République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, présidente.

Assistent à la séance: Mmes et MM. Laurent Moutinot, Micheline Spoerri, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat, Carlo Lamprecht, Robert Cramer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Blaise Bourrit, Anita Cuénod, André Hediger, Jacques Jeannerat, Véronique Pürro, Pierre Schifferli, Louis Serex et Ivan Slatkine, députés.

E 1314-A
Prestation de serment de Mme CAMBI FAVRE-BULLE Alessandra élue Juge à la Cour de justice (Entrée en fonction : 1er septembre 2005)
E 1311-A
Prestation de serment de Mme LAMMAR Stéphanie élue Juge assesseur au Tribunal des baux et loyers (Entrée en fonction immédiate)
E 1309-A
Prestation de serment de Mme CRUCHON Laurence élue Juge assesseur à la Chambre d'appel en matière de baux et loyers (Entrée en fonction immédiate)

La présidente. Mmes Alessandra Cambi Favre-Bulle, Stéphanie Lammar et Laurence Cruchon sont assermentées. (Applaudissements.)

Annonces et dépôts

Néant.

La présidente. Nous reprenons notre débat sur l'initiative 121.

IN 121-C
Rapport de la commission de l'enseignement et de l'éducation chargée d'étudier l'initiative populaire 121 "Pour le maintien des notes à l'école primaire"

Suite du débat

M. Alberto Velasco (S). Je n'avais pas l'intention de prendre la parole, mais il faut dire que M. Barrillier m'a inspiré. (L'orateur est interpellé.)Absolument, Monsieur, absolument !

M. Barrillier a parlé d'intégration. L'école devrait être un outil d'intégration et pour cela il faudrait, selon lui, «serrer les boulons». Notre groupe pense en effet que l'école est un outil d'intégration, mais que pour cela il faut lui donner des moyens. Les moyens on les donne, en tous les cas une fois par année, ici, dans ce Grand Conseil, en votant le budget. Or, on constate précisément que, année après année, le groupe auquel appartient M. Barrillier - et donc lui-même - diminue le budget du DIP. Alors, voyez-vous, l'intégration, c'est aussi donner des moyens au DIP à travers le budget et non pas voter des réductions !

On a entendu également notre collègue dire que l'école s'occupe de parler syndicats, associations et politique. Bien sûr qu'elle le fait ! Le rôle de l'école, c'est aussi de faire des élèves des citoyens. Intégrer ces jeunes à la cité, c'est en faire des citoyens et leur faire prendre conscience qu'il y a des règles, des partis et ceux qui façonnent une cité.

Enfin, mon collègue a donné un exemple assez significatif en disant qu'il avait connu un jeune vitrier incapable de calculer une surface... Je partage l'avis que, quand on est apprenti vitrier, il faut savoir calculer une surface. Il faut non seulement savoir calculer, mais il faut aussi comprendre ce qu'on calcule. Tout cela, c'est très bien, mais si on calcule sans savoir à quelle formule on a affaire, cela ne sert strictement à rien et on se trompe très souvent. Je pense qu'aujourd'hui l'école a intégré non seulement l'apprentissage du calcul, mais aussi la compréhension du pourquoi du calcul.

Mon collègue Brunier me disait tout à l'heure que, précisément, les élèves dont parlait M. Barrillier avaient fait leurs classes à l'époque où l'on mettait des notes; je remercie donc M. Barrillier, parce qu'il nous a donné un exemple patent de ce que les notes récompensent tôt ou tard des élèves qui ne savent pas utiliser des outils qu'on leur a donnés.

Plusieurs orateurs favorables aux notes nous disent qu'elles sont un moyen pour mesurer si un but est atteint, et l'on peut très bien avoir deux classes qui suivent les mêmes cours, mais dont les niveaux sont différents. Les notes seront alors totalement différentes : un «6» dans une classe ne voudra pas dire la même chose que dans l'autre, de même qu'un «2» dans l'une ne voudra pas dire la même chose qu'un «2» dans l'autre. On ne peut même pas contrôler avec les notes l'objectif qu'on se donne. (L'orateur est interpellé.)Oui, cher Monsieur Catelain. Parce que cela dépend, Monsieur, de la référence que l'on a et de ce que l'on mesure ! En revanche, mesurer le niveau d'avancement et d'apprentissage des élèves, cela c'est significatif.

Je ne m'étendrai pas sur la question de la «méritocratie» et de la civilisation dont M. Kunz nous a entretenus tout à l'heure... C'était très intéressant, mais, cher collègue, je tiens à vous dire qu'à mon humble avis une civilisation est basée avant tout sur le savoir, le devoir et la responsabilité envers la cité et les citoyens. Quant au mérite, c'est appartenir à la cité qui est un mérite et non pas de faire du lucre avec son savoir.

M. François Thion (S). Mesdames et Messieurs les députés, je crois que la première particularité du débat que nous avons ce soir, c'est son aspect technique. Il est également passionné. La mise en place de la rénovation n'est pas un instrument politique ou idéologique, mais c'est la conclusion de plus de 50 ans de réflexions pédagogiques. Pour prouver que ce n'est pas une histoire de gauche et de droite, on peut remarquer que parmi les signataires de l'initiative il y a des gens qui sont membres de partis de gauche et d'autres de partis de droite. De même, on trouve des opposants à l'initiative de l'ARLE aussi bien à gauche qu'à droite.

Rappelons aussi que la situation antérieure au projet actuel de rénovation de l'enseignement primaire genevois était loin de représenter un âge d'or de l'école. Les élèves genevois qui ont passé le test PISA, dont nous connaissons les résultats, ont fréquenté des classes primaires qui n'étaient pas en rénovation. De même, les études effectuées à la même époque en Suisse auprès des jeunes recrues et apprentis confirment des lacunes scolaires qui sont, c'est vrai, inquiétantes. Pourtant, le lien n'est pas si évident entre des résultats moyens et l'absence de notes ou encore avec un enseignement en rénovation.

En ce qui concerne le redoublement, très longtemps j'ai pensé, comme le rapporteur de minorité, qu'un «redoublement en début de scolarité permet à l'élève de combler rapidement ses lacunes, notamment en lecture, afin de suivre ensuite une scolarité normale.» M. Follonier ajoute : «C'est le bon sens.» J'ai cru longtemps aussi à ce bon sens, mais le bon sens ne fait pas tout. Mme Hagmann a cité tout à l'heure un certain nombre de chercheurs universitaires spécialistes de la pédagogie. Je citerai aussi des recherches effectuées en France. J'ai lu un article du «Monde» du 28 mai 2004 qui rend compte d'une recherche effectuée par l'Institut de recherche sur l'éducation. Monsieur Kunz, ça devrait vous intéresser, parce que cet institut est spécialisé dans la sociologie et surtout dans l'économie de l'éducation. Le titre du journal «Le Monde» est le suivant : «Le redoublement accroît le risque d'échec scolaire.» Tiens ! Pourtant le bon sens nous disait le contraire. Si on va un peu piocher dans cette recherche publiée dans un cahier, on s'aperçoit que le redoublement fragilise la confiance en soi de l'élève et l'amène ainsi à réduire ses ambitions. Cette recherche montre également que plus le redoublement intervient tôt, plus il est, en moyenne, associé à une faible réussite scolaire dans l'avenir. L'image des élèves redoublant auprès des enseignants apparaît moins favorable, ce qui influe en général sur leur orientation. Le redoublement apparaît, nous dit cette recherche, véritablement efficace au lycée, c'est-à-dire entre l'âge de 15 et 18 ans. A ce moment-là, l'enquête montre que 80% des redoublants obtiennent le baccalauréat général ou technique.

Voilà pour mettre un peu les choses au point sur le redoublement. Il n'y a pas que des histoires de bon sens. Quand on fait de la recherche en éducation, que ce soit à Genève ou en France - en l'occurrence, c'est l'Université de Dijon qui a fait cette recherche - on arrive aux mêmes conclusions.

Les notes maintenant. Ne pas mettre de notes, je le rappelle, ne signifie pas que la rénovation de l'école primaire ne prévoit pas d'évaluation. Dans le système de l'école rénovée, les parents sont régulièrement mis au courant des apprentissages de leurs enfants. Le changement est avant tout qualitatif. La nouvelle évaluation proposée dans la rénovation est détaillée. Elle sollicite l'intérêt des parents auxquels elle reconnaît d'ailleurs des compétences de partenaires et un rôle de suivi des élèves.

A cela s'ajoute que la note peut-être un leurre ou un mensonge. Dans son rapport de minorité, M. Follonier le reconnaît : «Même si la note présente une apparence d'objectivité, personne ne nie que, derrière la note, peuvent s'articuler quantité de facteurs découlant de la subjectivité de l'enseignant.» C'est vrai - je vois que M. Follonier fait de temps en temps un pas en avant dans notre direction. Je ne voudrais pas tronquer sa citation parce qu'il revient ensuite complètement en arrière : «Cette faiblesse, si elle existe, n'est toutefois pas l'apanage exclusif de la note, bien au contraire.» Alors là, je ne sais plus ce qu'il veut dire. Il dit à la fois que la note ne veut rien dire et qu'en même temps il ne faut que les notes... (L'orateur est interpellé.)Vous me répondrez tout à l'heure, Monsieur Follonier !

Voyons maintenant l'exposé des motifs des initiants sur les six degrés de l'école primaire. Il y a un alinéa de la loi qui mentionne six degrés. Les initiants disent : «A force de laisser du temps au temps, on ralentit le rythme des apprentissages et l'on reporte toujours à plus tard certaines acquisitions fondamentales pour la suite de la scolarité.» (Commentaires.)Eh bien, c'est faux ! Là aussi, je citerai un exemple français. La mise en place des cycles scolaires voulus par la loi d'orientation de 1989 a donné les résultats suivants: à la fin de l'école primaire la proportion d'élèves en retard a été ramenée de 25,4% pour 1990-1991 à 19,5% en 1999-2000, après la mise en place les cycles scolaires. Il y a donc progrès.

La présidente. Il faudra bientôt terminer, Monsieur le député.

M. François Thion. Monsieur Follonier permettez-moi de vous citer encore une fois, la dernière. J'ai lu attentivement votre rapport et, sur un certain nombre de points, je trouvais que vous commenciez à comprendre des choses en pédagogie. (Commentaires.)Mais il y a des dérapages. Je vous cite : «Mais il est vrai que le goût de l'effort et sa valorisation sont des notions que les plus fervents partisans de la rénovation ont remis au rang des idées désuètes ou rétrogrades.» Pourquoi dites-vous des choses pareilles ? En fait, quand vous avancez des choses comme ça, vous attaquez non seulement les partisans de la rénovation, mais encore tous les enseignants qui travaillent dans la rénovation et même, je dirais, l'ensemble du corps enseignant genevois ! Ce sont des propos impardonnables. (Commentaires.)

La présidente. Vous avez parlé plus de sept minutes, Monsieur le député !

M. François Thion. Je termine. Pour ce qui est de la rénovation, il faut tout de même conclure en disant que la plupart des pays occidentaux ont opté pour des réformes scolaires. Les principales options qu'ils ont choisies sont proches de celles retenues à Genève. L'école moderne n'a pas pour objectif, Madame Bartl, d'éliminer les plus faibles, mais de former tous les élèves ! L'école primaire genevoise a aussi pour objectif de transmettre des compétences et des savoirs. Elle le fait ! Il n'y a pas de retour en arrière. Il ne faut pas croire qu'à l'école on n'apprend plus rien.

Pour conclure, je dirai que les socialistes vous demandent de refuser cette initiative et d'accepter le contreprojet du Conseil d'Etat dont on parlera bientôt.

Mme Salika Wenger (AdG). En préambule, j'aimerais dire que je ne souscris en aucun cas au discours rétrograde et conservateur de ceux qui prétendent défendre l'école républicaine qu'ils ont pourtant abandonnée depuis si longtemps au point de n'y faire plus référence qu'en parlant d'une école que je suis heureuse de ne pas avoir connue et que je ne souhaite à aucun élève, même le plus doué.

Ma critique est d'un autre ordre. Elle n'a rien à voir avec la mécanique de l'enseignement, elle porterait plutôt sur ce qui, à mon sens, sous-tend la réforme. L'école est incontestablement, de nos jours, l'espace d'activité sociale qui prédispose le plus un individu à être repéré comme inadapté. L'échec scolaire, partiel ou global, à l'un des apprentissages fondamentaux - lecture, écriture, calcul; la déviance des comportements vis-à-vis du maître ou d'autres élèves; l'inobservation répétée des règles de conduite tendent à être systématiquement interprétés comme des symptômes significatifs de perturbations.

On envisage, sous le concept d'«enfant en difficulté» non seulement les effets de la pauvreté du milieu socioculturel, mais surtout - c'est ce qui me gêne le plus - les perturbations qui seraient induites par des modes de relations affectives, personnelles, familiales, ou sociales, différentes des normes dominantes. Dans ce cas-là, il me semble que nous ne sommes pas loin des théories des aliénistes du XIXe siècle qui faisaient un rapport direct entre pauvreté et anormalité. Et c'est là où je ne suis plus d'accord.

C'est une des raisons, entre autres, qui me fait regretter que certains, dans nos rangs, aient chaussé bien trop rapidement les lunettes des préjugés culturels dominants. En effet, il convient de penser les inadaptations scolaires dépendantes de l'origine sociale comme des produits de rapports de force sociaux, et non de les imputer a priori comme des carences ou des infériorités presque constitutives des individus. C'est pourtant ce qui est fait aujourd'hui dans le discours pédagogique.

Pour faire simple, je vais vous dire ceci : les enfants des familles modestes ne sont pas les débiles légers qu'on nous décrit au fil des manuels pédagogiques. Ces enfants méritent, comme les autres, l'enseignement riche et exigeant qui fera d'eux des citoyens à part entière. Ce n'est certainement pas en faisant du bricolage pseudo-pédagogique qu'on y parviendra.

Au nom de la lutte contre l'échec scolaire, on a abaissé les exigences en matière de connaissances de base; on a déstructuré les savoirs; on a demandé de réduire les devoirs à domicile; on a supprimé le redoublement en primaire, créant ainsi les conditions idéales pour développer ce qui, à mon sens, est le véritable échec scolaire, c'est-à-dire le non-accès au savoir. (Applaudissements.)Les maîtres et les professeurs ont été poussés à faire du ludique, de la pédagogie de projet, à multiplier les activités diverses, extrascolaires; je trouve cela très bien, mais cela coûte du temps et de l'énergie. Où les prendre en période de disette budgétaire, si ce n'est au détriment des apprentissages de base ? Ces apprentissages de base sont cruciaux non seulement pour les études, mais aussi, de manière extrêmement importante, dans la vie en général.

Les décisions en matière d'enseignement doivent être prises dans un contexte marqué par une crise économique durable et profonde. Durant les années 90, lorsque Mme Brunschwig Graf mettait en place ce que nous nommons aujourd'hui la rénovation, l'OCDE avait précisé que cette ambitieuse réforme nécessiterait une augmentation d'au moins 20% du budget du département. Non seulement ça n'est pas arrivé, mais en plus l'école doit faire face aujourd'hui à une baisse importante de ce budget ! On doit faire mieux avec moins d'argent, moins de personnel, moins de temps d'enseignement et beaucoup plus d'élèves ! On comprendra donc le scepticisme de certains quant à la pertinence de ce train de réformes qui a poussé une partie non négligeable de la population à signer la fameuse initiative 121 et à porter sur la place publique ce débat important.

J'en viens maintenant au véritable but de notre réunion de ce soir qui était de discuter, me semble-t-il, d'un contreprojet. Dans son rapport, M. Brunier tente de nous forcer la main en indiquant qu'il n'est point de salut hors du contreprojet du département. Je ne me prononcerai pas sur celui-ci, car ce n'est pas l'objet de notre discussion - enfin, je croyais que nous votions sur le principe d'un contreprojet possible. Dans mon innocence, je pensais même qu'il serait envisageable de présenter un contreprojet qui ne serait pas cosmétique et qui proposerait, par exemple, un moratoire sur les réformes et qui demanderait un temps de réflexion et d'évaluation scientifique des expériences réalisées dans la perspective de permettre un ajustement avec les attentes de la population concernée. Visiblement, ce n'est pas le cas !

Alors, s'il faut prendre position sur l'unique contreprojet, je voterai en faveur de l'initiative et je vous invite à faire la même chose. (Applaudissements.)

Mme Jeannine De Haller (AdG). Je ne sais pas si Mme Wenger a précisé qu'elle parlait en son nom propre ou pas. Si elle l'a fait, je l'en remercie, sinon je précise qu'elle est intervenue strictement en son nom propre et que l'Alliance de gauche ne partage pas son opinion. (Brouhaha.)

A propos du sujet de ce soir, deux intervenants ont dit qu'il s'agissait d'un débat de société. C'est vrai. Ce dont il s'agit ce soir, c'est du choix de donner sa chance à chacune et à chacun depuis le début de l'école, et jusqu'au bout de la scolarité obligatoire en tous cas. Certains d'entre nous ne partagent pas cette opinion, ils estiment que les notes permettent d'établir directement des frontières entre certains enfants, ceux qui ont droit à l'éducation et les autres. Nous ne sommes bien entendu pas d'accord avec cela.

M. Aubert parlait tout à l'heure de l'aspect psychologique extrêmement important de la note. Effectivement, une note, c'est une façon de censurer, de dire «réussi» ou «raté». Le fait d'estimer le travail de l'élève à l'endroit où il se situe, sa manière de progresser, bref, de faire ce qu'on appelle une évaluation formative, permet à l'élève de se sentir valorisé, de se construire. Et c'est grâce à cette estime de soi que les enseignants vont aider à construire, que l'envie d'apprendre sera suscitée. Les encouragements accompagnés d'évaluations formatives, c'est cela qui motivera les enfants à atteindre les objectifs fixés.

Je vous rappelle que, dans la réforme, il y a aussi des objectifs. Ils sont très précis et ils sont tous écrits, il y a de gros classeurs pleins d'objectifs. Il ne s'agit donc pas de ne plus rien apprendre. Ces objectifs et l'envie d'apprendre suscitée chez ces enfants, c'est précisément ce qui leur évitera dorénavant de dire que les notes sont la raison d'être de leur travail, ce que je trouve épouvantable. Heureusement que, grâce à l'évaluation formative, les enfants apprendront à dire autre chose que cela et à travailler autrement qu'uniquement pour les notes.

Un autre aspect extrêmement important de la réforme est les regards multiples portés par différents enseignants sur le même enfant. Je ne suis pas sûre que cela ait déjà été mentionné ce soir. C'est pourtant un des aspects qui, à mes yeux, est extrêmement important. Cela permet un regard multiple qui, lui aussi, construira positivement l'enfant et le valorisera.

Enfin - je ne veux pas parler trop longuement - je remercie Mme Hagmann de son intervention. Je voudrais ajouter à tous ses «oui» à la connaissance, à tous ses «oui» à tout ce qui se passe à l'école, un «oui» à l'enfant, à chacune et chacun de ces enfants, pour qu'ils puissent étudier, apprendre, et avoir du plaisir à le faire ! (Applaudissements.)

M. Gilbert Catelain (UDC). La question qui nous est posée ce soir n'est pas de savoir si les moyens alloués à l'instruction publique sont suffisants ou non: ils le sont.

La question n'est pas non plus de savoir si l'école genevoise remplit sa mission ou non. Elle n'est pas non plus de savoir si l'école est parasitée par l'évolution sociale de ce canton; ni de savoir pour quels motifs les profs doivent passer en moyenne un tiers de leur temps à essayer d'instaurer de la discipline au lieu de faire de l'enseignement; ni de savoir pourquoi l'un des plus grands problèmes de l'école réside dans le manque d'intérêt des élèves; ni encore de comprendre pourquoi ce qui a fonctionné plus ou moins bien dans le passé fonctionne un peu moins bien ces dernières années.

La question qui nous est posée ce soir est simplement la suivante: approuvons-nous ou pas une évaluation continue des connaissances et des compétences; approuvons-nous ou pas une évaluation chiffrée des connaissances et des compétences et, finalement, si nous approuvons une évaluation certificative par rapport à des objectifs, des compétences et des connaissances.

Donc, pour répondre à M. Brunier, je dirai qu'il ne m'a pas convaincu par sa démonstration que les notes étaient inutiles. Je trouve déplorable qu'une initiative signée par 28'000 personnes soit considérée comme du populisme. Je trouve que c'est surtout populaire et que c'est l'expression d'une volonté populaire.

Les notes sont un point de repère pour les enfants, les parents et les enseignants. Si vous faites une analyse statistique, dans un travail de mathématiques, sur la base de points et de chiffres, vous pouvez déterminer exactement le niveau de la classe et savoir précisément à quelle question il a été le mieux, respectivement le moins bien, répondu. On peut alors axer l'instruction, l'enseignement, sur cette analyse-là.

La note doit être le reflet du niveau d'acquisition par rapport à un objectif fixé. Je ne parle même pas de la note qui pourrait, à long terme, servir à l'évaluation des fonctionnaires. En effet, il y a un projet de loi qui permettrait d'introduire un salaire à la prestation pour les fonctionnaires et il faudra bien trouver un moyen pour les payer... De cela, je n'en parle pas, n'est-ce pas ?!

On doit quand même considérer qu'il y a dans notre société 10% de gens proches de l'analphabétisme. Je ne parle pas ici des élèves, mais des parents. La note est quand même un moyen simple, visuel, facile à comprendre pour tout le monde, permettant de se faire une image du niveau et de la progression de son enfant. L'école genevoise, à mon avis, engendre aujourd'hui, peut-être pour les motifs que j'ai expliqués avant, une sorte d'exclusion sociale. Je le vois personnellement dans les tests de recrutement, j'en ai d'ailleurs déjà parlé au chef du département. On se rend compte que des gens qui ont un certificat de maturité et qui se présentent à un examen professionnel pour embrasser une nouvelle profession font jusqu'à 70 fautes d'orthographe dans une dictée de dix lignes... C'est la réalité. J'ai fourni les chiffres. Ce ne sont pas forcément des élèves genevois, ce sont aussi des élèves d'autres cantons. On se dit qu'il y a effectivement un problème au niveau de notre école genevoise. Et il est vrai que ni les notes, ni l'absence de notes ne vont y changer grand-chose.

Je prendrai un exemple très simple. J'ai deux filles jumelles. Cela tombe bien: elles ont la même composition biologique, elles habitent la même famille. Elles se lèvent à la même heure le matin et vont dans la même école; elles fréquentent la même classe: elles n'ont pas les mêmes résultats ! (Commentaires.)Etonnant ! C'est étonnant !

Ce dont on n'a pas parlé ce soir, c'est de l'attitude de l'enfant par rapport à l'école... On en a très peu parlé. Les notes, là-dedans, n'ont absolument pas d'incidences. Il est donc faux et malsain de vouloir biaiser le discours sur les notes par rapport à la composition sociale d'une classe, par rapport à la composition sociale d'une région, puisque c'est essentiellement en fonction de l'attitude de l'enfant par rapport à l'enseignement que va se décider son parcours scolaire. Et les notes sont un moyen comme un autre.

Il appartiendra au peuple de décider. Si le peuple se plaît à voir dans les notes un moyen simple d'évaluer les compétences et le comportement de ses enfants, alors nous, UDC, soutiendrons ce système. Il présente au moins l'avantage de la simplicité et de l'égalité de traitement pour l'ensemble des élèves de ce canton et de Suisse, puisque le système des notes au niveau primaire est valable dans tous les cantons suisses, du moins dans la majorité d'entre eux. Dans un canton où il y a une mobilité professionnelle et sociale importante, les enfants ne font pas forcément toute leur scolarité dans le canton de Genève. Je pense dès lors qu'il est perturbant de faire trois ans d'école primaire dans un système sans notes, puis deux ans dans un canton avec notes, et revenir enfin dans le canton de Genève pour effectuer sa dernière année primaire avec un système sans notes.

En résumé, le groupe UDC votera oui sur le principe de l'initiative qui introduit l'évaluation continue et certificative par rapport à des objectifs.

M. Bernard Lescaze (R). A chaque génération, depuis plusieurs siècles, on parle de réforme scolaire. Personne n'aurait, dans cette assemblée, l'idée qu'on enseigne aujourd'hui comme on enseignait en 1920, en 1820 ou en 1550. Il y a ici beaucoup de gens qui se sont érigés en professeurs. Certains l'étaient, d'autres pas. Vous me permettrez de ne pas parler ce soir de pédagogie, mais de ce dont nous devons débattre, c'est-à-dire d'une initiative populaire signée par 28 000 citoyennes et citoyens et de l'éventualité de lui opposer un contreprojet.

S'il y a ce soir quelque chose dont on a peu parlé, c'est de la partie carrée qui se joue entre l'élève, l'enseignant et les parents, d'une part, et la transmission des connaissances: le savoir, qui circule entre parents élèves et enseignants. C'est cela qui nous paraît important. C'est cela qui devrait être mis, quels que soient les projets, au premier plan.

Je tiens ici à dire qu'une simple constatation montre que, dans la société, beaucoup de notations sont chiffrées, partout. C'est un moyen parmi d'autres d'évaluer, mais c'est un moyen simple, un moyen immédiatement perceptible pour chacun. C'est cela qui fait la portée de la note. Il faut savoir que les élèves eux-mêmes apprécient d'être notés et d'avoir les notes. Ils ont d'ailleurs l'habitude d'un certain nombre de classements.

Sur l'essentiel, nous dit-on, le Conseil d'Etat est unanime pour refuser l'initiative et lui opposer un contreprojet. Je le veux bien, mais, ce soir, si au moment où je parle il y a trois conseillers d'Etat présents, durant tout le début de la soirée seul le chef du Conseil d'Etat était là ! Ce qui montre que cette unanimité n'est peut-être pas aussi grande que le rapporteur de majorité veut bien le dire.

En tant que radical, ce que j'entends contester ici, c'est le fait que nous, et les partis qui nous appuient, ayons refusé de donner à l'instruction publique un certain nombre de moyens qui lui sont nécessaires. L'école genevoise est une école de qualité ! J'en profite ici pour remercier - qu'ils aient signé ou non l'initiative d'ARLE - les enseignants qui font ce métier et que jusqu'ici dans ce débat personne n'a remerciés. (Remarques.)L'école genevoise est une école de qualité, mais il n'y a pas que les moyens financiers qui doivent être pris en compte. Je constate d'ailleurs que ceux qui, bien à tort, nous faisaient le reproche de diminuer les fonds de l'école genevoise sont ceux-là mêmes qui ont refusé de voter le budget ! Alors que ce sont les partis de l'Entente et l'Union démocratique du centre qui ont voté les crédits 2005 pour l'école. (Vifs applaudissements sur les bancs de l'Entente et de l'UDC. Commentaires sur les bancs de l'Alternative.)

J'aimerais dire, Mesdames et Messieurs, que l'on peut être pour ou contre les notes, pour les évaluations certificatives ou pas: à un moment donné, il nous faut trancher. Le groupe radical a décidé, dans un premier temps, puisqu'on nous demande de voter pour ou contre l'initiative ce soir, de voter en faveur de l'initiative. Mais il précise qu'il sera également en faveur d'un contreprojet ! Bien sûr, nous avons notre contreprojet, le contreprojet radical, que nous avons même la faiblesse de croire meilleur que l'initiative, puisqu'il résout un certain nombre de problèmes que l'initiative ne résolvait pas.

Nous sommes partisans de continuer en commission le travail sur la base du contreprojet radical. Comme nous tenons à rester modestes et à l'écoute, nous sommes parfaitement d'accord d'envisager un contreprojet encore meilleur que le nôtre. Mais alors il faut bien dire qu'il ne s'agit en aucun cas du contreprojet que je n'ose pas appeler «du Conseil d'Etat», du contreprojet post-soixante-huitard qui est comme une aspirine face aux problèmes de l'école. C'est de l'acide acétylsalicylique ! (Applaudissements sur les bancs de l'Entente et de l'UDC.)Cela ne répond à rien. Cela ne répond à rien !

Notre position est claire : Oui à l'initiative dans un premier temps et oui à un contreprojet qu'il appartiendra à ce Grand Conseil de déterminer afin d'offrir un choix à la population ! (Applaudissements.)

M. Pierre Weiss (L). Dans cette affaire, qui est, au fond, comme l'a relevé très justement l'un des nôtres, une indication quant au type de société que nous voulons, il s'agit de prendre des positions. Celles-ci doivent être raisonnables, doivent préserver l'avenir, rassurer les parents et aider les enfants. C'est dans cette perspective que je vais m'exprimer tout en faisant d'abord quelques remarques sur les interventions des rapporteurs de majorité et de minorités.

J'aimerais remercier le rapporteur de première minorité, M. Follonier, d'avoir relevé la pertinence des enquêtes du SRED qui, parfois, peut-être critiqué pour son activité ou plutôt son inactivité. Ce soir, M. Follonier a eu raison de nous dire ce que le SRED nous avait dit des préoccupations des parents. Peut-être pourrait-on souhaiter que ces enquêtes soient davantage suivies de conséquences - je rappelle qu'elles datent de 2001 ou 2002, les conséquences viendront peut-être un jour. On pourrait notamment se demander quand l'évaluation des réformes sera faite.

Je crois que le rapporteur de majorité ne s'est pas rendu compte qu'il introduisait dans son discours un paradoxe fâcheux. Il a en effet lié les moyens donnés à l'école - ou plutôt la baisse de ceux-ci - et les résultats que les élèves pouvaient prétendre obtenir à la fin de leurs études ou au cours de celles-ci. De deux choses l'une : soit il y a une influence des moyens sur les études et, comme ces moyens ont baissé, les résultats devraient baisser; soit on prétend qu'il n'y a pas de baisse des résultats, et cela signifierait qu'il y a indépendance entre les moyens et les résultats. Il faudra choisir, Monsieur Brunier !

Enfin, Mme Bartl, rapporteuse de seconde minorité, termine son rapport en disant que les noces de l'égalitarisme et du libéralisme engendrent l'apologie de la médiocrité... Cette citation est probablement une hypothèse. Jamais le libéralisme n'a consommé de noces avec l'égalitarisme. (Commentaires.)

J'aimerais maintenant en venir à l'initiative et au débat sur celle-ci. Cette initiative est simple en tant qu'elle demande des notes. Elle ne demande pas la permanence des notes, mais elle demande les notes. Je ne dirais pas qu'elle est simpliste, je dirais simplement que demander que les notes soient maintenues peut prêter à la critique du nominalisme, c'est-à-dire prendre la forme pour le fond, l'habit pour le moine, la note pour la connaissance. Je vais donner un exemple. En section de pédagogie de la faculté de psychologie et des sciences de l'éducation, il y a des notes, notamment pour les diplômes d'études avancées. Il y a même six notes. Vous allez croire que ce sont des notes de six à un. Non ! En fait, ce sont des lettres. Ces lettres montrent une très grande précision pour les appréciations entre six et quatre. Il en faut cinq : 6; 5,5; 5; 4,5; 4. La sixième note est réservée à ce qui est en dessous de quatre. On voit fort bien qu'il peut être dangereux d'avoir des notes lorsqu'elles mettent tous les échecs au même niveau et distinguent si finement la réussite.

Cette initiative est trop confiante aussi. Elle fait confiance à ceux qui, à certains moment, pour certains d'entre eux, n'ont pas mérité notre confiance en tant que parents. Qui va évaluer les évaluateurs ? L'initiative ne le dit pas. Qui va contrôler les contrôleurs ? Qui parle d'épreuves communes qui seraient contrôlées par d'autres que les maîtres de classe ? Rien n'est dit. Evidemment, on pourrait imaginer une loi d'application, des règlements d'application, mais là aussi il y a un manque dans cette initiative.

Cette initiative, quoi qu'insuffisante est pourtant nécessaire. Elle est nécessaire et en même temps insuffisante : elle ne dit rien sur la qualité de l'enseignement. Elle dit, par exemple, quelque chose sur la possibilité du redoublement, mais elle ne dit rien sur la possibilité d'accélérer les cycles scolaires. Elle ne se préoccupe pas des bons élèves. Ils existent pourtant aussi dans notre système scolaire.

Cette initiative est néanmoins un point de départ qui doit nous permettre d'arriver quelque part. C'est en ce sens-là que j'aimerais plaider pour une union entre ceux qui sont pour le oui à l'initiative et ceux qui sont pour le non à l'initiative et le oui au contreprojet. Mon préopinant a lui aussi parlé d'un oui au contreprojet. En d'autres termes, j'aimerais que cette initiative, cette parturiente, nous permette d'accoucher d'un contreprojet qui soit peut-être radicalo-libéral, peut-être de l'Entente ou de la droite au sens large. Ce contreprojet - pour reprendre les mots de mon collègue Aubert - devrait être un signe qui nous rassure, qui nous donne des repères, qui fasse que de la note on remonte aux connaissances, on remonte à la rigueur. La rigueur du DIP, ce soir et dans le passé récent, ne nous a pas convaincus.

M. Jacques Follonier (R), rapporteur de première minorité. On a entendu un nombre important de choses ce soir et c'est vrai que le débat est important.

Avant de vous livrer ma conclusion, j'aimerais préciser quelques points. Beaucoup de choses ont été dites et l'on a parlé de différents points, de l'enquête PISA par exemple. M. Brunier nous a raconté son histoire inaliénable sur la Finlande, sur les résultats de la Finlande, le problème de la Finlande, etc. Bien ! On peut en parler vingt ans. On peut aussi dire que le Portugal, qui a exactement le même système que la Finlande, est dernier dans le classement... Cela recentrerait un peu le débat, mais cela, personne n'a envie de le dire ! (L'orateur est interpellé.)Ah oui, ils n'ont pas les mêmes moyens ! Ils n'ont pas la même vie socio-économique... Eh bien, c'est exactement ça Monsieur Brunier !

Revenons à quelque chose de plus simple et de plus proche de nous. Si vous aviez bien étudié le rapport PISA, Monsieur, vous auriez vu que le canton du Valais, qui a un système d'organisation par degré et des notes, a un rapport pratiquement similaire à celui de la Finlande... Donc, que fait le canton de Genève ? Là, il y a vraiment des questions à se poser.

D'ailleurs, il y a une autre chose qu'on a passée complètement sous silence - c'est peut-être voulu - c'est ce que relève le rapport Erasme. Il y est indiqué deux choses importantes que nous devons retenir : 75% des enseignants du primaire disent que la rénovation ne sert à rien dans le cas de l'échec scolaire. Cela monte même jusqu'à 84% dans le cas des enseignants du secondaire. On voit donc bien que même les enseignants ne sont pas convaincus que la rénovation peut apporter une quelconque réponse !

Quelqu'un a parlé des médicaments et de la recherche - c'est important de le dire, en médecine la recherche est importante, on voit qu'aux Etats-Unis la Food and Drug Administrationest très sévère. Qu'est-ce qui se passe avec l'école ? Dans tous les pays, personne ne veut faire d'évaluation ! J'en veux pour preuve un rapport fourni par l'Université de Laval qui présente une réflexion sur les expériences nord-américaines, principalement canadiennes - un pays que M. Beer connaît très bien. Là-bas, on dit très clairement ceci: «Ainsi, les innovations pédagogiques proposées dans le cadre de réformes sont rarement le produit de recherches et deviennent comme des projets intégristes.» Et c'est exactement ce que nous avons fait aujourd'hui à Genève avec cette rénovation. La rénovation devait lutter contre l'échec scolaire.

Quelqu'un a cité le rapport Hutmacher. Je rappelle qu'en 1993 M. Hutmacher disait :«Ce rapport, mon rapport, atteste que trois quarts des élèves qui redoublent mènent une scolarité normale.» N'est-ce pas un bon résultat ? Alors, finalement, dire que le redoublement est inutile, c'est aller à l'encontre de ce qui a été mis dans ces différents rapports.

Pour finir, j'avoue que la référence de Mme Hagmann à M. Perrenoud me sidère. C'est vrai que M.  Perrenoud, père de la rénovation, a été le premier à critiquer et à dire, dans un rapport aussi, que les cycles et les notes ne faisaient pas du tout partie, au départ, de la rénovation. Pourquoi voudrions-nous aujourd'hui nous battre pour enlever des notes, alors que, finalement, elles n'étaient pas au départ de la rénovation ? Il dit aussi quelque chose de très poignant: il dit, lors d'une audition, que le département se trouve dans l'obligation de broder un contreprojet là où il aurait dû, lui, produire un contreprojet. Il faut bien reconnaître qu'il y a un certain chenit dans le cadre du département. Je vais devoir, malheureusement, lire un procès-verbal de commission, parce que ça ressort de l'audition de M. Beer et que je suis incapable de retenir cela par coeur tellement c'est complexe : «Le conseiller d'Etat constate une trop grande diversité des pratiques. Il peut exister des contradictions entre ces pratiques et pas uniquement dans une opposition entre écoles traditionnelles et écoles en rénovation, mais également à l'intérieur de deux sensibilités. Au sein même de l'école rénovée, on pratique selon différents schémas, notamment en matière d'évaluation. Parfois ces contradictions apparaissent au sein même d'une école.»

A ce stade-là, il est clair qu'il n'y a plus de pilote dans la rénovation ! C'est certain que le département ne maîtrise pas ce qu'il est en train de mettre en place. Alors, je crois que l'initiative a au moins le mérite de permettre à la population de s'exprimer.

En conclusion, il y a un point sur lequel je suis parfaitement d'accord avec M. Brunier, c'est qu'il est regrettable que, lorsqu'on parle d'enseignement, cette salle a tendance à se vider... (Exclamations.)... et que l'intérêt général ne soit pas là. Je suis désolé: est-ce une manifestation du Sonderfall Genfou du Röstigraben? Je ne sais pas, mais j'ai envie de demander à ceux qui sont là et à ceux qui ont pris la parole s'ils ont des enfants. Lorsqu'on a des enfants, on sait ce qu'est l'école, et le jour où on a vu ce qu'est l'école on peut se permettre d'en parler beaucoup plus clairement que ce que j'ai entendu ce soir. (Brouhaha.)

M. Alain Charbonnier. Retourne à l'école !

M. Jacques Follonier. Il y a de ceux qui n'en sont peut-être jamais sortis, Monsieur Charbonnier ! (Commentaires.)J'aimerais dire une dernière chose. Peut-on jouer avec l'enseignement scolaire, comme le préconisent les pédagogues en mal d'inspiration et, malheureusement, la gauche ? Moi, je ne le crois pas. Vous avez peut-être tort de croire que votre responsabilité n'est pas engagée, Mesdames et Messieurs: elle l'est ! Ce que vous déciderez ce soir fera ce que l'école genevoise sera demain. Ce sera la responsabilité de ceux qui auront pris cette décision ce soir.

Pour moi, il est important de voter cette initiative. Dans tous les cas, une chose au moins me fera plaisir: le peuple tranchera. Et je peux vous dire qu'on va bien s'amuser.

Mme Caroline Bartl (UDC), rapporteuse de deuxième minorité. Je veux dire quelques mots encore. L'école doit faire face à de nouvelles missions «topinambouresques», avec un public de plus en plus nombreux. De nouvelles tensions sont donc apparues dans un système, tensions qui semblent affaiblir l'efficacité de l'école comme instance d'intégration des jeunes dans la société.

La première tension, c'est que la massification de l'enseignement et le nivellement par le bas qui s'est ensuivi se sont accompagnés de la nécessité de continuer à faire émerger une «élite». Pourquoi s'étonner que certaines écoles privées dépassent les programmes et appliquent des barèmes plus sévères ? On sait que les exigences demandées aux élèves dans le cursus normal sont tellement en baisse en raison de l'idée d'un socle minimum de savoir.

Ensuite, il faut vraiment une bonne dose de mauvaise foi pour dire que l'enseignement traditionnel fondé sur une pédagogie de l'imposition favorise les plus forts et les plus aisés des élèves. Je pense franchement que ces derniers n'ont pas besoin de l'école, et l'expérience montre qu'ils s'adaptent à tous types d'enseignement. En revanche, préconiser des pédagogies nouvelles sans être assurés que les élèves maîtrisent les bases, c'est à coup sûr défavoriser les plus faibles !

Si les inégalités augmentent, c'est aussi parce que notre pays accueille des populations étrangères dont les enfants ne maîtrisent pas le français. (Protestations sur les bancs de l'Alternative.)Eh bien oui, c'est la réalité ! Faudra bien... (L'oratrice est interpellée.)Oui, oui, bien sûr !

L'école n'a guère réduit les inégalités sociales et laisse de côté une part non négligeable des élèves. Le travail des enseignants est de plus en plus pénible, puisque l'école coûte de plus en plus cher pour des résultats somme toute décevants en regard des investissements économiques et humains consentis. L'école est aujourd'hui dans une situation plus fragile, dans la mesure où elle réussit sans doute moins bien qu'avant à remplir tous les rôles nouveaux qu'on lui a assignés.

Je vous invite donc à soutenir cette initiative, car je pense qu'il est crucial de redonner du sens à l'école et, surtout, de s'accorder sur ce sens une bonne fois pour toutes !

M. Christian Brunier (S), rapporteur de majorité. En préambule, j'aimerais faire deux remarques sur le style du débat, parce qu'il y a eu deux dérapages qui ne sont pas tout à fait corrects.

Monsieur Weiss, vous avez le droit de ne pas aimer les rapports du SRED. Vous avez le droit de dire que vous pensez qu'il ne travaille pas sur des thèmes suffisamment intéressants. En revanche, qualifier le travail du SRED d'inaction, c'est insulter le travail des gens, et cela ce n'est pas correct !

Monsieur Follonier, vous nous avez dit que, finalement, seuls ceux qui avaient des enfants à l'école pouvaient s'exprimer sur ce thème... Alors, ça m'arrange ! Moi, j'ai des enfants à l'école. Et à l'école publique ! Je pourrais vous dire que, ayant mis vos enfants à l'école privée, vous n'avez pas grand-chose à dire sur l'école publique: je ne me comporterai pas ainsi. Je sais que vos enfants ont transité et qu'ils sont maintenant au collège public; pourtant, ils ont fait tout leur cursus préliminaire en privé. Cela pour dire que ce n'est pas parce qu'on n'a pas d'enfant qu'on ne peut pas parler d'école. (Commentaires.)Je vous le dis: moi, j'ai des enfants qui vont à l'école publique ! (Remarques. Brouhaha.)Venons-en au débat... Madame la présidente, calmez vos troupes, s'il vous plaît ! (La présidente agite la cloche.)

La présidente. Monsieur Froidevaux, voulez-vous vous taire, s'il vous plaît ! C'est comme à l'école... (Brouhaha. Protestations.)

M. Christian Brunier. Pendant cette soirée, on a entendu souvent des gens dire que l'école n'était plus respectée en tant qu'institution. A entendre ce qui a été dit ce soir, on peut le comprendre. On ne peut pas dire pendant toute la soirée - et c'était de la caricature de votre part, j'en suis sûr - que l'école est mauvaise, qu'elle est malade, qu'elle produit de l'échec, et s'étonner ensuite que l'institution ne soit plus respectée ! Si vous voulez que les enfants et les parents respectent l'école, vous devez aussi, Mesdames et Messieurs, respecter l'école et ne pas tomber dans la caricature. (Applaudissements.)

Ensuite, quand j'ai entendu les radicaux et l'UDC dire que l'école était mauvaise, j'ai pensé qu'ils diraient aussitôt ce qu'ils allaient changer, améliorer. Moi, quand je trouve que quelque chose est mauvais, je fais des propositions pour le changer, l'améliorer. Alors, au contraire, j'entends M. Follonier nous dire l'école est mauvaise et nous dire ensuite qu'il propose un moratoire sur toutes les réformes, sur tous les changements. C'est un projet de motion que vous avez déposé ! On ne peut pas prétendre que ça ne va pas et dire en même temps qu'il ne faut surtout rien changer, cela revient à rester dans l'erreur. Je ne comprends pas votre analyse, Monsieur Follonier !

M. Kunz voit une preuve que l'école publique est mauvaise dans la hausse du nombre d'enfants qui vont à l'école privée. M. Kunz a raison: le nombre d'enfants qui vont dans le privé est en hausse. Mais le nombre d'enfants qui vont dans le public est aussi en hausse ! Tout simplement, il y a plus d'enfants dans le canton ! (Rires. Brouhaha.)Ce que vous ne dites pas Monsieur Kunz, c'est que la proportion des enfants qui sont scolarisés respectivement dans le privé et dans le public reste identique: il n'y a pas d'évolution dans ce domaine.

M. Barrillier, ensuite, pour montrer que l'école publique est mauvaise, a parlé des apprentis... Ceux qui passent les examens d'apprentissage sont, dit-il, de plus en plus mauvais. Il a peut-être raison, et il connaît bien l'apprentissage. Sur ce point, je partage avec lui l'avis qu'il faut valoriser l'apprentissage. C'est précisément cela le problème, c'est qu'il faut valoriser l'apprentissage ! On ne valorise pas assez l'apprentissage... Ce que vous ne dites pas, Monsieur Barrillier, c'est que la plupart des jeunes qui sont arrivés jusqu'ici en apprentissage ont connu le système des notes. L'initiative ne répondra absolument pas à votre problématique ! Oui, il faut améliorer l'apprentissage ! Oui, il faut valoriser l'apprentissage ! Mais ce n'est en tous cas pas l'initiative qui nous est soumise ce soir qui va changer quelque chose.

Si j'ai bien compris le débat de ce soir, il y a les gens qui défendent les notes et qui veulent une école de rigueur, où l'on apprend le savoir élémentaire, et les autres qui se moquent de tout... (L'orateur est interpellé.)Eh bien non ! Je le redis. La gauche, comme les libéraux qui se sont exprimés contre l'initiative, défendent l'acquisition des savoirs. C'est évident ! Personne ici ne va dire qu'apprendre à lire, à écrire et à compter ne sert à rien ! Personne ne dit cela aujourd'hui. Arrêtez de caricaturer le débat, Mesdames et Messieurs ! Oui, c'est important, nous disons juste que ce n'est pas la seule chose ! On ne peut pas dire qu'on veut une école exclusivement axée sur l'acquisition des connaissances et qui laisse tomber complètement la sociabilisation, c'est-à-dire le comportement en société. Nous devons tous vivre ensemble et nous devons l'apprendre dès l'école. Ce n'est pas l'un ou l'autre ! On ne peut pas faire soit du savoir, soit de la sociabilisation, il faut les deux. Car aujourd'hui, malheureusement peut-être, ça ne suffit plus dans notre société, il y a de nombreuses compétences que nous devons avoir.

Les intervenants ont beaucoup parlé des jeunes. J'ai trouvé relativement insultant ce que vous avez dit à leur sujet, vous avez dit: «Le niveau scolaire est en super baisse» et, Madame Bartl, vous avez dit: «Les jeunes sont tous moyens, voire faibles, et pénalisent les quelques uns qui sont forts.» Vous êtes insultante à l'endroit des jeunes ! Ce n'est pas comme ça qu'on va valoriser la jeunesse aujourd'hui ! (Brouhaha.)

En plus, dire que le niveau scolaire baisse, c'est faux ! Les jeunes, et vous le savez très bien, ont de plus en plus de connaissances. Des connaissances variées et, je le redis: en 1982, 59,8% sortaient de l'école avec un diplôme; aujourd'hui, ce sont 77,1% qui sont dans ce cas. (Remarques. La présidente agite la cloche.)

La présidente. Veuillez laisser terminer le rapporteur !

M. Christian Brunier. M. Catelain a essayé de faire une grande différence entre ce qui est populiste et populaire. Monsieur, je n'ai jamais dit que les 28 000 personnes qui ont signé cette initiative faisaient du populisme. (L'orateur est interpellé.)Jamais ! Jamais ! Laissez-moi m'expliquer et vous allez peut-être comprendre.

Sur les 28 000 personnes qui ont signé, un grand nombre ont signé parce qu'elles ont de vraies inquiétudes sur l'école. Ces inquiétudes, je les partage ! Je l'ai dit tout à l'heure, il y a beaucoup de choses à corriger, et la gauche le dit depuis longtemps. A une époque où les radicaux suivaient aveuglément tout ce qui se faisait au niveau de la réforme, nous étions déjà critiques. Ce n'est pas parce qu'il y a des défauts dans l'outil qu'il faut le jeter. Il faut le corriger !

Donc, les 28 000 personnes ont signé... (Brouhaha. Remarques.)Monsieur Froidevaux, s'il vous plaît ! Vous avez une notion de la démocratie et du dialogue politique un peu bizarre.

Les 28 000 personnes qui ont signé ont de vraies inquiétudes. Mais il ne faut pas y répondre en essayant de mentir et de salir le tableau. Il y a des défauts dans l'école, mais il ne faut pas dire que l'école genevoise est mauvaise, qu'il faut la jeter, qu'il n'y a rien de bon. L'école genevoise, Mme Hagmann l'a dit, nous devons en être fiers ! Et si vous voulez valoriser l'institution, vous devez en valoriser les bons côtés et en corriger les mauvais. Mais arrêtez de jeter complètement l'école sans distinction et dans la caricature ! Les 28 000 signataires, il faut les rassurer, mais ce n'est en tout cas pas l'initiative qui répondra à leurs soucis et ce n'est en tout cas pas vos propos qui vont les rassurer !

En ce qui concerne le redoublement, je pense qu'il faut donner des chances aux enfants qui sont en échec. Pour autant, Madame la rapporteure, il ne faut pas les punir - vous avez écrit dans votre rapport que les mauvais élèves devaient être punis... Je vais citer deux études...

La présidente. Monsieur le rapporteur, vous avez dépassé votre temps de parole.

M. Christian Brunier. J'arrive à la conclusion. Je cite très rapidement deux études. La première, qui provient de l'Institut pédagogique de l'Université de Fribourg - ce n'est pas là qu'on trouve les plus grand gauchistes - dit que le redoublement est mauvais et que si les Suisses allemands s'en sortent mieux, c'est qu'il font moins redoubler les enfants et qu'ils ont investi dans les cours de rattrapage - les cours de rattrapage que vous condamnez dans votre rapport. Et c'est M. Gros qui m'a donné tout à l'heure une deuxième étude, signée par le célèbre pédagogue américain... « Joker Poterkslip» - c'est dur à dire. Cette étude précise qu'utiliser le redoublement pour punir l'élève est une humiliation qui déstabilise grandement l'épanouissement des enfants et de la société.

La conclusion est simple. La rapporteure de minorité l'a dit clairement : pour elle, l'école est un moyen de sélectionner les meilleurs et les plus méritants. Je vous prie de m'excuser, mais c'est une solution d'eugénisme ! C'est une société à deux vitesses. C'est une société qu'on ne veut pas, et c'est pour cela que nous ne voterons pas cette initiative. (Applaudissements. Protestations.)

La présidente. Monsieur Follonier vous avez la parole, mais pas plus de quelques minutes, s'il vous plaît.

M. Jacques Follonier (R), rapporteur de première minorité. Ce sera moins que quelques minutes, je pense que ce sera beaucoup plus court, Madame la présidente.

Je tiens à vous dire que lors de cette législature - je parle de celle-ci, je n'étais pas là avant - vous n'avez rien fait en matière d'enseignement. (L'orateur est interpellé.)Aujourd'hui, votre manière de défendre bec et ongles votre conseiller d'Etat et votre Etat de girouettes est pathétique !

J'aimerais maintenant dire quelque chose à M. Brunier qui a eu l'indélicatesse de parler de ma vie privée. Je vais me mettre à son niveau ! (L'orateur est interpellé.)Monsieur Brunier, je vais me mettre à votre niveau ! Je vais vous demander de me dire sur l'honneur ce que vous m'avez confié sur vos enfants, puisque vous en avez un qui est à l'école rénovée et l'autre dans une école non rénovée. Maintenant, je vous laisse la parole. (Brouhaha.)

M. Christian Brunier. Je peux répondre ?

La présidente. Répondez, mais faites vite parce que cela n'apporte rien au débat !

M. Christian Brunier. Je veux tout simplement rétablir la vérité. Mes deux enfants sont à l'école de la Florence qui est une école qui n'est pas du tout rénovée. (Brouhaha.)

La présidente. Merci, Monsieur. Chacun a ainsi pu préciser son contexte familial. Je passe maintenant la parole à M. le conseiller d'Etat Charles Beer.

M. Charles Beer, conseiller d'Etat. D'abord, j'aimerais, en préambule, rendre hommage aux initiantes et aux initiants, ils ont eu le courage de lancer un débat démocratique sur l'école. Quel que soit l'avis qu'on peut avoir sur l'initiative, je crois que toutes celles et tous ceux qui se félicitent de la démocratie directe ne peuvent que prendre acte du fait que se prononcer sur l'école au niveau populaire ne peut que renforcer la légitimité du système scolaire. A cet égard, je tiens très clairement à rendre hommage aux initiants.

Ce qui m'intéresse également, c'est de noter qu'au-delà de l'initiative, des initiants et de la question des notes, l'école fait un retour spectaculaire dans l'arène politique et dans l'arène du débat démocratique. Nous avons pu noter ainsi que, pratiquement partout, les débats s'animent. Partout la question scolaire devient le centre des préoccupations des politiques. Il y a un certain nombre de raisons à cela, permettez-moi très rapidement de les évoquer. Cela a été rapidement dit tout à l'heure, mais permettez-moi d'insister.

Il y a d'abord de profondes transformations, politiques, économiques et sociales de notre société. Il y a le besoin de l'école, comme tout projet, comme toute association, comme toute initiative, de s'adapter aux normes du changement. Si l'école ne s'adapte pas au changement, il n'est pas possible pour elle de répondre aux défis de son temps. Je crois qu'on ne peut être que satisfait de la capacité des systèmes scolaires à se transformer.

Sommes-nous une exception à Genève ? Vous le savez bien, Mesdames et Messieurs les députés, la réponse est non. D'abord, l'ensemble des pays européens a changé de système scolaire. La totalité des cantons et demi-cantons de notre pays a changé de système scolaire. On peut évoquer, comme vous l'avez fait, la Corée ou la Finlande, on peut évoquer également le Valais - vous l'avez fait aussi - ou encore Neuchâtel. Savez-vous que dans ce dernier canton il n'y a pas de notes jusqu'à la fin du cycle d'orientation ?

Pratiquement partout, nous avons enregistré une profonde modification des systèmes scolaires. Ce que nous propose aujourd'hui l'initiative, c'est de revenir sur un certain nombre de changements apportés par la rénovation.

Avant de traiter l'initiative sur le fond, permettez-moi d'évoquer ceci: l'école genevoise a pratiqué des changements; elle en a initié; elle a largement participé à la nécessaire adaptation de son système scolaire. Pour autant, peut-on dire que tout est réussi ? Est-il question de sombrer dans l'autosatisfaction ? La réponse est non ! Peut-on, à l'extrême inverse, jeter le discrédit sur tout ce qui a été fait en matière de rénovation ? Vous savez bien que la réponse est non.

Une voix. La réponse est oui !

M. Charles Beer. Ce que nous devons faire, c'est prendre acte du fait qu'il fallait rénover notre système scolaire - qu'il convenait de le rénover. Ce dernier mérite encore des changements, il mérite un recadrage pour un certain nombre de pratiques, on ne peut pas nier cela.

Mesdames et Messieurs les députés, l'initiative nous propose un certain nombre de remèdes à la crise de confiance qui existe vis-à-vis de l'école. Elle nous propose des notes, le redoublement, de même que la sacralisation des degrés, c'est-à-dire la suppression des cycles d'apprentissage tels qu'ils se pratiquent dans toute l'Europe et dans toute la Confédération.

Sur le premier point, j'aimerais dire que, si 28 000 personnes ont signé l'initiative, c'est qu'il y a une réelle préoccupation par rapport à l'évaluation. Force est de constater qu'il convient d'entendre cette préoccupation. Oui, il convient d'ajouter des notes à notre système d'évaluation ! Cela est souhaité par le Conseil d'Etat, cela est souhaité également par les partenaires, enseignants et parents d'élèves qui ont contribué largement à l'élaboration du projet de contreprojet.

Oui, il convient d'avoir des notes. Non pas des notes qu'on décrète, mais des notes qui viennent réellement sanctionner un certain nombre de commentaires et d'appréciations par une traduction en chiffres. Elles indiquent ce que vaut l'évaluation.

Est-il question, pour autant, de faire des moyennes ? Je ne reviendrai pas sur cette question, mais cela me semble être de l'ordre du détail. Ce qui compte, c'est la clarté de l'évaluation. Ce qui fait défaut dans l'initiative, c'est le rythme de l'évaluation. Il n'est pas mentionné dans l'initiative. Une évaluation par année peut, à lire leur texte, satisfaire les initiants. Or ce qui compte pour le Conseil d'Etat, c'est de renforcer également le rythme de l'évaluation, notamment en réintroduisant une logique de trimestre.

Sur la question du redoublement, beaucoup d'études ont été citées. Et si l'on peut s'entendre sur un point, c'est bien sur le fait que le redoublement n'est pas, en soi, la panacée de la lutte contre l'échec scolaire. En revanche, l'utilisation de périodes de temps supplémentaires peut répondre à un certain nombre d'exigences. C'est pourquoi le Conseil d'Etat propose qu'en cas de difficultés, il y ait la possibilité de prolonger les cycles d'apprentissage. Il ne s'agit pas de répéter stérilement, mécaniquement, ce qui a été vu l'année précédente, même quand on a réussi: il s'agit tout simplement d'adapter l'enseignement aux difficultés.

Nous remarquons également que l'échec, qui devrait être sanctionné le cas échéant par une prolongation de cycle, devra intervenir après l'introduction de tout une série de mesures, puisque le but, encore une fois, est de permettre à chaque élève de parcourir sa scolarité dans le laps de temps voulu par la législation.

Je viens très rapidement d'évoquer la question des cycles d'apprentissage. J'ajoute que ces périodes permettent une plus grande souplesse dans l'apprentissage et dans le chemin vers l'acquisition des objectifs d'apprentissage. Je crois que c'est indispensable et si cette solution a été retenue pratiquement partout, c'est qu'il y a bel et bien une raison.

Au-delà de son contenu, l'initiative nous propose de nous isoler. Elle nous isole des autres cantons; elle nous isole des autres pays européens et, en ce sens, je pense qu'il n'est pas souhaitable de suivre l'initiative. J'y reviendrai.

Si nous reconnaissons aujourd'hui un certain nombre de défauts à notre système, si nous estimons qu'il doit y avoir des améliorations, je souhaite que nous prenions d'abord en compte la nécessité d'intervenir sur plusieurs axes. Il ne convient pas seulement d'agir sur l'évaluation, sur la question du redoublement, mais sur un certain nombre de paramètres. C'est pourquoi le département de l'instruction publique a proposé récemment treize priorités d'actions, de manière à renforcer la crédibilité, la performance et, également, l'aspect démocratique du fonctionnement de notre système scolaire. Voilà des points sur lesquels nous devrions nous entendre, pour ne pas réduire la lutte contre certaines de nos difficultés à des artifices extrêmement réducteurs.

Mesdames et Messieurs les députés, notre système scolaire a également besoin de sérénité. Si l'on peut saluer le fait qu'il y a un débat démocratique, la manière parfois excessive dont certains ou certaines peuvent évoquer le système scolaire ne peut qu'accroître le sentiment de défiance vis-à-vis de ce système, sentiment dont certain souhaitent tirer une rente électorale. Il y a aujourd'hui la possibilité d'exploiter un bon filon, c'est là que derrière une démarche populaire peut se cacher le diable populiste. Nous devons nous en défendre: nous devons relever nos manches, travailler ensemble à des normes, à des qualités de notre système d'enseignement, et nous devons admettre que nous avons - si nous prétendons défendre l'école genevoise et les enfants - à rechercher ensemble l'intérêt général, et non pas seulement l'intérêt particulier. Or l'intérêt général mérite que nous ayons une véritable décision populaire.

Mesdames et Messieurs les députés, 28 000 signatures, c'est important. Pourtant, ce que vous ferez, si vous votez l'initiative ce soir, c'est priver le peuple d'une possibilité de choisir. Vous le savez très bien ! Si le parlement vote ce soir l'initiative, le peuple ne votera pas ! Vous le savez très bien : la meilleure manière de retirer au peuple la possibilité de se prononcer, c'est de voter oui à l'initiative ce soir ! (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)

Ce que nous recherchons, c'est un débat démocratique, afin de renforcer la légitimité de l'école pour mieux améliorer son fonctionnement. C'est dans ce cadre que s'inscrit le contreprojet. Permettez-moi d'en dire deux mots. Le contreprojet est un élément éminemment important, il incarne, normalement, un chemin intermédiaire entre une initiative et le statu quo. Je tiens à déplorer que certaines et certains proposent déjà que le contreprojet qui sortira de la commission soit le frère siamois de l'initiative. Encore une fois, de quoi a-t-on peur ? A-t-on peur d'un véritable choix du peuple entre le projet du Conseil d'Etat, plus ou moins revu, l'initiative ou la situation actuelle ? En essayant d'agir contre le choix populaire et contre l'élaboration d'un contreprojet qui offre une alternative, vous confisquez les signatures récoltées, et vous ne permettez pas le choix populaire que vous prétendez appeler de vos voeux. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)

Je termine en vous disant ceci, Mesdames et Messieurs les députés: le Conseil d'Etat est non seulement unanime, mais déterminé à aboutir dans son contreprojet. J'aimerais attirer votre attention sur un point. La rénovation de l'école genevoise ne date pas d'hier: elle a été initiée par une magistrate libérale, elle est poursuivie par un magistrat socialiste et les intérêts partisans ne sont pas intervenus dans les discussions du Conseil d'Etat. Je comprends alors que, tel ou tel parti, privé de représentation, ait pu souffrir de cette information. (Applaudissements.)

M. Christian Brunier. Je demande le vote par appel nominal. (Appuyé.)

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je demande toute votre attention. Nous allons procéder au vote de l'initiative 121-C pour le maintien des notes à l'école. Nous nous prononçons d'abord sur l'acceptation de cette initiative. Si le Grand Conseil devait refuser l'objet, nous aurions un second vote sur le principe d'opposer un contreprojet.

Mise aux voix à l'appel nominal, l'initiative IN 121-C est rejetée par 49 non contre 28 oui et 5 abstentions.

Appel nominal

Mis aux voix à l'appel nominal, le principe d'un contreprojet est accepté par 64 oui contre 15 non et 6 abstentions.

Appel nominal

La présidente. Le Grand Conseil charge la commission de l'enseignement et de l'éducation de préparer un contreprojet de même genre et de même forme que l'initiative.

PL 9330-A
Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit d'étude de 1'275'060F en vue de rénover et d'agrandir partiellement la prison de Champ-Dollon à Puplinge
RD 437-A
Rapport de la commission de la santé chargée d'étudier le rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil concernant la prise en charge des patients dans le département de psychiatrie des HUG
M 1599
Proposition de motion de Mmes et MM. Claude Aubert, Janine Berberat, Blaise Bourrit, Alain Charbonnier, Laurence Fehlmann Rielle, Jeannine De Haller, Jocelyne Haller, Philippe Glatz, Guy Mettan, Marie-Françoise De Tassigny, Jacques Follonier, Anne Mahrer, Ariane Wisard-Blum, Gilbert Catelain pour la création d'un ou d'établissement(s) approprié(s) pour l'exécution des mesures ordonnées en application de l'article 43 CPS ou de privation de liberté à des fins d'assistance
RD 558
Rapport de la commission des visiteurs officiels du Grand Conseil (3e année de la législature 2001 - 2005)
Rapport de Mme Anne-Marie Von Arx-Vernon (PDC)

Premier débat

M. Hugues Hiltpold (R), rapporteur de majorité. Je traite du projet de loi 9330-A qui concerne l'agrandissement de Champ-Dollon. Je voulais juste rappeler la situation où se trouve actuellement la prison de Champ-Dollon. Elle compte aujourd'hui près de 480 détenus alors qu'elle a été conçue pour en accueillir 270, avec un seuil critique admis à 370 par M. Pedrazzini, expert en la matière. Ce crédit d'étude, Mesdames et Messieurs les députés, prévoit d'agrandir le bâtiment actuel de Champ-Dollon en y adjoignant un étage, à savoir 70 cellules supplémentaires.

En commission, nous avons eu un large débat sur la question plus générale d'un bâtiment pour les personnes condamnées selon les article 43 et 45 CPS, que Genève se doit de réaliser depuis plusieurs décennies déjà. Nous avons également eu un débat général sur le taux élevé de détentions en préventive que le canton de Genève connaît en comparaison avec d'autres cantons similaires, comme Zurich. Une partie de la commission avait estimé nécessaire de procéder à une audition de Mme Spoerri et du Procureur général, mais la majorité de la commission a estimé que ces auditions n'étaient pas nécessaires. D'une part, parce que M. Moutinot représentait le Conseil d'Etat, il était donc parfaitement en mesure de répondre sur le fond du projet de loi et sur l'urgence que celui-ci revêtait et, d'autre part, parce qu'il n'incombait pas à la commission des travaux de traiter de la problématique de la détention préventive, car cette question générale était étudiée par la commission des visiteurs.

S'agissant du bâtiment, concernant l'article 43 CPS, la commission des visiteurs a régulièrement demandé - comme on peut le voir dans le rapport de minorité - que ce bâtiment soit réalisé. Je vous rappelle que, depuis plusieurs années, les différents rapports de cette commission ont été votés à l'unanimité de ce Grand Conseil; cela veut bien dire que notre Conseil cautionne la réalisation rapide de ce bâtiment. Je voudrais également préciser que le Conseil d'Etat nous a confirmé que ce bâtiment serait réalisé beaucoup plus rapidement que ce qu'il aurait dû être, en l'occurrence pour ces prochains mois.

S'agissant de la détention préventive, qui sera l'un des arguments du rapport de minorité, je crois qu'il ne nous appartient pas, à nous, législateurs, de commenter les chiffres qui proviennent directement du pouvoir judiciaire, en vertu du principe de la séparation des pouvoirs. Cela étant, la commission des visiteurs auditionnera M. Zappelli pour obtenir une explication sur ce point.

En guise de conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, je demande à ce parlement de voter ce crédit d'étude et de ne pas renvoyer ce projet de loi en commission comme demandé dans le rapport de minorité, car il en va de la sécurité de notre institution.

La présidente. Pour remplacer Mme Nussbaumer, je demande à M. Hiler de faire un commentaire en tant que rapporteur de minorité.

M. David Hiler (Ve), rapporteur de minorité ad interim. En réalité, la commission des travaux a bel et bien commis une erreur d'appréciation. Ce n'est pas parce que l'on est la commission des travaux que l'on ne peut pas se pencher sur le problème de la surpopulation de la prison de Champ-Dollon.

On va faire un peu d'arithmétique, si vous le voulez bien. Aujourd'hui, la prison de Champ-Dollon contient 460 personnes - en pointe - pour une capacité de 270 personnes; ce sont des chiffres fournis par le département. Cette situation n'est admissible ni pour le justiciable, ni pour les gardiens, ni pour la police, empêchée de faire son travail. Là-dessus, on est tous d'accord.

Pourquoi la prison est-elle à ce point chargée ? Premier élément - sur lequel tout le monde est d'accord - c'est qu'un certain nombre de personnes ne devraient pas s'y trouver, mais elles s'y trouvent: les personnes tombant sous le coup de l'article 43 du Code pénal suisse, la présence de femmes dans un bâtiment qu'il faut séparer - ce qui signifie 50 places mal utilisées - et enfin, la présence de mineurs. La première priorité, et je ne pense pas que Mme Spoerri soit d'un avis contraire, c'est de régler le problème de l'article 43 qui date, comme le rappelle à juste titre le rapport de la commission des visiteurs, de 1937 ! Il y a une base légale depuis 1937 ! Personne ne s'en est occupé et, de ce point de vue, pour éclaircir aussi certains problèmes, il ne s'agit pas de faire des reproches à Mme Spoerri, car elle est, depuis 40 ans, la première responsable de ce dicastère qui veut bien s'occuper de l'article 43 ! Et la déclaration que nous avons reçue aujourd'hui, l'engagement de présenter un projet de loi avant l'été - il est en consultation - est quelque chose que nous accueillons avec satisfaction. Mais reste l'autre problème, et il n'est pas vrai qu'on peut l'évacuer au nom de la séparation des pouvoirs !

Mesdames et Messieurs les députés, si nous avions le même rapport entre la détention préventive et le nombre de condamnations que le canton de Zurich, nous n'aurions pas besoin d'agrandir cette prison. Nous avons un taux de 50 % de personnes condamnées qui ont fait de la préventives. Et nous avons aussi un taux de près de 50 % de personnes devant purger une peine avec sursis qui ont fait de la préventive à Genève ! Tout le code pénal est fondé sur un principe de gradation. Cette gradation exprime le fait que l'on sait que la prison n'est pas un endroit particulièrement recommandable pour se construire un avenir. On essaie donc de donner une chance, car on sait que la prison est criminogène. Que faisons-nous à Genève ? On envoie dans une prison, qui n'est certes pas un pénitencier mais une prison surchargée, les 50% des gens qui auront une peine avec sursis.

Est-ce que cela n'est pas un sujet politique ? Oui, c'est un sujet politique ! C'est d'autant plus un sujet politique que cela coûte cher, non pas dans le bâtiment, mais dans les frais que nous encourons. Ce que nous demandons et ce que nous avons demandé à la commission, et que celle-ci peut - à mon avis - raisonnablement refuser, c'est un débat sur cette question. Je vous ai donné les taux de Zurich, mais, quand j'ai vu les chiffres, je me suis dit: «Non, Zurich ne doit pas être un bon exemple, car nous sommes un canton frontalier et nous avons un tourisme du banditisme». Mais Bâle-Ville présente le même chiffre que Zurich ! Je ne sais pas si vous avez l'impression qu'on badine avec la justice dans les cantons dits «primitifs», mais en Appenzell, à Uri, Schwytz ou Unterwald, ce sont moins de 10% des personnes condamnées qui font de la préventive ! Et nous n'aurions pas le droit de nous adresser au Procureur général, au Collège des juges, pour leur dire: «Etes-vous sûrs d'utiliser vraiment les critères - très restrictifs pour la prison préventive - prévus par le code pénal et est-ce que des habitudes ne se seraient pas prises ?» Et le pire, Mesdames et Messieurs les députés - et ce dont n'a pas voulu discuter la commission - c'est que l'écart s'aggrave ! En 1995, on n'était pas si loin du taux affiché par Zurich, mais nous sommes passés de 43% à 50% - je le cite de mémoire - alors que son taux est descendu de 33% à 25%. On ne peut pas occulter ce débat !

Cela ne signifie pas que nous n'ayons pas besoin des 100 places supplémentaires. Mais, Mesdames et Messieurs les députés, si vous essayez aujourd'hui de mettre un couvercle sur cette question, qu'il faut bien appeler «une pratique abusive de la détention préventive», si vous laissez courir la tendance naturelle observable depuis 1995, eh bien, le temps d'avoir construit cette prison, vous serez exactement dans la même situation ! La prison, lorsqu'elle sera agrandie, sera déjà trop petite ! M. Pedrazzini nous dira alors qu'il manque à nouveau 100 places - et il aura raison... N'est-ce pas, Monsieur Pedrazzini ? Ce débat ne doit donc pas être occulté, il faut demander des explications au Palais de Justice.

Nous ne disons pas, non plus, que cette pratique ne s'explique pas, qu'elle n'a pas de bons motifs: nous disons simplement que, depuis plusieurs mois que le débat est ouvert, personne n'a été capable de nous expliquer pourquoi on avait un taux de détentions préventives deux fois supérieur à celui du canton de Zurich par rapport aux nombre de condamnations !

Alors, je regarde M. Unger, qui nous a dit: «Vous comprenez, dans le domaine social, il faut se remettre aux normes suisses». D'accord, vous l'avez fait. Je suis donc surpris que dans le domaine pénitentiaire on ne s'y remette pas, car les économies seraient autrement plus substantielles que dans d'autres domaines. Je vous le dis, le problème financier n'est pas celui du bâtiment ! Le problème est d'avoir deux fois trop de monde dans une prison, ce qui nécessite un encadrement deux fois plus grand, et c'est cela qui coûte extrêmement cher ! Peut-être que le Palais nous donnera des explications, mais vous avouerez qu'au moment de voter 20 millions il aurait été bon de connaître les raisons qui expliquent le besoin d'une nouvelle prison: essentiellement parce que nous avons un taux de détention préventive plus élevé !

Le rapport de Mme Nussbaumer est très synthétique, il donne tous ces éléments. Il faut des lunettes pour lire les chiffres, mais vous les avez - les lunettes et les chiffres. Et je m'adresse à vous, Monsieur Hiltpold: vous allez nous dire pourquoi nous avons un taux de détention préventive plus important. Parce que ce n'est pas vrai que une pure question de juges. Nous avons le droit de nous exprimer - pas d'ordonner - et nous déterminons les moyens mis à disposition de la justice. D'après le système même de la séparation des pouvoirs !

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, nous devons avoir un débat sérieux, et c'est bien pour cela que j'ai indiqué que celui-ci n'a rien de politicien. Mme Spoerri - rendons-lui cet hommage - a pris le taureau par les cornes sur tous les dossiers, depuis trois ans qu'elle est à la tête de ce département qui comportait un certain nombre d'autres problèmes. Je dis tout de suite pour M. Lescaze que je ne vise pas M. Ramseyer, parce que d'autres éminents magistrats avant lui ne se sont pas plus souciés d'un certain nombre de ces problèmes.

Donc, merci à Mme Spoerri d'avoir donné un calendrier. Nous vérifierons, c'est notre rôle, qu'il soit respecté à l'avenir. Mais nous attendons le Conseil d'Etat, les avocats et les députés de ce Grand Conseil sur la question de la détention préventive abusive. (Applaudissements.)

Mme Anne-Marie Arx-Vernon Von (PDC), rapporteuse. En tant que rapporteure de la commission des visiteurs officiels de l'année 2004, je tiens d'abord à remercier le DJPS, sa présidente: Mme Spoerri, la police et M. Rechsteiner, la direction du service pénitentiaire et M. Franziskakis, pour leur précieuse contribution aux travaux de la commission.

En préambule, cette commission des visiteurs est la plus ancienne du parlement genevois et elle traite d'un sujet grave, les conditions de détention. Alors, permettez-moi de pousser un coup de gueule, Madame la présidente ! Je ne suis pas coutumière du fait, mais je vais m'adresser à certains des députés ici présents qui continuent de ricaner sur les activités de la commission des visiteurs. Il est inadmissible de réduire cette commission à une commission secondaire composée de commissaires qui, à vos yeux, se promènent... Il est extrêmement important de savoir que chaque membre de la commission remplit sa mission avec énormément de respect et de considération pour les professionnels qu'ils rencontrent, je crois que M. Hiltpold et d'autres personnes présentes peuvent attester du sérieux et de l'excellent travail effectué dans des conditions parfois très difficiles.

Toujours en préambule, je tiens à relever encore combien, depuis trois ans que je siège dans cette commission, j'ai été témoin du respect et de l'humanisme dont tous les membres de cette commission - tous partis confondus - ont fait preuve face à un sujet délicat comme la détention de personnes qui portent atteinte à la sécurité des personnes et des biens. Je remercie tous mes collègues de la commission de m'avoir apporté leur précieux concours à la rédaction de ce rapport. Je crois que nous pouvons être tous d'accord pour dire que c'est à la qualité de ses prisons que l'on mesure l'évolution d'une société réellement démocratique. Bien sûr, le thème de la détention est un sujet délicat, peu porteur politiquement et peu « vendable» en période de restrictions budgétaires. Nous avons toujours le risque de voir des partis extrêmes stigmatiser des délinquants pour construire des projets de société basés sur l'exclusion.

Ce rapport rappelle les points forts des travaux de la commission et relève, par exemple, que certaines réparations et améliorations des locaux ont été effectuées grâce aux interventions de la commission des visiteurs. Donc, encore un coup de gueule pour dire que cette commission n'est pas une commission alibi. Elle est extrêmement sérieuse et respectueuse de ses prérogatives.

La commission a porté son attention en priorité sur les conditions de détention des mineurs. Elle s'est intéressée à l'agrandissement de la Clairière et à la présence de gardiens, mesure qui fut indispensable, à un moment donné, pour rétablir le calme et la sécurité, des jeunes comme du personnel. Elle s'est aussi intéressée aux conditions de détention des jeunes filles à Riant-Parc et à l'étude d'une convention concordataire romande sur la détention des mineurs.

La commission a également porté toute son attention sur les conditions d'internement des personnes condamnées sur la base de l'article 43 du Code pénal suisse, et c'est une nécessité absolue de construire un établissement approprié pour des personnes qui ont besoin de traitement et qui peuvent être dangereuses pour elles-mêmes et pour les autres.

Quant à la surpopulation carcérale, l'agrandissement de Champ-Dollon est, bien sûr, lié à la détention préventive, mais c'est une prison pour la détention préventive. Or nous avons pu, à la commission des visiteurs, constater qu'il y a aussi des exécutions de peines à Champ-Dollon, car il n'y a pas de place dans les établissements pénitentiaires concordataires. C'est un effet dominos qu'on ne peut pas réduire en disant simplement : «S'il n'y avait pas autant de détentions préventives». Bien sûr, il y a sûrement des moyens de faire autrement, mais on ne pourrait pas non plus justifier d'un coup de baguette magique qu'il n'est pas nécessaire de construire une extension à la prison de Champ-Dollon. L'effet dominos existe également parce que les autres lieux du concordat romand sont pleins et ne peuvent pas absorber les exécutions de peine.

En conclusion, la commission des visiteurs fait son travail au plus près de sa conscience, en étant simultanément attentive aux conditions de détention et aux conditions de travail des professionnels du pénitentiaire et de la police.

Madame la présidente, chers collègues, je vous recommande la lecture de ce rapport où sont relevés les points qui nous tiennent à coeur et, pour un sujet aussi grave, la commission vous recommande à l'unanimité d'accepter ce rapport.

La présidente. Je vous propose de clore la liste des intervenants. La voici: Mmes et MM. Bernard Lescaze, Roger Deneys, Alberto Velasco, Rémy Pagani, Esther Alder, Loly Bolay, Renaud Gautier, Jacques Baud, Hugues Hiltpold et Anne-marie Von Arx-Vernon.

Mme Jocelyne Haller (AdG), rapporteuse. Si je suis aujourd'hui à cette table, c'est plus par le fait que les travaux sur le RD 437 ont abouti à la rédaction de cette proposition de motion sur la création d'établissements spécialisés pour les articles 43 et 44, que pour la question de la santé mentale qui était, à l'origine, l'objet des travaux de la commission de la santé.

Je me suis déjà confondue en excuses pour le retard que j'ai apporté au dépôt de ce rapport, alors je n'insisterai pas plus, n'étant pas portée à l'autoflagellation. Je n'irai donc pas plus loin, d'autant moins que de l'eau a coulé sous les ponts depuis le dépôt de ce rapport et son traitement aujourd'hui.

En revanche, s'il est une chose que je souhaite faire ce soir, c'est rendre hommage à M. Albert Rodrik, car il a été le principal instigateur de cette motion. Le retard que j'ai apporté au dépôt de cette motion a eu pour conséquence qu'il n'a pas pu la signer, mais le mérite lui en revient et cela devait être dit.

Je n'ai pas grand-chose à ajouter à mon rapport, si ce n'est d'insister sur deux point qui me paraissent essentiels, sur la motion et son objet, bien évidemment, mais c'est une préoccupation directement liée aux deux autres objets traités ce soir, notamment la création d'établissements spécialisés pour l'incarcération des personnes faisant l'objet de mesures selon les articles 43 CPS et 397a CCS. Mais j'aimerais aussi insister - et c'est important - sur le fait que l'on axe toute cette discussion sur la question pénitentiaire, et cela risque d'occulter la préoccupation relative à la santé mentale. La réforme de la psychiatrie qui a fait l'objet de RD 437 est un élément important qui a emporté l'adhésion de toute une série de partenaires et d'acteurs, et ils l'ont manifestée au moment voulu.

Simplement, il apparaît que cette réforme n'a pas été menée à son terme et qu'un certain nombre d'éléments ne sont pas encore réalisés. Aujourd'hui, les foyers qui devaient faire partie intégrante du dispositif mis en place font encore défaut, et c'est un problème important parce que le besoin s'en fait quotidiennement sentir, de même que le besoin de mieux travailler l'articulation entre le service d'accueil, les urgences psychiatriques et les autres éléments du dispositif de prise en charge de la psychiatrie. Je crois qu'il était important d'insister sur ces éléments.

Pour conclure, et puisque l'occasion m'est donnée d'être à cette table et d'avoir la parole, j'aimerais dire que si, effectivement, ne se trouvaient pas à Champ-Dollon un certain nombre de gens devant être placés ailleurs, la question de la surpopulation se poserait en d'autres termes. Cela sous-entend que la question d'un agrandissement de Champ-Dollon doit être étudiée avant que l'on n'y adhère de manière inconditionnelle. Et en cela, j'approuve particulièrement les propos de M. Hiler.

M. Bernard Lescaze (R). La tournure que prend ce débat est certes intéressante, mais il me paraît regrettable de ne pas discuter le rapport des visiteurs de prison en soi, et peut-être pourrait-on lier la motion sur l'internement avec le projet de crédit d'étude. Je me bornerai donc à parler essentiellement du projet de crédit d'étude, car les arguments de Mme Stéphanie Nussbaumer sont tout à fait justes. Personnellement, j'ai regretté auprès de mon groupe qu'on ne l'ait pas davantage écoutée à la commission des travaux. Mais, je sais comment se passe parfois l'étude de certains projets à la commission des travaux et je me garderai de blâmer mes collègues à ce sujet.

Les statistiques fournies et qu'on ne peut mettre en doute, puisque ce sont des statistiques de l'Office fédéral de la statistique - bien que, semble-t-il, des rumeurs de l'Office pénitentiaire les mettent en doute - sont proprement étonnantes. Pas effarantes: étonnantes. Cela dit, je dois me distancer un peu du ton polémique du rapporteur remplaçant de minorité. La séparation des pouvoirs existe malgré tout. On peut demander des explications aux magistrats de l'ordre judiciaire, mais ils jugent en toute conscience et sérénité. Il y a effectivement un problème par rapport à d'autres pratiques judiciaires dans d'autres cantons, mais ni ce législatif ni le Conseil d'Etat ne pourront y trouver remède. Peut-être que l'Université, la faculté de droit, les nombreux pénalistes, et aussi les avocats qui siègent dans ce Grand Conseil, pourraient y remédier dans leur pratique ordinaire, quoiqu'on ne les ait pour l'instant pas beaucoup entendus sur ce sujet délicat.

D'où ma grande interrogation ! Je suis parfaitement convaincu que, malheureusement, nous sommes dans une société où les établissements de détention, les établissements fermés ou semi-fermés, sont à l'heure actuelle insuffisants. La preuve est que le rapport de Mme Haller et la motion de la commission se concluent par la demande d'entreprendre sans délai l'étude et la réalisation de deux quartiers carcéraux, plus un programme cohérent pour un établissement des condamnés de l'article 43 du Code pénal suisse. De même, on insiste beaucoup pour la création d'une prison pour femmes. Mme Nussbaumer a raison de dire que le fait de maintenir des femmes dans l'actuel bâtiment de Champ-Dollon provoque une perte d'efficacité et d'efficience, puisque 80 cellules restent inoccupées pour 30 femmes détenues en raison des circulations nécessaires.

C'est un procédé inhabituel de recevoir, après l'étude d'une commission, une note du Conseil d'Etat. Cependant, je tiens à rendre hommage à la note de Mme Spoerri, car elle assume avec courage quelque chose. Mais ce que je n'arrive pas à comprendre, c'est comment le Conseil d'Etat, appuyé certainement par son administration, a choisi d'avoir ces priorités. Là est le vrai débat ! Pourquoi commencer par l'agrandissement de Champ-Dollon, au lieu de réaliser cet établissement que l'on attend, sinon depuis 1937, au moins depuis la réelle entrée en vigueur du Code pénal suisse, c'est-à-dire en 1942 ? Pourquoi ne commence-t-on pas par la prison pour femmes ? Cela libérerait des cellules à Champ-Dollon. Ensuite, quand la justice se plaint de manquer de moyens financiers, on peut rappeler qu'un mois de détention à Champ-Dollon coûte, par détenu, l'équivalent d'une année d'un étudiant en Sciences commerciales, ou l'équivalent de plus d'une année d'élève à l'école primaire - pour reprendre un débat de tout à l'heure... (Rires.)Il y a ici une véritable interrogation ! Je ne comprends pas comment on en est arrivé à ce choix, parce qu'on ne va pas pouvoir tout faire à la fois, tout de suite !

Alors, je souhaite beaucoup entendre de la part du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement - quel logement en ces circonstances ! - quelles sont ses priorités, si elles lui sont commandées par le DJPS et dans quel délai on pense pouvoir construire les autres établissements qui, à mes yeux, s'imposent comme prioritaires. Je ne demande pas du tout le renvoi du crédit en commission, car c'est un crédit d'étude, mais, au moment de la réalisation, je souhaiterais que les autres crédits d'étude aient été votés et les études entreprises, puisqu'il s'agit d'établissements sans doute un peu plus petits. Si l'on n'arrive pas à tout financer, il faudra faire un choix. Et le choix que je souhaiterais que notre parlement puisse effectuer à ce moment, c'est de commencer par l'établissement d'internement, nécessaire d'ailleurs à une bonne partie de la Suisse romande, puis de réaliser la prison pour femmes.

M. Roger Deneys (S). En introduction, je dirai tout d'abord que je regrette - comme c'est souvent le cas - que vous ayez clos la liste des intervenants aussi tôt, parce que si M. Lescaze n'est pas d'accord avec mes propos, il ne pourra même pas rétorquer, alors que nous pourrions à plusieurs occasions essayer d'alimenter le débat avec des intervenants qui connaissent leurs dossiers.

A part cela, les socialistes ont eu l'occasion de se poser les mêmes questions que celles exposées dans le rapport de minorité concernant les conditions d'incarcération à la prison de Champ-Dollon. En commission, nous avons voté ce crédit d'étude car - Monsieur Hiler, il faut le rappeler - il s'agit d'un crédit d'étude de 1,2 million et non d'un crédit de construction de 20 millions. Et à ce stade, les socialistes - en tout cas pour une partie d'entre eux - sont favorables à ce crédit d'étude.

En fait, nous sommes partagés entre deux enjeux que tout le monde reconnaît ici. C'est-à-dire de savoir si, d'une part, il faut assurer des conditions de vie décentes, et conformes aux conventions en vigueur, à la Déclaration des Droits de l'Homme, aux détenus qui se trouvent actuellement à Champ-Dollon. Une fois de plus, faut-il rappeler que la prison avait été construite pour 260 détenus, alors qu'il y en a actuellement plus de 400 - on a eu un pic à 460 - et que la moyenne tourne autour de 370 ? Cette prison est en surpopulation constante et la moindre des choses serait de permettre aux détenus de vivre - survivre - dans des conditions acceptables, et il semble normal aux socialistes d'assurer cela.

Le problème, relevé en partie par le rapport de minorité, est la question de «l'appel d'air» éventuel que créerait cet agrandissement de Champ-Dollon. Si nous agrandissons Champ-Dollon pour y mettre 70 cellules supplémentaires, soit une centaine de détenus en plus, qu'est-ce qui nous garantit qu'après la construction de ces nouvelles places, soit dans deux, trois ou quatre ans, on ne se retrouve pas exactement face au même phénomène ? Les socialistes ne sont donc pas complètement rassurés, notamment en raison de la politique menée par le DJPS et par le Procureur. S'il s'agit de poursuivre et d'incarcérer à tire-larigot les petits délinquant pour les placer à Champ-Dollon, on risque d'avoir toujours des problèmes de surpopulation... Mais est-ce la bonne solution pour ces problèmes de petite délinquance ? Nous n'en sommes pas certains. Et cela demande au moins, aussi, des études plus approfondies. Dans ce sens, une partie des socialistes souhaite s'abstenir et ne votera pas le crédit en question.

En ce qui me concerne, j'étais en commission des travaux et je suis absolument favorable à ce crédit d'étude, d'une part parce que c'est un crédit d'étude et que j'espère qu'il apportera des réponses aux questions posées ici. Par ailleurs, j'ajouterai que Mme Nussbaumer avait bien raison d'insister sur la nécessité d'auditionner le pouvoir judiciaire et Mme Spoerri. En l'occurrence, une partie des questions qu'elle se posait trouve réponse dans le document que nous a remis Mme Spoerri, que je remercie. Mais Mme Nussbaumer aurait pu intégrer ce dernier directement au rapport en auditionnant la cheffe du département, cela aurait été agréable.

Pour le reste, une partie des socialistes soutiendra ce crédit d'étude, notamment parce qu'il permet de donner des conditions de vie décentes aux détenus dans la situation actuelle. Car, il faut le rappeler, le but de ce crédit d'étude est d'agrandir l'établissement parce qu'il y a surpopulation ! Ce n'est pas de créer des places supplémentaires pour accueillir des nouveaux détenus. Je pense qu'il est important d'avoir cela en tête. Mais, pour voter le crédit de construction à son terme, il est important que nous ayons les garanties que les détenus qui ne devraient pas être à Champ-Dollon trouvent des places ailleurs.

D'autre part, je regrette que le rapport de majorité - et pourtant j'aime beaucoup les textes de M. Hiltpold - ne mentionne pas davantage le fait que les travaux concernent non seulement le nombre de cellules supplémentaires, mais également des équipements annexes; je pense à l'accueil des familles et aux parloirs familiaux, à tous ces équipements qui permettent aux détenus d'avoir un minimum de contact décent avec l'extérieur. Et si, au moment de voter le crédit final, les socialistes sont opposés à l'agrandissement de Champ-Dollon, en tout cas ils seront toujours en faveur de ces crédits pour l'accueil des familles de détenus.

M. Alberto Velasco (S). En principe, mon intervention devrait s'orienter vers le rapport de la commission des visiteurs... Tout comme M. Lescaze, je regrette qu'on ait mêlé ces deux débats. Etant moi-même commissaire à la commission des travaux, j'ai assisté à ce débat très important sur la prison de Champ-Dollon et, par conséquent, je ne peux m'empêcher d'avoir un avis là-dessus, surtout que le problème de Champ-Dollon est repris dans notre rapport de la commission des visiteurs, parmi les recommandations.

Il y a un fait troublant. Quand Mme Nussbaumer est venue avec ces chiffres à la commission des travaux, je dois reconnaître qu'aucun d'entre nous n'avait ces chiffres, ni à la commission des visiteurs, ni à la commission des travaux, ni, je pense, dans ce Grand Conseil. Pour la première fois, les députés voyaient les chiffres que Mme Nussbaumer mettait sur la table. Nous avons été déstabilisés. Je faisais partie des députés favorables à la construction de cet étage supplémentaire, puisque les conditions dans la prison sont d'une promiscuité désastreuse. Cinq ou six jeunes vivent dans des cellules prévues normalement pour deux personnes... J'ai moi-même effectué une visite et, effectivement, il y avait quatre, cinq ou six jeunes de 15 ou 16 ans dans une cellule. Ce n'est pas normal.

Mais quand on a vu les chiffres, on s'est posé la question de savoir ce qu'il se passera en construisant un étage supplémentaire: les pratiques actuelles de la justice genevoise vont-elles se poursuivre ? C'était le premier point.

Aujourd'hui, nous avons eu un débat avec Mme Spoerri et il en est ressorti qu'à Genève les conditions changent et deviennent difficiles. Le chef de la police a donné une conférence de presse et, effectivement, on doit tous se poser la question - tous les députés ici présents et ceux de la commission des visiteurs - de savoir si nos institutions et nos établissements sont adaptés à la situation actuelle, et qui va se développer à Genève, concernant les problèmes d'immigration et d'autres. Et la construction d'un étage supplémentaire à Champ-Dollon ne me semble pas répondre aux situations qui se présenteront à l'avenir. Par conséquent, je m'abstiendrai sur ce vote.

S'agissant du rapport de la commission des visiteurs, j'ai un certain nombre de remarques à faire. A propos de Riant-Parc, la commission relève année après année que cette prison n'est pas adaptée à l'usage qui en est fait: on y place toujours des personnes et l'on nous dit qu'il y aura une solution plus tard avec la prison des femmes. Je sais qu'une de mes collègues a suggéré de placer des femmes à Champ-Dollon plutôt que de les détenir à Riant-Parc, parce que les conditions à Champ-Dollon seraient plus acceptables.

J'aimerais aussi dire quelque chose sur CLAplus, la prison pour les jeunes. Ma première remarque est qu'il y a eu un retard préjudiciable. La deuxième est la suivante - là, je m'adresse au Conseil d'Etat: vous avez eu l'occasion de visiter des prisons en Valais... J'ai été étonné de voir que des nouvelles constructions, de nouvelles architectures très intéressantes, donnaient une certaine vie à la prison. Mais j'ai malheureusement constaté que la prison CLAplus était presque identique à la précédente - c'est moi qui avais fait le rapport, il y a quatre ans - et c'est bien dommage, car on aurait dû en profiter pour apporter à CLAplus de nouveaux éléments ou des expériences des autres cantons. C'est pourquoi j'aimerais qu'à l'avenir les départements et les responsables voient ce qui se réalise ailleurs et qu'ils en tiennent compte au moment d'investir.

Un autre élément n'a pas été retenu dans notre rapport, mais j'aimerais en dire quelques mots. Etant donné les conditions de détention au QCH, le quartier cellulaire de l'Hôpital, les détenus ne peuvent pas faire de promenade à cause de la disposition des locaux. Je pense qu'il faudra aussi revoir cela et proposer des solutions.

Par ailleurs, la commission des visiteurs se rend aussi dans les locaux de la police; en ce qui concerne le Vieil Hôtel de Police, il mérite qu'on s'y attaque parce que les conditions de travail du personnel de la police ne sont pas acceptables. Il fallait donc le signaler, car, si l'on veut de bonnes conditions pour les détenus, celles des personnes qui y travaillent doivent également être acceptables.

Pour terminer, j'aimerais ajouter un mot sur la médecine pénitentiaire. Actuellement, dans ce qu'on appelle les violons, il est prodigué une certaine médecine aux détenus. Or nous avons constaté que les détenus doivent parfois attendre quelques heures et que, parfois aussi, la police est obligée d'aller chercher elle-même les médicaments et de les payer de sa poche. Il est donc urgent que l'on étudie la possibilité d'étendre la médecine pénitentiaire à l'ensemble des lieux de détention de ce canton.

Pour terminer, j'aimerais dire que je regrette...

La présidente. Monsieur le député, il faudra terminer !

M. Alberto Velasco. Je regrette que notre commission ait été «atomisée» par notre règlement. C'est une commission dont la composition était agréable et très studieuse, avec des députés expérimentés. Malheureusement, si cette commission venait à être «atomisée» chaque année, son efficacité s'en ressentirait. J'espère donc que la commission judiciaire fera le nécessaire pour que le projet de loi sur lequel elle planche se concrétise en temps utile.

M. Rémy Pagani (AdG). Je voudrais m'associer aux remarques de Mme Von Arx-Vernon en ce qui concerne l'utilité de la commission des visiteurs. On a tort de penser qu'il s'agit d'une commission annexe, car c'est bien le contraire ! Cela fait partie de notre rôle de député: il y a des choses qui nous font plaisir - la représentation, les débats polémiques - mais on a aussi la responsabilité de s'occuper de celles qui ne font pas plaisir, c'est-à-dire de la détention, et il faut assumer cette responsabilité. Dans ce sens, la commission des visiteurs de prisons remplit ce rôle, et il est important de la soutenir parce que cela fait aussi partie de notre responsabilité de député.

Cela étant, je ne reviendrai pas sur les arguments de M. Hiler concernant ses interrogations, car je les fais totalement miennes. D'ailleurs, en tant que président de la commission des travaux, je me suis associé à Mme Nussbaumer pour la soutenir dans sa réflexion et je prendrai aussi - une fois n'est pas coutume - l'argumentation de M. Lescaze pour dire à quel point je suis entièrement d'accord avec ses interrogations aussi.

J'aimerais dire quelque chose de plus que M. Hiler qui, pour être succinct, a traité uniquement de la préventive. Je crois que l'on a tort de se limiter, il faudrait prendre en compte l'ensemble des catégories de populations qui se trouvent aujourd'hui à Champ-Dollon. On s'est rendu à Champ-Dollon et l'on a bien vu: il y a une augmentation de la démographie à Genève, il devrait donc y avoir, théoriquement, une augmentation du nombre de prisons, cela paraît évident; on a constaté que la prison avait besoin de lieux d'accueil pour les familles - c'est évident aussi; il faut changer l'ensemble des blocs cuisine, car ils sont vétustes.

Mais un problème subsiste: plusieurs populations se côtoient alors qu'elles n'ont rien à faire ensemble. prenons la première d'entre elles: il s'agit de personnes comme vous et moi... Peut-être qu'un jour vous prenez votre voiture et vous commettez un excès de vitesse; on contrôle votre alcoolémie, et vous passez un jour voire deux à Champ-Dollon alors que vous n'avez - à mon avis - rien à y faire, puisque - et j'ai entendu Mme Spoerri à ce propos - on a ouvert des postes de police qui fonctionnent 24h sur 24. D'ailleurs, à l'Alliance de gauche, nous avons proposé que deux postes de police soient ouverts 24h sur 24, et c'est pourquoi cette population devrait «atterrir» dans ces derniers.

Deuxième population, celle de la préventive. Effectivement, un certain nombre de personnes placées en préventive le sont, à mon avis, abusivement - je ne reviendrai pas sur l'argumentation de M. Hiler, je trouve qu'il a totalement raison.

Il y a d'autres catégories de la population qui n'ont rien à faire à Champ-Dollon, par exemple les jeunes. Nous avons fait un effort considérable pour que la Clairière soit agrandie, mais malheureusement, et nous le rappelons régulièrement, deux foyers de semi-liberté ont été fermés dans les années 90 pour réaliser des économies budgétaires... Et il est nécessaire aujourd'hui d'ouvrir deux nouveaux foyers semi-fermés ou semi-ouverts, c'est selon, pour faire diminuer le nombre de détentions à la Clairière ou à Champ-Dollon ! Les jeunes sont une population qui n'a rien à faire à Champ-Dollon ! Nous ne cesserons de le répéter: la promiscuité de jeunes adolescents avec des malfrats, souvent des professionnels, n'est pas acceptable ! Même s'il s'agit d'une promiscuité très bien contrôlée, toujours est-il qu'il y a dans ces milieux une sorte d'émulation chez les jeunes, notamment de passer à Champ-Dollon, «comme les grands», et c'est inadmissible, Mesdames et Messieurs les députés !

Une autre catégorie de population qui n'a rien à faire à Champ-Dollon - depuis 1935, comme l'a dit M. Lescaze - ce sont les personnes concernées par les articles 43 et 45, qui demandent un investissement extrêmement lourd. Comme certains gardiens se forment «sur le tas», ils n'ont pas forcément les connaissances nécessaires quant à l'application de cet article 43. Là, Madame Spoerri, vous avez une responsabilité très précise, celle de ne pas avoir donné la priorité à ce projet, qui traîne dans les tiroirs du département depuis des années, pour sortir cette population de Champ-Dollon.

Mais il y a encore une cinquième population, ce sont les personnes - hommes ou femmes - condamnées et qui font recours - car elles restent à Champ-Dollon le temps que dure ce dernier. Et ces personnes, non plus, n'ont rien à faire dans une prison préventive !

Alors, Mesdames et Messieurs les députés, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, Madame la présidente, tant que nous n'aurons pas - et nous l'avons dit à la commission - une réelle politique qui traite de manière spécifique et aussi de manière globale l'ensemble de ces problèmes, nous ne ferons que mettre un emplâtre sur une jambe de bois ! Et c'est laisser perdurer le système, sans s'attaquer aux véritables problèmes, notamment à ceux que je viens de citer.

Bien que l'on ait reçu - et je vous en remercie - une lettre, parce que vous vous rendez bien compte que ce projet de loi ne va pas forcément passer au sein de notre Grand Conseil, je trouve plus judicieux de renvoyer ce projet de loi à la commission des travaux, pour que nous puissions au moins auditionner le pouvoir judiciaire - en votre présence, Madame la présidente ! - et lui demander des explications sur l'ensemble de la politique qu'il entend mener par rapport à Champ-Dollon. Et il faudra auditionner non seulement le pouvoir judiciaire mais également la police ! Car j'ai lu dans le journal de ce matin que M. Rechsteiner disait - et c'est inacceptable : «On évite d'intervenir...». De la part d'un policier, je trouve cela un peu spécial.

A mon avis, la seule chose sensée est - puisqu'il s'agit d'un crédit d'étude - de renvoyer ce projet en commission, pour auditionner les personnes et pour avoir un programme de construction raisonnable et raisonné qui tienne compte des problèmes de l'ensemble des populations en détention. C'est pourquoi je vous recommande, Mesdames et Messieurs, de renvoyer ce projet de loi à la commission des travaux.

Mme Esther Alder (Ve). Beaucoup de choses ont été dites, et l'on se rend bien compte que le problème...

La présidente. Attendez, Madame la députée, une question m'est posée... Le renvoi en commission a déjà été suggéré dans le rapport de minorité, et c'est la première chose que je ferai voter quand on aura entendu tous les députés. Je vous redonne la parole.

Mme Esther Alder. J'interviendrai surtout sur le rapport général de la commission des visiteurs. Beaucoup de choses ont été dites et l'on se rend bien compte qu'une multitude de problèmes vont nous occuper ces prochains temps, notamment les articles 43 et 45 et la détention des mineurs.

J'aimerais rendre attentif ce parlement à la question des mineures détenues à la maison d'arrêt pour femmes de Riant-Parc. Il faut savoir que cet établissement est parfaitement inadapté à l'accueil de mineures et qu'il ne répond en rien aux droits les plus élémentaires en matière de droit pour les enfants: les filles ne bénéficient quasiment d'aucune prise en charge éducative, les locaux sont tout à fait inadaptés, les promenades se font sur un minuscule balcon grillagé et, le reste du temps, ces mineures sont confinées dans leurs quartiers où sont également servis leurs repas. Aucune activité structurée ne leur est proposée. D'ailleurs, le personnel dévolu à la maison d'arrêt de Riant-Parc est formé à la surveillance d'adultes et non de mineures, il ne dispose donc d'aucune formation en matière d'éducation. Tout cela pour dire à quel point la situation est préoccupante et grave, et à quel point une solution doit être trouvée rapidement.

La construction de la CLAplus ne résoudra en rien la situation de ces jeunes filles, puisque seulement 13 places seront à disposition. Il faut savoir que déjà à Champ-Dollon, on compte parfois plus de 20 mineurs; si l'on compte ceux de Riant-Parc, on réalise bien qu'il manquera des structures appropriées pour ces jeunes.

Pour ce qui est de la Clairière, les Verts constatent que le personnel éducatif est de plus en plus dépassé par la prise en charge de mineurs délinquants. La volonté du personnel d'être assisté de surveillants de Champ-Dollon le démontre, mais cela révèle également une certaine démission face aux jeunes et, pour nous, éduquer implique aussi savoir apporter des limites. Donc, nous restons dubitatifs lorsque nous lisons dans le rapport du juge Zermatten que, par la présence de surveillants de Champ-Dollon, les éducateurs se sentent renforcés dans leur tâche.

Pour terminer, nous demandons impérativement - et comme le recommande le rapport - que les gardiens de Champ-Dollon soient formés à la surveillance de mineurs et que les éducateurs de la Clairière reçoivent une formation supplémentaire, peut-être une spécialisation en éducation en milieu fermé. Un réel projet pédagogique doit être mis en place à l'attention des mineurs détenus. Pour le reste, nous partageons les conclusions du rapport de la commission des visiteurs.

Mme Loly Bolay (S). Vous nous avez demandé, Madame la présidente, de nous exprimer sur le renvoi en commission. Le parti socialiste n'est pas opposé au renvoi, toutefois il se pose la question de savoir s'il est vraiment pertinent de renvoyer ce projet de loi à la commission des travaux, puisqu'il ne s'agit que d'un crédit d'étude. Et l'on pourrait très bien poser ces questions avec le projet de loi sur la construction.

Des questions de fond ont été soulevées par le rapport de minorité et par M. Hiler, notamment sur la préventive et sur les mineurs; c'est pourquoi, lorsque l'on débattra de ce problème, je me demande s'il ne serait pas possible de s'attaquer également aux causes et que la commission judiciaire, spécialiste de ces problématiques, puisse participer à ces travaux.

J'ajouterai juste un mot: ce crédit d'étude n'envisage pas seulement l'agrandissement mais aussi la rénovation - certains d'entre vous en ont parlé. Or il y a aussi l'agrandissement des ateliers, et je rappelle qu'à l'heure actuelle il y a seulement 140 ateliers pour 460 détenus. Et l'on sait que les ateliers sont des éléments d'apaisement et de réinsertion. Alors, on se trouve véritablement face à un problème urgent ! Nous devons donc avoir un débat sur les questions posées par le rapport de minorité et suite aux remarques de M. Hiler qui sont extrêmement pertinentes. Il me semble que nous l'avons déjà dit lors de nos discussions en commission: ce n'est peut-être pas le moment, lorsqu'on traite de ce crédit d'étude, d'aborder ces questions-là. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs les députés... J'aimerais juste ajouter qu'il y a aussi l'agrandissement de la cuisine pour les puddings - cela, c'était pour M. Gros.

M. Renaud Gautier (L). Une société se juge aussi à la manière dont elle dispose ou met de côté celles et ceux qu'elle condamne. A ce titre, Genève ne fait certainement pas figure d'exemple. Néanmoins, si l'on peut être d'accord avec le rapport de notre collègue Nussbaumer, si bien défendu par M. Hiler, on ne peut aussi que constater que plusieurs des intervenants précédents ont se sont donné de superbes tapes sur le groin ou ont fait de superbes autogoals... Car je ne vois pas comment l'on peut demander de repousser cette décision tout en convenant qu'il y a urgence.

De deux choses l'une, soit nous sommes dans une situation particulièrement tendue et dangereuse, soit... Je voudrais l'on rappelle ici - comme l'a fait Mme Spoerri dans la lettre qu'elle nous a transmise - qu'actuellement la situation à Champ-Dollon frise tous les jours une catastrophe majeure. On ne peut donc pas reporter ce que l'on a différé - comme l'a rappelé tout à l'heure M. Hiler - pendant plus de cinquante ans, c'est-à-dire une décision qui aurait du être prise dans ce parlement il y a une dizaine d'années au minimum ! Il faut donc aller de l'avant avec ce crédit d'étude, tout en relevant que la problématique de l'augmentation des places de détention à Champ-Dollon ne résout pas le problème des articles 43 et 45, et que c'est au canton de Genève qu'a été dévolue cette mission. Le canton doit répondre à cette question et ne peut plus la différer.

Je voudrais rappeler qu'un groupe de travail a été initié par Madame la présidente, auquel participaient plusieurs membres de ce parlement - et moi aussi - pour commencer à étudier cette problématique. Mais il n'est plus temps d'attendre ! Il faut accepter ce crédit d'étude; il faut accepter la problématique de l'augmentation des zones de détention à Champ-Dollon; il faut accepter l'urgence par rapport aux détenus psychiatrisés. Parallèlement à cela, il faut s'intéresser aux raisons pour lesquelles le taux de détentions en préventive est si élevé à Genève.

Je voulais aussi répondre à mon vis-à-vis. Vous vous offusquiez tout à l'heure du fait qu'une personne faisant recours reste à Champ-Dollon; mais c'est absolument évident ! Une personne qui demande la révision de son jugement a été condamnée, il paraît donc logique que celle-ci soit détenue là où l'enquête ou le recours a lieu.

Troisième point qu'il faudra aussi considérer un jour ou l'autre. Champ-Dollon est une prison préventive, on ne devrait donc pas y purger sa peine. Mais, si certains détenus purgent leur peine à Champ-Dollon, ou le commencent, c'est que dans le principe du pipeline qui prévaut, il n'y a pas de place dans les autres lieux de détention... Ne me dites pas que ce n'est pas vrai ! La commission des visiteurs se rend chaque année sur l'ensemble des lieux de détention du concordat romand, elle peut ici témoigner du fait qu'il n'y a pas de place ! Les délais d'attente - si l'on peut s'exprimer ainsi - dans des lieux comme Yverdon ou ailleurs, tournent actuellement autour d'un an ! On remplace un détenu genevois pour autant qu'un autre détenu genevois sorte, car il n'y a plus de place. Nous avons donc un effort à fournir, maintenant et ici, à Genève, en ce qui concerne la prison préventive de Champ-Dollon et les articles 43 et 45. De plus, nous devons réfléchir aux questions posées par notre collègue Nussbaumer sur le taux. Mais, pour l'amour du Ciel, ne reportons pas une fois de plus ce crédit d'étude alors que l'entier de ce parlement reconnaît l'urgence et la nécessité d'aller de l'avant !

M. Jacques Baud (UDC). Je vais essayer d'être le plus bref possible. Premièrement, en ce qui concerne le rapport de la commission des visiteurs. Je vous prie, Mesdames et Messieurs les députés, de l'accepter. Et pas seulement de l'accepter, mais de le lire ! C'est votre devoir. C'est là tout un pan de notre société que certains ne veulent pas voir - cela leur ferait beaucoup de bien.

Deuxième chose: on s'est rendu compte qu'à Champ-Dollon il n'était pas possible de détenir les personnes concernées par les articles 43 et 45. Cette prison n'est pas conçue pour des détenus qui ont des problèmes psychiatriques... (Brouhaha.)Puis-je parler, s'il vous plaît ? (La présidente agite la cloche.)On s'est également rendu compte que Belle-Idée n'a pas une vocation carcérale: il nous faut donc étudier un autre système d'établissement. Nous sommes allés à Rotterdam pour, justement, voir ce genre d'établissement, qui nous a paru intéressant - lisez notre rapport ! En l'occurrence, je pense qu'il faudra étudier la question avec les cantons romands, parce que cela coûte très cher, parce que c'est compliqué et que nous devons réaliser cela ensemble. Il faudra aussi voir les choses d'une façon plus précise.

Quant à Champ-Dollon: danger ! Danger permanent ! Danger pour les gardiens! Une surpopulation effroyable ! A chaque minute, il peut y avoir une émeute ! Des gardiens peuvent être blessés ! Alors, je ne veux plus entendre des âneries disant qu'il faut reporter en commission l'agrandissement de Champ-Dollon. C'est urgent !

Et malgré ce qu'a dit M. Hiler quant au déplacement hors de Champ-Dollon des femmes et des personnes concernées par les articles 43 et 45, je vous ferai remarquer qu'il manquerait toujours 100 places ! On est en augmentation constante des délits, on est en augmentation constante de population, ce qui accroît aussi les possibilités de délinquance. Donc, je vous propose de voter ce projet de loi et ce projet d'étude pour Champ-Dollon.

Mme Morgane Gauthier (Ve). A midi, à la commission des visiteurs, nous avions déjà reçu la note déposée sur chacune de vos places. Dans cette note, il est dit que le Conseil d'Etat a désigné comme priorité la construction de l'établissement pour les personnes détenues en vertu de l'article 43 du Code pénal suisse. Ce que nous attendons ce soir, c'est l'engagement ferme de ce qui a été dit à midi. De cette manière, nous pourrions nous abstenir sur le projet de loi et refuser le renvoi en commission.

Le deuxième élément de mon intervention est de relever qu'à la commission des visiteurs, sous la présidence de Mme Berberat, des discussions sur la problématique de la préventive à Champ-Dollon ont été agendées. C'est pourquoi nous attendons des réponses et ne comptons pas laisser ces questions de côté.

En revanche, si nous avons aujourd'hui ou demain l'engagement du Conseil d'Etat que ce projet de loi est à l'étude et qu'il sera déposé avant l'été, nous nous engageons également à poursuivre les travaux sur la préventive et à déposer les travaux de toutes nos commissions afin qu'il y ait un vrai débat au sein de ce parlement et que tous les députés soient au courant de ce qui se passe. Mais maintenant, nous attendons vraiment les réponses du Conseil d'Etat ! Je vous en remercie.

La présidente. Pour ce soir, nous terminons ici nos débats. Nous poursuivrons cette discussion demain à 17h, avec les rapporteurs sur ces projets.

Je vous rappelle toutefois que notre séance de 15h sera consacrée aux extraits.

Fin du débat sur les prisons: Session 05 (février 2005) - Séance 27 du 18.02.2005

La séance est levée à 23h.