République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 10699-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat relatif à la ratification du contrat de prestations 2011-2014 entre l'Etat de Genève et l'entreprise des Transports publics genevois (TPG)
Rapport de majorité de M. François Gillet (PDC)
Rapport de minorité de M. Jacques Jeannerat (R)

Premier débat

M. François Gillet (PDC), rapporteur de majorité. Avant d'en venir au point de divergence entre la majorité et la minorité de la commission, permettez-moi quand même, en tant que rapporteur de majorité, de vous dresser un bref tableau des éléments essentiels du nouveau contrat de prestations des TPG pour les quatre années à venir.

Tout le monde est conscient - il faut le préciser - que nous avions un certain retard à rattraper en termes de transports publics à Genève. Ce retard a en partie été comblé, avec le précédent contrat de prestations, mais, avec le nouveau, les objectifs sont encore plus ambitieux, puisqu'il s'agit d'augmenter de 35% l'offre de transports publics au cours des quatre années à venir. Cette augmentation très importante de l'offre va surtout concerner le réseau de trams - vous le savez, de gros travaux sont déjà en cours, et nous y reviendrons tout à l'heure - mais elle va aussi se matérialiser par une amélioration générale des fréquences et des dessertes des réseaux de bus et de trolleybus sur l'ensemble du canton.

Sur ces objectifs généraux, l'ensemble de la commission s'est trouvée d'accord pour confirmer qu'il fallait absolument aller dans le sens d'un développement important de l'offre sur notre canton.

Mais encore faut-il se donner les moyens de ses ambitions. Et ces moyens, c'est d'abord une augmentation de l'ordre de 22% des charges d'exploitation des Transports publics genevois. Il s'agit également d'investissements très importants: de l'ordre de 400 millions sur les quatre années, 325 millions concernant le matériel roulant, ce qui représente la plus grosse part de ces investissements et l'essentiel est évidemment destiné aux nouveaux trams devant être commandés. Certains le sont d'ailleurs déjà.

Il faut relever également que cette augmentation très importante de l'offre - heureusement ! - ne s'accompagne pas d'une hausse équivalente des charges d'exploitation. C'est donc avec satisfaction une amélioration de la productivité de l'entreprise, qu'il faut saluer dans le cadre de ce nouveau contrat de prestations.

Alors, comment financer ce développement important de l'offre ? Un accord, qui date de quelques années déjà et qui a été confirmé récemment par une nouvelle résolution, veut que cet effort soit financé pour moitié par le produit des titres de transport et, pour l'autre moitié, par la contribution cantonale, si vous voulez par un effort des contribuables genevois. C'est le fameux ratio de 50/50 qui est mentionné à plusieurs reprises dans le rapport - et que vous aurez constaté si vous avez lu ce dernier.

L'ensemble des groupes - même ceux qui étaient très attachés à la parité 50/50 - ont été d'accord avec le fait que, dans cette période où l'effort doit être massif, l'on peut déroger de quelques pourcents aux 50% de contribution cantonale - nous en parlerons tout à l'heure. Quoi qu'il en soit, Mesdames et Messieurs les députés, nous ne dépasserons pas les 54%. Même avec le projet de loi tel qu'il vous est présenté aujourd'hui; nous resterons dans une fourchette admissible pour les différents groupes qui se sont exprimés sur ce point.

Alors, qu'en est-il de ce fameux sujet qui divise: la question de l'augmentation tarifaire prévue ? Le Conseil d'Etat et les Transports publics genevois se sont mis d'accord sur une hausse de l'ordre de 6%, en moyenne, des tarifs pour les quatre prochaines années.

Il faut être clair: cet effort supplémentaire demandé aux usagers se justifie sur les quatre ans du contrat de prestations en raison de l'augmentation importante de l'offre, d'autant que les tarifs n'ont pas bougé depuis très longtemps et qu'ils sont inférieurs à ceux d'autres villes ou cantons comparables à Genève.

Le problème, c'est l'opportunité d'appliquer cette hausse déjà maintenant, en fin d'année 2010 et pour l'année 2011. Et c'est sur ce point précis, Mesdames et Messieurs les députés, que la majorité de la commission a considéré qu'il était tout à fait malvenu, inapproprié, inopportun, d'augmenter tout de suite les tarifs des transports publics, alors que tout un chacun peut constater les difficultés rencontrées sur le réseau, les retards dans les horaires. Parfois même, certains bus ou trolleybus doivent faire descendre leurs passagers en raison des chantiers qui sont réalisés en ce moment dans le canton.

Dans ces circonstances, la majorité de la commission a considéré qu'il était juste et sage d'allouer un montant supplémentaire de 7 millions en 2011 pour permettre de reporter cette hausse d'un an. Ce report est, aux yeux de la majorité de la commission, fondamental car, à l'heure où chacun appelle de ses voeux un véritable transfert modal, où il faut inciter un certain nombre d'usagers, de la voiture notamment, à utiliser davantage les transports publics, ce serait donner un signal catastrophique que d'augmenter les tarifs des transports publics en ce moment, alors que les incidences négatives des chantiers sur le réseau sont manifestes.

C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, nous considérons que ces hausses de tarifs sont inopportunes; ceci d'autant plus qu'elles concernent - il faut le rappeler - environ 50 000 abonnés, mensuels ou annuels, et 100 000 personnes qui sont des usagers occasionnels des transports publics. Et ce seront surtout ces personnes qui seront touchées par ces hausses. Je le répète, ce serait leur donner un très mauvais signal, tout à fait contre-productif en cette période de perturbations importantes du réseau, alors même que nous voulons inciter les gens à utiliser davantage les transports publics.

C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous invitons à voter le projet de loi tel qu'il ressort des travaux de la commission, sans amendement, sachant malgré tout que la majorité de la commission ne conteste pas le bien-fondé d'une telle hausse sur l'ensemble de la période concernée.

Voilà, Monsieur le président, l'essentiel de ce que je voulais dire. Je me réserve évidemment la possibilité de reprendre la parole par la suite.

M. Jacques Jeannerat (R), rapporteur de minorité. Je vais poursuivre la discussion sur la part de 50% de frais de fonctionnement couverts par la subvention de l'Etat.

Deux mots sur l'historique. Il y a huit ans, une motion préconisait justement de fixer la part de l'Etat à 50% pour couvrir les frais de fonctionnement, et ce taux avait été appliqué pour le contrat de prestations d'alors. Il en été de même il y a quatre ans. Et, il y a quelques mois, nous avons aussi, par la résolution qui accompagnait le plan directeur des transports publics adopté par ce parlement, proposé de la maintenir à 50%.

Toutefois, dans le contrat de prestations 2011-2014, l'offre est en nette augmentation: plus 35%. Il s'agit donc d'une étape, que l'on peut qualifier «d'exceptionnelle», du développement du réseau, et celle-ci a un coût. Comme l'a indiqué François Gillet tout à l'heure, nous étions assez majoritairement d'accord en commission pour déroger à cette règle. Et le projet de loi initial, tel qu'il était présenté par le Conseil d'Etat, prévoyait de porter cette part à 53%.

Il faut préciser à cet égard que ce taux est le résultat d'une négociation sérieuse entre le Conseil d'Etat et le conseil d'administration et la direction des TPG: il a été demandé des efforts importants pour que ces derniers maîtrisent l'évolution de cette subvention cantonale, notamment de retarder le renouvellement des véhicules et, également, de supprimer certaines lignes des Proxibus. Et, à l'avenir, ils devront encore poursuivre leurs efforts pour améliorer la productivité.

Si l'offre est augmentée de 35%, c'est pour rendre les TPG plus performants... Comme je viens de le dire, cela a un coût ! Eh bien, la minorité estime que ce coût doit être partagé entre la collectivité et les usagers: ce n'est pas seulement à l'Etat - donc au travers de l'impôt perçu auprès de tous les habitants de ce canton - de faire l'effort ! Je rappelle qu'entre 2010 et 2011 la subvention va augmenter de 15 millions, c'est-à-dire 9,6%... En outre et comme vous l'avez indiqué, Monsieur Gillet, il n'y a pas eu d'augmentation de tarifs depuis 2004, alors que, depuis cette date, l'offre a augmenté de 25%.

Nous devons aujourd'hui répondre à une simple question ou, plutôt, à une double question: voulons-nous avoir les transports publics les meilleur marché que possible ou voulons-nous avoir les transports publics les plus performants possibles ?

Eh bien, la réponse se trouve dans le projet de loi tel qu'il a été déposé par le Conseil d'Etat ! C'est un projet de loi équilibré, qui comporte quatre éléments: l'effort demandé aux TPG, une augmentation tarifaire, une augmentation importante de la subvention et un développement du réseau. Je vous invite donc à voter le projet de loi tel qu'il a été déposé par le Conseil d'Etat. J'interviendrai tout à l'heure pour proposer un amendement à l'article 2.

M. Antoine Barde (L). Je souhaiterais tout d'abord remercier le rapporteur de majorité pour son rapport qui reflète avec exactitude nos travaux de commission et, plus particulièrement, le rapporteur de minorité qui a su mettre en évidence toute la schizophrénie de cette dernière.

Je tiens à rappeler que le contrat de prestations, qui a été signé entre les TPG et le Conseil d'Etat, a été établi sur la base du plan directeur des transports collectifs que nous avons voté le 28 mai dernier et que nous avons complété par une résolution - la R 609 - que nous avons, dans un premier temps, adoptée à l'unanimité de la commission des transports, puis à une large majorité de ce Grand Conseil.

L'une des invites de cette résolution demandait au Conseil d'Etat de viser un objectif de financement public des transports collectifs de l'ordre de 50% dans le budget 2011-2014 des TPG. Or, le contrat de prestations qui nous a été présenté proposait un ratio de contribution publique de l'ordre de 53%. Nous pouvons dès lors constater que la volonté clairement exprimée par cette assemblée n'a pas été respectée dans le contrat de prestations initialement prévu.

Après différentes discussions et présentations lors de nos travaux de commission, nous avons conclu qu'il semblait raisonnable d'accepter ce contrat tel quel quand bien même ce ratio était plus élevé que celui désiré par notre commission. En effet, nous avons été convaincus tant par les arguments du département que par ceux des TPG qui avaient aussi consenti beaucoup d'efforts pour ficeler le budget.

Il faut également souligner que l'offre en augmentation de 35% est un point positif. Par contre, nous regrettons qu'un débat n'ait pas été proposé avec les communes pour la réintroduction des Proxibus.

Pour arriver à maîtriser les coûts, l'une des voies choisies a été d'augmenter le prix du billet. Celui-ci n'ayant pas subi d'augmentation depuis 2004, il semblait raisonnable de l'augmenter de 6,56%. Et je noterai au passage que l'offre, quant à elle, a largement augmenté en six ans: plus de 30%.

Une majorité de la commission des transports a décidé de voter un amendement repoussant l'augmentation du prix du billet d'un an, ce qui revient à attribuer 7 millions de plus pour l'année 2011 et, ainsi, contribue à faire augmenter le ratio des indemnités publiques.

Vous vous demandez sans doute pourquoi nous ne souhaitons pas reporter l'augmentation du prix du billet d'un an... Eh bien, Mesdames et Messieurs les députés, parce que l'argument selon lequel «ce n'est pas le bon moment» ne nous convient pas ! D'ailleurs, existe-t-il un bon moment pour augmenter le prix du billet ? Ce genre de choix est toujours déplaisant, et si l'offre des TPG continue à augmenter, ce ne sera jamais le moment !

J'ai entendu les arguments de M. Gillet... Eh bien, augmenter le prix du billet ordinaire encouragerait les utilisateurs à prendre un abonnement, ce qui est aussi l'un des objectifs: avoir plus d'abonnés que de personnes qui utilisent le billet ordinaire. Et puis, une des raisons qui nous pousse, nous députés du PLR, à refuser le report de cette augmentation de prix, c'est qu'introduire un doigt de rigueur dans la gestion de l'Etat ne nous semble pas être une chose excessive, Monsieur le président.

Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, nous voterons l'entrée en matière de ce projet de loi, tout en nous réservant d'intervenir en deuxième débat pour présenter un amendement le modifiant.

Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). Nous avons entendu l'excellent rapporteur de majorité ainsi que le non moins excellent rapporteur de minorité. Les deux ont fourni des chiffres, donné des détails tout à fait exacts, précis, respectueux des travaux de la commission.

Il n'en est pas moins qu'une décision a été prise à la fin de nos travaux de commission: une majorité s'est dégagée pour une hausse du prix du billet, certes, tenant compte de la réelle augmentation de la qualité des prestations, mais pas en 2011 ! Cette hausse n'est pas du tout en regard avec la réalité des prestations qui seront encore proposées en 2011: la population ne comprendrait pas une telle mesure, et il serait particulièrement maladroit de l'appliquer alors que les améliorations promises en matière de confort et de qualité ne sont pas encore optimales.

Monsieur Barde, vous avez raison: ce n'est jamais le moment... Mais c'est encore moins le moment maintenant, alors que beaucoup de chantiers sont en cours, qui provoquent des blocages, etc. Lorsque les prestations seront meilleures, lorsque la population appréciera les améliorations apportées telles que des cadences plus rapprochées, le moment sera plus choisi pour appliquer une hausse des tarifs. Quand tel sera le cas, nous la défendrons aussi, mais pas aujourd'hui.

C'est la raison pour laquelle le parti démocrate-chrétien vous invite à soutenir le rapport de majorité. (Applaudissements.)

Mme Patricia Läser (R). Le projet de loi 10699 du Conseil d'Etat avait reçu l'aval de tous. Des concessions avaient été faites de part et d'autre. Pour nous, les radicaux, il était important de maintenir la part du taux de couverture à 50/50. Si nous avons accepté de passer à 53%, c'est uniquement en raison de l'augmentation de l'offre d'environ 35% sur quatre ans. Mais, surtout, l'équilibre fragile de ce contrat de prestations imposait d'avoir la sagesse d'accepter ce projet de loi tel que proposé par le Conseil d'Etat.

Toutefois, l'amendement présenté par les Verts en fin de discussion en commission et accepté par la majorité a rompu cet équilibre fragile, et, de ce fait, le consensus pour accepter ce projet de loi, car, je le répète - cela a été dit, redit et expliqué - la hausse des tarifs est inévitable pour pouvoir maintenir le développement de l'offre. D'autant qu'en 2011 les TPG proposeront déjà 9% d'offres supplémentaires. Qualitativement et quantitativement, nous avançons de manière adéquate, et nous devons absolument mettre en oeuvre tous les moyens pour que ce réseau fonctionne, et fonctionne bien, ce qui passe par une hausse des tarifs.

Le Conseil d'Etat et ce parlement souhaitent développer les transports publics et avancer tous ensemble. C'est la raison pour laquelle le parti radical vous demande de revenir au projet de loi initial du Conseil d'Etat en acceptant l'amendement que proposera le rapporteur de minorité, un peu plus tard, à l'article 2.

Une fois encore, nous pouvons parvenir à un équilibre fragile, mais possible, si nous voulons maintenir les objectifs globaux des Transports publics genevois.

M. Roger Deneys (S). Les socialistes soutiendront, bien entendu, le projet de loi tel qu'il est issu des travaux de commission. C'est dire que nous nous félicitons du développement de l'offre des transports publics telle qu'annoncée, notamment concernant le développement du réseau de trams, le développement des lignes urbaines et, aussi, périurbaines. Nous savons que le but des transports publics est de développer l'attractivité pour les personnes qui habitent à l'extérieur de la ville, et, pour cela, il est fondamental que le réseau des TPG soit plus étendu. Pour ces raisons, que vous partagez certainement, nous soutiendrons ce projet de loi.

Maintenant, s'agissant du problème principal qui nous occupe, à savoir l'augmentation des tarifs des TPG, je dirai, à l'inverse de M. Barde, que c'est toujours le bon moment, mais qu'il faut bien faire attention de ne pas choisir le mauvais moment... (Rires.)

En l'occurrence, les socialistes considèrent plus particulièrement deux sujets. D'une part, la question du ratio 50/50 entre le prix du ticket de l'abonnement payé par l'usager et le financement public sous forme de subvention. Comme l'a relevé le Conseil d'Etat dans l'exposé des motifs du projet de loi, et, aussi, Coordination transports et déplacements, ce ratio fait l'objet d'une sorte de dogme. Il est effectivement extrêmement difficile de coller à ce taux année après année, dans la mesure où il y a des variations en termes d'investissements et en termes de recettes. Il est tout à fait logique, lorsque les TPG achètent de nombreux nouveaux trams, que la part du financement public soit supérieure. Il peut aussi se trouver qu'elle soit inférieure dans quelques années. Il ne faut donc pas être dogmatique par rapport à ce ratio de 50/50: il faut avoir une vision pragmatique de la situation.

L'autre problème concerne le développement de l'offre. Le développement annoncé est de 9% - certes, cet objectif est fixé - mais nous pouvons nous demander s'il sera concrétisé du jour au lendemain dès le 1er janvier 2011. Un usager même occasionnel des TPG peut bien imaginer qu'il y a fort peu de chances que cette offre puisse augmenter de 9% du jour au lendemain.

Et évidemment que la situation en termes de chantiers que nous connaissons au centre-ville est l'une des raisons pour lesquelles il est extrêmement difficile de prétendre que l'offre va augmenter. Certes, elle va augmenter sur certaines lignes, de nouveaux trams vont remplacer les anciens, mais, pour l'usager qui utilise déjà une ligne particulière tous les jours, l'année 2011 s'annonce malheureusement encore relativement chaotique. Il est certain que le fait d'augmenter les tarifs, surtout des tickets individuels, rendra le transport public moins attractif: d'une certaine manière, ce sera même dissuasif. On pourrait imaginer que certains usagers des transports publics, exaspérés par la situation en ville, décident de reprendre leur voiture. Certains députés extrémistes trouveront peut-être cela intéressant, mais, en fait, la situation risquerait d'empirer. Il faut donc éviter à tout prix et rapidement une éventuelle fuite des usagers des TPG vers la voiture, la mobilité individuelle prenant trop de place.

Et puis, Coordination transports et déplacements l'a relevé, l'un des problèmes soulevés par cette hausse des tarifs, c'est que, en réalité, le prix du transport public a augmenté de 30% en trente ans par rapport à celui de la mobilité individuelle. Si l'on augmente seulement les tarifs des transports publics sans augmenter ceux du stationnement, les transports publics deviennent forcément moins attractifs. C'est un élément important ! Il faut faire attention de ne pas accroître davantage ce différentiel en faveur de la voiture, car cela va à l'encontre de toutes les politiques publiques prônées depuis quelques années. En fait, augmenter la part des transports publics, c'est essentiellement dégager de la place pour les voitures qui vous sont si chères.

Mesdames et Messieurs les députés, nous vous invitons à soutenir ce projet de loi et à prévoir d'ores et déjà une augmentation des tarifs lorsque la réalité de l'augmentation de l'offre sera perçue.

M. Roger Golay (MCG). Les députés du groupe MCG n'ont pas la même position que la plupart des groupes réunis dans cette enceinte. Nous sommes, au MCG, favorables au maintien des Proxibus, car nous estimons que c'est un service public, au même titre que les cars de la Poste desservent certains villages de notre pays. Et cela a un coût ! Certes élevé, mais si nous commençons à fermer les lignes du réseau sous prétexte que le nombre des usagers n'est pas suffisant, c'est faire le contraire de ce que le service public doit offrir comme prestations à la population ! C'est comme si Swisscom ne voulait plus desservir les petits villages de montagne parce qu'ils ne comptent pas assez de clients. Nous estimons par conséquent que les Proxibus doivent être maintenus sous la forme actuelle.

Par rapport à ce projet de loi, nous sommes aussi favorables à différer l'augmentation tarifaire pour 2012, puisque le réseau des transports publics est actuellement perturbé par tous les travaux en cours. La vitesse commerciale - 18 km/h - ne peut plus être respectée, les bouchons empêchant de tenir les horaires. Il faut donc prendre en considération que les usagers ne bénéficient pas des conditions optimales au niveau des transports publics et leur accorder une année de répit avant d'augmenter les tarifs.

Enfin, troisième point, l'augmentation des tarifs en raison du développement du réseau des transports publics... Le MCG a toujours soutenu ce développement, bien que la complémentarité avec la circulation privée fasse souvent défaut, alors même que notre constitution - je vous le rappelle à chaque fois - préconise le développement de tous les modes de transport. Aujourd'hui, la priorité est donnée aux transports publics, ce qui gêne la circulation commerciale, ce qui a un coût.

Ensuite, on nous explique qu'il faut augmenter les tarifs parce que l'on développe le réseau des transports publics... Bien ! Mais, à ce moment-là, lorsqu'une compagnie aérienne développe une nouvelle ligne, il faudrait qu'elle augmente le prix des billets des autres destinations pour couvrir les coûts de la nouvelle ! Cela nous paraît assez invraisemblable ! Nous, nous partons du principe que si le réseau augmente, la clientèle augmentera aussi automatiquement, ce qui devrait couvrir les frais du développement, bien que nous soyons un peu coincés par le ratio de 50/50. A mon avis, lorsque la situation est exceptionnelle, nous devrions pouvoir déroger à ce ratio.

Au MCG, une chose nous tient très à coeur - et qui n'a pas été réinstaurée dans le contrat de prestations - je veux parler de la fameuse ligne 17 allant des Palettes à Pont-Rouge, ligne qui a été supprimée. Cela cause d'énormes difficultés aux Lancéens, qui ont pourtant investi quasiment 6 millions dans cette affaire, puisqu'ils en ont profité pour refaire le réseau des collecteurs en même temps. Une dépense de 6 millions, sans compter toutes les infrastructures sur place ! L'avenue des Communes-Réunies a été largement sacrifiée pour un site propre. La circulation ne se fait plus normalement. Vous le savez et pouvez le constater vous-mêmes: lorsque vous prenez la route du Grand-Lancy en direction de l'avenue des Communes-Réunies, il y a une interdiction d'obliquer à gauche, ce qui fait que toute la circulation doit passer par les petits chemins de Lancy, côté place du 1er août, etc., pour pouvoir revenir sur les Palettes. C'est un problème ! (Remarque de M. Roger Deneys.) Non, ce n'est pas hors sujet ! (L'orateur est interpellé M. Roger Deneys.) Oui, je suis Lancéen, je ne le cache pas ! Je défends tous les habitants du canton: les Lancéens en font partie, et je prends aussi leur défense ! Contrairement à vous, Monsieur Deneys !

Quoi qu'il en soit, nous exigeons que soit remise en service la ligne 17. Cette prestation a été supprimée, et ce n'est pas supportable pour la commune de Lancy et pour les Lancéens. Nous profiterons donc de rediscuter ce contrat de prestations pour obliger les TPG à remettre sur pied la ligne 17, soit par le tram soit par des navettes.

Le président. Merci, Monsieur le député. Le Bureau a décidé de clore la liste des intervenants. Monsieur Antoine Bertschy, vous avez la parole.

M. Antoine Bertschy (UDC). Merci, Monsieur le président. Nous sommes obligés de revenir sur le ratio de 50% de subventions et 50% d'abonnements ou autres recettes récoltées par les TPG.

Nous sommes aussi obligés de revenir à la fameuse résolution 609, qui a été votée par ce parlement le 27 mai dernier - c'est-à-dire il y a six mois - et qui n'a suscité que deux oppositions. Cette résolution demandait, je cite: «L'objectif d'un financement public des transports collectifs de l'ordre de 50% doit être respecté dans le budget du contrat de prestations des TPG 2011-2014.» Non seulement la quasi-totalité du parlement l'a votée, mais, en plus, tous les groupes politiques l'ont signée: Mme Chatelain, deuxième vice-présidente de notre Grand Conseil l'a signée; M. Zbinden, député Vert l'a signée; M. Gillet, député PDC l'a signée ! Evidemment, les personnes soucieuses de la politique financière, le PLR et l'UDC, l'ont signée, et M. Sauty, qui devrait être membre du Bureau de ce Grand Conseil... (Rires.) ...l'a aussi signée.

On nous explique que l'offre des TPG ne va pas comporter de nouveautés l'année prochaine et qu'il faut reporter l'augmentation des tarifs pour cette raison: c'est faux ! C'est absolument faux ! La ligne 18 va être introduite, c'est bien une nouvelle prestation !

Vous indiquez qu'augmenter les tarifs maintenant représenterait un signal catastrophique. Tel n'est pas le cas: ce serait catastrophique, psychologiquement parlant, de les augmenter au moment où sera introduite la nouvelle ligne de trams, car les usagers y verront un lien de cause à effet: à nouvelle ligne de tram, augmentation du prix du billet ! Comment ferez-vous, la prochaine fois, pour «vendre» à la population la création d'une nouvelle ligne de tram ? Non seulement vous susciterez des milliers d'oppositions, mais, en plus, le peuple, s'il doit voter, la refusera parce qu'il ne voudra pas que le prix du billet augmente ! C'est une aberration d'augmenter le prix du billet au moment où une nouvelle ligne est introduite ! Nous devons être clairs et rigoureux financièrement: il faut procéder à cette hausse tout de suite ! Pour quelle raison ? Pour respecter les engagements que vous avez pris !

Bien sûr, vous pouvez changer de politique tous les six mois, c'est votre affaire, mais vous n'êtes plus crédibles ! Un jour vous dites que vous choisissez la solution A, et six mois après vous choisissez la solution B ! Non, Mesdames et Messieurs: vous devez suivre la politique en laquelle vous vous êtes engagés, en appliquant les décisions que vous avez votées. Il faut revenir à la situation initiale, c'est-à-dire celle qui était proposée par le Conseil d'Etat et par les TPG, et qui était soutenue par les personnes de bon sens !

Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)

Mme Emilie Flamand (Ve). Je ne vais pas vous surprendre en disant que les Verts soutiendront ce contrat de prestations. Certes, la question de la hausse des tarifs a été très discutée, mais il comporte de nombreux autres aspects très positifs, qui ont d'ailleurs été relevés dans l'excellent rapport de majorité.

D'abord, une progression de l'offre de 35% sur quatre ans. Des nouvelles lignes de trams: le TCOB, le TCMC qui desservira le Cern avec la Direttissima, mais aussi une meilleure desserte des zones industrielles, un développement des trolleybus et toutes sortes d'autres nouveautés, qui vont véritablement améliorer notre réseau de transports publics et le rendre plus concurrentiel par rapport au trafic privé et provoquer, enfin, ce report modal que nous espérons tous, je crois.

J'en viens aux points qui posent problème. Pour les Proxibus, le département l'a indiqué, des solutions pourront être trouvées. Elles seront discutées avec les communes, et ce point peut être traité d'ici à quelques semaines. Il n'est donc pas nécessaire de le régler aujourd'hui.

Quant à la ligne 17, j'exprimerai ma surprise par rapport à l'exigence soudaine du MCG, qui l'a mentionnée, certes, une ou deux fois en commission, mais qui n'a fait aucune proposition concrète à ce sujet et qui n'a pas déposé de résolution que nous aurions pu voter aujourd'hui. Nous nous retrouvons un peu empruntés, car il n'est pas possible d'amender le projet de loi du contrat de prestations pour intégrer un élément concernant la ligne 17. Il faudrait faire des propositions un peu plus en amont pour pouvoir intégrer un tel élément.

Pour en venir aux tarifs, tout le monde l'a indiqué, me semble-t-il, c'est le plus mauvais moment pour procéder à leur augmentation ! Je ne comprends du reste pas très bien la logique de M. Bertschy, qui nous a expliqué que ce n'est pas le bon moment de procéder à une hausse des tarifs lorsqu'une nouvelle prestation est offerte... Il est bien évident qu'une hausse des tarifs ne sera jamais acceptée avec joie et bonheur par la population, mais je pense toutefois que celle-ci comprendrait mieux que les prix augmentent lorsqu'une nouvelle ligne de trams est proposée - voire deux, si l'on compte la Direttissima, qui desservira le Cern - car s'agit d'une amélioration nette et visible des prestations.

Or, actuellement - les personnes qui utilisent les transports publics le savent - tout est bloqué au centre-ville à cause des différents chantiers, et les bus n'avancent pas. La grogne est réelle: les usagers se plaignent de tous ces retards et sont irrités à la pensée que les TPG veulent en plus augmenter leurs tarifs. Cette position me paraît logique, et c'est d'ailleurs à cette position que la majorité de la commission s'est ralliée pour repousser d'une année cette hausse.

J'aimerais répondre à Mme Läser, qui évoquait le sens du compromis et le consensus. Des compromis, nous en avons fait également ! Nous, les Verts, nous aurions préféré qu'aucune hausse des tarifs ne soit envisagée pour les quatre années du contrat de prestations. Mais, constatant qu'il n'y avait pas de majorité pour défendre cette position, nous sommes revenus à une solution plus raisonnable, peut-être, ou consensuelle, c'est-à-dire repousser d'une année cette hausse.

Pour finir, j'en viens à la question des 50/50. La résolution qui accompagnait le plan directeur des transports collectifs préconisait un objectif vers lequel il faut tendre, et non un carcan rigide à respecter absolument. Ce ratio de 50/50 ne doit pas être suivi au pourcent près.

J'aimerais quand même rappeler aux personnes qui nous écoutent et qui pourraient avoir l'impression que, avec cet amendement, la part de l'Etat va passer à 80% et celle des TPG à 20%, que ce n'est pas le cas. Nous restons très proches de l'objectif fixé, puisque nous arriverons sans doute à 54/46. Je le répète, le ratio de 50/50 reste un principe, un objectif vers lequel il faut tendre.

Quoi qu'il en soit, en cette période de très fort développement du réseau - comme jamais il ne l'a été, et en quelques années seulement - il est normal que l'Etat fasse des investissements et mette un peu plus du sien. D'ailleurs, l'augmentation de l'offre qui a été développée ces dernières années a apporté une augmentation de la fréquentation; et le développement de l'offre qui aura lieu ces prochaines années apportera également plus de fréquentation. Nous pouvons donc imaginer que d'ici huit à douze ans, lorsque le réseau sera développé et à maturité, la répartition des charges pourra revenir à 50/50. Si des villes comme Zurich ou Berne, évoquées par certains, peuvent pratiquer le taux de 50/50, c'est justement parce que leur réseau de transports publics est largement développé depuis longtemps et qu'il est arrivé à maturité.

Je vous remercie donc de ne pas vous arrêter à ces 50% dogmatiques... (Exclamations.) ...de bien réfléchir à l'intérêt de la population, à l'intérêt des transports publics et de l'ensemble de la mobilité, car, je vous le rappelle, si le report modal se fait, la fluidité du trafic privé n'en sera que meilleure. Par conséquent, et dans l'objectif d'une meilleure complémentarité qui vous tient tellement à coeur, je vous remercie d'accepter ce contrat de prestations tel qu'il est issu des travaux de la commission. (Applaudissements.)

M. Eric Stauffer (MCG). Force est de constater qu'entre augmentation des tarifs au jour zéro ou au jour trois cent soixante-cinq, Proxibus ou pas, les choses paraissent passablement confuses... Visiblement, ce projet de loi n'est pas prêt à être traité en plénière. Je demande donc formellement son renvoi à la commission des transports.

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission. Seuls les deux rapporteurs et le Conseil d'Etat peuvent s'exprimer avant le vote. Monsieur Gillet, vous avez la parole.

M. François Gillet (PDC), rapporteur de majorité. A l'argument utilisé par M. Stauffer pour justifier le renvoi de ce projet de loi en commission, laissant entendre que les choses ne sont pas claires, je répondrai que tout était parfaitement clair pour les commissaires de la commission des transports: ils ont voté en toute connaissance de cause, notamment sur le principe d'une résolution sur les Proxibus.

A cet égard, j'aimerais rappeler que l'ensemble de la commission a considéré qu'il y avait matière à discuter en dehors du cadre du contrat de prestations, afin de trouver une solution pour la réintroduction des lignes de Proxibus avec les communes. Il est dommage que les auteurs de la résolution 643 aient voulu «en rajouter une couche» - au départ, cette résolution se concentrait sur les Proxibus - et qu'elle n'ait pas pu passer la rampe au niveau des urgences.

Je ne vois pas l'utilité, à ce stade, de renvoyer cet objet en commission, car les choses sont claires, en tout cas au niveau de l'essentiel du contrat de prestations, au niveau de la position des groupes par rapport aux Proxibus.

En ce qui concerne l'argument concernant la ligne 17, je pense que dans le cadre d'une résolution un certain nombre de choses pouvaient être introduites; mais on ne peut pas non plus, pour chaque commune et pour chaque ligne, forcément satisfaire tout le monde dans un contrat de prestations générales.

Au nom de la majorité, je pense pouvoir affirmer que le renvoi de cet objet en commission n'est pas une bonne idée, et personnellement, en tant que rapporteur, je m'y opposerai.

M. Jacques Jeannerat (R), rapporteur de minorité. Comme je le disais dans ma première intervention, avec l'amendement qui a été discuté et voté en commission, l'équilibre fragile que j'évoquais tout à l'heure a été rompu.

En ce qui me concerne, j'aimerais savoir quelle est la position de la cheffe du département, la position du Conseil d'Etat... Le Conseil d'Etat est-il fidèle à la ligne qu'il s'est fixée ? Va-t-il rester fidèle au résultat des nombreuses négociations qu'il a entreprises avec la direction et avec le conseil d'administration des TPG ou pas ? Autrement dit, Madame la conseillère d'Etat, allez-vous demander à ce parlement de revenir au projet de loi initial ou pas ? Allez-vous appeler à voter mon amendement à l'article 2 ou pas ?

Si tel n'est pas le cas, j'invite le parlement à renvoyer ce projet de loi en commission, car il faudra rediscuter de cet accord fragile, qui porte sur quatre points. Je les rappelle: l'augmentation tarifaire, l'augmentation des subventions, les efforts entrepris par les TPG et le développement du réseau.

Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Les choses sont relativement simples, puisque, au fond, deux options s'offrent à vous: celle du Conseil d'Etat, qui a déposé un projet équilibré tenant compte, tout d'abord, du plan directeur des transports collectifs, lequel préconise une augmentation de l'offre de 39%, puis des différents souhaits exprimés par la commission: s'approcher du ratio de 50% et augmenter les lignes dans les zones industrielles. Or, pour arriver à un projet équilibré, il a fallu réduire l'offre s'agissant des Proxibus. Par conséquent, ce renvoi en commission est tout sauf judicieux.

Ce que j'ai dit en commission par rapport au Proxibus est clair: nous organiserons des rencontres avec les communes pour discuter de l'introduction de mesures ciblées dans chaque commune ou groupement de communes. Cette question doit être examinée à part et figurer dans un contrat de prestations spécifique; les communes auront leur mot à dire et pourront apporter leur contribution. Mais, je le répète, cette question doit être traitée à part.

Je vous invite fermement à ne pas renvoyer cet objet en commission, car les choses sont claires: la décision est entre vos mains.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10699 à la commission des transports est adopté par 55 oui contre 39 non et 1 abstention.