République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 10h10, sous la présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, présidente.

Assistent à la séance: MM. Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat, Carlo Lamprecht, Micheline Spoerri, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Luc Barthassat, Janine Berberat, Anita Cuénod, Gilles Desplanches, Antoine Droin, René Ecuyer, Jean-Claude Egger, Philippe Glatz, Mariane Grobet-Wellner, Nelly Guichard, Michel Halpérin, David Hiler, Sami Kanaan, Nicole Lavanchy, Claude Marcet, Blaise Matthey, Jacques Pagan, Pascal Pétroz, André Reymond, Jacques-Eric Richard, Jean Rossiaud, Pierre Schifferli, Patrick Schmied et Ivan Slatkine, députés.

Discussion et approbation de l'ordre du jour

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous annonce que le point 153, projet de loi 9428-A, sera traité à 14h. Il s'agit de l'objet que vous avez, ce matin, accepté de traiter en urgence.

Annonces et dépôts

Néant.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons le cours de notre ordre du jour avec le point 40, soit le projet de loi 8858-A.

PL 8858-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi de Mme et MM. Mark Muller, Janine Hagmann, Jacques Pagan, Hugues Hiltpold, Jacques Jeannerat, Gabriel Barrillier, René Koechlin, Jacques Baud, Jean-Claude Egger, Pascal Pétroz, Jacques Baudit modifiant la loi sur les forêts (M 5 10)

Deuxième débat

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle que nous avons commencé à traiter ce projet de loi dans la précédente séance et que vous en avez accepté la prise en considération. Monsieur le rapporteur de minorité, vous voulez ajouter quelque chose ?

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Oui, merci, Madame la présidente. Nous avons discuté avec mon collègue Christian Grobet de l'amendement que j'ai présenté, dont le but était simplement de rétablir la situation antepour protéger le département de toute procédure qui viserait à légaliser les plans d'affectation adoptés avant le 15 novembre 1999. Mais on s'est aperçu que la loi telle que libellée aujourd'hui n'était pas claire. C'est pourquoi je retire le premier amendement que j'ai présenté, en faveur d'un nouvel amendement visant à clarifier cette notion, pour éviter que des recours ne soient interjetés - comme je viens de le dire. C'est en effet un débat extrêmement technique.

Mon amendement consiste simplement à ajouter une deuxième phrase à l'article 11, alinéa 2, lettre c). En voici la teneur: «La dérogation ne peut pas être accordée pour les alignements fixés dans les plans d'affectation du sol adoptés avant le 15 novembre 1999, si les alignements dérogent à la loi.»

La présidente. Je reformule vos propos. Vous voulez supprimer le premier amendement concernant l'article 11, alinéa 2, première phrase: on l'oublie. Et vous nous proposez un nouvel amendement, que je n'ai pas encore en main. Il va être distribué et, pendant ce temps, je donne la parole à M. Christian Grobet.

M. Christian Grobet (AdG). Il y a un principe qui est toujours délicat à interpréter, à savoir déterminer à quel moment on peut appliquer des dérogations et dans quelles conditions.

La loi sur les forêts fixe un certain nombre de règles en ce qui concerne les distances à respecter par rapport à la forêt. Par le biais de l'article 11, on souhaite introduire des possibilités de dérogations par rapport à la loi actuelle. On peut, par une loi spéciale ou par une décision spéciale, déroger à une loi si c'est prévu expressément. Cela ne me pose pas de problème que l'on puisse accorder une dérogation en adoptant un plan localisé de quartier, ou un plan de zone, ou un plan d'alignement.

Par contre, cela pose problème pour les plans d'affectation du sol qui sont antérieurs à la loi sur les forêts qui est entrée en vigueur le 15 novembre 1999. Je m'explique: si l'on traite d'un plan localisé de quartier ou d'un plan de zone qui remonte aux années 1970 et qui prévoit une distance de 15 mètres de la forêt alors que, normalement, elle doit être de 30 mètres, je considère qu'un tel plan ne devrait pas pouvoir déroger à la loi entrée en vigueur le 15 novembre 1999. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)

En d'autres termes, les plans d'affectation du sol antérieurs à la date du 15 novembre 1999 ne devraient pas pouvoir appliquer des dérogations. Il faudrait à ce moment-là adopter un nouveau plan d'alignement, ce qui n'est pas compliqué. Mais, je le répète, il serait tout de même assez choquant que des plans d'affectation du sol relativement anciens puissent déroger à une loi votée postérieurement. J'estime que ce serait violer le principe selon lequel c'est la dernière loi adoptée qui fixe la règle. Et les dispositions antérieures à la loi ne devraient pas pouvoir être appliquées sans que de tels plans ne soient modifiés ou qu'un plan d'alignement ne le soit. Et l'introduction du plan d'alignement dans l'article 11 permet, précisément, d'accorder une dérogation si cela se justifie.

On sait que, normalement, les plans d'affectation du sol devraient être réexaminés tous les cinq ans. C'est évidemment quelque chose d'impossible à faire... C'est pour cette raison - parce que les plans d'affectation du sol ne sont pas mis à jour régulièrement - que certains plans comportent des dispositions qui sont devenues obsolètes.

Je soutiens par conséquent l'amendement de M. Pagani.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Je dois vous prier, Madame la présidente, de m'excuser... En fait, je vous ai demandé de supprimer le premier amendement sur l'article 11, alinéa 2, première phrase, mais, en réalité, le débat que nous menons maintenant porte sur l'article 11, alinéa 2, lettre c). Je m'excuse platement et je vous prie de revenir sur ce que je vous ai dit tout à l'heure. Je vous demande donc de bien vouloir prendre en considération le premier amendement que j'ai déposé au sujet du «préavis favorable» et de revenir ensuite sur ce dont nous venons de discuter et que vient d'évoquer M. Grobet.

La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité. Vous ne me simplifiez pas la vie... Monsieur le député, René Koechlin, je vous donne la parole.

M. René Koechlin (L). Merci, Madame la présidente. A propos de ce débat, je voulais tout de même relever que les circonstances changent et que les motivations s'inversent au fil du temps, des années. Et l'on peut vraiment se poser des questions concernant les règles de distance à respecter par rapport aux forêts.

Je vous rappelle en effet, Mesdames et Messieurs, qu'à l'origine la Confédération - à la demande des CFF - a voulu que soit respectée une certaine distance par rapport aux forêts, notamment lors de la construction de voies ferrées, pour protéger précisément les voies ferrées contre des chutes intempestives d'arbres ou de branches. Puis, cette règle a été étendue aux constructions pour protéger les constructions - les constructions ! - contre d'éventuelles chutes d'arbres ou de branches, lors de certains phénomènes naturels, comme le cyclone qui a frappé notre pays il y a quelques années.

Et puis, maintenant, la motivation de cette règle est inversée et on dit qu'il faut respecter cette distance non plus pour protéger les constructions mais pour protéger ces «chères forêts»... Mesdames et Messieurs, on ne sait plus très bien de quoi on parle ! Je trouve ce débat ridicule ! Je vous assure qu'on peut construire à 10 mètres d'une lisière de forêt sans porter du tout atteinte à la forêt en question. Par contre - et c'est ce qui me paraît extrêmement important - si les arbres atteignent 15 ou 20 mètres, une construction peut en effet être en danger si elle n'est pas éloignée d'autant. C'est cette motivation de sécurité qui est essentielle et à laquelle, à mon avis, nous devons rester attachés. Il est par conséquent possible de déroger à la règle des 30 mètres en fonction de la hauteur des arbres en lisière d'une forêt et du caractère de la construction, en considérant les risques que celle-ci pourrait courir en étant placée à moins de 30 mètres de la lisière en question.

Mesdames et Messieurs, je vous demande de revenir à la raison et de tenir compte des circonstances qui ont motivé ces règles d'alignement et de distance par rapport aux lisières des forêts et de ne pas inverser ces motivations. Pour moi, c'est un faux débat, et on se trompe d'objectif !

Cela dit, je ne peux pas soutenir l'amendement de M. Pagani, parce que je pense qu'il faut pouvoir déroger à la loi s'il y a une bonne raison de le faire. Par contre, en cas de risque réel, il faut rester prudent et ne pas octroyer de dérogation. Il me semble, pour ma part, qu'il appartient à l'exécutif, et en particulier au département responsable de ces questions, d'être très attentifs aux risques encourus en approchant trop une construction d'une lisière de forêt. C'est une appréciation qui doit être faite de cas en cas, et il ne faut pas généraliser et fixer cette limite dans une loi.

M. Christian Grobet (AdG). Je voudrais vous répondre, Monsieur Koechlin... Je dois dire que je suis quelque peu étonné des propos que vous venez de tenir.

Il est certainement vrai qu'au départ - je ne mets pas en doute votre affirmation - c'est pour des questions de sécurité qu'une distance minimum par rapport aux chemins de fer a été fixée. Mais, entre-temps, Monsieur Koechlin, que vous adhériez ou non à cet objectif, la loi sur les forêts - déjà sur le plan cantonal - en portant la distance de construction à 30 mètres par rapport à la lisière de la forêt, a voulu précisément tenir compte de considérations environnementales et de protection de la nature.

Depuis lors - j'attire votre attention sur ce point, Monsieur Koechlin - la loi fédérale sur les forêts a été adoptée, et cette loi-là est extrêmement stricte, puisqu'elle prévoit que les peuplements boisés sont d'une surface relativement modeste, et que, sur le plan fédéral, on considère que la distance minimale de construction est de 25 mètres. Donc, nous sommes de toute façon liés par le droit fédéral. Que ce droit fédéral vous plaise ou pas, il en est ainsi ! C'est vrai qu'à Genève cette limite minimale de 25 mètres a été portée à 30 mètres, mais il faut, quoi qu'il en soit, respecter l'exigence du droit fédéral.

Vous n'étiez peut-être pas là tout à l'heure, lorsque nous avons discuté d'un amendement proposé par M. Pagani à l'article 11: j'ai dit que j'estimais normale la suppression de la référence à des lois en force; par contre, et je persiste à le dire, ce que je trouve anormal, c'est que des dispositions qui ne respectent pas le droit fédéral et la loi cantonale puissent être applicables, je dirai, à titre rétroactif.

Il me semble que cette question doit être clarifiée, d'où le nouvel amendement de M. Rémy Pagani, qui renonce, par contre, à modifier le début de la lettre c) de l'alinéa 2 de l'article 11.

M. Mark Muller (L), rapporteur de majorité ad interim. Je regrette un peu la tournure de ce débat. Ces aspects techniques auraient en effet dû être examinés en commission, d'autant plus que les travaux de commission ont été assez longs et que le libellé de ces dispositions a été très détaillé. Je le répète, je regrette que ce débat se fasse maintenant.

Cela étant, les amendements, notamment ceux présentés par M. Pagani, m'inspirent les remarques suivantes.

Dans son premier amendement, M. Pagani demande de lier l'octroi d'une dérogation au préavis favorable de la commune concernée... Vous le savez, la pratique en usage dans le canton consiste à consulter les communes. Elles peuvent donner un préavis positif ou négatif, mais cela reste un préavis. S'il faut que le préavis de la commune soit positif, cela revient à donner un droit de veto à la commune, ce qui ne se justifie pas - dans ce domaine plus encore que dans d'autres. Je propose, pour conserver une certaine unité de notre système, d'en rester à la pratique habituelle, c'est-à-dire que la commune est consultée et le département décide, en tenant compte du préavis de la commune quel qu'il soit.

Je propose également le rejet du deuxième amendement proposé par M. Pagani. Et cela, pour deux raisons: tout d'abord, à mon sens, il n'apporte pas grand-chose, puisque ce que nous voulons, c'est pouvoir déroger par le biais d'un plan qui doit suivre une procédure assez lourde sur le plan administratif. Il n'y a donc pas de danger que l'on remette en cause des droits acquis. Le libellé issu des travaux de commission me paraît un garde-fou suffisant. D'autre part, je dois avouer que je ne comprends pas très bien le sens de l'amendement de M. Pagani. Si le département devait l'appliquer ou, encore pire, si des tribunaux devaient être appelés à trancher des litiges relatifs à l'application de cet amendement, je craindrais fort que ne règne une très grande incertitude. Dès lors que cet amendement n'apporte à mon sens rien sur le fond, je propose de ne pas le retenir et de le refuser.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Monsieur le rapporteur, le premier amendement demande un préavis favorable non seulement de la commune, mais, aussi, de la commission consultative de la diversité biologique, de la commission des monuments, de la nature et des sites et du département de l'intérieur, pour que ce dernier puisse accorder une dérogation... Je suis catégoriquement et définitivement opposé à cette proposition: une telle exigence nous ligoterait complètement ! Autant remplacer mon département par un petit ordinateur et saisir les préavis ! La responsabilité politique ne pèserait plus sur les décisions prises. Je ne pense pas que vous puissiez vouloir une chose pareille ! Je vous demande donc avec force de rejeter ce premier amendement.

Le deuxième amendement concerne la validité des plans antérieurs à 1999. Cela pose à juste titre une question de sécurité du droit, car on ne peut pas retirer, par exemple, des droits à bâtir sur des plans sans faire en sorte que des situations antérieures - dont on ne veut plus qu'elles se produisent et qui ont motivé une nouvelle loi - puissent tout de même se produire.

A partir de là, je ne suis pas sûr que cet amendement résolve ce problème, parce que, de toute façon, en matière de plans d'affectation - et cela nous complique bien la tâche - les tribunaux exigent qu'ils soient relativement récents pour être valables. D'ailleurs, la validité même de tous ceux qui ont été adoptés sans la procédure prévue par la LAT et par la LaLAT est discutable. Il me semble donc qu'il faudrait éviter d'être trop catégorique dans un sens ou dans un autre, et, pour ce faire, il ne faut pas accepter cet amendement. Car ce qui va se produire, Monsieur Pagani, c'est qu'en cas de doute on va forcément passer par un nouveau plan d'alignement pour éviter l'incertitude juridique de la validité du plan précédent.

Nous sommes fondamentalement d'accord sur le fait que, dans un système dérogatoire, il convient d'être strict dans les cas de dérogations. Et, dans un tel cas, il faut un instrument de planification soumis à la procédure démocratique d'adoption d'un plan d'affectation.

Dès lors, je propose de ne pas résoudre la question de la date de validité des plans, comme vous le faites. Je propose de conserver le texte initial issu des travaux de la commission.

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'un amendement proposé par M. Pagani à l'article 11, alinéa 2, première phrase. Cette première phrase ne figure pas dans le projet de loi tel qu'issu des travaux de la commission, mais vous pouvez la trouver au verso de la feuille d'amendement qui vous a été distribuée. Cet amendement consiste à remplacer «après consultation» par «sur préavis favorable». Il se lit ainsi: «Le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement peut, sur préavis favorable du département, de la commune, de la commission des monuments, de la nature et des sites et de la commission consultative de la diversité biologique, accorder des dérogations pour: ...». Je vous soumets cet amendement au moyen du vote électronique.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 60 non contre 3 oui et 4 abstentions.

La présidente. Nous passons au deuxième amendement déposé par M. Pagani à l'article 11, alinéa 2, lettre c), nouvelle teneur. Monsieur le rapporteur de minorité, je vous donne la parole.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. On se trouve dans une situation paradoxale, puisque j'étais l'un des artisans du compromis que nous avons trouvé en commission - il fallait bien sortir d'une situation difficile... Je le rappelle, il était question au départ de «s'accaparer», entre guillemets, les droits à bâtir hypothétiques de la forêt pour augmenter les droits à bâtir des terrains vierges. J'ai pris note de la déclaration de M. Moutinot selon laquelle, lorsqu'il y aura litige sur des dérogations antérieures à 1999 - si j'ai bien compris - une procédure pour un nouveau plan d'affectation sera engagée. J'espère que les juges qui devront trancher sur une question de cet ordre reliront le Mémorial et respecteront la volonté de notre parlement, telle qu'elle a été exprimée par le département. Par conséquent, je retire mes amendements.

La présidente. Vous retirez également le deuxième amendement... (M. Rémy Pagani acquiesce.)Parfait !

Mis aux voix, l'article 11, alinéa 2, lettre c) (nouvelle teneur) est adopté.

La présidente. L'article 11... (M. Grobet interpelle la présidente.)Monsieur le député, votre amendement vient ensuite... Ce n'est pas très simple, mais je crois que c'est juste.

Nous sommes saisis à l'article 11, alinéa 4 (nouveau), d'un amendement de M. Christian Grobet. Ce texte vous a été distribué, il consiste à ajouter «du taux», ce qui donne: «Les surfaces sur lesquelles il n'est pas possible d'implanter des constructions, en vertu de l'alinéa 1, entrent dans le calcul du taux de l'utilisation du sol...». Monsieur Christian Grobet, je vous donne la parole.

M. Christian Grobet (AdG). Excusez-moi, Madame la présidente, mais, malheureusement, j'ai noté «alinéa 4» par erreur... Ah, non, il s'agit bien de l'alinéa 4 !

Cet amendement est tout à fait cosmétique. En effet, il est écrit que les surfaces entrent dans le calcul de l'utilisation du sol, alors qu'on parle d'habitude «du taux d'utilisation du sol».

Par ailleurs, en général on ne parle pas de «plans qui se superposent»... Il s'agit simplement d'indiquer qu'un terrain se trouve à l'intérieur d'une zone à bâtir.

Je voulais apporter ces deux précisions pour nous en tenir aux termes généralement utilisés en la matière. Je crois que M. Muller pourra le confirmer.

La présidente. Je vous remercie. Monsieur le député, René Koechlin, je vous donne la parole, mais uniquement sur cet amendement.

M. René Koechlin (L). Oui, Madame la présidente, j'interviens uniquement sur cet amendement.

J'approuve la remarque de M. Grobet: il faut voter cet amendement. Toutefois, la terminologie qui figure dans la loi n'est plus «le taux» mais «l'indice». Alors, si vous êtes d'accord, il faudrait remplacer «taux» par «indice».

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. J'accepte cet amendement sous la forme «d'indice d'utilisation du sol». C'est effectivement plus cohérent.

La présidente. Dans un premier temps, je vous soumets l'amendement proposé par M. Grobet à l'article 11, alinéa 4 (nouveau). Il consiste à remplacer les mots «de l'utilisation» par «de l'indice», ce qui donne: «Les surfaces sur lesquelles il n'est pas possible d'implanter des constructions, en vertu de l'alinéa 1, entrent dans le calcul de l'indice de l'utilisation du sol...».

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 67 oui (unanimité des votants).

La présidente. Je vous soumets le deuxième amendement qui porte sur la fin de la même phrase du même article. Le voici: «...pour autant qu'elles soient situées dans une zone à bâtir adoptée conformément aux buts...».

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 64 oui (unanimité des votants).

Mis aux voix, l'article 11, alinéa 4 (nouveau), ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).

Troisième débat

La loi 8858 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 8858 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 47 oui contre 10 non et 13 abstentions.

PL 9042-A
Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi de MM. Gabriel Barrillier, Thomas Büchi, Alain Meylan, Jean-Marc Odier, Olivier Vaucher, Jacques Baudit, René Koechlin, Pierre-Louis Portier, Jean Rémy Roulet, Mark Muller modifiant la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites (L 4 05) (Subvention à la restauration-rénovation de bâtiments)
Rapport de majorité de M. Bernard Lescaze (R)
Rapport de minorité de M. Alberto Velasco (S)

Premier débat

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Il s'agit ici d'autoriser l'aliénation d'un immeuble propriété de l'Etat de Genève sis sur la commune de Vernier... (Exclamations. La présidente agite la cloche.)

Une voix. T'es rapporteur !

M. Alberto Velasco. On en est au point 41 ! (Rires.)

La présidente. Monsieur Velasco, le point 41 a été ajourné ! Nous en sommes au point 42 de l'ordre du jour. Je l'ai annoncé ! (Commentaires et rires.)Monsieur le rapporteur, vous avez la parole !

M. Alberto Velasco. Merci, Madame la présidente. Ce projet de loi a été déposé par l'Entente et risque bien de dénaturer un fonds qui avait été prévu au départ pour subventionner la restauration-rénovation de bâtiments locatifs. Cette aide devait précisément permettre de maintenir des loyers assez bas, malgré la restauration de certaines parties de bâtiments anciens qu'il fallait préserver. Il est vrai qu'auparavant il n'était souvent pas possible de procéder à ces travaux tout en maintenant des loyers ne dépassant pas 3225 F la pièce. C'est pour cela qu'à l'époque l'Alliance de gauche avait déposé un projet de loi pour mettre en place un fonds de 20 millions et répondre à ces besoins, fonds qui devait financer les entreprises, entre autres chargées d'effectuer ces travaux.

Or, le projet de loi qui nous est soumis dénature l'usage de ce fonds, qui est pourtant récent - deux ou trois ans. Bien que le département nous ait dit que les dossiers commençaient à arriver et qu'une certaine expérience de la gestion de ce fonds était maintenant acquise... (L'orateur est interpellé.)Justement, la vitesse de croisière était soutenue, et il aurait peut-être fallu attendre quelques années encore pour pouvoir faire une évaluation pertinente de l'utilisation de ce fonds ! Et voilà que débarque ce projet de loi qui dénature le but de ce fonds, car, en fait, il ouvre ce fonds à la rénovation. La logique eût été que ce fonds, dont est chargé la commission des monuments, de la nature et des sites, soit alimenté normalement et reste destiné à la restauration, comme c'était prévu au départ. Il ne faut pas dénaturer le but de ce fonds, je le répète ! Le jour où il n'y aura plus d'argent pour restaurer les bâtiments locatifs, que fera-t-on ?

La commission du logement a travaillé pendant de nombreuses semaines sur cet objet. Elle est parvenue à trouver un consensus entre toutes les forces pour mettre ce fonds en place. Il n'est donc pas normal, à peine ce fonds mis en place et utilisé par l'administration, de nous soumettre un tel projet qui dénature l'objectif initial ! Et cela d'autant moins que le rapport de majorité fait l'éloge de ce fonds et s'interroge sur les motivations de l'Entente de déposer un tel projet de loi.

Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, bien que l'esprit de la loi originale a été conservé, puisqu'il est précisé que l'affectation doit principalement être destinée aux logements locatifs, je vous prie de laisser les choses en l'état. C'est-à-dire que je suggère de laisser ce fonds fonctionner et, d'ici quelque temps, de procéder à une évaluation. Et si, comme l'a dit M. Barrillier, ce fonds est très peu utilisé, nous en prendrons acte. D'après mes renseignements, ce n'est pas exact: ce fonds est aujourd'hui suffisamment utilisé, et il le sera de plus en plus.

Je vous prie donc de ne pas entrer en matière sur le projet de loi qui nous est soumis.

M. Jacques Baud (UDC). J'ai demandé aux représentants de la commission des monuments, de la nature et des sites, ce qu'ils pensaient de ce projet de loi. J'ai posé la question trois fois, mais je n'ai eu aucune réponse. J'ai également demandé si quelqu'un était intéressé par ce projet de loi: personne n'a levé la main. J'en déduis que ce projet de loi ne les intéresse absolument pas: ils ne sont ni pour ni contre !

M. Gabriel Barrillier (R). On ne va pas entamer la guerre des bonus ! Toutefois, derrière ces problèmes de transformation, rénovation, restauration, se cachent des intérêts souvent contradictoires...

Je vous rappelle que la loi que nous avions votée et qui avait été proposée, si je m'en souviens bien, par nos collègues de l'Alliance de gauche - 20 millions - était destinée à la sauvegarde du patrimoine, mais, également, au maintien des savoir-faire, des métiers comme les tailleurs de pierre et toute une série d'autres métiers, qui pourraient disparaître si les pouvoirs publics ne donnaient pas un coup de pouce.

Si nous avons à l'époque, peu après l'entrée en vigueur de cette loi déposé, un projet de loi, c'est uniquement pour essayer d'étendre le périmètre d'intervention de ce fonds, non seulement aux immeubles à vocation d'habitation, mais, également, pour apporter un soutien en matière de restauration d'immeubles patrimoniaux, qui appartiennent à des collectivités ou à des privés et qui méritent d'être protégés, toujours dans le souci de maintenir notre patrimoine et nos savoir-faire.

Nous avions ajouté la possibilité d'intervenir dans certains cas de rénovation. Je n'entrerai pas dans les détails: «rénovation», «transformation», «restauration», sont des domaines proches, mais qui comportent des différences subtiles, que les spécialistes peuvent reconnaître. Finalement, après cette discussion en commission, un compromis a été trouvé. Monsieur Velasco, il ne s'agit quand même pas d'une attaque en règle du projet initial et cela ne va certainement pas le dénaturer, puisque le terme de «rénovation» a été abandonné et que l'objectif du bonus est essentiellement «d'encourager la restauration de bâtiments dignes d'intérêt au sens de l'article 42C, principalement à vocation d'habitation...».

Etant donné qu'on précise «principalement», cela veut dire que «subsidiairement» la commission pourra intervenir et donner un coup de pouce dans des cas bien particuliers afin de sauvegarder certains bâtiments de notre patrimoine, même s'ils ne sont pas à vocation d'habitation. Je trouve, par conséquent, que ce compromis est une bonne chose.

Maintenant, d'après ce que je sais, l'utilisation du fonds est meilleure et un rythme de croisière a été pris. Pour ces raisons, le groupe radical vous invite à voter les conclusions de la commission des travaux.

La présidente. Merci, Monsieur Barrillier. Mesdames et Messieurs les députés, le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants. Sont inscrits: Mme Françoise Schenk-Gottret, M. Hugues Hiltpold, M. Gilbert Catelain, Mme Michèle Künzler, M. Alberto Velasco, M. Loly Bolay et M. le conseiller d'Etat Laurent Moutinot.

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Pourquoi dénaturer une loi votée en son temps à l'unanimité avec une réelle volonté de consensus ? Pourquoi créer la confusion entre un fonds destiné à la restauration de bâtiments à vocation d'habitation - qui fonctionne - et le FMNS ? Pourquoi avoir entretenu la confusion entre «restauration» et «rénovation» ?

Soyons clairs et dotons le FMNS, puisqu'il est insuffisant à l'heure actuelle, mais, surtout, laissons la subvention à la restauration de bâtiments à vocation d'habitation - à cette seule vocation !

Voilà pourquoi nous refuserons ce projet de loi.

M. Gilbert Catelain (UDC). J'ai bien entendu les arguments de notre collègue Barrillier. Sur le fond, on peut toujours soutenir ce genre de projets qui représentent un plus pour la collectivité, il n'empêche que le peuple a clairement dit que cela suffisait - j'ai bien observé les résultats des votations de ce week-end - il ne veut pas d'augmentation d'impôts et il ne veut pas que l'on effectue des coupes dans les domaines sociaux. Notre déficit budgétaire sera finalement beaucoup plus important que prévu, et la situation financière de notre canton ne permet pas - ne permet plus - de voter une rallonge supplémentaire dans ce domaine, ce qui ne va bien sûr pas beaucoup plaire à certains milieux immobiliers...

Quoi qu'il en soit, le financement de ce projet n'est pas très clair. J'ai lu dans le rapport que nous étions déjà passés de 10 millions à 20 millions. Nous ne savons en l'occurrence pas très bien si nous sommes toujours dans le cadre des 20 millions ou s'il s'agit de 20 millions supplémentaires. Le rapporteur pourra peut-être clarifier ce point...

Si c'est seulement l'affectation initiale des 20 millions qui change, la donne ne serait effectivement plus la même...

Une précision à ce sujet me serait très utile pour déterminer la position finale du groupe par rapport à ce projet de loi.

Mme Michèle Künzler (Ve). Je voudrais vous rassurer, Monsieur Catelain, il ne s'agit pas de créer un fonds supplémentaire, mais simplement de diversifier l'utilisation de ce fonds.

Nous partageons le souci du rapporteur de minorité, parce que le fonds a initialement été créé pour permettre d'effectuer des rénovations de bâtiments à vocation d'habitation en maintenant les loyers au dessous du plafond LDTR. Ces rénovations étaient de temps à autre compromises parce qu'il fallait parfois préserver des parties historiques d'un bâtiment. C'est bien à ce titre que ce fonds avait été créé. Nous pensons qu'il est heureux que le mot «rénovation» ait été supprimé, parce que, si nous devions commencer à subventionner les rénovations, cela serait un vrai puits sans fond...

D'autre part, la rentabilisation de travaux pour restaurer un élément historique d'un immeuble est tout à fait possible quand il s'agit d'un immeuble à vocation commerciale ou autre. Par contre, le problème se pose pour les immeubles à vocation d'habitation. En effet, la restauration d'un élément historique dans les immeubles d'habitation est difficile, car il faut, dans le même temps, maintenir des loyers bas. Si une fresque est restaurée, il est bien évidemment difficile de faire payer les travaux aux locataires. Pour nous, l'essentiel, c'est que le fonds soit vraiment ciblé sur le logement. Nous avons toutefois voté oui en commission, parce qu'il est parfois difficile de faire la part des choses dans un immeuble... S'il y a un étage à vocation commerciale dans un immeuble, va-t-on rentabiliser totalement le coût de la restauration d'une fresque par le biais de cet étage pour éviter de reporter ce coût sur les étages à vocation d'habitation ? Il faut, me semble-t-il, montrer un peu de souplesse et de finesse dans l'application de la loi et la gestion de ce fonds.

C'est pour cette raison que nous acceptons ce projet de loi. Mais nous serons très attentifs à toute dérive, c'est-à-dire que nous veillerons à ce qu'il ne soit pas utilisé à mauvais escient, à savoir: aider des personnes qui n'en ont pas vraiment besoin, dans la mesure où elles ont la possibilité de rentabiliser leurs travaux. Je le répète, c'est la raison pour laquelle nous acceptons ce projet de loi.

Mme Loly Bolay (S). Je serai brève, parce que tout a été énoncé dans le rapport de minorité.

J'aimerais juste relever que même le rapporteur de majorité a écrit dans son rapport, je cite: «L'esprit de la loi sur le bonus rénovation n'est-il pas trahi alors que le législateur avait voulu consacrer cet effort au logement ?»

Autrement dit, ne peut-on pas imaginer une augmentation de loyer à terme si cette loi était votée, étant donné qu'à l'époque les initiateurs du précédent projet de loi avaient visé la rénovation et non pas la restauration ?

Je vous invite donc à ne pas voter ce projet de loi.

M. Hugues Hiltpold (R), rapporteur de majorité ad interim. Je signale simplement au rapporteur de minorité et aux deux commissaires socialistes de la commission des travaux qui se sont exprimés précédemment que l'esprit de la loi n'a pas été dénaturé puisque, lors des travaux de la commission il a été décidé d'ajouter l'adverbe «principalement». Les subventions du fonds sont donc prioritairement destinées aux immeubles à vocation d'habitation. De ce fait, l'élément logement qui les préoccupe est toujours présent.

Vous avez cité, Madame Bolay, un extrait du rapport de M. Lescaze que je remplace aujourd'hui. Mais c'est une partie seulement de la réflexion. Vous savez que l'idée de consacrer cet argent pour la restauration d'immeubles à vocation d'habitation a été ajoutée au projet de loi initial. L'esprit de la loi - je le répète, car c'est très important - n'est donc absolument pas dénaturé.

Le but de ce projet de loi est simple, Mesdames et Messieurs les députés, il consiste à élargir le champ d'application de l'attribution des subventions à la restauration des bâtiments «qui sont dignes d'intérêt» et pas uniquement à la restauration de bâtiments d'habitation. L'idée étant d'avoir une réflexion patrimoniale beaucoup plus large et de ne pas la réduire exclusivement au logement.

Je réponds maintenant à la question de M. Catelain qui m'a interpellé... Le fonds reste tel quel: il s'agit simplement d'une affectation supplémentaire. Il n'y a donc pas d'augmentation de coût.

Il faut relever - cela a été fait tant par M. Velasco que par M. Barrillier - que ce fonds était relativement peu utilisé à l'époque, mais qu'il l'est de plus en plus. Je prends l'engagement devant ce Conseil, si d'aventure la commission d'attribution devait statuer un jour entre une décision d'attribution à du logement et une décision d'attribution à un autre type de bâtiment, d'en rediscuter, que ce soit pour un éventuel nouveau montant ou pour une meilleure affectation.

En conclusion, je vous invite toutes et tous à voter ce projet de loi et à respecter le vote des commissaires - qui l'ont voté à une très grande majorité. Je vous le rappelle en effet, tous les groupes se sont prononcés favorablement sur ce projet, à l'exclusion des socialistes, dont deux se sont abstenus et un l'a refusé.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Je dois dire ici que le souci de mon collègue Barrillier, quand il a présenté ce projet de loi et qu'il l'a défendu en commission, était respectable, dans la mesure où il voulait aider les petites et moyennes entreprises qui avaient besoin d'effectuer des travaux. D'après lui, le fonds FMNS n'étant pas suffisamment utilisé, on pouvait élargir l'affectation de ce fonds à d'autres travaux et alimenter certaines petites et moyennes entreprises, tout en maintenant des savoir-faire et certains métiers dans notre République.

Mais il est très vite apparu aux commissaires - et aussi au département - que ce fonds venait d'être mis en place et qu'il commençait tout juste à trouver sa vitesse de croisière, les gens étant de plus en plus au courant de son existence. Comme vient de le dire M. Barrillier lui-même, il est actuellement très sollicité.

Je voudrais aussi souligner que rénovation et restauration sont deux choses bien distinctes. Une rénovation est un travail beaucoup plus lourd qu'une restauration. Et ce fonds de 20 millions, selon la rénovation à effectuer, risquait bien d'être très insuffisant. Par exemple, s'il fallait rénover le Plaza - cela a été évoqué en commission - ce fonds suffirait à peine.

C'est pour cette raison que nous nous sommes, nous les socialistes, battus en commission, car nous savons très bien que si nous ne conservions pas l'esprit de la loi pour ce fonds, il ne suffirait pas, car il y a beaucoup de rénovations à effectuer. C'est la raison pour laquelle nous étions opposés à ce projet de loi. Pour nous, il fallait seulement subventionner la restauration de bâtiments à vocation d'habitation, qui ont des éléments historiques à conserver, sans pour autant faire assumer les charges inhérentes à ces travaux aux locataires.

Toutefois, nos travaux ont permis d'améliorer l'esprit de la loi, puisque la priorité est donnée au logement. Il n'empêche que, pour nous, le danger subsiste. Il serait, je le répète, en effet beaucoup plus logique d'affecter les subventions du FMNS uniquement à leurs fins.

Cela dit, Madame la présidente, je souhaiterais, avant que l'on procède au vote d'entrée en matière, que l'on fasse état, à notre Conseil, d'un courrier qui nous a été envoyé par le Rassemblement pour une politique sociale du logement qui prend position sur ce projet de loi. Ce courrier date du 15 février 2005. Je l'ai avec moi, si cela vous arrange...

La présidente. Cela nous arrange, en effet. Je vous remercie de bien vouloir nous l'apporter.

M. Alberto Velasco. Pour le reste, Madame la présidente, je maintiens notre position, c'est-à-dire de ne pas entrer en matière sur ce projet de loi, puisque, de toute façon, on ne porte préjudice à aucun des deux fonds: le FMNS subsiste et celui-ci subsistera aussi.

La présidente. Monsieur le rapporteur, êtes-vous soutenu pour votre demande de lecture ?

Une voix. Non !

La présidente. Il n'y a pas vingt personnes. Un peu plus d'énergie ! (Des députés lèvent la main.)Voilà. Parfait ! Avant de donner la parole à M. le conseiller d'Etat, je demande donc à M. le secrétaire de bien vouloir lire ce courrier.

Courrier 1962

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez voté le 2 mai 2002 une subvention pour la restauration de bâtiments. Le projet de loi qui vous est soumis aujourd'hui tente de revenir - en effet, très peu de temps après - sur ces dispositions.

Je rassure M. Catelain, les 20 millions en question ont été votés en 2002 déjà. Ils ne sont donc pas en plus. Au départ, ce fonds a été utilisé de manière limitée, mais il semble aujourd'hui avoir trouvé une certaine vitesse de croisière.

Le projet de loi initial n'était évidemment pas acceptable, notamment parce qu'il prévoyait de subventionner la rénovation, ce qui en faisait un véritable puits sans fond. Nous en restons donc à la restauration, et c'est une très bonne chose.

L'unique objet sur lequel vous débattez, Mesdames et Messieurs les députés, porte sur le fait d'avoir ajouté l'adverbe «principalement» à l'article 42A, s'agissant d'immeubles à vocation d'habitation. C'est de cela qu'il s'agit ! Fondamentalement, pour préserver des loyers à bon marché, on pourrait imaginer que ce fonds soit exclusivement dévolu à ce type de bâtiments.

Vous savez pour autant que la réalité est souvent plus complexe. En ouvrant la porte «principalement» à des bâtiments à vocation d'habitation et non à n'importe quel type de bâtiments, il me semble qu'on ne trahit pas l'esprit du but que vous vouliez atteindre en son temps et que l'on peut, sans risque majeur, accepter ce projet de loi. D'autant qu'à l'heure actuelle déjà, indépendamment de ce projet de loi, si un immeuble comporte une arcade au rez-de-chaussée et cinq étages de logements, je peux vous dire que la commission d'attribution accepte d'octroyer des subventions et qu'elle a bien raison de le faire.

Si vous voulez conforter cette honorable pratique, je vous invite à suivre le rapport de majorité.

Mis aux voix, ce projet de loi est adopté en premier débat par 50 oui contre 14 non et 1 abstention.

La loi 9042 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 9042 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 47 oui contre 16 non.

PL 9158-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Pierre-Louis Portier, Anne-Marie Arx-Vernon Von, Luc Barthassat, Jean-Claude Egger, Pascal Pétroz, Guy Mettan, Jacques Baudit, Patrick Schmied, Mark Muller, Pierre Weiss, Stéphanie Ruegsegger, Florian Barro modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (L 1 30)
Rapport de majorité de M. Alain Etienne (S)
Rapport de minorité de M. Olivier Vaucher (L)

Premier débat

M. Alain Etienne (S), rapporteur de majorité. Pour plusieurs raisons, une majorité de la commission estime que ce projet de loi n'est pas adéquat. Premièrement, il n'est pas judicieux d'inscrire dans la loi le principe de la mixité en zone industrielle, il est préférable de procéder par voie de déclassement qui implique une décision démocratique... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)... plutôt que par voie de dérogation, par simple décision du Conseil d'Etat.

Deuxièmement, il est nécessaire de maintenir en ville une diversité de l'activité industrielle. Les artisans et les petites industries doivent pouvoir rester dans l'agglomération urbaine et poursuivre leurs activités. Comme M. Moeschinger nous l'a indiqué, il n'y a pas de friches industrielles à Genève.

Troisièmement, il faut parler des nuisances. Si l'on introduit du logement en zone industrielle, il sera difficile de continuer à appliquer le degré de sensibilité au bruit - 4 en zone industrielle. Les nouveaux habitants se plaindront sans aucun doute du bruit et, certainement aussi, des dangers liés au va-et-vient des véhicules, camions et autres camionnettes. La sécurité sur le chemin de l'école pour les enfants ne sera pas assurée !

Quatrièmement, nous le savons, si les zones industrielles sont ouvertes aux logements et au secteur tertiaire, le prix des terrains va augmenter considérablement. Les représentants de la Chambre de commerce et de l'industrie de Genève sont venus nous le rappeler en commission et ils nous ont également indiqué que les milieux industriels étaient inquiets de l'application de ce projet de loi.

J'aimerais maintenant rappeler qu'au sein de la FTI des travaux sont actuellement en cours concernant la mixité des zones industrielles et la création de nouvelles zones. Ces travaux n'ont pas encore été avalisés, sauf erreur, par le Conseil d'Etat. Une synthèse de ces travaux devait être remise en mars 2005. Si l'ouverture de ces zones à des activités administratives a été envisagée, l'idée d'y installer des logements a été écartée, même s'il s'agit de surélévations. Il faut également signaler qu'avec la législation actuelle des dérogations sont déjà possibles. La loi permet déjà certaines adaptations.

Pour toutes ces raisons, la majorité de la commission vous invite à ne pas entrer en matière sur ce projet de loi.

M. Mark Muller (L), rapporteur de minorité ad interim. Pour la seconde fois de la matinée, j'ai le plaisir de remplacer M. Vaucher en tant que rapporteur. Cette fois-ci en tant que rapporteur de minorité.

Je précise que je ne m'exprimerai pas en tant que porte-parole des libéraux, même si j'aime bien le faire et pouvoir dire: «Vive les libéraux» lorsque j'en ai l'occasion. Ce n'est pas le cas ici: je m'exprimerai vraiment en tant que rapporteur de la minorité de la commission. Minorité de la commission qui, d'ailleurs, est constituée des auteurs du projet de loi qui - pour le moment en tout cas, on verra ce qu'il en sera au vote final - n'ont pas réussi à convaincre une majorité de les suivre sur la voie de l'assouplissement de la régulation de la zone industrielle, sur la voie de l'ouverture de nouvelles possibilités de construction de logements dans certains périmètres de la zone industrielle qui s'y prêtent.

Je vous rappelle, même si ce n'est un secret pour personne, que nous sommes dans une situation de pénurie de logements aiguë, sans précédent dans l'histoire du canton, et qu'il faut à tout prix faire ce qui est en notre pouvoir pour offrir de nouvelles possibilités de construction. Différentes pistes ont été proposées par l'Entente ces dernières années et ces derniers mois; et l'une d'elle consiste précisément à ouvrir la zone industrielle.

Le projet de loi issu des travaux de la commission n'est pas le même que celui qui a été déposé. Un grand nombre d'amendements ont été votés en commission, qui vont dans le sens des préoccupations des opposants. Et l'une des préoccupations que nous partageons - dont vient de parler M. Etienne - est de tenir compte des nuisances inhérentes aux zones industrielles. Comme tout le monde, nous sommes attachés à une certaine qualité de vie, à l'exigence d'offrir des conditions d'habitation qui soient agréables pour tout le monde. C'est pour cela que nous avons introduit dans le projet de loi une cautèle pour qu'il soit tenu compte des nuisances existantes et ne pas construire des logements là où ce n'est pas judicieux par rapport à ces nuisances.

Nous aurions presque pu nous dispenser de cette précision dans la mesure où l'Ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit et les règles cantonales d'application de cette ordonnance ne permettent pas la construction de logements dans des zones bruyantes. Nous avons malgré tout préféré le rappeler dans le projet de loi.

Autre élément qu'il est important de rappeler: les ouvertures proposées dans ce projet de loi ne concernent que les périmètres de la zone industrielle situés à proximité des zones dévolues au logement et au commerce. Nous ne parlons donc pas de la totalité de la zone industrielle, mais uniquement d'une partie de celle-ci que je qualifierai de «zone périphérique».

Dernier élément: pour que la dérogation proposée - c'est-à-dire une dérogation qui permette de construire du logement en zone industrielle ou d'affecter des bâtiments industriels à du logement - soit possible, il faudra l'accord du Conseil d'Etat, ce qui garantit tout de même un contrôle très sérieux du projet dont il est question.

Pour ces différentes raisons, il nous paraît que le projet est acceptable. Nous sommes favorables lorsqu'il s'agit de périmètres étendus que l'on souhaiterait attribuer au logement en zone industrielle. Nous sommes également favorables à ce que l'on passe par des procédures de déclassement. C'est la procédure ordinaire que nous soutenons et qu'il faudra continuer de suivre, mais, lorsqu'il s'agira de petits périmètres, de parcelles isolées ou de bâtiments, une procédure de déclassement nous paraît tout à fait disproportionnée. Je vous rappelle qu'un déclassement doit faire l'objet d'une loi votée par le Grand Conseil et, si l'on veut pouvoir ouvrir un tant soit peu certaines parcelles ou certains bâtiments bien délimités en zone industrielle à une affection différente, de logement ou de commerce, je crois qu'il faut pouvoir être en mesure de le faire plus facilement, sans passer par cette procédure très lourde.

Voilà. Ce que nous vous proposons n'est ni extraordinaire ni révolutionnaire, et nous espérons pouvoir convaincre aujourd'hui une majorité de nous suivre.

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Ce projet de loi n'est pas sain, et les conclusions du rapport de majorité mettent en évidence les risques qui lui sont liés: augmentation du prix des terrains, nuisances dues aux activités industrielles, problèmes de sécurité, difficultés de maintenir des petites et moyennes entreprises et des activités artisanales - qui sont, je le rappelle, les plus créatrices d'emplois - atteinte aux droits démocratiques...

Nous avons besoin de logements ? Que l'on déclasse dans ce sens ! Les zones industrielles arrivant quasiment à saturation, déclassons dans ce sens ! Restons clairs dans les principes et que les exceptions restent des exceptions !

Aussi, nous vous recommandons de rejeter ce projet de loi, qui ne peut qu'engendrer des confusions et nuire à un aménagement du territoire harmonieux dans un canton exigu comme le nôtre.

M. Rémy Pagani (AdG). Le choc des objets à notre ordre du jour est très intéressant... Ce matin nous avons refusé 300 logements supplémentaires sur le terrain de Frontenex... Et la logique immédiate consiste évidemment à accepter de construire n'importe où n'importe comment !

En effet, ce projet de loi a été déposé par nos prédécesseurs, la majorité de droite, qui a sévi durant de longues années dans ce parlement, pour construire dans des zones industrielles imposées par elle, parce qu'elle savait bien, fondamentalement, que l'industrie et l'artisanat ont besoin d'être protégés pour pouvoir subsister dans la concurrence effrénée - qui avait déjà cours il y a trente ans et qui n'a fait qu'augmenter depuis lors au niveau international.

A la base, je vous le rappelle, ces zones industrielles sont destinées à maintenir le prix des terrains à un prix extrêmement bas, à fixer un droit de superficie pour faire en sorte qu'un industriel qui veut développer une activité ne soit pas pénalisé au départ en étant obligé de bloquer son capital juste pour acheter un terrain qui lui permette d'exercer cette dernière.

Et aujourd'hui, avec ce projet, on met quasiment un cheval de Troie dans ces zones industrielles ! On prétend que des logements pourraient être construits, que ce serait intéressant d'en construire à la Praille, par exemple - d'ailleurs, je me demande en quoi c'est intéressant, mais ça c'est un autre problème... On commencerait par construire un ou deux immeubles, là où cela gêne le moins, et puis, ensuite, les locataires qui y habitent se rendraient compte que la carrosserie d'en face, la serrurerie, ou n'importe quelle autre entreprise, génère du bruit, et ils se plaindront, sans parler de l'inévitable augmentation du prix des terrains. Cela va créer une zone tampon et, pour finir, d'autres logements y seront encore construits, parce qu'il n'y aura pas de raison de se gêner d'en construire toujours plus, et ainsi de suite, jusqu'à ce que la zone industrielle soit vidée de son contenu.

Ce qui est intéressant dans ce dossier, c'est que nous avons auditionné la Chambre genevoise immobilière... Pardon, la Chambre de commerce ! J'ai tellement peu l'occasion de m'appuyer sur les déclarations de la Chambre de commerce que j'en bafouille ! La Chambre de commerce, donc, nous a dit qu'elle était totalement opposée à ce genre de projet de loi - ce qui a d'ailleurs inspiré nos amis radicaux, pour une fois, qui se sont ralliés à l'avis de la Chambre de commerce - elle le dit mieux que moi et elle est bien placée pour le dire. Selon elle, ce projet de loi est tout à fait inapproprié parce qu'il fragilise la politique de protection des petits artisans et commerçants dans notre canton. Et quand je dis «petits», dans la zone industrielle de La Praille il y a une grosse industrie horlogère - Rolex, pour ne pas la nommer - qui y développe ses activités, et on s'en réjouit, car ces grandes industries maintiennent le tissu économique de notre canton. Et il faut absolument, aujourd'hui, pour faire face à la monoculture dans laquelle certains veulent nous précipiter, maintenir cette industrie et les petites et moyennes entreprises.

C'est donc en m'appuyant - une fois n'est pas coutume - sur les déclarations, que je vous invite à lire, de la représentante de la Chambre de commerce que je vous recommande de suivre le rapport de majorité et de faire un sort à ce projet de loi.

M. Yvan Galeotto (UDC). Comme je l'ai dit lors de nos débats en commission sur ce projet de loi, je pense au contraire que la mixité dans les zones industrielles est une bonne chose. On peut très bien s'adapter, par exemple en construisant dans une zone où les activités sont peu bruyantes. Ce serait en tout cas tout à fait possible aux abords de la route des Acacias. Pourquoi ne pas construire des logements, pour des étudiants, par exemple, voire des logements sociaux en prévoyant une certaine mixité avec des petits artisans ! Pourquoi pas ?

Je soutiendrai donc ce projet de loi.

M. Pierre-Louis Portier (PDC). Madame la présidente, chers collègues, quelques députés démocrates-chrétiens et libéraux vous ont présenté, il y a quelques mois, ce projet de loi, simple, c'est vrai, mais qui remet en cause la vision de l'aménagement du territoire telle que nous l'avons eue dans ce canton jusqu'à présent.

Comme l'a dit M. Pagani, cela a été évoqué ce matin, cette vision de l'aménagement du territoire est trop figée. Et il convient, à l'heure où la crise du logement n'a jamais été aussi forte et où il faut repenser au positionnement de nos zones industrielles, de débattre et de mener une réflexion sur les moyens à mettre en oeuvre pour trouver des solutions.

Voilà une idée - reconnaissez-le ! - qui est au moins originale, dont nous n'avons jamais débattu - ce n'est pas exact, il y a déjà eu un rapport à ce sujet... En tout cas, c'est une idée qui refait surface.

Et la zone principalement concernée par cette proposition - le secteur des Vernets, des Acacias - est incontestablement située aux abords de notre ville, pour ne pas dire maintenant: dans notre ville. Il convient donc de réfléchir pour savoir si ce qui s'y passe est toujours d'actualité et aussi - surtout - si ce qui s'y est construit met vraiment en valeur de façon optimale ces terrains qui sont maintenant longés par l'autoroute, le train, le tram et, bientôt, le CEVA. Il faut absolument mettre en valeur tout ce secteur. C'est vraiment très important. On ne peut pas y laisser que des activités comme les garages et autres. J'en veux pour preuve que cette zone est maintenant mitée par toute une série d'activités qui n'ont plus rien à voir avec le but qui avait été imaginé initialement, à savoir l'implantation d'industries et d'activités artisanales. Il y a des magasins comme Word Office. Même la Ville de Genève a contesté ce projet de loi ! Et M. Ferrazino a trouvé intelligent d'y mettre Mediamarkt, cela, en marge des lois, puisque ces zones, je le répète, ne sont pas réellement faites pour cela.

Nous avons en l'occurrence affaire à un territoire dont les infrastructures sont immenses et qui est, à mon avis, plus assez exploité. C'est vrai, si l'on veut un jour pouvoir y construire du logement et réaliser un projet de masse, c'est la réflexion sur le long terme que nous devons mener - il faut absolument - et je rejoins nos amis radicaux - passer par un déclassement ! Le rapporteur de minorité l'a dit, et je suis tout à fait d'accord avec lui.

Mais, avant d'en arriver à ce stade, il va encore couler de l'eau sous les ponts. En attendant, une série de locaux pourraient y être aménagés en logements à relativement bon prix. Et n'iront habiter à cet endroit que ceux qui le souhaitent vraiment !

Dois-je vous rappeler qu'en Europe, en particulier, les lofts ont eu un succès phénoménal ? Il y a un exemple à Genève: celui de l'Usine Vifor. Certes - je vous le concède - elle est située dans une tout autre zone, mais il s'agit d'une ancienne usine qui a été réaménagée en lofts et qui a eu un succès commercial incroyable malgré leur prix élevé. Personnellement, je ne pourrais pas m'en offrir un. En tout cas, cela veut bien dire qu'il y a un marché pour cela.

Par ailleurs, on invoque les nuisances... Si je fais mien cet argument concernant des zones comme Meyrin, Satigny, Bois-de-Bay ou autres, où il est tout à fait exclu d'implanter du logement à côté d'une chaudronnerie ou d'une serrurerie, qui sont des activités très bruyantes, il me semble que les activités qui ont cours dans la zone des Acacias ne génèrent vraiment pas de nuisances.

M. Pagani a cité l'audition de la Chambre de commerce... J'aimerais tout de même qu'on revienne au moins sur l'intervention de M. Moeschinger de la FTI, qui a également été auditionné. Et c'est rapporté non pas dans le rapport de minorité mais dans le rapport de majorité ! Il relève que les activités industrielles sont de plus en plus propres et que la mixité avec du logement devient envisageable du point de vue de la cohabitation avec ces activités. Je crois que nous sommes tous prêts à admettre que si on loge à côté de Rolex, les nuisances sont faibles. Même la journée. La mixité avec de telles activités n'est donc pas impensable.

D'autre part, ce qui a inspiré les auteurs d'un tel projet de loi, ce sont les diverses revues que l'on nous donne à la commission de l'aménagement - et ailleurs - s'agissant de la manière actuelle d'urbaniser les villes ou leurs abords. On nous invite même à des séminaires à ce sujet... Malheureusement, notre emploi du temps nous empêche souvent d'y participer, mais j'ai quand même réussi à suivre un ou deux de ces séminaires. Et les urbanistes nous disent qu'il faut recréer la mixité en ville ! Il faut que la vie dans les quartiers se reconstruise avec les gens qui viennent y travailler et les gens qui y habitent. De toute façon, ce sont des populations différentes, mais le fait de se croiser dans les cafés et les commerces recrée une vie sociale. La vie sociale qu'on aime en ville, c'est cela: c'est que l'habitat jouxte l'activité !

La présidente. Il va bientôt falloir terminer, Monsieur le député: vous êtes à la fin de votre temps de parole !

M. Pierre-Louis Portier. Je serai bref, Madame la présidente. Je vais essayer de finir. (Rires.)Il n'est pas inintelligent, à l'occasion de ce projet de loi, de repenser à cette forme de cohabitation.

Je recommande donc qu'une majorité se dégage dans ce Grand Conseil pour voter le projet de loi qui avait été élaboré en fixant toutes les cautèles nécessaires en commission de l'aménagement et qu'on considère cette nouvelle disposition comme une disposition temporaire. Et, bien évidemment, le jour où le département fera des propositions d'aménagement différentes, qui ne concerneront pas seulement le logement, nous serons bien sûr les premiers à voter les déclassements y relatifs !

M. Hugues Hiltpold (R). Il est vrai que la zone industrielle suscite aujourd'hui de très grandes convoitises. On le voit, le débat est lancé à travers le concours que la Fédération des architectes suisses lance ces jours-ci sur le secteur de La Praille. On le voit aussi à travers des thèmes d'étude proposés par l'Institut d'architecture de l'Université de Genève.

Il me semble que nous devons avoir un débat de principe sur la question de la zone industrielle, à savoir déterminer quelles sont les zones industrielles où il faut encore maintenir des activités industrielles et quelles sont celles où l'on pourrait faire autre chose que de l'industrie. Et nous estimons - nous, le groupe radical - qu'on ne peut pas cautionner l'idée de laisser faire autre chose qu'une activité industrielle dans une zone industrielle ! Et surtout pas du logement, parce que ce n'est tout simplement pas viable pour les deux populations concernées !

C'est vrai, le groupe radical ne s'est pas porté signataire de ce projet de loi, et il ne l'a pas voté en commission, parce qu'il a estimé qu'on ne pouvait pas entrer en matière sur le principe, même si cela se fait sous forme de dérogation et même si l'idée est séduisante de pouvoir réaliser des lofts dans une zone industrielle, tout simplement parce que la cohabitation est difficile pour ne pas dire impossible.

Je vous cite un exemple qui me paraît assez parlant. Imaginez que l'on réalise quelques logements dans une ancienne usine - mettons une dizaine de logements - et qu'en face de cette usine se trouve un terrain vierge où viendra s'installer, quelques années après, une petite industrie... Que se passera-il, Mesdames et Messieurs les députés ? L'industrie qui a son activité dans cette zone ne pourra pas travailler correctement, car elle ne devra pas générer de nuisances pour les personnes qui vivent juste en face, et les personnes qui y habitent subiront tout de même des nuisances. Il ne me semble ni imaginable ni raisonnable de laisser construire du logement en zone industrielle !

Le débat sur la question des centres commerciaux est complètement autre, mais ce n'est pas l'objet de ce projet de loi qui concerne le logement.

Je tiens à relever également que nous avons des zones où la mixité est permise, notamment dans le quartier de la Suzette... Je peux vous assurer que la mixité n'est pas évidente à gérer au quotidien: pour l'instant, les résultats sont loin d'être satisfaisants !

Je terminerai simplement en disant ceci: la «Tribune de Genève» a publié un article selon lequel nous manquons de terrains industriels, et je doute très fortement que le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui, et sur lequel nous devons nous prononcer, apporte des réponses satisfaisantes dans ce sens. On ne peut pas tenir deux discours: dire que les zones industrielles ne sont plus utiles telles quelles et, à la fois, qu'il en manque !

A mon avis, il faut garder la loi telle quelle, et ne pas entrer dans un système dérogatoire, même si, c'est vrai, l'impact ne serait pas très grand. Je vous remercie de votre attention.

Mme Michèle Künzler (Ve). Je partage tout à fait l'avis de M. Hiltpold: il s'agit d'une question de principe !

A première vue, l'idée de mixité entre logements, industries et diverses activités paraît tout à fait séduisante. Mais la réalité est toute autre ! Le monde n'est pas parfait ! S'il n'y avait aucune incidence financière: pourquoi pas ? Il ne s'agit pas seulement d'une question de nuisances. Il est clair que n'importe quel artisan ne pourra pas payer le prix que l'on peut mettre pour un loft. Donc, on dit en fait, par le biais de ce projet de loi, que les artisans sont de trop à Genève... Et cela, nous ne l'acceptons pas, parce que nous avons aussi besoin d'une diversité de métiers ! Nous ne pouvons pas nous permettre de n'avoir que des activités tertiaires ! Si tel était le cas, comment les jeunes qui sont attirés par les métiers manuels pourraient-ils trouver du travail ? Devraient-ils émigrer ailleurs ? C'est cela, l'enjeu !

Et puis, les dérogations sont déjà possibles ! Et il ne s'agit pas seulement des Acacias ou de La Praille ! Je vous signale que la ville de Genève a des zones industrielles: les Charmilles, la commune de Vernier, le Lignon... de nombreux autres endroits seraient concernés !

On peut certainement discuter d'une meilleure affectation de la zone industrielle, mais, dans ce cas, il faut passer par une procédure de déclassement et tenir compte de ce qui fait aussi la force de notre industrie genevoise et de notre artisanat. Pour les industriels et les artisans, le prix du terrain est de 40 F le mètre. Comment pourront-ils se défendre face à des gens qui peuvent investir une somme très importante pour se payer un loft ? Ce n'est tout simplement pas possible !

Ce projet de loi est basé sur une idée qui paraît bonne, mais elle est mauvaise !

M. Christian Grobet (AdG). Je conçois tout à fait que l'on cherche toutes les solutions possibles pour trouver des terrains pour la construction de logements. Mais, comme Mme Künzler vient de l'indiquer, la proposition qui est faite est véritablement contre-productive... Je ne comprends pas, du reste, comment on peut arriver à un projet pareil !

On vient d'avoir - je m'adresse aux démocrates-chrétiens - une conférence de presse de M. Lamprecht qui met en exergue le manque de terrains pour satisfaire les besoins du secteur secondaire de l'économie et, plus particulièrement, des petites et moyennes entreprises de notre canton, qui constituent le tissu économique nous permettant de subsister, économiquement parlant. M. Lamprecht lance un appel au secours en disant qu'il faudrait créer de nouvelles zones artisanales et industrielles, et, au même moment, vous proposez d'affecter des terrains situés dans ces zones, dont on manque, pour réaliser du logement ! C'est totalement contradictoire !

Et c'est d'autant plus contradictoire pour la zone de La Praille - Acacias, qui, je dirai, est la zone phare en matière de zones industrielles ! Elle a été créée au lendemain de la dernière guerre et elle a toujours été citée comme une zone particulièrement exemplaire pour les activités économiques ! J'insiste à nouveau sur le fait qu'on ne peut pas vivre si les entreprises n'ont pas de terrains mis à leur disposition qui leur permettent d'y déployer leurs activités, assurant ainsi la vie économique dans notre canton ! Il est indispensable de faire ce travail d'aménagement du territoire leur octroyer des terrains.

L'exemple de La Praille est particulièrement mauvais, Monsieur Portier ! C'est une zone où l'on investi à hauteur de dizaines de millions, si ce ne sont des centaines de millions, pour réaliser toutes les infrastructures, surtout l'infrastructure ferroviaire ! Les points forts de la zone La Praille-Acacias, entre autres, ce sont les parcelles qui sont raccordées au réseau ferroviaire ! Et au moment où, précisément, on comprend qu'il faut développer les transports par le rail en raison des problèmes de circulation, en raison des problèmes de pollution, en raison des problèmes énergétiques auxquels nous allons être confrontés, on voudrait enlever des possibilités d'utilisation de la seule zone qui bénéficie de raccordements ferroviaires, dont je viens de parler ! (L'orateur est interpellé.)Mais, oui ! Aucune autre zone industrielle ne bénéficie... (L'orateur est interpellé par M. Jean-Michel Gros.)La ZIMEYSA ? Oui, une partie est raccordée au réseau ferroviaire, mais j'aimerais tout de même vous faire remarquer, Monsieur Gros, qu'une gare de marchandises a été créée à La Praille-Acacias pour cette zone, précisément, avec un port franc ! Cela représente des investissements énormes, et maintenant on voudrait enlever du potentiel à cette zone ?! Mais c'est totalement incohérent sur le plan économique ! Mme Künzler a évoqué le montant des investissements publics - qu'on oublie toujours dans certains milieux ! - qui ont été effectués pour équiper ces zones industrielles: et après, tout d'un coup, il faudrait y faire autre chose ?!

Par ailleurs, il a été démontré que, dans toutes les zones où la mixité a été introduite, la valeur des terrains s'est littéralement envolée, car elle s'aligne évidemment sur l'affectation la plus lucrative. Dès que vous mettez des bureaux dans une zone d'activité industrielle, le prix des terrains qui était de 150 ou 200 F le mètre carré - ce qui est le prix maximum que peuvent payer les petites et moyennes entreprises - s'envole immédiatement à 400, 500 ou 600 F le mètre carré ! Et cela sera la même chose avec le logement: les propriétaires du terrain chercheront à chaque fois, bien sûr, à affecter leur terrain à l'activité la plus lucrative, et il en résultera que les terrains non bâtis dans ces zones ne seront plus mis à la disposition des entreprises. C'est du reste déjà le cas: je vais vous en donner un exemple significatif, à savoir la zone de la Suzette, au Grand-Saconnex... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)Depuis qu'on a autorisé l'implantation de DuPont de Nemours, d'un hôtel, etc., il ne se construit quasiment plus de bâtiments destinés à des activités artisanales !

J'aimerais enfin terminer avec la question des nuisances, qui est également importante, parce que, chaque fois qu'il y a des nuisances à côté d'immeubles d'habitation - M. Moutinot doit le constater comme j'ai pu le faire par le passé - les activités qui les provoquent sont obligées d'aller s'installer ailleurs sous la pression des habitants qui ne supportent pas ces nuisances.

A ce sujet, je rappelle que la loi fédérale sur la protection contre le bruit impose l'établissement de degrés de sensibilité pour tous les plans d'affectation du sol. Or, les degrés de sensibilité des zones industrielles sont tout simplement incompatibles avec ceux du logement ! C'est violer la loi d'autoriser la construction de logements dans des zones industrielles dont on sait que leur degré de sensibilité est incompatible avec celui de l'habitat...

La présidente. Il faudra bientôt terminer, Monsieur Grobet !

M. Christian Grobet. ... et cela est particulièrement vrai pour La Praille où il y a énormément de trafic, de camions et de nuisances. La seule solution consisterait à créer une nouvelle zone au détriment d'une zone industrielle, en détachant des terrains d'une zone industrielle pour en faire une zone d'habitat. Mais, quoi qu'il en soit, le système dérogatoire, c'est la solution la plus catastrophique qu'on puisse imaginer !

M. Martin-Paul Broennimann (S). Je concède, comme d'autres, que l'idée proposée par les auteurs de ce projet de loi paraît de prime abord séduisante, et, en tant que pratiquant de l'aménagement, je peux dire que les milieux professionnels ont en effet le souci d'aller vers une mixité, laquelle offre plus de souplesse que le système de zonage que nous pratiquons. Ce zonage a été introduit au début du XXe siècle dans nos civilisations.

Cela dit, des travaux ont été menés sur le sujet, entre autres au sein des partis politiques, travaux qui ont débouché - je l'ai dit en commission, Monsieur Portier - sur une évaluation finalement négative. Ici, nous sommes dans un parlement. Nous devons prendre des décisions pratiques, pragmatiques, qui régissent la vie de nos citoyens. Revenons sur terre !

Les projets visionnaires des architectes doivent se faire et être un stimulant, mais ils ne sont pas forcément une formule adaptée à la réalité. (Exclamations.)Nous ne pouvons pas mélanger des poussettes et des semi-remorques ! Vous ne pouvez pas réaliser du logement sans qu'il y ait des enfants. Et s'il y a des enfants, cela implique qu'il faut réaliser des crèches, des parcs, des promenades, ce qui semble assez incompatible avec le déplacement de semi-remorques qui circulent jour et nuit !

J'ai travaillé dans une zone industrielle... Et je sais ce qu'une activité telle qu'un dépôt, qui est «propre» - comme le dit M. Moeschinger - cela veut tout de même dire le va-et-vient de véhicules, une concentration de tonnes de produits qui contiennent de l'alcool, que ce soient des cosmétiques ou autres, ce qui représente un réel danger: c'est une bombe ! La catastrophe AZF est encore dans nos mémoires. Un dépôt de produits cosmétiques est une bombe potentielle. On ne va tout de même pas autoriser la construction de logements à côté d'une bombe !

Nous avons entendu les représentants de la Ville de Genève qui est une commune urbaine et qui a des zones industrielles: ils tiennent à garder sur son territoire une mixité professionnelle, une mixité au niveau de la production. C'est le droit de cette commune ! Il ne faut pas oublier qu'en introduisant ce projet de loi on procède à un bipasse des règles démocratiques. Je dirai donc aux auteurs de la loi que l'idée est bonne, mais qu'il faut d'abord créer de nouvelles zones industrielles ailleurs pour pouvoir y implanter ces activités et transformer ensuite la zone industrielle en zone primaire. Cela doit faire l'objet d'un vote pour faire passer cette zone en zone urbaine, dans laquelle on pourra réaliser du logement, de l'administration et des activités qui sont propres.

En conclusion, et pour ne pas répéter ce qu'ont déjà dit mes préopinants, je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à suivre l'avis de la majorité de la commission et à rejeter le projet de loi. (Applaudissements.)

La présidente. Merci, Monsieur Broennimann. Mesdames et Messieurs les députés, le Bureau vous invite à clore la liste des intervenants. Sont inscrits: M. Pierre-Louis Portier, Mme Anne-Marie von Arx-Vernon, M. Gilbert Catelain. Monsieur Pierre-Louis Portier, je vous donne la parole.

M. Pierre-Louis Portier (PDC). Madame la présidente, chers collègues, j'ai bien entendu toutes les remarques qui ont été formulées pendant ce débat, et je voudrais tout de même faire un certain nombre de commentaires.

Comme je l'ai déjà dit, ce projet de loi concerne principalement la zone La Praille-Acacias où, vous le savez, les industries travaillent essentiellement le jour. Il n'y a donc pas de nuisances sonores la nuit. C'est déjà une première réponse.

D'autre part, j'aimerais vous signaler que M. Moutinot nous a présenté, lors d'une récente séance de commission de l'aménagement, un projet tout à fait séduisant - il faut le reconnaître - de construction de logements aux abords de la gare de La Praille, dans la petite moraine, en dessous du Grand-Lancy. Ce projet a été commenté, et nous étions unanimes à dire qu'il était important d'y construire du logement. J'ai même été de ceux qui pensaient que l'on aurait pu en construire un peu plus... Et pour protéger ces logements des nuisances sonores, en tout cas pour les placer dans les zones les moins désagréables, il a été prévu un certain nombre de locaux administratifs. Bref, de toute façon, vous avez toutes et tous lu les commentaires qui ont paru dans la presse à ce sujet !

Quoi qu'il en soit, Mesdames et Messieurs, les logements seront tout de même situés aux abords de la gare de La Praille, avec toutes les manoeuvres que cela suppose quotidiennement ! Pensez-vous que les nuisances y seront moins importantes qu'en habitant à côté de l'usine Rolex ? Je vous pose la question. Je vous laisse y répondre... Pour ma part, la réponse est évidente !

A chaque fois que nous parlons des zones industrielles, M. Grobet m'interpelle, mais il n'est jamais là pour écouter mes réponses... Cela me gêne un peu ! (Commentaires.)Je n'ai jamais dit - personne ne l'a jamais dit - qu'il ne fallait pas trouver de zones industrielles ! Au contraire, nous soutenons cette idée ! Du reste, lorsque M. Carlo Lamprecht a été auditionné par la commission, il est venu porter ce message - c'est vrai, pour notre part, nous y étions déjà sensibles - mais il a également dit que les zones industrielles se déplaçaient dans notre canton.

Et j'en reviens à ce que j'expliquais, à savoir que nous devrons concevoir l'aménagement du territoire différemment, nous adapter au fur et à mesure et garder l'esprit ouvert au changement. Si le Conseil d'Etat nous soumet des projets de déclassement de terrains pour y implanter de nouvelles zones industrielles - je l'enjoins d'ailleurs à le faire - le groupe démocrate-chrétien fera un excellent accueil à ses propositions.

Pour ce qui est du coût des terrains, je rappellerai tout de même que les terrains concernés sont propriété de la FTI et qu'ils sont monnayés sous forme de rente de droit de superficie. Et M. Moeschinger, à qui j'ai posé la question, a été très clair sur ce point: il est évident que, si l'on devait faire un usage différent de ces droits de superficie, ils seraient réévalués à la hausse. Ce qui, entre nous, permettrait peut-être à la FTI de mieux rentabiliser les mètres carrés qu'elle met à disposition et de financer, par ce biais, les équipements des futures zones industrielles. Par conséquent, je crois qu'en l'état le problème du coût du terrain ne se pose pas !

Je conclus - parce que je suis déjà intervenu longuement tout à l'heure et que je ne veux pas me faire rappeler à l'ordre une deuxième fois - avec un sentiment quelque peu désagréable... Je comprends bien que nous ne réunirons pas aujourd'hui une majorité autour de ce projet. Certes, il ne s'agit que d'une petite modification législative, mais elle significative de notre état d'esprit: il faut savoir si nous voulons ou non modifier un tant soit peu notre vision des choses en matière d'aménagement et apporter les réponses que la population attend.

Je constate que vous ne voulez pas surélever les constructions; que vous ne voulez pas de mixité en zone industrielle; que vous ne voulez pas envisager quelques déclassements de la zone agricole... Pour ma part, j'attends vos propositions ! (Exclamations. Applaudissements.)

Mme Anne-Marie Arx-Vernon Von (PDC). Je tiens à dire que j'ai signé avec enthousiasme ce projet de loi, parce qu'il donne une idée exacte de ce que peut être un vrai projet d'aménagement pour Genève, en utilisant ce que nous avons. Je trouve extrêmement intéressant de pouvoir défendre la notion de mixité, de pouvoir défendre la notion de cohabitation des populations.

La pire des choses qui nous arrive à Genève, c'est d'avoir des zones qui se désertifient socialement, où il n'y a plus personne le soir, où il n'y a plus d'activité ! Les gens attendent que l'on redynamise, que l'on redonne du caractère à ces quartiers ! C'est un projet qui me semble personnellement exemplaire, et je vous invite avec force à le voter. Des espaces industriels - qui ne sont pas que des friches - ont été réhabilités en Hollande, en France: ces expériences sont tout à fait positives et réussies. Je le répète, c'est extrêmement intéressant qu'il y ait de la vie le jour et la nuit et de pouvoir partager un espace qui redevient un vrai quartier.

M. Gilbert Catelain (UDC). Je me souviens avoir participé à une séance de commission au cours de laquelle ce projet de loi a été examiné. Le représentant de la Ville de Genève était du reste présent. Je lui avais demandé si, désormais, une directive de la Communauté européenne interdisait d'implanter des zones industrielles au centre des villes. Je n'ai pas reçu de réponse à cette question, je l'attends toujours... A notre connaissance, la réponse est négative. Mais il n'y a pas eu de recherches pour savoir si nous ne devrons pas un jour implanter les zones artisanales et industrielles à l'extérieur des agglomérations, comme cela se fait notamment en France et dans d'autres pays. Ce sera peut-être une obligation pour notre canton dans quelques années, si d'aventure certains persistaient à vouloir continuer dans cette voie...

Pour moi, l'idée du PDC est séduisante: on s'aperçoit que le soir et le week-end les zones industrielles sont vraiment très tranquilles, qu'il n'y a pas de bruit. Alors que dans certaines zones d'habitation les gens souffrent énormément du bruit, comme au pont de l'Ecu, à la route des Jeunes ou à la route de Chancy.

Alors, il existe effectivement des possibilités et il ne s'agit pas forcément de mettre des poussettes au milieu des semi-remorques, ce n'est pas le but ! Mais il faut trouver des solutions qui permettent de loger éventuellement des étudiants ou des employés détachés - c'est un argument qui avait été évoqué. En effet, pas mal de petites et moyennes entreprises doivent pouvoir loger des employés détachés, et elles ne trouvent pas de possibilités de logement pour ces personnes dans le canton. La mixité serait une solution pour loger ce type de personnes dans le cadre d'une formation professionnelle, de stages, d'échanges inter-entreprises.

Le groupe UDC maintient donc son soutien à ce projet de loi, envers et contre tout.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. La formule du député Martin-Paul Broennimann est pertinente: il ne faut pas mélanger les poussettes et les semi-remorques ! Tout simplement ! Cette formule résume la situation !

Tout d'abord, même si l'industrie a de toute évidence fait des progrès, même si elle est moins dérangeante et qu'elle fait courir moins de risques à l'environnement que par le passé, il n'en demeure pas moins que l'on ne peut pas construire des crèches à côté de dépôts pétroliers ! Ce sont des choses qui ne se font pas ! (L'orateur est interpellé.)Mais c'est de cela qu'on parle, Monsieur le député ! Vous êtes en train de mélanger des pommes et des poires, ce qui n'est pas souhaitable !

La deuxième raison pour laquelle ce projet est un mauvais projet, c'est que, lorsqu'il y a mixité dans une zone, il y a automatiquement augmentation des prix - Monsieur Portier, c'est incontestable ! - et que, dès lors, cela revient à chasser les industriels hors de ces zones. Il n'est pas acceptable non plus de faire courir un tel risque à l'industrie ! J'imagine d'ailleurs que la position très raisonnable du parti radical sur ce projet de loi tient précisément à sa volonté de défendre le tissu industriel genevois.

Le dernier point de cette problématique, soulevé par M. Grobet... (Brouhaha. La présidente agite la cloche avec vigueur.)... je veux parler des degrés de sensibilité au bruit. Si l'on doit faire de l'aménagement timbre-poste avec un système dérogatoire, cela va rendre les choses difficiles à ce niveau dans la mesure où ils ne sont pas compatibles.

Il convient de dire que si des périmètres doivent évoluer - ce qui est probablement souhaitable - cela ne doit pas se faire par voie dérogatoire, mais à la suite d'une procédure démocratique et d'une décision de votre Grand Conseil. Moi, je crains de ce genre de projet de loi qu'il ne conduise précisément au but inverse de celui qui est recherché, c'est-à-dire à un blocage. Parce que, ce faisant, vous induisez la crainte, notamment chez les travailleurs de la zone industrielle, qu'on en vienne à mettre à néant leurs emplois.

C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, même s'il est dit que cette manière de procéder serait rarement utilisée et pour des cas exceptionnels, il ne convient pas d'entrer dans un tel système. Et je vous remercie de bien vouloir suivre les conclusions du rapport de majorité.

Mis aux voix, ce projet est rejeté en premier débat par 32 non contre 23 oui et 2 abstentions.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprendrons nos travaux à 14h avec le point 153 de notre ordre du jour, projet de loi 9428-A pour lequel une demande d'urgence a été acceptée. A tout à l'heure et bon appétit !

La séance est levée à 12h.