République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 9442-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Christian Brunier, Anne Mahrer, Ariane Wisard-Blum, Sami Kanaan, Françoise Schenk-Gottret, Loly Bolay, Pierre Guérini, Sylvia Leuenberger modifiant la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière (H 1 05) (Extension des zones bleues de stationnement)
Rapport de majorité de M. Ivan Slatkine (L)
Rapport de minorité de M. Sami Kanaan (S)
P 1487-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier la pétition concernant les "voitures ventouses"
Rapport de M. Jean-Marc Odier (R)
M 1660
Proposition de motion de MM. Jean-Marc Odier, Ivan Slatkine, Alain Meylan, Michel Ducret pour promouvoir l'avancement de la politique des parkings relais (P+R) en synergie avec les transports publics

Premier débat

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Le Grand Conseil a instauré les zones bleues afin de lutter contre le trafic pendulaire et contre les «voitures ventouses». Cette mesure entre dans la stratégie du transfert modal et de l'amélioration de la fluidité au centre-ville. Ce concept rencontre globalement un succès certain, mais le problème est de plus en plus repoussé aux zones voisines, dans les communes suburbaines, leurs quartiers étant à leur tour envahis de «voitures ventouses», c'est-à-dire de voitures de pendulaires stationnant en longue durée. A cet égard, le courrier de la commune de Prégny-Chambésy qui soutient le projet de loi est significatif. Est tout autant significative la pétition 1487 sur les «voitures ventouses». Si l'on se réfère à la loi d'application sur la circulation routière et à son article 7A sur les zones de parcage - et plus particulièrement à l'article 7A de son règlement relatif aux secteurs - on lit, aux alinéas 1 et 2 : «Dans les secteurs délimités par le plan annexé, la réglementation locale du trafic limite la durée de parcage des véhicules automobiles sur la voie publique au moins du lundi au vendredi et de 9h à 17h, à l'exception des voitures automobiles des résidents. A l'extérieur des secteurs délimités par le plan annexé, une réglementation locale du trafic édictée par le département en collaboration avec les communes concernées peut limiter la durée de parcage des voitures sur la voie publique, à l'exception de celles des résidents.» Ainsi, on constate que le département concerné - il ne s'agit même pas du Conseil d'Etat - peut initier ou empêcher la création de zones bleues sans le moindre critère ni la moindre obligation de tenir compte du préavis de la commune concernée, et sans la moindre voie de recours. S'il est parfaitement logique que le département aie le dernier mot en la matière - afin d'assurer la cohérence du système - il est surprenant de constater que l'avis de la commune puisse être complètement ignoré et qu'il n'y ait pas de critère pour l'acceptation ou le refus de la création de nouvelles zones bleues.

Le propre de ce projet de loi était d'introduire une plus grande transparence dans la procédure de décision de création ou de suppression de zones bleues, associée à un processus de concertation avec les communes indispensable à nos yeux. Je laisse volontiers de côté le peu de cohérence de la majorité avec ses propres idées en matière d'autonomie communale et de concertation en matière de politique des transports.

Enfin, les auditions ont montré de façon évidente que la situation actuelle engendrait une disparité qui n'avait pas de sens entre les habitants de la ville et ceux des autres communes urbaines. C'est pourquoi la minorité vous propose - plutôt qu'un rejet du projet de loi - un amendement qui remplace le projet déposé. Cet amendement se trouve à la page 29 du rapport et consiste en un nouvel alinéa de l'article 7 de la loi d'application sur la circulation routière. Cet amendement - je n'ai pas peur de le répéter - donne une meilleure légitimité au système en introduisant dans la loi une garantie aux communes d'une plus grande transparence et d'une plus grande influence sur le processus, tout en maintenant le rôle décisionnel de l'Etat pour assurer la cohérence du système.

M. Ivan Slatkine (L). Je n'ai pas grand-chose à ajouter à mon rapport, si ce n'est que, suite aux propos tenus par Mme Schenk-Gottret, il faut noter que la problématique du parking dans notre canton est générale et dépasse le cadre des zones bleues - ou zones macaron. On s'est rendu compte qu'il y a un problème évident au niveau des P+R et qu'il s'agit aujourd'hui de trouver le moyen d'élaborer le troisième pilier de la politique de la mobilité. Il y a les transports publics, la hiérarchisation du réseau routier et le troisième pilier est un projet global, un plan directeur du stationnement. La commission des transports s'est penchée sur un premier projet qui n'a pas trouvé de majorité et qui a été retiré par la suite, mais l'ensemble de nos travaux nous montre qu'il y a nécessité d'avoir un projet global traitant du stationnement.

Le projet de loi proposé par le groupe socialiste et quelques Verts ne traite qu'une petite partie de cette problématique et ce n'est pas de cette manière que l'on résoudra la problématique globale du stationnement. Il faut, comme l'a fait la commission, ne pas entrer en matière sur ce projet de loi et travailler sur un projet plus global qui trouvera une unanimité, ou du moins une majorité, dans ce Grand Conseil.

M. Christian Brunier (S). Ce projet de la loi a la vocation d'être très pragmatique. Je vous rappelle qu'il y a quelques années, ce parlement constatait très majoritairement une chose tout à fait juste: un grand nombre de voitures provenant de France voisine, du canton de Vaud ou des communes éloignées du centre-ville descendent en ville et provoquent des engorgements pendant toute la journée. Ce sont ces «voitures ventouses» qui empêchent aussi bien les habitants que les gens qui veulent, par exemple, fréquenter les commerces ou se rendre dans les quartiers.

Ce parlement, dans sa grande sagesse - c'est le cas de temps en temps - avait adopté une loi pour développer des zones bleues permettant aux habitants de laisser leur voiture et de prendre le bus pour aller travailler. Ces zones bleues ne sont pas qu'une obligation de bouger sa voiture, elles empêchent les gens de laisser leur voiture toute la journée pour pas grand-chose au centre-ville et permettent donc aux autres qui fréquentent les commerces - ou qui ont une vie sociale dans un quartier - de venir pendant un moment et de repartir ensuite. Tout cela s'accompagne de constructions de parkings d'échange et d'un développement des transports publics.

Une politique cohérente avait été mise en place. Elle a connu quelques problèmes au départ, car des quartiers avaient octroyé plus de macarons que de places, mais cela s'est régulé peu à peu, grâce à un contrôle, et aujourd'hui les zones bleues sont globalement un succès dans les quartiers. Je pense qu'aucun parti ici représenté aurait envie de revenir en arrière.

Comme dans tout système, il y a parfois des dérives et la problématique qui était constatée au centre-ville s'est déplacée aux limites des zones bleues. Les gens qui se parquaient à l'époque au centre-ville ont maintenant tendance à se parquer, par exemple, dans les Trois-Chênes, au Grand-Sacconnex, à Pregny-Chambésy, ou à Meyrin, etc. Il faut développer ces zones bleues si l'on veut résoudre le problème un peu plus globalement. Et d'ailleurs, des communes à majorité de droite sont venues dire qu'elles soutenaient ce principe. Pregny-Chambésy n'est pas une commune de gauche, les Trois-Chênes non plus, ni Meyrin. Elles ont dit qu'elles connaissaient aujourd'hui cette problématique et qu'il fallait trouver une solution.

M. Slatkine a raison sur un point. Ce projet de loi ne résout pas tous les problèmes de stationnement, mais on n'a jamais eu la prétention de le faire et aucun projet - aucun projet ! - ne résoudra les problèmes de stationnement à Genève. Néanmoins, c'est un pas dans la bonne direction pour pousser au transfert modal... eh oui, quand on vient de loin travailler au centre-ville de Genève ou dans les communes suburbaines, le but est de parquer sa voiture dans un parking d'échange et de prendre les transports publics. Il faut développer les parkings d'échange dans les environs de la ville mais aussi plus loin. Je sais à ce propos que des projets pour développer des parkings d'échange en France voisine sont à l'étude et cela est un bon plan, j'espère que l'on fera la même chose au canton de Vaud.

Il faut laisser les communes en bordure de ville développer les zones bleues pour ne pas être envahies par les «voitures ventouses» comme c'est le cas dans ces quartiers. Ce projet de loi n'a que cette prétention, peut-être minimaliste: il permet à ces quartiers de vivre un peu plus correctement, il permet aux habitants de laisser leur voiture et aux gens qui fréquentent les commerces, de s'y rendre sans problème.

Je vous en prie, ce projet va dans le bon sens. Ne faisons pas une guerre gauche-droite. Je crois que vous avez mal accepté ce projet car il vient de la gauche. Certains radicaux soutenaient au départ ce projet et ensuite, ils sont revenus sur leur position uniquement parce que cela venait de la gauche. On peut laisser nos avis partisans de côté pour améliorer la vie des habitants et des commerçants de ces quartiers. Je vous demande de voter pour ce projet de loi.

M. Jean-Marc Odier (R), rapporteur. Tant la pétition que le projet de loi démontrent une chose certaine : l'insatisfaction des habitants par rapport à la possibilité de parking et vis-à-vis du nombre de pendulaires qui entrent en ville de Genève.

Que ce soit le projet de loi ou les propositions qui émanent de la pétition, ces propositions ne sont qu'une partie du problème. Il n'y a pas de vision d'ensemble. Ce que M. Slatkine nous suggère (établir un plan directeur) va dans le bon sens. Il est nécessaire que Genève prenne en considération cette partie de la mobilité qu'est le stationnement. En disant cela, je n'oublie pas les transports collectifs et individuels, mais la troisième partie est le stationnement et en ce moment, une vision d'ensemble fait cruellement défaut.

Je vous propose donc de ne pas suivre ce projet de loi qui ne résout rien. Je dirais même qu'il met la charrue avant les boeufs en offrant des possibilités de places bleues en périphérie, mais il empêche tout pendulaire de trouver des places. Et les pendulaires, il faudra bien trouver des solutions pour eux ! Il faut créer des P+R, pas trop proches du centre. C'est pourquoi, dans la motion qui vous est proposée, nous demandons de créer des P+R à proximité des frontières, sur sol suisse ou français, et particulièrement dans des axes bien desservis par les transports publics. C'est une des possibilités qui contribuera à améliorer la mobilité à Genève. L'autre possibilité à laquelle le département doit penser promptement, c'est d'avoir enfin une vision globale et une organisation par un plan directeur.

Mme Elisabeth Chatelain (S). Le projet de loi 9442 - ainsi que le point 47 que nous lions à ce point 31 - démontrent clairement que la problématique du stationnement doit être abordée sérieusement. En effet, les véhicules passent souvent plus de temps à l'arrêt qu'en trajet, et je ne parle pas des bouchons. Le projet de loi 9442 aborde le problème sous l'angle des zones bleues et je le soutiens dans sa version amendée par Mme la rapporteuse Schenk-Gotteret.

Ce rapport a toutefois été refusé par la majorité de la commission qui a déposé récemment un autre projet de loi abordant le problème sous un angle bien différent. Le projet de loi 9659, très discutable de mon point de vue, a été retiré après un bref et délicat passage en commission des transports. Quel que soit le vote de ce soir, il nous manque une véritable politique globale du stationnement, fondée sur des objectifs stratégiques et des principes acceptés par tous.

L'organisation du stationnement constitue un outil de la politique de mobilité au même titre que la gestion de la circulation, l'aménagement de l'espace public ou le développement de l'offre en transports publics. Les différents types de stationnement, parking privé, parking public, P+R, etc., sont très interdépendants et ne peuvent pas être considérés chacun pour soi. Il faudrait donc avoir une base légale avec des objectifs suffisants en matière de stationnement pour permettre aux services de l'Etat et à la Fondation des parkings de mettre en place une politique globale et cohérente sur tout le canton.

Il me semble que le travail peut se faire en intergroupes et peut être mis en place. Je souhaite vivement qu'une solution intelligente puisse être proposée prochainement.

Le président. Le bureau propose de clore la liste. Sont encore inscrits : Mmes et MM. Ducret, Meylan, Catelain, Bolay et M. le conseiller d'Etat Cramer.

M. Michel Ducret (R). Je crois que l'idée générale, en matière de stationnement, est relativement claire. L'introduction de la zone bleue a eu pour conséquence un report général des besoins en stationnement vers la périphérie, où les utilisateurs qui viennent de l'extérieur de notre canton - qu'ils soient vaudois, français, etc. - trouvent un endroit pour laisser leur voiture et utiliser les transports publics. C'est exactement la politique que nous souhaitons. Evidemment, cela apporte des nuisances dans ces zones périphériques, car, pour faire du park and ride, il faut que la zone soit bien desservie par des transports collectifs, avec des lignes de type urbain; on se trouve donc forcément dans des zones où il y a beaucoup d'habitants et on crée donc une gêne pour ces habitants; cela génère une demande de zone bleue dans ces endroits.

Hors, le projet de loi que l'on nous a présenté ne résout qu'une seule partie du problème, car en s'attaquant à la réalisation de zones bleues dans ces secteurs, il en ignore le corollaire. Et pourquoi ce projet de loi est-il venu ? C'est extrêmement simple: si l'OCM est si timide pour autoriser les communes périphériques à réaliser des zones bleues, c'est que, sur toutes les pénétrantes de notre ville, nous n'avons pas offert d'alternatives en suffisance, alternatives qui s'appellent des P+R. Si on met de la zone bleue dans ces endroits, ces gens ne pourront tout simplement plus venir travailler à Genève. Dans les régions d'où ils viennent, il n'y a aucun transport collectif valable. Le CEVA ne sera en service qu'en 2012 et sera loin de satisfaire les besoins de tout le monde, et les lignes de bus transfrontalières restent timides et peu crédibles - pour certaines en tous cas. Il n'y a donc tout simplement pas d'autre moyen pour ces gens de venir à Genève.

La vérité est qu'il est absolument indispensable - et M. Odier l'a dit - que l'on mette en place des P+R en corollaire de l'introduction de zones bleues dans ces secteurs. Pour créer ces parkings d'échange en suffisance, il faut des moyens que l'on doit conférer à la Fondation des parkings, et ces moyens sont insuffisants pour faire face à toute la demande. Voilà pourquoi ce projet de loi n'a pas satisfait la majorité autour de la table de la commission, bien que tout le monde s'accorde à reconnaître que le problème est bien réel et n'est pas quelque chose que l'on doit ignorer.

Maintenant, le problème est de mettre des moyens en suffisance à la disposition de la Fondation des parkings et de réaliser ce qui est promis. Je vous rappelle que le tram Sécheron a été mis en service il y a plusieurs années et que le P+R qui devait se réaliser là-bas, on l'attend toujours. Il y a un parking provisoire qui est tout sauf convainquant, mais pas de parking d'échange dans ce secteur, alors qu'il n'y a pas que les Français qui viennent sur Genève en voiture, mais plutôt un nombre incroyable de voitures en provenance de la Terre Sainte et du canton de Vaud, et nous n'avons absolument rien à offrir à tous ces automobilistes - et ce n'est qu'un exemple. Tous ceux qui viennent du pays de Gex n'ont pas beaucoup d'offres crédibles et attractives. Une politique existe, je ne sais pas s'il est nécessaire de faire un plan directeur, mais une chose est sûre, c'est qu'il faut donner les moyens de la mettre en oeuvre. Et, apparemment, ces moyens sont insuffisants puisque ces parkings d'échange n'existent tout simplement pas.

M. Alain Meylan (L). A vous entendre - et je crois que c'est une bonne chose - tout le monde appelle de ses voeux une réflexion globale sur les parkings. C'est véritablement là que l'on doit désormais s'atteler à trouver une solution de manière à régler - enfin, comme le disait M. Brunier, peut-être pas à satisfaction, mais en tous cas le plus généralement possible - la problématique des parkings. Dans le sens politique du terme, il faut fixer les grands axes, définir ce que l'on veut dans ce parlement et après, charge aux services techniques d'adapter ce que l'on souhaite.

Ce projet de loi est issu du manque de coordination entre l'office de la mobilité (ex-OTC) et certaines communes. Cela a peut-être créé un certain malaise, compréhensible, car les règles n'étaient pas vraiment définies, l'administration ne savait pas vraiment comment travailler et n'avait pas vraiment d'objectif. Ce que nous a montré ce projet de loi, ainsi que ceux qui ont été récemment retirés, c'est cette nécessité d'avoir un plan directeur. A tel point que le groupe socialiste - ceux qui ont lu le rapport de M. Slatkine le savent - a d'abord souhaité s'abstenir sur ce projet de loi, bien conscient qu'il posait d'autres problèmes et qu'il n'était pas possible de le soutenir à 100%. Ils sont un peu revenus sur leur décision de façon à proposer cet amendement dont on discutera tout à l'heure, mais je crois que ce si ce projet de loi était adopté, il poserait dans certaines situations davantage de problèmes qu'il n'en résoudrait. Actuellement, des places de parc à l'extérieur de la ville se substituent à des parkings d'échange et participent véritablement à ce transfert modal, à savoir le déplacement en véhicule privé jusqu'à une approche de la ville et après, une utilisation des transports publics. Ces places de parc sont très utiles au transfert modal. On voit donc que si l'on adoptait ce projet de loi, on ne ferait que déplacer le problème et peut-être que l'on irait même à fin contraire du transfert modal et de cette complémentarité que les uns et les autres nous soutenons, et qui se trouve dans la constitution.

Je fais miens les propos de Mme Chatelain: il faut se mettre au travail sur un plan directeur de manière à fixer les objectifs entre nous et à fixer les objectifs de l'administration pour avoir une véritable politique de parkings qui dira, «là on supprime des places, mais là on en rajoute». On doit penser à cet équilibre, mais pas procéder par saucissonnage, car on n'aura plus la cohérence nécessaire. Le groupe libéral s'opposer à ce projet de loi mais se réjouit de travailler dès demain avec tous ceux qui le souhaitent à déterminer ce que devrait être la politique du stationnement et du parking dans le canton de Genève.

M. Gilbert Catelain (UDC). Ce projet de loi a au moins un mérite, il établit qu'il y a un manque flagrant de places de parc à Genève. Dans les faits, je ne vois pas pourquoi il faudrait limiter le stationnement dans les zones périphériques, s'il y avait suffisamment de places en ville... Je vous rappelle que nous sommes dans un canton qui voit sa population grossir année après année, parfois de plus de 5000 habitants. Nous avons un aéroport qui voit son trafic passagers augmenter - et c'est une bonne chose, le canton et l'Etat en recueillent les fruits financiers - alors même qu'il se plaint qu'en comparaison internationale, il lui manque le 100% des places de parc, soit environ 5000 à 8000 places de parc.

Ce projet de loi vise à asphyxier le canton. Aux visites d'entreprises, on se rend compte que le problème des transports est un problème récurrent et vital qui incite certaines entreprises de ce canton à freiner leur développement ou à l'envisager sous d'autres cieux. Mais il est vrai que dans ces visites d'entreprises, personnellement, je n'ai pas encore vu - si ce n'est une fois, pour les visites auxquelles j'ai participé - un député socialiste.

Ce projet de loi démontre que la politique menée par la Ville de Genève n'était pas la bonne, dans la mesure où elle a induit des effets collatéraux qui obligent maintenant le canton à légiférer pour résoudre les problèmes qu'elle a engendrés. Je rappelle que la seule commune de la Ville de Genève a supprimé ces dernières années 1200 places de stationnement.

Certaines communes suburbaines, notamment celles de gauche, comme la commune de Vernier, qui engage un projet d'investissement de 30 millions pour introduire des zones 30 dans tout le secteur de Vernier-village et ses alentours et supprime dans le même temps un certain nombre de places de parc, poursuivent la même politique et ont aussi l'intention de créer des zones bleues pour les chemins sur lesquels, d'ailleurs, il n'y a aucune infrastructure commerciale.

Si l'on veut rénover la «Maison stationnement» à Genève et si l'on veut satisfaire à la fois les habitants et l'ensemble de la population qui travaille dans ce canton, il ne faut pas s'attaquer aux fondations de cette maison. Mais, comme l'ont dit plusieurs des précédents orateurs, avoir des priorités. La première des priorités est effectivement de construire des P+R. La deuxième est d'améliorer la capacité des transports publics, notamment via le CEVA. Et lorsqu'on aura fait cela, lorsque vous aurez mis en place une infrastructure qui fonctionne et qui permet d'absorber le trafic pendulaire, il sera temps d'envisager d'élargir les zones bleues en périphérie de la ville de Genève.

Pour tous ces motifs, le groupe UDC ne soutiendra pas ce projet de loi, qui est complètement prématuré.

M. Christian Brunier (S). Si j'écoute bien les messages transmis ce soir par la droite, j'entends qu'il y a une reconnaissance de la problématique. On est tous d'accord et les gens qui nous regardent sur Léman Bleu aussi. Il y a une problématique de parking et de transfert modal de la voiture aux transports publics dans ce canton. Vous nous dites que le mérite de ce projet de loi est de soulever le problème, mais le remède est insuffisant pour être efficace et vous nous donnez plein d'idées. Vous dites qu'il faut faire un plan directeur de stationnement. C'est bien. A Genève, on est les champions des grandes études... à la réalisation, on est moins forts. On peut toujours faire des grands plans, des grandes stratégies, mais pendant qu'on fait cela, on n'avance pas beaucoup. Pour se rendre compte que le stationnement ne fonctionne pas et que le transfert modal est insuffisant, on n'a pas besoin de faire des grands dessins.

Deuxième chose: vous nous dites qu'il faut construire en premier les parkings d'échange, les P+R. Tant que vous ne mettez pas des zones bleues aux Trois-Chênes, au Grand-Saconnex, à Lancy, à Meyrin, à Vernier, à Onex - ce qu'on demande dans notre projet de loi - vous n'incitez pas à la construction des P+R. Pourquoi ? Parce qu'aujourd'hui, au lieu de construire des P+R, on laisse se garer les voitures et ces quartiers servent de P+R gratuit ! La collectivité n'investit pas un centime, elle empoisonne la vie des quartiers. Mais, finalement, cela rend service, car pendant ce temps on n'a pas besoin de construire en grande vitesse des P+R. Et d'ailleurs, si le gouvernement ne s'est pas beaucoup mobilisé jusqu'à présent, c'est pour cela ! Il avait une solution d'échange en disant : «Parquez-vous dans les quartiers environnants et on verra quand on aura le temps et les moyens de construire les P+R». Si vous voulez les P+R rapidement, il faut voter notre projet de loi ! Ce sera incitatif ! Oui, notre projet de loi ne répond pas à toute la problématique des parkings, mais notre projet de loi poussera les autorités à construire des P+R.

Après, vous nous dites qu'il faut des transports publics efficaces. Là aussi, j'ai bien entendu. D'ailleurs, au niveau budgétaire, chaque fois qu'il y a eu un développement des transports publics, on l'a voté, et ce n'est pas le cas de tous les partis de droite qui nous donnent des conseils ce soir.

Je vous le redis, le projet de loi de développement des zones bleues dans les communes environnant la Ville de Genève ne résoudra pas tout le problème du stationnement, c'est évident. Mais, à ne rien faire, à attendre des grandes études, à tirer des plans sur la comète et à prier pour que cela s'améliore, vous êtes sûr que vous allez à l'échec et que rien ne s'améliorera.

Je vous demande de voter ce projet de loi qui est une réponse partielle à la problématique des parkings et qui améliore la qualité de vie d'un grand nombre de personnes habitant les communes suburbaines.

Mme Loly Bolay (S). Ce projet de loi met en lumière une chose: l'inégalité de traitement entre la Ville de Genève et les communes suburbaines. Bien évidemment, on a enlevé les «voitures ventouses» en Ville de Genève, mais maintenant, elles se trouvent en zone périphérique. On dit que la législation actuelle donne la possibilité aux communes de faire une demande de zones bleues, mais - le rapport le dit et la pétition 1487 le confirme encore - nous avons vu, avec les communes qui ont fait cette demande (Pregny-Chambésy, Carouge, Chêne-Bourg) que ce n'est pas le cas. Tout à l'heure. j'aimerais voir la position de Mme le maire de Chêne-Bourg, qui a été entendue dans les deux cas et qui a confirmé qu'il y avait un problème concernant sa commune.

Mesdames et Messieurs les députés, vous qui souvent dénoncez à juste titre que les communes suburbaines ne sont pas assez entendues, que la Ville de Genève a des privilèges que les autres communes n'ont pas, voilà qu'on vous donne la possibilité - en tous cas en ce qui concerne le problème du parking - de traiter les communes qui le demandent de manière équitable. Encore une fois, nous ne disons pas que toutes les communes doivent avoir des zones bleues, mais nous disons : « Donnons la possibilité aux communes qui se trouvent confrontées à des problèmes majeurs de "voitures ventouses" d'avoir le même traitement que la Ville de Genève». C'est tout ce que l'on vous demande de faire !

Dans la ville où je suis née, en Espagne, le système des macarons a été introduit il y a plus de vingt ans. Et ce système n'a pas seulement été mis en place au centre-ville, mais sur l'ensemble de la ville. Cela a permis d'éviter que les gens aient des problèmes de parking et qu'il y ait un transfert du problème du centre vers la périphérie.

Mesdames et Messieurs, il faut être cohérents. Notre projet de loi soulève un problème. J'entends dire qu'il n'y pas de parkings d'échange partout, alors je vais vous donner l'exemple de ma commune, le Grand-Sacconnex. Il y a des pétitions de gens qui en ont ras-le-bol de voir que des voitures passent quotidiennement devant leur maison. On a construit deux parkings - le P48, le P49 - on les a payés, il y a un arrêt de bus à côté, et ces parkings sont vides ! Comment voulez-vous que les gens prennent les transports en commun si vous leur donnez la possibilité de garer leur voiture en périphérie ? C'est la raison pour laquelle - j'insiste encore, car je vois des députés de droite hocher de la tête; ils sont apparemment d'accord avec ce que je viens de dire - j'espère que la maire de Chêne-Bougeries va nous appuyer. Je vous demande encore une fois de voter ce projet de loi.

Le président. Avant de passer la parole à M. le conseiller d'Etat, je signale à ceux qui l'ont encore demandée que la liste était close depuis un bon moment.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Au fond, ce long débat montre bien à quel point la majorité de la commission a eu raison de dire qu'il ne faut pas entrer en matière sur le projet de loi. Pourquoi ? Parce que l'on voit bien de quoi on a parlé. Pendant une longue partie de ce débat, on a parlé de questions locales, nous avons tout appris sur les drames du stationnement au Grand-Saconnex et chacun a pu exprimer les difficultés qu'il avait à parquer son auto. Ce dont nous avons parlé en réalité, ce sont des questions d'ordre réglementaire. Du reste, il est significatif que ce projet de loi ait été élaboré en essayant de passer dans la loi un certain nombre d'objets qui sont dans les règlements. C'est de la mauvaise technique législative. Lorsqu'on a envie de faire passer dans la loi des choses qui sont dans les règlements, on fait des mauvaises lois et on ne donne pas la possibilité au débat d'avoir lieu où il doit avoir lieu, c'est-à-dire dans une concertation - dans des affrontements aussi - entre l'autorité communale et l'autorité cantonale.

Mais, je vous en supplie, ne vous donnez pas le ridicule de vouloir régler en séance du Grand Conseil des questions de place de stationnement ou la question de savoir où il convient que l'on place des panneaux de sens unique ou de sens interdit, cela n'est pas décent pour cette institution et c'est un paradoxe. Ce long débat a permis cependant de voir émerger un certain nombre de convergences - le premier des paradoxes est que l'on puisse trouver des convergences sur des questions liées à la circulation. Le second des paradoxes est que l'on a bien compris, à travers ce projet de loi, que le stationnement est un des éléments de la politique de circulation. M. Meylan l'a dit assez clairement dans son intervention, si on entend lutter contre les embouteillages - et chacun sait qu'ils se produisent le matin et le soir - il faut rendre le centre-ville moins attractif aux pendulaires. Et l'un des moyens de le faire est de dire aux pendulaires qu'ils ne trouveront pas de stationnement au centre-ville, qu'il est donc inutile d'essayer d'y aller et qu'il ne faut pas charger les voies de circulation le matin et le soir. Mais cela, évidemment, entre dans le cadre d'une politique de circulation qui implique - M. Catelain l'a dit - que l'on offre des alternatives aux pendulaires.

Ces alternatives, on les connaît. Elle s'appellent soit P+R, soit système de transport public performant. C'est là-dessus que l'on est en train de travailler à Genève, sur tous ces objets en même temps - parfois on va plus vite sur un point, parfois plus vite sur un autre. Mais, dans tous les cas, pour que cette politique ait un sens, elle implique des contrôles. Cela ne sert à rien de dire aux gens qu'un stationnement est interdit si aucune contravention n'est infligée par la suite.

Je reviens sur le premier paradoxe que j'ai évoqué, c'est-à-dire, ce consensus sur la nécessité d'une visibilité de la politique du stationnement. Durant la dernière législature, nous avons réussi à donne une visibilité à la hiérarchie du réseau routier. C'était une proposition du Grand Conseil, le Conseil d'Etat a fait le travail qu'il devait faire, il vous a soumis un projet et aujourd'hui nous avons des règles en matière de hiérarchie du réseau routier. Ce travail doit être complété sur deux points. Il doit être complété par un plan directeur de l'extension et de la construction du réseau routier - vous savez que nous sommes en train d'y travailler et ce n'est pas une tâche simple, mais nous avons besoin de ce plan. Il doit également être complété par une vision générale de la politique du stationnement. C'est en ce sens que l'on peut suivre les conclusions du rapporteur de la majorité et ainsi rejeter le projet de loi, prendre acte de la pétition renvoyée au Grand Conseil - comme le propose la commission des transports - et enfin, renvoyer la motion au Conseil d'Etat. Vous accepterez que, quand le Conseil d'Etat répondra à cette motion, il ne se borne pas uniquement - comme le demande la motion - à concentrer sa réflexion sur la problématique des parkings d'échange et sur la nécessité d'un meilleur équilibre entre la Fondation des parkings et les transports publics en ce qui concerne la perception du coût de stationnement dans les parkings d'échange, mais qu'il aille au-delà de cela pour avoir une perspective un peu plus générale sur la politique du stationnement. On peut aller de l'avant. Faire aujourd'hui cette intervention me dispense peut-être, à l'occasion d'une prochaine séance du Grand Conseil, de faire la même intervention pour vous dire à quel point la commission des transports a eu également raison de ne pas entrer en matière sur un projet de loi de l'Entente - et donc pas un projet de la gauche - qui souhaitait également régler des questions de stationnement par la loi, ce qui est inutilement compliqué.

Mis aux voix, le projet de loi 9442 est rejeté en premier débat par 48 non contre 23 oui 6 abstentions.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des transports (dépôt de la pétition 1487 sur le bureau du Grand Conseil) sont adoptées par 66 oui contre 1 non et 9 abstentions.

Mise aux voix, la motion 1660 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 52 oui contre 11 non et 8 abstentions.

Motion 1660