République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 8735-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit extraordinaire au titre de subvention cantonale d'investissement pour les Hôpitaux universitaires de Genève afin d'acquérir, sous conditions, le Centre d'hydrothérapie de Cressy Bien-Etre
P 1399-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier la pétition: Sauvons Cressy Bien-Etre !
Rapport de M. Claude Blanc (PDC)

Premier débat

M. Claude Blanc (PDC), rapporteur. Mon rapport était censé être oral et théoriquement je devrais vous lire le texte que j'ai rédigé, mais je pense que vous m'en dispenserez étant donné sa longueur et vu le fait qu'il vous a été distribué.

Je voudrais ici simplement mettre l'accent sur les deux soucis que la commission a eus concernant ce projet de loi.

Tout d'abord à propos de l'exploitation du centre, nous nous sommes demandé quel était le montant annuel budgété sachant, entre autres, que le centre est luxueux. Il a été construit de cette façon et il faut le reprendre tel qu'il est. Par conséquent les amortissements pourraient s'avérer élevés. La question se posait donc de savoir s'il n'était pas plus avantageux de construire un nouveau centre et de laisser celui-là partir en faillite. En réalité, un nouveau centre coûterait au minimum 5 millions et les frais d'exploitation seraient à peu près les mêmes. Etant donné qu'une telle installation existe déjà et qu'elle est belle et utilisable, il serait dommage de la laisser se détériorer. En effet, si l'affaire passe en faillite, les installations resteront vides, commenceront à se détériorer et auront ainsi perdu la plus grande partie de leur valeur.

La commission a eu un deuxième problème, s'agissant de l'usage de ce centre, qui est actuellement public. Nous avons été saisis, après la fin de nos travaux, de la pétition 1399 qui dit simplement : «Afin de pouvoir encore bénéficier de l'infrastructure de Cressy Bien-Etre pendant longtemps, nous signons cette pétition pour que tout soit entrepris pour maintenir l'accès au public qui désire faire de la prévention et entretenir sa forme grâce aux bienfaits de l'eau.» Les 1429 signatures qui suivent ce texte représentent les clients extérieurs de Cressy Bien-Etre. Ceux-ci demandent que nous fassions le nécessaire pour qu'ils puissent continuer à utiliser cette infrastructure. La commission s'est préoccupée de cela et a demandé au Conseil d'Etat de vous faire deux propositions de budgets pour les deux options susmentionnées. Vous avez donc, en deuxième annexe, un budget détaillé concernant l'exploitation de ce centre par les hôpitaux universitaires à des fins exclusivement thérapeutiques et de prévention, c'est-à-dire tout ce qui doit être pris en charge par les assurances-maladie. Vous avez également le budget détaillé de la deuxième solution avec «ouverture à des fins thérapeutiques et de prévention et exploitation complémentaire pour le public». Il est évident que, s'il devait y avoir une telle exploitation, elle ne serait pas faite par les hôpitaux universitaires. A cette fin, un appel d'offres serait donc ouvert.

Il ressort de tout cela que si les hôpitaux universitaires se bornent à exploiter le centre uniquement pour les besoins thérapeutiques, le coût annuel pour l'Etat peut être estimé à environ 1 million de francs. Si on trouve le moyen d'ouvrir ce centre au public, par le biais d'une association chargée de le gérer, le coût estimé ne serait plus que de 700 000 F. La différence n'est pas grande mais le service rendu pourrait être intéressant et c'est d'ailleurs dans ce sens que va la pétition.

Nous avons traité rapidement cette pétition puisque nous avons estimé y avoir répondu en acceptant ce projet de loi. Comme le Conseil d'Etat s'était engagé à étudier activement la solution qui permettrait le maintien de l'ouverture au public, nous proposons de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.

M. Antoine Droin (S). Cressy Bien-Etre est une belle exploitation, trop belle, peut-être. Si belle que le fonctionnement de cet établissement engendre des dépenses confortables. Voilà bel et bien le noeud du problème qui a donné des sueurs d'eau chaude à la fondation qui dirige actuellement l'établissement. Si les HUG, intéressés par un achat du centre, ne veulent pas boire la tasse, il est sans conteste impératif que les frais de fonctionnement soient à l'avenir calculés et recalculés au plus juste. Faire les mêmes erreurs que par le passé serait mettre l'avenir de Bien-Etre en péril. Il est donc primordial qu'un vrai calcul de rentabilité, un business plan, soit élaboré pour que la garantie d'une certaine rentabilité, ou d'une rentabilité certaine, soit démontrée. Nous demandons donc que les belles intentions en la matière, portées devant la commission des finances, à savoir l'exploitation complémentaire destinée au grand public ainsi que la location de certains espaces, deviennent de vrais engagements de tiers, qui doivent à terme, non plus présenter un excédent de dépenses de 600 000 F environ, mais bien mener à un équilibre - un déséquilibre devrais-je dire - beaucoup plus acceptable.

Il nous reste toujours un arrière-goût d'incertitude : est-ce que réellement le faste d'une construction mégalomaniaque pourrait être comparable, avec un fonctionnement beaucoup plus modeste, à un établissement spécifiquement hospitalier? Des explications contradictoires nous ont été données sur le ratio nombre d'entrées et déficit. Alors que 300 entrées journalières étaient prévues, il y en a eu parfois le double, nous a-t-on affirmé. En tous les cas, elles ont été largement supérieures, au vu de la bonne affluence du public, nous a-t-on dit. Nonobstant, celles-ci ont été le reflet d'un déficit de 3,3 millions. Ceci m'amène à poser deux questions. Qu'aurait été le déficit s'il n'y avait eu effectivement que 300 entrées ? Comment les HUG ont-ils tiré profit de ces informations quelque peu aléatoires pour les calculs de rentabilité présentés en commission ?

Tout au long des débats, nous n'avons pas pu rejeter le sentiment désagréable de nous situer entre le marteau et l'enclume. Le canton a un besoin incontestable d'un centre d'hydrothérapie au bénéfice d'une population déjà défavorisée. Il est vrai que la fermeture inéluctable de Cressy Bien-Etre, en cas de non-achat par l'Etat, mettrait les bénéficiaires dans l'embarras puisque aucune autre solution fiable n'est disponible. Ce constat nous met, comme le mentionne le rapporteur, dans une situation émotionnelle délicate en regard des handicapés qui ont un réel besoin de la prestation offerte à Cressy Bien-Etre.

Monsieur Unger, Cressy, c'est le bien qui passe par le «être». Mais pour être, nous devons bien nous sentir, avoir l'assurance et la certitude que plus aucune hypothèque ne s'érige au travers du chemin de l'achat, que toute hypothèque est à jamais radiée, y compris celle qui pourrait être liée au centre Yamani. Nous attendons cette certitude de votre part. Je vous remercie.

Mme Morgane Gauthier (Ve). Le groupe des Verts a émis, en débat de préconsultation, certains doutes concernant le bien-fondé de l'acquisition d'un tel centre, vu le luxe et la mauvaise gestion de cet établissement. Loin de nous l'idée que les personnes bénévoles ne se donnent pas de la peine, surtout dans le domaine du handicap, mais sur cette opération nous ne pouvons pas admettre que la conception ait été réalisée correctement.

Le travail en commission a permis de lever certaines inquiétudes. Le département nous a ainsi fourni un budget qui, on l'espère, tiendra la route. Il a également répondu au grand nombre de nos interrogations concernant le traitement du personnel, bien que la majorité de la commission se soit prononcée en défaveur d'une audition de ce dernier, majorité à laquelle les Verts n'ont absolument pas participé. Nous avons également eu des indications concernant les services offerts par les HUG et le manque de lieux permettant d'accueillir les personnes à mobilité réduite. Offrir ce type de thérapie à la population nous semble effectivement nécessaire et c'est en grande partie pour cette raison que nous avons voté ce projet de loi.

Par ailleurs, nous sommes toujours favorables à une ouverture au grand public et nous participerons, si nécessaire, à l'élaboration d'une motion allant dans ce sens.

Je tiens également à remercier le rapporteur d'avoir fait figurer notre volonté que ce bâtiment soit examiné du point de vue énergétique par le service cantonal de l'énergie. L'Etat doit montrer l'exemple et c'est une bonne occasion de le faire. Finalement, 5 millions pour un bâtiment estimé à plus de 22 millions, c'est peut-être une bonne opération, mais seulement si le fonctionnement est bien maîtrisé. Pour cela, nous examinerons avec soin les comptes de l'année prochaine en regard du budget présenté en commission. En conclusion, comme en commission, le groupe des Verts soutiendra ce projet de loi.

M. Rémy Pagani (AdG). Cette affaire me rappelle la débâcle de Swissair. Nous avons aussi affaire ici à des dépenses pharaoniques engagées pour construire un bâtiment de 22 400 000 F. De plus, en une seule année, le déficit de fonctionnement s'est élevé à 3 300 000 F. Il faut quand même le faire !

Certains membres de la majorité actuelle nous rebattent les oreilles à longueur d'année de l'efficacité du secteur privé, qui leur tient lieu de doctrine, mais on voit ce que cela a donné avec Swissair, ce que cela donne avec Cressy Bien-Etre et ce que cela donnera avec la votation sur la LME. Le miracle et le nirvana nous sont prédits mais dans la réalité, lorsque le secteur privé s'occupe d'affaires qui concernent l'ensemble de la collectivité, les résultats sont assez déplorables. Citons la faillite monstrueuse qui a eu lieu ces derniers jours aux Etats-Unis et dont nous avons vu les effets.

La société doit mener une réflexion sur les privatisations et sur la soi-disant excellence du secteur privé. Un autre bilan doit être tiré, à savoir que, chaque fois qu'un gouffre s'ouvre devant les pas de ces managers super-qualifiés, ils en appellent à l'Etat qu'ils décrient toute l'année, qu'ils mettent au pilori et dont ils dénient les qualités, notamment s'agissant de régulation du marché. Il y a là une incohérence. Je ne sais pas combien de personnes des bancs d'en face prendront la parole pour défendre ce projet. Toujours est-il que peu de personnes se sont levées pour l'instant pour en appeler à l'Etat, car ils ont évidemment un peu de mal à le faire...

Deux bilans peuvent donc être tirés de l'affaire Cressy: d'une part, la gestion a été non seulement mauvaise mais catastrophique, comme cela a été le cas pour Swissair, comme ce sera le cas pour le marché de l'électricité - si nous le libéralisons - et pour toutes les autres questions qui concernent l'ensemble de la collectivité; d'autre part, quand ça va mal, effectivement et heureusement, il y a encore l'Etat ! J'en appelle donc aux citoyens pour constater que l'Etat, d'autant plus avec la crise économique que nous traversons en ce moment, est nécessaire pour réguler un certain nombre de défectuosités du marché.

Cela étant, notre groupe soutiendra du bout des doigts ce projet de loi et cet achat. Du bout des doigts parce que nous n'avons pas la certitude que les frais de fonctionnement de cette piscine, qui au demeurant est excellente, puissent être couverts, malgré les augmentations du coût des assurances-maladie, par la collectivité.

Comme les Verts l'ont précédemment dit, nous resterons attentifs l'année prochaine pour voir combien coûtera réellement, au niveau des frais de fonctionnement, cette piscine qui a été décidée et construite, je le rappelle, par des gens qui ont eu les yeux plus gros que le ventre.

M. Alberto Velasco (S). Mon collègue Droin a été assez explicite sur les raisons qui nous font douter du futur de ce projet. Les coûts d'exploitation ne sont en effet connus que théoriquement et nous pensons qu'ils seront plus importants. Cela dit, je tiens à signaler que nous nous serions ralliés au vote du projet, car nous considérons que ces infrastructures sont utiles pour la collectivité. Toutefois, notre groupe s'abstiendra ce soir, parce qu'il avait émis le désir qu'une commission du personnel qui en avait fait la demande soit reçue et écoutée, et que la commission a refusé et a préféré l'entendre une fois ce projet voté. Les socialistes trouvent cela regrettable. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes abstenus en commission, non pas parce que l'investissement ne nous paraît pas utile, mais bien parce que le personnel n'a pas été écouté. Notre groupe s'abstiendra sur ce projet ce soir.

M. Claude Blanc (PDC), rapporteur. M. Droin a dit tout à l'heure qu'il fallait lever toutes les hypothèques. Je pense qu'il faisait allusion aux hypothèques qui grèvent le bâtiment. J'ai donc peut-être oublié d'attirer votre attention sur l'article 2 de ce projet de loi, qui dit expressément que l'affaire ne se réalisera que lorsque ce bâtiment aura été délié de toutes charges. Cela est bien précisé dans le projet de loi.

D'autre part, ce bâtiment luxueux, comme il a été dit, et en excellent état est à prendre ou à laisser. Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, si l'Etat le laisse, l'affaire tombera en faillite et cela durera des années: le bâtiment se détériorera, l'affaire sera ainsi perdue pour tout le monde. Même les utilisateurs actuels ne pourront pas l'utiliser tant que quelqu'un ne se sera pas inscrit pour le reprendre. Je ne sais d'ailleurs pas qui pourrait alors le faire.

Il se trouve que l'Etat en a l'usage pour les hôpitaux universitaires, puisque de toute manière les HUG voulaient construire un centre d'hydrothérapie. L'occasion se présente avec un bâtiment magnifique de 22 millions qui ne coûtera que 5 millions et dont seuls 4 millions devront être libérés. Je crois par conséquent que l'affaire est bonne et qu'il faut la saisir.

Maintenant, quant au budget d'exploitation, il est évident qu'il a été calculé en supposant que la partie privée pourra être exploitée comme elle l'était jusqu'à présent et que les gens continueront à fréquenter ce centre. Il est évident qu'on ne peut pas prévoir dès aujourd'hui la fréquentation future de cet établissement, qui ne pourra être ouvert au public qu'en dehors des heures réservées aux HUG, ce point est bien clair. Il y aura donc quand même des contraintes.

Les projets de budgets d'exploitation qui nous ont été soumis restent des projets et nous espérons qu'ils se vérifieront. Personne ne peut dire ici dans quelle mesure le public va suivre. Par conséquent, il faudra encore le vérifier.

Maintenant, je trouve un peu regrettable le dérapage de M. Pagani qui a comparé cette affaire à Swissair. En effet, Foyer-Handicap ne peut pas être comparé à une entreprise du secteur privé comme l'était Swissair. Franchement, Foyer-Handicap est une organisation de personnes qui ont voulu faire du bien en payant de leur personne et de leurs biens. J'attire quand même votre attention sur le fait que la plupart des personnes qui font partie de Foyer-Handicap ont ressenti le besoin de créer des structures que l'Etat ne possédait pas à l'époque, pour essayer de faire du bien avec leurs propres biens. Probablement qu'au début ces gens étaient capables de gérer leurs modestes installations et qu'ils ont ensuite été dépassés par les événements. Ils n'ont, à un certain moment, plus eu la possibilité de contrôler les dérapages financiers. Si M. Pagani a raison sur un point, c'est sur le fait qu'ils ont eu les yeux plus gros que le ventre. Je trouve cependant regrettable qu'on les accable. C'est malheureux pour eux qu'ils en soient arrivés là et je tiens quand même à dire que ce sont eux qui vont perdre le plus d'argent. Ils avaient cru le mettre dans une bonne oeuvre qu'ils ont mal gérée et c'est leur argent qu'ils vont perdre. Accessoirement, les banques qui étaient impliquées en perdront aussi. Ma foi, tant pis pour elles, je ne vais pas pleurer. Mais je voudrais quand même réhabiliter ces gens, qui n'ont pas commis de faute mais qui ont été dépassés par les événements en voulant bien faire.

Le président. Il reste encore sept intervenants, le Bureau vous propose de clore la liste.

Mise aux voix, cette proposition est adoptée.

M. Robert Iselin (UDC). Je suis un peu neuf dans ce parlement, mais je suis toujours étonné de la logorrhée qui saisit les personnes de gauche pour dire en cinq ou six minutes un truc qui peut se dire en trente secondes ! On peut toujours se moquer des gens qui sont dans le privé et qui, après tout, font marcher l'économie. Pour ma part, j'ai un seul argument : nous avons la possibilité d'acheter pour 5 millions un établissement qui a coûté 22,4 millions de francs suisses. Il y a évidemment des frais d'exploitation, dont on n'est pas très sûr où ils peuvent nous mener, il faut être franc. Mais on sait cependant que les 3,3 millions de déficit mentionnés par M. Pagani correspondent à une équipe de quarante personnes. L'organisation prévue fait état, dans un cas, de 10,5 personnes et, dans l'autre, de 13 ou 14 personnes, si je ne me trompe pas. On ne peut donc pas utiliser cet argument des 3,3 millions pour faire capoter cette histoire.

Pour le surplus, je remercie M. Blanc pour ses propos sur quelqu'un avec qui j'ai parfois été en compétition, mais qui a fait beaucoup pour les handicapés. Ces gens ont été emportés par leur désir de faire du bien à leur prochain, je peux vous le dire, ils ont été sincères. Ils ont été saisis par la folie des grandeurs, c'est possible, et si l'Etat de Genève peut en profiter, qu'il en profite !

M. Philippe Glatz (PDC). Compte tenu du fait qu'il y a encore beaucoup d'inscrits, je vais essayer d'être très bref, d'autant que pratiquement tout a déjà été dit. Je ne vous cacherai pas, Mesdames et Messieurs, que le parti démocrate-chrétien était fort réticent quant à ce projet de loi. En effet, de notre point de vue, il n'incombe pas à l'Etat de venir au secours des associations du secteur privé lorsque celles-ci se trouvent en difficulté. En la circonstance, qu'est-ce qui nous a fait changer d'avis ? C'est une analyse objective des conditions qui étaient offertes pour l'acquisition de ce centre.

Comme l'ont dit les préopinants, celui-ci a coûté 22,4 millions, il a été payé grâce à 7 millions de dons et l'Etat pourra le racheter pour 5 millions, c'est un fait objectif. Il s'agit d'un bâtiment bien construit et qui sera relativement facile à entretenir. Bien que nous soyons d'accord avec Mme Gauthier qui disait tout à l'heure qu'il faudra surveiller les futures charges d'exploitation, nous n'avons pas à faire ici le procès de la gestion précédente compte tenu du problème qui est posé.

Un deuxième élément a motivé notre décision, c'est que, grâce à l'intervention de l'Etat, grâce à cette prise en charge par l'Etat, nous pouvons sauver un certain nombre d'emplois. Nous avons en effet obtenu la garantie qu'un certain nombre des collaborateurs qui sont aujourd'hui employés par la fondation ou par Cressy Bien-Etre pourront être maintenus dans leur fonction, au service de la collectivité. Par conséquent, le groupe démocrate-chrétien soutiendra ce projet de loi.

M. Olivier Vaucher (L). Tout d'abord, j'aimerais relever les propos lamentables du député Pagani qui compare une organisation bénévole à une société de l'économie privée. Monsieur Pagani, que vous critiquiez les entreprises privées qui se sont distinguées ces derniers mois ou ces dernières années, je le comprends fort bien, mais sachez qu'on ne peut pas comparer une institution privée, composée en grande partie de personnes agissant de façon bénévole, à de grands managers qualifiés de l'économie privée, comme vous l'avez dit tout à l'heure. De grâce, ne mélangez pas les différents secteurs d'activité, ne mélangez pas le bénévolat avec le professionnalisme de l'économie. C'est la première chose que je voulais relever, car je pense que ces propos étaient particulièrement déplacés.

D'autre part, certains préopinants ont parlé des résultats lamentables du premier exercice de ce centre. Mesdames et Messieurs les députés, je peux vous dire que lorsqu'il s'agit de gérer et d'exploiter un centre de cette ampleur, ce n'est pas en une année qu'on peut réussir à le rentabiliser et à boucler avec des chiffres positifs. On ne peut pas objectivement juger la gestion après un seul exercice comptable. Je ne me permettrai par conséquent pas de faire des critiques, compte tenu de ce que je viens d'évoquer.

Bien entendu, il faudra impérativement que les frais de fonctionnement soient jugulés par le futur exploitant, qui devrait être, nous le souhaitons tous, l'Etat. Je remercie ici M. Blanc d'avoir apporté la bonne précision, à savoir que la reprise du centre s'effectuera après un nettoyage net, si je puis dire, des charges. Ce point est important. Une fois ces charges liquidées, il faudra que le centre se remette en route le plus rapidement possible, d'une part pour que les installations ne se détériorent pas et, d'autre part, comme mon préopinant l'a dit, de manière à ce qu'un certain nombre d'emplois puissent être sauvegardés.

J'aimerais aussi relever la proximité du centre de Loëx. Je crois que là aussi il s'agit d'un avantage non négligeable pour l'Etat. Pour ces raisons, le groupe libéral soutiendra le rachat de ce centre, sous condition, je le répète, que les frais d'exploitation soient jugulés à l'avenir.

M. John Dupraz (R). Le groupe radical soutiendra ce projet de loi. Il est vrai que, dans une affaire aussi délicate, l'Etat vient au secours d'un canard boiteux qui va à la faillite, mais je crois qu'il faut tout d'abord relever ici la qualité et le bien-fondé de l'action de Foyer-Handicap et des gens qui, bénévolement, s'engagent au service de personnes défavorisées et handicapées. Dans cette affaire de Cressy Bien-Etre, il faut dire que la construction du bâtiment a été gérée de façon calamiteuse. De plus, les banques - souvent enclines à donner des leçons de bonne gestion et de savoir-faire, notamment aux politiques - se sont engagées avec les initiants de ce projet dans une aventure qui conduit aujourd'hui à la catastrophe si l'Etat n'intervient pas.

Le groupe radical estime que c'est un bon projet car l'Etat, qui prévoyait de construire un tel centre, pourra en bénéficier immédiatement. De plus, il l'achète à un prix qui est raisonnable par rapport à l'investissement qui a été fait. Enfin, ce projet permet de maintenir des emplois, alors que si l'entreprise allait à la faillite le personnel serait immédiatement licencié. Il s'agit ainsi d'une bonne affaire sur le plan de l'emploi, du fonctionnement et de l'outil que Cressy représente pour les hôpitaux, l'Etat et les gens nécessitant des soins. Nous voterons donc ce projet de loi.

Cela dit, quant aux frais d'exploitation, il faut savoir que les piscines sont fort coûteuses. Je ne connais pas de piscine qui fasse des bénéfices. Elles sont toutes subventionnées. Dans le cas qui nous intéresse, il y a quand même un caractère médical, un objectif de thérapie et même un complément de loisir aux heures où la piscine n'est pas utilisée par les patients. Je trouve que c'est une bonne combinaison entre les soins donnés aux malades et une utilisation de loisir pour les habitants de la région. Encore une fois, il s'agit d'une bonne affaire. Je tiens à féliciter M. Unger d'avoir pris l'initiative courageuse de faire savoir aux responsables de ce centre que l'Etat offrait ce prix-là et rien d'autre. Je regrette enfin que les socialistes s'abstiennent: ils font là de la petite politique politicienne !

M. Alain Charbonnier (S). Je ne reviendrai pas sur le luxe du lieu et sur la mauvaise gestion, je crois que tout a été dit. J'insisterai plutôt sur l'utilité du centre pour les personnes handicapées. Je crois que celle-ci a été prouvée au long de l'unique année d'exploitation du centre et qu'elle justifie par conséquent les prestations. J'en viens donc au budget d'exploitation, qui a été présenté tardivement, il est vrai, aux députés ne siégeant pas à la commission des finances. Je m'aperçois que seuls trois postes de physiothérapeutes sont prévus pour l'exploitation de ce centre. Cela veut dire, j'imagine, que deux d'entre eux seront présents simultanément pour 300m2 d'eau. Cela me paraît largement trop peu pour un centre de rééducation destiné aux patients des HUG, c'est-à-dire à des personnes paraplégiques, hémiplégiques, atteintes de sclérose en plaques, etc., qui ont besoin de traitements. Celles-ci ne viennent pas simplement barboter dans l'eau comme le ferait tout un chacun, mais pour des traitements de physiothérapie ou de rééducation. Deux postes simultanément pour une piscine de 300m2, avec en plus les structures annexes de physiothérapie, cela me laisse vraiment songeur.

D'autre part, il a été question de la proximité de Loëx: je rappellerai quand même que l'hôpital de Loëx se trouve à 1,7 kilomètre et non pas à 100 mètres et qu'il s'agit de personnes à mobilité réduite. Je pose donc la question de savoir comment sont envisagés les transports, de l'hôpital de Loëx au centre de Cressy Bien-Etre, pour les patients des HUG.

Je ferai encore une petite remarque par rapport aux personnes qui disent que les socialistes ne sont pas très honnêtes sur la question. Je vous signale qu'une entreprise comme Textura s'est vu retirer sa subvention sous prétexte qu'elle ne présentait pas des comptes très clairs. Là, je vous ai donné deux exemples qui ne me paraissent pas très clairs non plus ! (Applaudissements.)

M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Je crois que tout a été dit. Je vais cependant expliquer en deux mots à M. Charbonnier le pourquoi du nombre de postes de physiothérapeutes prévu. Il s'agit de deux physiothérapeutes en plus de ceux qui pratiquent déjà le métier que vous avez décrit, qui est de rééduquer par exemple des paraplégiques ou des personnes atteintes de sclérose en plaques. Le jour où il y aura une bascule complète de Beau-Séjour à Loëx, il serait absurde, comme vous l'avez dit, de n'avoir que deux physiothérapeutes simultanément pour un bassin de cette taille.

Concernant la question de M. Droin sur la rentabilité, je dirai qu'il n'est pas question que ce centre devienne rentable: il est question - cela a été très clair dans nos échanges à la commission de finances - que ce bassin remplisse les fonctions requises par les HUG, c'est-à-dire qu'il remplisse ses missions pour les handicapés et pour les patients dont M. Charbonnier a parlé, de manière plus générale pour les patients à mobilité réduite ainsi que pour quelques associations qui agissent dans ce domaine. A cet égard, il ne peut pas, et ce n'est pas sa vocation, être rentable. La diminution des charges pourra venir d'un affermage d'une partie des heures, probablement des heures de fin d'après-midi et de début de soirée, ainsi que de celles du week-end à la mauvaise saison, puisqu'une analyse fine des chiffres fournis par l'actuelle équipe de direction montre que l'exploitation de Cressy Bien-Etre est excellente lorsqu'il fait mauvais temps - ce n'est pas une surprise - et qu'elle est très mauvaise dès que le temps s'améliore. Pour cette raison, dans les projets que je vous ai soumis, il y avait une limitation d'octobre à mars, d'une part, et de 16 ou 17 h à 21 h, d'autre part.

Je crois, et je me joindrai à ceux qui l'ont fait, qu'il convient de rendre hommage à toute l'équipe qui s'est occupée de Foyer-Handicap pendant toutes les années où le canton, lui, ne s'occupait pas de handicap. Vous avez dû, Mesdames et Messieurs les députés, voter en urgence, à la fin de l'année dernière, trois projets de lois : un pour aider Clair-Bois, un pour aider Aigues-Vertes et un troisième pour aider Foyer-Handicap. Il ne faut voir là que le passage d'une étape où le bénévolat suffisait à une étape où la professionnalisation s'impose, et cela a un coût.

Vous avez aussi pris la peine de voter un projet de loi qui séparait clairement la fondation Foyer-Handicap de la fondation Cressy Bien-Etre parce qu'on voyait les difficultés arriver à l'horizon. J'aimerais donc rendre hommage à tous ceux qui pendant des années, que ce soit à Clair-Bois, à Aigues-Vertes, à Foyer Handicap ou dans bien d'autres institutions pour personnes handicapées, ont dépensé tant d'énergie et de compétences pour faire vivre le monde du handicap et lui faire atteindre le niveau où il est aujourd'hui à Genève. Cela étant dit, et beaucoup d'entre vous l'ont souligné, probablement que Cressy Bien-Etre a été une espèce de rêve un peu fantasmatique: l'on voulait faire si bien que les choses n'avaient pas de prix. Hélas, le retour à la réalité a été dur pour les initiateurs de ce projet.

La conviction du Conseil d'Etat est qu'une reprise éventuelle ne peut se faire que dans le cadre d'une exploitation par les hôpitaux et sans qu'aucun centime supplémentaire ne puisse être imputé à l'assurance-maladie de base au prétexte de l'acquisition de cet objet. C'est bien la raison pour laquelle j'ai été, M. Dupraz a dit ferme: soyons honnête, je dirai un peu dur avec l'équipe de Cressy Bien-Etre qui au départ nous proposait tout simplement de reprendre la dette hypothécaire de 15 millions. A ce moment, le Conseil d'Etat et les HUG ont décidé de faire une offre à hauteur de ce que coûterait le bassin qui aurait dû de toute manière être construit à Loëx lors du transfert de l'hôpital de Beau-Séjour sur le domaine de Loëx. Pour cette raison, nous sommes tombés d'accord sur cette somme de 5 millions.

Mesdames et Messieurs les députés, au fond je n'ai pas envie de savoir s'il s'agit d'une bonne ou d'une mauvaise affaire. La question qui se pose, et M. le rapporteur l'a très bien dit, est qu'il existe un objet et que celui-ci est de qualité. Il existe également un besoin, à venir, il est vrai, d'un bassin d'hydrothérapie à l'occasion du transfert, dans quatre ou cinq ans, de Beau-Séjour sur le domaine de Loëx. Dans l'intervalle, il existe un besoin pour tous les gens qui ont apprécié le confort, l'utilité et l'aspect promotion de la santé qu'offre le bassin de Cressy Bien-Etre.

Le Conseil d'Etat s'est donc engagé sous ces conditions et, je le répète, en certifiant que pas un centime ne viendra grever le budget de l'assurance-maladie de base et donc les cotisations que nous payons. Je vous prie donc de bien vouloir accepter ce projet. Je vous signale enfin que ce projet est conditionnel, puisque le montant offert est maximal alors que l'ensemble de la dette hypothécaire n'a pas encore trouvé de règlement définitif.

La loi 8735 est adoptée en trois débats, par article et dans son ensemble.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des finances (renvoi de la pétition 1399 au Conseil d'Etat) sont adoptées.