République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1991
Proposition de motion de Mme et MM. Christo Ivanov, René Desbaillets, Guy Mettan, Michel Ducret, Pierre Conne, Fabiano Forte, Jacques Jeannerat, Ivan Slatkine, Patrick Lussi, Stéphane Florey, Marc Falquet, Christina Meissner, Gabriel Barrillier demandant la réalisation d'un P+R à proximité de la jonction autoroutière de Ferney sur le territoire de la commune du Grand-Saconnex et la mise en place d'une desserte en site propre par les transports en commun

Débat

Le président. Mesdames et Messieurs, nous traitons ce point en urgence. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) C'est un débat de catégorie II: trois minutes par groupe. La parole est au premier signataire, M. le député Christo Ivanov.

M. Christo Ivanov (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, la présente proposition de motion demande la réalisation d'un park and ride sur le territoire du Grand-Saconnex, à proximité de la jonction autoroutière de Ferney-Voltaire. Il s'agit là de réaliser un maillon essentiel et complémentaire aux deux projets de lois votés par ce parlement: le premier, sur l'extension et le prolongement du tram depuis la place des Nations, via le Grand-Saconnex et Ferney-Voltaire; le deuxième, sur la réalisation de la route des Nations, depuis l'OMC jusqu'à l'autoroute.

L'implantation d'un park and ride à cet endroit stratégique est capitale. Elle l'est d'abord pour les habitants du Grand-Saconnex, qui ne supportent plus ce trafic de transit de plus de 100 000 véhicules par jour. Il s'agit bien évidemment de diminuer ce trafic pendulaire, qu'il soit français mais surtout vaudois, en utilisant les transports en commun et en favorisant le transfert modal. L'autoroute de contournement est aujourd'hui plus que saturée. Et la traversée de la rade, ce n'est pas avant 2030. D'ici à dix ans, le trafic devrait quasiment doubler dans cette commune. L'implantation d'un P+R dans cet endroit stratégique permettra également aux visiteurs de Palexpo et de l'Arena d'en profiter.

Il s'agit donc d'anticiper ces continuelles augmentations de trafic, et c'est pour les raisons exposées, Mesdames et Messieurs les députés, que je vous demande de bien vouloir voter et accepter cette proposition de motion.

M. Gabriel Barrillier (R). Chers collègues, je pense que notre collègue Ivanov a bien expliqué les objectifs de cette proposition de motion. Effectivement, lorsque nous avons été amenés à voter différentes infrastructures dans le cadre du projet d'agglo, nous avons décidé, pour l'entrée de la rive droite de Genève, de financer la route des Nations et le tram. C'était une nouveauté. Je pense que cela pouvait mettre tout le monde d'accord, c'était objectif et cohérent.

Mais il fallait terminer le travail, c'est-à-dire voter également un P+R, qui est situé en Suisse, c'est vrai, mais il est situé en Suisse parce qu'il sera très utile notamment aux pendulaires vaudois. On a ainsi la chance de réaliser, dans un endroit stratégique de notre canton, des infrastructures de mobilité qui concernent les transports publics, le tram, le transport privé et le P+R. C'est une triangulation, si je peux m'exprimer ainsi, qui pourrait être également utilisée dans d'autres endroits stratégiques du canton.

Notre groupe accepte cette proposition de motion. Faut-il la renvoyer directement au Conseil d'Etat ou à la commission des travaux ou des transports ? Je n'ai pas de religion bien définie.

Le président. Je vous accorde, Monsieur le député, que vous n'avez pas de religion bien définie, mais il me faciliterait la vie de savoir laquelle des deux options vous choisissez.

M. Gabriel Barrillier. Il faut demander aux motionnaires !

Le président. La parole est à M. le député Mauro Poggia.

M. Mauro Poggia (MCG). Chers collègues, «agglo», «agglo»... Il y en a qui n'ont que ce mot-là à la bouche. «Engagez-vous - engagez-vous dans la région franco-valdo-genevoise»... Excusez-nous, mais le MCG ne marche pas. Nous sommes d'accord que la région est grande et qu'il faut la construire ensemble. Mais dans le mot «ensemble», il faut bien comprendre «tous ensemble», et pas «à sens unique». Les Français ne font rien, absolument rien. Vous avez vu sur le site de «La Tribune», à partir d'aujourd'hui les Français trouvent à redire sur votre merveilleux CEVA, qui a été plébiscité par la gauche comme par la droite, et ils ne mettront pas un centime.

C'est vrai qu'il faut faire des park and ride, mais il faut les faire là où il le faut, c'est-à-dire du côté français, et prévoir précisément des transports en commun pour que les pendulaires entrent dans le canton de Genève avec ces transports en commun. Or le MCG n'est pas d'accord que Genève finance encore et toujours un park and ride sur le territoire genevois: nous dirons non à la proposition qui nous est faite.

M. Olivier Norer (Ve). Je suis un peu estomaqué par la position du MCG qui nous fait penser que, s'il y a une solution à trouver, ce n'est visiblement pas en l'écoutant, car il n'apporte aucune réponse concrète aux problèmes de mobilité à Genève.

Nous, groupe des Verts, souhaitons effectivement pouvoir avancer sur ce dossier et renvoyer cette proposition à la commission des transports, afin que l'on puisse entendre les propositions en matière de P+R lancées par le canton. Nous irons de l'avant de cette manière.

Mme Loly Bolay (S). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion demande quelque chose qui existe déjà. En effet - j'habite la commune du Grand-Saconnex - il y a un parking à côté du Bois-Brûlé. On a refait la route maintenant. Ce parking devait à l'origine être un P+R; on devait ériger un arrêt de bus, pour la ligne F, je crois, qui va à Ferney. Or ce parking, qui a été construit, sert uniquement aux petits avions.

Quand on a parlé de ce parking, à l'époque - vous vous en souvenez, on a voté ici le crédit pour la route du Bois-Brûlé, qui incluait ce parking - on a dit que ce dernier devait servir aussi pour y mettre des petits avions, car ils allaient à la Blécherette puisqu'il n'y avait plus de place à Genève. Ils partaient tous les soirs - avec le bruit, évidemment, pour les riverains - et revenaient tous les matins à l'aéroport de Genève. Le problème est que, aujourd'hui, l'aéroport a énormément développé le trafic privé des petits avions. On le sait, on a plusieurs fois traité ici des doléances de riverains, que ce soit au Grand-Saconnex ou ailleurs, concernant ce trafic énorme de petits avions. Alors voilà... (Remarque.) Les petits avions... Enfin bref, vous me comprenez, tous ces Russes et Ukrainiens, tous ces gens qui ont beaucoup d'argent viennent à Genève en jets privés, que l'on gare là. Pourtant, ce parking était dédié justement à un P+R.

Cette proposition de motion, telle qu'elle est rédigée, ne sert à rien - excusez-moi de vous le dire - car ce parking existe bel et bien. La seule chose que l'on pourrait faire est de changer l'invite en demandant que, tel que le gouvernement s'est engagé ici le faire, ce parking soit effectivement un P+R, et non pas qu'il serve à garer les avions des Russes et autres qui viennent à Genève en jets privés. Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, ce que j'avais à dire.

M. Roberto Broggini (Ve). J'interviens très brièvement, Monsieur le président. Effectivement, je pense qu'il serait utile que cette proposition de motion soit renvoyée à la commission des transports, que l'on puisse faire le point sur les petits avions de Mme Bolay et examiner la situation, sachant que, dans le plan directeur cantonal, cette zone est appelée à être développée, avec des infrastructures ferroviaires, et que l'autoroute est à côté. Donc l'opportunité d'étudier ceci me semble tout à fait raisonnable.

En tant que président de la commission des transports, c'est très volontiers que je mettrai cet objet à l'ordre du jour de cette dernière, pour lui donner un accueil favorable ou pas, mais cela vaut le coup d'étudier cet objet.

Enfin, j'aimerais bien que l'on parle de «parc relais», et pas de «park and ride», anglicisme qui n'est peut-être pas de bon aloi dans ce parlement.

M. François Gillet (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, je ne parlerai pour ma part que de P+R, ce qui laisse toute liberté au niveau de la langue utilisée.

Je crois que cette problématique des P+R est fondamentale aujourd'hui dans notre canton, plus généralement dans notre agglomération. Il était prévu de ne pas débattre ce soir de cette question, donc il est effectivement important de pouvoir en discuter en commission des transports, non seulement pour examiner la zone concernée du Grand-Saconnex, mais également, plus généralement, pour reprendre l'état de la situation des P+R, qui constituent un élément fondamental de la gestion de la mobilité à Genève.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Eric Stauffer, à qui il reste deux minutes.

M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, il faudra un jour expliquer à certains groupes que les P+R doivent être construits en France. Il faudra expliquer un jour aux groupes parlementaires représentés dans ce Grand Conseil que les Français doivent construire chez eux et respecter ce que les Genevois font. J'en veux pour preuve, Mesdames et Messieurs, que, sur le site de la «Tribune de Genève», il y a une «news» fédérale qui a été publiée aujourd'hui à 11h50 - vous trouvez cela sur le site de «La Tribune». Je vous lis le titre: «CEVA: l'étude d'impact jugée incomplète par la France». (Remarque.) Alors imaginez-vous bien que nos amis français commencent à faire de l'écologie. Ils trouvent des défauts au projet du CEVA - qui va coûter un petit milliard, à nous autres Suisses... (Remarque.) ...enfin, un milliard et demi ! - et disent que l'étude d'impact doit être complétée par plusieurs points, à savoir «des éléments concernant les impacts sur la biodiversité».

On sait pourtant que la première décision des Français, quand on a voté le CEVA, a été de supprimer le parking au terminus et d'en faire des bureaux. Eh bien, Mesdames et Messieurs: les P+R, les Genevois en ont assez ! Pour le trafic des pendulaires, les Français construiront des P+R... chez eux ! Et nous mettrons les Transports publics genevois à disposition de nos amis français. Mais maintenant cela suffit de prendre les Genevois pour... (Remarque.) «Pour des vaches à lait», exactement ! Merci, cher collègue ! Cela suffit, la plaisanterie a assez duré ! M. Pierre-François Unger s'est déjà fait rouler dans la farine, pour la santé... (Rires.) Mais oui ! Mais c'est vrai ! ...pour la santé...

Le président. Il vous reste cinq secondes, Monsieur le député !

M. Eric Stauffer. Je vais conclure. ...pour la santé et pour toutes les mesures hospitalières. A Genève, cela suffit ! Aujourd'hui, il faut savoir dire non aux Français ! Il faut faire acte de fermeté. Les P+R, c'est: chez eux !

Des voix. Bravo !

M. Stéphane Florey (UDC). C'est avec attention que j'ai écouté les propos de Mme Bolay. Cette proposition de motion a précisément tout son sens. Vous l'avez dit, il y a déjà un emplacement prévu pour un P+R. Eh bien, cette proposition de motion permettra justement, en commission, de déterminer si l'emplacement qui était prévu reste d'actualité ou s'il faudra peut-être en trouver un autre, à proximité de l'autoroute.

Nous sommes donc favorables à un renvoi en commission, afin que cette proposition de motion y soit étudiée. Nous pensions plutôt à la commission des travaux, mais si celle des transports a votre préférence, pourquoi pas.

Une voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Jacques Jeannerat, à qui il reste une minute et demie.

M. Jacques Jeannerat (R). Oui, très rapidement. Pour une fois, je vais être d'accord avec M. Stauffer. Mais le seul P+R qui n'est justement pas destiné aux Français, mais aux Vaudois qui viennent travailler à Genève... (Remarque.) ...c'est celui du Grand-Saconnex. Alors je suis d'accord avec vous, Monsieur Stauffer, pour tous les autres P+R du canton, mais pas pour celui-ci. (Remarque.) Celui-ci n'est pas destiné aux frontaliers français. Il est destiné aux Vaudois. Donc cela a tout son sens. (Commentaires. Le président agite la cloche.)

Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, je pense que le Conseil d'Etat accepterait de toute façon volontiers cette proposition de motion, mais nous sommes aussi d'accord de l'étudier en commission. La volonté du Conseil d'Etat est d'avoir un vrai plan d'action P+R, en lien avec nos voisins français et vaudois. Nous avons dans ce périmètre... (Remarque.)

Des voix. Chut !

Mme Michèle Künzler. Ce périmètre n'est pas forcément le bon, mais on pourrait expliquer cela en commission. Peut-être qu'il faut le faire de l'autre côté de la frontière, de l'autre côté du tunnel de Ferney. Cependant, plusieurs projets sont en cours. Il y a déjà un parking P+R à cet endroit, mais il n'est simplement pas utilisé; il n'a aucun succès, il y a trois voitures... Certains P+R ne marchent pas, notamment sur la rive droite.

Il n'est pas exact de dire que les Français ne font rien: il y a tout un plan d'actions. Lundi prochain, je vais inaugurer un P+R à Bonneville, lequel est entièrement payé par les Français. Bientôt, on inaugurera le P+R de Veigy, qui est aussi financé uniquement par les Français. Et beaucoup de P+R sont en train de se mettre en place. Je me réjouis de vous présenter cela en commission, puisqu'il y a une grande méconnaissance quant aux infrastructures projetées par nos voisins.

Ils sont aussi en train de préparer un financement pour les trams qui vont passer la frontière - nous avons acheminé des trams pratiquement jusqu'à la frontière. Quatre projets de trams sont en cours. Lundi également, vous pouvez aller à Prévessin, où sera communiquée une information sur le tram qui va jusqu'à Saint-Genis. On a là beaucoup de projets en commun, qui sont cofinancés par les Français ! Ils ont parfois des difficultés à le faire, mais je vous garantis que, le jour où ils prennent une décision et qu'ils ont de l'argent pour une réalisation, ils seront peut-être plus rapides que nous, nous qui tergiversons si souvent ! (Remarque.)

Donc je vous engage, premièrement, à renvoyer la proposition de motion en commission: on vous y présentera le plan d'action. En ce qui concerne le P+R de Grand-Saconnex, pour celui-ci, on l'étudiera, et je ne sais pas si c'est la bonne solution de le réaliser à cet endroit. Quoi qu'il en soit les projets sont bien engagés tout autour de Genève.

Cependant, les P+R ne sont pas l'unique solution. En effet, je vous rappelle simplement que les mouvements aux frontières dépassent 550 000 entrées et sorties. Donc construire des P+R pour chaque voiture qui pourrait passer la frontière est économiquement insoutenable. C'est l'un des moyens d'agir, ce n'est pas le seul, mais on va entreprendre une action dans ce sens.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission des transports. Nous procédons au vote.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1991 à la commission des transports est adopté par 70 oui contre 15 non.