République et canton de Genève

Grand Conseil

Chargement en cours ...

La séance est ouverte à 18h10, sous la présidence de M. Eric Leyvraz, président.

Assistent à la séance: Mme Anne Emery-Torracinta et M. Serge Dal Busco, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Mauro Poggia, Pierre Maudet, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Murat Julian Alder, Jean Batou, Pierre Gauthier, Sandra Golay, Lionel Halpérin, Jean-Charles Lathion, Carlos Medeiros, Simone de Montmollin, Philippe Morel, Salima Moyard, Jean Romain, Eric Stauffer et Ronald Zacharias, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Maria Casares, Nathalie Hardyn, Xavier Magnin, Patrick Malek-Asghar, Claire Martenot, Ana Roch, Pascal Uehlinger et Céline Zuber-Roy.

Annonces et dépôts

Néant.

M 2330-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. François Baertschi, Pascal Spuhler, Lydia Schneider Hausser, Roger Deneys, Jean Batou, Pierre Vanek, Eric Stauffer, Jean-Marie Voumard, Alberto Velasco, Jocelyne Haller, Sandro Pistis, Daniel Sormanni, Thierry Cerutti, Christian Zaugg, Florian Gander, Sandra Golay, Nicole Valiquer Grecuccio, Salika Wenger, André Python, Christian Frey, Isabelle Brunier, Salima Moyard, Christian Flury, Francisco Valentin, Romain de Sainte Marie, Jean-Charles Rielle, Cyril Mizrahi pour des relations apaisées entre l'Etat et les organismes subventionnés (EMS, institutions pour personnes handicapées, pour jeunes, etc.) : supprimons l'« effet noria » et faisons des calculs plus équitables !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 12 et 13 octobre 2017.
Rapport de majorité de M. François Baertschi (MCG)
Rapport de minorité de M. Cyril Aellen (PLR)

Débat

Le président. Nous abordons maintenant la suite de notre ordre du jour, dont le prochain point est la M 2330-A que nous traiterons en catégorie II, quarante minutes. Monsieur Baertschi, je vous laisse la parole.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Cette motion a été déposée parce que nous avons soulevé une problématique générale qui touche le fonctionnement des organismes subventionnés au travers de ce que l'on appelle l'effet de noria. Ce mécanisme prend en compte l'arrivée de nouveaux employés, qui coûtent moins cher puisqu'ils ont moins d'annuités; ils ont donc en général un revenu plus bas parce que ce sont de nouveaux arrivés. De ce fait, l'Etat de Genève lime les budgets des institutions subventionnées au travers d'un pourcentage fixe, qui devrait être un peu universel, utilisé pour tous les organismes, quel que soit le nombre de nouveaux arrivants au sein de l'organisme subventionné. Ça a posé un certain nombre de problèmes, et le but de cette motion était de s'interroger sur ce financement, sur ce mécanisme qui a également des effets pervers et permet surtout de réduire les budgets alloués.

Le but des signataires, ce qui nous semblait important - qui est aussi ressorti des travaux de commission - c'est de veiller à l'équilibre financier à long terme de ces institutions, d'avoir un système pérenne et non pas un système qui apparaît, à nos yeux, comme une espèce de bricolage. C'est pourquoi nous avons proposé cette motion. Nous avons eu de nombreuses auditions, très instructives, sur ce phénomène et avons écouté notamment les difficultés de certains de ces organismes subventionnés. La grande difficulté, ce qui nous a le plus dérangés, c'est le fait que ces coupes s'additionnent à d'autres coupes sans qu'il y ait une vision d'ensemble. Nous avons également eu à déplorer un élément en commission: un chiffrage commun à cette motion et à un projet de loi, qui a été traité hier, nous a été donné en dernière minute, lors d'une des dernières séances, et nous n'avons pas pu l'examiner alors que nos travaux sur cette motion se sont étendus sur une longue période. Nous avons déploré d'avoir ces chiffres sans pouvoir les étudier de manière beaucoup plus précise, parce qu'ils méritaient un examen plus précis. C'est donc un regret que nous avons eu dans l'examen de cette question en commission; les chiffres nous semblent un peu contestables. Mais il s'agit d'une motion: il s'agit de principes généraux qui permettront au Conseil d'Etat de tendre vers un meilleur calcul et une meilleure appréciation à la fois des recettes et des dépenses, d'avoir une vision un peu prospective de ce qui doit être fait dans ces institutions subventionnées. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Nous avons entre-temps également... Excusez-moi, je prends un peu plus de temps, Monsieur le président.

Le président. Prenez sur le temps de votre groupe, c'est bon.

M. François Baertschi. Je vais essayer d'être le plus rapide possible. Nous avons également accepté en commission un amendement pour mieux formuler une des invites, de sorte qu'elle corresponde plus à la réalité de ce que nous traitons. L'une des invites de la motion demandait que l'«effet noria» soit aboli, mais nous nous sommes rendu compte au cours des travaux qu'il fallait une formulation plus nuancée. Nous l'avons modifiée, et c'est la motion que nous présentons ce soir au Grand Conseil. Merci, Monsieur le président.

M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de minorité. Deux choses; merci d'une part au MCG d'avoir effectivement déposé un amendement en commission. C'était un amendement bienvenu et le PLR l'a voté. D'autre part, je n'avais à titre personnel pas compris que les tableaux avec les chiffres méritaient un examen complémentaire; j'entends cet argument-là et je propose un renvoi en commission.

Le président. Merci, Monsieur. Nous voterons sur cette demande, mais nous allons d'abord écouter l'avis de M. Baertschi puis celui du Conseil d'Etat.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. J'ai déploré le chiffrage parce que celui qu'on nous a fourni mélangeait les données qui s'appliquent au projet de loi avec celles relatives à la motion. En revanche, du fait qu'il ne s'agit pas ici d'un projet de loi, nous pensons que le retour en commission n'est pas nécessaire.

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je soutiens au nom du Conseil d'Etat le renvoi en commission pour une raison que je tiens à porter à votre connaissance. Mes deux collègues, M. Poggia et Mme Emery-Torracinta, et moi avons récemment - très récemment, il y a quelques jours - reçu à leur demande des représentants de l'AGOEER et d'INSOS. Ces faîtières regroupent des associations actives dans le domaine du handicap et de l'éducation, de l'enseignement, de la réinsertion, etc., et nous avons discuté très largement: c'était une réunion tout à fait constructive, nous les reverrons prochainement. Un agenda est donc prévu pour examiner précisément les difficultés que représente en particulier l'application de l'effet de noria pour certaines associations, notamment celles qui comptent une vingtaine de personnes. Ce calendrier a tout son sens: il nous permet d'avancer dans les discussions et dans l'affinage appelé de ses voeux par l'auteur de la motion. Suite à ces prochains entretiens, je pense qu'on pourra assez rapidement revenir en commission pour faire état du progrès, ou des progrès, qu'on aura pu enregistrer d'ici là. Je vous invite donc à voter ce renvoi en commission.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, vous êtes priés de vous prononcer sur cette demande de renvoi à la commission des finances.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2330 à la commission des finances est adopté par 46 oui contre 43 non. (Exclamations à l'annonce du résultat.)

R 766-A
Rapport de la commission fiscale chargée d'étudier la proposition de résolution de Mmes et MM. Gabriel Barrillier, Jean-Marc Guinchard, Béatrice Hirsch, Philippe Morel, Anne Marie von Arx-Vernon, Serge Hiltpold, Jean Romain, Pierre Weiss, Vincent Maitre, Frédéric Hohl, Patrick Saudan, Beatriz de Candolle, Murat Julian Alder, Pierre Ronget, Simone de Montmollin, Raymond Wicky, Jean-Luc Forni, Bertrand Buchs, Guy Mettan, François Lance, Olivier Cerutti, Martine Roset, Pierre Conne : Reconnaissance et encouragement du bénévolat : pour une exonération fiscale des indemnités de bénévoles (Résolution du Grand Conseil genevois à l'Assemblée fédérale exerçant le droit d'initiative cantonale)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VI des 21 et 22 septembre 2017.
Rapport de M. François Baertschi (MCG)

Débat

Le président. Nous sommes en catégorie II, trente minutes, pour traiter la R 766-A. Monsieur Baertschi, c'est à vous. (Un instant s'écoule.) Monsieur Baertschi !

Des voix. Baertschi ! (Remarque.)

Le président. Il s'agit de la R 766-A, dont vous êtes le rapporteur. (Un instant s'écoule. Le président rit.) Monsieur Barrillier, je vous laisse la parole ? (Remarque.) Bon, Monsieur Baertschi, allez-y !

M. François Baertschi (MCG), rapporteur. Je suis désolé, Monsieur le président.

Le président. Allez-y, ce n'est pas grave.

M. François Baertschi. Deux anciens présidents de ce Grand Conseil ont soulevé une question intéressante. Ils ont souligné le fait que les bénévoles ne sont souvent pas très bien traités, qu'ils ont des problèmes. Ils font parfois un travail presque professionnel, qui leur prend un temps considérable, et n'ont pas de financement pour cela, ou seulement des défraiements très minimes. Le principe est donc d'avoir le même système pour les activités de bénévolat que celui qui existe pour les sapeurs-pompiers qui ont droit à des déductions. Ça concerne notamment le milieu sportif, et nous avons eu des auditions très instructives de personnes qui en sont issues. Les bénévoles du milieu sportif - qui a de la peine aussi à trouver de nouveaux bénévoles pour continuer: des entraîneurs, des gens qui s'occupent de la vie des clubs - consacrent beaucoup de temps à ces activités et il y a donc un véritable besoin, comme on nous l'a confirmé.

La seule difficulté, c'est que ça doit passer par le droit fédéral: nous ne pouvons pas, nous, à Genève, décider de cela. Une fois de plus, on doit... Le principe de base de la résolution était donc d'exercer le droit d'initiative cantonale et de demander que l'Assemblée fédérale fasse le nécessaire; c'est ce que voulaient à l'origine les auteurs. Entre-temps, ils ont déposé un amendement pour modifier cette demande. Je laisserai d'ailleurs un des auteurs le présenter, j'imagine que ce sera M. Barrillier; il m'en a parlé et je pense que c'est très sage de déposer cet amendement pour être plus efficace. C'est vrai qu'on envoie beaucoup trop de textes directement à Berne. Il est préférable de passer par le Conseil d'Etat afin qu'il intervienne de manière idoine, et c'est la technique choisie par le biais de cet amendement. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Je vous demande donc, au nom de la commission, de soutenir cette résolution ainsi que cet amendement qui est tout à fait cohérent. Il peut véritablement amener un plus pour tous les bénévoles de notre canton, parce que le message de cette résolution est essentiel: développons le bénévolat sportif, culturel, social...

Le président. Vous parlez sur votre temps de groupe.

M. François Baertschi. ...dans des tas de domaines. C'est un des éléments importants et je crois qu'il faut véritablement soutenir massivement cette résolution. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur. Monsieur Flury, c'est à vous pour deux minutes cinquante-deux.

M. Christian Flury. Déjà ? Je vous remercie, Monsieur le président. M. Barrillier avait demandé la parole avant moi, je crois.

Le président. En effet, et je vais donc la lui laisser, si vous le voulez bien.

M. Christian Flury. Par politesse, je laisse parler M. Barrillier.

Le président. Allez-y, Monsieur Barrillier.

M. Gabriel Barrillier (PLR). Merci, Monsieur le président. Merci, Monsieur Flury; ce sont les déposants qui passent normalement les premiers. Chers collègues, le rapporteur a effectivement résumé la situation. J'aimerais en premier lieu vous rappeler que l'article 211, alinéa 1, de notre constitution stipule que «l'Etat reconnaît et soutient le rôle des associations et du bénévolat dans la vie collective». Cette proposition de résolution est le fruit du travail des présidents, qui ont le privilège de faire le tour de certaines associations pendant leur année de présidence. Nous avons effectivement eu l'occasion de faire des rencontres diverses et d'assister à des assemblées, notamment de l'Association genevoise des sports. On a bien évidemment constaté que sans l'engagement bénévole et volontaire d'innombrables personnes - j'y reviendrai - il serait difficile, voire impossible, d'encadrer les 7000 membres des 42 sociétés de gym, les 17 000 licenciés, dont 10 000 juniors, jouant dans les 650 équipes amateur de foot réparties dans 65 clubs, et les autres milliers de sportifs pratiquant 65 sports différents dans 73 associations réunies précisément dans cette Association genevoise des sports. Je passe sous silence les 50 000 participants à la course de l'Escalade, qui ne pourrait avoir lieu sans cet encadrement de bénévoles.

Il est vrai que la commission fiscale, qui a examiné en long et en large la nature du bénévolat et du volontariat, a découvert que la frontière entre ces deux façons de servir la collectivité est floue. Les auditions ont clairement montré que la relève et l'encadrement des actions de bénévolat deviennent problématiques pour plusieurs motifs, dont sans doute le fait que si on touche quelque argent - ça arrive: une petite indemnité, un petit coup de pouce - le traitement fiscal de ce petit coup de pouce risque de ne pas être adéquat. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Chers collègues, la commission a constaté qu'on ne peut pas simplement envoyer une résolution à l'Assemblée fédérale pour modifier la LHID, parce qu'on n'a aucune chance d'atteindre notre but: les résolutions genevoises ne sont pas acceptées telles quelles, elles sont téméraires. C'est la raison pour laquelle nous vous proposons un amendement général qui charge le Conseil d'Etat de vérifier auprès de la conférence...

Le président. Il vous faut terminer, Monsieur.

M. Gabriel Barrillier. ...auprès de la conférence suisse des directeurs des finances s'il n'y a pas une possibilité de passer par ce biais pour améliorer la situation des bénévoles. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur. Juste une petite précision: quand il y a un rapport de commission, ce n'est pas forcément le proposant qui passe en premier. Monsieur Flury, c'est à vous.

M. Christian Flury (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, M. Barrillier a effectivement demandé la parole avant moi et c'est normal que celle-ci lui revienne avant de revenir à ma modeste personne. La vie associative sportive repose sur l'engagement quotidien des bénévoles. Il s'agit de personnes - qu'elles soient jeunes, qu'il s'agisse de parents ou d'amis - qui mettent du temps et des compétences au profit d'une activité. Notre canton compte environ 800 clubs sportifs regroupant 100 000 à 120 000 pratiquants encadrés par globalement 16 000 bénévoles. Aucun entraînement, aucune compétition ou fête de village ne peut se dérouler sans la présence de bénévoles, qu'ils soient moniteurs, entraîneurs, commissaires de course, arbitres ou samaritains; un ensemble de petites mains qui facilitent toutes ces activités.

En fonction des prestations offertes, ces bénévoles peuvent percevoir des défraiements, recevoir des bons de repas, ou même voir les frais de leur véhicule pris en charge pour les déplacements qu'ils effectuent au profit de l'activité bénévole. Or, au regard des lois fiscales, chaque franc reçu ou gagné doit être imposé. Il y a certes une liste, au niveau fédéral, des cas d'exonération admis; le bénévolat n'y figure malheureusement pas. Chaque grand fleuve est constitué de fines gouttes d'eau. En fonction de l'ampleur de son dévouement au sport ou à la population en général, les indemnités du bénévole peuvent parfois atteindre des montants non négligeables. Devoir tout déclarer à l'administration fiscale cantonale peut avoir des répercussions sur l'assiette financière du bénévole et de sa famille: d'une part ses impôts vont augmenter, ce qui est normal, mais il y a d'autre part le risque que l'assiette crève le plafond et empêche le bénévole de bénéficier d'allocations diverses. Au final, la perte d'allocations et l'augmentation des impôts pourraient lui coûter plus cher que ce que lui auront rapporté les quelques francs gagnés grâce aux activités de bénévole. Le Mouvement Citoyens Genevois partage les préoccupations des rédacteurs de cette résolution et soutient l'idée de défiscaliser les indemnités des bénévoles à hauteur du même montant que celui accordé aux pompiers volontaires. Nous soutiendrons l'amendement général et vous invitons, Mesdames et Messieurs, à voter en faveur de cette résolution. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Je crois que MM. Barrillier et Flury ont bien résumé la situation. En tant que président de ce Grand Conseil, j'ai été appelé, comme mes prédécesseurs, à faire des rencontres diverses ou à assister à des événements sportifs dans lesquels vous retrouvez systématiquement les mêmes bénévoles, qu'ils soient coachs, encadrants, entraîneurs ou simplement petites mains, comme cela a été dit. L'apport de ces bénévoles est absolument indispensable, et c'est pourquoi en premier lieu nous avons décidé de déposer cette résolution, que la commission fiscale a empoignée avec beaucoup de sérieux et d'application; je tiens à l'en remercier et à l'en féliciter. Je remercie également le rapporteur qui en a fait un résumé tout à fait complet et synthétique.

Mesdames et Messieurs, nous savons que peu de résolutions connaissent une issue favorable aux Chambres fédérales: seuls 1% ou 2% d'entre elles sont couronnées de succès. Cela laisse évidemment peu de chances à ce genre de démarche alors que la Confédération reproche souvent à Genève d'être le champion du dépôt de toutes sortes de résolutions. C'est pour cela que M. Barrillier et moi-même vous proposons cet amendement général qui vise à s'adresser plutôt à la conférence des directeurs des finances cantonaux. Il s'agit d'abord de faire un inventaire de ce qui existe déjà: certains cantons reconnaissent d'une façon ou d'une autre le travail effectué par les bénévoles, d'autres pas. En second lieu, il s'agit d'essayer de trouver des solutions ou des propositions. Si cette démarche devait aboutir au sein de la conférence des directeurs des finances cantonaux, ce serait une belle reconnaissance pour ces gens qui s'engagent, en soirée, week-end après week-end, pour organiser des activités en particulier dans les domaines sportif et sanitaire. Je vous remercie du bon accueil que vous allez réserver à ces deux textes, et vous informe que le groupe démocrate-chrétien bien évidemment les soutiendra.

M. Stéphane Florey (UDC). Si le besoin de volontariat et de bénévolat n'est plus à démontrer, je suis quand même déçu de l'amendement proposé aujourd'hui. Si c'était pour en arriver là, il aurait à mon avis peut-être mieux valu s'informer par une question écrite pour obtenir ce type d'information. La nouvelle invite proposée ne va absolument pas régler le problème des bénévoles, puisqu'ils continueront à toucher des défraiements qu'ils devront déclarer ! La conférence des directeurs cantonaux n'a aucune marge de manoeuvre concernant cette imposition. La reconnaissance, quoi qu'il arrive, les bénévoles l'ont déjà; ça, c'est établi. Mais fiscalement, ça ne va rien changer pour eux alors qu'on a entendu en commission que les personnes qui renoncent au bénévolat le font justement aussi à cause de cette imposition.

L'amendement que vous proposez n'y changera absolument rien, c'est pourquoi nous avons soutenu la résolution telle qu'elle a été présentée en commission. M. Barrillier propose finalement un amendement parce que son groupe, malheureusement pour lui, n'a pas soutenu la résolution. Alors je comprends qu'il faut, entre guillemets, «sauver la face», trouver des solutions. Mais, je suis désolé, cet amendement équivaut en fait à noyer le poisson, à cacher la poussière sous le tapis et à dire: «Oui, on a fait quelque chose !» Alors que finalement on ne fait rien du tout ! C'est pour ça que nous, nous continuerons à soutenir la résolution telle qu'issue des travaux de commission: elle apporte véritablement une solution de fond, même si Berne a effectivement plutôt tendance à s'asseoir sur les résolutions genevoises. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Mais le problème est réel, et ce n'est pas en amendant la résolution que vous trouverez une solution. C'est pourquoi nous refuserons l'amendement; nous tenons à ce qu'il y ait une vraie défiscalisation des défraiements...

Le président. Il vous faut conclure.

M. Stéphane Florey. ...une défiscalisation des défraiements des bénévoles, au même titre qu'elle existe pour les pompiers volontaires. Si l'amendement passe, nous nous abstiendrons sur la résolution, parce que c'est véritablement mettre la poussière sous le tapis et...

Le président. C'est terminé, merci, Monsieur.

M. Stéphane Florey. ...se délier d'un vrai problème. Je vous remercie.

M. Romain de Sainte Marie (S). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste salue l'amendement proposé par le PLR, qui fait preuve ici d'honnêteté intellectuelle, il faut le relever. Les travaux en commission ont en effet été particulièrement utiles. Les auditions, notamment d'entités ou d'associations sportives, d'associations qui connaissent un nombre de bénévoles important, ont permis de dégager une problématique qui n'est pas celle de la résolution initiale. La résolution initiale vise en effet à défiscaliser le revenu et à intervenir pour modifier la LHID, avec le peu de chances de succès que peut avoir une résolution envoyée à Berne - c'est vrai, on le sait. Je cite la page 36 du rapport: «Le commissaire PLR a entendu plusieurs auditionnés dire que ce n'est pas tellement la défiscalisation de revenus qui est importante pour eux, mais plutôt celle des frais.» C'est véritablement ce qui est ressorti des différentes auditions. L'amendement proposé ici permet de rediriger cette résolution, je dirais, vers une étude concertée avec les autres cantons afin de voir ce qui pourrait réellement être fait, de façon efficace, pour le bénéfice des bénévoles. Comme on a pu l'entendre à la commission fiscale, il s'agit en effet de pouvoir défiscaliser les frais plutôt que le revenu, tel que proposé ici. La défiscalisation des frais n'est pas une solution immédiate; elle peut être envisagée avec une concertation au niveau des directeurs cantonaux des finances. Par conséquent, le parti socialiste, qui était dubitatif concernant cet objet, votera l'amendement. Et si celui-ci est accepté, il votera la résolution.

Le président. Merci, Monsieur. M. Guinchard a la parole pour trente-deux secondes.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Merci, Monsieur le président, cela va suffire. Je voulais juste rappeler à M. de Sainte Marie - vous transmettrez - que l'amendement a été déposé par le PLR et le PDC. On a souvent tendance à oublier les petits, dans ce parlement. La deuxième chose: je signalerai au chef de groupe UDC, tout en respectant sa position, qu'il sous-estime nettement le pouvoir de ces conférences de directeurs - des finances, de la santé, du social et autres - qui travaillent et exercent un important lobbying à Berne. Je suis persuadé que par le biais de cette conférence, nous arriverons à une solution, pas dans l'immédiat, certainement, mais après quelques mois. Je vous remercie.

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat partage très largement les avis exprimés presque à l'unanimité dans cette enceinte concernant l'importance du bénévolat, de l'action de nombreuses personnes qui ne comptent pas leur temps au profit de nos associations sportives et culturelles. En effet, il y a véritablement un problème et plusieurs d'entre vous l'ont relevé; nous partageons largement ce constat.

S'agissant des résultats que l'on peut obtenir avec les résolutions auprès du Parlement fédéral, on sait qu'ils sont bien maigres - des tentatives dans ce domaine ont déjà eu lieu - et je pense que l'amendement qui a été déposé va dans le bon sens. Vous me savez souvent et très impliqué au sein de la conférence des directeurs des finances; je me ferai volontiers le vecteur, le porte-parole, de la volonté de ce parlement si vous votez cette résolution ainsi amendée. Je vous invite donc à le faire, vous pouvez compter sur moi pour essayer de relayer le message. Quant à savoir si cela sera suivi d'effets concrets, je ne peux pas vous le dire à ce stade, mais je ferai en tout cas le nécessaire. Merci.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons d'abord considérer la demande d'amendement général. Comme la résolution n'est plus adressée à l'Assemblée fédérale mais au Conseil d'Etat, les lignes suivantes sont supprimées:

«vu l'article 160, alinéa 1, de la Constitution fédérale, du 18 avril 1999;

vu l'article 115 de la loi fédérale sur l'Assemblée fédérale, du 13 décembre 2002;

vu l'article 156 de la loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève, du 13 septembre 1985,»

Voici donc le texte qui vous est soumis:

«Titre et préambule (nouvelle teneur)

pour la reconnaissance et l'encouragement du bénévolat, y compris par des aménagements fiscaux coordonnés entre les cantons

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

Invite (nouvelle teneur)

invite le Conseil d'Etat

à intervenir auprès de la Conférence des directeurs cantonaux des finances afin de vérifier quelles mesures les cantons ont déjà prises ou sont susceptibles de prendre - de concert et en coordination avec la Confédération - pour encourager et soutenir, y compris fiscalement, l'exercice du bénévolat dans des domaines comme par exemple les sports amateurs pour les jeunes et l'engagement dans des activités de protection sanitaire.»

Mis aux voix, cet amendement général est adopté par 82 oui contre 8 non.

Mise aux voix, la résolution 766 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 78 oui contre 3 non et 9 abstentions.

Résolution 766

PL 11779-A
Rapport de la commission de l'enseignement supérieur chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Emilie Flamand-Lew, Boris Calame, Jean-Michel Bugnion, Sarah Klopmann, Sophie Forster Carbonnier, Frédérique Perler, François Lefort, Yves de Matteis, Christian Frey modifiant la loi sur l'université (LU) (C 1 30) (Délais de recours raisonnables)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VI des 21 et 22 septembre 2017.
Rapport de majorité de M. Patrick Saudan (PLR)
Rapport de minorité de Mme Caroline Marti (S)
PL 11780-A
Rapport de la commission de l'enseignement supérieur chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Emilie Flamand-Lew, Boris Calame, Jean-Michel Bugnion, Sarah Klopmann, Sophie Forster Carbonnier, Frédérique Perler, Yves de Matteis, Christian Frey modifiant la loi sur la Haute école spécialisée de Suisse occidentale - Genève (LHES-SO-GE) (C 1 26) (Délais de recours raisonnables)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VI des 21 et 22 septembre 2017.
Rapport de majorité de M. Patrick Saudan (PLR)
Rapport de minorité de Mme Caroline Marti (S)

Premier débat

Le président. Nous abordons maintenant les PL 11779-A et 11780-A en catégorie II - quarante minutes - et je passe la parole à M. Saudan, rapporteur de majorité.

M. Patrick Saudan (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, les deux projets de lois qui vont nous occuper durant les prochaines minutes visent à modifier les procédures d'opposition aux décisions d'échec définitif des étudiants, tant à l'université qu'à la HES-SO. De qui parle-t-on ? Il s'agit d'étudiants qui ont échoué définitivement à leurs examens ou qui ont été convaincus de fraude durant une session d'examens. Il faut savoir qu'au niveau de l'université, par exemple, il y a environ 60 à 80 recours par an et que nous assistons à une judiciarisation accrue de ces recours, puisque nous constatons maintenant la présence d'un avocat dans 40% des cas.

Quelles sont les procédures ? Au niveau de l'université - je vais essayer d'être synthétique - il existe deux échelons. Un étudiant ayant reçu une décision d'échec définitif peut s'y opposer durant trente jours. Cette opposition est alors transmise à une commission de recours qui instruit le dossier. Lorsque le dossier est finalisé, la décision doit être rendue un mois plus tard et l'étudiant a de nouveau un mois pour recourir au deuxième échelon, c'est-à-dire la Chambre administrative, qui prend généralement six mois pour statuer. Il faut aussi savoir que ce recours à la Chambre administrative est payant - il coûte 400 F - et que généralement un recours sur dix est accepté.

Dans le cas de la HES-SO, il existe trois niveaux. Le premier, c'est évidemment l'école où étudie l'élève, qui doit statuer dans les deux mois - c'est dans la loi. Par la suite, l'étudiant peut recourir au niveau de la direction générale de la HES-SO, qui statue généralement en quatre mois et demi, et si l'étudiant persiste dans ses procédures de recours, il doit cette fois-ci s'adresser à une commission de recours intercantonale HES-SO - une procédure qui est également payante. Il faut enfin noter que l'effet suspensif existe dans le règlement de l'université mais qu'il n'est appliqué qu'exceptionnellement.

Ces deux projets de lois partent du principe que ces procédures sont beaucoup trop lentes et que si l'acceptation d'un recours intervenait trop tardivement, un étudiant pourrait être extrêmement pénalisé car il aurait perdu beaucoup de temps dans son cursus universitaire. Ces projets visent donc à amender tant l'article 43 de la loi sur l'université que l'article 22 de la loi sur la HES-SO en instaurant d'une part un effet suspensif automatique, à moins qu'un intérêt public prépondérant ne s'y oppose - on donne toujours comme exemple le passage en deuxième année de médecine, où les places sont strictement contingentées. Ils prévoient d'autre part que les autorités en charge du traitement des oppositions internes et des recours d'étudiants statuent dans les trois mois dès leur saisine - et non pas dès la fin de l'instruction.

Ces deux projets de lois ont donné lieu à des débats nourris et très intéressants au sein de la commission de l'enseignement supérieur. Nous avons eu droit à deux auditions de l'université - dont une du recteur - ainsi qu'à une audition de la direction générale de la HES-SO, du président de la commission judiciaire, du procureur général et d'un juge de la Chambre administrative, et le département s'est également renseigné auprès de toutes les universités suisses pour savoir quels étaient les us et coutumes dans notre pays. De toutes ces séances et ces travaux il est ressorti plusieurs éléments. Premièrement, la commission judiciaire avait préavisé favorablement à l'unanimité ces deux projets de lois, mais il faut mentionner - et c'est important... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...que ni l'université ni la HES-SO n'avaient été auditionnées par cette commission judiciaire qui donnait un préavis. Deuxièmement, lorsque l'université et la HES-SO ont été auditionnées, elles se sont opposées fermement à ces deux projets de lois, arguant que les prolongations de procédures étaient souvent dues à des demandes des étudiants qui avaient besoin de plus de temps pour réunir les pièces du dossier, que le fait de raccourcir les délais risquait d'amener à bâcler les procédures, ce qui pouvait être au détriment des étudiants, puisqu'il y aurait davantage de rejets au premier échelon...

Le président. Vous parlez sur le temps de votre groupe !

M. Patrick Saudan. Déjà ? ...et que l'effet suspensif serait extrêmement dommageable, avec probablement un risque d'augmentation des recours.

Nous nous sommes donc basés sur les travaux menés de concert avec le département - lequel a essayé de travailler à une solution qui soit au bénéfice des étudiants et qui ne soit pas au détriment des hautes écoles - en raccourcissant d'une part les délais au niveau interne à trois mois, plus un mois supplémentaire, en acceptant également un amendement de l'UDC permettant une inscription provisoire des étudiants tant que le recours n'a pas été statué, et surtout en supprimant l'effet suspensif automatique qui aurait été très dommageable pour les hautes écoles. La majorité de la commission vous demande donc, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter ces projets de lois tels qu'ils ont été amendés en commission. Merci.

Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, ces deux projets de lois visent à instaurer dans la loi deux principes fondamentaux: d'abord la réduction du délai de traitement des oppositions et des recours, afin que les décisions soient rendues dans un délai de trois mois, et ensuite - un élément tout aussi essentiel - l'introduction d'un effet suspensif de ces procédures pour permettre aux étudiants de poursuivre leur cursus dans l'attente de la décision et ainsi leur éviter de devoir interrompre leur cursus et de perdre six mois à un an. Ces projets de lois répondent à une situation qui actuellement n'est absolument pas satisfaisante, puisqu'il n'y a aucun délai de traitement inscrit dans la loi et qu'ainsi certaines procédures peuvent s'étendre sur des mois, voire des années. Plusieurs cas ont été portés à la connaissance de la commission de l'enseignement supérieur et ont très vivement ému une partie des commissaires.

Ce qu'on peut dire, c'est que ces cas de délais de traitement extrêmement longs qui dépassent les trois mois ne sont pas des cas isolés, mais semblent plutôt être la règle. En effet, la majorité de ces procédures dépassent ce délai de trois mois: à la HES-SO, notamment, le délai moyen a été calculé à cinq mois, alors qu'à la Chambre administrative il est de quatre à cinq mois. Et le résultat de ces délais qui s'allongent, c'est que les parcours de formation des étudiants sont suspendus ou interrompus, ils perdent parfois un semestre, voire une année, et certains, sachant qu'ils s'engagent sur une procédure de long terme, décident même de se réorienter, alors qu'ils auraient pu contester une décision et peut-être gagner leur recours.

Les travaux de la commission ont malheureusement, au sens de la minorité, mené à l'acceptation d'un amendement qui supprime cet effet suspensif, ce qui, à nos yeux, est extrêmement problématique. Il s'agissait en effet d'un élément central des projets de lois, puisque c'est justement ce dispositif qui permettait d'assurer la continuité du cursus de l'étudiant. C'est pour cette raison que, alors que la minorité que je représente était tout à fait favorable à ces projets de lois initiaux, nous avons décidé de nous y opposer et de faire un rapport de minorité, pour expliquer le problème du dépôt et de l'acceptation de cet amendement qui vide une partie de ces projets de lois de leur substance. C'est également pour ces motifs que nous avons décidé de déposer deux amendements visant à réintroduire cet effet suspensif des procédures. Je vous remercie et reprendrai la parole un peu plus tard dans le débat.

Mme Emilie Flamand-Lew (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, ces projets de lois ont été déposés par les Verts, rejoints par des signataires d'autres groupes, suite au constat d'un dysfonctionnement - ou en tout cas d'une lacune - dans le traitement des oppositions au sein des hautes écoles et de l'université, et en particulier au sein de cette dernière institution dont le règlement ne prévoit à ce jour aucun délai de traitement des oppositions et recours internes. Une partie des recours est traitée avec diligence, ce qui est souhaitable tant pour l'institution que pour l'étudiante ou l'étudiant concerné mais, comme l'a dit la rapporteure de minorité, dans certains cas - qui sont loin d'être isolés - cela dure des années, ce qui prétérite fortement les étudiants dans leur cursus, les laissant dans une incertitude parfois insoutenable. Dans certaines situations, dont les médias se sont d'ailleurs parfois fait l'écho, des personnes abandonnent leur cursus, en choisissent un autre ou se réorientent, puis se voient donner raison des années plus tard par la justice. C'est totalement ubuesque.

La commission de l'enseignement supérieur a amendé ces projets de lois, notamment en apportant un peu de souplesse aux délais proposés, ce qui nous semble parfaitement raisonnable. Toutefois, un élément fondamental a été biffé, à savoir l'effet suspensif. Or, rappelons-le, cet effet suspensif n'est pas une mesure visant à prolonger indûment le cursus des étudiants éliminés - qui, s'ils n'ont pas de chance de succès, n'ont aucune raison ni aucune motivation à vouloir prolonger leur cursus, puisqu'ils devront de toute façon l'interrompre dans le cas où leur opposition ou leur recours est rejeté au final - mais a bel et bien pour but de faire respecter les délais qui sont fixés à l'alinéa précédent. En effet, fixer un délai de traitement sans prévoir d'effet suspensif, c'est comme fixer des limitations de vitesse dans la LCR sans prévoir d'amendes pour ceux qui auraient envie de rouler plus vite ! Ça ne sert à rien, c'est purement déclaratoire, il faut donc ce bâton de l'effet suspensif pour encourager l'université et les HES à traiter effectivement les recours et les oppositions dans le délai qui leur est fixé par la loi.

Nous entrerons donc en matière sur ces projets de lois et soutiendrons évidemment les amendements déposés - nous les avons d'ailleurs cosignés - qui rejoignent sauf erreur un amendement proposé par l'UDC lors des débats en commission, dans la mesure où ils visent à réintroduire l'effet suspensif afin de donner plus de force au délai fixé pour le traitement des oppositions. Nous vous engageons à faire de même, pour le bien tant des étudiants et des étudiantes, qui ont le droit de voir leurs oppositions traitées dans un délai raisonnable, que des institutions, lesquelles n'ont aucun intérêt à voir traîner des procédures pendant des mois, voire des années. Cela prend également du temps au personnel enseignant et administratif de l'université et des HES qui doit suivre ces procédures, et personne n'a à y gagner à voir des procédures durer pendant des années. Nous vous engageons par conséquent à voter résolument ces projets de lois. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Christian Frey (S). La commission de l'enseignement supérieur a travaillé pas mal de temps sur cette question des délais et a effectivement constaté qu'il s'agissait d'un problème réel. Comme cela a déjà été mentionné, elle a pris connaissance de la situation de personnes présentes d'ailleurs dans la commission, d'étudiants de l'époque qui ont dû attendre des décisions pendant des années - non pas pendant des mois, mais pendant des années ! Nous nous référons bien sûr aussi au préavis de la commission judiciaire qui nous a été transmis par son président, M. Murat Julian Alder, lequel - je cite - disait que les étudiants n'ont pas à faire «les frais des problèmes organisationnels». C'est difficile, mais possible. Il trouvait d'ailleurs - je le cite de nouveau - que le délai de traitement de trois mois est «parfaitement raisonnable». Supprimer, comme ça a été fait dans le cadre des discussions de la commission, l'octroi de l'effet suspensif des procédures d'opposition vide selon nous les projets de lois de leur substance ou raison d'être. Voilà pourquoi nous avons déposé ces deux amendements, qui reprennent en fait la formulation d'origine de la démarche des Verts. Nous sommes conscients qu'en amenant de tels amendements, nous remettons d'une certaine manière en question plusieurs discussions qui ont eu lieu en commission, mais nous y tenons néanmoins car, encore une fois, il s'agit de ne pas vider ces deux projets de lois de leur substance. Je vous remercie.

M. Stéphane Florey (UDC). Tout d'abord, je salue l'initiative des signataires des amendements qui sont revenus à la raison en proposant de retourner au texte initial, ce que nous avions effectivement déjà suggéré en commission, comme ça a été souligné. En effet, le groupe UDC l'a toujours dit, nous soutenions les projets de lois originaux, et les amendements qui ont été acceptés - notamment sous la «pression», entre guillemets, de certains pro-universitaires, ce que je déplore largement ici - ont totalement vidé de leur substance ces projets de lois. Finalement, c'était un projet d'intention plutôt qu'une volonté de résoudre un réel problème qui a été dénoncé dans ces textes.

Le préavis de la commission judiciaire sur ces projets de lois ne faisait pas mention de quelconques amendements, et ce qui s'est passé - je tiens à le souligner ici - c'est que, lors de son audition, le rapporteur de cette commission a proposé, sur sa propre initiative, d'amender les textes pour les assouplir, etc., ce qui a longuement fait débat au sein de la commission de l'enseignement supérieur. Je soulignerai aussi - et c'est un peu dommage - que le représentant des Verts de l'époque a un peu «flingué», entre guillemets, les projets de lois de son groupe, ce que personnellement je trouve assez déplorable. C'est pour ces raisons que nous nous étions abstenus en commission et que nous voterons bien évidemment les deux amendements proposés, puisqu'ils visent à revenir à la version initiale. Et si malheureusement ces deux amendements sont refusés, nous continuerons à nous abstenir sur ces projets puisque, sans un retour à la version initiale, ils n'apportent pas grand-chose à la situation des étudiants. Je vous remercie.

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ces deux projets de lois ont effectivement été longuement examinés en commission; dix séances ont été consacrées à cette question, je pense donc qu'on a fait le tour du problème. L'université a été entendue, la HES-SO aussi, et nous avons également reçu M. Murat Julian Alder, président de la commission judiciaire à l'époque, pour qu'il commente son préavis, qui était d'ailleurs positif. Je crois donc qu'on en a fait le tour et qu'il n'y a pas de raison de renvoyer à nouveau ces deux projets de lois en commission; en ce qui nous concerne, en tout cas, nous nous y opposons.

Il est vrai qu'au moment des discussions en commission, le groupe MCG avait finalement été convaincu par les amendements, dont je ne dis pas qu'ils vidaient de leur sens ces projets de lois, mais quand même un peu, car ça restait plutôt au stade des intentions. Puis, après réflexion, on a décidé de changer d'avis et on votera donc les deux amendements qui ont été présentés - et que j'ai d'ailleurs signés - parce que je pense que la raison le commande. Il faut bien se rendre compte qu'il ne s'agit pas de centaines de cas, mais de quelques-uns, et qu'il n'y a pas de raison qu'un étudiant soit pénalisé et perde une année, voire plus, simplement parce que son recours n'est pas traité. A un moment donné, les cas doivent être traités, et je crois que ce délai de trois mois est tout à fait raisonnable et permet d'arriver à des solutions. Il faut donc que l'université et la HES-SO rendent leurs décisions dans ces délais. C'est possible, il n'y a pas besoin d'en faire tout un pataquès ! D'ailleurs, lors de cette discussion on a également auditionné le procureur général, qui nous a dit que si ça venait devant la justice, ça n'allait rien régler, parce que la justice va à la vitesse à laquelle elle va... On espère donc que cette mesure mettra justement un peu de pression sur ces deux institutions, une pression raisonnable, parce que la plupart du temps les cas ne sont pas si compliqués et peuvent être traités dans ces délais.

Par conséquent, suite à ce qui est sorti de la commission de l'enseignement supérieur, je pense qu'il est nécessaire d'amender ces projets, c'est la raison pour laquelle nous soutenons ces amendements. Ça mettra une pression suffisante sur ces deux institutions pour que désormais les décisions soient rendues dans des délais raisonnables. En effet, il y a eu quelques cas où les décisions ont tellement traîné qu'elles ont finalement pénalisé les étudiants; je crois que ce n'est pas admissible et qu'on peut faire mieux. Ici, c'est Genève, on peut le dire, et on doit être équitable. J'ai malheureusement repris sans le faire exprès une expression souvent utilisée par l'UDC, mais c'est vrai, on doit être équitable. Le MCG a fait une pesée d'intérêts: il votera ces projets avec les deux amendements et s'opposera à un éventuel renvoi en commission. Merci. (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît ! (Un instant s'écoule.) Merci. La parole est à M. Forni.

M. Jean-Luc Forni (PDC). Merci, Monsieur le président. Le groupe démocrate-chrétien ne changera pas d'avis et soutiendra ces projets tels qu'ils sont sortis de commission. En effet, tout le monde l'a mentionné ici, nous avons travaillé durant de nombreuses séances, nous avons entendu beaucoup d'avis, dont celui du procureur général et de la Chambre administrative, et je me souviens encore du petit sourire en coin du juge - ou du procureur général, je ne sais plus - lorsqu'il a dit: «Mesdames et Messieurs les commissaires, si vous voulez que la justice avance plus vite, eh bien je vous souhaite bonne chance, parce que nous avons des priorités et malheureusement, en fonction des impératifs que cela implique, il est clair que les recours d'étudiants ne sont pas forcément prioritaires dans notre ordre du jour.» Par conséquent, Mesdames et Messieurs, si un recours prend dix-huit mois - même si ce n'est vraiment pas la majorité des cas - on risque de se retrouver dans une situation absurde où un étudiant aurait été en échec définitif à son examen de bachelor mais aurait la possibilité de continuer son cursus et de réussir son master. Et dans ce cas-là, Mesdames et Messieurs, que fait-on ? Eh bien c'est justement à cause de ce genre de problématique qu'il a été décidé en commission - en tout cas dans un premier temps - de trouver une solution à mi-chemin, raisonnable. Les autorités universitaires, les responsables de l'université, le recteur et la direction des HES ont alors proposé une solution pragmatique prévoyant que les recours soient traités en trois mois, ce qui a semblé satisfaire toute la commission. Même le commissaire Vert s'était finalement rangé à l'opinion de la commission, avant de changer d'avis sous la pression de son groupe. Mais nous étions tous d'accord sur le fait qu'il s'agissait d'une solution pragmatique permettant de régler les cas les plus ardus dans un délai qui ne devait pas dépasser quatre mois. Maintenant, si on réintroduit ce problème de l'effet suspensif, ça signifie que tout le monde va systématiquement prendre un avocat et faire traîner la procédure, avec effectivement le risque que les recours traînent.

Mesdames et Messieurs, j'en appelle donc à la raison de ce parlement; il est clair qu'il y a eu des cas absolument inadmissibles, mais est-ce qu'il faut changer la loi et faire des règlements pour inscrire des procédures servant à traiter finalement quelques rares déficiences ? Nous ne le pensons pas; nous estimons que le compromis tel qu'il est sorti est un bon compromis et qu'il n'est pas nécessaire de rajouter cet effet suspensif. Nous nous opposerons dès lors à ces deux amendements concernant l'université et la HES-SO, et vous invitons à faire de même. Je vous remercie.

M. Alexis Barbey (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, il faut faire de ces textes des projets de lois de l'équilibre. Ils ont des fondements tout à fait compréhensibles, à savoir que les étudiants ont droit à ce que leur recours soit traité dans un délai raisonnable, mais ils ne doivent pas nuire au fonctionnement de l'université ou de la HES-SO. Le délai de traitement de trois mois sur lequel tout le monde est tombé d'accord est raisonnable et permet à l'étudiant de reprendre ses études lors de la session suivante si son recours a été jugé en sa faveur. L'effet suspensif, en revanche, est à la fois inutile, nuisible et impossible à appliquer. Il est inutile parce que si l'on respecte le délai de trois mois, l'étudiant aura le résultat de son recours dans un délai suffisant pour reprendre son cursus l'année suivante; il est nuisible parce qu'on peut imaginer que la cohabitation d'élèves promus et d'étudiants recourants est dommageable, en particulier dans des petites structures comme les classes des HES; enfin, il est impossible à appliquer parce que la Chambre administrative a d'ores et déjà prévenu que le délai de traitement serait de six à dix-huit mois pour ce genre de cas. En conséquence, Mesdames et Messieurs, pour retrouver l'équilibre dans ces projets de lois, le groupe PLR vous suggère d'accepter ces textes et de refuser les amendements déposés par le groupe socialiste. Je vous remercie.

Une voix. Bravo ! (Brouhaha.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Est-ce qu'on peut avoir un peu de silence, le groupe Ensemble à Gauche ? Merci. Je passe la parole à Mme Flamand-Lew pour une minute.

Mme Emilie Flamand-Lew (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais juste réagir brièvement à l'intervention de M. Forni, qui nous parle du procureur général, du pouvoir judiciaire, etc. Il faut voir que l'amendement relatif à l'effet suspensif ne concerne pas les délais de traitement au niveau du pouvoir judiciaire: il est dit que l'étudiante ou l'étudiant éliminé peut continuer sa formation au moins aussi longtemps que la procédure interne n'a pas donné lieu à une décision. Il est évident qu'après on ne peut pas fixer un délai de trois mois à la Cour de justice, par hypothèse, pour prendre une décision. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Il ne s'agit donc pas de cela. De plus, il y a une autre cautèle qui prévoit que cela se fasse «à moins qu'un intérêt public prépondérant ne s'y oppose». On peut ainsi imaginer que si 500 étudiants de première année de médecine forment des oppositions et que l'on n'arrive pas à les traiter, on ne permettra pas à ces 500 personnes de poursuivre leur cursus l'année suivante. Des cautèles sont donc prévues et on parle ici uniquement de la procédure interne, ce qui correspond à l'accord passé avec le recteur et le directeur de la HES-SO, qui peuvent aussi s'arranger pour s'activer un peu à l'interne et prendre des décisions plus rapidement sur les cas simples...

Le président. Il vous faut terminer, Madame la députée.

Mme Emilie Flamand-Lew. ...puisque les cas compliqués appelés à aller en justice ne seront, quant à eux, pas soumis à cet effet suspensif. Je vous remercie. (Brouhaha.)

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Sormanni pour une minute dix.

M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Vous transmettrez à M. Barbey que les scénarios qu'il imagine - cela vient d'ailleurs d'être corroboré par Mme Flamand-Lew - sont selon moi totalement irréalistes. Il n'y a pas 500 étudiants sur une volée qui vont faire recours et paralyser l'institution ! Il y a quelques recours, au pire, et je crois que ce n'est pas ça qui va gêner et empêcher les sessions de se tenir. Il faut donc aussi savoir raison garder. Et l'équilibre, ce n'est pas ce qu'il propose; ce sont plutôt les amendements ! Je le répète encore une fois, il faut permettre aux étudiants qui font recours d'avoir des réponses dans des délais raisonnables - et ces trois mois sont raisonnables - de façon à ne pas les empêcher de poursuivre leur cursus, le cas échéant. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Autrement, ils perdent une année, voire plus ! Je trouve que c'est terriblement dommageable, et je vous rappelle quand même que c'est le contribuable qui paie les frais de scolarité des étudiants ! Donc si on prolonge leurs études à l'envi, ça n'a pas de sens. Il faut trouver un équilibre, et je pense qu'il réside dans ces projets de lois avec les amendements, car ils permettent justement de faire en sorte que les choses se passent de manière raisonnable.

Le président. Il vous faut terminer, Monsieur le député.

M. Daniel Sormanni. C'est la raison pour laquelle je vous invite, Mesdames et Messieurs, à voter ces projets de lois ainsi que les amendements, et à ne pas renvoyer le tout en commission.

M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe Ensemble à Gauche a bien participé aux débats et observé les travaux, et c'est vrai que durant ces deux ans, on a quand même pas mal tourné en rond. Je reconnais que dix séances, cela peut paraître beaucoup - je donne raison à M. Sormanni sur ce point - mais en même temps, pour celles et ceux qui ont suivi ces débats intéressants et entendu tous les arguments, je crois qu'il serait raisonnable de renvoyer ces deux projets de lois à la commission de l'enseignement supérieur pour un réexamen... Je vois que le président actuel de la commission opine ! Ça semble tout à fait raisonnable, et le groupe Ensemble à Gauche demande donc le renvoi à la commission de l'enseignement supérieur. Merci.

Le président. Merci, Monsieur le député. Nous sommes donc saisis d'une demande de renvoi en commission de ces deux projets de lois. Je vais passer la parole aux rapporteurs, puis à Mme la conseillère d'Etat. Monsieur Saudan, c'est à vous.

M. Patrick Saudan (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je rebondis directement sur les propos de mon préopinant. C'est vrai que ces amendements introduisent une nouvelle notion, c'est-à-dire un effet suspensif pendant la période d'opposition interne, et je pense qu'il faut qu'on en étudie tous les détails. Je suis donc personnellement favorable à un renvoi à la commission de l'enseignement supérieur. Je vous remercie.

Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de minorité. Un mot pour inciter la commission de l'enseignement supérieur, si ces projets de lois lui sont renvoyés, à s'en emparer sans tarder et à les traiter très rapidement. Toutes les auditions ont été faites, on doit donc être en mesure de se prononcer extrêmement rapidement sur ces amendements. Je vous remercie.

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je trouve en effet plus raisonnable de renvoyer ces projets de lois en commission. Je crois du reste que la commission de l'enseignement supérieur a du temps actuellement et pourra les traiter rapidement. Cela étant dit, j'aimerais quand même attirer votre attention sur le fait que l'effet suspensif n'est pas anodin, ni pour l'université, ni surtout pour les HES. En effet, vous savez que les HES dispensent un enseignement qui est parfois très axé sur le terrain, avec de temps en temps un professeur pour un élève. A la Haute école de musique, par exemple, les élèves ont parfois un enseignant de musique pour eux seuls, pratiquement, ou du moins ils disposent d'un moment seuls avec lui. Par conséquent, déclencher l'effet suspensif et permettre à un étudiant de continuer un cursus, ce n'est pas anodin. Imaginons qu'on engage un enseignant et qu'ensuite il n'ait plus ses élèves... Il en va de même à l'université: dans tous les travaux de séminaire qui se font en petits groupes, cela peut vraiment avoir une incidence. Je souhaite donc que la commission puisse sereinement reprendre ce sujet, et si une majorité du parlement tient à l'effet suspensif, il est bien évident que le Conseil d'Etat s'y pliera, mais nous voulons être sûrs que juridiquement les choses soient faites dans les formes.

J'ajouterai un dernier élément pour ceux qui ne siègent pas à la commission de l'enseignement supérieur et qui peut-être écoutent ce débat sans connaître les détails du dossier: on parle bien uniquement des étudiantes et des étudiants qui ont été définitivement éliminés d'un cursus de formation. On ne parle pas d'étudiants qui ont raté par exemple un examen d'économie politique, au hasard, et qui font recours parce que - je cite une possibilité parmi d'autres - deux ou trois autres élèves étaient au-dessous de la moyenne et qu'ils ne pouvaient pas passer à l'année suivante, etc. Il s'agit vraiment d'étudiants qui sont définitivement éliminés de l'université ou des HES.

En conclusion, sans refaire des auditions, je pense qu'on peut rapidement en parler à la commission de l'enseignement supérieur. Je sais que je dois m'y rendre prochainement pour une audition, le sujet peut donc aussi être repris à cette occasion si la commission le souhaite. Je vous remercie de votre attention.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous allons maintenant voter en une fois sur le renvoi de ces deux projets de lois à la commission de l'enseignement supérieur.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur les projets de lois 11779 et 11780 à la commission de l'enseignement supérieur est adopté par 53 oui contre 33 non et 2 abstentions.

PL 11922-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat accordant une aide financière pour les années 2016 à 2019 à trois institutions du domaine des musées : a) la Fondation de droit public du Musée d'art moderne et contemporain - Fondamco b) la Fondation Martin Bodmer c) la Fondation du Musée international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XII des 26 et 27 janvier 2017.
Rapport de majorité de M. Olivier Cerutti (PDC)
Rapport de minorité de M. François Baertschi (MCG)

Premier débat

Le président. Mesdames et Messieurs, nous passons au PL 11922-A en catégorie II, quarante minutes. Je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Olivier Cerutti.

M. Olivier Cerutti (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, nous voici devant un projet de loi qui aurait pu passer aux extraits. La commission des finances l'a traité très rapidement, en une seule séance, le 7 décembre 2016. Il s'agit de trois institutions, dont une sur laquelle nous ne nous sommes pas mis d'accord, et c'est la raison pour laquelle nous en parlons ici ce soir.

Ces trois entités sont d'abord le musée de la Croix-Rouge, une belle institution genevoise, la Fondation Martin Bodmer, une autre belle institution, colognote celle-ci, et enfin la Fondamco, une fondation qui traite de l'art; or quand on traite de l'art, Mesdames et Messieurs, cela peut être très subjectif, l'objectivité n'est pas toujours de mise. Nous sommes cent dans cette salle ce soir, nous aurons tous un avis très différent - et j'en suis très heureux - sur l'esprit que peut dégager une oeuvre.

Le MAMCO est une magnifique plate-forme pour les artistes genevois, tout comme une magnifique vitrine pour la presse internationale qui cite souvent les oeuvres et artistes qui y sont présentés. C'est aussi une magnifique animation pour le quartier des Bains: les fameuses Nuits des Bains animent énormément de galeries externes au MAMCO, et je pense que cette synergie est très intéressante pour notre ville.

Monsieur le président, je m'arrêterai là et laisserai mon collègue nous expliquer ce que représente l'art pour le MCG. Ce parti revendique en effet une objectivité qui ne correspond pas forcément à la subjectivité à laquelle on pourrait se livrer dans le domaine de l'art.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Je vais continuer sur les belles paroles de mon préopinant, Olivier Cerutti. Nous ne contestons pas les deux remarquables fondations qui accompagnent le MAMCO; ce qui nous déplaît, c'est que l'on fasse un paquet ficelé de trois institutions qui, à notre sens, n'ont rien à voir les unes avec les autres, en tout cas s'agissant du MAMCO.

J'ai été très choqué par ce qui s'est passé lors du lancement de ce musée: on nous a dit que ça ne coûterait rien ou pas grand-chose et que des privés financeraient le tout. Au final, on s'est retrouvé avec une sorte de privatisation de biens publics, puisqu'une usine a été entièrement reprise pour le compte de cette institution qui, d'une certaine manière, est quand même discutable.

Certes, on peut penser ce que l'on veut de l'art contemporain - quant à moi, je n'ai aucune prétention d'objectivité - mais quand il s'agit d'argent public, ce n'est pas la même chose. Certains choix sont faits qui sont politiques, et accepter tout et n'importe quoi n'est absolument pas admissible. Cette honorable structure consacre une vision de l'art contestable, ne serait-ce que les oeuvres de Manzoni qui y ont été présentées - je ne vais pas faire de description, parce que c'est peu ragoûtant à cette heure, mais je conseille à chacun d'aller se renseigner dans une encyclopédie ou via toute autre source d'information.

D'un autre côté, c'est la dynamique actuelle, comme le disait l'ancien directeur du musée Picasso de Paris, Jean Clair, qui s'est exprimé à propos des dérives de l'art dans un livre intitulé «De immundo»: «Le temps du dégoût a remplacé l'âge du goût.» Certains apprécient sans doute, mais ma question est la suivante: jusqu'où descendra-t-on ? Et doit-on vraiment financer cela avec de l'argent public ?

Si de riches mécènes sont prêts à financer ce type d'oeuvres, libre à eux de dépenser leur argent ainsi, mais, à notre sens, ce n'est pas le rôle de l'Etat de subventionner ce genre d'institution, ce d'autant plus que le Musée d'art et d'histoire peut tout à fait accueillir des collections d'art contemporain, comme il l'a déjà fait.

Le MAMCO est une institution superfétatoire qui fait oeuvre de déconstruction de l'art, de négation de notre civilisation, et je me vois mal soutenir ce type d'action. C'est pour cela que la minorité vous propose, Mesdames et Messieurs, de refuser ce projet de loi.

M. Henry Rappaz (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, pour commencer et faire bref, je ne vous dirai pas de mal de l'art contemporain, loin de là, car il est bien connu que celui qui ose émettre des doutes quant à sa beauté et à son intérêt passe immédiatement pour un idiot, voire un inculte. Audiard disait à juste titre qu'on reconnaît les cons parce qu'ils osent tout, et là, vous avez fait très fort. Quand je m'aperçois, dans ce PL 11922-A, que la Fondamco s'immisce en tête des demandeurs devant la célèbre Fondation Martin Bodmer ou celle du Musée international de la Croix-Rouge, je me dis qu'il fallait vraiment oser !

Le MAMCO, qui dispose d'une surface d'exposition de 3500 mètres carrés, est bien trop élitaire et peu rempli au mètre carré, si ce n'est plusieurs fois par an par un vaste public avide de cocktails dînatoires. La Fondamco sollicite une aide financière annuelle de 1 344 375 F pour les années 2018 et 2019, alors que la brillante Fondation Martin Bodmer doit se contenter d'une subvention de 665 000 F pour les mêmes années et que celle du Musée international de la Croix-Rouge, plus économe mais non moins performante, percevra une aide beaucoup moins importante.

Pour de nombreuses autres raisons qui me tiennent à coeur, le Mouvement Citoyens Genevois s'abstiendra de donner sa voix au MAMCO.

M. Edouard Cuendet (PLR). Quand j'entends certaines des précédentes descriptions de l'art contemporain, je me sens tout à coup très modéré, parce qu'on n'est pas loin des notions d'art dégénéré qui rappellent de mauvais souvenirs ! Le PL 11922-A concerne trois institutions phares du paysage muséal genevois dans des domaines très différents: d'abord le MAMCO, qui constitue une référence internationale dans le domaine de l'art contemporain. N'en déplaise à MM. Baertschi et Rappaz - vous transmettrez, Monsieur le président - il y a eu là-bas des expositions d'artistes extrêmement reconnus, comme John Armleder, Sylvie Fleury ou encore le Zurichois Thomas Huber. Ce musée met en avant des artistes suisses, ce qui devrait plaire au MCG, et est internationalement reconnu, couvert par des publications. Des expositions décentralisées dans plusieurs communes ont également été organisées, qui ont rencontré un vif succès.

Viennent ensuite la Fondation Martin Bodmer, qu'on n'a pas besoin de présenter puisqu'elle fait partie du patrimoine mondial de l'UNESCO et bénéficie d'un rayonnement international majeur, puis le Musée international de la Croix-Rouge, qui est lié à ce qui constitue l'ADN de la Genève internationale. En effet, cette organisation a été l'une des premières créées à Genève et a lancé le mouvement de l'esprit de Genève.

Si ces trois entités sont actives dans des domaines très différents, elles ont en revanche un point commun: elles sont nées de l'engagement massif de mécènes privés qui ont permis leur réalisation. Pour répondre aux arguments avancés par le MCG, les mécènes en question sont toujours extrêmement engagés au sein de ces institutions - ce n'est malheureusement pas le cas dans certains projets qu'on a eu à traiter ici récemment - c'est-à-dire qu'ils participent non seulement à l'enrichissement des collections - je pense notamment au MAMCO ou à la Fondation Bodmer - mais aussi aux frais de fonctionnement. Le MAMCO, par exemple, est régi par une convention tripartite avec un fonctionnement assumé à la fois par la Ville, le canton et les mécènes. Pour eux, ce n'est pas uniquement un investissement, ce qui pose parfois problème, ils sont aussi impliqués dans le fonctionnement, ce que je tiens à saluer.

Chacune dans leur domaine, ces trois fondations contribuent énormément au rayonnement international de Genève. Leur grande caractéristique, c'est qu'elles sont très peu politisées et sont gérées de manière sereine, ce qui n'est pas le cas du Grand Théâtre, comme on a pu le voir, qui est devenu un enjeu politique. Ici, tout se fait dans le calme et la sérénité, et participe au rayonnement muséal de notre canton. C'est la raison pour laquelle le groupe PLR soutiendra ce projet de loi avec détermination. Je vous remercie.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. Roger Deneys (S). Ce n'est pas mal que vous me donniez la parole maintenant, Monsieur le président, parce qu'il me faut saluer l'approche des élections qui fait redécouvrir aux députés PLR les vertus des structures culturelles genevoises... (Protestations.) ...sans qu'ils proposent de réduire la durée des contrats de prestations ou le montant des subventions de quelques dizaines ou centaines de milliers de francs !

Je salue ce progrès, parce que, comme l'a relevé M. Cuendet, président de la commission des finances, ces institutions contribuent massivement au rayonnement de Genève, tant au niveau touristique qu'international. Une ville comme Genève, qui a vocation à accueillir des activités internationales, que ce soient des entreprises ou des organisations non gouvernementales, se doit de présenter une offre culturelle de pointe, laquelle est possible parce que des mécènes s'engagent pour financer notamment l'acquisition des oeuvres.

Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi concerne trois institutions à subventionner, on l'a évoqué. J'étais un peu perplexe en lisant le rapport de minorité de M. Baertschi, parce qu'il n'y figure aucun amendement. Je me suis dit qu'en s'opposant à ce projet de loi, ce que signifie généralement un rapport de minorité, on saborde non seulement le MAMCO, mais encore deux autres institutions, puisqu'il concerne aussi la Fondation Bodmer et le Musée international de la Croix-Rouge. Cela signifie, Mesdames et Messieurs les députés, que le MCG veut saborder trois institutions genevoises majeures au prétexte d'un désaccord dans le goût ou l'appréciation - qui sont bien relatifs, d'ailleurs. C'est ça, le vrai problème ! Si vous consultez le rapport de minorité à sa page 53, on y trouve une phrase que je trouve absolument édifiante: «Doit-on financer la déconstruction de l'art, sa négation et ses expressions les plus vulgaires ? Des commissaires s'y refusent.»

Il y a quelques jours, on a eu droit à des publicités parfaitement abominables de la part du MCG, qui sont certainement bien plus vulgaires que tout ce qu'on peut exposer dans tous les musées du monde, parce qu'il s'agit d'attaques indécentes contre la dignité humaine. Le problème, c'est que les politiciens ne doivent pas se mêler du contenu culturel des musées ! Même M. Cuendet l'a reconnu tout à l'heure: ce n'est pas le rôle du monde politique, et je pense qu'il faut en prendre acte. Dans une démocratie, nous devons offrir des conditions-cadres pour qu'une expression culturelle variée puisse exister, et puis nous devons faire en sorte que les deniers publics ne soient pas dilapidés. La diversité culturelle constitue une richesse, un bien précieux; imposer des règles en définissant ce qui est bien, ce qui est mal, ce qu'on veut financer ou non, c'est tout simplement dramatique, c'est la dérive vers les régimes dictatoriaux.

Mesdames et Messieurs les députés, nous ne pouvons pas accepter ce genre de propos dans un rapport de minorité ! On peut apprécier ou non l'art contemporain, mais une chose est sûre: on n'est pas obligé d'aller dans ces musées si on n'aime pas les oeuvres qui y sont exposées ! La démocratie vit de la diversité, Mesdames et Messieurs, et nous devons l'encourager. C'est pour cela que je vous invite à voter ce projet de loi le plus majoritairement possible. (Applaudissements.)

M. Marc Falquet (UDC). M. Cerutti disait que chacun a sa propre définition de l'art, mais c'est tout à fait faux, parce que l'art doit respecter certaines conditions d'harmonie, de proportions, de beauté... (Remarque de Mme Salika Wenger.) L'artiste ne travaille pas pour développer son ego, il doit essayer de transcender quelque chose, de livrer un message.

Aujourd'hui, le musée d'art moderne, c'est quoi ? Rien du tout ! Le véritable art possède une âme; l'art moderne - ou ce qui est considéré comme art - n'a plus d'âme, donc on abaisse l'être humain au niveau le plus bestial... (Remarque de Mme Salika Wenger.) Ce n'est plus de l'art, on ne devrait même pas évoquer ce terme... (Commentaires.)

Le président. S'il vous plaît, laissez parler M. Falquet !

M. Marc Falquet. Laissez-moi finir ! Si vous voulez voir une magnifique oeuvre, Mesdames et Messieurs, je vous conseille d'aller dans la commune de Collonge-Bellerive admirer le giratoire des Tattes: il nous a coûté près de 300 000 balles et c'est le carrefour le plus moche du canton !

Alors oui, il faut développer le véritable art, qui correspond à une âme. Mais le MAMCO n'a plus ça, et donc c'est se moquer de la population. Si des mécènes ont cet état d'esprit, qu'ils financent un tel musée, mais ce n'est pas aux contribuables de payer pour la médiocrité. Si vous montriez ces oeuvres aux gens, 90% d'entre eux seraient d'accord avec le rapport de M. Baertschi. C'est n'importe quoi ! Nous voterons contre le financement du MAMCO qui devrait être supprimé par un amendement. Merci beaucoup.

Une voix. Bravo !

Mme Salika Wenger (EAG). Chers collègues, je remarque qu'en général, ceux qui s'opposent à l'art contemporain sont ceux qui ont le moins de culture. Là, par exemple, et c'est typique des membres du groupe MCG, lorsque l'on parle de culture, ils parlent d'argent. Ce n'est pas que l'argent les intéresse, mais ignorants comme ils sont, c'est une forme de censure ! (Exclamations.) C'est pour eux une forme de censure, car il leur est difficile d'admettre qu'ils n'y comprennent rien, qu'ils font même la confusion entre art moderne et art contemporain, alors que ce sont deux périodes différentes de l'histoire de l'art. Comme ils ne savent pas tout ça, qu'ils ne s'y intéressent probablement pas, ils vont d'une part chercher des citations bidon dans les dictionnaires, d'autre part ne mettent jamais les pieds dans les musées, ni dans les uns, ni dans les autres...

Des voix. C'est faux !

Mme Salika Wenger.  Ça ne les intéresse pas !

Des voix. C'est pas vrai !

Mme Salika Wenger. La culture ne les intéresse jamais, et chaque fois que nous avons tenté de voter des budgets pour la culture, le MCG s'y est toujours opposé, ce n'est tout de même pas un hasard ! Qu'il existe des personnes ignorantes, ça ne me dérange pas, parce qu'on peut toujours apprendre, mais que cela serve de prétexte à empêcher le reste de la population d'avoir accès à la culture, d'exprimer son goût, voire sa passion, non !

Pour ma part, j'ai connu les débuts du musée d'art contemporain et j'ai connu aussi certains de ses mécènes, qui ne font certainement pas partie de mon groupe politique; néanmoins, le plaisir que j'ai eu à rencontrer ces gens, à les voir donner de leur personne, espérer qu'un musée de cette sorte existe, la force qu'ils y ont mise, l'investissement qu'ils y ont consacré me semblent déjà une raison suffisante pour respecter l'existence de cette institution. (Brouhaha.)

De plus, ne pas aimer l'art contemporain ne constitue pas une raison pour empêcher la Fondation Bodmer ou le musée de la Croix-Rouge d'exister. Celui-ci, comme par hasard, fait souvent des expositions qui sont davantage de l'art contemporain que de l'art grec, comme en parlait monsieur... Je ne sais plus comment il s'appelle !

Une voix. Falquet !

Mme Salika Wenger. ...en nous disant qu'il y a des règles dans l'art que l'on doit respecter. Je ne pense pas qu'il ait les qualités requises pour définir ces règles. Que l'on aime ou pas l'art contemporain n'est pas une raison pour dire qu'on ne peut pas... Moi, par exemple, j'aime l'art contemporain, j'adore ça, je trouve que c'est une expression riche, diverse, souvent amusante, étonnante. J'apprends en permanence, j'apprends de tout, j'apprends de l'humanité, j'apprends de plein de choses; et je devrais me priver du plaisir de cet art parce que vous ne l'aimez pas ? (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Et je ne suis pas la seule, donc... (Remarque de Mme Magali Orsini.) De grâce, Madame... Comment s'appelle-t-elle, déjà ? Madame Orsini ! De grâce, taisez-vous ! Vous m'ennuyez à mourir ! (L'oratrice rit. Commentaires.) Je disais donc que je ne veux pas me priver et je ne veux pas priver les gens qui, comme moi, ont fait des efforts...

Le président. Il vous faut conclure, Madame.

Mme Salika Wenger. ...qui, comme moi, se sont battus pour ce musée, je ne veux priver personne de la possibilité de le découvrir...

Le président. Merci, Madame.

Mme Salika Wenger. ...du plaisir de découvrir la richesse de l'art contemporain.

Le président. C'est terminé !

Mme Salika Wenger. Je vous invite tous à voter la subvention ! (Applaudissements. Brouhaha.)

Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît ! Il reste dix minutes, essayons de les passer dans le calme, merci. Madame Engelberts, c'est à vous.

Mme Marie-Thérèse Engelberts (HP). Merci, Monsieur le président. Si j'étais ironique, je dirais qu'on vient d'avoir un très beau happening, qui aurait pu se dérouler sur la place Neuve ou celle du Marché. C'est triste, quand on parle de culture, de s'invectiver ainsi, de dire qu'il y a d'un côté les imbéciles, de l'autre ceux qui savent. Ce jugement de valeur sur des personnes - et, encore plus ridicule, sur un groupe - c'est exactement le contraire de la culture au sens général. Quelle est votre connaissance, Madame, des gens en face de vous ? C'est n'importe quoi ! C'est n'importe quoi d'accuser individuellement les gens comme ça, c'est non culturel ! Va au musée qui en a envie, parce que la culture, c'est la liberté.

Je reviens au projet de loi et j'aimerais dire la chose suivante aux membres de la commission des finances: faites preuve d'un peu d'humilité, tout de même ! Vous n'êtes des spécialistes ni de la culture ancienne... Monsieur Baertschi, je vous parle ! ...ni de celle d'aujourd'hui, et personne ici n'est habilité à définir des critères, si ce n'est des critères personnels liés à des connaissances, des critères émotionnels en relation avec sa propre histoire, et éventuellement des critères intellectuels... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...parce qu'on a appris dans les livres à conceptualiser un certain nombre de choses.

Mesdames et Messieurs - mais surtout Messieurs - de la commission des finances, l'humilité est liée à l'exigence; votre travail n'est pas de dire que Ferdinand Hodler, c'est super, que Maillol, c'est génial et que Giacometti, ça ne vaut rien parce que ses personnages sont tout maigres. Juste pour terminer...

Le président. Oui, il vous faut conclure.

Mme Marie-Thérèse Engelberts. ...la mère de Giacometti a dit une chose très belle à son fils. A une époque, il confectionnait de toutes petites sculptures qu'il mettait dans des boîtes d'allumettes; un jour, par arrogance ou parce qu'il était fâché...

Le président. C'est terminé, Madame...

Mme Marie-Thérèse Engelberts. ...il a tout détruit, et sa mère lui a dit: «Mon fils, rappelle-toi que l'humilité, c'est le début de l'art.»

Une voix. Bravo !

M. Bertrand Buchs (PDC). Pour ma part, j'attends uniquement de la commission des finances qu'elle me dise, s'agissant d'un organisme, si les comptes sont bien tenus, si la gestion est bonne. J'attends de la commission des finances qu'elle examine les chiffres, qu'elle juge si l'argent public est bien utilisé, voilà tout. Le reste n'est pas de sa compétence, elle n'a pas à nous dire quel est le meilleur art, c'est à chaque personne de décider.

Vous savez, l'art contemporain a toujours été considéré comme de l'art dégénéré par la plupart des gens, il a toujours été refusé parce qu'il ne correspond pas aux canons. Laissez les artistes faire ce qu'ils ont à faire ! La commission des finances doit se montrer beaucoup plus humble. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur. La parole est à M. Flury pour deux minutes.

M. Christian Flury (MCG). Merci, Monsieur le président. Je serai bref afin de laisser un peu de temps à mon ami Baertschi. Oui, chers amis des bancs d'en face, le MCG est en faveur de la culture, mais d'une certaine culture. Nous apprécions les belles collections de beaux musées de Suisse, nous sommes d'accord de soutenir la Fondation Bodmer qui possède des collections remarquables, nous soutenons le musée de la Croix-Rouge qui est un merveilleux musée. En revanche, j'ai eu l'occasion de visiter le MAMCO, eh bien je suis désolé, mais je ne suis pas encore prêt pour ce type de culture, et j'estime - nous estimons ! - que prendre l'argent des contribuables genevois, qui doivent se serrer la ceinture, pour le foutre dans ce ramassis là-bas, c'est prendre les gens pour ce qu'ils ne sont pas, et il faut refuser ça. Je vous remercie beaucoup.

Une voix. Bravo !

Une autre voix. Très bien !

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député, et passe la parole au rapporteur de minorité, M. Baertschi, pour une minute quarante.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Oui, Monsieur le président, merci. J'ai déposé un amendement visant à supprimer les aides financières au MAMCO uniquement, en gardant celles pour la Fondation Bodmer et le Musée international de la Croix-Rouge. Il s'agit donc d'abroger l'article 2, alinéa 1, lettre a.

Par ailleurs, j'aimerais répondre au député Deneys qui a dit que ce n'est pas le rôle des politiques de s'occuper d'art; je vais tout à fait dans sa direction ! Ainsi, il suffit d'enlever le financement au MAMCO, et la politique ne s'occupera plus d'art ou d'art contemporain, et on demandera aux riches banquiers du PLR de financer ce musée qu'ils avaient lancé, si je me souviens bien. Quant à Salika Wenger, je n'ai qu'une chose à lui répondre - vous transmettrez, Monsieur le président: la culture, moins on en a, plus on l'étale. (Rire de Mme Salika Wenger.)

Le président. Merci. Monsieur Cerutti, c'est à vous pour trois minutes.

M. Olivier Cerutti (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je suis finalement heureux de ce débat, parce qu'il y a de la passion, et je pense que la passion est quelque chose de très important, c'est l'un des moteurs dans la vie.

S'agissant du MAMCO, j'aimerais rappeler qu'il s'agit de l'un des musées les plus visités par nos enfants, par les écoles. Il a un rôle pédagogique important en permettant à nos enfants d'oser la créativité. Qu'est-ce que la créativité, au final ? Le geste qui sublime l'âme, pour M. Falquet, le geste créateur. On a besoin tous les jours de créativité, et ça commence peut-être par un monde plus éphémère.

La dernière chose que j'aimerais indiquer, Mesdames et Messieurs, en vous demandant de voter ce projet de loi, c'est que le rôle de l'Etat, du politique, c'est aussi de permettre la diversité. Pourquoi la diversité ? Nous sommes tous différents, nous avons tous une vision des choses différente, comme on a pu le voir ce soir au travers de ce passionnant débat, donc je crois que c'est notre rôle de permettre la diversité culturelle. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur. La parole n'étant plus demandée, nous allons d'abord voter sur l'entrée en matière de ce projet de loi... (Remarque.) Oui, Madame Emery-Torracinta ? (Remarque.) Ce n'est pas grave, allez-y.

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. J'avais oublié de demander la parole, Monsieur le président, mais je serai très rapide. Je souhaite d'abord remercier la majorité de ce parlement de voter ce projet de loi. Les trois fondations que nous vous présentons ici, cela a été dit par plusieurs d'entre vous et notamment par M. Cuendet, avec qui je suis pour une fois totalement - ou presque totalement - d'accord... (Exclamations. Applaudissements.) ...sont trois institutions qui participent au rayonnement de Genève, et c'est d'ailleurs bien pour cela que dans le cadre de la répartition des tâches, le canton a décidé, en accord avec la Ville de Genève, de les garder sous sa houlette, même si celle-ci gère encore une partie du MAMCO.

Ensuite, Mesdames et Messieurs, je ne vais pas refaire le débat, mais je dois vous dire que je suis profondément choquée par certains mots que j'ai entendus ce soir. Quand on dit que l'art contemporain est la négation de notre civilisation, je suis choquée, quand on parle de bestialité, je suis choquée, parce que ce qui détermine la différence entre un homme et un animal, c'est la capacité à créer, c'est notamment l'art, et c'est justement ce qui fait la richesse de notre humanité.

Mesdames et Messieurs les députés, on peut apprécier ou non telle ou telle forme d'art, cela fait partie de nos goûts personnels. Pour ma part, je visite régulièrement le MAMCO, et il y a certaines pièces que j'aime et d'autres que je n'aime pas, mais jamais, au grand jamais il ne me viendrait à l'idée de nier le fait qu'elles expriment quelque chose pour l'artiste. Je crois, Messieurs les députés qui avez prononcé ces mots, que vous devriez réfléchir à ce qu'ils signifient.

Comme l'a très bien dit M. Cuendet, les époques de l'histoire où l'on a parlé d'art dégénéré nous font froid dans le dos. Je vous invite donc, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser cet amendement et à adopter le projet de loi tel que sorti de commission. Merci. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Madame la conseillère d'Etat, et mets aux voix l'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 11922 est adopté en premier débat par 62 oui contre 23 non et 1 abstention.

Deuxième débat

Le président. Mesdames et Messieurs, nous sommes saisis d'un amendement de M. Baertschi portant sur le titre. Il s'agit d'y supprimer la mention de la Fondamco. Je lance la procédure de vote.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 62 non contre 23 oui et 1 abstention.

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'art. 1.

Le président. Puisque le titre n'a pas été modifié, Monsieur Baertschi, votre amendement à l'article 2, alinéa 1, lettre a, visant à écarter la Fondamco des institutions bénéficiant d'une aide financière, n'est plus valable.

Mis aux voix, l'art. 2 est adopté, de même que les art. 3 à 10.

Troisième débat

Mise aux voix, la loi 11922 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 61 oui contre 18 non et 5 abstentions.

Loi 11922

Le président. Mesdames et Messieurs, je vous souhaite un bon retour chez vous et une excellente fin de semaine. Merci pour votre travail !

La séance est levée à 19h45.