République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1521
Proposition de motion de MM. Claude Marcet, Robert Iselin, André Reymond pour le réexamen et la révision du budget 2003 et l'amélioration de la rentabilité de l'appareil étatique

Débat

M. Robert Iselin (UDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés. En principe, je considère que l'exposé des motifs est déjà suffisamment détaillé et je n'ai pas beaucoup à ajouter. De façon générale, nous sommes devant une étrange situation : un canton économiquement riche et un Etat ruiné. Le bilan laisse apparaître un découvert de 6,6 milliards de francs suisses, et je peux vous dire qu'un directeur général de banque qui présenterait un bilan de ce genre serait mis à la porte en moins de quinze minutes.

Cette situation pousse à la réflexion et je me permettrai de vous livrer les quelques pensées d'un vieux grigou.

Le canton suisse qui a le plus de fonctionnaires par tête d'habitant est le canton de Genève. Quand on parle à des hauts fonctionnaires, ils vous indiquent d'eux-mêmes, sachant que leur identité ne sera pas révélée, qu'il y a un grand coulage dans l'organisation de la République. On peut aussi faire état des déclarations de ceux qui quittent la hiérarchie et qui s'expriment avec plus de liberté.

A mon avis, la conclusion qui s'impose est que l'Etat doit être réorganisé - et c'est dans ce sens que va cette motion - car il laisse se produire une perte d'énergie et une perte financière considérables. Je ne comprends pas, et ceci est peut-être un peu personnel à l'égard des bancs d'en face, comment on peut s'opposer aux idées développées dans cette motion. En effet, cela ressort clairement du texte, le but n'est pas de mettre brutalement les gens à la porte. Il faudra bien une dizaine ou une quinzaine d'années pour faire maigrir l'Etat de Genève. Je vous remercie.

M. Pierre Kunz (R). Les événements économiques, militaires, sociaux, qui chamboulent notre monde ont commencé déployer des effets importants sur le fonctionnement et les finances de notre Etat. D'ailleurs Standard & Poor's l'a rappelé voici quelques jours en abaissant - quelque peu seulement, c'est vrai - le rating de Genève.

A l'évidence, le budget voté à fin 2002 ne correspond plus aux nouvelles réalités. Il doit donc être recalculé en profondeur et revu car les recettes prévues ne rentreront pas intégralement. Les dépenses de l'exercice doivent par conséquent être révisées à la baisse, car, pour les radicaux, il ne saurait être question de procéder une fois encore - après les exemples pitoyables des années dites monocolores - à de l'emprunt pour financer le fonctionnement de l'Etat.

Mesdames et Messieurs, indépendamment de l'idée que chacun peut avoir sur l'efficacité ou non de notre administration publique, nous devrions tous admettre qu'il y a urgence, qu'il y a péril en la demeure. Et cette motion vient à point nommé. Elle doit être adressée directement au Conseil d'Etat, que nous devrions inviter à présenter son budget révisé avec les projets de loi éventuellement requis par les mesures proposées, cela avant fin juin.

Les radicaux le disent clairement : s'agissant des économies à réaliser, comme à Berne, comme au sein de la Confédération, tous les postes budgétaires doivent être passés au tamis, secteur social et instruction publique compris.

Mme Mariane Grobet-Wellner (S). Cette motion s'inscrit dans la ligne des affirmations tous azimuts de certains qui veulent faire croire que l'administration n'est pas à la hauteur. Ils cherchent donc à discréditer le personnel de l'Etat selon le principe: «Calomniez, il en restera toujours quelque chose, même si cela s'avérera par la suite infondé».

Ces motionnaires n'hésitent pas à insinuer par leurs considérants que le budget 2003, par exemple, est totalement dépassé, qu'il est entaché d'un optimisme injustifié, que la situation financière n'est pas un souci constant et premier du gouvernement et des élus du peuple, que le fonctionnement de l'Etat n'est pas optimalisé et j'en passe.

Ayant prouvé leur incapacité à faire une seule proposition concrète dans le sens souhaité par eux, les motionnaires préfèrent aujourd'hui se livrer à ces insinuations, sans apporter la moindre preuve à leurs affirmations, ni même proposer des diminutions concrètes des dépenses de l'Etat.

Les socialistes regrettent que les motionnaires s'estiment être en droit de se comporter de cette façon peu responsable et contre-productive à l'égard de la fonction publique qui, dans son immense majorité, fournit des prestations de haute qualité à la population. Ces prestations, qui constituent un des éléments, sinon l'élément d'attrait principal de notre canton, sont d'autant plus indispensables en période des difficultés économiques pointant à l'horizon.

Pour toutes ces raisons, les socialistes s'opposent fermement à cette motion et vous invitent à en faire de même. Je vous remercie.

M. Souhail Mouhanna (AdG). En fait, nous avons une motion qui demande de revoir un budget, voté par le Grand Conseil, discuté chaque année et voté au mois de décembre.

Si l'on suit les motionnaires concernant une révision du budget en cours d'année, comme l'a dit M. Kunz, il faudra peut-être ne plus jamais voter un budget au mois de décembre et envisager que le Grand Conseil se réunisse en permanence pour examiner chaque jour l'évolution de la bourse, des profits de tel ou tel milieu, les conséquences financières de telle ou telle escroquerie du même milieu ou d'un autre... Si vous envisagez le travail du Grand Conseil de la sorte, vous voulez nous faire vivre dans une drôle de démocratie !

Non, le budget a été voté au mois de décembre et nous verrons avec le budget suivant comment vous vous comporterez et quels choix vous ferez par rapport aux rubriques budgétaires diverses, notamment concernant le domaine social!

J'aimerais aussi m'adresser à M. Iselin et aux motionnaires que j'entends souvent en commission des finances. En effet, j'entends M. Iselin faire des déclarations quant au nombre exédentaire à la fois des services et des fonctionnaires de l'Etat: il se base systématiquement sur des ouï-dires et des rumeurs pour faire ces affirmations, tout prêt qu'il est à marcher pieds nus sur des braises ardentes afin de ne pas révéler le nom de celui qui lui aurait dit que l'Etat vit très au-dessus de ses moyens... Non, Monsieur Iselin, il y a des chiffres et des réalités, et vous refusez de les considérer! En commission des finances, je vous ai communiqué tous les chiffres concernant les effectifs de personnel. J'ai même fait une comparaison - peut-être anecdotique, il est vrai, étant donné que l'un de vos collègues est garde-frontière et puisque vous voulez faire des comparaisons: il y a quelques dizaines de gardes-frontière dans notre canton, alors que, dans le canton de Schwytz, il n'y en a aucun! Que faut-il faire, face à cette réalité, supprimer les gardes-frontières à Genève ? (Brouhaha. Le président agite la cloche.)Vous comparez ce qui n'est pas comparable! Vous dites que l'Etat vit au-dessus de ses moyens, qu'il y a des milliers de postes qu'il faudrait supprimer... Qu'est-ce qu'un Etat rentable? Il faut qu'on nous le dise! Quelle est la rentabilité du poste d'infirmière? Cette rentabilité peut-elle être calculée en termes de diminution du nombre de personnes dans les hôpitaux? Dans le cadre du secteur gériatrique, vous préconisez peut-être l'euthanasie? Comment mesurer la rentabilité d'un policier ou d'un enseignant? Monsieur Iselin, il faut savoir que les membres de la fonction publique et que le personnel des services publics sont des gens qui fournissent un travail, qui est utile à la société, et que cette dernière l'a voulu!

Lorsque vous dites que vous désirez qu'il y ait plusieurs milliers de suppressions de postes, mais d'une manière humaine... Mais qu'allez-vous donc faire? Augmenter le chômage? Réduire les prestations? Croyez-vous que les gens vont se laisser faire? Les gens que vous voulez prétendument traiter «de manière humaine» en supprimant des milliers de leurs postes, eh bien, ces gens vous traiteront aussi «de manière humaine» en vous renvoyant à vos chères études!

Je crois que cette motion ne signifie strictement rien! Elle est tout simplement l'expression d'une attitude contre l'Etat, contre les services publics et le social. Or personne - même pas vous - n'est dupe de ce discours qui est à côté de la réalité.

Je me contente de faire cette remarque pour l'instant. Je reprendrai la parole ultérieurement pour fournir des éléments chiffrés ayant pour but de contrer cette motion, que nous refusons. Et de nombreuses motions ont un dénominateur commun, ce sont celles dirigées contre les services publics, contre le social, et contre la population en général! C'est pourquoi nous sommes contre cette motion-ci!

M. Pierre Weiss (L). Il y a, dans la motion qui nous est présentée par le groupe UDC, les mots et l'esprit de cette motion. C'est à l'esprit de la motion qu'il faut s'attacher : cette motion nous exhorte à procéder à un examen attentif du budget 2003, s'il est encore nécessaire, et à veiller à l'amélioration de la rentabilité de l'Etat. Qui peut s'opposer à une amélioration de la rentabilité de l'Etat ? Un certain nombre de moyens sont mis en oeuvre à cette fin; je crois qu'en commission des finances, nous procéderons à cet examen de façon attentive.

C'est dans ce sens que je vous demande de considérer positivement l'esprit de la motion qui nous est présentée et de l'accueillir afin qu'elle soit transmise à la commission des finances. J'en ai terminé. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Claude Marcet (UDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, la problématique n'est pas sociale, comme cela vient d'être dit, mais elle consiste dans la vérité que révèlent les chiffres et uniquement dans cela.

Je me permettrai de rappeler un article, émanant d'un député et paru dans les journaux pas plus tard qu'hier ou avant-hier, dans lequel il est fait état d'un certain nombre de milliards de déficit sur les caisses de retraite. Je me permettrai de rappeler ceci: même si la totalité des engagements est présentée au pied du bilan, dès le moment où un fait s'est avéré et montre que l'Etat devra payer, la totalité des engagements concernés doivent faire l'objet d'une provision pour risques. Cela veut dire, Mesdames et Messieurs, que le budget, tel qu'il a été présenté, est tout simplement faux! Et lorsque nous demandons une révision du budget, c'est parce que nous voulons avoir un état de la situation réelle.

La problématique, ici, Mesdames et Messieurs, c'est que l'on parle d'un Etat pérenne! Or si nous faisons un bilan, nous devons avoir un certain nombre de règles à l'esprit. L'une de ces dernières consiste dans l'étanchéité des exercices; cela ne signifie pas que nous devrons payer plus tard, sans savoir quand, et que la seule chose que nous avons à faire, c'est de nous taire. Non! Ce que nous voulons, à l'UDC, c'est avoir des chiffres reflétant la réalité; c'est savoir si nous avons la capacité d'investir, la capacité de payer, et non pas de reporter sur nos enfants des choses que nous sommes incapables de gérer actuellement. Merci!

M. Robert Iselin (UDC). J'ai effectivement été interpellé personnellement, Monsieur le président. Je voudrais simplement dire, comme l'a soulevé mon collègue Weiss, que je remercie, que la motion n'est pas une motion antisociale.

La motion porte uniquement sur une question d'organisation. On peut être d'un avis différent en ce qui concerne l'organisation et considérer qu'elle est O.K. Certains considèrent qu'elle ne l'est pas.

Et, bien qu'étant un vieux grigou, pas très génial, je suis tout de même au bénéfice d'une expérience de quarante ans dans les affaires. Or, à observer l'Etat de Genève, avec toute l'affection que je lui porte, je trouve qu'il est mal organisé et qu'il est urgent de l'amener à la situation de la fin du XXe siècle.

M. Pierre Kunz (R). J'aimerais revenir à la proposition, émise par M. Weiss, d'envoyer cette motion à la commission des finances. Et dans ce cas, de deux choses l'une: soit on s'attaque à un problème qui me paraît beaucoup trop important pour être abordé dans les termes en lesquels il l'a été dans la motion, à savoir le problème de la rentabilité de l'Etat, et dans ce cas je veux bien qu'on envoie cette motion à la commission des finances, soit nous sommes raisonnables et nous partons du principe que notre problème réel consiste bien dans le budget 2003. Et si vous voulez envoyer en commission des finances une motion qui demande ensuite au gouvernement de peut-être s'intéresser au budget 2003, cela est inutile. Il faut envoyer directement cette motion au Conseil d'Etat, faute de quoi on sera à la fin de l'exercice et on aura passé le cap.

Je répète la proposition des radicaux: envoyons cette motion au Conseil d'Etat en lui demandant de nous présenter, au mois de juin au plus tard, des mesures visant à rééquilibrer le budget 2003, puisque manifestement il ne sera pas conforme à ce qui avait été prévu en décembre.

M. Albert Rodrik (S). Il y avait probablement dix ou vingt façons de présenter une légitime ambition de mieux présenter nos comptes et nos budgets, et de ces dix ou vingt façons je pense qu'on en a pris une vingt-et-unième, qui est la plus abominable. La plus abominable parce que c'est une machine de guerre contre l'Etat, contre la fonction publique, et qui fait des procès d'intention.

Ces dernières quatre années, la présentation des comptes et des budgets de ce canton ont fait des progrès considérables, qui n'avaient pas été réalisés depuis fort longtemps. Si c'est cela qu'on vise, faisons mieux !

En revanche, si sous prétexte de dire qu'il vaut mieux, comme les grandes entreprises, présenter les comptes et les budgets de telle et telle manière, et s'y prendre de cette façon, à cela nous disons: «non»! Et la mansuétude de M. Weiss n'est pas de mise dans cette affaire.

Ce qui figure dans l'exposé des motifs, la manière dont on intervient, les sous-entendus et les arrières-pensées sont bien plus importants que le texte de cette motion, et c'est pourquoi - comme dans nos ordinateurs, il y a une corbeille - nous disons: "Cette motion est destinée à finir dans cette corbeille". Parce que, par rapport à ce qu'elle prétend régler, ses intentions vont bien au-delà et sont bien plus pernicieuses. Par conséquent: «corbeille»! Mesdames et Messieurs! Et le litige entre M. Weiss et M. Kunz sera réglé très simplement. Je vous montre le chemin, il est par là!

M. Souhail Mouhanna (AdG). J'ai écouté avec attention ce que M. Marcet a dit tout à l'heure. Il a prétendu que le but de cette motion était de corriger des chiffres, notamment les engagements de l'Etat au niveau du pied de bilan.

Je lis l'invite au Conseil d'Etat, dans laquelle ce dernier est prié de procéder à une révision en profondeur du budget 2003. M. Marcet aurait pu, s'il n'était question que de ce qu'il fallait faire figurer au pied de bilan du budget de l'Etat, présenter une motion ou un projet de loi corrigeant cet aspect des choses.

Or réviser en profondeur le budget de l'Etat 2003, tout de suite après augmenter sensiblement la rentabilité de l'appareil étatique et, de plus, quand on entend les déclarations de M. Kunz à l'appui de cette motion avec l'offensive anti-sociale qu'il mène depuis pas mal de temps... Eh bien, on comprend que l'objectif de cette motion n'est pas de corriger quoi que ce soit, mais bien de voir comment on peut s'attaquer aux prestations de l'Etat, à celles du domaine social, du service public et de la fonction publique, etc.!

Ce sera l'occasion, pour vous justement, de continuer de développer cette campagne. Je dirai encore ceci: il y a eu dans notre canton des tentatives encore plus pernicieuses que celles que vous êtes en train de vouloir étendre d'une manière insidieuse... Eh bien, vous risquez de réveiller un certain nombre d'antagonismes! Les uns et les autres peuvent imaginer ce que la signifie: tout simplement que vous risquez d'être des apprentis-sorciers!

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, finalement chacun peut interpréter comme il l'entend, lorsqu'il lit une motion. Je dois toutefois vous dire qu'en vous écoutant je me pose des questions sur la façon dont nous allons pouvoir travailler dans le futur.

Il est excessif de penser que, par le biais d'un service d'organisation de l'Etat, on puisse imaginer améliorer lesdites prestations, bien que cela ait existé, Mesdames et Messieurs les députés, en 1968. Il existait un service d'organisation de l'Etat, ou plutôt de l'administration, qui a laissé des traces telles, dans l'administration elle-même, qu'en définitive cela s'était révélé dans la durée être un frein plutôt qu'un avantage. Cela n'était pas dû aux personnes qui avaient été mandatées pour ce faire, cela était dû à la méthode elle-même: les propositions et les possibilités de mouvements d'un service quelconque chargé de la responsabilité de réorganisation pour l'ensemble de l'Etat ne pouvaient qu'être extrêmement restreintes. Je vous parle de cet exemple pour vous dire qu'il n'y a pas de recette toute faite, mais un certain nombre de nécessités à respecter, et vous me permettrez de vous dire que la situation n'est pas aussi grave que vous l'estimez, même si un certain nombre de problèmes demeurent. Donc, aucune recette toute faite! Et on ne peut pas dire que tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes pour les deux ou trois années à venir, tel n'est pas le cas.

Au Conseil d'Etat, nous n'avons pas besoin de motions pour prendre des mesures et les examiner. C'est une responsabilité qui ressortit à l'Etat et particulièrement au Conseil d'Etat. A ce titre, je voudrais rappeler qu'un budget voté ne constitue pas une obligation mais une autorisation de dépense, et que le budget 2003, de par la façon dont il a été élaboré, et dont les estimations de recettes le concernant doivent être précisées, ne passera comme une lettre à la poste!

Gouvernement et parlement sont impliqués, et je pense que le groupe libéral a parfaitement raison de demander le renvoi en commission de cette motion, parce qu'en dépit des considérations de certains sur la fonction publique, et en dépit des idées reçues, Mesdames et Messieurs les députés, plus d'un millier de postes ont effectivement été supprimés dans la fonction publique, des mesures ont été prises, et d'autres pourraient l'être dans le cadre d'une démarche plus harmonieuse, des propositions pourraient même être avancées par les députés !

S'il est légitime de lancer des affirmations sur le bien-fondé du service public et de la fonction publique, d'une part, d'exiger des comptes véridiques et d'éviter d'endetter l'Etat, de l'autre, je crois cependant que ce n'est d'aucune utilité dans la résolution des problèmes qui se posent.

C'est pourquoi je souhaite véritablement qu'avec la commission des finances nous conduisions des travaux sur ce qui a été et sur ce qu'il sera possible de faire à l'avenir.

Je vous rappelle que je me suis engagée à présenter pour 2003 des éléments ayant trait à l'évaluation des recettes réestimées et ayant trait aux possibles mesures à mettre sur pied.

Nous n'avons pas besoin, au Conseil d'Etat, de vous soumettre des rapports, mais je pense que certaines idées reçues pourraient trouver des réponses dans un travail de commission.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Je mets aux voix l'acceptation de cette motion et, comme il l'a d'abord été demandé par M. le député Kunz, son renvoi au Conseil d'Etat. Si le renvoi au Conseil d'Etat est refusé, la motion sera renvoyée aux finances.

M. Pierre Kunz (R). Monsieur le président, afin d'éviter tout malentendu, j'aimerais préciser que les radicaux n'ont pas du tout l'intention de remettre en cause quoi que ce soit en ce qui concerne l'organisation générale de l'Etat. De plus, il n'est pas dans l'esprit de notre groupe d'attaquer en quoi que ce soit la fonction publique.

En revanche, nous souhaiterions préciser que, pour le budget 2003, il est important que le Conseil d'Etat, comme l'a dit Madame la présidente, soit attentif. A cet effet, nous proposons que les considérants 2, 3, 6, 7 et 8 soient supprimés de la motion - car ils peuvent être considérés comme agressifs par la fonction publique - que la deuxième invite soit également supprimée, et que ce parlement vote la motion concernant le budget 2003 et l'envoie au Conseil d'Etat... (Le micro est momentanément coupé.)Supprimons les invites qui nous divisent et concentrons-nous sur celles qui nous rassemblent, supprimons les considérants qui peuvent paraître outranciers à certains!

Le président. Monsieur le député Kunz, cela me paraît un peu du bricolage de dernière minute, au moment où je commence une procédure de vote! Il y a maintenant cinq personnes inscrites... Vous voudrez bien me remettre par écrit, au bureau, votre amendement supprimant la seconde invite.

M. Jean Spielmann (AdG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, d'après ce que j'ai cru comprendre, le message de cette motion viserait à corriger le budget 2003. Ai-je bien compris ?

Dans ces conditions et en tant que président de la commission des finances, permettez-moi de vous dire que toutes les séances sont agendées jusqu'à fin juin pour l'examen des comptes et qu'il n'est pas certain que l'on arrive, étant donné le rythme de travail actuel, à clore les débats et à présenter les comptes en juin.

Si j'en crois le calendrier des échéances, nous nous occuperons du budget 2004 à partir du mois de septembre; or, pour pouvoir effectivement travailler au budget 2004 à partir de septembre, il faudra faire vite. Vous m'expliquerez donc comment vous entendez travailler en commission afin de corriger le budget 2003!

M. Albert Rodrik (S). Par courtoisie, je m'étais abstenu tout à l'heure d'utiliser un épithète concernant la motion UDC. Cependant, maintenant que M. Kunz nous a éclairé de ses lumières, je dois dire que nous sommes dans le domaine de la farce. Vous voulez amender, supprimer, faire une ablation des huit dizièmes de la motion, et c'est ainsi que vous voulez retrouver un semblant d'unité au sein de la majorité?

Nous vous proposons encore une fois de mettre cette affaire à la corbeille et nous sommes d'autant plus déterminés à cela que Mme Brunschwig Graf s'est expliquée avec clarté, concision et compétence, et nous attendons de voir ce que le Conseil d'Etat entend faire avec le budget 2003 qui est sous toit et qui n'a pas à être secoué de tous les côtés parce qu'il y a quelques barmen de génie qui se trouvent ici.

C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, soit vous avez la majorité pour le renvoi en commission, soit nous mettons cette affaire à la corbeille! Mais entre deux, dans cette affaire, on ne peut pas à l'innommable ajouter la farce! Merci beaucoup!

M. Claude Marcet (UDC). Mesdames et Messieurs, que ce budget aille au Conseil d'Etat ou en commission, comme cela a été dit, je rappelle que, en ce qui nous concerne, le but poursuivi n'est pas antisocial, mais bien celui d'avoir la connaissance réelle des développements actuels, qui font que ce budget ne veut strictement plus rien dire.

Je me permets d'évoquer l'exemple des CFF qui «ponctionneront» maintenant 140 millions pendant une dizaine d'années, pour la simple raison que cela n'a pas été prévu en temps utiles.

Je demande au Conseil d'Etat non pas une révision totale du budget mais bien de nous indiquer clairement où se trouvent les éléments qui biaisent les résultats liés à ce budget, les rendant ainsi incohérents. Il est inutile de tout refaire, comme l'a dit M. Spielmann... (L'orateur est interpellé.)Oui! Mais le problème, Monsieur Spielmann, c'est qu'on passe dans cette salle des heures et des heures à discuter d'un budget, pour s'apercevoir ensuite que, simplement parce que certains groupes souhaitent un «embellissement» du budget, on arrive au bout du compte à présenter un budget qui ne veut rien dire!

Nous voulons désormais que les comptes, tels qu'ils sont présentés, fassent référence à un budget qui soit bel et bien réel et non dans l'esprit et dans l'espace. Nous demandons quel est le décrochage actuel par rapport aux résultats, c'est tout!

M. Rémy Pagani (AdG). J'aimerais en premier lieu saluer l'intervention de M. Kunz qui, de manière pondérée - et inhabituelle le concernant - retire un certain nombre d'amendements. De plus, M. Kunz estime que certaines invites sont provocatrices, notamment par rapport à la fonction publique. Cette motion, mais d'autres également, agressent effectivement la fonction publique, alors que, jusqu'à preuve du contraire, à part certains services et une minorité de fonctionnaires, la fonction publique répond parfaitement aux attentes du public et à un service efficace, Monsieur Kunz!

Cela étant, et comme l'a dit M. Rodrik, il n'est pas nécessaire de discuter ces affaires pour l'heure. Il faut soit renvoyer cette motion en commission, puisque vous nous proposez de tailler dans une grande partie des invites, et effectuer un véritable travail de commission, qui ne peut être effectué ici, soit, comme cette motion est une pure provocation à l'égard de la fonction publique, la retirer et la jeter au panier. Merci!

Le président. Bien. Nous aurons tout de même perdu plus de quarante minutes. Je donne la parole à M. Mouhanna.

M. Souhail Mouhanna (AdG). Merci, Monsieur le président. Je ne sais qui je dois croire parce que M. Kunz parlait de supprimer ou de modifier certaines invites... (L'orateur est interpellé.)Ah! c'étaient les considérants? Parce qu'il n'y en a que deux. Bien!

Vous voulez procéder à une révision en profondeur du budget 2003. M. Marcet a dit qu'il n'était pas question de revoir le budget en profondeur mais d'en considérer seulement quelques éléments, alors que la première invite consiste à procéder à une révision en profondeur du budget 2003! Peut-être que les auteurs de la motion n'ont même pas lu leurs propres invites? Ce qui amène à se poser un certain nombre de questions.

J'aimerais dire à Madame la présidente du département des finances que le Conseil d'Etat est bien chargé de veiller à ce que les autorisations de dépenses soient utilisées avec le souci permanent de ne pas gaspiller l'argent public, et ceci doit être une constante. Nous n'avons pas besoin d'une motion pour considérer les choses sous cet angle, à moins que le Conseil d'Etat n'ait pas fait le nécessaire jusqu'à présent?

Je ne vois pas l'utilité d'une telle motion alors que l'une des charges essentielles du Conseil d'Etat consiste à veiller à une gestion efficace des deniers publics, telle que le Grand Conseil l'a votée dans le cadre d'un budget. Si vous voulez renvoyer cette motion au Conseil d'Etat uniquement pour que ce dernier ait le souci de bien faire, ce qui est son rôle, c'est que cette motion ne sert à rien!

Dans l'éventualité d'un renvoi en commission des finances, nous considérerons tout à l'heure plusieurs motions tournant toutes autour de la fonction publique et des services publics. Et quand on dit: «efficacité» ou «rentabilité», etc., on sait ce que cela veut dire ! M. Kunz dit toujours que les prestations sociales à Genève sont trop développées et trop généreuses, et qu'il faut les diminuer... D'ailleurs, on entend souvent dire que les pauvres, les malades et les chômeurs sont responsables de leur sort... Mais que faut-il faire?

Augmenter le nombre de chômeurs? Parce que, comme certains l'imaginent, l'Etat vit au-dessus de ses moyens et que, par conséquent, les enseignants, les infirmiers, les policiers ne sont pas tous nécessaires?

Alors, dites de manière explicite ce que vous voulez, Mesdames et Messieurs les députés! Et arrêtez de jouer sur les mots et de lancer des slogans! La poubelle est le seul endroit que mérite cette motion.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, mon rôle est d'assurer une gestion efficace du temps de parole des différents parlementaires. J'aimerais que vous vous ressaisissiez. Nous avons aujourd'hui une séance supplémentaire avec près de 80 points à l'ordre du jour, nous ne pourrons pas procéder de la sorte toutes les semaines!

Après MM. les députés Weiss, Gautier et Glatz, nous nous arrêterons et nous voterons. Il y a maintenant trois votes grâce à l'amendement de M. Kunz.

M. Pierre Weiss (L). Monsieur le président, nous avions tout à l'heure émis l'idée de renvoyer cette motion en commission des finances, je crois qu'il est inutile de se lancer des invectives, de projeter des intentions néfastes chez les motionnaires.

Prenons le texte tel qu'il nous est présenté. Nous pouvons tout au plus nous permettre un peu d'ironie : on peut observer que la première des idées émises est la création d'un nouveau service administratif, qui montre bien qu'il n'y a aucun esprit antifonctionnaire au sein de l'UDC. Par conséquent, je crois qu'il serait bon, Mesdames et Messieurs les députés, de veiller à une meilleure organisation de l'administration cantonale, si possible, et de transformer la première invite, le cas échéant, en une proposition pour préparer le budget 2004 avec soin sur la base des expériences pour 2003!

C'est en ce sens que je propose de passer aux points suivants lorsque nous aurons épuisé la liste des orateurs, que M. le président a close.

M. Renaud Gautier (L). Monsieur le président, il est toujours difficile de parler après l'une des quatre-vingts personnes qui font Genève... (Rires.)Je voulais juste rassurer certaines des personnes me faisant face ici. Nous récitons un peu tous - à la manière des écoliers récitant leur fable de Jean de la Fontaine - ce que nous avons bien appris, sans nous poser vraiment de questions sur le sens.

Non, chers collègues, il n'y a pas de volonté de sacrifier la fonction publique! Oui, la fonction publique fait un travail remarquable! Tout le monde ici est prêt à le reconnaître. Il n'y a donc pas de volonté, de quelque sorte que ce soit, de «tailler» dans la fonction publique.

Il m'apparaît que nous gagnerions en vitesse et en efficacité si vous sortiez de ce discours totalement stérile et rigide, qui consiste, chaque fois que l'on parle du budget, à affirmer, pour une partie, qu'il s'agit de pendre la fonction publique et, pour l'autre, que la fonction publique fait défaut.

Il me semble que nous avons dépassé ce stade depuis de nombreuses années et que nous devrions pouvoir parler de problèmes d'évolution budgétaire dans le calme, sans s'opposer chacun sa propre fable de la Fontaine.

M. Philippe Glatz (PDC). J'ai écouté attentivement ce débat et je suis extrêmement frappé qu'à chaque fois qu'il y a une demande de réexamen du fonctionnement de l'Etat, l'on brandisse ici ou là les bannières de l'atteinte à la fonction publique, de sorte que chacun soit obligé de se lever pour faire allégeance à la fonction publique.

Mesdames et Messieurs, à force de traiter ces sujets de la sorte, et de vouloir frapper d'austracisme toutes les initiatives que veut prendre l'UDC, quand bien même elles sont exprimées maladroitement, vous en faite le lit.

Il s'agit aujourd'hui de pouvoir reprendre un examen sérieux du fonctionnement de l'Etat. Chacun doit ici en être conscient. Je souhaiterais que nous travaillions de manière plus sereine, sans se jeter des slogans, Monsieur Mouhanna, ou faire des procès d'intentions aux uns et aux autres.

Je vous demanderai par conséquent d'examiner ces objets avec un peu plus de retenue. (Applaudissements.)

Le président. La parole n'étant plus demandée, je mets aux voix l'amendement de M. Kunz, à savoir la suppression de la seconde invite de la motion.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Mise aux voix, la proposition de renvoyer cette proposition de motion au Conseil d'Etat est rejetée.

Mis aux voix, le renvoi de cette proposition de motion à la commission des finances est rejeté par 33 non contre 32 oui et 1 abstention.