République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 9042
Projet de loi de MM. Gabriel Barrillier, Thomas Büchi, Alain Meylan, Jean-Marc Odier, Olivier Vaucher, Jacques Baudit, René Koechlin, Pierre-Louis Portier, Jean Rémy Roulet, Mark Muller modifiant la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites (L 4 05) (Subvention à la restauration-rénovation de bâtiments)

Préconsultation

M. Gabriel Barrillier (R). Monsieur le président... (Brouhaha.)

M. Rémy Pagani. C'est scandaleux !

Le président. Non, Monsieur Pagani, je ne vous permets pas de dire cela ! J'ai précisé que le débat portait sur les deux objets. J'en ai assez de vos remarques insultantes ! Monsieur Barrillier, vous avez la parole. (Protestations virulentes.)

Le président. Vous êtes suspendu, Monsieur Spielmann !

Des voix. Barrillier, Barrillier, Barrillier !

M. Jean Spielmann. Il y a un règlement !

Le président. Pour vous aussi, Monsieur Spielmann, et je l'applique beaucoup mieux que vous ne croyez ! Allez-y, Monsieur Barrillier... malgré les tentatives de sabotage ! Vous n'êtes qu'un saboteur, Monsieur Pagani ! Je vous en prie, Monsieur Barrillier, allez-y.

M. Gabriel Barrillier. Monsieur le président, le député Pagani, qui était d'ailleurs dans mon bureau ce matin pour faire une belle photo pour la Radio et la Télévision suisses alémaniques... (Huées.)

Nous nous sommes malheureusement croisés sans nous voir ! Je lui demande peut-être de me laisser développer brièvement mon intervention. On verra ensuite...

Nous avons voté il y a quelques mois un projet de loi destiné à donner les bases légales à un bonus de 20 millions de francs pour encourager les propriétaires à rénover leurs bâtiments. C'est ce qu'on appelle le «bonus patrimoine». Malheureusement, il faut reconnaître qu'après quelques mois d'expérience ce bonus est très peu utilisé, Monsieur Pagani, au grand détriment des travailleurs de la construction et des entreprises ! Il est peu utilisé, parce que son champ d'application est trop restreint: il est limité aux immeubles d'habitation et de location. Or, ce type d'immeubles est en quantité trop limitée pour intéresser les propriétaires. Nous proposons, par ce projet de loi, d'étendre le parc susceptible de recevoir un coup de pouce à l'ensemble des immeubles dignes de protection. De plus, pour inciter les propriétaires à mieux utiliser ce bonus, nous proposons d'étendre la subvention aux travaux de restauration et rénovation. Voilà les raisons qui nous ont poussés à déposer ce projet de loi.

Le président. Merci ! Je vous rappelle qu'en préconsultation un député par groupe a droit à la parole. C'est le tour de M. Vanek, pour l'Alliance de gauche.

M. Pierre Vanek (AdG). Monsieur le président, je voulais réclamer - comme chaque député peut le faire en tout temps - l'application du règlement concernant la modification de l'ordre du jour à laquelle vous avez procédé. Nous avions deux points à l'ordre du jour: la résolution dont nous sommes les auteurs et qui a été envoyée en commission abusivement, mais aussi - tout de même ! - le rapport du Conseil d'Etat, qui était au point 2 de l'ordre du jour. Vous avez dit apparemment - je n'avais pas entendu - que vous fusionniez ces deux points. Or, faire de deux points, imprimés dans la «Feuille d'avis officielle», un seul, cela s'appelle modifier un ordre du jour, et jusqu'à nouvel avis, cela se vote, Monsieur le président, cela ne se décrète pas d'autorité !

Subsidiairement, il est évident que le Conseil d'Etat, qui a fourni un travail considérable pour produire ce rapport, devrait en entendre le débat, même sommaire, dans cette enceinte, et devrait prendre la parole pour donner quelques indications ou répondre aux questions que les députés peuvent avoir.

Ce que je défends là, c'est l'ordinaire d'un travail parlementaire. J'entends un conseiller d'Etat, sotto voce, indiquer que cela se fera en commission... Certes, mais ce débat intéresse l'ensemble des députés de ce parlement, l'ensemble des citoyens, des habitants et contribuables de ce pays, et, de ce point de vue-là, je crois que vous ne pouvez pas simplement l'escamoter ! C'est tout de même incroyable ! (Protestations.)Nous avons un rapport de pratiquement cent pages du Conseil d'Etat, et il passe à l'as. Le débat précédent portait uniquement sur la résolution que nous avons déposée. Je demande que l'ordre du jour soit respecté ! (Remarques. Brouhaha.)S'il doit être modifié, que cela soit fait dans les formes que prévoit la loi portant règlement !

Le président. Son renvoi en commission a été demandé et voté. La parole est à M. le député Baud sur le projet de loi 9042.

M. Jacques Baud (UDC). Je vais parler des projets de lois 9042 et 8883, car les deux sont proches.

M. Pierre Vanek. Parlez du point 2 de l'ordre du jour, nous sommes au point 2 !

M. Jacques Baud. Tu te tais, bonhomme ! Tu te tais, tu n'as rien à dire !

Le président. Monsieur Vanek, vous n'êtes pas le président ! Monsieur Baud, parlez du projet de loi sur la subvention à la restauration !

M. Jacques Baud. Bien, j'espère que je peux parler. Oui ? Merci !

J'aimerais commencer par une remarque importante. Nous avons là deux subventions à la restauration: l'une pour les monuments et sites, l'autre pour la rénovation des bâtiments. On peut avoir une commutation des deux sur un même chantier, et il serait très important de faire attention à ce qu'il n'y ait pas de double subvention, c'est-à-dire qu'on n'attribue pas deux subventions à un même objet.

Deuxièmement - et ceci est plus important ! - ces subventions existent depuis un certain nombre d'années, or personne n'en veut. Je demande dès lors: pourquoi ? Ce n'est pas en faisant des digressions de lois, des tentatives à gauche ou à droite pour essayer d'améliorer la chose, que ça changera quoi que ce soit ! Il faut nous demander pourquoi ils n'en veulent pas. Et la réponse est aussi simple que la question: ils n'y gagnent rien ! Il est plus intéressant pour eux d'augmenter le loyer sans subvention - c'est pérenne ! - que de prendre une subvention qui bloquerait leur loyer - ils y gagneraient moins. Tout ce qu'on peut faire comme loi ne les fera pas avancer d'un pas. Essayons comme on peut de leur donner ces subventions, mais ils n'en veulent pas ! Point ! Voilà ce que j'avais à dire, je vous remercie.

Le président. Je vous rappelle que nous sommes en préconsultation et qu'un député par parti s'exprime. (Le président est interpellé.)Non, M. Vanek a déjà parlé pour l'Alliance de gauche en préconsultation !

M. Pierre Vanek. Pas du tout !

Le président. Il n'y a plus de demande de parole en préconsultation, ni des libéraux, ni des radicaux, ni des Verts. L'AdG a déjà parlé. En conséquence, ce projet de loi est renvoyé...

Une voix. Non mais !

Le président. Je suis désolé ! Si vous continuez, je vais lever la séance pour de bon. (Protestations.)

M. Pierre Vanek. Je vous prie de respecter le règlement ! Je n'ai pas parlé du projet de loi, vous le savez bien !

Une voix. J'ai préparé ce projet de loi, Monsieur le président !

Le président. Monsieur Pagani, je vous cède la parole sur le point 20, projet de loi 9042, sinon je lève la séance.

Une voix. C'est inadmissible !

Le président. Ce qu'il y a d'inadmissible, c'est votre attitude, celle de l'Alliance de gauche ! Et particulièrement la vôtre, Monsieur Spielmann, candidat au Conseil national ! Votre attitude est indigne ! Vous êtes le doyen de ce parlement, vous devriez avoir un peu plus de respect pour l'institution parlementaire ! (Applaudissements.)

Monsieur Pagani, vous avez la parole... (Remarques.)

Vous pouvez sortir, je maintiens tout ce que j'ai dit, Monsieur Spielmann: votre attitude est inacceptable, scandaleuse... Oui, Monsieur Spielmann !

Monsieur Pagani, allez-y !

M. Rémy Pagani (AdG). Monsieur le président, j'aimerais, préalablement à l'intervention que je m'étais promis de faire en ce qui concerne ce projet de loi, dire que M. Spielmann est effectivement le doyen de ce parlement, qu'il a été président de notre Grand Conseil et qu'à ce titre, il connaît mieux que personne le règlement. En l'occurrence, je me suis levé tout à l'heure pour dire exactement ce qu'a dit mon collègue Pierre Vanek, soit pour vous prier de respecter le règlement, mais je constate une fois de plus que non seulement vous ne le respectez pas, mais aussi que vous voulez éliminer concrètement le droit de parole de M. Vanek.

Le président. Exprimez-vous sur le projet de loi 9042, je vous prie !

M. Rémy Pagani. C'est ce que je vais faire, Monsieur le président.

M. Baud a demandé si je comprenais bien ce qu'était la discussion immédiate, or je le rejoins sur ce point. A mon avis, ce projet de loi est superflu. Cette subvention à la rénovation d'immeubles a été mise sur pied il y a quelques années, mais on a vu qu'elle était sans effet, que personne ne se saisissait de cet outil, même pas pour relancer l'économie - c'était pourtant le but de ceux qui défendaient ce projet et privilégiaient ce type de travaux ! Malheureusement, cela n'a pas été efficace. Par contre, nous avons fait une expérience tout à fait positive à travers le bonus à la rénovation. Les 20 millions ainsi alloués ont bel et bien motivé certains propriétaires à entreprendre des opérations de rénovations et, à ce titre, nous avons déposé - nous, l'Alliance de gauche - un nouveau projet de loi pour offrir 20 millions supplémentaires. Et cette méthode porte ses fruits !

J'approuve donc la demande de M. Baud de passer à la discussion immédiate sur ce projet de loi, pour qu'on lui fasse le sort qu'il mérite, c'est-à-dire pour qu'on le mette purement et simplement à la poubelle.

Mise aux voix, la proposition de discussion immédiate est adoptée par 43 oui contre 15 non et 2 abstentions.

Premier débat

M. Rémy Pagani (AdG). Je crois qu'il est important de préciser ce dont il est question aujourd'hui. Il est question de reconduire - si j'ai bien compris - les motivations des auteurs, et de transformer l'impact de cet instrument qui avait été voté en 2002, ceci en allouant un crédit de 20 millions de francs au Conseil d'Etat, au titre de subvention cantonale d'encouragement à la restauration-rénovation de bâtiments.

Nous estimons, après avoir pris connaissance de ce dossier et, surtout, de ce qui s'est passé les années précédentes, qu'il n'y a pas lieu de voter en l'état ce projet de loi. Nous vous proposons donc de ne pas entrer en matière.

Le président. Je cède la parole à Mme Michèle Künzler, puis à M. Barrillier. Je rappelle à l'assemblée que les 20 millions mentionnés dans ce projet de loi sont les 20 millions déjà votés, et qu'il ne s'agit pas d'un nouveau crédit. Cela pour rassurer tout le monde.

Mme Michèle Künzler (Ve). Je trouve dommage de ne pas aller en commission pour discuter d'un projet tel que celui-ci. Vous apportez des modifications à une loi qui vient d'être votée, alors que nous n'avons pas eu le temps d'en mesurer les effets, que les gens n'ont pas eu le temps de s'y intéresser. En tout cas, si cette discussion se poursuit, nous proposerons un amendement qui supprime le terme «rénovation». Nous voulons que la restauration soit possible, car c'est cela qui pose problème et qui est essentiel. Le but ne doit pas être de rénover n'importe quelle surface commerciale telle que le Plaza, qui boufferait les 20 millions en une seule fois ! Puisque vous ne voulez pas aller en commission, nous demandons la suppression de l'élément «rénovation», pour qu'on en reste à «restauration».

M. Gabriel Barrillier (R). Je crois qu'on fait beaucoup de bruit pour pas grand-chose. D'abord, cette somme de 20 millions a déjà été votée. Peut-être pourra-t-on avoir la confirmation du président du DAEL, mais d'après mes dernières informations, pour différentes raisons et après une année de fonctionnement, ce bonus - qui est un bonus permanent, ce n'est pas un bonus conjoncturel, Monsieur Pagani - n'a pas été utilisé. D'ailleurs, les auteurs qui, à l'époque, avaient imaginé ce bonus - je regarde M. Grobet, c'était notamment lui - proposaient que d'autres bâtiments que les immeubles d'habitation et locatifs puissent aussi bénéficier de ce bonus. La proposition que nous faisons ici reprend le projet d'origine déposé par le député Grobet et d'autres députés.

Ce bonus - et nous en faisons l'expérience depuis un an - n'est pas demandé parce que le nombre d'objets, d'immeubles, qui pourraient en profiter est trop peu important. Il faudrait pouvoir étendre ce bonus à d'autres immeubles, par exemple à des mairies ou à des propriétés qui soient dignes de protection. Pourquoi pas ? Cela permettrait de rénover un patrimoine digne de protection, et cela permettrait aussi - je vous le rappelle ! - à des métiers en voie de disparition, des métiers d'art, de survivre dans notre canton.

Je pense qu'on peut très bien voter cette révision sur le champ, étant bien entendu, Madame Künzler, qu'il faut étendre la notion de restauration à celle de rénovation. Cela nous permettra de répondre plus aisément à différentes demandes. Je suis donc favorable - pourquoi pas ? - à un vote immédiat sur cette modification. Ce bonus n'est pas utilisé, c'est ridicule !

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je veux bien qu'on vote des projets de lois sur le siège, mais si nous connaissons bel et bien des problèmes de nature budgétaire - certains d'entre vous ont soutenu des appels à la rigueur - et même si les 20 millions ont déjà été attribués, je m'étonne qu'on puisse voter sur le siège l'affectation de cette somme à d'autres fins que celles prévues. Cela aura des conséquences y compris sur des bâtiments qui ne sont pas d'habitation - je vous le rappelle - puisque vous venez de modifier ce point.

Il me semble qu'il n'est pas raisonnable de voter cela sur le siège, que vous devriez l'envoyer en commission pour voir si vous renouvelez le bail de ces dépenses, et, si vous estimez que celles-ci sont justifiées, vous devrez en mesurer les conséquences.

Je vous dis cela parce que le Conseil d'Etat va s'astreindre lui-même à inscrire dans la durée certains projets de lois et se posera un certain nombre de questions. Ce n'est pas parce que des montants sont inscrits au budget qu'il faut les renouveler automatiquement, sans s'interroger ! Je pense qu'il serait bon que le Grand Conseil prenne la même voie que le Conseil d'Etat, si l'on veut petit à petit remonter la pente dans nos débats financiers.

Le président. Comme M. Moutinot renonce à prendre la parole, nous passons au vote sur la prise en considération, à moins que M. Rodrik, qui demande la parole, ne propose le renvoi en commission... Je vous cède la parole, Monsieur le député.

M. Albert Rodrik (S). Monsieur le président, je vous remercie. Depuis le début de cette discussion, j'essaie d'obtenir de notre ami Barrillier, comme représentant de la brochette honorable d'auteurs de ce projet de loi, qu'il nous explique ce que cela ajoute à la situation actuelle, à une législation qui a été renouvelée il n'y a pas longtemps.

Cette affaire n'émergeant pas, ne peut-on pas demander à ces auteurs la sagesse de ne pas nous flanquer un projet de loi à 20 millions de cette manière-là, de retirer cette affaire et de la reprendre sur d'autres bases ? Ne peut-il pas y avoir un mouvement de sagesse à 22 h 30 aujourd'hui ? Nous n'arrivons pas, cher Monsieur Barrillier, à comprendre quelle couche vous voulez ajouter au gâteau existant !

Le président. Le renvoi en commission ayant été demandé par le Conseil d'Etat, je vais le mettre aux voix. Il prime sur tout. Voulez-vous un tour de débat ? (Protestations.)Dans ce cas, je mets aux voix le renvoi en commission.

Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce projet à la commission des travaux est adoptée par 42 oui contre 9 non et 8 abstentions.