République et canton de Genève

Grand Conseil

IN 150-B
Rapport de la Commission législative chargée d'étudier la validité de l'initiative populaire 150 : Pas de cadeaux aux multinationales : Initiative pour la suppression des allégements fiscaux

Débat

Le président. Nous attaquons notre point fixe, point 135 de l'ordre du jour, IN 150-B. Je précise qu'il s'agit d'un débat sur la recevabilité de cette initiative. La parole est à M. Edouard Cuendet, rapporteur de majorité. C'est un débat libre.

M. Edouard Cuendet (L), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Il faut quand même revenir un peu à la genèse du dossier: le parti socialiste genevois veut chasser les multinationales et leurs dizaines de milliers d'emplois du canton de Genève, et cela constitue une priorité économique et politique pour le PS genevois, qui est prêt à tout pour arriver à ses fins.

L'initiative 150, dont il est question ce soir, s'inscrit pleinement dans cette stratégie d'éradication, dont Mme Sandrine Salerno est l'un des porte-drapeaux les plus virulents. On ne sera pas surpris de constater qu'elle fait partie du comité d'initiative, en compagnie des trois conseillers nationaux socialistes genevois, toujours en pointe pour saboter le tissu économique du canton.

J'ai affirmé, et je le répète, que le PS est prêt à tout pour débarrasser Genève de ses multinationales ! Il est tellement prêt à tout qu'en l'occurrence, et cela touche la forme, il a induit les citoyens en erreur pour les amener à signer une initiative avec laquelle ces citoyens, en réalité, ne pouvaient être d'accord. En effet, durant la campagne de récolte de signatures, le PS a fait croire aux signataires que la suppression des allégements fiscaux n'allait toucher que les multinationales. Or, dans le rapport du Conseil d'Etat et selon les chiffres qu'il fournit, il s'avère que ces mesures fiscales d'allégements profitent en large majorité à des entreprises locales, à des PME locales, souvent en difficulté, pour leur permettre de passer un passage difficile, dans des conditions acceptables. Ces mesures d'allégements permettent donc de préserver des emplois locaux dans notre canton, dans des PME. Ce fait a été sciemment caché aux signataires, dont l'attention a été systématiquement attirée sur les multinationales que ce soit dans le texte même de l'initiative, l'exposé des motifs ou l'argumentaire. Preuve en est le fait que le terme «multinationales» apparaît au moins vingt-cinq fois et qu'elles sont traitées, au passage, de «profiteurs», de «parasites» et que les socialistes leur imputent tous les maux du canton.

En revanche, ni dans le titre, ni dans le texte, ni dans l'exposé des motifs, ni dans l'argumentaire, il n'est question du fait que les entreprises endogènes, les PME locales, sont les principales bénéficiaires de ces mesures. D'ailleurs, notre excellent collègue MCG Pistis a très bien résumé le problème, en demandant aux initiants, lors des travaux de commission, si l'initiative aurait reçu autant de succès si le titre avait été correctement formulé. En réponse à cette question tout à fait pertinente, le président du PS a clairement répondu que l'initiative 150 n'aurait pas rencontré le même succès ! Notre estimé collègue Dandrès a ajouté, en commission, que les citoyens sont censés lire non seulement le titre de l'initiative mais également l'exposé des motifs. Or, comme cela a été dit précédemment, l'exposé des motifs n'évoque que les multinationales. Par conséquent, les citoyens ont bel et bien été induits en erreur.

L'omission fondamentale et voulue des socialistes au sujet des entreprises locales a sans conteste exercé une influence inadmissible sur la formation de la volonté démocratique. Les droits politiques des citoyens au sens de l'article 34 de la Constitution - droits fondamentaux - ont été bafoués, de sorte que l'initiative 150 doit être déclarée totalement irrecevable. Je vous remercie donc de suivre la majorité de la commission législative sur ce point. Je vous invite également à vous opposer à l'élaboration d'un contre-projet si par impossible l'initiative 150 venait à être déclarée recevable. En effet, dans cette hypothèse, il faudra que les socialistes assument leur responsabilité jusqu'au bout et expliquent à la population qu'il faut supprimer ces allégements et conduire à la faillite les PME genevoises qui en bénéficient dans les périodes difficiles. Je leur souhaite d'ores et déjà bonne chance !

Mme Loly Bolay (S), rapporteuse de minorité. En préambule, Monsieur le président, vous me permettrez de dire que je trouve inacceptable les propos de M. Cuendet, vis-à-vis de mon parti, le parti socialiste. J'aimerais rappeler à M. Cuendet que nous sommes en démocratie et que tout parti peut déposer une initiative. Je sais très bien que le parti libéral, lorsque l'on parle d'allégements fiscaux ou d'équité - parce que c'est l'équité que veut cette initiative - prône toujours de favoriser ceux qui se font faire des cadeaux, comme les multinationales ou autres. Je regrette cette attitude, qui était la même en commission vis-à-vis des personnes auditionnées, vis-à-vis d'un président de parti qui a toute son honorabilité et sur lequel on n'a pas le droit de tenir de tels propos.

Maintenant, Mesdames et Messieurs les députés, que demande l'initiative 150 ? Elle demande la suppression des allégements fiscaux. La loi, LHID, dit que les cantons peuvent prévoir des allégements fiscaux. La suppression de cet article 10 n'est pas en contradiction avec le droit fédéral. En revanche, à l'article 45B, les dispositions transitoires sont déjà beaucoup plus problématiques. Ces dispositions transitoires proposent que l'abrogation de l'article 10 déploie ses effets dès la période fiscale qui suit la votation populaire. Cet article est contraire au droit supérieur, car cette disposition revient sur un acte unilatéral de gouvernement par des arrêtés du Conseil d'Etat. Il faut savoir que les allégements fiscaux peuvent avoir une durée de presque dix ans. Or, les arrêtés en force au jour de l'entrée en vigueur de l'abrogation de l'article 10, demandée par l'initiative, le demeurent jusqu'à la fin des périodes fiscales concernées. La personne morale concernée peut s'en prévaloir. C'est ce qu'on appelle les droits acquis. De plus, il faut savoir que tant la jurisprudence que la doctrine protègent les droits acquis.

J'en reviens maintenant à la position de la majorité, qui, en définitive, se limite à dire que le problème de cette initiative est le principe de clarté. Vous l'avez entendu, le rapporteur de majorité dit que les personnes qui ont signé cette initiative ont été trompées par le parti socialiste. Tout d'abord, j'aimerais rappeler que le Conseil d'Etat admet dans son rapport la recevabilité partielle de cette initiative. L'article 45B, concernant les dispositions transitoires, est contraire au droit supérieur et, vous l'aurez compris si vous avez lu les deux rapports, mon rapport de minorité arrive à la même conclusion que le Conseil d'Etat.

Que dit la majorité ? Elle dit que le principe de clarté est violé. Tout d'abord, je souhaite vous rappeler que le principe de clarté - et le Conseil d'Etat le dit, tout comme le rapporteur de majorité - ne fait absolument pas partie des critères de recevabilité. Le Conseil d'Etat ne s'est pas trompé sur cette question, car il écrit à la page 7 de son rapport du 15 juin dernier: «L'exigence de clarté - celle qui est contestée par la majorité - du texte d'une initiative populaire ne fait pas partie des conditions de validité des initiatives étudiées.» Et, plus loin, il écrit que «l'initiative 150 comporte d'une part une abrogation d'un article - l'article 10 - ce qui ne pose aucun problème de clarté.» Il conclut en disant que «L'IN 150 ne comporte donc pas de problème de clarté.», donc aucun problème avec le droit supérieur.

Autre élément: que disent la doctrine et la jurisprudence ? Il faut d'abord rappeler que le principe de clarté ne repose sur aucune base légale, car il n'existe pas d'arrêt précis du Tribunal fédéral sur cette notion. De plus, le principe de clarté n'est pas formellement ancré dans la constitution genevoise.

Enfin, la jurisprudence: il existe un arrêt récent du Tribunal administratif cantonal, suite à un recours contre la formule de signatures d'une demande de référendum, toujours concernant ce principe de clarté, dans lequel les recourants estimaient qu'il y avait violation des droits politiques. Le Tribunal administratif genevois avait débouté les recourants, estimant que le Tribunal fédéral avait relevé par le passé que le droit genevois ne contenait aucune règle sur les manières de rédiger une demande de référendum ou d'initiative.

Autrement dit, Mesdames et Messieurs de la majorité, votre courroux contre cette initiative ne repose sur rien ! Vous avez sans doute, ce soir, gagné une manche. Vous avez la majorité, vous vous êtes bornés à contester ce principe de clarté qui ne repose sur aucune base légale, sur aucun arrêt du Tribunal fédéral, sur aucune jurisprudence. Vous allez certainement gagner ce soir, mais le match sera arbitré par le Tribunal fédéral, parce que, naturellement, le parti socialiste fera recours. A ce moment-là, on verra bien. Rira bien, qui rira le dernier.

Mesdames et Messieurs les députés, je regrette cette attitude qui fait fi d'une volonté populaire, de tous ceux et celles qui ont signé cette initiative. Je rappelle quand même qu'au moment où on a débattu de cette question à la commission législative la question a été posée à la chancellerie. Et que dit la chancellerie lorsqu'on lui propose une initiative ? Eh bien elle dit qu'une initiative doit répondre à certains critères. C'est déjà arrivé que la chancellerie refuse une initiative qui n'est pas conforme. La chancellerie n'a rien eu à dire sur l'initiative 150. Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande ce soir de suivre les conclusions de la minorité, formée des socialistes et des Verts, et de déclarer cette initiative, comme le demande le Conseil d'Etat, partiellement valide. Je vous en remercie.

M. Jacques Jeannerat (R). Permettez-moi, Monsieur le président, d'abord de vous féliciter pour votre brillante élection. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, les enjeux entourant l'initiative ont été parfaitement résumés par l'excellent rapport de majorité. Je rappellerai donc ce soir uniquement quelques éléments fondamentaux sur le fond et sur la forme de cette initiative. Sur le fond pour commencer: je me contenterai de souligner à quel point cette initiative constitue une hérésie, qui plus est en ces temps économiques difficiles !

Le président. Monsieur le député, c'est sur la recevabilité.

M. Jacques Jeannerat. Oui, je sais. Je vais y venir. Ce que l'initiative demande n'est, ni plus ni moins, que des PME locales ne puissent soit pas naître... (Brouhaha. Commentaires.) ...soit doivent mettre la clé sous le paillasson. Les allégements fiscaux, Monsieur le président, visés par cette initiative, s'adressent en effet, comme l'a dit le Conseil d'Etat dans son rapport...

Le président. Monsieur le député, c'est sur la recevabilité. Vous ne siégez pas à la commission législative, donc...

M. Jacques Jeannerat. Alors j'en viens à la forme.

Le président. Voilà, c'est cela, merci.

M. Jacques Jeannerat. Alors, je passe à la deuxième page et j'en viens à la forme. Sur ce point, c'est important d'insister sur le fait qu'il n'y a qu'une seule solution pour cette initiative, c'est le classement vertical. Les initiants ont, en effet, ni plus ni moins, trompé les électeurs. Ils ont violé l'article 34 de la Constitution fédérale qui garantit l'expression fidèle et sûre de la volonté des citoyens. Tout, dans l'argumentaire de l'initiative, qui se trouve dans son exposé des motifs mais aussi sur les feuilles de signatures, vise les statuts fiscaux cantonaux et l'imposition différenciée des entreprises multinationales, qu'elles soient étrangères ou suisses. Mais l'article visé par l'initiative ne concerne absolument pas ces statuts cantonaux, mais bel et bien des allégements fiscaux, qui, eux, s'adressent à des catégories d'entreprises tout à fait autres. En conclusion, considérant cette initiative pour ce qu'elle est, à savoir une tromperie manifeste de la population, clairement contraire au droit supérieur, je vous invite à tirer les conséquences qui s'imposent et à suivre les conclusions du rapporteur de majorité, qui déclare que cette initiative n'est pas recevable.

M. Patrick Lussi (UDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, à titre liminaire, j'aimerais quand même clarifier le débat. (Exclamations.) Au nom de l'Union démocratique du centre, nous sommes appelés à nous prononcer sur la forme. Pour ceux qui ont la chance de voir document, ils remarquent qu'il y a un échéancier qui commence au 16 mars 2012 pour se terminer au 16 septembre 2014. Nous en sommes à la phase trois, à savoir déterminer si le texte déposé correspond au droit. L'Union démocratique du centre, durant les débats en commission, a été partagée par le fait que, même si l'on nous affuble de plein de choses, nous sommes quand même soucieux d'écouter les considérants du Conseil d'Etat. Ceux-ci figurent dans cet excellent rapport qu'on appelle IN 150-A, sur laquelle nous sommes appelés à nous prononcer. Dans ce rapport, le Conseil d'Etat dit clairement que cette initiative, dans une grande partie, notamment par cet article 45, est irrecevable mais suggère quand même de la déclarer partiellement recevable et de lui offrir un contre-projet, ce qui n'est pas - le contre-projet - le fait de la commission législative, mais qui viendra dans la phase qui va suivre.

Face à ceci, Mesdames et Messieurs les députés, l'Union démocratique du centre fait partie de ces partis dits populistes, qui aiment déposer des initiatives et, en fait, nous commençons à nous inquiéter de cette démarche - qui ne nous semble pas tout à fait correcte - de rejeter d'emblée, sur des prétextes de recevabilité, un texte. Néanmoins, il est vrai que nous avons voté avec la majorité. Pourquoi ? Je m'en explique ce soir. Nous avons voté avec la majorité, parce que les restrictions nous semblent tellement fortes qu'il vaudrait presque mieux refuser ce texte et qu'un autre soit redéposer.

Quant au fond, je déçois peut-être les socialistes, il est vrai que sur le fond, l'UDC, dans le troisième débat qui suivrait, ne pourrait que s'opposer à ce type de projet. Mais je tiens à le dire, ce soir, pour les citoyens qui nous regardent, nous parlons de recevabilité et il n'est pas juste, je choisis à dessein le terme de «judiciariser» pareillement les initiatives que chaque parti politique propose, en disant qu'elles ne sont pas recevables, et on finit alors au Tribunal fédéral. Ceci, en ce qui nous concerne, n'est pas démocratique. Cependant, l'Union démocratique du centre vous demandera de suivre le rapport de majorité.

Mme Lydia Schneider Hausser (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, l'argument retenu par la majorité de la commission législative et la formulation de cette position par le rapporteur de majorité sont désolants. Visiblement, celui-ci est aveuglé par ses désirs qui l'empêchent de respecter le contenu de sa prestation de serment, dont je vous rappelle une partie du contenu non respecté: «Je jure et je promets solennellement de rester strictement attaché aux prescriptions de la Constitution». J'en ai enlevé une partie. Ces prescriptions, en ce qui concerne les initiatives, sont claires: la commission législative doit se positionner sur la forme. En matière de recevabilité formelle, seuls les éléments législatifs doivent respecter l'unité de la matière, l'unité de la forme, l'unité du genre. L'argumentaire n'entre pas en ligne de compte pour vérifier cette recevabilité de forme, contrairement à tout ce qui a été dit par les personnes qui soutiennent le rapport de majorité. En conséquence, cette initiative est parfaitement recevable et le Conseil d'Etat l'a dit dans son rapport.

Le rapporteur de majorité de la commission législative se focalise sur le terme «multinationale», utilisé dans l'argumentaire. Comme la majorité estime que ce terme doit être banni de tout discours et de tout débat dans ce Grand Conseil, il est donc justifié, pour eux, de conclure à l'irrecevabilité totale de cette initiative. La suite du rapport de majorité ne fait que répéter ce que dit le Conseil d'Etat, mais en termes plus vagues. On pourrait même penser que le rapporteur pense que le Conseil d'Etat ne saurait pas vraiment de quoi il parle. Enfin, à plusieurs reprises, en particulier dans le dernier paragraphe du rapport de majorité, il est avancé un argument complètement lacunaire qui a été répété ici ce soir et qui est, d'une certaine manière, de la pure provocation: le rapporteur et certains préopinants ont évoqué le fait que nous parlons de multinationales. Mais vous n'apportez aucune preuve à ce que vous dîtes ! Il n'y a pas non plus de preuve dans le rapport de majorité. Concernant les 42 entreprises au bénéfice d'un allégement fiscal, on n'a aucune preuve qu'elles soient toutes ou majoritairement endogènes, vu que ce qui est relaté dans le rapport de gestion du Conseil d'Etat sur les comptes n'évoque pas ces éléments.

Ensuite, il est vrai que - vous avez parlé de la forme - que cette initiative touche un sujet qui relève d'allégements fiscaux de l'ordre de 60 millions en 2011 et à hauteur d'un milliard 240 millions pour la totalité des allégements engagés par le Conseil d'Etat actuellement. Prétendre que cette initiative est totalement invalide est une position purement politique sur la forme et est donc contraire aux prérogatives, à ce stade, de la commission législative. C'est pourquoi nous n'accepterons pas cette position et nous soutenons donc le rapport de minorité de Loly Bolay, qui dit que l'initiative est, en tout cas, partiellement recevable. Nous verrons encore, au niveau du Tribunal fédéral, si nous devons y aller.

Mme Emilie Flamand (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, nous devons donc parler ce soir de recevabilité. Eh bien, j'ai un scoop, Mesdames et Messieurs: une initiative qui incommode le PLR n'est pas forcément irrecevable. On pourrait croire le contraire parfois, parce que l'on a vu beaucoup d'initiatives invalidées dans ces lieux, qui finalement ont été rétablies par le Tribunal fédéral. Aujourd'hui nous partageons les conclusions du Conseil d'Etat et de la rapporteure de minorité, à savoir que les dispositions transitoires posent un problème, puisque le principe de non-rétroactivité est un des principes fondamentaux de notre Etat de droit. Nous sommes donc favorables à une invalidation partielle. Quelques mots, pour finir, sur le fond, parce que sinon, ce n'est pas drôle ! Nous ne sommes pas entièrement favorables au texte de l'initiative et quand l'initiative reviendra du Tribunal fédéral partiellement validée, nous serons très heureux d'étudier un contre-projet qui ne supprime pas totalement les allégements fiscaux, mais qui les limite en les soumettant à des critères sociaux et environnementaux stricts.

M. Serge Hiltpold (L). La première lecture porte sur le principe de clarté. Je prends le rapport de IN 150-B en gras «Initiative populaire 150: pas de cadeaux aux multinationales». Je crois que le principe de clarté est clairement violé. Nous avons entendu dans ce débat, avec passion, que le but de l'initiative était vraiment de taper et de dénigrer les multinationales, secteur économique important de notre canton. Et nous avons entendu les socialistes opposer systématiquement les différents secteurs économiques alors qu'ils sont complémentaires.

L'attitude est parfaitement trompeuse. Je vais vous parler du rapport: la mise en application de cette initiative touche 42 entreprises genevoises. Cela est la réalité. La réalité de ce que vous cherchez quand vous faites signer des gens dans la rue, en voulant politiquement dresser les gens contre les multinationales, alors que les effets de la recevabilité de cette initiative pénalisent les entreprises genevoises. Concernant le ton utilisé dans cette initiative, il est parfaitement désagréable: «Les PME et les PMU locales oubliées. Genève a besoin de développer son économie locale et non de survivre aux injections financières des grandes multinationales hors-sol.» On l'a vu: les entreprises locales sont défavorisées.

Je crois que le fond du problème est autre. Un débat a été lancé avec cette initiative que le conseiller d'Etat, David Hiler, met sur la table, sur le taux d'imposition de 13%. Cela c'est l'avenir. Et je pense que cette initiative maintenant est parfaitement irrecevable. S'agissant du climat, je peux essayer de comprendre les socialistes qui essaient de développer l'emploi. Mais une fois que vous nous avez expliqué que vous êtes contre les multinationales, que vous êtes contre les banques, que vous êtes contre le secteur financier, que vous êtes contre les artisans, j'aimerais bien savoir comment vous allez maintenir l'emploi sur le canton.

En conclusion, évidemment le parti libéral et le groupe PLR seront contre un contre-projet. Concernant les propos de la rapporteuse de minorité, parlant de «courroux» et de «gagner une manche»: je pense que Genève n'a pas à gagner une manche. L'emploi doit gagner une manche et la responsabilité que nous avons en tant que parlementaires est de développer l'économie avec justice et équité pour tous. Raison pour laquelle nous jugeons que cette initiative est irrecevable.

Le président. Bien, merci Monsieur le député. Nous exerçons un mandat difficile, on doit se déterminer sur la recevabilité. Ceux qui siègent à la commission législative connaissent cette problématique. Savoir ce qui est recevabilité et ce qui est le fond. On joue cet exercice très difficile, je vous demande quand même d'essayer de vous cantonner dans cette problématique de recevabilité. La parole est à M. le député Dal Busco.

M. Serge Dal Busco (PDC). Merci, Monsieur le président du parlement et président de la commission législative pour ce rappel. Je vais donc effectivement vous écouter et n'en rester qu'à la forme. Je ne vais pas être de ceux qui vont reprocher aux initiants d'avoir sciemment cherché à tromper les signataires. On ne va pas aller sur ce terrain-là. Néanmoins, le groupe démocrate-chrétien suivra les conclusions du rapport de majorité, quand bien même, en commission, votre serviteur s'était abstenu pour débattre effectivement de la question à fond au sein du groupe. Nous sommes arrivés aux mêmes conclusions que la majorité, en ce sens que, si cela n'a pas été fait sciemment, il y a probablement eu...

Et j'ai été personnellement extrêmement frappé d'entendre de la bouche même des initiants le fait de reconnaître que si l'initiative avait été formulée différemment dans son intitulé, elle n'aurait probablement pas recueilli autant de succès. Cela est quelque chose de dérangeant dans l'exercice de la démocratie et donc ce principe de clarté, pour nous, est clairement violé.

Les dispositions de l'article 34 de la Constitution fédérale ne sont pas respectées, précisément parce que, en lisant cet intitulé, en lisant l'exposé des motifs, la personne, qui est appelée à signer, ne signe pas forcément - même pas du tout - ce qu'elle croit signer. Alors, Mesdames et Messieurs, on verra bien si cette base légale sera établie suite à ce qui a été annoncé, c'est-à-dire un recours au Tribunal fédéral. Elle n'existe pas encore aujourd'hui, on l'aura peut-être enfin, et personnellement j'appelle vraiment de mes voeux que les futures initiatives lancées dans ce canton respectent une forme qui nous évite de passer des heures, en tout cas de longues minutes ici dans ce parlement à débattre de ces questions de forme. Il faudrait vraiment qu'à l'avenir, et c'est vrai que la Constituante a prévu des dispositions en la matière, on arrive à éviter ces situations extrêmement désagréables. Vous l'aurez compris, le groupe démocrate-chrétien vous encourage à voter comme la majorité, c'est-à-dire à déclarer cette initiative totalement invalide.

M. Mauro Poggia (MCG). Sans doute, avant que cette initiative ne soit soumise au peuple, la question sera réglée d'une autre façon, puisque, sous la pression de l'Union européenne, nous allons devoir adapter notre imposition et éviter ces différences entre ces sociétés qui ont une partie de leur activité à l'étranger et les entreprises locales.

Néanmoins, nous avons aujourd'hui à régler, comme l'a très justement dit notre président, une question qui est éminemment juridique. De sécurité et de certitudes, il n'y en a jamais dans ce domaine. Il y a tout de même et néanmoins des principes qui doivent être appliqués. On ne vend pas une signature comme on vend un produit de lessive. Il s'agit d'informer les citoyens qui sont amenés à adhérer à cette initiative, et le but n'est pas de mettre des slogans attractifs pour attirer le chaland. Il s'agit évidemment d'avoir des slogans qui collent avec le texte de l'initiative. Nous ne sommes pas dans une élection où tout le monde dit qu'il sera forcément meilleur que les autres. Ici on ne peut pas, et c'est là un point faible de cette initiative, on ne peut pas venir dire que l'on s'en prend aux multinationales, alors que, du même coup, en supprimant une disposition, on s'en prend aussi aux entreprises locales qui peuvent avoir besoin d'allégements fiscaux à un moment donné de leur vie économique, tout simplement parce qu'il y a une baisse des commandes, parce qu'ils veulent conserver les emplois et la condition est de pouvoir bénéficier d'une aide de l'Etat, cette aide qui peut être octroyée sous la forme d'un allégement fiscal. Venir ici prétendre que le but est de s'en prendre aux multinationales est manifestement trompeur.

Je relève d'ailleurs que lorsqu'il s'est agi de voter sur l'unité de la matière, un député Vert et un député socialiste en commission se sont abstenus, aucun n'a dit clairement qu'il considérait que la conformité au droit supérieur était réalisée. Je pense donc que lorsque même les députés du parti qui lance cette initiative ne sont pas convaincus du respect du droit supérieur, en l'occurrence il s'agit de l'article 34 de la Constitution fédérale qui impose que le citoyen puisse librement former son opinion sur la base des renseignements qui lui sont donnés, il y a de quoi avoir des doutes. Vous direz à Mme Loly Bolay que l'expression «rira bien qui rira le dernier» n'est peut-être pas la bonne, parce que si une initiative comme celle-là passe, nous sommes peut-être tous amenés à pleurer ensemble. (Applaudissements.)

M. Roger Deneys (S). J'ai écouté avec attention les arguments du rapporteur de majorité, ainsi que ceux des autres intervenants qui sont en défaveur de cette initiative. J'aimerais relever que, si le rapporteur de majorité, à la page 4 de son rapport, reproche aux initiants d'avoir ignoré qu'il y avait une différence entre les entreprises dites endogènes et les entreprises exogènes et qu'en l'occurrence cela ne s'appliquerait pas correctement au terme «multinationale», on peut se poser la question de savoir s'il y avait tromperie. En réalité, j'ai regardé comment le Conseil d'Etat présente les allégements fiscaux dans le document des comptes et j'ai pris les comptes 2011, aux pages 62 et 63 - je ne sais plus de quel tome, I ou II - eh bien, en réalité, les allégements fiscaux, tels qu'ils sont présentés aux pages 62 et 63, donnent le nombre d'entreprises, le nombre d'emplois, les impôts exonérés, les impôts générés et la masse salariale soumise à l'impôt. On ne peut pas savoir, du rapport des comptes, s'il s'agit d'entreprises endogènes ou exogènes, cette information ne pouvait pas être connue des initiants. Au demeurant, la définition des entreprises endogènes ou exogènes - d'ailleurs, je ne sais pas qui a inventé cela au départ - se trouve à la page 35 du rapport du Conseil d'Etat l'IN 150-A. Nous pouvons y lire: «Sont considérées comme des entreprises endogènes celles qui avaient leur centre de décision en Suisse au moment de l'octroi de l'allègement. Sont considérées comme des entreprises exogènes celles qui avaient leur centre de décision à l'étranger au moment de l'octroi de l'allégement.»

En fonction de ces définitions, Mesdames et Messieurs les députés, il est tout simplement impossible de savoir, qu'elles soient endogènes ou exogènes, si elles sont multinationales ou non. Il n'y a pas de lien entre le siège en Suisse et le siège à l'étranger, pour dire si une entreprise est multinationale ou pas.

Nestlé a son siège en Suisse, c'est une multinationale. Quand Merck Serono était Serono et avait un siège à Genève, c'était une multinationale. Donc on ne peut pas du tout déduire des définitions du Conseil d'Etat - qui n'étaient pas dans les rapports des comptes d'ailleurs - qu'une entreprise est multinationale ou non. Donc il est en tout cas certain qu'il n'y a pas du tout tromperie quand les socialistes ont déposé une initiative qui parlait des multinationales, parce que l'information n'était connue de personne ! Cela souligne aussi le problème de l'opacité de l'octroi de ces allégements. En réalité, ce n'est que dans le rapport de l'IN 150-A que nous avons un certain nombre d'informations sur la typologie de ces entreprises ! Parce que ces informations ne figurent pas dans les rapports des comptes. Donc, Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes, en toute bonne foi, ont pensé que les entreprises concernées étaient des multinationales. On ne peut même pas déduire du rapport du Conseil d'Etat que ce n'est pas le cas. On n'en sait rien du tout.

Les socialistes estiment donc simplement que la différence de traitement fiscal entre les entreprises suisses qui ne sont pas des multinationales et les entreprises étrangères ou suisses qui sont multinationales ou non n'a pas de raison d'être. Toutes les entreprises doivent être traitées de la même manière et, au demeurant, l'allégement fiscal est bien une mesure limitée dans le temps. Après dix ans, ces entreprises restent en Suisse, avec un traitement fiscal identique aux autres entreprises, ou elles repartent. D'ailleurs, on n'a aucune information dans le rapport du Conseil d'Etat IN 150-A sur le nombre d'entreprises qui restent, qui partent, le nombre d'emplois qui sont préservés ou non. On ne sait pas. Donc l'opacité fiscale règne du début à la fin dans ce dossier, et les socialistes déposent une initiative qui vise à régler le problème de l'inégalité de traitement entre les entreprises suisses, les PME suisses, les indépendants suisses, et les étrangers qui bénéficient d'avantages. Les entreprises suisses bénéficient peut-être aussi d'avantages et sont peut-être des multinationales. Le titre n'est donc en aucun cas trompeur et le respect de la Constitution fédérale est certain.

Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit certainement d'invalider partiellement cette initiative, parce que la disposition transitoire pose problème, mais, sur le fond, il n'y a absolument pas tromperie. Cette initiative est faite en fonction des éléments connus de la population genevoise, des députés, du parti socialiste et, donc, aucune personne ayant signé ce texte ne pouvait envisager quoi que ce soit sur les bénéficiaires de ces allégements. Donc, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous demandons de soutenir le rapport de minorité.

M. Eric Stauffer (MCG). Je souhaiterais presque, aujourd'hui, un mariage entre la droite et la gauche, parce que, finalement, entre les deux, vous faites tout, mais tout, pour décourager les entreprises de venir s'installer à Genève. Alors je vous pose la question, vous transmettrez, Monsieur le président, je pose la question aux socialistes: si demain, par grand malheur, cette initiative passait, qu'est-ce qu'il resterait aux entreprises pour choisir Genève pour venir s'y installer ? La sécurité dans nos rues ? (Commentaires.) Non, je vous pose la question: la sécurité dans nos rues ? Je crois que c'est un débat qui est dépassé, et là la responsabilité est à droite effectivement. La qualité et le nombre de logements vacants ?

Le président. Monsieur le député, je suis désolé de faire le cerbère ce soir.

M. Eric Stauffer. Mais je vous en prie, Monsieur le président, mais comme tout le monde...

Le président. C'est la recevabilité.

M. Eric Stauffer. J'y arrive, Monsieur le président.

Le président. Oui, mais il faut y arriver rapidement.

M. Eric Stauffer. J'y arrive, c'est directement lié, vous allez comprendre. Mais vu que tout le monde a un tout petit peu digressé, vous me permettrez de faire 32 secondes encore sur ma digression. Finalement, ces entreprises ne vont pas arriver parce qu'il y a un nombre de logements satisfaisant et bon marché à Genève ! Donc, finalement, il ne restera plus rien. Alors, moi je vous le dis, Mesdames et Messieurs, cessons d'être hypocrites. (Exclamations.) Peut-être qu'effectivement cette initiative pourrait être recevable au sens du droit, mais si une possibilité est offerte à ce parlement de la déclarer irrecevable, eh bien, pour le bien des Genevois, nous la déclarerons irrecevable. Point. Terminé. A la ligne.

Vous notez - à la recevabilité, page 19 de votre rapport: «Diminution des prestations publiques. Le prix à payer pour les contribuables Genevois est lourd. En offrant, ces réductions fiscales à ces multinationales, c'est autant de recettes en moins qui servent à financer des prestations publiques [...]». Mais, si ces entreprises ne viennent plus, ce n'est pas des recettes fiscales en moins, c'est zéro que vous aurez à vous partager ! Et au MCG, nous avons toujours dit qu'il faut une économie forte pour pouvoir faire du social efficace ! Il me semble que ce paramètre vous échappe complètement chez les socialistes ! Sans économie forte, vous n'avez rien à dépenser !

Partant de ce principe, on voit qu'il y a aussi quelques lacunes dans la franchise de certains de nos collègues. J'en veux pour preuve que la droite s'est clairement affichée contre la recevabilité de cette initiative, adoubée de l'UDC et du MCG. Mais je vois dans le rapport, à la page 11, qu'un PDC, membre de la commission législative et magistrat communal de l'Entente, qui doit promouvoir l'économie genevoise, s'abstient par deux fois sur la décision de déclarer cette initiative irrecevable, moi j'émets quelques doutes sur cette Entente, parce qu'il faut savoir à un moment ce que l'on veut pour Genève et les Genevois. Alors, je vous le dis, Monsieur le président, cette initiative, pour nous, du point de vue du Mouvement Citoyens Genevois, est irrecevable. Elle est dangereuse, comme beaucoup de choses que les socialistes font malheureusement dans les rues par pur électoralisme en faisant signer des initiatives avec des titres trompeurs. Et je vous ai vu faire à moultes reprises, notamment sur la place du Molard. Et cette initiative en est un exemple frappant. Rappelez-vous, s'il y a une chose dont vous devez vous souvenir ce soir de mon discours, c'est qu'il faut une économie forte pour du social efficace. Cela vous pouvez vous l'imprimer, parole de MCG !

M. Christian Dandrès (S). Je vous remercie, Monsieur le président, et je vous promets que je ne vais pas digresser. J'aimerais rappeler ici simplement que l'initiative 150 est l'une des deux composantes de la double initiative qui avait été déposée par les socialistes, la 149 et la 150, dont les titres se font écho. 149: «Pas de cadeaux aux millionnaires». 150: «Pas de cadeaux aux multinationales».

Mais, Monsieur Cuendet, si vous aviez lu le titre jusqu'au bout, vous auriez constaté qu'il est parfaitement clair, parce qu'il se poursuit par «Pas de cadeaux aux multinationales» deux points : «Initiative pour la suppression des allégements fiscaux». Des allégements fiscaux, c'est moi qui souligne cette fois, Monsieur Cuendet. Le titre est limpide et j'ai donc le sentiment qu'à suivre la lecture que vous faites du principe de clarté, ce qu'il faudrait pour le PLR, en somme, c'est que le comité d'initiative annexe à l'argumentaire votre position, la position de l'Entente. De ce point de vue, vous jouez les censeurs de la République, Monsieur.

J'aimerais préciser qu'à ce propos votre parti avait lancé une initiative. La Chancellerie a constaté qu'elle n'avait pas abouti cet été. Elle s'intitulait: «Stop à la bureaucratie». J'avais lu, à l'époque, l'argumentaire qui figurait en annexe à la feuille des signatures et qui préconisait de, je cite: «limiter la densité normative et la charge administrative des entreprises». Pour convaincre le chaland, selon l'expression de Maître Poggia, les initiants servaient un florilège de slogans. Je cite simplement deux exemples. Le premier slogan: «L'Etat nous dicte quand et où nous pouvons faire nos achats». Deuxième slogan, je pense que l'on met cette réplique dans la bouche d'un fonctionnaire: «Pour des raisons inconnues, nous ne trouvons pas votre dossier.»

Alors voilà, Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, l'interprétation à géométrie variable que fait le PLR du principe de la clarté. Parce que, effectivement, si l'on avait appliqué la doctrine «Cuendet», celle qu'il souhaite voir appliquer à notre initiative, il aurait fallu préciser que ces mesures qu'il préconisait auraient eu pour conséquence, par exemple, d'entraver la lutte contre le travail au noir et pour la protection de la santé des consommateurs. Mais le PLR ne l'a pas fait, et j'aimerais relever que le sort que la population a réservé à cette initiative montre que vous avez tort, Monsieur Cuendet, puisque l'initiative n'a pas abouti. Lorsqu'on utilise des arguments qui sont ceux que vous avez servis, la population ne signe pas. Je crois que ce qui s'est passé au mois d'août 2012 démontre que cette initiative ne pose aucun problème et que vous avez tort, Monsieur Cuendet. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Vont s'exprimer encore Madame la rapporteure de minorité, ensuite Monsieur le rapporteur de majorité et finalement, M. le conseiller d'Etat, David Hiler. La parole est à Mme Loly Bolay.

Mme Loly Bolay (S), rapporteuse de minorité. J'aimerais d'abord répondre à M. Mauro Poggia que, effectivement, on a répondu avec les Verts que cette initiative n'était pas conforme au droit supérieur - je le dis dans mon rapport de minorité et je viens de le dire à deux reprises - tout simplement parce qu'on considère, comme le Conseil d'Etat, que l'article 45B, les dispositions transitoires, est contraire au droit supérieur. Donc, effectivement, j'ai voté comme cela, parce que cette initiative doit être déclarée partiellement valide, parce que l'article 10 est valide, mais pas l'article 45B. Si vous avez lu mon rapport de minorité, si vous m'avez écoutée, je pense que maintenant vous avez compris mes propos et mon vote en commission. Je vous dirais si on va rigoler. Mais bien sûr que l'on va rigoler, Monsieur Poggia, pour la raison suivante, Monsieur le président vous la lui direz: parce que, quand on analyse une initiative, Monsieur le président, vous qui présidez la commission législative aussi, il y a des critères auxquels il faut répondre: les critères sur la forme, sur l'unité de la matière, sur l'exécutabilité, sur le droit supérieur.

Mais le principe de clarté, celui que vous invoquez pour dire que cette initiative n'est pas valable, ne fait pas partie des critères. Le Tribunal fédéral n'a pas d'arrêt sur cette question. La constitution genevoise ne fait aucune mention de la clarté, et je l'ai dit tout à l'heure: un arrêt du Tribunal administratif a débouté le recourant sur un référendum qui invoquait ce principe de clarté. J'ai mis l'argumentaire du Tribunal administratif dans mon rapport de minorité. Sur ce principe de clarté, le Tribunal fédéral ne peut que nous donner raison, parce que vous invoquez quelque chose qui n'existe pas dans la jurisprudence. C'est la raison pour laquelle j'ai dit que l'on va bien rigoler et non pas sur les allégements fiscaux. Sur cette notion-là on va rigoler, parce que, encore une fois, la majorité s'est trompée, la majorité aurait dû dire que cette initiative, comme le Conseil d'Etat le dit et comme nous le disons, effectivement pose un problème à l'article 45B, mais pas l'article 10. Encore une fois, la clarté ne fait pas partie des critères de recevabilité.

M. Edouard Cuendet (L), rapporteur de majorité. Tout d'abord, pour revenir sur un des propos liminaires de la rapporteure de minorité, elle a évoqué l'équité fiscale et, à ce sujet-là, je souhaiterais poser la question de savoir s'il est équitable de condamner à la ruine des PME locales qui bénéficient de tels allégements.

Sur le principe de la clarté, je vais parler de ma petite expérience au Grand Conseil - ce sera le moment historique - le nombre de fois, et j'ai des témoins ici, où on m'a dit: «Vous ne comprenez rien au social, vous ne comprenez rien à l'enseignement, vous ne comprenez rien à ci, vous ne comprenez rien à cela.»! C'est peut-être vrai, on a beaucoup d'experts, notamment au sein de l'Alternative. Mais alors là, Madame Bolay, je suis désolée de vous le dire, en termes juridiques, en tout cas M. Poggia, avocat au barreau, et moi-même avons peut-être un peu plus de connaissances que vous et nous avons lu l'arrêt du Tribunal administratif, contrairement à vous, auquel il est fait référence et qui cite clairement, mais alors, on ne peut plus clairement, l'article 34 de la Constitution comme un droit fondamental, une garantie minimale que tous les textes de référendums et d'initiatives doivent respecter à Genève. Donc là, vous vous trompez lourdement du point de vue juridique. J'ai cité cet arrêt dans mes conclusions, pages 11 et 12. Donc, je suis désolé de vous contredire sur ce point, vous vous trompez complétement.

Cela étant dit, je voulais ajouter que la question de la tromperie se pose aussi sur un élément important, c'est que, au fond, le parti socialiste demande la suppression de l'article 10 LIPM qui parle des allégements fiscaux. Or, si on lit l'argumentaire, si on lit l'exposé des motifs, ce que M. Dandrès nous a expressément demandé de faire en commission - il a dit qu'on ne pouvait pas comprendre l'initiative si on ne lisait pas l'exposé des motifs - tout l'argument du PS repose en réalité sur les statuts fiscaux et non sur les allégements fiscaux. Les statuts fiscaux, à savoir les sociétés holding, les sociétés auxiliaires - qui profitent, il est vrai, à de nombreuses multinationales, qui sont venues créer des dizaines de milliers d'emploi à Genève - eh bien ces multinationales, qui sont les principaux contribuables et qui ont créé des emplois à Genève, bénéficient de tels statuts, mais qui n'ont rien à voir avec l'article LIPM qui est attaqué ici par le parti socialiste.

Le parti socialiste est extrêmement mal à l'aise avec le libellé de son initiative. Ses représentants se répandent dans les médias, sur Léman Bleu, dans les journaux en disant: «Pitié, faites-nous un contre-projet pour nous sortir de cette ornière !». Parce qu'ils se sont trompés, ils se sont lourdement trompés dans la rédaction de leur texte, puisqu'ils ont mélangé - c'est triste pour eux - l'article 10 LIPM, qui concerne les allégements et les articles qui touchent les statuts fiscaux. En se trompant dans la rédaction de leur texte, ils ont par là-même induit en erreur les signataires évidemment, puisque les signataires pensaient qu'ils signaient contre les statuts des multinationales et, au fond, ils ont signé contre les allégements fiscaux bénéficiant majoritairement à des sociétés endogènes et destinés à les sauver de situations difficiles. Donc la tromperie est tout à fait évidente. En plus, comme M. Poggia, je suis extrêmement choqué par l'expression utilisée par Mme Bolay de «rira bien qui rira le dernier». Ici, on parle de dizaines de milliers d'emplois et il est totalement inacceptable qu'une personne qui est censée défendre l'emploi à Genève utilise des expressions aussi provocantes. Je conclurai en disant que je vous remercie par avance de suivre les conclusions du rapport de majorité. (Applaudissements.)

Le président. Merci, M. le rapporteur de majorité a sollicité ou posé une question au début de son intervention à Mme la rapporteure de minorité, à qui j'accorde quelques instants pour répondre.

Mme Loly Bolay (S), rapporteuse de minorité. Monsieur le président, pas quelques instants, puisque nous sommes dans un débat libre, et je ne crois pas avoir parlé déjà trois fois sept minutes, donc j'ai le temps, Monsieur le président, je vous remercie.

J'aimerais quand même revenir d'abord sur ce qu'a dit M. le rapporteur de majorité. M. le rapporteur de majorité me dit que j'ai tort. Mais j'ai mis dans mon rapport de minorité l'arrêt du TA, en tout cas les conclusions de l'arrêt du TA. L'arrêt du TA dit, je ne vais pas tout lire, Monsieur le président, mais juste quelques lignes. L'arrêt du TA dit: «Le Tribunal fédéral l'a relevé, le droit genevois ne contient aucune règle sur la manière de rédiger une demande de référendum ou d'initiative contrairement à d'autres législations cantonales qui interdisent toute mention susceptible de créer un doute.» Autrement dit, ce principe de clarté n'existe nullement.

Maintenant, Monsieur le président, si vous permettez, puisque le rapporteur de majorité a parlé d'une anecdote personnelle, je vais vous donner la mienne. (Exclamations.) Il y a quelques années, j'ai travaillé dans une grande multinationale étrangère en Suisse et je faisais partie des dix-sept employés à Genève et il y avait, à Bâle, environ neuf employés. Cette multinationale a décidé de fermer ses portes. Dix-sept emplois ont donc été supprimés à Genève, neuf à Bâle. Eh bien, le volet financier de cette multinationale est venu s'installer à Genève, dans une rue très connue et ils ont emmené tous leurs employés. A Genève, ils n'ont engagé personne. Je me trouvais à la direction, parce que je faisais partie de la direction genevoise pour aller négocier les plans sociaux dans une grande ville européenne. Nous avons appris de la bouche même de la direction de cette multinationale que Genève était très généreuse, parce que les autorités genevoises avaient proposé à la filiale financière, alors qu'elle n'avait rien demandé, des allégements fiscaux. Autrement dit, la même multinationale qui a supprimé dix-sept emplois à Genève et neuf à Bâle se voit fournir un magnifique cadeau. On leur dit: «Vous ne créez pas d'emplois à Genève, vous en avez même supprimé, mais parce que vous venez vous installer à Genève, on vous fait cadeau d'allégements fiscaux.»

Voilà, Mesdames et Messieurs les députés pourquoi je me bats. Parce que moi aussi j'ai eu une petite entreprise, j'ai un mari qui a une petite entreprise et moi je veux l'équité pour les petites PMU/PME. C'est pour cela que le parti socialiste se bat. Et arrêtez de nous dire que nous, nous voulons casser de l'emploi ! Nous nous battons depuis des années pour l'emploi à Genève, pour les Genevois et pour ceux qui habitent ici... (Brouhaha.) ...et je conteste vos propos selon lesquels le parti socialiste veut supprimer des emplois dans les PME. Nous voulons l'équité, c'est la raison pour laquelle je vous demande d'accepter mon rapport de minorité.

M. Edouard Cuendet (L), rapporteur de majorité. Je serai très bref. Evidemment, la rapporteure de minorité admet ici, en plénière, qu'elle n'a pas lu l'arrêt du Tribunal administratif. Elle élabore toute son argumentation sur les seules conclusions de cet arrêt, alors que l'arrêt lui-même, dans le corps de l'arrêt, précise clairement que l'article 34 de la Constitution est un droit fondamental, une garantie minimale, touchant au fonctionnement de la démocratie, en garantissant que les droits politiques puissent s'exercer de manière libre et régulière. Donc, avant de faire de grandes péroraisons sur les conclusions d'un arrêt, il faut lire l'entier de l'arrêt, parce qu'il est tout à fait pertinent. C'est pour cela que je me suis permis de le citer dans mon rapport de majorité, pour faciliter la lecture aux membres de ce parlement.

Et puis, dans son expérience personnelle, Mme Bolay a bien démontré qu'il s'agissait d'un problème de multinationale ! Uniquement de multinationale et que cela n'avait rien à voir avec les allégements fiscaux accordés à des entreprises locales, pour les sauver de la faillite. Donc, les conclusions de mon rapport sont parfaitement exactes: le PS veut éliminer les multinationales du canton. Mme Salerno l'a dit à plusieurs reprises, mais dans des publications subventionnées par la Ville de Genève, en disant qu'il y avait trop de multinationales à Genève. Alors, de nouveau une anecdote personnelle: en tant que contribuable de la Ville de Genève, je ne suis pas ravi qu'une magistrate de la Ville demande que les multinationales partent du canton. Cela étant dit, j'en reste à la conclusion de mon rapport de majorité.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Nous continuons le ping-pong, mais j'aimerais quand même qu'on s'en tienne à la recevabilité. Je sais que je prêche dans le désert, mais enfin, j'essaie. Je donne la parole à M. le député Roger Deneys.

M. Roger Deneys (S). Je suis désolé, mais pour aller sur le fond, un petit moment quand même, de l'initiative... (Exclamations.) ...parce que, Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez attaqué directement et frontalement le parti socialiste, en disant qu'on était contre l'emploi, contre les multinationales et, en réalité, moi je vais reprendre justement...

Une voix. Mais c'est vrai !

M. Roger Deneys. ...le rapport sur les comptes 2011. Dans ces pages 62 et 63 du rapport sur les comptes, on voit le nombre d'allégements fiscaux octroyés en 2011...

Le président. Je suis désolé, Monsieur le député, mais vraiment désolé...

M. Roger Deneys. Oui, mais j'y arrive. Je vais arriver sur la forme. Mais laissez-moi terminer...

Le président. Non, vous y arrivez ! Et j'aimerais vraiment vous prier de terminer ce débat dans la sérénité et sur la recevabilité.

M. Roger Deneys. Laissez-moi terminer, Monsieur le président.

Le président. Poursuivez, Monsieur le député.

M. Roger Deneys. C'est gentil, Monsieur le président. Eh bien, cinq entreprises ont bénéficié de ces allégements, et on ne sait pas de quel type d'entreprises il s'agit, concernant leur statut de multinationale ou non. On sait que trois d'entre elles sont dans la production de commerce de biens et deux sont dans les biotechnologies et la biométrie. On ne sait rien de plus. Concernant le nombre d'entreprises qui sont peut-être bénéficiaires de ces statuts d'allégements fiscaux et qui arrêtent ou qui disparaîtraient en raison de l'initiative socialiste, ce qu'on peut relever du tableau du Conseil d'Etat, toujours aux mêmes pages et sans qu'il n'y ait de totaux explicites mentionnés, c'est que sur les 135 entreprises bénéficiaires depuis 1998 - il faut déduire celles qui ne sont plus au bénéfice de ces allégements, parce que cela fait plus de dix ans - il y en aurait 60 et, sur ces 60, il y en aurait encore 42 qui bénéficieraient de ces allégements. Ce qui veut dire que 18 d'entre elles sont parties et, en l'occurrence, ce ne sont pas les socialistes, ni quiconque ici dans cette assemblée, qui ont pu faire partir ces entreprises, c'est d'autres considérations, liées à leur rentabilité, liées à d'autres avantages acquis ailleurs, mais cela, on ne peut pas le savoir.

Et c'est vrai que le manque de transparence qui régit les statuts fiscaux en général, les bénéficiaires d'allégements, fait que l'initiative socialiste est totalement recevable, parce que la qualité des bénéficiaires n'est pas connue préalablement au dépôt de cette initiative et, au moins, elle aura eu ce mérite, grâce au rapport du Conseil d'Etat IN 150-A, de clarifier un peu plus la typologie de ces entreprises. Cela n'est pas suffisant et certainement que l'hypothèse d'un contre-projet aurait peut-être permis de clarifier davantage la situation. Mais, dans tous les cas, la recevabilité est absolue, puisque ces entreprises sont souvent, voire toujours, multinationales.

M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Il y a certains propos que je ne peux pas laisser passer de cette manière, parce qu'on entend, et vous transmettrez à la rapporteuse de minorité, Mme la députée socialiste Loly Bolay, qui vient nous dire, presque une larme à l'oeil: «Mon mari est indépendant et, nous aussi, nous aurions voulu bénéficier d'abattements fiscaux». C'est ce que vous avez dit en substance, Madame la députée. Moi, j'aimerais quand même dire aux gens qui nous regardent: n'oubliez jamais, c'est vrai, il y a des allégements fiscaux pour les multinationales, mais le nombre de sous-traitants qu'elles ont est juste impressionnant. Alors imaginons une seule seconde, mais par pure fiction, que l'entreprise du mari de Mme Bolay soit dans, par exemple, le bois, la menuiserie, l'ébénisterie... et qu'une grande multinationale, ayant décidé de refaire tous ses bureaux, lui confie un contrat de 200 ou 300 000 F. Cela arrive tous les jours, dans les multinationales à Genève ! Eh bien, si ces multinationales ne sont pas là, finalement, vous irez réparer des portes chez des assistés sociaux qui n'auront de toute façon pas les moyens de vous payer et le problème des impôts sera réglé, car votre entreprise n'en payera pas, puisqu'elle n'aura pas de bénéfices ! C'est là où je veux en venir: il ne faut pas scier la branche sur laquelle nous sommes assis ! Avoir aujourd'hui des multinationales, certes cela peut choquer, en disant: «Mais pourquoi eux paieraient 11% et les autres 23% ?» Eh bien, regardez un petit peu le calcul inverse: les employés, eux, n'ont pas d'allégements fiscaux...

Une voix. Le calcul inverse, c'est le même calcul.

M. Eric Stauffer. Et les employés qui gagnent des 200, 300, 400 000 F par année, eux paient des impôts ! Allez demander au ministre des finances si, tout d'un coup, on avait toute cette manne fiscale qui disparaissait... Déjà, on n'a pas besoin de supprimer l'impôt sur les multinationales, parce que, vu qu'on n'est pas capable de faire de logements, ils vont dans le canton de Vaud, où ils paient zéro franc d'impôts dans le canton de Genève ! Mais posez la question à M. le ministre des finances s'il serait content. Evidemment, Madame Bolay, ces arguments ne vous plaisent pas, parce que c'est juste la vérité ! Cela découle juste du bon sens ! Alors, oui, et là le MCG rejoint ce qui a été dit, même, de temps en temps, par nos pires ennemis de droite, avec lesquels on a des fois des relations un peu humides... (Brouhaha.) ...mais vous voulez casser de l'emploi à Genève ! Et c'est ce que vous réussirez à faire !

Une voix. C'est dégoulinant. (Rires.)

Le président. Monsieur le député, et si on revenait à la recevabilité ?

M. Eric Stauffer. Voilà. Donc, ce que je veux dire - et en restant sérieux, parce que c'est un sujet important - il faut à tout prix maintenir ces avantages, mais surtout les compléter par un système de sécurité à Genève qui va rassurer ces gens qui vont venir, par un système de construction de logements où on ne va pas se laver les mains, tel Ponce Pilate, pour dire que l'arrière-pays du Genevois, c'est la zone frontalière ou le canton de Vaud et puis alors, surtout, j'encourage vraiment le gouvernement à aller taper sept fois sur la table du Conseil fédéral pour mettre un terme à cette inégalité fiscale - et là on vous soutiendra: lorsqu'un résident du canton de Vaud travaille à Genève - et cela a quand même fait la fortune de Nyon et des environs - et paie zéro franc d'impôt dans le canton de Genève ! Cela est une aberration helvétique à laquelle il faut aujourd'hui mettre un terme !

Le président. Revenons à notre initiative, cher Monsieur.

M. Eric Stauffer. Mais c'est les impôts, c'est les accords fiscaux, c'est global ! On ne peut pas sectoriser ! C'est une vision d'ensemble qu'il faut avoir ! Certains partis rêvent d'une vision pour Genève. Eh bien, le MCG a cette vision ! Et cette vision, c'est une économie forte ! J'en ai terminé.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la rapporteure de minorité, Loly Bolay. Sur la recevabilité, Madame la députée.

Mme Loly Bolay (S), rapporteuse de minorité. Oui, Monsieur le président, vous avez laissé largement M. Stauffer, qui ne lit pas les rapports sur la recevabilité et qui mélange un peu tout, parler longuement. J'aimerais juste vous demander si cela est normal qu'une entreprise comme Merck Serono, qui a bénéficié des largesses du gouvernement de Genève et qui, aujourd'hui, a sacrifié des centaines d'emplois et d'autres entreprises, multinationales ou autres, qui ne paient que 11% et que les entreprises ici paient 24% d'impôts. Trouvez-vous cela normal ? Moi je parle au nom de l'équité ! Que cela soit pour des gens de ma famille ou pour d'autres ! Toutes les entreprises genevoises paient plein d'impôts ! Alors, bien sûr que certains bénéficient des apports des multinationales, mais regardez ce que dit le rapport de gestion: c'est 60 millions de cadeaux qu'on a fait aux multinationales en 2011 ! 60 millions en fiscalité ! (Brouhaha.) Alors, Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, le Conseil d'Etat est d'accord de proposer un contre-projet...

Une voix. Parce que vous ne défendez que cela.

Le président. Monsieur le député Golay, laissez s'exprimer votre collègue !

Mme Loly Bolay. Le Conseil d'Etat dit qu'il est d'accord pour un contre-projet, le parti socialiste se réjouit de pouvoir en discuter si l'occasion lui est donnée. Pourquoi ? Parce que, dit-il, il veut diversifier le tissu social. Cela veut dire qu'implicitement le Conseil d'Etat reconnaît qu'effectivement les multinationales sont largement bénéficiaires des allégements fiscaux.

Le président. Merci, Madame la rapporteure. La parole est pour dix secondes à M. le député Stauffer.

M. Eric Stauffer (MCG). Monsieur le président, j'allais oublier l'essentiel. Nous avons, au MCG, un représentant au Conseil national, et je tiens ici à féliciter Mauro Poggia, qui, seul, a déposé un texte parlementaire au Conseil fédéral pour justement corriger cette iniquité fiscale entre le canton de Vaud et le canton de Genève. Et j'invite les autres groupes parlementaires qui ont des conseillers nationaux à appuyer le texte parlementaire de Mauro Poggia au Conseil national et au Conseil des Etats et à faire en sorte que ce texte soit discuté, car d'ores et déjà le Conseil fédéral s'est opposé à ce texte - on se demande bien pourquoi du reste... Peut-être parce que, quand on dit Genève, certains pensent que ce n'est pas grave et qu'ils n'ont qu'à payer !

Le président. Monsieur le député, vous avez dépassé dix secondes.

M. Eric Stauffer. J'ai dépassé. Je conclus. Donc cela serait vraiment une solution à un problème qui pourrait satisfaire tout le monde. Et là, on parle d'équité, Madame la députée socialiste: des gens qui habitent dans le canton de Vaud et qui travaillent à Genève, il faut aussi qu'ils paient des impôts à Genève !

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, peut-être que, comme le député Stauffer, devrais-je commencer par «Amis téléspectateurs, bonsoir» mais... (Rires.) ...ma fonction m'en empêche, hélas ! Mesdames et Messieurs, j'aimerais d'abord vous dire: comment est-ce que le Conseil d'Etat définit sa position sur la recevabilité d'une initiative ? Nous avons certes quelqu'un qui a fait des études de droit parmi nous, mon ami François Longchamp, mais chaque fois qu'on l'interpelle sur ses redoutables connaissances, il répond: «Cela fait longtemps et je n'ai jamais pratiqué.»! Ce qui signifie que c'est la direction des affaires juridiques de la chancellerie, particulièrement depuis le départ de nos éminents collègues Cramer et Moutinot, qui fait le rapport que vous connaissez, extrêmement pointu, et, sauf si le sens commun allait à l'encontre de ses conclusions - auquel cas nous avons toujours la possibilité de vérifier chez un spécialiste éminent - nous nous rangeons à cet avis. Avec un principe, qui d'un Conseil d'Etat à l'autre a toujours été le même, si nous avons un doute, nous allons plutôt dans le sens de laisser le peuple s'exprimer.

Sur ce point, qu'ont dit nos juristes ? Ils ont dit: «En tout cas, la clause qui est dans les dispositions transitoires prévoyant une rétroactivité, cela n'est pas possible et, en plus, c'est une somme inouïe d'ennuis, de procès, de demandes en dédommagements, si, par hasard, on laissait cela.» Nous nous sommes rendus à cette opinion. Il ne nous avait pas échappé, parce que nous savons lire, que l'exposé des motifs était relativement confus, au point que certains collaborateurs non fiscalistes du département, lorsque l'initiative a été présentée publiquement, ont cru eux aussi, l'espace d'un instant, que cela parlait des statuts et pas des allégements.

Certes, Mesdames et Messieurs les députés, j'ai vu beaucoup de formulaires de référendums et d'initiatives dans ma vie: en politique, on ne demande pas à une force partisane de donner autre chose que son point de vue. En démocratie, la vérité est supposée sortir du choc des opinions. Effectivement, de ce point de vue là, nous pensons qu'il y a bel et bien, à Genève, beaucoup de nos concitoyens - pas la majorité, mais beaucoup - qui estiment que les désagréments qu'ils ont dû subir à cause de l'arrivée d'un certain nombre de ces entreprises multinationales sont plus importants que les avantages qu'ils en ont retiré. Je ne vous parle pas du bien-être général. Nous pensons qu'ils ont tort, mais nous pensons que ces désagréments, ceci dit, sont réels et qu'on ne peut pas simplement dire: «Non, il n'y a pas de problèmes.» Vous l'avez dit vous-même, mais en proposant, Monsieur Stauffer, d'autres solutions.

Alors, à partir de là, j'aimerais tout d'abord dire deux ou trois choses. Dans le débat d'aujourd'hui, j'ai décelé plus d'une cinquantaine d'erreurs factuelles, d'inexactitudes, de confusions, et après j'ai arrêté de compter. (Rires.) J'aimerais quand même rappeler - comme a dit M. Stauffer, «pour ceux qui nous regardent» - que, tout d'abord, la majorité des multinationales n'ont ni statuts ni allégement, qu'elles représentent aujourd'hui plus de 30% des emplois et, si ma mémoire est bonne, plus de 40% du PIB genevois. Ces ordres de grandeur, il faut quand même les avoir en tête. Parmi ces sociétés, il en est un certain nombre, de tailles très inégales, un millier à peu près, représentant 20 000 emplois, qui ont des statuts ou des sociétés qui dépendent ou qui sont directement liées à des sociétés à statuts. Nous avons montré dans une étude récente, qui a eu un certain impact, qu'à ces 20 000 emplois directs correspondaient 30 000 emplois indirects. On peut toujours demander à un autre institut s'il arrive à la même conclusion que le Crea, mais peu importe. Même l'usine Ford de Genk, où les gens ne sont pas aussi bien payés que dans les multinationales ici, ont compté un ratio de 2. Là, on est arrivé à un ratio de 2,3, si ma mémoire est bonne, sur les emplois. C'est dire, Mesdames et Messieurs, qu'il s'agit de choses sérieuses.

En dernière analyse, il y a ces allégements. Là-dessus, je crois qu'il y a une ou deux choses qui ne sont pas bien comprises par les uns et par les autres. Ces allégements ont des conditions. Une des conditions, c'est qu'il ne doit pas y avoir de concurrence directe entre les entreprises, ce qui fait que malgré tout l'amour que nous avons pour les artisans boulangers, nous ne pouvons pas alléger une nouvelle entreprise de boulangerie qui vient ouvrir parce que c'est de la concurrence déloyale. Cela limite le nombre, et c'est pour cela qu'il n'y a que cinq, six ou sept cas d'allégements par an. Cela limite d'autant plus que la deuxième condition, c'est que l'entreprise doit être nouvelle, développer une nouvelle activité ou être en restructuration. Hors de cela, même si c'est une entreprise bio, responsable, sociale, solidaire, représentant 300 emplois, les allégements ne s'appliquent pas ! Il faut qu'il y ait quelque chose de nouveau qui n'entre pas en concurrence. Est-ce que cela a toujours été respecté ? Presque. Je pense qu'il y a un certain temps les décisions en opportunité étaient moins bien analysées, moins bien fondées. Mais pour avoir regardé les allégements faits depuis la loi sur l'harmonisation, dans l'ensemble, cela a été respecté. Il y a quelques exceptions. Une autre chose qui doit être précisée, c'est que, bien sûr, les multinationales à statut peuvent prétendre à des allégements et en ont obtenu. Maintenant, évidemment, cela réduit aussi le cadeau, puisque de tout façon, comme vous l'indiquez, elles paient en moyenne 11,3% à l'arrondissement, alors que les autres c'est 24% et que là, évidemment, elles vont payer tout l'impôt fédéral direct, rien de cantonal, puis elles monteront à un impôt cantonal de 3%.

Cette clause fait que le système est utilisé aussi bien pour des start-up - et pour cela, vous avez un certain nombre d'informations dans le rapport - que pour des entreprises industrielles, qu'elles soient nouvelles ou qu'elles soient en restructuration, il y en a eu beaucoup. Cette clause s'est aussi appliquée à un certain nombre d'entreprises qui agissaient pour le marché local, mais qui proposaient un produit qui n'existait pas. Il y a eu une vague de sociétés, pendant la bulle internet, elles ont d'ailleurs à peu près toutes disparu, pas parce que c'était des multinationales, mais parce qu'elles n'avaient pas beaucoup d'assise. Il est vrai que la mortalité de ces entreprises est plus forte que les entreprises endogènes, puisqu'on prend un risque.

Il est vrai aussi, Mesdames et Messieurs, que, pour les start-up, ce n'est pas extrêmement efficace, puisque, généralement, elles ne font pas de bénéfices pendant la période des allégements, il y a des exceptions, mais pas tant que cela. Il faudrait qu'on trouve mieux, en fait. Maintenant, nous pensons honnêtement que le rapport de la commission législative n'est pas suffisamment étayé. La commission législative aurait dû demander un avis à quelqu'un qui fait autorité dans le domaine des droits politiques pour étayer sa prise de position. C'est du droit, vous aurez peut-être raison, nous aurons peut-être raison, nous verrons. Mais là, nous pensons qu'il y a, pour reprendre un terme utilisé récemment par un de mes amis, qui s'appelle Michel, un côté un peu amateur dans la démarche. Bien, cela étant dit... (Rires.) Je peux aussi faire un peu de spectacle, cela fait longtemps que je ne suis pas venu ! Un ami personnel, je précise et de longue date, bientôt vingt ans ! J'ajoute que dans ces conditions, il m'aurait paru plus raisonnable, par principe, de laisser le peuple trancher sur la version dans laquelle on invalidait ce que tout le monde admettait qui ne jouait pas: la rétroactivité. Et, en dernière analyse - et là je m'excuse, je vais faire une toute petite digression sur le fond - j'ai l'impression que c'est une faute politique. Pourquoi ? Parce que ce que je constate, c'est qu'il y a un certain nombre de convergences qu'on observe. Il y a eu un débat extrêmement vif, il y a deux ans, avec des attaques extrêmement vives. Je peux en parler, parce que principalement, j'en étais la cible, pour des raisons électorales ou autres... Je m'excuse, c'est bien le «Père Hiler» que les socialistes ont voulu brûler, ceux de la Ville, mais... (Rires.) ...tout de même. Bref, j'en suis sorti indemne...

Ce que je constate, c'est que, devant l'ampleur des dangers qui nous menacent, sur la question des statuts, tout le monde a compris que la solution n'était pas totalement mûre, mais qu'il fallait qu'on travaille à en trouver une, celle qui fait le moins de dégâts, parce qu'effectivement nous ne voulons pas perdre 50 000 emplois et nous ne voulons pas perdre, en effet direct - sans aucun effet indirect ni effet induit - 1 milliard 100 millions de recettes fiscales. Et donc nous devons trouver une solution.

Cette solution passe par l'égalité de traitement de toutes les sociétés. On peut discuter à l'infini de quel est le taux qui permet cela. C'est plutôt du réglage fin, on verra à l'issu des travaux de la Confédération. Et puis, je crois aussi, en regard de toutes les interventions du parti socialiste - parce que j'ai la chance d'avoir des gens qui prennent tous les communiqués de presse et qui me les donnent - qu'ils ont aussi compris que l'initiative était vouée à l'échec. Effectivement, même si le gros des allégements, en termes quantitatifs, en termes d'emplois, comme en termes d'impôts concerne bel et bien des multinationales, l'outil a été particulièrement opérant et le plus grand nombre d'entreprises - vous avez des statistiques sur la période - étaient bien des entreprises qui n'étaient pas des multinationales. Les multinationales sont plus grosses en général, pas toutes d'ailleurs, mais en réalité cette chose est relativement importante. Donc, nous avions la chance d'avoir un débat économique dépassionné sur le thème: «Maintenant qu'on sait qu'on peut tout perdre, comment on va faire pour ne pas tout perdre ? Mais comment on va faire aussi pour corriger un certain nombre de problèmes liés à notre mode de développement ?»! Comment allons-nous faire pour que dure la croissance extraordinaire qui est derrière nous - elle n'est pas forcément devant par contre - et qui a conduit à des aspects de mal-développement dénoncés ici. On s'attaque chaque fois à des choses différentes. Quels sont leurs rapports avec la croissance et, surtout, que faisons-nous, Mesdames et Messieurs, de cette réalité ? Le premier secteur économique à Genève n'est plus la banque. Ce n'est pas l'horlogerie, ce n'est pas la Genève internationale, c'est le commerce de gros, qui inclut aussi bien les sociétés de négoce que les QG de multinationales. Oui, mais d'un autre côté - et c'est la réflexion du canton de Vaud, lisez attentivement la documentation du canton de Vaud - nous devons veiller à ce que les allégements soient un instrument de diversification.

Dans les années 90 et encore au début des années 2000, là où les très grosses opérations ont été réalisées, il était normal, alors que Genève se désindustrialisait et qu'il ne nous restait pratiquement plus que la banque, de trouver de nouvelles manières et même d'y mettre le prix, je veux dire, avec des allégements extraordinairement avantageux. Lorsque ce secteur devient le premier, il faut aussi éviter la monoculture dans ce domaine-là, et c'est vrai que, dans l'option du Conseil d'Etat, de plus en plus l'allégement doit d'abord être un outil de diversification. Et même si les opportunités industrielles sont rares, le récent contrat avec une société genevoise sur des pièces en platine pour l'EADS montre qu'il y a toujours des niches. Par contre, dans les domaines...

Non, mais c'est quand même important, je veux dire: on peut encore faire de l'industrie en Suisse ! Mais il n'y a pas que de l'industrie, on peut faire de la recherche en Suisse. Je me permets à ce propos de dire que la société Serono, à l'époque était une société totalement familiale, que c'est après qu'elle a été rachetée par la société Merck, qu'elle n'a jamais été un siège, mais une succursale. Donc, même lorsqu'il y a vertu, c'est-à-dire que l'on encourage la recherche et le développement, rien n'est acquis. De la même façon que quand vous avez une chaîne industrielle, elle peut faire faillite. Mais il est vrai que nous sommes d'avis, au Conseil d'Etat qu'aujourd'hui, là où nous pensions avoir marqué de sérieux points, c'est-à-dire dans les biotechs, la disparition du navire amiral fait que nous devons retrousser nos manches, que, pour ce qui est des cleantechs, il y a des choses, mais cela est très peu et le centre se développe plutôt en Suisse alémanique, comme les biotechs se développent dans le canton de Vaud.

Donc il nous faut à tout prix - cela est le fond - garder cet instrument ! Mais nous étions d'accord d'essayer de trouver, avec vous, avec la commission, puisque c'est elle qui présente un contre-projet, des modalités. De ce point de vue, notre démarche n'est pas différente de celle du Conseil d'Etat vaudois qui, après avoir reçu des critiques assez dures du contrôle fédéral, puisque c'était l'arrêté Bonny, sur le fait que leur procédure était questionnable, a corrigé le tir.

Nous n'avons pas été attaqués. Il n'y pas d'évidence que nous soyons sortis. Mais nous pensions qu'il était intéressant d'essayer d'avoir peut-être quelque chose de mieux cadré et d'en discuter avec vous, toujours dans l'idée de construire un consensus autour de la défense de l'essentiel, parce qu'il y a tellement de choses que l'on peut discuter, de toute façon ce n'est pas la peine de se disputer quand on risque de couler Genève. Vous ne voulez pas; moi ce que je crains simplement c'est qu'on retarde ce débat, parce qu'il aura lieu. Si vous continuez à suivre la majorité, si le Tribunal fédéral donne raison aux initiants, on est repartis pour un tour, mais en retard.

Enfin, je ne verrai pas ce round-là, parce que le Tribunal fédéral ne va pas très vite. Inversement, si le Tribunal fédéral donne raison à la majorité de ce Grand Conseil, alors je crois que nous serons amenés par nous-mêmes à présenter un projet qui fixe un certain nombre de choses. Pour nous, ce qui est important, c'est de pouvoir compter, comme tous les gouvernements de Suisse, pour les questions essentielles, sur une majorité qui défend non pas les intérêts d'une minorité, mais les intérêts du peuple. Mais je m'excuse de vous le dire: les intérêts du peuple, ce n'est pas qu'on perde 50 000 emplois et 1 milliard 100 millions de recettes, même si c'est pour des idées nobles et généreuses.

Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que le Conseil d'Etat vous recommande. Il vous recommande donc les conclusions du rapport de minorité, puisque les conclusions du rapport de minorité sont celles du Conseil d'Etat, ce dont nous le remercions et, pour le reste, il peut vous assurer qu'il cherchera à améliorer le système des allégements et qu'il fera tout ce qui est en son pouvoir pour que nous évitions les effets d'une débâcle, non pas annoncée, mais menaçante. Merci, Mesdames et Messieurs. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons passer au vote.

M. Eric Stauffer. Vote nominal, Monsieur le président !

Le président. Est-ce que vous êtes soutenu ? Oui, largement soutenu. Alors je vous demande beaucoup d'attention. Unité de la forme: estimez-vous que l'IN 150 respecte l'unité de la forme ?

Mise aux voix à l'appel nominal, l'unité de la forme de l'initiative 150 est adoptée par 92 oui.

Appel nominal

Mise aux voix à l'appel nominal, l'unité du genre de l'initiative 150 est adoptée par 91 oui contre 2 non.

Appel nominal

Mise aux voix à l'appel nominal, l'unité de la matière de l'initiative 150 est adoptée par 59 oui contre 32 non et 2 abstentions.

Appel nominal

Mise aux voix à l'appel nominal, la conformité au droit supérieur de l'initiative 150 est rejetée par 66 non contre 27 oui.

Appel nominal

Mise aux voix à l'appel nominal, l'invalidité partielle de l'initiative 150 est rejetée par 66 non contre 28 oui.

Appel nominal

Mise aux voix à l'appel nominal, l'exécutabilité de l'initiative 150 est adoptée par 72 oui contre 13 non et 8 abstentions.

Appel nominal

Le président. Nous passons au vote final: l'initiative 150 doit-elle être déclarée totalement invalide ?

Mise aux voix à l'appel nominal, l'invalidité totale de l'initiative 150 est adoptée par 66 oui contre 28 non.

Appel nominal

L'initiative 150 est donc déclarée irrecevable.

Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat IN 150-A.

Le Grand Conseil prend acte du rapport de commission IN 150-B.