République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 10127-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Chêne-Bougeries (création d'une zone de développement 3 principalement destinée à du logement à Grange-Canal au chemin de Challendin)
M 1801
Proposition de motion de Mmes et M. Michèle Künzler, Anne Mahrer, Christophe Aumeunier Pour une densification de la couronne urbaine : plus de logements à Challendin !

Premier débat

Mme Michèle Künzler (Ve), rapporteuse. Voilà un projet de loi qui a été voté à l'unanimité, mais, en fait, il ne s'agit pas d'un projet sans histoire... C'est trompeur. S'il a été voté à l'unanimité, c'est parce que nous y avons été contraints. Nous avons simplement voulu éviter le pire, c'est-à-dire ne pas gaspiller davantage ce terrain de 15 000 m2, sinon il n'y aurait eu là que six ou sept villas.

Ce projet n'est pas bon, mais nous vous invitons malgré tout à le voter. Je vous explique pourquoi il n'est pas bon. Il s'agit donc d'un terrain de 15 000 m2, magnifiquement situé le long de la route de Chêne, à côté du tram, et qui peut faire l'objet d'une vraie densification, d'autant plus qu'il est situé à proximité de la ville. Et que fait-on de ce terrain nu ? On limite la hauteur des gabarits à 13,5 mètres, comme dans les villages. Tout cela parce que la commune de Chêne-Bougeries a déjà refusé un projet limitant cette hauteur à 15 mètres, estimant que c'était une atteinte énorme à son paysage ! Le conseil municipal à l'unanimité a refusé le projet initial. C'est pourquoi le Conseil d'Etat a diminué la hauteur des gabarits, pour éviter de nouvelles oppositions. Résultat: huit personnes contre sept ont accepté ce projet. C'est un pur scandale !

Maintenant - et je crois que la commission de l'aménagement tout entière était d'accord sur ce point - cela suffit, les choses doivent changer ! Les communes qui n'ont pas de grands ensembles - et certaines d'entre elles sont plus particulièrement visées, car elles n'ont quasiment pas accepté de logement social sur leurs terrains - doivent maintenant aussi participer à l'effort commun pour le logement. Nous estimons qu'il est inadmissible que ce projet de loi fasse l'objet d'une telle limitation, d'autant plus que nous nous sommes trouvés contraints de le voter en commission, hier soir. J'ai dû rédiger le rapport cette nuit pour que nous puissions le voter aujourd'hui pour éviter le pire. Nous ne voulons plus nous trouver dans ce genre de situation.

En parallèle, nous avons déposé une motion qui, nous l'espérons, rencontrera un accueil favorable. Elle demande, même si la hauteur est limitée à 13,5 mètres, que l'on se fixe certains objectifs, à savoir de ne pas réaliser un village le long de la route de Chêne, à proximité du CEVA, à proximité de l'arrêt de tram. Il faut, au minimum, déterminer une densité et construire au moins 150 logements. Or, les plans qui ont circulé ne correspondent absolument pas au projet de loi qui proposait 150 logements. Ils en comptaient à peine 125, souvent très grands, qui ne répondent pas aux besoins essentiels de notre population.

Il faut voter ces deux objets, mais, je le répète, nous ne voulons plus que l'aménagement soit fait au rabais ! Nous voulons un aménagement de qualité, surtout dans des périmètres qui devraient être la ville de demain.

La présidente. Merci, Madame la députée. Sont inscrits: M. Walpen, Mme Mahrer, M. Guénat, M. Etienne, M. Aumeunier, M. Ducret et M. Cavaleri. M. Cramer s'exprimera ensuite. Le Bureau vous propose de clore la liste des orateurs. Je vous rappelle que nous arrêterons nos travaux à 23h et que nous avons encore une motion à traiter. Je voulais vous rendre attentifs à cela. Monsieur Walpen, vous avez la parole.

M. Francis Walpen (L). Auriez-vous l'obligeance de faire mentionner au Mémorial que, compte tenu du mandat politique que j'exerce au sein de la commune concernée, et par déontologie, je ne prendrai part ni au débat ni au vote ?

La présidente. Je vous remercie, Monsieur Walpen. Madame Anne Mahrer, vous avez la parole.

Mme Anne Mahrer (Ve). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, les deux commissaires Vertes à la commission de l'aménagement sont de fort mauvaise humeur... Mais elles ont, malgré tout, voté ce projet de loi. Elles sont de très mauvaise humeur, parce qu'elles ont découvert, lors de la deuxième séance de commission traitant de cet objet, qu'il fallait le voter en urgence en raison de l'échéance du délai du refus conservatoire, sous peine que ce périmètre ne reste en zone villas. Et ce n'est pas la première fois que cela nous arrive ! Nous avons donc demandé qu'une liste de tous les projets soumis à ce délai conservatoire nous soit présentée, comme le prévoit d'ailleurs l'article 11A, alinéa 5, de la loi sur l'aménagement du territoire, qui, finalement, n'est pas appliqué.

De très mauvaise humeur, encore, de constater que ce projet de loi précise en son article 2 une hauteur de gabarit à 13,5 mètres, alors que nous déclassons en zone de développement 3 ce périmètre desservi par les trams 12, 16, et bientôt 17, périmètre qui est pratiquement en ville et qui permet la réalisation d'une urbanisation exemplaire répondant aux critères du développement durable.

Mesdames et Messieurs les députés, nous voterons ce projet de loi, mais nous souhaitons que ce soit la dernière fois que nous ayons à travailler dans de telles conditions.

Vous avez aussi trouvé la proposition de motion 1801, qui exprime très clairement ce que ce déclassement devrait permettre, et nous vous invitons à lui réserver un bon accueil.

M. Philippe Guénat (UDC). J'avais promis que j'essaierais de rester calme, mais, chers collègues, ce soir j'hallucine ! Nul besoin de parler de la dépénalisation de la consommation du chanvre, pour vous écouter, les Verts ! Il n'y a pas si longtemps, M. Zbinden prenait la parole pour s'opposer énergiquement à tout rehaussement des bâtiments à Genève... Et aujourd'hui, vous vous lamentez à la pensée que ces bâtiments ne pourront pas dépasser 13,5 mètres !

Je voulais simplement faire remarquer qu'un jour vous voulez lancer un référendum contre la surélévation des bâtiments à Genève et, le jour d'après, vous vous plaignez que les immeubles ne puissent pas atteindre une certaine hauteur... C'est tout ce que je voulais dire.

Mesdames et Messieurs les Verts - j'ai pourtant une admiration sans borne pour vous, Madame Künzler... (Exclamations.) - je vous prie d'avoir un peu de cohérence et de consistance dans vos dires !

M. Alain Etienne (S). Nous sommes arrivés à un point tel que nous pouvons effectivement nous poser des questions, car nous nous trouvons dans l'urgence pour un périmètre qui a été identifié et que l'on nous propose de déclasser.

Le parti socialiste a toujours préconisé de suivre le plan directeur cantonal. Et si, depuis que le plan directeur cantonal est adopté, chaque groupe avait pris la responsabilité de l'appliquer dans son ensemble, nous ne nous trouverions pas dans la situation que nous connaissons aujourd'hui.

Effectivement, il y a urgence, car - cela a été dit - il y a un délai conservatoire. Nous, les socialistes, nous ne voulons pas de villas sur ce périmètre, c'est pour cela que nous soutiendrons ce projet de loi, même si nous ne comprenons pas pourquoi le gabarit des bâtiments est limité à 13,5 mètres et qu'il est inscrit dans la loi.

Nous pensons qu'il faut suivre les procédures et les processus habituels. Le plan directeur cantonal existe. Un déclassement de zone nous est proposé. Alors, nous devons voter le déclassement, et, ensuite, l'administration prépare le plan localisé de quartier. Puis, le Conseil d'Etat, avec le conseiller d'Etat en charge de l'aménagement, dirige les négociations avec les voisins et avec les propriétaires pour arriver à obtenir un maximum de logements, en fonction de la politique qui est indiquée dans le plan directeur cantonal. A savoir que, pour une zone de développement, l'indice d'utilisation du sol doit approcher le taux de 1,2. C'est la marche à suivre logique, et nous aimerions bien que les choses se passent ainsi.

Je suis donc très étonné de la situation. Certes un accord sur le logement est intervenu depuis... Je suis toutefois heureux d'apprendre que le parti libéral souhaite densifier ces périmètres au maximum. D'autant plus qu'à l'époque, au moment du projet Frontenex-La Tulette, l'Entente avait sorti du périmètre en question un petit mouchoir de poche pour réaliser quelques appartements, appelés «townhouses». Je ne me rappelle plus la densité, je crois que c'était au moins 1,2. Alors je le répète, je suis heureux de constater aujourd'hui que l'ensemble de ce parlement veuille appliquer le plan directeur cantonal et densifier au maximum les périmètres identifiés par le plan directeur cantonal.

En résumé, le parti socialiste votera le projet de loi tel qu'il est issu de la commission, ainsi que la motion.

M. Christophe Aumeunier (L). C'est une vraie colère qu'exprime ici l'unanimité de la commission de l'aménagement, pour des questions de forme et de fond. S'agissant de la forme, si ce soir nous sommes obligés de traiter ce projet en urgence, c'est tout simplement que la commission de l'aménagement a appris hier soir seulement qu'il faisait l'objet d'un délai conservatoire. Cela prouve, en définitive, un grave dysfonctionnement du département du territoire. Nous demandons au Conseil d'Etat de remédier à ce dysfonctionnement et de présenter la liste mentionnée tout à l'heure par la députée Anne Mahrer.

S'agissant du fond, oui, nous les libéraux, nous sommes réticents au déclassement de zones villas, parce que nous prônons, en définitive, la logique des zones, la densification de la zone de développement, la densification des zones 1 à 3. Cependant, le plan directeur cantonal, à certaines conditions, permet le déclassement de zones villas. Et, au regard de la pénurie de logements persistante, au regard de l'intérêt supérieur de construire du logement, nous sommes favorables au déclassement de certains périmètres, lorsqu'ils sont situés dans des zones urbaines, proches de voies de communication, lorsqu'ils sont d'une certaine importance quant à leur taille, lorsqu'ils sont libres de constructions, lorsque le propriétaire est d'accord de densifier. Lorsque ces conditions sont remplies, nous sommes effectivement d'accord de déclasser un périmètre pour pouvoir construire du logement.

L'ensemble de ces conditions étant en l'espèce réunies, il convient dès lors de déclasser. Mais alors, il faut déclasser comme il faut ! Et c'est la raison de l'énervement de la commission. Les conditions pour procéder à ce déclassement étant réunies, il faut déclasser comme il faut, c'est-à-dire en densifiant suffisamment ce périmètre, parce que densifier est générateur d'économies d'énergies et générateur d'économies d'eau. De plus, cela limite les transports publics et concentre en un lieu les prestations de l'Etat et les rentrées fiscales. En définitive, densifier répond à la logique que nous recherchons.

Mais, surtout, il faut prendre en considération que le sol est un bien qui n'est que très partiellement renouvelable, ce qui fait qu'il est rare et qu'il faut l'utiliser avec discernement. Déclasser pour limiter les gabarits à 13,5 mètres et prévoir une densité d'à peine 1, c'est du gaspillage ! Le département du territoire nous «gave» avec les écoquartiers et il nous propose un déclassement avec une densité d'à peine 1 ! La première des choses à faire pour réaliser des quartiers durables, c'est de densifier ! J'aimerais donc bien que le Conseil d'Etat prenne cet élément en considération et qu'il nous présente des dossiers plus denses.

La création de logements est génératrice de bien-être et de développement. Elle est génératrice de prospérité et de rentrées fiscales. Le Conseil d'Etat est responsable des densités appliquées dans les périmètres. Il doit faire savoir que cette notion est distincte de la qualité des projets et qu'en définitive les projets denses sont aussi des projets très agréables à vivre.

La commission à l'unanimité a été heurtée que des gabarits soient fixés dans une loi de déclassement. En effet, si l'on commence à introduire tout et n'importe quoi dans une loi de déclassement, ce ne sera plus une loi de déclassement, mais un animal juridique distinct: une sorte de plan, dont on ne sait pas très bien ce qu'il représente. Les déclassements doivent rester des déclassements: il faut déclasser certaines zones, mais il ne faut rien ajouter, notamment des restrictions quant aux gabarits.

Nous demandons donc au Conseil d'Etat d'agir avec vigueur et persévérance dans ce type de dossiers. Ce dossier est d'autant plus symptomatique, je le disais tout à l'heure, qu'il révèle un dysfonctionnement du département du territoire.

En résumé, vous l'aurez compris, nous sommes contraints de voter ce déclassement ce soir, si nous voulons que soient réalisés 125 à 150 logements. C'est ce que nous vous recommandons de faire.

M. Michel Ducret (R). Dans notre canton et depuis des dizaines d'années - c'est vrai - l'urbanisation se définit au travers des zones et celles-ci sont précisément caractérisées par les possibilités en gabarits de réaliser des constructions dans une zone donnée.

Vous constaterez donc que le fait de déclasser un périmètre en zone 3 de développement - qui suppose un minimum de réalisations, à 21 mètres à corniche selon les gabarits de cette zone - et limiter la hauteur des gabarits à 13,5 mètres, c'est nier le contenu potentiel d'une zone de développement 3 telle que nous la connaissons. Pourtant, nous ne pouvons pas nous permettre le luxe de retarder encore les constructions qui sont prévues sur ce périmètre, et c'est d'ailleurs inique par rapport aux investisseurs qui attendent de pouvoir aller de l'avant.

En conséquence, le groupe radical votera, bien entendu, ce projet de loi, mais il est d'avis que nous ne pouvons plus, Mesdames et Messieurs les députés, nous permettre le luxe de persister à gaspiller notre territoire en sous-occupant des terrains si proches du centre urbain, situés sur un axe majeur des transports publics.

Aussi nous souhaitons marquer notre désapprobation d'un tel choix en soutenant la motion déposée par Mme Mahrer, Mme Künzler et M. Aumeunier, laquelle, si elle reste certainement sans effet sur ce projet-là, manifeste le désir très partagé - en commission, en tous les cas - d'un meilleur urbanisme, et cela dans l'intérêt public. Un urbanisme de transition, qui permette de passer de zones très urbanisées à des zones qui le sont un peu moins, vers un urbanisme peut-être plus détendu, plus vert, un peu moins dense, qui permette quand même des réalisations sociales et écologiques, mais aussi attractives pour des personnes qui ne souhaitent pas forcément s'établir dans des villas et qui restent des contribuables intéressants sur les territoires fortement urbanisés de notre canton.

Vous l'aurez compris, l'aménagement du territoire ne doit plus, à nos yeux, être une somme de ce que nous ne voulons pas; il ne doit plus être une somme des égoïsmes des uns et des autres. Tout cela ne produit rien de bon pour notre avenir. Nous voulons un aménagement plus cohérent et plus moderne pour l'avenir de Genève.

Une voix. Très bien ! C'était parfait !

M. Mario Cavaleri (PDC). Le groupe démocrate-chrétien souhaite d'abord remercier Mme Künzler pour la célérité avec laquelle elle a rendu son rapport. En effet, comme cela a déjà été expliqué, il fallait absolument que notre Grand Conseil puisse prendre une décision ce soir.

Le groupe démocrate-chrétien s'associe également aux nombreuses doléances exprimées quant à la nécessité de traiter ce point en urgence, en fonction du délai conservatoire, qui a été rappelé très précisément par Mme Mahrer. J'ai envie de dire, au nom de tous les commissaires de la commission de l'aménagement, à l'adresse du Conseil d'Etat: «Plus jamais ça !» Plus jamais ça ! Il n'est pas possible de travailler dans de telles conditions: Monsieur le conseiller d'Etat, vous l'avez compris, et je vous en remercie ! Je le répète, il est vraiment tout à fait inadmissible que les députés doivent travailler dans de telles conditions !

En ce qui concerne la motion - que nous traitons, par économie de temps, avec le projet de loi - le groupe démocrate-chrétien n'a pas pu la cosigner précisément en raison du manque de temps, compte tenu de la nécessité de déposer le texte rapidement. Mais nous nous y associons, bien sûr, étant entendu que nous tenons également à insister sur la question de la mixité entre activités et logements, telle qu'elle est prévue dans le projet qui nous a été présenté d'une manière que je qualifierais d'officieuse, plus qu'officielle. Sans vouloir parler davantage de la motion, je voudrais tout de même dire que, pour ma part, je fais confiance au Conseil d'Etat pour ce qui est de la qualité des logements qui seront réalisés à cet endroit. Dans le cadre de la zone de développement, la direction du logement a la responsabilité de vérifier et les plans financiers et les plans techniques. Par conséquent, dès lors qu'il s'agit d'une zone de développement, les logements doivent répondre à un besoin prépondérant d'intérêt général - il s'agit - sauf erreur - de l'article 5 de la LGZD. Nous devons donc faire confiance au Conseil d'Etat pour que les plans des logements qui seront construits correspondent en effet aux objectifs et aux attentes de la population. C'est ce qui est très important.

Enfin, s'agissant des gabarits, nous ne pouvons également que déplorer les fourches caudines de la commune sous lesquelles il a fallu passer. Je regrette, mon cher collègue, d'avoir à le dire de cette manière, mais il est vrai que - et je reprends les propos de M. Ducret, du groupe radical - nous ne pouvons pas accepter, dans un périmètre qui doit être considéré comme quasi urbain - pour ne pas dire urbain, tout court - de telles contraintes en termes d'aménagement du territoire.

Vous l'avez compris, nous sommes aussi favorables à une utilisation économe de notre territoire et nous espérons que le Conseil d'Etat pourra aménager ce périmètre au mieux, dans le cadre des contraintes qui ont été relevées lors des travaux de commission, pour arriver à un résultat qui soit, en définitive, le plus satisfaisant possible.

Mme Michèle Künzler (Ve), rapporteuse. Je voudrais juste revenir sur la question de la densité et de gabarit. Nous sommes-nous opposés à la loi sur les surélévations ? Non ! D'ailleurs, elle sera bientôt votée. Mais nous nous trouvons dans une situation fort différente: aux Pâquis, la densité est de 4; dans le dossier qui nous occupe, nous ne sommes même pas à 1, et cela dans un périmètre tout aussi urbain. En ce qui nous concerne, nous voulons maintenant la création d'écoquartiers, des quartiers de qualité. En effet, non seulement il faut construire le plus de mètres carrés possible, c'est ce que l'on a toujours fait, mais en tenant compte du critère de qualité, avec, surtout, un espace public de qualité ! Car le biotope de l'être humain est un lieu construit, un lieu où les êtres humains peuvent avoir un lien social. Il ne s'agit pas seulement de mètres cubes juxtaposés. Et il faut véritablement que nous changions notre optique à Genève en matière d'aménagement. C'est pour cela que nous ne n'avons plus envie de construire: il suffit de penser à la Tambourine, ou à d'autres très mauvais exemples, qui sont des endroits que les gens n'aiment pas.

Nous devons construire en densifiant suffisamment les périmètres concernés et en réalisant des bâtiments de qualité, à proximité des transports publics. Il faut réaliser davantage de logements, et malheureusement ce projet n'en prévoit pas suffisamment. D'ailleurs, le préavis de la direction du logement est défavorable, parce que le projet prévoit des appartements de six pièces, de 180 m2, dans de petits immeubles, ce qui ne correspond pas vraiment aux besoins prépondérants de la population.

J'invite par conséquent le Conseil d'Etat à se pencher sur ce périmètre et à faire mieux, là et ailleurs aussi.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Tout d'abord, à la suite de l'administration, je tiens à exprimer tous mes regrets à ce Grand Conseil en ce qui concerne le couac qui s'est produit par rapport aux délais extrêmement contraints dans lesquels vous avez dû travailler en raison du délai du refus conservatoire et, pire encore, parce que l'administration n'avait pas réalisé qu'elle était tenue à des délais très brefs. Je le regrette infiniment ! C'est à juste titre que vous demandez la liste des refus conservatoires qui sont actuellement à l'examen. Nous vous la remettrons, bien entendu. J'exprime aussi toute notre gratitude au rapporteur de la commission, qui a rendu un rapport extrêmement fourni, précis et riche, tout cela en une nuit. C'est un véritable tour de force, et je m'incline devant ce travail. Merci infiniment, Madame la rapporteure !

Au-delà de cela et quel que soit le ton critique avec lequel l'un ou l'autre d'entre vous a pu s'exprimer, je tiens à vous dire que je jubilais en vous écoutant. Je jubilais parce que, à travers vos différentes interventions, vous avez réellement indiqué les critères, les conditions, qui devront dorénavant présider aux déclassements, lorsqu'il s'agira de périmètres situés à proximité de la zone construite. Je demanderai donc aux services de l'administration de lire très attentivement ces pages du Mémorial, en particulier l'intervention de M. Aumeunier - extrêmement fournie - ainsi que celles de M. Cavaleri, de M. Etienne, et, bien sûr, le rapport qui a été rédigé suite aux travaux de la commission.

Vous avez fixé des critères: j'en ai retenu quelques-uns. Le premier consiste, en matière de places de parking, à ne pas surcharger les coûts de construction en prévoyant 1,4 ou 1,6 place par logement, lorsqu'il s'agit d'un emplacement bien desservi par les transports publics.

Ensuite - et c'est le plus important - en matière de densité, il n'est pas acceptable de descendre en dessous de l'indice de 1,2. Et puis, il faut aussi se méfier de construire des logements trop grands. C'est aussi une façon de répondre à la crise du logement.

Enfin, vous avez rappelé à juste titre que ces critères se retrouvaient dans le concept d'écoquartier. Un écoquartier n'est pas un quartier composé de trois maisons qui se perdent dans la forêt: c'est un quartier dense situé en milieu urbain. Ces critères nous seront extrêmement précieux dans les discussions que nous devons avoir au quotidien pour réaliser des plans localisés de quartier.

Vous avez bien compris ce qui s'est passé dans ce projet ! Le premier projet du département correspondait, dans une certaine mesure, aux critères dont nous venons de parler. Ce projet a été refusé à l'unanimité par la commune, et, pour éviter de passer outre à ce refus, nous avons présenté un deuxième projet que la commune a accepté «par les poils». Mais, comme vous le dites, ce projet est mauvais.

Alors, quelle sera la suite des événements ? Il me paraît important de vous l'annoncer loyalement. Tout d'abord - bien sûr, en partant de l'idée que vous accepterez cette motion - nous nous efforcerons de la mettre en oeuvre. Mais je vous dis tout de suite qu'avec une limitation des gabarits à 13,5 mètres un indice de 1,2 ne sera pas facile à mettre en oeuvre. Il faudra donc voir dans quelle mesure il sera possible de revenir sur ce projet de loi par des procédures simplifiées. Des pistes sont évoquées dans le cadre du rapport, nous les examinerons. En tout cas, vous aurez une réponse à cette motion.

Au-delà de cela, Mesdames et Messieurs les députés - particulièrement vous, qui siégez à la commission de l'aménagement - vous allez avoir une nouvelle responsabilité. En effet, dorénavant, en cas de blocage, j'arrêterai de discuter avec les communes. Je susciterai des préavis négatifs des communes, et, ensuite, nous suivrons la loi. C'est-à-dire que nous reviendrons devant le Grand Conseil pour lui exposer le problème et lui demander de trancher entre le projet proposé par l'autorité - je pense notamment aux plans localisés de quartier - et le refus de la commune. Le Grand Conseil jouera le rôle d'arbitre. C'est très volontiers que je partagerai votre décision. C'est très volontiers aussi que je m'inclinerai si, ici ou là, l'administration devait être désavouée par rapport aux communes, mais je crois véritablement que ce débat, par la clarté de vos propos, nous donne des indications nouvelles dans les rapports que nous devons avoir avec les communes du canton. En outre, vous nous donnez aussi des indications quant aux projets acceptables à vos yeux qui nous permettraient de passer outre un certain nombre de refus.

C'est donc ainsi que nous procéderons, et je vous signale d'ores et déjà que le premier dossier concerné par ce mode de faire - et ce n'est pas un dossier mineur - sera celui des Communaux d'Ambilly, dont vous aurez connaissance dès le mois de janvier.

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant la prise en considération du projet de loi 10127.

Mis aux voix, le projet de loi 10127 est adopté en premier débat par 65 oui et 4 abstentions.

La loi 10127 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 10127 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 67 oui et 4 abstentions.

Loi 10127

La présidente. Je vous soumets maintenant la proposition de motion 1801.

Mise aux voix, la motion 1801 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 65 oui et 4 abstentions.

Motion 1801