République et canton de Genève

Grand Conseil

M 2022
Proposition de motion de Mme et MM. Ivan Slatkine, Jacques Béné, René Desbaillets, Gabriel Barrillier, Michel Ducret, Guy Mettan, Fabiano Forte, Dominique Rolle, Olivier Sauty, Henry Rappaz, André Python, Pascal Spuhler, Roger Golay, Jacques Jeannerat, Mauro Poggia, Thierry Cerutti, Jean-François Girardet, Christo Ivanov demandant un crédit d'étude pour la construction d'une route reliant la route de Base à la route de Soral par le pont de la Praleta

Débat

Le président. La parole est au premier des inscrits, M. le député Ivan Slatkine.

M. Ivan Slatkine (L). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, il faut croire que, ce soir, je suis amené à parler trop souvent de routes, et j'ose espérer que les Verts seront un tout petit peu plus raisonnables que lors du vote précédent !

La commission des travaux a voté à l'unanimité un projet, la troisième étape de la renaturation de l'Aire. Or, en étudiant ce projet de loi, nous nous sommes rendu compte qu'une petite route servant de liaison entre la route de Base et la route de Chancy allait être fermée au trafic automobile pour être destinée à la mobilité douce.

Alors, jusque-là, tout le monde est très content et très heureux: nous sommes pour le développement et la renaturation des cours d'eau genevois. Néanmoins, nous avons demandé l'audition des maires des communes de Confignon et de Bernex, pour nous assurer que la fermeture de cette route ne poserait pas de problème. Quelle surprise d'apprendre alors de ces maires qu'un gros trafic de transit passe par le pont et la route qui vont être fermés !

Nous avons aussi appris lors de cette audition que le DCTI a fait une réserve de gabarit pour construire une nouvelle route destinée au transport privé, mais aussi au transport public, parce que, comme vous le savez, près de cette zone va se développer le quartier des Cherpines, quartier qui appartient à la commune de Confignon, et le seul point de liaison entre ce nouveau quartier des Cherpines et la commune de Confignon passe aujourd'hui par le pont de Mourlaz, pont qui sera condamné au moment de la renaturation de l'Aire.

Cette motion, Mesdames et Messieurs les députés, poursuit donc un objectif très simple. Elle demande au Conseil d'Etat de présenter le plus rapidement possible un crédit d'étude à la commission des travaux pour qu'on puisse étudier la construction de cette nouvelle route, de telle sorte que nous puissions réaliser simultanément la troisième étape de la renaturation de l'Aire et cette nouvelle route, laquelle sera importante pour toutes les personnes qui habitent la région ainsi que pour le développement de celle-ci. J'ose espérer que, sur ce projet-là, les Verts ne seront pas aussi dogmatiques qu'ils l'ont été jusqu'à maintenant ! En effet, pour mémoire - et c'est un ancien magistrat de la commune de Perly qui me l'a dit - la personne qui avait promis cette route au moment de l'étude sur la renaturation de l'Aire, c'est M. Robert Cramer ! Il faut croire qu'il promet beaucoup de choses, mais ne les réalise pas !

M. Christo Ivanov (UDC). La votation populaire sur le déclassement des Cherpines-Charrotons a certes modifié la donne. En effet, sur la commune de Confignon va naître une nouvelle zone industrielle, et il faudra impérativement que les clients et les fournisseurs puissent avoir accès à cette zone. Le pont de Mourlaz depuis la route de Base, qui servait même de délestage en cas de bouchons sur l'autoroute de contournement, est une route avec un fort trafic, et il est impératif de trouver une solution à cette suppression. C'est pour cela que le groupe UDC soutiendra la motion 2022 qui demande la création d'une route élargie sur le pont de la Praleta.

M. Serge Dal Busco (PDC). Mesdames et Messieurs, chers collègues, je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de voir sur place les travaux de la deuxième étape, c'est-à-dire entre la frontière nationale et le pont de Lully. Ces travaux de renaturation ont été en la circonstance également des travaux de sécurisation du village de Lully. C'est absolument magnifique, c'est un projet vraiment extraordinaire, je dois pouvoir le dire, tant du point de vue environnemental que du point de vue de la sécurité des habitants. C'est quelque chose qui a permis de régler la grosse problématique des inondations de Lully en novembre 2002. En ce qui concerne les espaces publics, c'est aussi une réalisation absolument magnifique ! Je mentionne tout cela pour vous dire que ces travaux doivent être prolongés avec la troisième étape, qui a été votée en commission à l'unanimité, cela a été relevé. J'espère du reste que ce plénum va pouvoir voter très prochainement ce texte.

Il y a toutefois un petit souci, parce que comme l'a dit très justement M. Slatkine qui a présenté la motion, la troisième étape - celle qui suscite l'unanimité et l'enthousiasme des Bernésiens et des Confignonnais - pose un petit problème de mobilité et de liaison entre le sud, la plaine de l'Aire, et le plateau de la route de Chancy. Ce projet a déjà été discuté au sein du projet d'agglomération, et il figure d'ailleurs dans la fiche PSD 13 du projet de plan directeur cantonal. C'est donc quelque chose qui est tout à fait dans l'air, si vous me permettez ce mauvais jeu de mots !

Dans le cas d'espèce, si cette étude en démontre la nécessité, il sera tout à fait judicieux de réaliser ces travaux en même temps ou en tout cas de manière coordonnée avec les travaux de renaturation, dont on espère qu'ils vont démarrer rapidement. Pour moi, c'est totalement nécessaire. C'est la raison pour laquelle, au-delà de la nécessité de la liaison à créer entre le nouveau quartier des Cherpines et le centre historique de Confignon, il nous semble absolument indispensable d'entamer ces études, le plus vite possible, pour déterminer l'opportunité et la justesse du tracé et décider également quelle sera la nature de cet ouvrage qui devrait aussi servir à créer des liaisons transversales de transports publics, qui manquent cruellement dans cette région.

Le groupe démocrate-chrétien soutiendra donc cette motion, comme il soutiendra avec enthousiasme le vote du crédit pour la troisième étape de la renaturation de l'Aire.

Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, aïe, aïe, aïe, la hache de guerre est de nouveau déterrée ! Mais oui ! Demain, aux extraits, nous aurons un rapport de la commission des travaux chargée d'étudier un projet de loi du Conseil d'Etat pour la renaturation de l'Aire, et dans ce projet de loi ainsi que dans toutes les négociations sur ce périmètre avec les communes environnantes, particulièrement Confignon, il est prévu que le pont que vous voulez élargir avec cette motion soit normalement affecté - c'est ce qui est décidé dans le rapport - à la mobilité douce voire à un transport public.

Après, c'est vrai que, dans ce projet de loi que nous voterons demain, la renaturation de l'Aire et une possibilité pour le futur quartier des Cherpines seraient effectivement privilégiées, et une solution est en train de se discuter entre le DCTI, le DIM et les communes pour trouver une possibilité de remplacer le pont de Mourlaz mais à un autre endroit.

Mesdames et Messieurs les députés, cette motion est donc superfétatoire, elle est juste en contradiction avec tous les travaux qui ont été réalisés et par le DCTI et par le service de la mobilité, et que nous avons quelque part acceptés. Le groupe socialiste refusera donc cette motion.

M. Olivier Sauty (MCG). Contrairement à ce que vient de dire ma préopinante Mme Schneider Hausser, je ne considère absolument pas, ni le groupe MCG, que cette motion soit superfétatoire. Pourquoi ? Parce que la première étape de l'aménagement de la plaine de l'Aire a été un succès, et si l'on veut que la troisième soit également un succès, il faut faire les choses correctement !

Il est prévu de réserver un gabarit pour la route dans le projet de loi lié à cet aménagement. A notre sens, il est vraiment inutile et presque imbécile de commencer un chantier de renaturation et de le terminer, pour se rendre compte ensuite que les deux traversantes est-ouest qui restent sur la route de Soral et sur la route du Pont-du-Centenaire sont insuffisantes et qu'il faudra par la suite ouvrir un nouveau chantier pour faire une route !

C'est pourquoi le groupe MCG et moi-même vous invitons à soutenir cette motion de vos deux mains, Mesdames et Messieurs les députés. (Exclamations.)

Mme Anne Mahrer (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, c'est vrai, cette renaturation de l'Aire est essentielle. Elle est importante et elle est prévue notamment pour sécuriser le quartier Praille-Acacias-Vernets. Si ce quartier devait prendre l'eau, ce ne serait certainement pas à cause d'inondations !

Mesdames et Messieurs les députés, le nouveau quartier des Cherpines-Charrotons nous a été vendu comme un écoquartier. Je ne vois donc pas en quoi ce nouveau quartier amènera plus de trafic et plus de trafic motorisé, surtout. (Commentaires.) Je pense que ce qui est prévu dans le projet de loi 10827 - avec ce que Mme Schneider Hausser a indiqué - et ce qui a été discuté au niveau du DCTI est tout à fait suffisant, et les Verts s'abstiendront sur cette motion.

Mme Christina Meissner (UDC). Que la commune de Confignon souhaite relier ses quartiers entre eux ne peut être que légitime. Ce projet de route va effectivement relier la commune de Confignon à la nouvelle zone industrielle des Cherpines, que la majorité - à laquelle tout le monde n'a certes peut-être pas appartenu - a votée ! Dès lors, il est légitime que l'on écoute cette commune si elle désire relier ses quartiers.

Par contre, je ne peux m'empêcher de revenir en arrière, au passé de l'autoroute de contournement, et de rappeler qu'à cet endroit même elle a été enterrée afin d'éviter des nuisances pour les communes de Bernex et de Confignon. Il serait dès lors regrettable que, avec un tracé en surface mal étudié et mal positionné, on détruise ce que les Confignonnais et les Bernésiens ont gagné grâce à l'enterrement de l'autoroute.

Par ailleurs, je rappelle qu'il y a là une césure verte qu'il convient de préserver aussi par rapport au fait qu'il s'agit d'un projet de renaturation émanant de l'Etat qui sait ce qu'il fait, et que d'autre part cette étude de route doit se faire de manière coordonnée avec l'ensemble du projet.

Je proposerai que la motion soit renvoyée au Conseil d'Etat, pour que les départements s'entendent entre eux et trouvent la meilleure solution qui préserve la nature et satisfasse les habitants de la région.

M. Ivan Slatkine (L). Je réinterviens brièvement parce que j'ai entendu ce soir des choses qui m'étonnent de la part de personnes qui siègent à la commission des travaux. Monsieur le président, vous transmettrez à ma préopinante socialiste que le pont de Mourlaz sera destiné à la mobilité douce et que les TPG, justement, on veut les faire passer ailleurs ! Parce que ce que l'on veut privilégier sur le pont de Mourlaz, ce sont les vélos et les piétons. Pour nous, la vraie complémentarité, c'est de séparer le trafic automobile, qu'il soit public ou privé, de la mobilité douce. Alors, quand on vient me dire qu'on fera passer des transports publics sur un pont où il y aura des vélos et des piétons, vous m'excuserez, mais j'ai de la peine à comprendre la logique !

En ce qui concerne ma préopinante Verte, je crois qu'il n'y a pas grand-chose à dire: c'est désespérant, c'est la vision zéro de la croissance ! C'est la vision de la décroissance ! C'est cette vision Verte: il faut qu'on retourne au Moyen-Age ! Vous comprendrez, Monsieur le président, que le PLR ne peut pas partager un tel point de vue.

Pour conclure, je dirai à ma préopinante UDC que je comprends ses soucis, mais il s'agit de renvoyer ce texte au Conseil d'Etat pour lui demander un crédit d'étude. On n'a donc pas défini de tracé... (Commentaires.) On n'a pas dit si c'était en surface ou en sous-sol. On demande simplement que ce soit étudié et qu'on vienne nous proposer un projet qui se fasse simultanément ou parallèlement à la renaturation de l'Aire, car il serait bien dommage de terminer les travaux de renaturation de l'Aire pour devoir détruire ensuite ce qu'on a construit, parce qu'on va se rendre compte qu'on aura besoin d'une route, route qui à l'évidence sera une nécessité. Je vous remercie.

Une voix. Très bien !

M. Michel Ducret (R). Mesdames et Messieurs les députés, après toutes ces discussions pour savoir quel sera le trafic à cet endroit, si ce seront des voitures, des camions, des vélos ou des planches à roulettes et combien il y en aura, je crois que le plus important dans cette affaire, c'est de penser qu'un pont est un symbole et un lien. Et ce lien, il est clairement et totalement indispensable pour la cohésion de cette partie de la commune de Confignon avec le reste de cette commune déjà suffisamment dispersée, et dont c'est un souci primordial de trouver une cohésion territoriale.

Alors soyez d'abord favorables à ce lien indispensable à une collectivité qui recherche sa cohésion. En même temps, cela permettra à l'ensemble du périmètre de fonctionner et de bien fonctionner. Après, il sera toujours possible de régler ce que l'on voudra faire passer sur ce pont, mais ce qui est important aujourd'hui, c'est de dire qu'il faut ce lien !

En ce sens, cette motion est tout sauf superfétatoire, parce qu'elle demande un lien, un lien qui est indispensable à une partie de notre collectivité. Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous invitons à accepter cette proposition.

Une voix. Bravo !

Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, c'est bien volontiers que le Conseil d'Etat vous proposera, selon l'issue du vote sur cette proposition de motion, un crédit d'étude. Nous le verrons demain, ou plus probablement lors de la prochaine session, la renaturation de l'Aire est une urgence si nous voulons avoir un vrai développement à Genève, pour mener à bien le projet Praille-Acacias-Vernets, pour sécuriser ce périmètre, pour achever quelque chose. Et le maire de Bernex l'a souligné, il s'agit de quelque chose d'extraordinaire, une renaturation qui est un exemple pour toute la Suisse, et nous avons des visites de tous les cantons - nous pouvons en témoigner - pour voir ce projet pionnier ! Cette étape est l'une des plus importantes, et en parallèle mon collègue Mark Muller, puisqu'il s'agit des constructions, pourra vous proposer un projet, et nous espérons bien que ces projets pourront aboutir très prochainement. Nous vous invitons donc à nous renvoyer cette motion. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en procédure de vote.

Mise aux voix, la motion 2022 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 55 oui contre 13 non et 14 abstentions.

Motion 2022