses pour rénover ce lieu et le mettre aux normes de sécurité, ce qui est bien la moindre des choses.

Depuis, le chantier de remise en état a commencé.

Alors que nous pensions que les travaux allaient être conformes à la circulaire interministérielle française de 1981 qui régit la sécurité des tunnels et qui contient des normes sécuritaires reconnues, nous savons maintenant que cette rénovation sera bien en deçà de ces directives. A titre d'exemple, l'élargissement du tunnel, évoqué au lendemain de la catastrophe, est abandonné sur l'autel de la rentabilité.

Plus grave encore. Puisque ces travaux ne correspondent pas aux normes définies, les Autorités ont décidé désormais de revoir ces dispositions à la baisse. On est bien loin des promesses des responsables qui annonçaient que cette rénovation allait être à la pointe de la sécurité.

Cette situation est inacceptable et le silence de notre canton sur cette question est intolérable. La République et canton de Genève doit tout mettre en oeuvre pour garantir la sécurité de ce lieu.

En plus de la problématique liée à la sécurité, il faut se soucier des aspects environnementaux si nous ne voulons pas sacrifier les vallées de Chamonix et d'Aoste. Cette région est un patrimoine naturel exceptionnel. La santé de la planète concernant l'ensemble de l'humanité, nous devons faire usage de notre droit d'ingérence environnementale afin de limiter la pollution dans cette région. Pour atteindre cet objectif, il est impératif de limiter la circulation des poids lourds et de promouvoir le ferroutage. C'est dans ce sens que notre motion incite le gouvernement genevois à agir.

Finalement, nous incitons le canton de Genève à participer au financement du Mémorial qui sera édifié au printemps 2001, près de la plate-forme du tunnel du Mont-Blanc, pour rappeler au monde le souvenir de cette terrible catastrophe et à chacun des organismes gestionnaires leurs responsabilités.

Pour garantir la sécurité des usager-ère-s de ce tunnel et pour nous conformer aux principes de développement durable, nous vous invitons à soutenir, Mesdames et Messieurs les député-e-s, cette motion.

Débat

M. Christian Brunier (S). Au lendemain de la catastrophe du tunnel du Mont-Blanc, en mars 1999, tout le monde promettait que ce tunnel allait être sécurisé pour éviter un tel drame à l'avenir. Les propriétaires annonçaient très solennellement cette mise en conformité, annonçaient aussi le doublement des voies, en tout cas au niveau du projet, et l'installation d'une aération enfin au top. Mais, l'émotion retombée, les soucis de rentabilité, les envies de profit à n'importe quel prix ont malheureusement et odieusement repris le dessus. Au placard les belles promesses des propriétaires, à la poubelle les beaux projets ! La rentabilité est de nouveau plus importante que la vie humaine !

Les gestionnaires de ce tunnel n'ont rien compris, n'ont rien appris. Plus grave : puisque les travaux de rénovation ne répondent pas à la circulaire interministérielle française de 1981 qui régit la sécurité des tunnels, les autorités françaises sont tout simplement en train de revoir et d'adoucir cette norme. C'est tout à fait scandaleux. Je suis révolté par tant d'hypocrisie et dégoûté par cette cupidité morbide.

Genève, en tant qu'actionnaire, en tant qu'administratrice des sociétés exploitant ce tunnel, ne peut continuer à se taire. Cette motion vise à nous faire réagir face à l'inacceptable. Même le droit du travail n'est aujourd'hui pas respecté dans les travaux de rénovation du tunnel. Vous savez que les travailleurs qui sont actuellement occupés à la réfection de cette installation condamnent aujourd'hui les conditions de travail inacceptables que leur offrent les propriétaires du tunnel.

Cette motion touche aussi à la problématique environnementale. Les vallées de Chamonix et d'Aoste appartiennent au patrimoine environnemental mondial. Rétablir un trafic poids lourd, qui est en pleine expansion actuellement, serait inadmissible d'un point de vue environnemental et contraire au développement durable tant loué à l'intérieur de ce parlement. La qualité de vie doit reprendre le dessus. C'est pourquoi cette motion reprend ce que la population locale, tant au niveau italien qu'au niveau français, demande, c'est-à-dire de proposer un quota journalier maximal admissible de camions dans ce tunnel, de réaliser des études d'impact environnemental sérieuses et indépendantes sur cet ouvrage, et surtout de promouvoir le ferroutage. Cette idée fait son chemin, puisque dernièrement nous apprenions - on peut s'en réjouir - que l'exécutif européen disait son espoir que les autorités françaises et italiennes concentrent rapidement leurs efforts sur le lancement du projet de tunnel ferroviaire sur la ligne Lyon-Turin, qui permettrait de décharger l'axe du Mont-Blanc au niveau des camions. Le gouvernement socialiste français a aussi fait un effort dans ce sens et nous nous en réjouissons.

La motion demande enfin que l'Etat de Genève soutienne financièrement la construction du mémorial, à la mémoire des victimes de l'accident du Mont-Blanc. Nous reconnaissons que c'est chose faite, bien que de manière modeste.

Nous avions pensé renvoyer cette motion à la commission des affaires régionales pour l'étudier plus à fond, mais je crois qu'il y a urgence aujourd'hui. C'est pourquoi le groupe socialiste vous demande, Mesdames et Messieurs les députés, de la renvoyer immédiatement au Conseil d'Etat. Je vous remercie d'avance de votre soutien.

M. Laurent Moutinot. Je me réjouis de cette motion. J'avais d'ailleurs, lors d'une interpellation urgente de M. Hiler, suggéré que votre parlement s'intéresse à cette problématique.

Il se trouve que, lorsque le Conseil d'Etat m'a désigné pour représenter la République au sein du conseil d'administration de la société italienne du tunnel du Mont-Blanc, j'avais demandé un rapport sur la sécurité du tunnel. J'ai reçu ce rapport - avant la catastrophe - je l'ai lu et je le tiens à votre disposition. Vous verrez qu'en tant qu'administrateur je n'avais pas, à la lecture de ce rapport, à avoir des craintes. La réalité a bien évidemment été différente... Après la catastrophe, le canton de Genève a été le premier à réagir, en demandant une réunion d'urgence du conseil d'administration des deux sociétés, l'italienne et la française, et ces demandes ont été acceptées.

Aujourd'hui, la situation est la suivante. Dans les deux sociétés, le pouvoir décisionnel est extrêmement faible, parce que la catastrophe a eu pour effet de faire remonter le dossier tunnel du Mont-Blanc au niveau des ministères et que, concrètement, pratiquement, nous n'avons pas de grande maîtrise sur ce dossier. Je vous le dis, parce que vos invites sont ciblées sur les sociétés. Je pense qu'il serait plus opportun d'imaginer d'autres types de démarches, notamment à l'adresse du groupe européen d'intérêt économique qui a été mis en place pour précisément gérer de manière uniforme cette structure ; c'est là qu'il faudrait agir, plus qu'au niveau des deux sociétés concessionnaires, italienne et française.

Je peux en tout cas vous assurer qu'à toutes les séances de conseil d'administration auxquelles j'ai participé, j'ai à chaque fois rappelé la politique fédérale en matière de trafic à travers les Alpes et insisté sur la nécessité d'un transfert modal en faveur du rail. La première fois que j'ai dit cela, à Rome, juste après la catastrophe, on m'a traité à peine différemment que si j'avais prononcé une obscénité. Deux ans après, je constate une très nette évolution, pas encore suffisante, mais on semble se rendre compte - c'est peut-être la conséquence heureuse de cette triste catastrophe, qui a été un véritable électrochoc dans certains milieux, en tout cas en Italie - qu'il y a, en matière de transports, des choix à faire.

Mesdames et Messieurs les députés, j'accepte cette motion et j'y répondrai volontiers. Néanmoins, s'agissant des démarches à entreprendre, je pense que ce ne sont pas ces invites-là qui devraient être rédigées. De ce point de vue, un passage en commission me permettrait de vous donner plus d'indications et vous permettrait, cas échéant, de déterminer d'autres modes d'action qui vous paraîtraient souhaitables.

Enfin, en ce qui concerne le mémorial, Monsieur Brunier, c'est exact : le Conseil d'Etat a décidé de participer financièrement à la construction de ce mémorial.

Voilà, je ne veux pas demander formellement le renvoi en commission, mais il me semble que vous devriez envisager d'approfondir cette question en commission.

M. Walter Spinucci (R). Le groupe radical appuie fermement la motion présentée par nos collègues du parti socialiste. Nous demandons néanmoins qu'elle soit renvoyée à la commission des affaires communales, régionales et internationales, ainsi que nous en étions convenus d'ailleurs avec les motionnaires.

M. Christian Brunier (S). Mesdames et Messieurs, après avoir entendu les propos de M. Moutinot, le groupe socialiste soutiendra le renvoi en commission !

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission des affaires communales, régionales et internationales.

M 1376
9. Proposition de motion de Mmes et MM. Pierre-Pascal Visseur, Bernard Lescaze, Charles Seydoux, Louis Serex, Thomas Büchi, Jean-Louis Mory, Marie-Françoise de Tassigny, Nelly Guichard, Antonio Hodgers, Christian Brunier, Jacqueline Cogne, Pierre-Alain Cristin, Nicole Castioni-Jaquet, Alberto Velasco, Gilles Godinat, Danielle Oppliger et Marie-Paule Blanchard-Queloz demandant une salle de musique de danse pour les jeunes. ( )M1376

EXPOSÉ DES MOTIFS

Depuis toujours, les jeunes que vous êtes ou que vous avez été aiment danser et s'amuser durant leurs soirées libres.

Genève disposait, il y a encore peu de temps, de deux lieux qui se prêtaient à la danse et à la musique, l'ancien Palais des expositions et le Palladium.

L'ancien Palais des expositions a été démoli et remplacé par une salle de concerts dans le complexe d'Uni-Mail, qui s'est avéré trop exigue et génératrice de nuisances auprès du voisinage.

Ces mêmes nuisances, principalement sonores aux abords immédiats des salles de concerts, ont également conduit les autorités à interdire ceux-ci au Palladium.

Les zones industrielles de Genève disposent encore de nombreux locaux inoccupés, que leurs propriétaires seraient disposés à louer, voire à vendre, mais ils ne peuvent le faire en raison de l'affectation de ces zones à des activités purement artisanales ou industrielles. Or, c'est précisément dans ces zones que les nuisances sonores et les problèmes de parking pourraient être résolus sans problème majeur.

En attendant qu'une solution définitive puisse être trouvée, nous demandons que des dérogations provisoires soient accordées afin que ces concerts puissent avoir lieu sans nuisance pour le voisinage et que les jeunes puissent à nouveau disposer de lieux pour danser et se divertir.

Débat

M. Pierre-Alain Cristin (S). Cette motion, qui fait suite à la fermeture de Jackfil et aux embûches qu'a connues la location du Palladium pour l'organisation de soirées techno, nous ramène au problème récurrent du manque de salles de loisirs pour les jeunes à Genève, endroits où ils peuvent se rencontrer, danser, s'amuser à moindre prix, sans être obligés de se rendre dans les discothèques de la place, hors de prix, où la musique ne leur correspond pas et dans lesquelles ils ne sont, pour la plupart du temps, pas acceptés parce que trop jeunes ou en baskets.

Les problèmes de voisinage entre générations ou populations aux divertissements différents ne sont pas nouveaux. En effet, les musiques pour jeunes de toutes les époques ont été bruyantes et souvent incomprises, comme tout ce qui est nouveau. Mais il y a aussi le problème des déplacements qui y sont liés. En effet, les jeunes comme tout un chacun se déplacent, soit en voiture, mais plus régulièrement en scooter, et puisqu'il s'agit d'un endroit de rencontre ils s'interpellent, discutent entre eux, ce qui provoque du bruit... Mais est-ce bien admissible qu'il y ait de la vie dans nos rues ?

Député d'une commune suburbaine, je peux témoigner, sans occulter les problèmes qui sont à la genèse de cette motion, que le fait de fermer un établissement de ce type, même s'il n'est pas dédié à la techno, est déstabilisant pour les jeunes. En effet, à la place de pouvoir se rencontrer dans les lieux adaptés à leurs besoins, à leur culture, ils n'ont plus d'autre alternative que de se rencontrer dans la rue ou dans des lieux sauvages, avec toutes les conséquences négatives pour les principaux intéressés et pour l'image des jeunes dans notre société.

C'est pourquoi nous devons nous poser la question de savoir comment résoudre ces problèmes de voisinage et comment permettre aux jeunes de pouvoir organiser des soirées en toute liberté. Il nous a donc semblé judicieux d'explorer la piste des zones industrielles. En effet, ces zones seraient des endroits bien adaptés, de par le fait qu'elles ne sont pas proches des habitations, que le parking y est aisé et qu'elles sont relativement bien desservies par les transports publics. Ainsi, les jeunes et les moins jeunes pourraient venir s'y défouler en toute liberté.

Mais ceci pose un problème : les zones industrielles ne sont pas déclassables d'un coup de baguette magique ! C'est pourquoi, dans l'esprit de vouloir finalement résoudre ce problème et plus spécifiquement celui des dérogations aux régimes des zones, point décisif de cette motion, le groupe socialiste vous propose de renvoyer ce texte en commission de l'aménagement qui, forte de la pétition déposée ce jeudi, se mettra au travail rapidement et trouvera, avec tous les intervenants, une solution qui, j'en suis sûr, satisfera tout le monde.

Mme Nelly Guichard (PDC). Je déplore aussi que les salles sises en ville ne puissent plus être mises à disposition des jeunes, soit qu'elles aient disparu, soit que les nuisances que ces activités créaient soient devenues trop grandes. Je me résous donc, comme d'autres, à tenter de trouver d'autres solutions et je pense, comme la motion le propose, que c'est du côté des zones industrielles qu'il faudrait trouver les solutions en question. Je suis également favorable au renvoi de cette motion en commission de l'aménagement, puisque le sujet y est déjà abordé, et je me rallie donc, au nom de mon groupe, à cette proposition.

M. Roger Beer (R). La problématique des salles pour les jeunes a déjà été abordée un certain nombre de fois dans cette enceinte. Nous sommes donc très satisfaits que cette proposition de motion ait été déposée, même si la proximité des prochaines élections pourrait faire croire qu'il y a un lien... Remarquez, si cela peut faire avancer les choses, c'est très bien !

La proposition de renvoyer cette motion en commission de l'aménagement me semble également excellente, parce que les problèmes posés par ce type de salle - bruits, nuisances et autres - sont effectivement liés à une question de zone. En l'occurrence, il y a, à Genève, une certaine rigidité qui fait que, lorsqu'on veut changer l'affectation d'une zone, on bute systématiquement sur la loi, sur l'application ou l'interprétation extrêmement sévère des critères. Ce serait ici l'occasion de voir ce qui existe en zone industrielle.

Comme le disent les motionnaires, il y a actuellement des gens qui seraient d'accord de louer des locaux, d'autres qui seraient d'accord de vendre. On sait que certains locaux sont vides, parce qu'ils sont inadéquats pour une utilisation industrielle et que les nouvelles industries qui s'implantent préfèrent construire leurs propres locaux. Il y a là une occasion à saisir pour utiliser les quelques bâtiments vides qui existent en zone industrielle. En plus, la desserte par bus serait facile, ce qui réglerait le problème des déplacements. Enfin, au niveau des nuisances, il est clair qu'en zone industrielle, le samedi à 2 h du matin, on ne dérange pas beaucoup de monde !

Le groupe radical est donc d'accord de renvoyer cette motion en commission de l'aménagement.

M. Laurent Moutinot. Mesdames et Messieurs les députés, vous me demandez usuellement d'être strict dans le respect des zones ; aujourd'hui, vous me demandez une dérogation. Je pense que cette dérogation, effectivement, s'agissant d'activités musicales à gros volume sonore et à grand public, se justifie. Toutefois, avant de me lancer spontanément dans une politique dérogatoire en la matière, je souhaite avoir l'appui formel de votre Grand Conseil et, surtout, que nous examinions en commission d'aménagement les conditions, les limites, les cadres à donner à ces dérogations. En effet, il y a évidemment la techno, mais il y a aussi toute une série d'autres activités sympathiques, culturelles et musicales, qui souhaitent s'établir en zone industrielle. Pour que l'égalité de traitement soit respectée, il faudra donc qu'on sache très exactement dans quelle circonstance et à quelles conditions ces dérogations sont admissibles.

En ce qui concerne la deuxième invite de la motion, soit construire une maison pour la techno, je ne suis pas sûr qu'une construction avec un stempel «Etat de Genève» dessus soit absolument compatible avec la culture techno... Je l'ai dit hier soir aux jeunes pétitionnaires : ils trouvaient, eux aussi, que ce n'était pas forcément la meilleure solution et qu'un peu de souplesse en la matière aurait certainement des avantages pour eux, comme pour les finances de l'Etat !

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission d'aménagement du canton.

M 1379
10. Proposition de motion de Mmes et MM. Pierre Vanek, Gilles Godinat, Anita Cuénod, Pierre Meyll, Salika Wenger, Bernard Clerc, Danielle Oppliger, Jeannine de Haller, Rémy Pagani, Luc Gilly et Cécile Guendouz sur la remise en état des immeubles dégradés. ( )M1379

EXPOSÉ DES MOTIFS

En adoptant, l'année dernière, la révision de la LDTR prévoyant la possibilité pour le DAEL d'ordonner des travaux d'entretien d'immeubles dont la structure et l'habitabilité sont en péril, le peuple genevois a donné un mandat clair aux autorités cantonales pour mettre fin à la politique, menée par certains propriétaires, consistant à délaisser délibérément leurs immeubles afin de pouvoir ensuite les démolir en invoquant le coût excessif de leur réhabilitation.

Tel fut le cas, par exemple, des immeubles démolis à l'angle de la rue des Délices et de la rue de Lyon, qui étaient protégés par la loi Blondel, des immeubles de la rue de Chêne-Bougeries, démolis abusivement sur ordre de l'ancien conseiller d'Etat Philippe Joye, ou encore de l'immeuble angle rue de la Terrassière et rue de la Flèche, qui devait être rénové en vertu d'un plan localisé de quartier adopté à cet effet.

Aujourd'hui, on continue à voir, en ville, notamment à la rue de Berne, à la rue Rousseau, à la rue de la Servette, des immeubles comportant des échafaudages ou des éléments de protection mis en place depuis des années pour protéger les passants des chutes de matériaux provenant de façades dégradées. Les travaux de rénovation de la Villa Schaek à Villereuse, dont le maintien est également prévu par un plan localisé de quartier, n'ont toujours pas été engagés malgré les promesses faites, alors que le chantier des nouveaux immeubles est mené tambour battant.

Cette situation est inacceptable. Maintenant que les nouvelles dispositions de la LDTR ont été confirmées par un récent arrêt du Tribunal fédéral, le Conseil d'Etat se doit d'établir l'inventaire des immeubles dont le défaut d'entretien entraîne des dégradations mettant en péril leur habitabilité et leurs structures et d'ordonner aux propriétaires d'exécuter les travaux nécessaires, à défaut de les faire exécuter aux frais de ces derniers par inscription d'une hypothèque légale.

Au bénéfice de ces explications, nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que vous réserverez un bon accueil à la présente motion.

Débat

M. Rémy Pagani (AdG). Cette motion, nous avions espéré ne jamais devoir la déposer, d'autant que nous n'imaginions pas qu'une nouvelle crise du logement se développerait aussi rapidement dans notre cité. Evidemment, avec le retour de la crise du logement, un certain nombre de pratiques caractéristiques des années de spéculation reviennent au galop. C'est ainsi que nous constatons, depuis deux ou trois ans, qu'un certain nombre de bâtiments dans notre ville - par exemple à la rue de Berne, à la rue Rousseau, à la rue de la Servette - sont garnis d'échafaudages de protection ou sont en état de décrépitude avancée. On les laisse sciemment se dégrader pour obtenir, soit des autorisations de rénover, de démolir ou de reconstruire, soit tout simplement le départ des locataires, pour revendre l'immeuble vide à un bon prix, comme cela se pratiquait de manière systématique pendant les années 80.

La loi qui a été votée voici une année permet, aujourd'hui, au département de faire un inventaire des immeubles qui se dégradent, qui sont volontairement retirés du marché pour faire grimper les prix des autres logements et des immeubles considérés, ou qui ont fait l'objet de refus d'accords et notamment de PLQ - je pense là à la villa Schaek, dans le triangle de Villereuse. Nous estimons que le département doit faire cet inventaire et doit appliquer la LDTR, pour que le parc de logements reste disponible et que la pénurie ne s'accentue pas trop. Le département doit faire en sorte que les propriétaires mettent sur le marché un certain nombre de logements qui sont aujourd'hui vides.

Nous vous proposons, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer cette motion en commission des travaux, pour étudier les modalités de cet inventaire et en déterminer notamment les conditions. En l'occurrence, il ne s'agit pas d'inventorier l'ensemble des immeubles du canton, mais de répertorier quels sont les immeubles qui sont sciemment retirés du marché, ou qu'on laisse volontairement se dégrader pour faire partir leurs locataires. Ensuite, il s'agira de nous assurer que le département mène une politique rigoureuse en ce qui concerne l'application de la LDTR, laquelle permet au département, je le rappelle, d'imposer la rénovation et la remise sur le marché de ces appartements, bon marché pour la plupart.

M. Pierre-Alain Cristin (S). Cette motion, qui demande de dresser un inventaire des immeubles méritant une remise en état, part d'un bon principe. En effet, quoi de plus pitoyable, au beau milieu d'un quartier, qu'une habitation dégradée ou dangereuse pour ses habitants ? C'est pourquoi, en adoptant la révision de la LDTR qui donne autorité au DAEL pour ordonner l'entretien de certains immeubles, nous nous sommes dotés d'un outil fort pour préserver notre patrimoine immobilier. Mais, ici, est-ce que le jeu en vaut vraiment la chandelle ? En effet, le travail de titan que demanderait un tel recensement est énorme. De plus, il faut noter que ce travail s'effectue déjà au sein du DAEL, où le service LDTR agit ponctuellement. Ajoutons que le SIB a été dans le sens de cette motion, en effectuant en 1999 un recensement en ville de Genève, dans le cadre de l'étude «Rénover Genève» qui, depuis, est devenue un document de travail pour le département. De surcroît, les locataires eux-mêmes peuvent intervenir auprès du département pour demander des travaux d'entretien.

Ces précisions étant données, j'aimerais insister sur le travail considérable que représenterait un tel inventaire. En effet, on peut imaginer le nombre de personnes et le temps nécessaires pour inspecter tous les immeubles, car l'entretien, Mesdames et Messieurs les députés, ne s'arrête pas aux façades. En plus, il ne pourra s'agir d'une simple inspection visuelle en se promenant dans le canton, car le mauvais état d'un immeuble ne se perçoit pas forcément de l'extérieur. L'article 42A de la LDTR nous parle de «défaut d'entretien». En conséquence, il faudra vérifier l'entier des bâtiments et, ensuite, maintenir l'actualité d'une telle étude, ce qui représente aussi un travail considérable.

C'est pourquoi, prenant en compte ces divers éléments, le groupe socialiste souhaite le renvoi de cette motion en commission des travaux, pour faire le point sur les moyens qui pourraient être mis à disposition pour atteindre le but de cette motion.

M. Olivier Vaucher (L). Permettez-moi tout d'abord de vous rappeler que la LDTR est une loi unique en Suisse. Seul le canton de Genève connaît une législation qui rend la rénovation d'un immeuble locatif aussi difficile.

En effet, en fixant des conditions strictes pour obtenir l'autorisation et, surtout, en ne permettant pas au bailleur de répercuter le coût des travaux sur les loyers, comme le prévoit le droit fédéral du bail à loyer, la LDTR freine la rénovation à Genève.

D'après les statistiques fédérales, Genève rénove deux fois moins vite son parc immobilier que la moyenne nationale. Bien loin d'encourager ce genre de travaux, comme le déclare son article premier avec beaucoup d'humour, la LDTR est au contraire la cause principale de cet état de fait.

La gauche de ce canton, sous prétexte de protéger les locataires, a en réalité mis en place un système de contrôle de la propriété privée. Il lui est en effet insupportable que des propriétaires gèrent eux-mêmes leur immeuble. Il en résulte qu'un grand nombre d'immeubles ne reçoivent pas les travaux de rénovation qu'ils mériteraient. Les premières victimes de cette situation sont, vous l'aurez bien compris, Mesdames et Messieurs les députés, ceux-là mêmes que vous prétendez soutenir : les locataires.

Sans vouloir ouvrir tout le dossier du logement, car il est long, un parallèle peut être fait avec la construction de logements dont nous avons aujourd'hui, comme vous le savez tous et comme certains des préopinants l'ont dit, grandement besoin : en bloquant systématiquement les projets, en introduisant mille chicanes et en prônant la «dédensification», la gauche, et plus précisément l'Alliance de gauche a provoqué la pénurie de logements que nous connaissons tous aujourd'hui. Une pénurie qui, d'ailleurs, vous arrange fort bien, puisqu'elle vous permettra à nouveau d'accuser les régisseurs et les promoteurs de tous les maux de la planète, mais dont les victimes, à nouveau, Monsieur Vanek, sont les jeunes couples et les familles qui cherchent à se loger.

Nous reviendrons bientôt devant vous avec des propositions constructives qui nous permettront de répondre à ces besoins urgents.

Mesdames et Messieurs de l'Alliance de gauche, l'introduction de l'article 42A dans la LDTR et votre motion sont un magnifique aveu d'échec. Votre politique a échoué. Sous couvert de protection des locataires, vous avez créé un parc d'immeubles fort mal entretenus.

Vous vous êtes alors demandé comment il vous fallait corriger le tir. La solution raisonnable aurait dû être d'assouplir la loi ! Hélas, votre réponse a été, comme on aurait d'ailleurs pu s'y attendre, de contraindre les vilains qui ne rénovent pas leurs immeubles à le faire, sous la menace de sanctions, d'inscription d'une hypothèque légale et j'en passe.

Bravo ! Mesdames et Messieurs les députés de l'Alliance de gauche, croyez-vous vraiment que vous allez parvenir à de bons résultats avec cette méthode ? Croyez-vous qu'obliger un propriétaire qui n'en a pas les moyens à faire des travaux soit efficace ? Permettez-moi d'en douter.

Ne pensez-vous pas plutôt qu'il faudrait offrir les conditions légales appropriées aux propriétaires concernés pour leur permettre de rénover normalement, comme les propriétaires d'immeubles des autres cantons suisses peuvent le faire ?

Après avoir tout fait pour que les propriétaires d'immeubles locatifs du canton ne puissent pas rénover, vous voulez les y obliger. Bien ! Mais vous ne leur permettez toujours pas de rentabiliser normalement ces travaux. Vous les placez entre le marteau et l'enclume ! Ce n'est pas comme ça que vous attirerez à Genève des investisseurs et que vous rétablirez la confiance qu'ils doivent avoir en notre système pour y investir.

Un mot encore, pour terminer. Ne vous faites pas trop d'illusions sur les moyens que l'article 42A de la LDTR donne au département. Le Tribunal fédéral, dans son récent arrêt rendu suite au recours de la Chambre genevoise immobilière, a clairement précisé que cet article ne donnait pas plus de pouvoir à l'Etat que les dispositions de la loi sur les constructions, qui permettent déjà au département d'ordonner des travaux lorsqu'un immeuble présente un problème de salubrité ou de sécurité.

Mesdames et Messieurs les députés de l'Alliance de gauche, je suis heureux de vous le dire : vous avez manqué votre coup. La CGI a été déboutée par le Tribunal fédéral, certes, mais déboutée avec raison, puisque l'interprétation du Tribunal fédéral de l'article 42A de la LDTR est très restrictive et ne permet pas, je vous le rappelle, à l'Etat d'agir aussi férocement contre les propriétaires du canton que vous le souhaiteriez.

Pour toutes ces raisons, nous espérons que la commission rejettera cette motion.

M. Claude Blanc (PDC). Je reviens à l'exposé un peu fumeux de M. Cristin, plus exactement à ses conclusions, tout autant qu'aux conclusions de M. Vaucher. Sans aborder le fond, je vous rappelle, Mesdames et Messieurs les députés, que cette motion invite simplement le Conseil d'Etat à dresser un inventaire. Or, je ne vois vraiment pas ce que la commission des travaux pourra faire pour aider le Conseil d'Etat à dresser un inventaire. Envoyez, si vous voulez, cette motion au Conseil d'Etat et, ensuite, nous travaillerons sur l'inventaire ! Vous avez cette fâcheuse habitude, quand vous ne savez pas que faire avec un projet, de l'envoyer en commission... En l'occurrence, que voulez-vous que la commission des travaux - j'interviens parce que je la préside ! - fasse de ce texte ? Que le Conseil d'Etat fasse d'abord cet inventaire, sur la base de la motion ; ensuite, nous verrons ce que la commission des travaux peut faire. En l'état, nous ne pouvons pas faire nous-mêmes l'inventaire et le Conseil d'Etat n'a pas besoin de nous pour le faire.

M. Rémy Pagani (AdG). Sans allonger, je dirai qu'il est effectivement plus simple de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.

Cela dit, par rapport à tout le fatras des affirmations de M. Vaucher, je voudrais rétablir un fait. Il est vrai, Monsieur Vaucher, que nous sommes le seul canton suisse à avoir une LDTR et je m'en félicite, parce que Genève est aussi la seule ville suisse qui n'a pas perdu un habitant depuis les années 60. Zurich, qui n'a pas ce type de loi, a perdu 100 000 habitants. Le centre-ville de Zurich et de toutes les villes suisses, ainsi que la majorité des villes européennes, ont perdu des habitants, du fait de la spéculation, du fait des changements d'affectation qui ont eu lieu au centre-ville. C'est une réalité, ce sont des faits que vous devriez apprendre à lire, Monsieur Vaucher. Nous, nous nous glorifions de voir que la population habite encore des quartiers populaires comme les Pâquis, les Eaux-Vives ou la Jonction. Cela est dû aux batailles des habitants, des locataires qui, grâce à la LDTR, ont vu le niveau des loyers et leur existence au centre-ville protégés. Vous avez beau raconter tout ce que vous voulez, cette réalité est incontournable, Monsieur Vaucher.

Cela étant, il y a effectivement, dans vos milieux, un certain nombre de propriétaires qui ne supportent pas d'être contrôlés au niveau des loyers pratiqués, qui ne supportent pas d'être limités dans leurs abus. Face à ceux-ci, nous estimons que l'Etat doit faire prévaloir les droits de la population et le bien commun.

Je propose que nous renvoyions cette motion au Conseil d'Etat.

M. Laurent Moutinot. Mesdames et Messieurs les députés, je suis plutôt partisan d'un renvoi à la commission du logement, qui connaît bien la LDTR et qui pourra recevoir rapidement toutes les indications souhaitées. Il me semble plus judicieux de traiter ce sujet en commission, plutôt que vous receviez un rapport écrit du Conseil d'Etat, mais je le ferai si vous le souhaitez. Sur les invites de cette motion, je dirai trois choses. La première, c'est qu'un travail d'inventaire ne me paraît pas utile, compte tenu de l'excellent inventaire du SIB sur lequel nous travaillons et compte tenu des informations que nous avons d'autre part. C'est une question de priorité dans le travail.

Deuxièmement, je suis navré pour les auteurs de la motion, mais je suis quand même obligé de le dire : l'immeuble 2, rue de Lyon cité en exemple, a été autorisé à la rénovation le 30 mai 2000, avec un bonus à la rénovation à la clé, mais ensuite il y a eu un recours. Ce n'est donc pas le département qui aurait manqué de s'occuper de ce dossier. Pour la villa Schaek, c'est à peu près la même situation, en ce sens que le chantier a débuté et qu'ensuite une demande complémentaire a été déposée qui vient seulement d'être délivrée.

Je vous expliquerai volontiers, pour tous les cas qui vous posent problème, ce que nous avons fait ou pas fait. A ce jour, nous avons examiné dans une dizaine de cas l'opportunité d'appliquer les nouvelles dispositions de la LDTR. Nous en sommes au premier stade qui consiste à interpeller le propriétaire. Il est vraisemblable que, dans quelques cas, il y aura des suites ; dans d'autres non, parce que précisément les choses se normalisent. Je vous expliquerai volontiers en détail comment nous appliquons la LDTR, en commission du logement de préférence, parce que vous pourrez y poser des questions. Mais si vous voulez un rapport écrit du Conseil d'Etat, vous l'aurez, c'est à votre bon vouloir.

La présidente. Monsieur Pagani, êtes-vous d'accord avec la proposition de renvoyer cette motion à la commission du logement ? Bien, nous passons au vote.

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission du logement. 

M 1386
11. Proposition de motion de Mmes et MM. Anita Frei, Jacques-Eric Richard, Alain Charbonnier, Cécile Guendouz, David Hiler, Salika Wenger, Pierre Vanek, Jean Spielmann, Françoise Schenk-Gottret, Christine Sayegh, Albert Rodrik, Rémy Pagani, Dominique Hausser, Christian Grobet, Gilles Godinat, Luc Gilly, Magdalena Filipowski, Laurence Fehlmann Rielle, René Ecuyer, Erica Deuber Ziegler, Jeannine de Haller, Régis de Battista, Anita Cuénod, Jean-François Courvoisier, Jacqueline Cogne, Bernard Clerc, Fabienne Bugnon, Christian Brunier et Marie-Paule Blanchard-Queloz contre les compromissions de notre canton avec le World Economic Forum. ( )M1386

EXPOSÉ DES MOTIFS

Les considérants de cette motion urgente en constituent l'exposé des motifs. Nous vous invitons donc à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.

Débat

M. Pierre Vanek (AdG). Mesdames et Messieurs les députés, je serai très bref, ce d'autant qu'en répondant tout à l'heure à mon interpellation le Conseil d'Etat, ou du moins Mme Micheline Calmy-Rey a été assez largement dans le sens de cette motion ; ce d'autant également que certains d'entre nous ont rendez-vous demain à 6 h du matin, à la place Neuve, pour notre départ collectif pour cette manifestation à Davos... (Exclamations.) C'est dire si je n'entends pas prolonger ce débat.

Cette motion demande deux choses, au nom de quatre considérants. Elle dit notre attachement aux libertés publiques, aux droits démocratiques, à la liberté d'expression dont la liberté de manifestation est partie intégrante. Ceci est très important. Quand Mme Calmy-Rey a répondu tout à l'heure, elle a indiqué que le Conseil d'Etat avait eu à coeur, lors du Sommet social de l'ONU, de permettre l'expression de toutes les opinions et des manifestations extrêmement diverses dans notre ville. Elle a rappelé que l'interdiction de manifester l'an passé à Davos avait été cassée par le Tribunal fédéral et que, du point de vue du Conseil d'Etat, les autorités auraient dû délivrer une autorisation de manifester, à des conditions concrètes à définir, bien entendu.

Or, les autorités grisonnes et les autorités fédérales, qui les ont suivies, ont engendré autour de cette manifestation un climat d'hystérie. Elles ont monté les tours, ont désigné tous les manifestants potentiels comme des casseurs. Je lis à ce propos des choses surréalistes. Dans une dépêche d'agence de presse, hier, le conseiller fédéral Joseph Deiss parle de «précautions à prendre alors que l'on appelle littéralement à détruire Davos»... Parmi d'autres bêtises de cet ordre-là, on apprend que la police chargée de la répression de cette manifestation fait des essais pour arroser les manifestants au purin... (Exclamations.) ...ce qui visiblement réjouit certains paysans parmi nous qui, à d'autres occasions, Monsieur Dupraz, étaient moins réjouis de l'intervention de la police...

Enfin, tout cela n'est pas très sérieux. Nous pensons donc, pour faire court, que nos forces de police doivent être retirées du dispositif qui transforme Davos en camp retranché des multinationales. Notre police devrait être une police citoyenne, au service des libertés publiques, et ne peut pas être au service de l'interdiction unilatérale de l'expression d'un courant d'opinion dans ce pays. C'est la première invite de la motion. En l'occurrence, la seule chose qu'a répondue M. Ramseyer, suite à l'interpellation de M. Luc Gilly d'hier, c'est que tout ceci se fait dans le cadre de l'aide confédérale et qu'il est légitime que des cantons nous appellent à l'aide, puisque nous les appelons aussi à l'occasion. Là, je dois dire que, si nous les appelons, c'est en rapport avec des conférences ayant lieu dans le cadre de l'ONU, qui est une organisation internationale reconnue. Nous ne les appelons pas à l'aide pour protéger des séances organisées par des clubs privés, et je pèse mes mots en parlant de club privé s'agissant du World Economic Forum !

Monsieur Ramseyer, j'aimerais que vous réfléchissiez à cette idée-ci : en matière d'aide à la Confédération et à nos Confédérés des Grisons, plutôt que de dépêcher cent ou deux cents gendarmes à Davos, la véritable aide aurait probablement consisté à leur dire que nous n'étions pas d'accord de marcher dans la combine comme des moutons de Panurge, à leur prêcher les libertés démocratiques, à leur expliquer comment nous gérons, à Genève, la liberté de manifester. Or, ce n'est pas ce qui a été fait, nos gendarmes sont transformés malgré eux en garde prétorienne des multinationales et sont au premier rang. Nous demandons donc qu'ils soient rappelés.

S'agissant de la deuxième invite de la motion, et je finirai là-dessus, je dirai simplement qu'à nos yeux la République et canton de Genève est une collectivité publique démocratique, soit une organisation d'un autre ordre que celle qui réunit les mille plus riches multinationales, les mille plus riches entreprises privées du monde, qui se sont constituées en club privé pour défendre un programme politique qui n'est évidemment pas celui de cette République et qu'ils vendent à coup de pleines pages achetées dans la presse, comme le faisait feu Kim Il Sung à l'époque ! Nous n'avons rien à faire dans ce club, nous n'avons pas à figurer dans cette liste de multinationales, aux côtés de Nike, McDonald's, Coca-Cola, Sony et Dieu sait qui d'autre !

Genève est une des deux ou trois collectivités publiques à tremper dans ce club, à être membre de la Fondation du Forum économique mondial : nous demandons que Genève se retire. Et cela n'influera en rien sur nos relations avec les entreprises établies sur notre territoire, contrairement à ce que me disait M. Lamprecht il y a quelques mois. Le minimum de décence veut qu'on soit capable d'établir une claire distinction entre la République démocratique que nous sommes et les entreprises privées que j'ai citées, qui ont leur propre agenda et derrière lesquelles nous n'avons pas à nous encolonner.

Ce sont donc les deux simples invites que je vous propose de voter ce soir, afin, comme je l'ai dit hier, de sauvegarder un tant soit peu l'honneur démocratique de la Suisse à travers cette prise de position du canton de Genève. C'est un service que nous rendons à la Confédération et c'est donc au véritable esprit d'aide confédérale que j'en appelle pour vous demander de voter cette motion !

Mme Myriam Sormanni-Lonfat (HP). Utiliser des moyens musclés - forces de police en grand nombre, blocage d'accès, refus d'autorisation de manifester - aura pour conséquence d'être ressenti par certains manifestants comme une provocation légitimant des débordements, avec les dégradations ou les violences pouvant en résulter. Certes, je n'approuve pas la violence, mais je crois qu'en l'occurrence, si on veut l'éviter, il convient justement de ne pas avoir recours à tout ce dispositif et ce barrage policier.

Je ne pourrai malheureusement pas me rendre à Davos, car j'ai un cours. Mais j'ai toujours participé à des manifestations : je n'ai jamais dégradé quoi que ce soit, je n'ai jamais été arrêtée par la police dans une manifestation quelle qu'elle soit, je n'y suis jamais allée pour semer le «petchi», mais là je crois que, si les autorités ne lâchent pas un peu de lest, il ne faudra pas s'étonner des conséquences. Cela ne veut pas dire qu'on approuve, mais là, ma foi, si on empêche les manifestants d'utiliser leurs droits démocratiques, ils vont répondre, c'est tout ! Aussi, Monsieur Ramseyer, si vous pouvez faire quelque chose, faites-le, s'il vous plaît !

M. Claude Blanc (PDC). M. Vanek nous a avertis qu'il serait bref parce qu'il doit se lever de bonne heure... Eh bien, figurez-vous, Mesdames et Messieurs, que moi, demain, je fais la grasse matinée... (Rires.) ...et que par conséquent j'ai tout mon temps !

Je vais donc prendre le temps qu'il faut, en commençant par les considérants. Le premier considérant parle de «notre attachement aux libertés publiques et aux droits démocratiques». Permettez-moi, Mesdames et Messieurs, de faire quelques commentaires sur votre attachement aux libertés publiques et aux droits démocratiques. Il y a cinq heures, vous vous êtes assis sur les droits les plus essentiels des citoyens, en essayant de contourner la volonté populaire qui s'était exprimée par le biais d'un référendum : à la place de la loi contestée, vous en avez voté une autre qui lui ressemble comme une soeur, dans d'autres termes ! Pensez-vous que c'est cela, le respect des droits démocratiques ? Puisque vous parlez des droits démocratiques, je répète que, tout à l'heure, vous avez commis cette forfaiture de vous asseoir sur le droit, de bafouer les droits essentiels et constitutionnels des citoyens qui avaient signé le référendum sur le parking de la Nautique. Et maintenant, vous venez nous donner des leçons, à 23 h, alors que vous voulez vous lever de bonne heure... Eh bien, permettez-nous de discuter abondamment ce soir des droits démocratiques, au sujet desquels j'espère que quelques-uns de mes collègues vont prendre le relais... (Exclamations et rires.)

Dans votre motion, vous vous attaquez ensuite au fait que notre police cantonale, à vocation essentiellement citoyenne, n'a pas à se transformer en «garde prétorienne des multinationales». Cela, c'est plutôt rigolo, mais la réalité, on vous l'a déjà expliqué tout à l'heure, c'est que le canton des Grisons, qui est un canton suisse comme Genève, même si ses dirigeants ne sont pas tous de l'Alliance de gauche, a le droit, très légitimement et conformément aux accords intercantonaux, de faire appel aux cantons suisses quand il l'estime nécessaire. Je vous rappelle, Mesdames et Messieurs, que l'année passée, alors que la garde prétorienne était un peu plus lâche, il y a eu d'énormes dégâts à Davos. Le gouvernement grison est donc fondé à penser que, s'il ne réagit pas, s'il ne prend pas des précautions, il y aura cette année aussi d'énormes dégradations à Davos. Vous avez déjà prouvé à maintes et maintes reprises que, même quand on autorise vos manifestations, vous ne pouvez pas vous empêcher de casser. Le gouvernement des Grisons est donc tout à fait fondé à demander l'appui des cantons confédérés, le Conseil fédéral d'ailleurs s'y est joint. C'est l'ordre public qui le veut, c'est la collaboration confédérale qui l'exige : nous devons répondre à l'appel du canton des Grisons.

Ensuite, vous demandez que Genève se retire du World Economic Forum, sous prétexte que ce n'est pas une organisation démocratique. Certes, il y a de tout à ce forum, mais je constate quand même qu'on attend la venue de quatre-vingts chefs d'Etat, chefs de gouvernement ou ministres, dont un que j'ai remarqué en lisant la presse ce matin : le nouveau président du Mexique. Ce nouveau président, dont on attend un certain nombre de changements au Mexique, fait son premier voyage en Europe à l'occasion du Forum de Davos, où il aura l'occasion de rencontrer des dirigeants d'un certain nombre de pays. Je crois que c'est un élément positif. Je ne connais pas la liste de tous les gens qui viennent à Davos, ni les raisons de chacun, mais j'ai remarqué que le nouveau président du Mexique aura ainsi l'occasion de prendre contact avec certains dirigeants politiques et certains dirigeants économiques, de manière à entrer dans le concert des Nations. A cet homme qui n'avait pas fait de politique jusqu'alors, qui a promis qu'il allait entreprendre des changements au Mexique, qui a déjà donné quelques gages de ces changements, comme à d'autres qui se déplacent à Davos, nous aurions bien mauvaise grâce de dire : «Rentrez chez vous avant d'avoir pu rencontrer les personnes que vous désiriez rencontrer !»...

Il me reste une minute, Madame la présidente ? Eh bien, je vous en fais grâce !

Mme Vérène Nicollier (L). Je dirai d'abord que Davos aujourd'hui, c'est aussi du travail pour demain. Puis, j'aimerais relever que notre attachement aux libertés publiques s'applique aussi aux activités remarquables que déploie l'institution du World Economic Forum, une institution qui est à l'honneur de notre ville et qui, entre autres activités, sert de relais entre le monde international et la Genève locale, entre la petite économie et la grande, qui sert de tremplin et de lien entre des acteurs qui, sans ce forum, ne se rencontreraient pas.

Si le World Economic Forum est amené à prendre les mesures de sécurité que nous connaissons aujourd'hui, c'est bien parce que les manifestants n'ont pas su, au cours des dernières rencontres à Davos, raison garder. La violence et la déraison, le vandalisme et le manque de discernement ont été les moteurs et les catalyseurs de manifestations devenues par conséquent des outrages aux forces de l'ordre et à la bienséance. Aucune recherche de dialogue, des critiques publiées par les médias contre les institutions au sens large - aussi bien que contre le World Economic Forum évidemment - qui depuis plusieurs décennies essaient toutes de favoriser les rencontres et les dialogues entre les pays du monde privilégié et ceux qui le sont moins.

D'autre part, des accords avec Berne, et ceci a été dit par les préopinants, sont prévus déjà depuis des décennies au niveau de la sécurité. Il est donc tout à fait normal que nos forces de l'ordre aillent prêter main-forte dans ce genre de situation et nous n'avons pas à intervenir. Enfin, je souhaite bon voyage à ceux qui partent demain matin : le paysage est très beau, il est enneigé, et vous verrez qu'à Davos tout se passe parfaitement bien !

M. Pierre Froidevaux (R). Nous voici en fin de soirée, face à une motion typique de l'Alliance de gauche, typique de celles dont nous avons été abreuvés au cours de cette législature. Alors que nous avons un ordre du jour extrêmement chargé, alors que certains points étaient attendus par le public, nous traitons une motion que je recommande au Conseil d'Etat de considérer selon la valeur légale qu'il accorde habituellement aux motions, c'est-à-dire de la lire et de la ranger dans un classeur suspendu !

Cette motion a deux invites, la seconde demande que Genève se retire immédiatement du World Economic Forum. Mesdames et Messieurs les députés de la majorité, le World Economic Forum est une vitrine extraordinaire pour la Suisse, et pour la Genève internationale à laquelle vous faites référence régulièrement. Pourquoi refuser de participer à cette vitrine ? M. Blanc vous l'a rappelé, plus de quatre-vingts chefs d'Etat ou ministres seront présents ce week-end à Davos. L'ensemble de ces personnalités ont pu fixer un rendez-vous, certes privé, où pourront se rencontrer autant les décideurs politiques que les décideurs économiques. Imaginez, Monsieur Vanek, l'importance que cela peut avoir pour chacun d'entre nous, pour l'ensemble de la Suisse, comme pour l'ensemble des relations économiques, sociales et politiques.

Vous entendez manifester librement. La Confédération, elle, a prévu un dispositif pour protéger les participants à ce forum. Comment pouvez-vous, Monsieur Vanek, reprocher à la Confédération d'assurer l'ordre public ? Etes-vous vraiment contre l'ordre public ? Par ailleurs, s'il se trouve que la police genevoise doit participer à ce dispositif, vous en êtes largement responsable. Je vous rappelle que, lors de manifestations internationales, nous avions prévu d'engager des citoyens genevois équipés d'une tenue qui ne vous convient pas, celle de l'armée ! Nous avions prévu que des citoyens puissent assurer la protection des sites, ce que vous avez régulièrement refusé. Nous avons dû, pour l'assemblée extraordinaire de l'ONU en juin, faire appel à l'aide fédérale et au soutien de différents cantons pour assurer la sécurité à Genève, aux côtés des effectifs genevois. Aujourd'hui, de la même manière que les Confédérés nous ont aidés, nous devons aider le canton des Grisons à assurer la sécurité de ces ministres et hommes d'Etat.

Monsieur Vanek, vous nous faites la leçon, mais nous, nous essayons de protéger la démocratie, nous essayons d'établir le dialogue. Vous voulez créer le désordre, eh bien créez le désordre à l'Alliance de gauche et laissez le forum se dérouler normalement ! (Applaudissements.)

M. Bernard Lescaze (R). A nouveau, comme souvent en fin de soirée, nous sommes face à un texte qui n'est qu'une provocation ! Une provocation qui, comme à plusieurs reprises, concerne bien entendu un sujet d'actualité.

Mesdames et Messieurs, je comprends mieux, ce soir, pourquoi vous avez refusé, hier, de parler du texte sur l'Europe : l'Europe est, pour l'avenir de ce pays et de ce canton, un sujet autrement important et cela pouvait donc attendre, tandis que le texte provocateur sur Davos méritait l'urgence ! Eh bien, chacun a l'urgence qu'il mérite et qu'il souhaite !

Ce soir, nous allons, non pas décortiquer votre texte, mais rappeler que le World Economic Forum - qui est né dans ce canton il y a près de trente ans, qui a apporté un certain nombre d'emplois, de ressources économiques et qui a surtout contribué formidablement, qu'on le veuille ou non, à l'image internationale de Genève - ce forum, vous n'avez décidé de le contester, suivant en cela la mode, que depuis une année ou deux ! Il aurait fallu le faire avant et pas maintenant que Davos et les organisations créées autour du Forum de Davos par le World Economic Forum sont devenues des lieux qui, certes, sont utiles à des relations d'affaires internationales, mais qui surtout, et c'est là le rôle de Davos que vous voulez occulter, sont des lieux de dialogue et de paix, rares dans le monde actuel où la violence règne souvent en maîtresse. C'est cela que je trouve regrettable dans les manifestations qui pourraient se produire à Davos.

Pour ma part, je suis favorable à la liberté d'expression où que ce soit et je pense qu'effectivement les gens hostiles à une certaine forme de mondialisation ont le droit de manifester. Ils le font d'ailleurs fort bien au Brésil, à Porto Alegre, où a lieu la véritable riposte ; s'ils le veulent, ils peuvent le faire aussi ailleurs. Mais manifester, susciter la violence dans un lieu qui doit servir au dialogue, ce n'est pas acceptable et, de ce point de vue, nous sommes heureux, nous sommes satisfaits que la police genevoise puisse contribuer à essayer de maintenir le calme dans ce lieu.

Dois-je rappeler que c'est à Davos que Palestiniens et Israéliens essaient de renouer tant bien que mal un dialogue extrêmement difficile ? Est-ce cela, Mesdames et Messieurs les députés de l'Alternative - car je vois sur ce texte les signatures de toute l'Alternative - que vous voulez finalement détruire ? J'espère que non.

J'aimerais encore ici dire qu'à l'évidence l'appel que la Confédération a fait aux forces de sécurité genevoises est conforme au lien confédéral. Plusieurs ici l'ont rappelé : nous devons, que nous le voulions ou non, nous y soumettre.

En réalité, les deux invites que vous proposez sont inacceptables. La première, parce qu'elle est simplement hors de propos, hors du temps, hors de la réalité, hors de notre pouvoir et de notre compétence de députés. Quant à la seconde, elle est la plus imbécile, permettez-moi de vous le dire ! Il est au contraire fort judicieux que le canton de Genève soit membre de la Fondation du World Economic Forum. Nous devons ici être reconnaissants, quoi que nous en pensions, au professeur Klaus Schwab d'avoir créé ce forum à Genève. Dans le courant du XXIe siècle, on reconnaîtra que cette fondation, créée en 1971, a représenté pour l'histoire de ce canton, comme d'ailleurs pour l'histoire de la planète, un moment déterminant dans l'histoire mondiale, que vous le vouliez ou non !

C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite fermement à refuser cette motion. Je n'ai aucune illusion sur l'issue du vote, mais je demanderai toutefois l'appel nominal, pour que l'on sache qui, ici, est en faveur de la paix et qui veut simplement semer le désordre et le trouble ! (Applaudissements et bravos.)

La présidente. A l'applaudimètre, je considère que la demande d'appel nominal est soutenue !

Mme Myriam Sormanni-Lonfat (HP). Je voudrais répondre à deux personnes. Monsieur Froidevaux, vous pouvez vous opposer à cette motion, c'est tout à fait votre droit, mais vous ne pouvez pas suggérer au Conseil d'Etat de la ranger dans un dossier suspendu !

Quant à vous, Monsieur Lescaze, je vous répondrai que cette motion n'est pas une motion provocatrice... (Exclamations.) Pas du tout ! Je crois que vous n'avez pas compris dans quel esprit elle a été rédigée. Il n'est pas du tout dans l'intention des manifestants de vouloir s'en prendre aux gens qui vont participer au forum. Simplement, ceux qui ne sont pas d'accord avec le Forum économique ont le droit d'avoir d'autres idées et de les présenter de quelque manière que ce soit. Si on reste sur des positions bloquées, cristallisées, c'est là que les problèmes vont surgir. C'est maintenant qu'il faut dialoguer et si cette motion demande à M. Ramseyer de retirer les forces de police genevoises, c'est justement pour permettre ce dialogue, afin que les choses se passent mieux demain.

Il est vrai qu'on ne peut pas toujours canaliser les manifestants. Il n'y a pas longtemps, j'ai fait partie du service de sécurité dans une manifestation et, pour l'avoir expérimenté, je sais qu'on peut facilement se faire déborder et que ce n'est pas évident. Mais en l'occurrence on essaie d'ouvrir un dialogue et ce n'est pas avec vos méthodes que vous arriverez à calmer les gens !

M. Charles Beer (S). J'ai conscience, en prenant la parole, que je vais émettre un avis un peu singulier au sein de cette assemblée, puisque je n'ai pas forcément envie de m'aligner sur les différents propos tenus jusqu'ici, même si cette motion émane des rangs de l'Alternative.

Tout d'abord, Monsieur Lescaze, je ne suis pas d'accord avec vous sur le fait qu'il serait si légitime, si normal d'envoyer les forces de police genevoises s'opposer au droit démocratique de manifester. Je ne peux pas vous rejoindre sur ce point et j'approuve donc fort logiquement les trois premiers considérants et la première invite de la motion. Il n'est pas normal, il est même choquant que notre Etat démocratique participe, non pas à un maintien de l'ordre, mais à un maintien de l'ordre qui rime avec suppression des droits démocratiques.

En revanche, je dois exprimer un profond malaise par rapport au dernier considérant et à la seconde invite. En effet, si pour ma part je n'ai aucune fascination pour le World Economic Forum, je dois malheureusement constater qu'il vaut mieux discuter, qu'il vaut mieux réunir ces gens autour d'une table, en compagnie de chefs d'Etat et de ministres. Il y en a quatre-vingts à Davos, il y a même, sauf erreur, un certain nombre d'associations non gouvernementales et de syndicats : il ne s'agit donc pas seulement du club des multinationales. Je crois donc qu'il ne faut pas caricaturer cette rencontre à outrance et ne voir que les côtés les plus désagréables.

En l'occurrence, il s'agit de faire discuter les entreprises et les gouvernements, et un certain nombre d'Etats socialistes, quand je dis socialistes, je veux dire à gouvernement socialiste, participent au World Economic Forum. Le gouvernement français, vous le savez, a décidé d'y participer, comme d'autres Etats, pour tenter d'influencer de l'intérieur un certain nombre de politiques. C'est le même enjeu qui nous avait opposés à propos du Fonds monétaire international, lorsque certains disaient qu'il valait mieux se tenir à l'extérieur, plutôt que de tenter d'influencer de l'intérieur.

Là où on atteint le paroxysme de l'ambiguïté avec cette seconde invite, c'est que finalement, en se retirant simplement du World Economic Forum, on entérine l'alliance entre celles et ceux qui souhaitent une autre mondialisation que celle des multinationales, et celles et ceux qui refusent toute forme d'internationalisation, préférant le repli sur le réduit alpin, l'isolement, pour ne pas dire l'Alleingang cher à d'aucuns. C'est l'ambiguïté que cache ce type de comportement.

Mesdames et Messieurs, si vous êtes réellement soucieux, comme moi, d'éviter à la planète les pires excès de la mondialisation et du néolibéralisme, il faut penser une autre mondialisation, il faut construire des remparts et, comme le gouvernement français, participer directement, non seulement au World Economic Forum, mais également au Sommet de Porto Alegre. Or, vous ne demandez même pas la participation du canton de Genève au sommet de Porto Alegre. La Ville de Genève, sauf erreur, y participe, le canton je n'en suis pas sûr, mais en tout cas, dans votre motion, vous n'appelez pas sa participation de vos voeux. Si vous l'aviez fait, j'aurais pu vous rejoindre sur la seconde invite.

Pour terminer mon intervention, je proposerai deux amendements, soit la suppression de la deuxième invite et son remplacement par deux autres invites : l'une qui demande que le canton de Genève intervienne pour maintenir partout le droit de manifester, et l'autre qui appelle à participer d'urgence et activement au Sommet de Porto Alegre.

La présidente. Monsieur le député, vous voudrez bien déposer ces amendements au bureau par écrit.

M. Claude Blanc (PDC). L'intervention de M. Beer m'amène à dire qu'un consensus a peut-être enfin été trouvé. En effet, M. Beer rejoint en gros ce que nous disions tout à l'heure, à savoir que le Forum de Davos n'est pas seulement un forum économique, mais aussi une rencontre des milieux économiques avec les milieux politiques, dont un certain nombre ne sont pas forcément des adeptes du néolibéralisme. Je faisais allusion tout à l'heure au président du Mexique, mais il y en a d'autres, notamment des gouvernements européens de tendance socialiste - je dis de tendance socialiste, car entre le socialisme à l'européenne et le néolibéralisme on a parfois de la peine à s'y retrouver, voir le procès qui est actuellement en cours au sujet d'un ancien ami de M. François Mitterrand... Bref, cela pour dire que j'approuve les considérations de M. Beer sur ce genre de rencontre.

Par ailleurs, j'ai oublié tout à l'heure de souhaiter bon voyage à M. Vanek demain. J'en profite pour lui dire qu'il vaudrait peut-être mieux qu'il ne porte pas son pull jaune demain, parce que si la police bernoise a utilisé des produits qui ont endommagé les parties intimes de M. Dupraz... (Rires et exclamations.) ...la police grisonne, elle, a des moyens beaucoup plus doux, des moyens biodégradables, mais qui tachent et qui puent ! Alors, je vous mets en garde, Monsieur Vanek ! (Rires.)

M. Bernard Clerc (AdG). Je ferai quelques observations, même si, j'en ai conscience, ce débat vient un peu tard. On nous parle ce soir de violence, de la violence de quelques manifestants susceptibles de casser une ou deux vitres à Davos. Mais c'est évidemment prendre le problème à l'envers, car il faut savoir qu'au Forum de Davos se décident des stratégies économiques qui, elles, sont d'une violence d'une tout autre nature, qui conduisent à la mort, je pèse mes mots, de centaines de milliers, voire de millions de personnes ! C'est cela, la réalité du libéralisme tel qu'il est prôné à Davos.

Deuxième constatation : on nous dit que c'est un forum démocratique, puisque des chefs d'Etat y participent. En l'occurrence, ce n'est pas la première fois, ni sans doute la dernière, que des chefs d'Etat se mettent à la traîne de capitaines d'industrie, puisque, aujourd'hui, le pouvoir économique est déterminant par rapport au pouvoir politique - ce qui pose une question fondamentale en termes de fonctionnement démocratique.

On nous dit aussi que l'image de Genève est renforcée à travers le World Economic Forum. Eh bien, je vous le dis : c'est exactement le contraire qui est en train de se passer dans de nombreux pays du monde. Maintenant, tout le monde sait que Genève est le siège d'une organisation économique qui conduit à la misère et à l'approfondissement du fossé entre pauvres et riches. Pensez-vous que ce soit bon pour l'image de Genève ? Pensez-vous que cela corresponde à l'image qu'on peut avoir de Genève à travers la Croix-Rouge par exemple ? Je ne le pense pas et je dis qu'à moyen terme nous le paierons très cher.

Troisième constatation. On nous dit que la deuxième invite est une erreur, qu'il ne faut pas se retirer du World Economic Forum. Mesdames et Messieurs, je crois que vous faites une confusion. Le canton de Genève est membre du World Economic Forum, paie une cotisation, mais c'est une exception, car les membres du World Economic Forum sont principalement soit des entreprises, soit des capitaines d'industrie ; il n'y a pas de collectivités publiques, à part deux Etats américains. Nous sommes donc, de ce point de vue là, dans une situation un peu particulière. Le gouvernement français, c'est vrai, est présent à Davos, des ministres participent aux discussions de Davos, mais le gouvernement n'est pas membre du World Economic Forum. En l'occurrence, c'est comme si aujourd'hui nous vous proposions, Mesdames et Messieurs les députés, que le canton de Genève devienne membre de la Chambre de commerce et d'industrie de Genève... (Exclamations.) Pensez-vous sérieusement que ce soit le rôle d'une collectivité publique d'être membre d'une organisation économique particulière, qui défend des intérêts particuliers ? Bien sûr que non ! C'est la raison de la deuxième invite : nous ne trouvons pas admissible que notre canton soit membre du World Economic Forum, et non qu'il participe, le cas échéant, à des rencontres organisées par le World Economic Forum.

Enfin, M. Beer dit que ce serait bien de soutenir le Forum de Porto Alegre et qu'il aurait fallu le faire. Monsieur Beer, je vous signale que nous l'avons fait : nous avons voté un projet de loi, au mois de décembre, afin de permettre à des participants de pays du tiers monde qui ne pouvaient pas se payer le déplacement de participer à ce forum social mondial, première tentative de réponse à la stratégie économique mise en place par le World Economic Forum. Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, pourquoi il faut voter cette motion telle qu'elle vous est proposée ce soir. (Applaudissements.)

M. Gérard Ramseyer. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai le sentiment que l'on parle ici de quelque chose qui est mal connu.

Le World Economic Forum, ce sont 300 ateliers en six jours, 1000 leaders économiques certes, mais aussi 30 chefs d'Etat, 250 représentants politiques, chefs de gouvernement ou ministres, plus de 70 organisations non gouvernementales, 250 intellectuels et chercheurs et 500 journalistes. A Davos se trouvent, ces jours, le secrétaire général des Nations Unies, les présidents de l'Autorité palestinienne, du Mexique, de la République de Yougoslavie - on y parle, en aparté, des problèmes des crimes de guerre - le président de la Confédération helvétique, accompagné de trois conseillers fédéraux, le président de l'Afrique du Sud...

Hier soir, la cérémonie finale était agrémentée d'une première mondiale du fameux musicien Quincy Jones. Cette présentation exceptionnelle était consacrée au «Regard de M. Mandela», regard que j'ai eu le très grand privilège de croiser plusieurs fois : il n'est pas innocent de voir sur un écran, avec un choeur venu exprès d'Afrique du Sud et dirigé par Quincy Jones, un moment consacré au regard de M. Nelson Mandela !

Se trouvent également à Davos le ministre israélien de la coopération régionale, et M. Elie Wiesel, Prix Nobel... Ces gens se rencontrent, s'entretiennent, nouent des contacts, font avancer leurs dossiers, font en quelque sorte avancer le monde dans la mesure où c'est possible. C'est ce dont témoignent les chefs d'Etat des nations les moins favorisées. C'est ce dont était venu témoigner l'année passé M. le président du Mexique.

«Le World Economic Forum, c'est un site de dialogue et d'échanges, ce n'est quasiment que cela, mettons à profit cette session pour chercher à comprendre, pour débattre, pour réfléchir au futur dont nous sommes tous responsables.» Voilà les mots de Klaus Schwab, au moment d'ouvrir le WEF cette année.

Mesdames et Messieurs les députés, peut-on à la fois hurler contre la mondialisation, proclamer son attachement à la démocratie et assassiner le dialogue ? Genève vient de rappeler son attachement au droit d'expression, qui est justement présent à Davos en cette fin de semaine. Parmi les personnalités qui ne sont pas susceptibles d'être aveuglément partisanes de la mondialisation, on rencontre à Davos Claude Martin, un Suisse qui est président du WWF international. On y rencontre, Monsieur Vanek, quelqu'un que vous connaissez fort bien : M. Thilo Bode, le patron de Greenpeace. On y rencontre Bertrand Piccard, Pierre Sané, secrétaire général d'Amnesty International, Juan Somavia, directeur général du BIT...

C'est à Davos qu'on a entendu jeudi le plaidoyer véhément du ministre brésilien de l'agriculture contre les subventionnements des agriculteurs occidentaux, qui empêchent tout simplement son pays de vivre ! Il n'est pas allé dire cela chez lui, à Porto Alegre : il a pensé plus intelligent, plus efficace de le dire devant une salle archicomble comprenant les fameux mille leaders de l'économie mondiale ! C'était un plaidoyer exceptionnel.

C'est à Davos qu'on a entendu, de la bouche de M. Klaus Schwab, patron du WEF, de fortes paroles en faveur du développement durable, de la réduction des disparités sociales et de l'écart entre les pays riches et les pays en voie de développement. C'est à Davos que M. Moritz Leuenberger... (Exclamations.) ...après avoir affirmé qu'il ne fallait pas conférer aux ONG une légitimité plus grande que ne l'est celle des élus gouvernementaux, a souligné que, si après la chute du Mur de Berlin, on avait pu dire : tout est devenu possible, il fallait dire maintenant tout aussi fermement : il ne faut pas que tout soit possible ! Il a ajouté qu'il n'y a pas de vraie liberté sans justice, sans solidarité. C'était à Davos, hier en fin d'après-midi.

Mesdames et Messieurs les députés, je suis convaincu que le Forum de Davos est devenu un moment privilégié, un moment incontournable dans la construction de notre monde. Je suis tout aussi convaincu que, s'il faut hurler à mieux de mondialisation, il faut également combattre pour l'expression démocratique et tout faire pour que survive le dialogue et l'échange. C'est pour témoigner en faveur de la sauvegarde de ces vertus que je suis allé représenter, durant une journée, le Conseil d'Etat à Davos. Et c'est peut-être comme cela qu'on peut interpréter la présence à Davos de nos forces de sécurité, dans la mesure où elles garantissent la tenue pacifique de ce forum.

Monsieur le député Vanek, ne m'en veuillez pas de rappeler que c'est vous et vos milieux qui veulent empêcher ce dialogue, que c'est vous et vos milieux qui, l'année passée, ont recouru à la violence la plus bête et la plus aveugle à l'égard de petits commerçants qui n'étaient pas concernés par cette discussion... (Protestations.) ...mais qui en ont supporté les conséquences !

Le Conseil d'Etat ne pourra pas, sans préavis et pour autant qu'il en ait la moindre intention, quitter le concordat de Suisse occidentale et refuser de participer à l'effort confédéral en matière de sécurité au profit du canton des Grisons qui, je le rappelle si nécessaire, est souverain chez lui. Le Conseil d'Etat ne quittera pas la Fondation du World Economic Forum, dont il est membre avec honneur et conviction. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai la certitude que cette motion est totalement contraire à l'esprit de Genève, je m'y opposerai par tous les moyens, je vous invite à en faire de même ! (Applaudissements.)

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons procéder à plusieurs votes, de manière à nous prononcer séparément sur chaque invite.

Mise aux voix, la première invite est adoptée.

La présidente. Nous passons à la proposition d'amendement de M. Beer visant à supprimer la deuxième invite de la motion.

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

La présidente. M. Beer propose, dans sa proposition d'amendement qui vous a été distribuée, une deuxième invite, je la lis :

«- invite le Conseil d'Etat à intervenir auprès du canton des Grisons pour garantir les droits démocratiques, notamment de manifester ;»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

La présidente. M. Beer propose une troisième invite :

«- invite le Conseil d'Etat à soutenir les suites qui seront données au Sommet social de Porto Alegre.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

La présidente. Je mets aux voix la motion ainsi amendée. Monsieur Lescaze, persistez-vous dans votre demande d'appel nominal ? Bien.

Celles et ceux qui acceptent la motion répondront oui, et celles et ceux qui la rejettent répondront non.

Cette motion ainsi amendée est adoptée par 38 oui contre 29 non.

Ont voté oui (38) :

Charles Beer (S)

Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)

Christian Brunier (S)

Fabienne Bugnon (Ve)

Nicole Castioni-Jaquet (S)

Alain Charbonnier (S)

Bernard Clerc (AG)

Jacqueline Cogne (S)

Jean-François Courvoisier (S)

Pierre-Alain Cristin (S)

Anita Cuénod (AG)

Régis de Battista (S)

Jeannine de Haller (AG)

Erica Deuber Ziegler (AG)

Alain Etienne (S)

Laurence Fehlmann Rielle (S)

Magdalena Filipowski (AG)

Anita Frei (Ve)

Morgane Gauthier (Ve)

Luc Gilly (AG)

Gilles Godinat (AG)

Mariane Grobet-Wellner (S)

Christian Grobet (AG)

Cécile Guendouz (AG)

Dominique Hausser (S)

David Hiler (Ve)

Antonio Hodgers (Ve)

Georges Krebs (Ve)

Danielle Oppliger (AG)

Rémy Pagani (AG)

Véronique Pürro (S)

Jacques-Eric Richard (S)

Albert Rodrik (S)

Christine Sayegh (S)

Françoise Schenk-Gottret (S)

Myriam Sormanni-Lonfat (HP)

Jean Spielmann (AG)

Pierre Vanek (AG)

Ont voté non (29) :

Florian Barro (L)

Luc Barthassat (DC)

Roger Beer (R)

Janine Berberat (L)

Claude Blanc (DC)

Marie-Françoise de Tassigny (R)

Gilles Desplanches (L)

Jean-Claude Dessuet (L)

Hubert Dethurens (DC)

Daniel Ducommun (R)

Pierre Ducrest (L)

Michel Ducret (R)

John Dupraz (R)

Henri Duvillard (DC)

Pierre Froidevaux (R)

Philippe Glatz (DC)

Nelly Guichard (DC)

Bernard Lescaze (R)

Pierre Marti (DC)

Etienne Membrez (DC)

Jean-Louis Mory (R)

Geneviève Mottet-Durand (L)

Vérène Nicollier (L)

Jean-Marc Odier (R)

Michel Parrat (DC)

Jean Rémy Roulet (L)

Walter Spinucci (R)

Micheline Spoerri (L)

Olivier Vaucher (L)

Personne ne s'est abstenu

Etaient excusés à la séance (13) :

Bernard Annen (L)

Michel Balestra (L)

Anne Briol (Ve)

Nicolas Brunschwig (L)

Christian Ferrazino (AG)

Alexandra Gobet (S)

Michel Halpérin (L)

René Koechlin (L)

Armand Lombard (L)

Alain-Dominique Mauris (L)

Pierre Meyll (AG)

Stéphanie Ruegsegger (DC)

Alberto Velasco (S)

Etaient absents au moment du vote (19) :

Esther Alder (Ve)

Jacques Béné (L)

Dolorès Loly Bolay (HP)

Thomas Büchi (R)

Juliette Buffat (L)

Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)

Hervé Dessimoz (R)

René Ecuyer (AG)

Jacques Fritz (L)

Jean-Pierre Gardiol (L)

Mireille Gossauer-Zurcher (S)

Janine Hagmann (L)

Yvonne Humbert (L)

Louiza Mottaz (Ve)

Catherine Passaplan (DC)

Pierre-Louis Portier (DC)

Louis Serex (R)

Pierre-Pascal Visseur (R)

Salika Wenger (AG)

Présidence :

Mme Elisabeth Reusse-Decrey, présidente

La motion est ainsi conçue :

Motion(1386)contre les compromissions de notre canton avec le World Economic Forum

M. Christian Grobet (AdG). Madame la présidente, je demande, au vu de la déclaration qui a été faite par le conseiller d'Etat Ramseyer, que le Bureau du Grand Conseil adresse directement le texte de cette motion au World Economic Forum, et ce soir encore par fax ! (Applaudissements.)

La présidente. Bien, le Bureau va se réunir...

M. Christian Grobet. Non, non, je demande que ma proposition soit mise au vote !

La présidente. Je ne peux faire de vote formel, il s'agit donc d'un vote d'intention.

Mise aux voix, la proposition de M. Grobet est adoptée.

La présidente. Bien, cette proposition est adoptée... Nous allons examiner encore la légalité de cette proposition, dès lors qu'elle ne faisait pas partie de la motion. Vous avez proposé cela après que le vote a eu lieu... (La présidente est interpellée par M. Christian Grobet.) Nous allons voir cela, Monsieur le député !

Mesdames et Messieurs, je lève la séance et vous souhaite un bon week-end ! 

La séance est levée à 23 h 40.