République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1609
Proposition de motion de Mme et MM. Anne-Marie Von Arx-Vernon, Jean-Claude Egger, Guy Mettan, Pierre-Louis Portier, Patrick Schmied : Répartition des charges et des compétences Etat - Communes genevoises

Débat

La présidente. J'ouvre le débat. Monsieur le député Portier, vous avez la parole.

M. Pierre-Louis Portier (PDC). Pour une fois, notre ordre du jour colle à l'actualité. Même si, dans ce plénum, le débat sur le budget n'a pas encore débuté, il a déjà commencé depuis longtemps en commission, dans les médias, de même que dans toutes les discussions de la République. Vous savez qu'à l'occasion de ce débat et, surtout, lors de la présentation par le Conseil d'Etat du projet de budget, ce dernier propose une mesure consistant à reporter sur les communes un montant de 89 millions de francs de charges, ce qui est très largement commenté et critiqué dans la République.

Le groupe démocrate-chrétien a consulté ses nombreux magistrats occupant des fonctions dans les communes genevoises et il s'est rendu compte que cette mesure était totalement inacceptable. Le groupe démocrate-chrétien a d'ailleurs non seulement annoncé par voie de presse qu'il refuserait ce report de charges sur les communes, mais il a également mis en pratique ses intentions par un refus de ses commissaires en commission des finances. Il n'empêche que le problème de la répartition des charges entre l'Etat et les communes subsiste. Cette fois-ci, il est simplement mis en exergue à l'occasion de ce budget, mais il subsistera tant qu'on ne le prendra pas à bras-le-corps.

Disons-le tout net: soucieux de doter ce canton d'un budget, le parti démocrate-chrétien pense à toutes les associations subventionnées - et déjà, pour commencer, à l'administration - mais également à toutes celles et ceux qui attendent de savoir ce que sera ce budget pour prévoir leur degré d'activité. Le parti démocrate-chrétien sait avec quelle angoisse les associations ont attendu le fameux budget 2004 que nous n'avons fini de voter qu'en juin. Ils souhaitent évidemment que cela ne se reproduise pas pour 2005.

Il est vrai que dans le cadre de ce débat le parti démocrate-chrétien a essayé de faire un certain nombre de propositions. On a beaucoup parlé de la FAS'e, ce soir encore des gens se manifestaient à cette occasion. On a aussi parlé du problème du GIAP. Mais nous avons aussi proposé, en retour, un certain nombre de recettes pour les communes, dont un projet de loi concernant les Services industriels sur lequel vous n'avez même pas voulu entrer en matière.

Mais il n'empêche que, même si notre démarche a été exécutée dans l'urgence et de manière un peu maladroite, nous sommes prêts à l'admettre, elle met en exergue le fait que ce débat ne peut être exécuté à la va-vite, car c'est un débat de fond qui doit prendre certainement plusieurs mois, voire une année ou deux. Il est donc plus que jamais important que nous nous y attelions.

Notre projet de motion parle également des doublons. Là aussi, depuis combien d'années - et c'est aussi un ancien magistrat qui vous parle - n'évoquons-nous pas, dans cette République, les fameux doublons entre l'Etat et les communes ? Tout le monde, dans les discussions de café du commerce et autres, a des exemples à formuler. Et cela ne va plus, Mesdames et Messieurs ! Alors, à l'occasion de ce débat budgétaire, et puisque l'ordre du jour nous en donne l'occasion, le parti démocrate-chrétien, soucieux de l'équilibre des tâches entre le canton et les communes, soucieux de la gestion des biens publics, réclame à cor et à cri que ce débat s'ouvre enfin et espère que le Conseil d'Etat, cette fois-ci, l'entendra. Il y a urgence pour que ce canton puisse un jour retrouver le chemin de saines finances publiques.

Ce que nous réclamons ce soir, c'est un débat de fond sur ce sujet, et il faut l'entamer de manière urgente. C'est ce que nous vous proposons en renvoyant cette motion immédiatement au Conseil d'Etat. (Applaudissements.)

M. Jacques Baud (UDC). Là, je vois clair ! Je rappelle une chose importante: le social est une des responsabilités primordiales de tout Etat démocratique. Il semble qu'on l'ait oublié dans cette motion en essayant de refiler en partie le bébé aux communes. On s'attaque ici à l'OCPA en proposant une dislocation d'un service de l'Etat qui fonctionne relativement bien - pas toujours de manière extraordinaire, enfin on peut l'améliorer. Mais en l'occurrence, cette motion mène tout droit à une déliquescence de ce service indispensable à la survie de nos aînés.

L'OCPA est financé au niveau fédéral - par l'AI ou l'AVS - et au niveau cantonal. Ce n'est pas facile à établir, puisque pour chaque individu l'opération est différente. On aura donc tout un calcul à faire au niveau des communes, et je ne vous parle pas des problèmes entre les communes, des péréquations et autres, des jalousies, des «nous avons plus de pauvres que vous», etc. On n'est pas sorti de l'auberge...

Cela signifie également une augmentation des coûts administratifs, et dans une sacrée mesure ! Alors, on aura moins pour ceux qui en ont besoin et plus pour l'administration. On aura une augmentation des coûts du social, voilà ce que cela propose.

Alors, j'aimerais que l'on n'oublie pas à la fin des comptes, cantonaux et communaux, que c'est toujours le contribuable qui paie ! Je refuse cette motion.

M. Pierre Weiss (L). Je ne suis pas certain d'avoir suivi avec toute l'intelligence nécessaire l'intervention que nous venons d'entendre, mais je tiens à vous dire, au nom du groupe libéral, que nous nous prononçons en faveur de la motion déposée par nos collègues démocrates-chrétiens. Pourquoi? Parce qu'il s'agit de remettre à plat les relations entre le canton et les communes, et cette motion en présente ici une première occasion. Je profite d'avoir la parole, Madame la présidente, pour vous dire que le groupe libéral va également - j'allais dire «s'engouffrer dans cette brèche» - continuer dans la voie ouverte par nos collègues démocrates-chrétiens pour bénéficier d'une vision exhaustive des relations existant entre le canton et les communes.

N'oublions pas que dimanche passé nous avons voté pour un désenchevêtrement des relations entre la Confédération et les cantons. Il s'agit de procéder à la même démarche pour les relations qui existent entre le canton et les communes. Bien entendu, il ne faut pas procéder à la hussarde mais, au fil des mois, considérer les besoins et les contraintes qui pèsent sur les communes, ainsi que les contraintes que connaît le canton. Les doublons ont été soulignés et il y a aussi des lacunes. En d'autres termes, il s'agit de voir où nous en sommes.

De nombreux exemples montrent que les compétences ou les charges sont complexes. L'OCPA a été évoquée, mais la loi sur les droits d'enregistrement connaît aussi une mise en application que j'appellerai «conjoncturelle» au fil des ans; l'aide et les soins à domicile ont aussi besoin d'une redéfinition, la péréquation financière intercommunale de même. Et la «petite enfance» - qui vous est chère, Madame la présidente - doit aussi voir son avenir assuré ! L'influence du canton sur les communes en matière de constructions scolaires et de standard pour les communes mérite aussi d'être rediscutée.

Bref, de nombreux exemples nous montreront comment les communes sont redevables au canton dans un certain nombre de cas, et comment, dans d'autres cas, trop de charges pèsent sur elles. C'est en leur nom que le groupe libéral soutient la démarche démocrate-chrétienne. (Applaudissements.)

Mme Véronique Pürro (S). Les socialistes - en tout cas moi - partagent le souci des uns et des autres de clarifier les compétences et mettre à plat les choses, et ceci dans un esprit de concertation et de dialogue, c'est-à-dire pour que cela ne soit pas fait « à la hussarde», comme l'a dit M. Weiss.

Dans ce sens, je vous propose un amendement pour ajouter une invite à la teneur suivante: «A stopper toutes velléités de transfert de charges aux communes avant qu'un rapport sur les compétences des uns et des autres soit présenté et adopté par le Grand Conseil».

Je pense qu'il s'agit d'une question de méthode. Avant d'augmenter les charges des communes, adoptons des principes et discutons-les, nous verrons ensuite quelles seront les conséquences en matière budgétaire.

La présidente. Madame la député, je vous remercie de nous remettre cet amendement sous forme écrite. Je passe la parole à M. le député Gabriel Barrillier.

M. Gabriel Barrillier (R). J'ai été un peu surpris par la proposition du groupe PDC, la motion date du 2 novembre et accompagne les discussions sur le budget. Je m'adresse, Madame la présidente, à mon collègue Pierrre-Louis Portier, avec qui nous siégeons à la commission des affaires communales, régionales et internationales. Depuis trois ans, avec les autres groupes, nous avons essayé d'avancer dans l'examen du partage des compétences entre le canton et les communes: la péréquation. On a également examiné des motions qui demandaient une nouvelle répartition des fardeaux suite aux problèmes d'aménagement du territoire. Je partage donc les soucis du groupe PDC. Mais renvoyer cette motion d'un coup, à la hussarde, à l'occasion de la discussion sur le budget, alors qu'au fond le parti radical partage entièrement les soucis et les propositions de nos collègues PDC, je trouve cela un peu dommage ! Et nous souhaiterions en discuter à la commission des affaires communales, régionales et internationales - cela me paraît beaucoup plus logique.

Nous vous proposons donc de renvoyer cette motion à la commission des affaires communales, qui porte bien son nom.

M. Rémy Pagani (AdG). En préambule, je relève que cette motion a été déposée le 2 novembre 2004 et qu'elle est traitée aujourd'hui. Donc, quand il le veut, notre parlement peut aussi examiner rapidement - contrairement à ce qui s'est dit tout à l'heure - ce type de motion.

Les choses positives s'arrêteront là en ce qui me concerne, parce que je trouve assez extraordinaire que des mots soient utilisés pour dire le contraire de ce qu'ils veulent dire ou de ce qu'ils exigent, et on en a ici une preuve évidente, Mesdames et Messieurs les députés ! Quand il est écrit: «Invite le Conseil d'Etat à proposer des solutions qui tiennent compte de la capacité financière des communes...» - jusque là, cela peut aller, mais: «... en concertation avec l'Association des communes genevoises», alors je prendrai juste deux exemples montrant à l'évidence que ce que vous avez fait ces derniers mois - le PDC compris - n'est pas du tout en conformité avec ce que vous écrivez !

Je prendrai pour premier exemple la Fondation pour l'Animation socioculturelle - la FAS'e. Il faut rappeler l'histoire de cette fondation. Depuis longtemps, passablement de personnes - y compris sur vos bancs - se sont échinées à définir une politique cantonale pour les maisons de quartier et les centres de loisirs, afin de promouvoir l'animation socioculturelle. Et il y a un mois, vous avez sorti de votre chapeau qu'il fallait - contrairement à ce qui se passait depuis longtemps - mettre tout cela à la poubelle, donc revenir quasiment vingt ans en arrière ! Parce qu'il y a vingt ans, c'était cette pratique-là ! C'est-à-dire que les communes déterminaient leur politique dans leurs propres centres de loisirs.

Alors, il y a non seulement cela, mais vous ne mettez même pas en pratique ce que vous écrivez, puisqu'à aucun moment vous n'avez tenu au courant l'Association des communes genevoises ! Jamais le PDC n'a pris langue avec l'Association des communes genevoises pour lui dire: «Voilà, nous avons ce projet-ci, qu'en pensez-vous ? Où arrive-t-on, quelles sont les implications, quels sont les problèmes financiers ?»

Le deuxième exemple, encore plus extraordinaire, est celui des Services industriels. On l'a dit la dernière fois en cette enceinte, pendant ces sept dernières années, on a tous fait un effort...

La présidente. Monsieur le député, j'ose vous rappeler que c'est sur le renvoi en commission des affaires communales que vous devez vous exprimer !

M. Rémy Pagani. Et alors ?

La présidente. La teneur de vos propos ne va pas tout à fait dans ce sens-là. Nous parlons du renvoi aux affaires communales.

M. Rémy Pagani. Très bien ! Je m'exprime sur le renvoi en commission des affaires communales.

Les Services industriels sont un exemple typique. Cela fait sept ans que cette entreprise, gérée en totalité par les pouvoirs publics - ce service public - était en déficit chronique. Nous nous sommes donné les moyens de permettre à cette entreprise de subsister et qu'elle soit pérennisée, y compris dans les périodes de crise, et c'est remarquable ! Aujourd'hui, elle fait des bénéfices, et que faites-vous en l'espace d'un mois ?! Vous décidez de piocher dans la caisse, sans vous préoccuper des implications que cela aura, notamment dans la politique des Services industriels. C'est extraordinaire ! Alors, on repose la question: quand avez vous pris langue avec les SIG pour, au moins, ajuster vos propositions à la réalité ? (Exclamations.)Je n'en ai entendu parler nulle part. La semaine prochaine, on auditionnera M. Battistella, directeur des SIG, qui nous fera connaître son désarroi. Je vous relis encore ceci, car je crois que vous n'êtes pas conscients de ce que vous avez écrit concernant les mesures de répartition: «... en concertation avec l'Association des communes genevoises». En «concertation»... ce mot-là, Mesdames et Messieurs les députés, ne veut rien dire !

Je formule donc une autre proposition de renvoi. A mon avis, il est inutile de renvoyer ce texte au Conseil d'Etat ou en commission, car, de toute façon, on dira: «Oui, oui! Tout le monde est d'accord pour se concerter !» D'ailleurs, on attend encore de nouvelles propositions; j'ai entendu qu'il y en avait d'autres concernant la suppression des effets de la loi sur la police, ainsi que la suppression du PLEND. Enfin, toute une série de propositions arriveront dans le budget, mais ces propositions ne seront aucunement émises de manière concertée.

Par conséquent, ce papier ne mérite qu'une chose: le dépôt dans la poubelle.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je vous rappelle que nous avons une demande de renvoi en commission des affaires communales. Un député par groupe peut s'exprimer. Je passe la parole à M. Marcet, de l'UDC, pour le renvoi en commission des affaires communales uniquement.

M. Claude Marcet (UDC). En ce qui nous concerne, il est totalement exclu que l'on renvoie ce projet de loi en commission. Je suis tout à fait de l'avis de M. Pagani et de la gauche à ce sujet. Que l'on redéfinisse un transfert des charges sur les communes est une chose, que l'on fasse de la carambouille comptable et financière à la veille du budget, parce que l'on ne sait pas quoi trouver pour faire des économies, en est une autre ! A ce stade, je n'entre même pas dans le débat au sujet des SIG. J'y reviendrai en temps opportun, mais je suis tout à fait d'accord avec M. Pagani. (Exclamations.)En ce qui concerne l'UDC, c'est totalement vrai !

Une voix. Mais ce n'est pas vrai !

M. Claude Marcet. Je peux continuer ? Merci ! Concernant les SIG, je vous prie de m'excuser, Mesdames et Messieurs, mais le PDC agit aussi probablement «à l'insu de son plein gré», parce que, manifestement, il n'a strictement rien compris ! Contre les SIG... (Chahut.)Alors, je dirai une chose: j'ai lu dans la presse que nous sommes bêtes et méchants - la droite bête et méchante... - mais nous ne sommes pas parmi ceux qui ont mis la gestion de ce canton au niveau du bourbier où il se trouve actuellement. C'est tout ! (Applaudissements.)

M. Pierre-Louis Portier (PDC). S'agissant du renvoi aux affaires communales proposé par mon collègue Barrillier, je souhaitais une action rapide du Conseil d'Etat. Mais en effet, nous débattons depuis plusieurs années - souvent à l'occasion de points particuliers - de ce problème des charges entre l'Etat et les communes, il y a une espèce d'usure du temps, il y a aussi des doublons, comme je l'ai déjà dit. Un certain nombre de choses s'interpénètrent et font que l'argent public n'est pas bien géré. Il vaudrait peut-être mieux préparer ce débat en commission des affaires communales, c'est pourquoi le groupe PDC se rallie à cette proposition.

Mais, permettez-moi, Madame la présidente, de répondre à mon préopinant. Tout d'abord, s'agissant de l'ACG, Monsieur Pagani, vous profitez de cette tribune - c'est de bonne guerre - mais vous le savez très bien, le parti démocrate-chrétien ne souhaite absolument pas démanteler la FAS'e ! (Exclamations.)Preuve en est que le parti démocrate-chrétien - et beaucoup d'anciens du parti - est à l'origine de la FAS'e...

La présidente. Monsieur le député, ce n'est pas le sujet !

M. Pierre-Louis Portier. Madame la présidente, j'ai été mis en cause. Laissez-moi juste répondre à M. Pagani, si vous le permettez !

La présidente. Une minute seulement !

M. Pierre-Louis Portier. Nous souhaitons simplement redistribuer non seulement les charges financières, mais également les compétences. Car, même si vous nous accusez de n'avoir pas consulté l'ACG, nous avons consulté nos magistrats et ceux d'autres groupes politiques. Sachez que beaucoup se plaignent du mauvais fonctionnement de la FAS'e et qu'ils souhaiteraient pouvoir y mettre leur nez. Et, comme on dit: «Qui commande paie».

Une dernière chose concernant M. Pagani...

La présidente. C'est fini Monsieur le député !

M. Pierre-Louis Portier. Vous nous accusez de puiser dans la caisse des SIG: nous ne voulons que simplement y prendre ce qui est dû aux actionnaires !

La présidente. Monsieur le député !

M. Pierre-Louis Portier. D'autre part, Monsieur Pagani, vous nous accusez de vouloir puiser dans la caisse des SIG, mais vous, vous vous échinez à vider la caisse de l'Etat ! (Applaudissements. Chahut.)

M. Alain Charbonnier (S). Je m'exprimerai sur le renvoi en commission, puisque ma collègue Mme Pürro est déjà intervenue sur le fond et a proposé un amendement à cette motion.

On refusera évidemment le renvoi en commission, ce d'autant plus que, vraiment, cette motion... Encore peut-on vous excuser pour les projets de loi sur la FAS'e et les SIG, ils ont été rédigés dans la précipitation et complètement bâclés sur le coin d'une table de bistrot - ou encore pire... On peut donc encore vous excuser pour cela. En revanche, ce n'est pas le cas pour cette motion, car elle a été déposée, pour une fois, dans un temps normal, régulier - ce qui est étonnant pour le PDC, car il ne nous avait pas habitué à cela depuis quelques temps. Donc, si je lis la première invite... Je vais vous la lire, parce que cela en vaut la peine. Je ne suis pas un champion en français, mais j'ai quand même quelques notions: «A entamer une discussion de fond sur les compétences respectives du canton et des communes, notamment dans les services et les prestations où la proximité est un atout, et à l'intégrer dans le plan GE-Pilote.» A entamer une discussion de fond... Avec qui, Monsieur Portier ?

M. Pierre-Louis Portier. Avec les communes !

M. Alain Charbonnier. Mais ce n'est pas marqué ! Alors, je ne suis pas très bon en français, mais j'ai beau retourner cette invite dans tous les sens: impossible de s'en sortir !

Ensuite, je lis: «A proposer des solutions qui tiennent compte de la capacité financière de chaque commune, en concertation avec l'Association des communes genevoises.» Il y a une capacité financière pour chaque commune, et on la connaît tous, M. Cramer pourrait nous donner les chiffres un par un - on les reçoit d'ailleurs chaque année. Alors, «En concertation avec l'Association des communes genevoises»... Que peut-on faire de cette concertation une fois que l'on connaît la capacité financière de chaque commune ?

Cette motion ne mérite donc pas d'aller en commission.

M. Pierre Weiss (L). Nous pouvons ironiser sur la formulation de tel ou tel terme, mais nous devons nous interroger sur le fond de la motion et les invites. Le problème posé est suffisamment sérieux pour qu'un renvoi en commission s'impose. En commission, nous avons tout loisir d'examiner attentivement les problèmes posés, et j'espère que nous aurons encore plus de temps pour l'autre motion dont je vous ai parlé tout à l'heure. Mais, pour ce soir, afin de démontrer notre sens des responsabilités, et pour «dégonfler» aussi une certaine crispation qui a vu le jour récemment, la meilleure des choses à faire - le sens des responsabilités à prendre - consiste précisément à renvoyer cette motion en commission. Mme Pürro tout à l'heure a fait une suggestion pouvant être prise en considération, mais l'essentiel, dans cette affaire, est de renvoyer cette motion en commission plutôt que de prolonger les débats inutilement.

M. Jean Rossiaud (Ve). La répartition des tâches et des compétences entre l'Etat et les communes doit être examinée avec attention. En effet, la mondialisation néo-libérale provoque un effet destructeur sur les structures les plus locales, et il faut en prendre acte. Il s'agit donc de réinventer une politique de proximité qui... (Commentaires.)Mais attention ! Ecoutez-moi jusqu'au bout ! Il s'agit donc de réinventer une politique de proximité qui soit gérée au plus près des citoyens. Et si vous pensez que cela va coûter moins cher, ce n'est pas sûr ! En tout cas, ce sera mieux.

A partir de là, les Verts soutiennent l'amendement socialiste présenté par Mme Pürro. (L'orateur est interpellé.)Nous proposons le renvoi au Conseil d'Etat. Pourquoi ? Pour que le Conseil d'Etat établisse un rapport avec différentes options et que ce dernier puisse être discuté en plénière. Après, nous pourrons renvoyer tout cela en commission. Il ne faut pas se hâter sur cette question, mais il faut la prendre tout de suite à bras-le-corps !

Pour conclure, sur le temps de parole: renvoyer ce projet en commission sera ce qui nous fera perdre le plus de temps. Alors que, si on le renvoie au Conseil d'Etat, on aura une chance d'avoir différentes options qui nous permettront de travailler comme il faut en commission.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Les arrières-pensées ne manquent pas derrière cette proposition de motion déposée par le PDC, ni, du reste, derrière les interventions que l'on vient d'écouter. Elles sont telles qu'il me semble indispensable que vous renvoyiez cette proposition de motion en commission...

Finalement, à entendre le débat, votre objectif est d'envoyer au Conseil d'Etat un texte dont on espère «vivement» une réponse dans trois ou quatre législatures, tellement il est exigeant, c'est-à-dire quand le problème aura été traité de façon totalement différente. Si ce n'est pas le cas, vous devriez vous accorder pour proposer un texte qui soit écrit de façon lisible aux yeux de chacun, et qui comporte les considérants et les invites que vous souhaitez y voir figurer.

Ensuite, il faudrait également - pour que ces arrières-pensées dont j'ai fait mention ne soient pas trop évidentes - que vous vous donniez la peine de prendre connaissance de ce que les communes ont exprimé lors des auditions de la commission des finances. Alors, vous entendrez peut-être que, lorsqu'on nous demande des solutions en concertation avec l'ACG, on ne nous demande en réalité aucune solution du tout ! Parce que le meilleur système est assurément celui que l'on a aujourd'hui, celui qui a vu l'Etat supporter une diminution de 12% de ses ressources fiscales alors que les communes n'étaient pas concernées. En d'autres termes, le meilleur système est un transfert de charges égal à zéro. Voilà ce que signifie «vouloir la concertation avec les communes». Et si vous voulez vous en assurer, si vous voulez savoir sur quel objet cette concertation pourrait bien porter, eh bien, il serait préférable que vous puissiez le faire en direct, ceci par le biais d'une audition.

Dans le même temps, si vous estimez qu'il faut faire quoi que ce soit allant dans le sens des intentions proclamées par la motion, on n'y arrivera certainement pas en la concluant par une «clause guillotine» comme celle proposée par Mme Pürro, qui signifie grosso modo: «Vous aurez un censeur. Ce censeur, ce seront les communes. Mais avant que cette censure n'intervienne et qu'il y ait un rapport distribué au Grand Conseil, celui-ci entend ne rien faire. Cependant, quel que soit le texte que ce Conseil votera, je peux vous dire une chose: c'est que le Conseil d'Etat, lui, n'attendra pas pour agir !

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes donc saisis d'un renvoi en commission des affaires communales, que je mets aux voix.

Mis aux voix, le renvoi de cette proposition de motion à la commission des affaires communales, régionales et internationales est rejeté par 37 non contre 32 oui et 1 abstention.

La présidente. Le débat continue.

M. Christian Grobet (AdG). Un de nos collègues a relevé avec beaucoup de pertinence le style imbattable du PDC lorsqu'il fait des propositions. C'est-à-dire qu'on avance un certain nombre de choses sans véritablement savoir ce qu'il en est, et l'on donne l'impression qu'on est contre le transfert des charges de l'OCPA aux communes. Est-ce qu'il y a une majorité de droite au Conseil d'Etat, Monsieur Portier, pour régler ce problème ? Alors, je ne sais pas quelles sont vos intentions réelles.

Par contre, je crois déceler la vraie intention dans cette motion: en ce qui concerne le problème des communes, vous ne voulez pas imposer la concertation des communes - comme une de mes collègues conseillère administrative a naïvement cru que c'était le cas - mais vous voulez imposer la concertation avec l'Association des communes genevoises ! A mon avis, il n'est pas nécessaire de demander au Conseil d'Etat de prendre des rendez-vous avec l'Association des communes genevoises par voie de motion. Et il n'est pas, non plus, nécessaire de capter le temps du Grand Conseil à ce sujet.

Mais évidemment, derrière tout cela, on voit de quoi il s'agit... Cela fait depuis longtemps que nous disons dans cette enceinte que l'ACG - ne vous en déplaise, Monsieur Portier - n'est pas représentative des communes genevoises. Elle ne l'était pas il y a vingt ans, et elle l'est encore beaucoup moins aujourd'hui.

Du reste, aux dernières élections municipales, le rapport des forces dans les grandes communes genevoises a continué à se modifier; on constate que la majorité a quasi basculé du côté de l'Alternative, et ce sont principalement les grandes communes qui sont intéressées par la répartition des compétences. L'ACG est formée d'un délégué de chaque commune, c'est-à-dire qu'il y a une majorité écrasante de petites communes de l'Entente: on comprend dès lors que l'Entente prétende représenter les communes genevoises dans ses discussions avec le Conseil d'Etat ! Alors, pour ce seul motif déjà, nous rejetons cette motion qui veut imposer un dialogue avec une association non représentative démocratiquement des communes genevoises. Voilà pour le premier point !

En ce qui concerne les compétences, on constate votre désir de les augmenter quand ça vous arrange et de les diminuer dans d'autres circonstances. M. Pagani a bien fait de rappeler le coup de poing que vous donnez aux maisons de quartier. Quant à savoir quelle est la véritable position de votre parti en ce qui concerne le report des charges de l'OCPA sur les communes, on reste un peu sur notre faim.

Vous évoquez le problème - réel - de la capacité financière de chaque commune... Les communes genevoises où sont les riches contribuables ont des centimes additionnels d'impôts plus bas que les grosses communes supportant des lourdes charges, et cela fait longtemps que la gauche demande que les impôts communaux soient les mêmes pour chacun dans ce canton. Il est foncièrement inéquitable que les personnes de condition modeste vivant dans des communes où les charges fiscales sont élevées doivent payer proportionnellement bien plus d'impôts que les personnes fortunées qui vivent à Cologny, Vandoeuvres ou Genthod ! Cette situation fiscale est intolérable, et vous invoquez aujourd'hui le problème de la capacité financière alors que vous n'avez jamais voulu faire quoi que ce soit !

Et puis, quand on veut donner d'autres compétences décisionnaires aux communes, comme, par exemple, de laisser quelques petites compétences en matière d'organisation du domaine public, alors vous n'en voulez pas, il faut que ce soit l'Etat, bien entendu, qui se substitue aux communes ! En revanche, quand il s'agit de rassembler les Neinsager pour la construction des logements sociaux, alors là, comme par hasard, vous voulez confier la compétence aux communes de pouvoir refuser la construction de logements sociaux sur leur territoire ! Alors, on aurait encore pu être trompé par votre vocabulaire et dire: «eh bien, on transmet cela au Conseil d'Etat !», mais quand on sait comment vous envisagez les compétences communales, c'est-à-dire toujours dans le sens de favoriser les nantis à l'extérieur de la ville, vous comprendrez que nous n'allons pas être trompés !

Pour finir en boutade dans cette affaire, si cette compétence des communes allait jusqu'au transfert total des charges pour les réseaux routiers en ville de Genève, on pourrait se demander si cette traversée de la Rade ne devrait pas être payée par la Ville et non l'Etat ! (Applaudissements.)

Mme Nicole Lavanchy (AdG). Je rejoins tout à fait la position de MM. Pagani et Grobet - vous l'imaginez bien - mais je tiens à prendre la parole sur cet objet. Si, moi aussi, je jette cette motion directement à la poubelle, c'est que vous puissiez prendre des positions aussi schizophréniques me choque. C'est-à-dire que vous envoyez des doubles messages à la population: pendant un temps, on est pour la proximité, pour les jeunes, etc., et puis, du jour au lendemain, on coupe 17 millions, on décide comme cela, sur un coin de table... Vous l'avez fait, vous l'avez écrit, et votre exposé des motifs sur cet objet n'était pas plus long que celui-là ! Il indiquait que «pour le canton, c'est tout à fait honorable; on va se rapporter à la constitution et faire juste ce qu'il faut avec l'Office de la jeunesse...».

Pour vous, l'Office de la jeunesse doit avoir un usage curatif. C'est-à-dire que vous laissez, en amont, des jeunes se désocialiser et que vous n'agissez plus dans le domaine préventif. Et après cela, vous venez nous dire: «Non, il faut redonner aux communes...», etc.

A propos des chômeurs en fin de droit, je ne me suis pas tellement exprimée lors du débat qui a eu lieu à ce sujet, car on avait encore un peu de respect pour votre position. Mais, au vu de ce qui se passe, je ne vais pas me gêner de dire que vous avez exactement le même discours sur les chômeurs en fin de droit: «On est pour soutenir les chômeurs en fin de droit, on va les aider...», etc. Et finalement, vous leur coupez leurs revenus !

Donc, le discours que vous tenez - là, je me dirige vraiment contre les démocrates-chrétiens ! - je le trouve franchement schizophrénique ! Et la population doit se rendre compte de ce que vous êtes en train de faire !

A lire le contenu de cette motion, ma seule envie est de la mettre à la poubelle, car je ne crois plus à vos propos.

M. Jean Spielmann (AdG). A la commission des finances, et dans ce Grand Conseil la dernière fois, nous avons déjà eu l'occasion de discuter des différentes propositions par rapport aux relations de l'Etat avec les communes, mais permettez-moi d'être étonné de la manière dont les choses se passent ! L'Entente est majoritaire dans quasiment toutes les communes. Elle a la possibilité de discuter avec quasiment l'ensemble des responsables des communes. Et que fait l'Entente ? Ces temps, vous traversez une mauvaise phase... (Rires.)Eh bien, l'Entente propose des projets de loi visant à supprimer des activités ! Et à quel moment les propose-t-elle, Monsieur Portier ? Le 16 novembre. Pourquoi cette date ? Presque personne ne le sait: parce que la loi sur l'organisation des communes oblige ces dernières, sauf la Ville de Genève, à déposer leur budget le 15 novembre ! Le 16 novembre, elles ont l'obligation de boucler leur budget et doivent l'avoir équilibré. Et vous proposez, le 16 novembre, des projets de loi qui suppriment aux communes 17 millions en faveur des activités socioculturelles ! Vous proposez la suppression du parascolaire sans avoir discuté avec personne et sans avoir parlé avec aucun magistrat communal pour examiner ces propositions. Et en commission des finances, vous étiez tellement convaincus de ce que les autres disaient que vous avez décidé de suspendre les projets de loi parce que vous aviez peur. Mais le mal était fait !

Et ce mal est profond, Mesdames et Messieurs les députés, car le problème est que le parascolaire et le socioculturel sont des édifices qui ont mis des années à se construire ! Il a fallu près de quarante ans pour mettre en place les maisons de quartier et pour faire accepter l'idée de leur fonctionnement. Si l'on suivait vos propositions, on devrait licencier au début de l'année quelque 420 personnes - dont 300 personnes à temps complet - puis supprimer le budget... (Huées.)Ce n'est pas vrai qu'il s'agit d'un transfert aux communes, puisque vous ne leur en avez même pas parlé ! Il s'agit purement et simplement de supprimer des subventions. Et pire que cela, vous n'osez même pas venir proposer des économies, mais vous décalez votre incapacité de gérer et vos déficits sur les communes !

Le problème, c'est qu'il y a derrière tout cela un gros travail de plus de quarante ans pour mettre en place les maisons de quartier. Pour le parascolaire, ce sont des années et des années de travail avec les communes avant que les projets puissent être mis en place avec les fondations qui s'y emploient. Et comment cela s'est-il passé pour le financement ? Cinquante pour cent pour les communes - avec une discussion entre les vingt-six communes possédant des maisons de quartier et toutes les autres - et cinquante pour cent pour le canton ! Pour mettre en place une politique cohérente, on a procédé par paliers de cinq pour cent par année jusqu'à arriver aux cinquante pour cent. Et ce furent de très longues négociations ! On arrive cette année à la dernière phase des cinq pour cent, et vous proposez d'enlever cinquante pour cent d'un coup, sans discuter avec les communes, sans débattre et sans même donner la possibilité de se retourner au niveau budgétaire puisque vous avez déposé le projet de loi le lendemain du dépôt du budget des communes !

Cette politique est inacceptable, car vous déstabilisez une partie de la population qui travaille dans des conditions difficiles et dans des domaines extrêmement importants pour les jeunes: le théâtre, les activités culturelles et toutes ces maisons de quartier. Pour vous, il n'y a que 300 postes à supprimer, c'est facile ! Mais derrière ces 300 postes - ils sont en général deux ou trois par maison de quartier - il y a des dizaines de milliers de volontaires, des gens qui travaillent dans le mouvement associatif, des gens qui sont sur le terrain... (Protestations. La présidente agite la cloche.)Et il y a des gens qui réalisent un travail politique remarquable. Mesdames et Messieurs les députés, cette politique est irresponsable ! Après avoir mis le feu dans ce secteur d'activité, que proposez-vous? «On suspend notre projet de loi, on n'ose plus le présenter, on va le mettre de côté.» Mais vous n'avez même pas le courage politique de retirer votre projet de loi et, pire que cela, vous venez ici, de manière hypocrite, présenter un projet qui vise à discuter, à concerter les communes à propos du transfert des charges... Voilà pour la partie culturelle.

Maintenant, concernant la partie économique. Pendant plus de quinze ans, les SIG ont essayé de sortir du trou financier dans lequel vous les aviez enfoncés. Or cette entreprise commence à tourner et à montrer des résultats. Vous faites quoi ?! Au premier bénéfice qu'ils présentent, vous le leur prenez ! C'est intelligent, comme mesure économique ! Parce que les SIG ont parfaitement la capacité de présenter un budget qui ne fasse pas de bénéfice, si c'est cela qui vous dérange ! Mais nous, au contraire, considérons que l'ensemble du personnel des SIG a fait un travail remarquable de distribution, et vous sabotez cela. Pourquoi ? Parce que vous n'avez pas de courage politique, vous êtes incapables de gérer les affaires de cette République et de rendre des budgets équilibrés. Et pour vous venger, vous prenez sur le dos des autres, vous sabotez les entreprises, vous sabotez le travail social des communes. Ah, c'est une belle politique ! Et vous avez le culot de venir nous dire que vous voulez faire de la concertation... C'est une guerre que vous avez déclarée. Cette guerre vous allez perdre, et on se chargera de bien vous la faire perdre ! (Applaudissements.)

Mme Véronique Pürro (S). Essayons de ne pas trop mélanger: je pense que nous aurons ce débat la semaine prochaine dans le cadre de la discussion sur le budget. M. Spielmann et ses collègues veulent aller dans cette direction-ci, et moi j'ai envie d'aller dans celle-là !

Parce que la proposition de se décharger sur les communes de la moitié du budget de l'OCPA, c'était vraiment tout ce qu'il y a de plus stupide... (Exclamations.)Stupide, dans la mesure où s'il y a bien un domaine - un domaine ! - où la répartition des compétences avait été clarifiée après un très long débat, c'est bien la loi sur les centres d'action sociale et de santé. Cette loi avait occupé la commission sociale pendant plus de vingt séances et fait l'objet d'un très long débat en plénière. Nous avions alors réussi à clarifier qui fait quoi, laissant aux communes l'action communautaire pour responsabiliser le canton sur l'action individuelle. Or, un ou deux ans plus tard, que faites-vous ? L'inverse ! Alors, ne nous trompons pas de débat.

Je reviens au débat sur la motion. Même si je partage ce qui a été dit à propos de la schizophrénie - ce que j'appellerais plutôt l'incohérence du PDC et de certains autres - cette motion a tout de même plusieurs mérites. Elle a notamment celui de réclamer une réflexion de fond. Cela a l'air basique, mais jusqu'à présent tout ce qui a été réalisé ne nous laisse pas entendre qu'on est allé dans cette voie. Alors, ayons une réflexion de fond !

Cette motion veut que les principaux acteurs que sont les communes participent à cette réflexion; on ne peut pas être opposé à cela. Même si je partage le point de vue de certains qui reprochent à l'ACG de n'être pas représentative pour toutes les communes, l'ACG bénéficie d'une base légale... (L'oratrice est interpellée.)... qui fait de l'ACG le partenaire de discussions entre le canton et les communes. Donc, changeons la loi !

Je suis prête à signer un projet de loi, Monsieur Grobet, pour changer la représentation des communes à l'ACG. Mais, tant qu'elle est ce qu'elle est, il faut admettre qu'elle est le partenaire de discussions.

Alors, j'ajoute une chose à cela, Monsieur Cramer: mon amendement n'est pas une guillotine ! Il a pour but de demander franchement: «Qu'allons-nous dire de plus dans les débats de commission que ce que nous avons exprimé ce soir ?» Si on est d'accord sur les buts, allons de l'avant ! C'est plutôt à vous de nous indiquer dans quel sens vous comptez aller, et à nous de vous dire si nous sommes d'accord ou non de vous suivre.

Certains d'entre vous nous ont laissé entendre, lors des derniers débats en commission, qu'étant donné la gabegie dans laquelle nous nous trouvions, un groupe de travail allait être mis sur pied avec les communes pour clarifier des compétences. Vous en avez vous-même fait allusion dans votre intervention précédente. Eh bien, laissons ce groupe travailler, et qu'il nous fasse des propositions ! Ensuite, on verra bien si on est prêt à le suivre ou pas, et avec quelles conséquences budgétaires. C'est une question de méthode.

La motion est bonne, nous sommes prêts à la renvoyer directement au Conseil d'Etat, pour autant qu'on y ajoute la fin de la méthode: c'est-à-dire qu'elle nous ramène à la discussion de fond avec les communes et qu'ensuite nous décidions ce que nous comptons en faire.

M. Philippe Glatz (PDC). J'ai bien entendu M. le président du département de l'intérieur signaler qu'il n'attendra pas le résultat de cette motion pour agir. Eh bien, j'en suis fort aise ! Cependant, je regrette un peu que vous ayez considéré cette motion comme du bouillon pour les morts, cela montre le peu de considération que vous pouvez avoir pour le travail parlementaire. Parce qu'en fait, lorsque nous rédigons une motion, Monsieur le président du département de l'intérieur, c'est pour vous donner les orientations et le cadre dans lesquels nous souhaiterions vous entendre négocier avec les communes. Il me semble qu'il serait dans votre avantage d'en tenir compte. Vous avez vécu l'échec de votre proposition de projet de budget, dont j'aimerais rappeler ici que cette proposition était unanime et solidaire du Conseil d'Etat. Et, à l'adresse de M. Spielmann ou de M. Grobet, je dirai que cette proposition de budget n'est pas seulement l'oeuvre des partis de l'Entente, mais du Conseil d'Etat, unanime.

Or, vous avez aussi ressenti que la proposition de l'OCPA était inacceptable. C'est bien pour cela que seul parti gouvernemental responsable... (Remarques.)... le PDC s'est attelé à chercher des solutions avec l'appui de ses partenaires de l'Entente. Ces solutions, nous les avons proposées dans un cadre défini, car nous avons rencontré, de la part des communes, un intérêt tout à fait manifeste à établir une nouvelle répartition des charges, et des responsabilités !

J'aimerais signaler à Mme Lavanchy, qui nous dit toujours qu'elle ne croit plus que l'on veut aider - d'ailleurs, elle est partie... J'aimerais donc lui dire qu'aider n'est pas, pour nous, centraliser. Nous ne sommes pas favorables à un Etat central omnipotent qui s'accapare toutes les compétences. Nous pensons que les communes ont un rôle fort à jouer dans cette République. Et il n'est pas question aujourd'hui de reprendre toutes ces compétences à charge de l'Etat; au contraire, il faut aller vers de la décentralisation ! Chère au coeur des Verts, d'ailleurs. Cette décentralisation passe aussi par la prise en compte de nouvelles responsabilités et, bien sûr, la maîtrise des charges qui accompagnent ces responsabilités. C'est en ce sens, nous souhaitions établir un dialogue constructif avec les communes, pour que, dans un intérêt commun, les uns et les autres parviennent à redistribuer des tâches qui se trouvent aujourd'hui aux mains d'un Etat centralisateur qui n'est plus de notre temps.

M. Alberto Velasco (S). J'ai bien entendu le discours de mon collègue Glatz... Vous avez déposé cette motion le 2 novembre et, bien entendu, c'est à cette époque que nous constatons tous qu'il y a un problème budgétaire. Et cette motion vient justement parce qu'on a des problèmes budgétaires ! Et ces problèmes proviennent de la baisse d'impôts de 12,5% - environ 500 millions par année - que vous avez effectuée... (L'orateur est interpellé.)Oui, mais j'y viens ! Parce que sinon, s'il n'y avait pas cette situation budgétaire, jamais vous n'auriez demandé le transfert de charges aux communes - jamais ! Et l'origine de cette motion est là ! Vous êtes dans une situation très difficile, vous avez besoin de vous en sortir, de trouver quelques millions, et ces quelques millions vous voulez les prendre là-dessus !

Mais, Monsieur le député Glatz - comme Monsieur le député Weiss et d'autres députés de l'Entente ici présents - vous étiez présents à la commission des finances, quand on a auditionné les communes ! Personnellement, j'ai pris acte que l'ensemble des communes n'était pas d'accord avec ce transfert ! Si vous en avez pris acte comme moi, mercredi matin, au point de décider d'ajourner sine die votre projet de loi, vous devriez faire la même chose avec cette motion ! C'est-à-dire l'ajourner sine die. Pour agir de manière cohérente: j'ajourne le projet de loi, donc j'ajourne la motion ! Et on attend de voir ce qui se passera mercredi prochain.

La réalité est là, Messieurs: vous voulez transférer ces charges pour essayer de trouver les 40 ou 50 millions dont vous avez besoin. Il faut arrêter le débat ici, Mesdames et Messieurs ! Vous avez eu une réponse mercredi matin, cela a duré toute la matinée. Tout à l'heure, vous avez vu dehors une manifestation des personnes qui ne veulent pas de ces transferts, et ces transferts sont beaucoup plus complexes que vous ne le croyez.

Je propose aux uns et aux autres d'en rester là. Ajournez votre motion, comme votre projet de loi, et on discutera l'année prochaine !

M. Pierre Weiss (L). On peut parfois, sans s'en rendre compte, discuter d'art moderne. Ceci n'est pas une motion, c'est une introduction à la discussion sur le budget. Et en réalité, un certain nombre d'intervenants ont ici procédé à un galop d'essai.

J'aimerais préciser deux points. Le premier à l'intention de M. le conseiller d'Etat Cramer, le second à l'intention de M. Grobet.

En ce qui concerne M. Cramer, nous n'aurions pas eu la discussion de ce soir s'il n'y avait pas eu, dans la préparation du budget, un transfert de charges à raison de 88 millions en direction des communes. Il l'a d'ailleurs rappelé, et je suis entièrement d'accord avec lui sur ce point. Nous aurions pu éviter cette discussion que je trouve un brin stérile, voire un brin désordonnée.

A l'égard de M. Grobet, j'aimerais ajouter que le mépris avec lequel - on parlait de respect tout à l'heure, à juste titre - il traite l'Association des communes genevoises qui, dans la situation actuelle, représente chacune d'entre elles, et dont aucune n'a jusqu'à présent renoncé à y participer, ce mépris n'est pas digne des quarante-cinq communes du canton, des quarante-cinq exécutifs... (L'orateur est interpellé.)Monsieur Guérini, auriez-vous l'amabilité de ne pas m'interrompre ? De ce point de vue, il faut tenir compte de la situation actuelle et collaborer avec l'ACG.

Peut-être que des maladresses de langage - ou d'action - ont été commises par les auteurs de la motion. Ils ne font que répondre à une erreur antérieure. En ce sens, je suis pleinement d'accord avec les propos de Mme Pürro qui propose de renvoyer au Conseil d'Etat - assortie ou non d'une modification des invites - la motion proposée. Nous verrons bien - j'espère plus rapidement que dans trois ou quatre législatures - ce qu'il convient de penser ou la façon dont le Conseil d'Etat conçoit les relations avec les communes. Il est vraien particulier - et M. Velasco s'en rendra compte dans la réponse du Conseil d'Etat - que les communes n'ont pas vu leurs recettes affectées par l'initiative libérale sur la baisse de 12,5% des impôts. Par conséquent, ce point-là doit aussi être pris en considération dans les discussions à venir.

J'aimerais terminer par le point polémique qu'a soulevé M. Spielmann en accusant l'Entente d'être dans une mauvaise phase actuellement. Je crois que c'est le propos d'un hôpital qui s'adresse à la charité... C'est parce que vous n'êtes pas simplement en phase avec l'actualité de ce canton, Monsieur Spielmann, que vous vous êtes lancé dans cette discussion ! Votre mauvaise foi sur les licenciements est évidente quand on sait qu'il n'y aura aucune conséquence pour les collaborateurs de la FAS'e... (Exclamations.)Dans la mesure où le projet de loi dont nous avons discuté en commission des finances a été suspendu sine die et que, par conséquent, l'Entente et la majorité parlementaire sauront trouver les solutions adéquates pour que, d'ici à la fin de l'année, nous adoptions un budget pour l'année prochaine, ce qui rassurera les citoyens de ce canton !

M. Pierre-Louis Portier (PDC). Je n'ai pas pu terminer tout ce que j'avais à dire lors de ma précédente intervention, mais je vais tenter d'être bref. Tout d'abord, je voudrais m'adresser à l'UDC, dont j'avoue très poliment, mais franchement, ne pas comprendre l'attitude ce soir. Vous, qui réclamez, dans ce parlement et dans la presse, que l'Etat s'organise, qu'il économise et qu'il réfléchisse à une réorganisation de son fonctionnement pour que les différentes collectivités publiques unissent leurs efforts afin d'épargner les deniers du contribuable, vous refusez d'entrer en matière sur une proposition qui va exactement dans le sens que vous souhaitez. Permettez-moi de m'étonner !

Deuxième chose: j'aimerais revenir très rapidement sur l'intervention de M. Spielmann qui nous traite d'incohérents lorsque nous faisons un certain nombre de propositions - encore une fois - constructives. Je rappelle que, premièrement, nous n'avons jamais voulu démanteler la FAS'e, quand bien même vous le criez à hue et à dia, car cela sert évidemment votre clientèle... (Brouhaha.)Il s'agit simplement de transférer le financement de l'Etat aux communes, je le répète clairement: il ne s'agit pas du tout de vouloir démanteler la FAS'e.

D'autre part, nous faisons des propositions de dépenses pour les communes, mais avec des recettes. Vous n'y adhérez pas, d'accord... Mais reconnaissez que l'on avance un certain nombre de propositions qui amènent quelque chose au débat et illustrent notre souci de trouver des solutions. Même si, parfois - je l'ai reconnu dans ma toute première intervention - elles ont été effectuées un peu rapidement et sans la concertation nécessaire. Je fais amende honorable: c'est en effet ce qui s'est passé. Mais à propos d'incohérence, Monsieur Spielmann, quand vous voulez faire voter à ce parlement un budget déficitaire de plus de 500 millions, alors que l'Etat a bientôt 13 milliards de dettes, où est l'incohérence ? (Rires. Remarques.)

Dernière chose. J'ai bien entendu M. Grobet qui, une nouvelle fois, veut faire payer les communes riches. C'est son leitmotiv: les communes riches doivent payer ! (Brouhaha.)J'ai regardé attentivement Mme Jeannine de Haller - qui acquiesce - qui l'écoutait attentivement et qui préside aux destinées d'une des communes - Carouge, pour ne pas la nommer. Cette commune a un des centimes additionnels les plus bas du canton - parce qu'elle est nettement en dessous de la moyenne cantonale - et, qui plus est, bénéficiera très prochainement de la manne fiscale de Pictet. En plus, elle pourra répondre aux faveurs de M. Grobet, puisque le Conseil municipal lui a refusé l'augmentation de 46% de ses jetons de présence ! (Applaudissements.)

M. Patrice Plojoux (L). Je ne vais pas revenir sur le cas de Carouge... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)Mais je voulais mettre quelques éléments au point concernant l'ACG comme partenaire dans des négociations.

J'aimerais tout d'abord rappeler que l'ACG n'est pas spécifiée dans la loi, c'est une association en tant que telle, c'est-à-dire qu'elle est régie par la loi sur les associations. Et les quarante-cinq communes font partie de cette association ! Les exécutifs de ces quarante-cinq communes sont - de par la loi, cette fois-ci - les représentants des communes. Les communes composent l'Association des communes genevoises par leurs exécutifs. Cette association est donc représentative des quarante-cinq exécutifs appartenant aux quarante-cinq communes - contrairement à une majorité en rapport à la population, comme au Grand Conseil, où les représentants de la population sont élus par rapport au nombre d'habitants. Par conséquent il n'y a qu'une seule voix par commune, et c'est tout à fait correct.

J'aimerais rappeler que l'actuel président de l'ACG est socialiste. (Remarque.)Simplement pour redire, aux gens qui prétendent que cette association ne représente que des bourgeois, qu'il n'y a pas que des gens de droite. Ce n'est pas vrai, le président est socialiste et beaucoup de personnes de gauche représentent des communes dans le comité de cette association. (Commentaires.)

Je tenais à rappeler ces quelques éléments à M. Grobet, qui porte une hargne furieuse à l'encontre de cette association, et dire également à sa collègue de ne pas trop l'écouter quand elle défend les communes !

La présidente. Madame de Haller, vous avez été mise en cause, je vous donne la parole.

Mme Jeannine De Haller (AdG). Effectivement, Carouge a un taux de centimes additionnels à 39 depuis fort longtemps. Il y a trois ans, le Conseil municipal a voté une augmentation d'un centime, car il en avait effectivement besoin. Et je vous rappelle que le parti démocrate-chrétien avait soutenu cette augmentation de un centime à Carouge.

Par ailleurs, Carouge a su - ou n'a pas su - que la Banque Pictet allait venir s'y installer. Cela rapportera à la commune de Carouge un certain nombre de francs. (Remarque.)Et d'emplois ! Tant mieux pour Carouge ! Qui n'a pas pu augmenter son taux, qui est très bas pour une commune suburbaine. Je rappelle que le taux est de 39 alors que celui des communes suburbaines est généralement à 48 et plus.

L'augmentation de la population de Carouge est la plus élevée du canton, c'est-à-dire de 39% depuis les années 80. Carouge est passée de 12 000 à près de 20 000 habitants; nous avons donc des infrastructures à construire, et, parce que notre centime est si bas, nous n'avons aucun appui, ni des communes, ni d'ailleurs. C'est nous qui construisons nos écoles, etc. Je ne vois donc pas où est le problème !

Je voulais juste corriger le tir à propos des 46% des jetons de présence. Il s'agit effectivement, Monsieur Portier, du fait que l'exécutif carougeois travaille à environ 70 ou 80% depuis un an et demi. Il est rémunéré. Ce n'est pas un salaire, ce ne sont pas des jetons de présence. Pour un poste à 40% - une évaluation a été faite - nous sommes beaucoup moins payés qu'à Lancy, Meyrin et Vernier. Il ne s'agit donc pas d'une augmentation de salaire, mais uniquement d'un réajustement en fonction des heures effectuées chaque semaine par l'exécutif de Carouge. (Applaudissements.)

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. A teneur de la loi portant règlement du Grand Conseil - il s'agit d'une loi que vous connaissez bien, puisque vous la modifiez fréquemment - une motion demande au Conseil d'Etat de faire rapport sur tel ou tel objet: c'est la définition de cet instrument. Vous vous proposez donc de voter sur une demande au Conseil d'Etat de faire rapport et, ma foi, il vous appartiendra de souhaiter ou pas un tel rapport.

Au cas où vous estimeriez souhaitable de voter l'ajout de Mme Pürro, je peux vous faire le rapport immédiatement. Cela simplifie les choses, et peut-être cela permettra-t-il à Mme Pürro de retirer sa demande d'amendement.

La situation du canton ne nous permet pas d'attendre aussi longtemps que le souhaiterait Mme Pürro. La situation des finances de notre République ne nous permet pas de nous donner paisiblement le temps de faire un rapport sur les compétences des uns et des autres, ni de faire ce rapport en tenant compte de la capacité financière de chaque commune, ni de le faire en concertation avec l'ACG, ni d'inscrire ce rapport dans le cadre d'une réflexion conduite de façon cohérente avec GE-Pilote, ni que, une fois ce rapport rédigé, il soit présenté au Grand Conseil. Je peux vous dire - c'est anecdotique - que la plupart des objets du département traités aujourd'hui sont à l'ordre du jour du Grand Conseil depuis près de deux ans. Donc, il faudrait encore attendre deux ans pour que votre Conseil se saisisse du rapport ainsi rédigé et que, après l'avoir examiné avec la sagesse qui est la vôtre, il puisse l'adopter. Malheureusement, Madame Pürro, nous n'avons pas le temps de faire tout cela. Parce qu'au rythme où avancent les déficits de nos budgets, au rythme où avance l'accroissement de notre endettement, si nous entendons que ce canton ait encore quelques ressources à consacrer aux tâches qui sont les siennes, à ces tâches indispensables notamment en matière de solidarité, eh bien, il est urgent d'agir ! Et agir, c'est notamment agir par un certain nombre de transferts de charges qui seront plus ou moins librement consentis par ceux qui en seront les bénéficiaires ou les victimes - à choix - mais qui devront intervenir avec une certaine urgence. Alors, il va de soi que ces transferts interviendront chaque fois dans un cadre légal, c'est-à-dire qu'il s'agit de lois votées et beaucoup plus rarement de règlements. Cela permet au Grand Conseil d'être chaque fois saisi d'un projet de loi, d'un exposé des motifs, et d'examiner tout cela. Mais aller au-delà, c'est tout simplement irréaliste, pour autant que l'on croie encore que cela a un sens de ne pas vouloir voir la dérive de nos finances continuer à s'accroître.

La présidente. Nous allons donc nous prononcer sur l'amendement présenté par Mme Véronique Pürro. Il s'agit d'ajouter cette invite: «A stopper toutes velléités de transfert de charges aux communes avant qu'un rapport sur les compétences des uns et des autres soit présenté et adopté par le Grand Conseil.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 51 non contre 17 oui et 4 abstentions.

La présidente. Dans la foulée, je vous soumets le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.

Mise aux voix, cette proposition de motion est rejetée par 44 non contre 29 oui.