République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 8h, sous la présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, présidente.

Assistent à la séance: Mmes et MM. Laurent Moutinot, Micheline Spoerri et Pierre-François Unger, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat, Carlo Lamprecht, Robert Cramer et Charles Beer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Janine Berberat, Anita Cuénod, Gilles Desplanches, Antoine Droin, Jean-Claude Egger, Philippe Glatz, Mariane Grobet-Wellner, Michel Halpérin, David Hiler, Nicole Lavanchy, Blaise Matthey, Jacques Pagan, Pascal Pétroz, André Reymond, Jacques-Eric Richard, Jean Rossiaud, Pierre Schifferli, Patrick Schmied et Ivan Slatkine, députés.

Discussion et approbation de l'ordre du jour

La présidente. Nous allons reprendre nos travaux au point 37... Je passe la parole à Mme Künzler.

Mme Michèle Künzler (Ve). J'aimerais demander l'urgence sur le point 153 qui concerne une subvention pour le groupement Lestime. Je pense que c'est important de le voter encore cette année.

Mis aux voix, le traitement en urgence du projet de loi 9428-A est adopté par 20 oui contre 16 non.

Mme Anne Mahrer (Ve). Je demande l'ajournement du point 43 de notre ordre du jour, il s'agit du rapport 9137-A de la commission de l'aménagement modifiant les limites de zone sur le territoire de la ville de Genève.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Je prends la parole simplement pour appuyer la demande de Mme Mahrer. Il me semble toutefois que l'ajournement consiste en une décision et pas seulement en une prise d'acte.

La présidente. Nous allons donc nous prononcer sur cet ajournement.

Mis aux voix, l'examen du PL 9137-A est reporté sine die par 28 oui contre 6 non et 3 abstentions.

La présidente. Concernant le point 38, PL 8667-A-2, vous trouverez sur vos places une nouvelle version du plan qui annule et remplace celui qui est annexé au rapport.

En ce qui concerne le point 41, PL 9041-A, la commission des finances demande la suspension de son traitement. A nouveau, nous nous prononçons de manière formelle sur cet ajournement.

Mis aux voix, l'examen du PL 9041-A est reporté sine die par 34 oui (unanimité des votants).

Mme Esther Alder (Ve). J'aimerais que l'on traite le point 45 - englobant les motions 1530-A, 1538-A, 1539-A et 1553-A - avec le point 66, soit la motion 1598, relatif au même objet. Cela concerne la création d'un impôt cantonal de compensation.

La présidente. Normalement c'est le Bureau qui statue sur ce genre de question, mais je vais la soumettre au vote.

Mis aux voix, le traitement conjoint des points 45 (motions 1530-A, 1538-A, 1539-A et 1553-A) et 66 (motion 1598) de l'ordre du jour est adopté par 35 oui (unanimité des votants).

Correspondance

La présidente. Vous avez trouvé sur vos places l'énoncé de la correspondance reçue par le Grand Conseil. Cet énoncé figurera au Mémorial.

Courrier de FRONTIMMO SA transmettant copie de sa lettre au président du DAEL, M. MOUTINOT Laurent, concernant le PL 8667-A-2 (limites de zones, Chêne-Bougeries) (voir pt 38) ( C-2005)

Annonces et dépôts

La présidente. La commission des pétitions nous informe qu'elle désire renvoyer la pétition suivante à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat:

Pétition contre le projet de loi sur le personnel de l'administration cantonale ( P-1535)

La commission des pétitions nous informe qu'elle désire renvoyer la pétition suivante à la commission de l'environnement et de l'agriculture:

Pétition concernant l'évacuation des terres de creuse pour la construction, par les SIG, du nouveau réservoir d'eau de Choully (Satigny) ( P-1536)

Il est pris acte de ces deux renvois.

Je salue à la tribune la présence de notre ancien collègue Pierre-Alain Champod. (Applaudissements.)

Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons le cours de notre ordre du jour.

PL 7631-A
Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit complémentaire pour le bouclement du compte de la construction et de l'équipement des ateliers, du dépôt et du bâtiment administratif des Transports publics genevois au Bachet de Pesay

Premier débat

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur ad interim. Il s'agit d'un bouclement de crédit. A mes collègues députés - qui ont vu à l'entrée Geneviève Piret qui a été condamnée à 300 F d'amende pour avoir fait son devoir, pour avoir défendu des enfants et des mamans - je leur recommande de lui verser, comme je l'ai fait, dix francs pour la soutenir dans la lutte qu'elle mène depuis vingt ans dans notre République.

La présidente. Votre intervention ne correspond pas au rapport, Monsieur Pagani. Nous allons procéder au vote d'entrée matière de ce projet de loi.

Mis aux voix, ce projet de loi est adopté en premier débat par 34 oui contre 6 abstentions.

La loi 7631 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 7631 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 29 oui contre 11 abstentions.

PL 8667-A-2
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Chêne-Bougeries (création d'une zone de développement 3) (Projet de loi scindé en deux)

Premier débat

M. Pierre-Louis Portier (PDC), rapporteur de majorité. Cela fait un moment que nous n'avons plus parlé de cette problématique. Je souhaite rappeler qu'en 2004, dans cette enceinte, nous avions décidé de scinder ce projet de loi en deux. Lors de l'abondant débat qui avait présidé à nos travaux, il avait été souligné que nous n'avions pas suffisamment consulté la commune concernée sur l'aménagement du solde du périmètre.

J'aimerais aussi rappeler que nous étions pressés par le temps, car une des parcelles faisait l'objet d'un délai conservatoire et, de l'avis d'une majorité de ce parlement, il convenait de répondre rapidement à ce problème. Sur proposition de notre collègue Künzler, nous avions scindé ce projet de loi pour ainsi permettre que les travaux du PAC de Frontenex se déroulent.

Nous avons terminé nos travaux et, maintenant, nous proposons à ce parlement de s'exprimer et - si possible - de voter le rapport de majorité concernant la deuxième partie de l'aménagement de Frontenex; étant entendu que l'ensemble du PAC recouvre la région de Frontenex et de la Tulette, sur la commune de Cologny, et que les travaux concernant le PAC et la commune de Cologny se sont déroulés parallèlement.

Encore un détail, mais un détail d'importance: vous avez lu dans le rapport que la commission a décidé de donner à ce périmètre une zone de protection 2 pour le bruit. Il y a une petite erreur, car le plan porte la mention «3». Ce n'est pas le bon plan qui est annexé, le projet de loi prévoit bien une zone OPB 2.

La présidente. Monsieur le député, il s'agit du plan distribué sur les tables.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Nous nous retrouvons face à un projet de loi qui aurait dû s'inscrire dans la continuité du plan directeur cantonal et qui aurait dû mettre à disposition de nos concitoyens - avec la Tulette et le terrain de Frontenex - plus de 1200 logements. Nous devrions entériner aujourd'hui le fait que la majorité a scindé ce projet de loi en deux, mais, contrairement à toutes les promesses faites, le promoteur n'a proposé que 190 logements dans sa demande d'autorisation au lieu de 220; et sur l'autre terrain, il a proposé seulement 150 ou 120 logements.

La dernière fois, nous aurions dû déclasser l'ensemble du terrain, car c'est une zone de développement 3. Comme nous ne l'avons pas fait à temps et qu'on nous avait dit que les terrains actuellement occupés par le centre de loisirs de l'UBS n'étaient pas à vendre, un promoteur s'est précipité sur l'occasion et, dans ce laps de temps, il a acheté ce terrain. Et l'Etat n'a pas pu exercer son droit de préemption puisque le terrain n'avait pas été déclassé.

On se trouve donc face à une opération immobilière scandaleuse, et je pèse mes mots. Aujourd'hui, il n'est plus possible de construire des logements à bon marché, pour autant que l'Etat veuille le faire encore, ce terrain nous a été ravi par des promoteurs sans scrupules, et nous le déplorons d'autant plus que ce dernier devait accueillir au bas mot 700 logements. Demain, il est fort possible qu'il n'en accueille que la moitié. La majorité de droite en est responsable, et nous le déplorons. Nous stigmatisons cette attitude qui vise, une fois encore, à privilégier des logements de luxe au détriment des logements nécessaires à la majorité de la population, c'est-à-dire des logements HBM.

Nous avons fait un rapport de minorité et, bien que la situation soit extrêmement critique, nous vous proposons - j'y reviendrai après - de rétablir la situation antérieure par un amendement. Il faudrait déclasser l'ensemble du terrain car, encore aujourd'hui, le promoteur de la première partie a des velléités de se soustraire aux promesses qu'il a faites devant certains membres de la commission.

De ce fait, nous estimons qu'il est inadmissible de persévérer dans cette situation où nous a mis la majorité de droite de ce Grand Conseil, qui vise à privilégier des logements non pas de luxe, mais d'hyper grand-luxe, contrairement à ce pourquoi nous sommes ici, soit pour défendre les intérêts de la majorité de ce canton.

La présidente. M. Baudit, secrétaire de notre Bureau, va procéder à la lecture de la lettre adressée au Grand Conseil par le Rassemblement pour une politique sociale du logement en octobre 2004.

Courrier 1895

M. Alain Etienne (S). Le parti socialiste était favorable au déclassement de l'ensemble du périmètre en zone de développement 3 - y compris pour la Tulette sur Cologny - afin de pouvoir utiliser l'ensemble du potentiel à bâtir.

A l'origine, dans le plan directeur, 1200 logements étaient prévus. Cette majorité de droite a préféré laisser en zone 5 - comme l'a rappelé M. Pagani - le périmètre dit du Pré-Babel: elle a préféré servir des intérêts particuliers plutôt que de servir la cause publique, nous le regrettons. Il n'est pas acceptable d'être ainsi lié au pouvoir économique ! Aujourd'hui, nous affirmons notre volonté de construire sur ces terrains. Nous voterons donc ce projet de loi, car le périmètre dit du Pré-Babel a déjà été voté lors d'une autre séance du Grand Conseil.

Cela dit, j'aimerais revenir sur les propos du rapporteur de majorité. Vous parlez de dialogue, de concertation et de respect de la vie des communes... Je ne sais pas si vous avez assisté aux séances de concertation, mais, pour y avoir été invité au nom du parti socialiste, je peux vous dire que les positions extrêmes des autorités communales et des propriétaires ne permettaient aucune discussion et aucun consensus. De plus, dans les annexes de votre rapport, vous vous êtes autorisé à reproduire une lettre du PDC demandant à la commission de reprendre ses travaux. C'est de la publicité à bon compte, et je ne pense pas que l'on arrive à faire avancer la cause de l'aménagement du territoire avec de telles lettres ! Le PDC est signataire d'un projet de loi qui donnerait la possibilité aux communes de choisir quel type de logement elles veulent construire sur leur territoire. Croyez-vous que c'est ainsi que l'on fait un aménagement du territoire cohérent ? Si ce projet de loi entre en vigueur, on aura un aménagement du territoire complètement inégal.

Vous parlez ensuite de la maille bocagère à respecter sur cette parcelle. Dans cette région, comme par hasard, le patrimoine prend subitement une valeur importante. Certes, il y a des chênes centenaires et une maison de maître, mais il s'agit d'abord de prévoir le renouvellement de ce patrimoine dans le cadre du PLQ et dans la réalisation du nouveau quartier - ce qui n'est pas assuré. Il faudra également prendre en compte l'impact des chantiers de construction sur la végétation, car on sait très bien que construire du logement implique des travaux, et je ne suis pas sûr que l'on arrivera à préserver ces vieux chênes.

Concernant le patrimoine bâti. J'aurais apprécié de la part du PDC - comme de l'ensemble des partis de l'Entente - la même précaution pour la villa Blanc, par exemple, qui a été démolie en ville de Genève, ou encore la préservation du village rue de Chêne-Bougeries, où l'on sait qu'un bâtiment a été démoli.

La réalité est que nous construisons moins de logements que ce qui était prévu par le plan directeur. Au final, je crois que nous arrivons à 880 logements. Nous gaspillons du terrain et après, il sera facile de dire qu'il faut déclasser de la terre agricole ou construire ailleurs ! Le parti socialiste votera le projet de loi.

M. Christian Grobet (AdG). Le projet d'aménagement de ce secteur, qui a bénéficié d'un apport positif du DAEL dans sa dernière version, demeure inacceptable par rapport aux décisions antérieures de ce Grand Conseil. En cette période de pénurie de logements, où il est nécessaire de construire un nombre important de logements répondant aux besoins prépondérants de la population, il est inacceptable que l'on ne puisse pas construire normalement sur des terrains situés aux abords de la ville, extrêmement bien placés et qui constituent l'extension du périmètre urbain.

Des communes - des quartiers où habitent des citoyens particulièrement aisés qui bénéficient d'un site exceptionnel - ne veulent pas que l'on construise aux abords de leurs villas des immeubles à un gabarit parfaitement normal. De plus, ces immeubles sont la simple continuité des immeubles extrêmement plaisants et de grande qualité qui ont été construits le long du chemin de la Gradelle.

L'extension naturelle de cette zone - créée il y a vingt ou trente ans sans le moindre problème - était logique. Les intérêts purement égoïstes de certaines personnes relayées par les autorités communales - libérales - de Cologny et de Chêne-Bougeries ont fortement réduit ce projet.

J'adhère totalement à la lettre du RPSL qui dénonce le fait que la majorité de ce Grand Conseil a volontairement diminué le nombre de logements à construire dans ce périmètre. C'est d'autant plus scandaleux qu'il y a tous les équipements scolaires à disposition immédiate et que l'on s'apprête à investir des centaines de millions pour la création du CEVA qui reliera Annemasse aux gares des Eaux-Vives et Cornavin ! Aux abords d'un maillon de transport de cette qualité, il est évident qu'il faut utiliser les terrains d'une manière adéquate, avec le taux d'utilisation du sol de 1,2, qui est parfaitement normal. Ce taux est pratiqué depuis cinquante ans, il a été mis au point au début des années 60 par un Conseil d'Etat de centre droite, avec des radicaux et des PDC qui savaient encore construire du logement d'une manière correcte et sans excès. Aujourd'hui, vous remettez en cause ces principes fondamentaux de notre aménagement et, dans la situation actuelle, c'est inacceptable !

Ces mêmes milieux ne craignent pas de demander de surdensifier la ville de Genève, ils considèrent que c'est tout à fait normal de construire des tours de trente étages à la Jonction, de bourrer à fond des quartiers... N'est-ce pas Monsieur Portier ? Vous rigolez, évidemment ! Dans votre commune de Veyrier, il y a des espaces verts, chacun a sa villa avec jardin... Mais dans des quartiers comme les Pâquis, il n'y pas un brin d'herbe, il faut mettre le préau de l'école sur le toit - j'ai vécu cela - et on a encore dû enlever le jardin Robinson pour procéder à l'extension de la station d'épuration des eaux ! Et à la Jonction, il a fallu que la Ville achète à prix d'or une propriété pour acheminer le parcours gaz au milieu du quartier, mais les enfants n'ont pas d'espace pour jouer, etc. Et on veut encore densifier en ville ?! Oui ! c'est tout à fait normal... C'est tout juste si l'on n'engueule pas la Ville de Genève parce qu'elle ne construit pas davantage, et l'on refuse d'appliquer le taux de 1,2 systématiquement appliqué dans les quartiers périurbains ! C'est inadmissible ! Et je remercie M. Pagani de remettre cette question sur le tapis, car il faut que la population sache qui sont les personnes qui bloquent la construction de nouveaux logements à Genève ! C'est vous, Mesdames et Messieurs, les partis de l'Entente - avec l'UDC, bien entendu - qui bloquez des projets de construction !

Par ailleurs, j'aimerais bien que M. Moutinot nous explique clairement la suite. Monsieur Moutinot, j'aimerais qu'après réception de la lettre du RPSL on sache effectivement quel sera le taux des logements sociaux qui seront construits sur le plateau de Frontenex. En retirant ses lois d'application de l'initiative «Un toit pour soi», en retirant ses projets de loi qui veulent limiter la construction de logements locatifs et d'appartements sociaux, la droite démontre qu'elle a finalement pris conscience de la situation. Vous avez enfin compris que vous aviez fait totalement fausse route ! Eh bien, maintenant, le Conseil d'Etat doit prendre ses responsabilités face à la situation dramatique des logements !

La présidente. Monsieur le député, il vous faut terminer !

M. Christian Grobet. Des locataires viennent à l'ASLOCA et nous disent qu'on ne trouve plus que des appartement à 2000 F, 2500 F par mois, alors que plus de la moitié de la population bénéficie d'un revenu inférieur à 5000 F par mois. On doit maintenant construire des logements sociaux !

Je veux poser une dernière question à M. Moutinot. On a longuement décrié l'immeuble en PPE de Cologny-Parc. Vous savez que la surélévation de cet immeuble a été réalisée à cause du scandale de Plan-les-Ouates, pour accorder une compensation à un promoteur immobilier - Monsieur M. Ce bâtiment de Cologny-Parc est en dessus de cime des arbres, et tout le monde s'en plaint. Est-ce vrai que maintenant, à cause de cette mauvaise urbanisation provoquée par la droite, des immeubles ne vont pas respecter cet alignement avec les arbres ? Je serais intéressé de connaître la réponse.

M. Jacques Baud (UDC). On parle de logements sociaux, c'est bien, j'y suis favorable - dans une certaine mesure. Mais quand j'entends le manichéisme de la gauche qui ne parle que de logements sociaux, qui veut faire croire qu'en dehors des logements sociaux on ne construit que des logements de luxe, il y a une certaine exagération ! Par là même on ne se préoccupe plus que des logements sociaux et on oublie pas loin des 70% de la population, pour lesquels on ne construit plus rien. La population dans son entier souffre du manque de logements, et pas seulement les personnes qui ont besoin du social. J'aimerais bien que l'on n'oublie pas cela !

Pour répondre à ce que vient de dire notre cher collègue des bancs d'en face sur le prétendu scandale des Pâquis et de la Ville, je lui ferais remarquer que cela fait 200 ans qu'il n'y a plus un brin d'herbe. Quand on aura construit la ville à la campagne, quand il n'y aura plus un brin d'herbe, plus un champ pour se promener ou pour planter des carottes, la gauche sera satisfaite et bien contente !

En l'occurrence, le projet de loi qui nous préoccupe a été pensé, réfléchi, et on a trouvé un consensus. Ce n'est pas parfait - rien n'est jamais parfait - mais cela va dans le bon sens. Il n'y aura pas d'exagération par une trop grande surface de logements sur ce terrain. Donc, nous soutiendrons ce projet de loi.

Mme Anne Mahrer (Ve). Comme l'a rappelé M. Portier tout à l'heure, sans la proposition de Mme Künzler de scinder le projet en deux lors de notre séance plénière de juin 2003, on ne voterait pas ce matin. On est passé très près de laisser ce périmètre en zone villas. On a ainsi évité de recommencer la procédure et on a permis au groupe de concertation de terminer ses travaux.

Il est vrai, Mesdames et Messieurs les députés, que l'intransigeance de la droite nous fait perdre la réalisation d'une centaine de logements. Mais nous sommes pragmatiques, et les Verts souhaitent réaliser un projet réussi.

Les Verts estiment que le résultat est finalement satisfaisant, bien qu'il aurait pu être atteint en 2003 déjà. Ce périmètre proche de la ville se prête parfaitement à l'urbanisation, il offre la possibilité de réaliser un quartier modèle, non seulement du point de vue de l'urbanisation mais aussi du point de vue de la mobilité. Mais, sur ce point, les Verts pensent que la réflexion sur la mobilité a été négligée. La bonne desserte de la ligne 9 semble rassurer tout le monde, alors que le réseau routier dans la région est saturé aux heures de pointes.

Avant toute nouvelle urbanisation, il s'agit d'améliorer l'offre des transports publics, de renforcer les lignes de campagne existantes, de prévoir les déplacements supplémentaires des futurs collégiens. Evidemment, on pourrait imaginer ce quartier sans voitures - ce lieu est magnifique - et idéalement, on pourrait se rendre en ville à pied.

Donc, les Verts voteront ce projet de loi et vous invitent à en faire de même.

M. Gabriel Barrillier (R). Il y a deux manières d'aborder ce type de débat: la manière de Mme Mahrer et des Verts, tout à fait pragmatique, réaliste, et nous reconnaissons qu'ils ont apporté leur pierre à l'édifice en rendant possible la construction d'un certain nombre de logements, et il y a la deuxième manière, celle de l'AdG. Je rappelle qu'en commission ce projet était accepté par l'ensemble de la commission, sauf deux AdG - et deux abstentions libérales, il faut le dire aussi. Alors, la deuxième manière d'aborder cette discussion est de bouter le feu et provoquer un débat interminable sur la question du logement.

Le groupe radical préfère la première manière. Lors du débat sur la première partie, j'avais dis que j'entrais dans ces problèmes d'aménagement avec une vision assez simpliste, assez directive. Au fil des années passées à la commission de l'aménagement, je me suis aperçu qu'il fallait compter, qu'il fallait discuter et négocier, notamment avec les communes. Je n'accepte pas que l'Alliance de gauche reproche aux partis de l'Entente - aux radicaux en particulier - d'appuyer les égoïsmes de certaines communes et pas d'autres. Je vous rappelle que nous avons eu un débat il y a quelques semaines sur un autre déclassement: La Chapelle-Les Sciers. Il a fallu arbitrer contre l'avis d'une commune qui n'était pas d'accord, et nous avons pris nos responsabilités !

Nous aurons bientôt une discussion sur la Tulette - la troisième partie du déclassement et de l'aménagement du plateau de Frontenex - et, sans dévoiler des secrets de commission, nous sommes en train de prendre nos responsabilités pour un aménagement, et les décisions que prendront les partis de l'Entente n'iront pas forcément dans la direction de la commune en question. Je n'admets donc pas que l'on reproche aux partis de l'Entente de rouler pour les milieux économiques et pour les communes riches !

Le PDC, le parti radical et - je peux le dire - les députés Portier, Koechlin, moi-même et d'autres avons joué un rôle: nous avons pris nos responsabilités pour trouver des solutions acceptables. Pour cette raison, entre ne rien construire et construire 600 ou 700 logements, nous choisissons la deuxième solution. Le parti radical votera ce projet de loi.

M. Martin-Paul Broennimann (S). Notre groupe s'est déjà prononcé sur le sort que nous entendons donner à ce projet de loi. Cela étant, nous voulons manifester un certain nombre de points de vue et émettre quelques réserves.

Nous trouvons regrettable l'évolution de ce dossier: au niveau de la quantité, nous perdons une surface de plancher, ce que nous ne pouvons pas nous permettre en situation de pénurie; par le découpage en sous-secteurs, nous perdons une cohérence de planification qui aurait pu être possible au niveau des espaces publics, entre les sous-secteurs. Et nous craignons fortement que le secteur resté en zone 5 ne devienne un enclos de jardin et que la solution nettement meilleure d'une planification d'ensemble ne soit pas prise en considération.

Les contacts que nous avons eus avec la commune de Cologny nous font sentir que l'on est en présence d'une forte hostilité, d'une forte détermination, même si elle reste du caractère que je nommerais de «notable de campagne», et il est déjà difficile d'arriver au 0,8% que l'on a prévu dans notre dernière estimation de densité. Compte tenu de cela, nous demandons à notre canton d'exercer pleinement ses prérogatives en matière d'aménagement et de ne pas céder à ces exigences locales.

M. Pierre Kunz (R). Nous sommes lassés d'entendre le discours que vient de tenir M. Grobet. Selon lui, à droite, nous avons fait fausse route et nous sommes responsables de tout. Il est vrai qu'à droite nous n'avons pas toujours fait tout juste. Mais ce qui est sûr, c'est qu'à gauche, M. Grobet et ses amis ont fait tout faux depuis trente ans. La preuve, regardons la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui. Attendez ! Ils n'ont pas fait tout faux en politique ! On sait combien les soi-disant protecteurs des locataires ont profité des retombées de leur gestion efficace de la pénurie - efficace dans le mauvais sens du terme, bien sûr - et de leur discours démagogique et populiste, dont on a eu un nouvel exemple ce matin. Mes amis, quelle calamité pour les locataires ! Et aussi pour les propriétaires ! Une calamité causée par une politique incohérente qui a débouché sur la pénurie grave que nous connaissons. Ainsi, on n'a jamais construit si peu l'an dernier qu'au cours des cinquante dernières années.

Cette politique est incohérente, j'ai déjà eu l'occasion de le dire mais je ne manquerai désormais plus aucune occasion de le répéter. M. Grobet et ses amis l'ont fondée sur deux ambitions totalement contradictoires : la limitation doctrinaire et inutile des surfaces à construire et le blocage des prix des terrains et des loyers. Tout apprenti en économie sait qu'un tel système ne peut déboucher que sur la pénurie que nous connaissons ! La pénurie n'est due ni aux communes, ni aux promoteurs, ni aux partis de droite, ni même aux égoïsmes particuliers; elle est due, Mesdames et Messieurs, à la politique stupide - stupide ! - que nous avons menée depuis trente ans, sous l'oeil insuffisamment critique - il est vrai - d'une partie de la droite et des gouvernements successifs. Mais remettons l'église au milieu du village ! Enfin, si en tout cas nous voulons en reconstruire une, arrêtons de vouloir poursuivre des objectifs totalement contradictoires !

M. Pierre-Louis Portier (PDC), rapporteur de majorité. J'aimerais rappeler un certain nombre de choses. Tout d'abord, on nous accuse d'avoir privilégié les intérêts d'un particulier. L'argument que nous avions évoqué - et qui l'a été à nouveau ce matin - était d'essayer de créer les conditions permettant de construire rapidement. Nous avions raison, preuve en est qu'aujourd'hui une autorisation de construire est délivrée pour une partie du périmètre et que la demande de renseignement pour 160 logements a déjà été traitée par le département, ce qui permettra certainement le démarrage d'un chantier dans l'année ou dans les deux années à venir. Voilà la politique pragmatique souhaitée par la droite modérée ! Cela ne sert à rien de se buter, de se mettre à dos les communes et de provoquer des oppositions qui empêchent la construction de logements pendant des années. Comme nous l'avions dit, il vaut peut-être mieux prendre le risque de construire un peu moins de logements, mais de les construire rapidement plutôt que de ne rien construire à l'horizon de dix ou quinze ans.

Même si cela déborde un peu du sujet sur lequel vous avez à vous prononcer, il est intéressant de faire le point sur les responsabilités que la droite - en tout cas le PDC - entend prendre. M. Barrillier les a rappelées: tout d'abord, La Chapelle-Les Sciers. M. Grobet, qui nous attaque toujours sur le manque de caractère de notre politique, peut en être témoin : la commission et ce Grand Conseil ont voté à la quasi-unanimité un périmètre très important pour l'avenir du logement à Genève. Reconnaissez, Monsieur Grobet, que les élus de l'Entente - et en particulier celui qui vous parle - ont pris leurs responsabilités sur ce point !

Second exemple: M. Grobet m'attaque toujours au sujet de cette tour de trente étages à la Jonction. Il est vrai que j'ai fait - avec d'autres - des propositions dans ce secteur, mais je n'ai jamais parlé de tour de trente étages. C'est facile de présenter les choses de manière aussi simpliste ! Vous savez très bien, Monsieur Grobet, que, si j'ai fait ce type de proposition, j'en ai fait d'autres aussi, comme il y a déjà trois ans, concernant...

La présidente. Monsieur le rapporteur, vous devez vous adresser à moi et non à votre vis-à-vis !

M. Pierre-Louis Portier. Excusez-moi, Madame la présidente. Mais M. Grobet sait que c'est très facile de simplifier les choses.

Nous souhaitons amener les élus de ce canton - tous partis confondus - à réfléchir un peu autrement et à répondre à une problématique difficile d'aménagement du territoire, avec pour heureuse conséquence la construction de logements. C'est tout simplement cela que nous demandons ! Je n'ai jamais dit - comme l'a prétendu M. Pagani dans un quotidien - qu'il fallait construire des tours autour de la Rade ! Par contre, il est vrai que le PDC a été le premier à dire qu'il fallait réfléchir à l'aménagement du périmètre des Vernets - Acacias - La Praille. Et vous savez, Monsieur Grobet - le Grand Conseil le sait également - que la balle a été saisie au bond puisque les architectes ont lancé des concours d'architecture... (Exclamations.)Mais oui ! C'est important de réfléchir à ces problématiques, car sans réflexion on n'avance pas !

Dernière chose qui me paraît importante - j'ai évoqué en début de débat la Tulette: les députés de l'Entente ont entrepris des démarches, M. Moutinot le confirmera, pour convaincre la commune de Cologny de ne pas se contenter des 220 logements prévus dans le PAC; ils sont unanimement reconnus comme insuffisants. Nous avons amené la commune à accepter l'idée d'en construire en tout cas plus de 300. Parallèlement, un architecte de talent est venu présenter un projet que la commission d'aménagement a unanimement jugé intéressant - M. Grobet ne m'écoute pas, c'est dommage, ce serait important qu'il soit conscient de tous les efforts que nous faisons... Eh bien, nous avons pris notre courage à deux mains et nous sommes allés présenter ce projet qui est une forme moderne d'aménagement de ces nouveaux quartiers autour de la ville de Genève. La difficulté d'aménager ces nouveaux quartiers - qui ne font plus partie de la ville mais qui ne sont pas encore la campagne - a été mise en exergue tout au long de ce débat. Il est clair que l'on ne peut pas faire la ville dans ces endroits, comme on ne peut pas y laisser la campagne. Il faut les aménager, et c'est toute la difficulté.

L'intérêt de ces débats est d'essayer de montrer aux communes et à la population que, si l'on veut préserver les espaces verts nécessaires à la qualité de la vie - comme M. Grobet l'évoquait - il faut réfléchir à construire un peu plus haut. Car évidemment, le territoire étant tellement restreint, le terrain étant tellement rare, il faut l'utiliser avec parcimonie et qualité dans l'aménagement. Je vois que M. Broennimann me regarde, et ce n'est pas lui qui me contredira à ce sujet.

Voilà ce que j'avais à dire. Quant aux autres attaques sur mon jardinet à Veyrier, c'est trop facile, et je n'y réponds même plus.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. J'ai le regret de dire que M. Kunz nous ment effrontément. Je n'avais pas imaginé à quel point il se laisserait aller et, malheureusement, il en fait la démonstration aujourd'hui. Pourquoi nous ment-il ?

A Zurich, par exemple, l'ensemble de la population a été chassée du centre ville: les statistiques l'attestent, plus de 100 000 personnes manquent cruellement au centre de cette ville. Et l'on constate cela dans toutes les villes de Suisse et dans les villes européennes. Malheureusement pour M. Kunz, seul le canton de Genève, par sa politique, a réussi à conserver la majorité de la population au centre ville.

La tendance à faire disparaître les logements à bon marché au profit des banques et des bureaux a commencé en 1960. Elle a été combattue - heureusement ! - par les locataires et les habitants associés pour que les 100 000 personnes qui auraient dû quitter la ville y soient encore aujourd'hui. Alors, les statistiques prouvent que M. Kunz nous ment quand il dit le contraire ! Il nous ment d'autant plus que même le rapport de la CEPP - avec une majorité de droite - encense la politique qui a permis de protéger les logements à bon marché.

Et le débat doit avoir pour but de créer des logements, mais des logements prix abordable, pour les gens de la classe moyenne ! Les gens extrêmement riches ont aussi le droit de cité, mais pas au détriment de la majorité de la population. Et quand vous voyez des logements proposés en PPE à quasiment 6000 F ou 7000 F par mois pour un cinq pièces, il devient honteux de les mettre sur le marché !

Sur l'ensemble du terrain dont il est question, il manque 320 logements par rapport aux 700 logements prévus par le plan directeur. De plus, on ne nous propose de construire quasiment que des logements de luxe pour une certaine catégorie de la population, c'est-à-dire les très hauts revenus - avec 500 000 F de revenus par année et avec des fortunes au-delà de ce que nous imaginons tous dans cette enceinte. C'est bien de cela dont il est question ! Nous ne sommes pas d'accord avec ces deux paramètres, et je ne parle pas de la classe moyenne qui, malheureusement, n'est plus défendue par vos milieux, ce que je regrette !

Cela étant, nous estimons que le projet de loi que nous allons voter ne correspond pas aux besoins prépondérants de la population et ne correspond pas non plus à la potentialité de ce terrain qui, je le rappelle, est de 1,2 de densité. Et après, on vient nous dire de ne pas nous en faire, car on trouvera des terrains ailleurs. Puis le parti libéral et les radicaux nous proposent de déclasser des zones agricoles et ils lancent une initiative... Bien évidemment, en ces temps électoraux, il est toujours intéressant de lancer des initiatives, parce qu'il est effectivement plus facile de proposer le déclassement d'une zone agricole que de s'astreindre à construire là où c'est possible, en l'occurrence sur ce terrain et sur les zones villas. Et, de manière systématique, vous refusez de construire sur des terrains affectés à des villas qui ne sont pas encore construites, comme vous refusez de densifier un peu - à 1,2 - des terrains qui vous sont proches, puisqu'ils sont dans les régions que les plus riches d'entre nous se sont réservées dans le canton, comme Cologny, la Gradelle et certains secteurs alentours.

Bien évidemment nous allons perdre, mais j'espère que dans quelques mois la balance va inverser la décision déplorable qui sera prise aujourd'hui.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Un périmètre d'aménagement de cette importance suscite forcément passions et tensions, et il n'est pas toujours certain qu'il parvienne à bon port. Une première décision sur la première partie de ce périmètre a été prise; le Conseil d'Etat souhaitait que l'intégralité passe en zone de développement 3; votre Grand Conseil a gardé une partie en zone villas, dont acte.

Monsieur. Pagani, vous ne pouvez pas revenir sur ce périmètre-là, car la loi a été votée, publiée et mise en vigueur. Vous ne pouvez pas modifier une zone sans suivre les procédures d'aménagement, de mise à l'enquête publique et d'opposition. Par le biais de la partie de la loi qui concerne une deuxième partie du périmètre, vous ne pouvez pas remettre en cause ce qui a été définitivement voté sur la première partie. La proposition du Conseil d'Etat n'a pas été suivie, mais la décision du Grand Conseil a été respectée. Les autorisations concernant la zone villas ont été données et le plan localisé de quartier, sur la partie déclassée en zone 3, est pratiquement à bout touchant.

Aujourd'hui, nous débattons de la deuxième partie de ce périmètre, et je n'ai entendu aucune voix discordante. Tout le monde admet que cette deuxième partie doit être déclassée en zone 3. Je me souviens d'un moment où c'était un peu plus compliqué, il y avait quelques autres idées et deux ou trois autres problèmes... Je vous remercie d'ores et déjà de bien vouloir accepter ce déclassement en zone de développement 3, avec un degré 2 de sensibilité au bruit.

Pour que le périmètre soit complet, nous débattrons prochainement de la troisième partie, située sur Cologny. Et si je m'abstiens de toute critique comme de toute félicitation, je me dois néanmoins de souligner que les uns et les autres avez passablement travaillé et fourni une belle énergie pour faire évoluer ce dossier dans le bon sens, puisque nous remettons en procédure d'opposition la partie Tulette en supprimant sa limite de gabarit, précisément afin d'arriver à un nombre de logements suffisant avec une qualité architecturale reconnue par chacun - l'architecte a présenté son projet avec grand succès à la commission d'aménagement, mais avec un peu moins de succès aux autorités de Cologny, il faut bien le dire.

En ce qui concerne le taux de logement social, je vous rappelle que tout cela se déterminera au niveau du plan localisé de quartier. Evidemment, la partie villas échappe à la somme du calcul. Pour la partie que vous avez déjà déclassée en zone 3, on devrait trouver - en l'état actuel des discussions - un tiers d'immeubles LGL, un tiers Fondation communale, dont la caractéristique n'est pas encore connue, et un tiers en loyer libre. En ce qui concerne Cologny, on est assez clairement sur du deux tiers /un tiers qui n'a pas été contesté. Et pour la deuxième étape, le plan localisé de quartier n'est pas suffisamment élaboré pour que je puisse être catégorique, notamment en raison du fait qu'une école prendra place à cet endroit.

Mesdames et Messieurs les députés, nous ne sommes pas au bout de nos peines, mais nous sommes sur un bon chemin. Je vous demande donc de voter ce projet de loi tel qu'il ressort du rapport de majorité.

Mis aux voix, ce projet de loi est adopté en premier débat par 56 oui contre 9 non et 2 abstentions.

Deuxième débat

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Puisque l'entrée en matière est faite, ce que j'imaginais est malheureusement en train d'arriver : nous allons gaspiller un certain nombre de surfaces à bâtir au profit de logements de luxe. On va s'en sortir avec un malheureux tiers de logements LGL, et encore, ce ne sont pas des logements à loyer bon marché.

M. Moutinot nous a dit qu'il n'était pas possible de voter mon amendement car les procédures sont achevées. Cependant, la mise à l'enquête publique du plan tel que je vous le propose a été effectuée dans un premier temps. Au sens de la loi, il n'est pas possible de réduire les prétentions du plan après la mise à l'enquête publique, mais il n'est pas possible de les augmenter, car l'augmentation nécessiterait une remise à l'enquête publique. Cela a justifié le fait que le Grand Conseil puisse réduire les dispositions prévues dans le premier plan. Je constate ainsi que l'enquête publique a été faite sur l'ensemble de l'amendement que je vous propose. C'est pourquoi je vous invite à voter sereinement et sans préoccupation en ce qui concerne la légalité de cet amendement qui figure en page 25.

M. Pierre Kunz (R). Je ne voulais pas interrompre le cours des choses lors du premier débat, mais il est bien évident que je ne peux accepter que M. Pagani me traite de menteur ! Si je suis un menteur, lui est d'une incompétence crasse ! On ne peut nier qu'une majorité de la population a le droit de vivre au centre-ville. Mais, Monsieur Pagani, les conséquences de votre politique de raréfaction de l'offre sont désastreuses. Aujourd'hui, 25% des gens travaillant à Genève sont obligés d'aller vivre dans le canton de Vaud ou en France: cette tendance signifie une perte fiscale pour le canton de l'ordre de 400 à 500 millions par année ! Les nuisances - vous le savez aussi bien que moi, car, même si vous habitez en ville et moi à la campagne, j'en souffre plus que vous - eh bien, les nuisances, notamment celles liées au trafic, sont une calamité pour les gens qui continuent à vivre à Genève !

Enfin, dans le domaine privé, presque plus personne ne construit en centre-ville où, contrairement à ce que vous pensez, la construction de logement stagne ! Et si elle ne baisse pas, c'est uniquement parce que les pouvoirs publics et les caisses de pension publiques investissent dans la construction de logements en centre-ville.

Un dernier mot encore, Monsieur Pagani: si nous avons lancé notre initiative, ce n'est pas par gesticulation électorale, mais parce que nous - nous ! - avons vraiment envie de construire, que ce soit dans les zones agricoles peu propices à l'agriculture ou dans les zones industrielles, comme il est proposé dans «Le Temps» ce matin, lequel serait favorable à la construction de logements après déclassement car ils sont proches des agglomérations et du centre-ville.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Je répondrai d'abord à M. Kunz qu'il doit se replonger dans le rapport de la CEPP pour comprendre à quel point il dénigre le travail accompli par - je le répète - une majorité de droite.

D'autre part, concernant les zones industrielles, des députés membres de votre parti se sont rendu compte que placer des logements dans les zones industrielles équivalait à attaquer les conditions-cadres que nous essayons de donner aux petites et moyennes entreprises; mais je sais que M. Kunz et son parti n'en ont plus grand-chose à faire... Un certain nombre de députés ont compris que construire des logements dans les zones industrielles faisait fuir les industriels, car ils font du bruit de par leur activité intrinsèque. Et dès le moment où vous mettez des logements, il y a des locataires...

La présidente. Monsieur le rapporteur, sur l'amendement s'il vous plaît !

M. Rémy Pagani. Les locataires se plaindront du bruit et chasseront les artisans qui travaillent à côté d'eux. C'est donc un cheval de Troie que le parti radical a trouvé avec cette fumeuse idée de placer des logements dans les zones industrielles.

Par ailleurs, je trouve assez exceptionnel que M. Kunz se fasse le chantre - je ne savais pas qu'il était écologiste - de la dégradation de notre environnement... M. Grobet et d'autres l'ont dit, cette surface est propice à la construction de logements parce qu'elle sera située près d'une gare à haut trafic; le projet CEVA permettra d'urbaniser l'ensemble de ce secteur. En ne votant pas les amendements que nous proposons, c'est-à-dire en ne votant pas les 300 logements qui manquent dans cette surface - au profit de logements qui se situeront plus loin, dans les fameuses zones agricoles qu'il nous recommandera de déclasser, ou aux communaux d'Ambilly - beaucoup de gens vont prendre leur voiture pour venir travailler en ville, malheureusement...

Une voix. Ils viendront en tram !

M. Rémy Pagani. Attendons encore le tram... Les gens vont devoir prendre leur voiture, parce qu'on va construire dans les zones agricoles déclassées au diable Vauvert. Et c'est cela que l'on nous propose: une dégradation des conditions de l'environnement ! Merci, Monsieur Kunz !

M. Gabriel Barrillier (R). J'ai dit tout à l'heure qu'il y avait deux manières d'aborder ce débat et je constate qu'effectivement, c'est la deuxième, la moins raisonnable, qui est en train de prendre le dessus.

Puisque c'est à nouveau lui qui jette en pâture des affirmations gratuites, j'aimerais rappeler à M. Pagani que nous aurons un débat sur la mixité au point 44 de l'ordre du jour: si vous avez lu les rapports sur ce projet de loi, vous aurez vu que le parti radical a pris une position médiane qui n'est pas celle que vous semblez affirmer !

Deuxième chose: les PME. Permettez-moi de m'étonner ! Quelle est la force politique qui a le plus entravé le développement et le travail des PME et des artisans, notamment en ville de Genève ? C'est votre alternative, Monsieur, c'est votre Alliance de gauche ! Je crois qu'en matière de conditions-cadres, à votre place, je m'occuperais d'un autre sujet.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Une fois encore, en soi, en son temps, le Conseil d'Etat était favorable au déclassement qui vous est demandé par M. Pagani. Mais vous avez pris une décision, et quoi que vous en disiez, Monsieur Pagani, on ne peut revenir dessus, à moins de faire courir un risque majeur à l'ensemble du développement du périmètre, car vous donnez ici un argument de procédure à tous ceux qui ne veulent rien construire du tout.

Monsieur le rapporteur de minorité, j'observe que vous êtes d'accord sur l'objet qui vous est soumis; vous aimeriez certes qu'il y ait plus, mais cela n'est pas possible, et je vous demande par conséquent de rejeter cet amendement.

J'ai oublié tout à l'heure de répondre à une question de M. Grobet sur l'alignement des constructions: nous avons vu des photomontages démontrant que les altitudes prévues ne sont pas visibles du lac - comme c'est le cas avec l'immeuble de Frontenex-Parc qui a la très mauvaise idée d'être localisé sur la rupture de crête. Les immeubles dont nous parlons maintenant sur Frontenex et La Tulette sont en arrière de la crête; par conséquent, un simple calcul de trigonométrie démontre qu'ils ne peuvent être vus des rives du lac.

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

La présidente. Un amendement est proposé dans le rapport de minorité: à l'article 1, alinéa 1, il s'agit de supprimer les mots « modifié le 2 juin 2002 (plan No 29180B 511).»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 43 non contre 9 oui et 4 abstentions.

Mis aux voix, l'article 1 est adopté, de même que les articles 2, 3 et 4.

Troisième débat

La loi 8667-2 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 8667-2 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 49 oui contre 8 non et 1 abstention.

PL 8825-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Vernier (création d'une zone agricole)

Premier débat

Mme Françoise Schenk-Gottret (S), rapporteuse. Ce projet de loi est très intéressant. A travers une modification de zone, nous allons procéder à un classement et non à un déclassement, fait suffisamment rare pour être relevé. Le périmètre concerné est pour partie touché par les valeurs d'alarme en matière de bruit, et pour autre partie concerné par des valeurs d'immission qui sont dépassées de plus de trois décibels.

Le plan directeur prévoit ce périmètre en zone agricole, car il est contigu à une zone agricole de grande importance. Le plan directeur de Vernier adopté en 1997 prévoyait d'affecter ce secteur à l'agriculture, à la viticulture ou à un aménagement paysager reconnaissant la valeur du lieu. Le plan directeur communal n'était alors pas contraignant, la loi sur les plans directeurs localisés n'ayant pas encore été adoptée.

A l'époque où le régime des zones NNI était en vigueur, le périmètre qui nous concerne se situait en zone NNI. Il était donc impossible d'y construire des logements. En 1995, un arrêt du Tribunal fédéral déclarait les zones NNI inapplicables. Cela a instauré une période d'incertitude juridique, car les zones de l'OPB n'étaient pas encore applicables. Cette période s'est achevée en mai 2001 par l'adoption de la seconde annexe 5 de l'OPB, fixant les valeurs limites de l'exposition au bruit des aérodromes civils.

Durant cette période, des autorisations de construire ont été délivrées. La commission a procédé à de longues auditions qui sont transposées dans ce rapport. Des discussions animées ont eu lieu, après avoir obtenu les éclaircissements indispensables pour comprendre les modifications législatives et les difficultés d'application des procédures qui ont suivi. Il est alors apparu de façon très nette que le problème se divisait en deux niveaux: le niveau juridique, où se traitent les différends entre les propriétaires des parcelles et l'Etat, et le niveau parlementaire, où se prennent des décisions en matière d'aménagement du territoire conformément au plan directeur cantonal.

Ce projet de loi a été voté en commission par 8 oui et 7 abstentions. Je vous invite donc à voter ce projet de loi de classement.

M. Ernest Greiner (R). Mesdames et Messieurs les députés, il est étonnant de voir qu'aujourd'hui on doit parler d'un déclassement pour construire en zone agricole dans la deuxième commune du canton de Genève. C'est assez rare, vous me l'accorderez !

Au début de cette année, le conseil municipal de Vernier a refusé d'entrer en matière sur ce déclassement. Pourquoi ? Même si une zone agricole dans ce périmètre est prévue dans le plan directeur communal, le conseil municipal a compris qu'actuellement ce n'est pas forcément la bonne décision à prendre, et pour plusieurs raisons.

La première raison est que nous ne savons toujours pas vers quelle tendance iront les décisions des tribunaux, car il y a passablement de recours pendants. Nous ne savons pas s'il faudra payer des indemnisations, même si des chiffres avoisinant les 15 millions ont été articulés. Cependant, je crois que dans un Etat de droit les propriétaires doivent aussi pouvoir savoir s'ils seront indemnisés ou pas.

Second argument: il est assez extraordinaire de constater qu'autour de cette parcelle, côté Rhône, on accorde en masse des autorisations de construire des villas. On a pu obtenir une autorisation pour construire l'Ecole allemande encore plus proche de l'aéroport, certes avec des améliorations d'isolation, mais on a donné cette autorisation ! Je vois donc assez mal pourquoi, pour une partie de ce périmètre qui n'est pas non plus dans des valeurs d'alarme, on refuse toute la parcelle. Ou alors, la vérité est ailleurs ! La vérité est peut-être que l'on veut déplacer les jardins des villas pour construire à Châtelaine... Mais c'est un autre débat.

Néanmoins, des initiatives circulent pour construire 15 000 logements supplémentaires. On ne peut les construire sur des nuages, il faut bien les construire sur le sol !

Les valeurs d'alarme sont dépassées à gauche et à droite en ville de Genève: aurons-nous bientôt une ville de paix, avec des vaches et des moutons, parce que chaque petit coin où l'on peut encore construire en ville doit être déclassé en zone agricole ? Non ! Et aujourd'hui, il est trop tôt pour déclasser en zone agricole cette zone à construire en villas 5, parce qu'il y a encore d'autres arguments. Pas plus tard que cette semaine, nous avons lu dans la «Tribune de Genève» que l'on voudrait construire une patinoire dans une région située sous les avions... C'est vrai qu'il y a des avions dans cette zone, mais ils deviennent de plus en plus silencieux - on l'a encore remarqué hier avec l'Airbus A380 - et il n'est pas du tout certain que l'on construise cette patinoire à l'endroit mentionné. Alors, pourquoi ne pas prévoir une zone sportive dans ce périmètre effectivement trop bruyant ?

Mais voilà, nous sommes aujourd'hui dans un canton où l'on n'a pas le droit de déclasser des terrains qui sont, mine de rien, un poumon de réserve pour construire soit des installations sportives, soit des villas. C'est pourquoi le parti radical vous propose de refuser ce déclassement.

M. René Desbaillets (L). Vous pourriez attendre de moi que je me précipite, en tant qu'homme de la terre, pour soutenir ce projet de loi visant à rétablir de la zone agricole dans notre canton... Eh bien non, Mesdames et Messieurs ! Je ne veux pas répéter les propos de mon préopinant et je soutiens absolument ce qu'il a dit au niveau technique à propos de la construction de logements, etc., mais je me prononcerai sur la partie agricole.

On essaie de nous faire croire que ce terrain pourrait être cultivé et donner de la vigne: je vous rappelle que le cadastre viticole réclame une certaine pente et une bonne orientation pour produire de la vigne. Il est donc exclu d'y faire de la culture spéciale.

Et faire de l'agriculture sur ce terrain qui est déjà entouré de villas, d'habitations - terrain qui est un véritable puzzle - alors qu'on demande aux agriculteurs d'être rationnels et de travailler avec un minimum d'heures/hectare, ce n'est pas possible ! Aujourd'hui, ce sont des grosses machines qui sont utilisées, larges de 15 ou 30 mètres, et ce n'est donc pas possible de cultiver rationnellement une parcelle comme celle qui nous est présentée.

Donc, il faut laisser cette parcelle en l'état et y prévoir une utilisation optimale, pour le bien de notre République. On peut y réaliser des projets soit pour la petite industrie artisanale, soit pour du logement, et je laisse déterminer à la commission future la meilleure façon d'utiliser cette parcelle. C'est pourquoi je vous propose de refuser ce projet de loi.

Mme Anne Mahrer (Ve). Il est vrai que le flou qui a prévalu de 1995 à 2000, dans l'attente l'adoption des nouvelles normes concernant les nuisances sonores, a permis d'autoriser des constructions dans des zones déjà situées en valeur d'alarme - on se souvient d'autorisations données à Genthod ou à Meyrin.

Le périmètre concerné - je vous ai bien écouté, Monsieur Greiner - se trouve dans un secteur où les valeurs d'alarme sont dépassées, et nous soutiendrons donc ce déclassement en zone agricole. Je vous rappelle que le principe de précaution interdit la construction de logements dans des zones fortement exposées au bruit. De plus un certain nombre de zones n'ont pas été mises en conformité, et nous souhaitons que cette dernière soit accélérée, ce qui éviterait ainsi des conflits et des recours - le périmètre qui nous occupe aujourd'hui est tout à fait un exemple.

C'est pourquoi les Verts vous invitent à accepter ce projet de loi.

M. Rémy Pagani (AdG). On se trouve dans une situation assez bizarre, car, même si nous ne remettons pas ce terrain en zone agricole, de toute façon rien ne se construira puisque nous sommes dans les zones d'alarme et qu'il est interdit d'y construire.

Et si, par impossible, on le pouvait, on se retrouverait dans la situation complètement aberrante que nous avons déjà vécue, c'est-à-dire de devoir indemniser des propriétaires. Puis on se rendrait compte que l'aviation, c'est non seulement le bruit - qui a été réduit mais pas au point d'être totalement supprimé - mais c'est aussi la pollution atmosphérique ! Je vous laisse le soin de vous balader sur ce terrain et de humer l'air pour vous rendre compte des rejets de kérosène qui sont intenables - le bruit a bien diminué, mais le trafic a augmenté. Chacun se plaît à ici de dire qu'il est bénéfique que des avions viennent en nombre dans notre aéroport: mais les conséquences sont qu'il faut protéger des effets nocifs la population, car l'aviation est malheureusement une industrie polluante ! Il faut en prendre acte, car un certain nombre d'indemnités doivent être versées régulièrement à des personnes qui ont construit et qui se sont aperçues plus tard que l'aéroport était source de nuisances.

De toute façon, c'est un débat vain que de vouloir refuser ce projet de loi, parce que dans les trente ans à venir - à moins qu'on ne passe des avions et qu'on trouve un nouveau mode de transport - les avions resteront polluants. Or ce terrain se situe en zone d'alarme qui, quoi qu'il advienne, le demeurera dans les trente ans à venir.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Le déclassement proposé est tout simplement conforme au plan directeur cantonal que toutes les autorités du canton, y compris votre parlement, se doivent de le suivre. Il est absolument certain que ces périmètres ne peuvent pas accueillir de logements: les valeurs de bruit qui y sont relevées font que ces terrains ne sont pas constructibles en logements ! A partir de là, on aurait pu imaginer de l'industrie, de l'agriculture ou d'autres choses, mais en tout cas pas du logement.

Il se trouve que le plan directeur cantonal a fait le choix de la zone agricole. Pourquoi ? Parce qu'aujourd'hui une partie non négligeable de ces terrains est en surface d'assolement. Alors, Monsieur Desbaillets, il ne s'agit pas de créer de l'agriculture: c'est dans la liste des surfaces d'assolement.

Monsieur Greiner, vous avez dit que la commune était défavorable; mais il y a un préavis favorable de la commune du 25 juin 2002, et je me demande si vous ne confondez pas avec le périmètre d'à côté où il y a effectivement des contestations. Ici, nous sommes en conformité avec le plan directeur cantonal: il s'agit de superficies qui sont, en partie, en surfaces d'assolement, dans des terrains inutilisables pour le logement, en raison du bruit. C'est la raison pour laquelle je vous demande de voter ce projet de loi, à moins de nous placer dans une situation assez invraisemblable où la zone juridique serait vide de sens, à cause des nuisances sonores. Et ce genre de contradictions sont de nature à poser ultérieurement des problèmes juridiques ou financiers qui seraient tout à fait dommageables.

J'ajoute qu'en commission ce projet de loi a été voté par 8 oui et 7 abstentions. Je suis un peu surpris de ce renversement inattendu, mais je vous demande, pour les raisons que je viens d'évoquer, de bien vouloir voter ce projet de loi tel qu'issu des travaux de votre commission.

Mis aux voix, ce projet de loi est rejeté en premier débat par 34 non contre 30 oui.

PL 8858-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi de Mme et MM. Mark Muller, Janine Hagmann, Jacques Pagan, Hugues Hiltpold, Jacques Jeannerat, Gabriel Barrillier, René Koechlin, Jacques Baud, Jean-Claude Egger, Pascal Pétroz, Jacques Baudit modifiant la loi sur les forêts (M 5 10)
Rapport de majorité de M. Olivier Vaucher (L)
Rapport de minorité de M. Rémy Pagani (AdG)

Premier débat

M. Mark Muller (L), rapporteur de majorité ad interim. Il ne s'agit pas de mon rapport, mais de celui de mon collègue Olivier Vaucher qui a démissionné la semaine dernière et que je remplace au pied levé.

Nous avons déposé ce projet de loi il y a quelques temps pour résoudre un problème bien particulier, lié à l'application de la loi sur les forêts. La loi actuelle proscrit toute construction sur une distance de 30 mètres à partir de la lisière d'une forêt. Dans un grand nombre de cas, cela réduit sensiblement les possibilités de construire, notamment en zone villas où la forêt est encore très présente. Il nous a donc paru nécessaire de trouver une solution à ce problème, c'est-à-dire d'essayer d'assouplir un peu la législation pour répondre aux voeux de certains propriétaires de villa qui veulent pouvoir construire sur leur terrain.

Nous avons fait cette proposition qui, dans un premier temps, allait certes un peu loin - mais il est toujours bon d'émettre des propositions claires pour ouvrir le débat - et une discussion constructive a pu se développer en commission, grâce aux remarques du responsable de l'application de la loi sur les forêts, M. Joly. Et, de manière relativement consensuelle - malgré ce que le rapporteur de minorité pourrait laisser croire - nous avons trouvé la solution suivante: une personne qui souhaite déroger à la limite des 30 mètres pourra dorénavant le faire, moyennant l'adoption d'un plan de quartier ou d'un plan d'alignement. Cela signifie qu'un contrôle sur les conditions d'obtention de cette dérogation sera effectué. En effet, adopter un plan de quartier nécessite une procédure assez lourde qui passe notamment par un préavis municipal, par une enquête publique et par une décision du Conseil d'Etat. Pour obtenir un plan d'alignement, la procédure est assez proche de celle que l'on doit respecter pour l'adoption d'un plan localisé de quartier.

Il existe ainsi des garanties pour que l'on ne porte pas préjudice à la protection de la forêt et que l'on ne construise pas, non plus, des bâtiments qui, à terme, seraient mis en danger par des arbres trop proches. Il me semble donc que cette solution est équilibrée et qu'elle devrait trouver un large soutien.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Contrairement à ce que vient de dire M. Muller, ce n'est pas l'unanimité de la commission qui s'est déclarée favorable à ce projet, mais une large majorité seulement. Je rappelle que l'Alliance de gauche était contre et que Verts et socialistes s'étaient abstenus, car le sujet est très complexe et demande réflexion.

Comme M. Muller l'a dit, nous nous trouvons face à un projet de loi visant à faire admettre dans notre législation qu'un acquéreur de parcelle - qui voudrait exploiter le potentiel de cette parcelle alors qu'un bois s'y trouve - pourrait dorénavant bénéficier d'un pseudo-droit de bâtir, y compris sur la forêt implantée sur cette parcelle. L'ensemble de la commission s'est rendu compte que c'était totalement impossible d'un point de vue légal - puisque personne n'admettrait que l'on puisse faire bénéficier d'un report de droit de bâtir sur une forêt.

Par conséquent, les députés de la majorité de droite se sont repliés sur d'autres subterfuges juridiques pour permettre d'utiliser au maximum les potentialités d'un terrain à bâtir et faire sauter le verrou des 30 mètres. C'est un sujet complètement scabreux, qui laisserait entendre que l'on peut construire à 10 mètres de la forêt - c'est ce qui vous est proposé - avec une certaine cautèle, notamment correspondre au plan d'alignement éventuel qui pourrait subsister.

En faisant sauter ce verrou des 30 mètres à la forêt, on se retrouvera avec des demandes d'indemnités d'acquéreurs de biens bâtis - par des promoteurs qui, dans un premier temps, trouvaient très bucolique de construire à 10 mètres de la forêt - mais qui, bien vite, se rendraient compte que la forêt a ses inconvénients, comme celui, par exemple, de maintenir une humidité constante et de dégrader beaucoup plus rapidement les bâtiments qui lui sont proches. Et si les arbres venaient à tomber sur les constructions...

Mettre le doigt dans cet engrenage, c'est aller vers des catastrophes. Non seulement des catastrophes pour les propriétaires des immeubles, mais aussi pour l'Etat ! Puisque le propriétaire d'une villa qui viendrait à subir ces inconvénients pourrait se retourner contre la décision, que la majorité de droite et l'UDC vont prendre, et demander des indemnités - du moment que nous donnons la possibilité de construire des logements insalubres... La jurisprudence du Tribunal fédéral l'indique très clairement et certaines affaires nous ont d'ailleurs été citées en commission.

Je vous invite donc à rejeter nettement cette possibilité, d'une part parce qu'un certain nombre d'inconvénients intrinsèques viendraient à subsister pour les propriétaires d'immeubles ou de villas construits à 10 mètres de la forêt. D'autre part, parce que nous estimons que, d'un point de vue légal, il est préférable de fixer la limite à 30 mètres et de permettre des dérogations, et il y en a... (L'orateur est interpellé.)Non, Monsieur Muller, ce ne sont pas des dérogations que vous proposez ! Vous nous proposez d'inscrire dans la loi les 10 mètres à la forêt. Or nous estimons beaucoup plus juste de partir de 30 mètres et d'accorder, le cas échéant, des dérogations pour aménager des parkings ou des petits édicules qui permettraient de viabiliser les terrains dans les 30 mètres à la forêt.

M. Alain Etienne (S). Dans sa teneur initiale, le projet de loi proposé par la droite de ce parlement n'était pas conforme au droit fédéral, il faut bien l'admettre, mais durant cette législature, nous avons été habitués à ce genre situation.

Le groupe socialiste est très réservé quant à ce projet de loi. Tout d'abord, il est fait référence à la modification de la loi sur les eaux, adoptée par ce Grand Conseil, modification que les socialistes avaient refusée.

Concernant cette nouvelle proposition, nous avons de la peine à en mesurer les applications, c'est pourquoi certains et certaines d'entre nous continuerons à s'abstenir. D'autres pourraient voter ce projet de loi, mais sans grande conviction.

Mme Michèle Künzler (Ve). Ce qui est gênant pour un projet de loi qui traite de modification de la loi sur les forêts, c'est que l'on commence l'argumentaire en soulevant le cruel besoin de logements. Nous sommes tous d'accord sur ce point-là, mais doit-on construire sur la forêt, en portant préjudice à la nature ? Je pense que c'est une très mauvaise idée.

Sur Genève, 100 hectares de forêt sont déjà en zone constructible. Comme pour les hameaux, pour les forêts ou pour les zones agricoles, je trouve vraiment dommage que, pendant ces quatre ans, on n'ait pas progressé dans le reclassement des zones. Cela nous aurait évité bien des conflits !

Venons-en maintenant au point précis. Pour les Verts, il est très important de maintenir la zone des 30 mètres. Non seulement pour la forêt mais aussi pour les êtres humains. M. Pagani l'a rappelé, il faut une saine distance entre les deux, pour que les arbres n'empiètent pas non plus sur le territoire des êtres humains ni ne tombent sur les maisons - comme c'est arrivé récemment, même en pleine ville, et fendant la maison en deux. Il n'y a heureusement pas eu de blessés, mais il aurait pu y en avoir. La logique veut que l'on n'approche pas des arbres de trop près et qu'il y ait une zone de sécurité.

Il est vrai que nous nous sommes abstenus, car nous doutons de pouvoir appliquer cette dérogation des 30 mètres en prétendant que la lisière n'est pas touchée. Si l'on applique réellement la loi, je ne vois honnêtement pas comment on pourrait approcher de plus près que 30 mètres, car la lisière est toujours concernée.

Pour l'instant, nous approuverons les propos du rapporteur de minorité, cela clarifiera la situation. Si l'on peut parfois avoir des dérogations et si la loi passe telle qu'elle est proposée, j'espère que toutes les instances qui seront appelées à se prononcer appliqueront la loi avec beaucoup de rigueur: il en va de la santé et de la sécurité des habitants, mais aussi du bien-être des forêts.

M. Jacques Baud (UDC). Je suis toujours quelque peu stupéfait par l'attitude de M. Pagani et sa haine des promoteurs. Il y a là quelque chose qui me paraît un peu forcé. Tous ceux qui voudraient construire des logements - hormis l'Etat - ne seraient que des voyous et des gens malhonnêtes ? Cela me choque un peu.

Quant au fait qu'il serait dangereux, pour construire, d'être plus proche des arbres que trente mètres, je me pose la question: les arbres sur les trottoirs de nos villes seraient-ils dangereux pour les immeubles et les passants ? N'exagérons pas trop !

D'un autre côté, pour la Tulette, là, il faut densifier... Mais dès qu'il s'agit des villas, alors non: ce sont les riches, ce n'est pas permis ! Il y a tout de même une certaine exagération, que je regrette, de la part de la gauche, parce qu'elle n'est pas raisonnabée et que cela va un peu loin.

Il est bien évident que nous voterons pour ce projet de loi.

M. Mark Muller (L), rapporteur de majorité ad interim. J'aimerais revenir sur une ou deux déclarations. Le groupe libéral est également très attaché à la protection des forêts. Son objectif n'est évidemment pas d'empiéter sur la forêt ou d'y bâtir des logements, comme la députée des Verts l'a laissé entendre.

J'aimerais aussi rappeler que la forêt s'étend, elle progresse dans notre pays, il n'y a pas de danger d'atteinte irrémédiable à la substance même de notre aire forestière nationale. Je ne crois pas que l'on puisse peindre le diable sur la muraille comme cela a été fait.

Deuxième élément: je vous rappelle que nous sommes liés par une loi fédérale. Notre loi cantonale ne fait qu'appliquer cette loi fédérale qui limite la zone inconstructible à 10 mètres; nous avons donc la législation cantonale la plus protectrice pour la forêt, et ce n'est pas un mal. Aujourd'hui, nous proposons simplement d'assouplir un peu les règles assez sévères que nous nous sommes imposées par voie dérogatoire.

Dernier point que j'aimerais aborder suite à l'intervention de M. Pagani: il ne s'agit pas ici de remettre en cause de manière généralisée la limite des 30 mètres, mais il s'agit d'étendre un peu les possibilités d'y déroger. Le principe restera toujours le respect de la limite des 30 mètres, mais on voudrait faciliter un peu les dérogations et, encore une fois, dans le cadre de l'adoption de plans, c'est-à-dire toujours dans une procédure - assez lourde - où tout le monde peut s'exprimer. Il me semble donc qu'il n'y a pas de danger à voter cet assouplissement.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Le sujet est extrêmement complexe, bien qu'il ne le paraisse pas au premier abord: ce n'est pas simplement le fait de déroger aux 30 mètres, mais que la suppression de cette limite soit entrée en force au moment de l'adoption de la présente loi. Un certain nombre de dérogations seront accordées, et cela laissera la porte ouverte à des dérogations en masse.

Aujourd'hui, le département a une vision claire de la limite à 30 mètres, il l'applique de manière stricte et il y déroge dans certaines circonstances; mais demain, avec la suppression qui nous est proposée, le département connaîtra des difficultés: évidemment, les autorités vous diront qu'il n'est pas possible de construire à moins de 30 mètres, mais des recours seront déposés auprès des tribunaux et le département aura beaucoup de mal à justifier sa position.

C'est pourquoi nous proposons, pour garantir le droit, de réintroduire ce segment de phrase: «... en force au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi...». Il nous paraît utile et nécessaire d'octroyer au département les moyens juridiques de résister aux demandes pléthoriques de dérogation qui seront déposées: elles seront refusées dans un premier temps et, parce que les tribunaux appliqueront la décision que nous risquons de prendre ce matin, le département devra finalement s'y soumettre.

La présidente. Nous allons nous prononcer sur l'entrée en matière et, ensuite, nous prendrons une pause... Monsieur Grobet, souhaitez-vous vous exprimer sur l'entrée en matière ou sur les amendements ?

M. Christian Grobet (AdG). Je ne souhaite pas évoquer ces amendements. J'ai beaucoup de respect pour M. Pagani, pour beaucoup de ses amendements, mais, là, je crois qu'il fait fausse route... (Rires.)Même en réintroduisant cette disposition, qui va être supprimée, cela pourrait aller à fins contraires de ce que vous souhaitez.

Je m'explique. A mon avis, la disposition des lois entrées en force aurait dû figurer dans une disposition transitoire au moment où la loi sur la forêt a été votée. Pourquoi ? Parce qu'on voulait éviter d'appliquer la loi avec effet rétroactif. Et l'on a intégré cela dans cet article pour éviter, précisément, qu'on applique la nouvelle loi à des projets alors que les zones n'étaient pas encore en force.

En examinant la disposition que vous voulez réintroduire, on pourrait l'interpréter en disant que cette dernière ne s'applique pas à des zones créées ultérieurement. La suppression de cette disposition est donc un simple toilettage qui ne modifie absolument pas le sens de la loi. Je ne vois pas en quoi cela entraînerait des dérogations supplémentaires; elles résulteront de l'introduction de la notion de plan d'alignement qui sera forcément interprétée de manière restrictive. Car, bien qu'il ne soit pas mentionné dans la loi d'application sur l'aménagement du territoire, le plan d'alignement implique, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, une procédure d'adoption conforme au plan d'affectation du sol, c'est-à-dire une mise à l'enquête publique, un préavis du Conseil municipal, etc.

Objectivement, je crois que la disposition que vous voulez réintroduire était une simple disposition transitoire au moment où la loi avait été adoptée et qui, aujourd'hui, n'a plus de sens.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. A l'origine, ce projet de loi était quelque peu excessif. Aujourd'hui, votre commission d'aménagement est parvenue à trouver une solution qui respecte le principe de base d'interdire les constructions à 30 mètres de la forêt, tout en permettant d'introduire - avec une souplesse raisonnable et les garde-fous qui évitent que l'exception devienne la règle - un système acceptable.

Je rappelle que parmi les cas bizarres entourant cette loi se trouve celui où, quand une route sépare une parcelle de la forêt, les 30 mètres se calculent en traversant la route. Cela n'a évidemment aucun sens par rapport à la protection de la forêt elle-même, déjà limitée par la route.

Il y a un certain nombre de cas de ce genre où, de toute évidence, un plan d'alignement - qui est un instrument suffisamment strict et raisonnable - peut régler cette problématique.

Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à voter ce projet tel qu'il ressort des travaux de la commission d'aménagement.

Mis aux voix, ce projet de loi est adopté en premier débat par 45 oui contre 16 non et 4 abstentions.

Deuxième débat: Session 07 (avril 2005) - Séance 40 du 28.04.2005

La présidente. Nous prenons une pause de 15 minutes. Nous nous retrouverons à 10h10 et poursuivrons l'examen de ce projet de loi.

La séance est levée à 09h55.