République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 11695-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant les limites de zones sur le territoire des communes de Choulex et Puplinge (création d'une zone des bois et forêts, d'une zone de développement 4A affectée à de l'équipement public, d'une zone de développement 4A affectée à de l'équipement public sans infrastructure et d'une zone de développement 4A affectée à de l'équipement public destinée à un parking de surface) situées entre le chemin de Champ-Dollon et le chemin de Favra (Brenaz II)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 25 et 26 février 2016.
Rapport de majorité de Mme Geneviève Arnold (PDC)
Rapport de première minorité de M. Francisco Valentin (MCG)
Rapport de deuxième minorité de Mme Caroline Marti (S)
Rapport de troisième minorité de Mme Christina Meissner (UDC)

Premier débat

Le président. Mesdames et Messieurs, nous examinons à présent le PL 11695-A. Nous sommes en catégorie II, quarante minutes, et je cède la parole à la rapporteure de majorité, Mme Geneviève Arnold.

Mme Geneviève Arnold (PDC), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, voici un projet de loi qui dérange, qui agace, qui fâche, et qui va sans doute entraîner de nombreuses prises de parole puisque le dossier remis aux mains de la commission d'aménagement relève du fait accompli. En effet, l'établissement pénitentiaire de la Brenaz et son parking ont été construits sans respecter la procédure; mais, ne l'oublions pas, ils ont été inaugurés - en octobre 2015 déjà pour la prison - opérationnels et utiles. Bien que nous, députés, devions nous prononcer aujourd'hui sur ce projet de loi de déclassement, il s'agit de se souvenir que ce même Grand Conseil a voté le financement du projet et qu'il était au courant de la dérogation au régime existant en zone agricole - chronologie certes totalement inversée et état de fait que nous déplorons, mais que la députation a quelque part cautionné.

Je vais relever ici quelques éléments factuels indispensables: la commission d'aménagement a travaillé sur ce projet de loi durant sept séances, au cours desquelles quatre conseillers d'Etat ont été auditionnés, dont deux ayant repris le dossier après réalisation des travaux. Les magistrats des communes concernées ont été reçus en commission, tout comme les représentants d'associations de quartiers, d'AgriGenève et de sociétés d'agriculture. Le périmètre concerné d'environ 40 000 mètres carrés se trouve en zone agricole et en zone des bois et forêts pour 7000 mètres carrés, au nord de la prison de Champ-Dollon, à cheval sur les communes de Choulex et Puplinge.

S'inscrivant dans la planification de la détention 2012-2022 visant à garantir la sécurité publique, le projet concerne l'établissement pénitentiaire de la Brenaz - inauguré, je l'ai dit, en 2015 - consacré à la détention administrative. Une demande d'autorisation de construire a été déposée en avril 2013, et le Grand Conseil a adopté le projet de loi le 8 novembre 2013 pour une entrée en force le 7 janvier 2014. Les travaux ont eu lieu de mars 2014 à septembre 2015 - précisons que le défrichement de la forêt s'est fait avec l'autorisation de l'Office fédéral de l'environnement.

Ce projet fait partie intégrante du plan directeur cantonal. Les plans directeurs des communes concernées - Choulex et Puplinge - prévoient la protection de la Seymaz dans le cadre de sa revitalisation, ainsi que les modalités d'extension du centre de détention. La situation est donc intégrée, la modification des limites de zones permettra de mettre en conformité une situation acquise, tant au niveau du parking de la Brenaz que de la zone des forêts.

Au niveau de la procédure, la commune de Choulex, par le biais de son Conseil municipal, a préavisé favorablement le projet le 15 février 2015, alors que celle de Puplinge s'est positionnée négativement. Suite à son audition par le Conseil d'Etat, il a toutefois été convenu de poursuivre la procédure.

Le président. Il vous reste trente secondes.

Mme Geneviève Arnold. Les contacts avec les agriculteurs concernés ont abouti à des arrangements concertés, les oppositions ont été traitées, et un plan d'aménagement paysager compensatoire a été réalisé en 2014. Lors de la présentation du projet par le département, la commission a pris conscience que les bâtiments étaient construits sur un terrain demandant à être déclassé, qu'un parking était aménagé sur la zone agricole et que la forêt avait déjà été défrichée. Le Conseil d'Etat a justifié cet état de fait par l'urgence du démarrage des constructions et les enjeux importants...

Le président. Vous prenez sur le temps de votre groupe, Madame !

Mme Geneviève Arnold. ...en matière de sécurité.

M. Francisco Valentin (MCG), rapporteur de première minorité. Nous voilà effectivement devant le fait accompli, devant une singularité, dirons-nous, du Conseil d'Etat presque in corpore. Si ce déclassement de zone agricole était prévu de longue date, le parking n'a en revanche jamais figuré sur aucun plan, il n'a jamais été mentionné nulle part. Or d'un seul coup, nous voilà devant le fait accompli, devant un magnifique parking - si j'ose dire ça comme ça, parce qu'il s'agit plutôt d'un no man's land de gravier qui navigue entre la légalité et l'illégalité. Bien sûr, on nous a brandi la clause sécuritaire, mais j'aimerais bien savoir en quoi un parking ouvert à tout vent, sans aucun contrôle, peut subitement être invoqué au nom de la sécurité. La sécurité de qui, de quoi ? Je me le demande.

Si vous le permettez, Mesdames et Messieurs, je vais juste vous citer les propos du président du département de la sécurité et de l'économie dans l'émission «Les yeux dans les yeux» du 21 février 2017, animée par l'excellent Pascal Décaillet. Il y disait, la bouche en coeur - le passage se trouve à 4'50'' de la vidéo: «Mon job [...] est de faire respecter les lois, pas de tolérer des zones de non-droit.» Dans ce cas, je voudrais savoir sur quel droit s'est basée la construction de ce parking, surtout quand on pense à la carence de zones de construction à Genève - je pense que le conseiller d'Etat Hodgers ne me contredira pas sur ce point. Sur une même surface, on aurait pu, avec un IUS de seulement 1, réaliser 80 logements - comprenne qui pourra.

La deuxième dérogation, c'est que le parking a été construit le long de la Seymaz, il a donc fallu obtenir une autorisation particulière pour le placer à 10 mètres d'un cours d'eau, ce qui est aussi problématique; mais enfin, c'est toujours pour des raisons sécuritaires, n'est-ce pas ? Alors qu'en est-il du parking du CERN, qui est également provisoire et se trouve en zone agricole ? Aura-t-il droit, lui aussi, à une dérogation ? Il y a déjà eu plusieurs problèmes dans ce dossier, notamment le défrichement nécessaire d'une zone agricole laissée à l'abandon par l'Etat - encore une erreur, Dieu merci nous n'y étions pas ! - dont la reforestation coûtera environ 600 000 F, payés bien entendu par le contribuable !

Que dire à part ça ? Malheureusement, ce projet de loi a été accepté suite à une abstention, ce que je regrette - mais enfin, il en est ainsi, c'est la démocratie. Nous n'avons pas bien compris la raison de cette abstention, mais nous en avons pris acte. Cela dit, je précise que la minorité que je représente dans ce rapport n'est en aucun cas opposée à la nécessaire augmentation des places de détention, mais quand on est garant de la loi, la moindre des choses serait simplement de la respecter. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)

Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'on tient ici notre prochaine Genferei ! Le Conseil d'Etat a jugé bon de construire une prison et son parking en plein milieu d'une zone des bois et forêts et d'une zone agricole, deux zones inconstructibles et particulièrement protégées par les cadres légaux genevois et suisse. Cette décision est parfaitement contraire à l'Etat de droit ainsi qu'à la séparation des pouvoirs. En effet, il n'est peut-être pas inutile de rappeler aujourd'hui, notamment au Conseil d'Etat, que le déclassement d'un terrain, c'est-à-dire le fait de rendre un périmètre constructible alors qu'il ne l'était pas auparavant, est une prérogative stricte et exclusive du Grand Conseil. Or, dans le cas présent, le Conseil d'Etat a lancé en 2014 la construction de cette prison, respectivement de ce parking, pour une inauguration célébrée en automne 2015; et lorsque la commission d'aménagement a commencé à traiter ce projet de loi, à discuter afin d'évaluer si oui ou non il était pertinent de déclasser les terrains, la forêt avait déjà été défrichée et la prison construite et même inaugurée.

Mesdames et Messieurs les députés, que serait un débat d'aménagement sans évoquer la question des SDA ? Ce projet de loi n'y coupe pas car nous nous trouvons face à cette problématique. Vous savez que les surfaces d'assolement sont très restreintes, que notre quota s'amenuise de jour en jour - on a même dû mettre en suspens certains projets de construction de logements par manque de SDA; construire une prison sur des SDA, qui plus est une prison prévue pour de la détention administrative, n'est pas raisonnable aux yeux de la minorité. Certes, le Conseil d'Etat évoque un régime dérogatoire en raison d'un intérêt public prépondérant, mais est-il réellement plus important de construire une prison de détention administrative plutôt que du logement ou une école ? A notre sens, non. De plus, ce type de bâtiments est soumis à des règles, et il n'y a pas de raison qu'une prison ne le soit pas. Créer des places de détention administrative ne répond pas, selon la minorité, à un intérêt public prépondérant.

Soulignons également que le Conseil d'Etat n'est pas au-dessus des lois, il devrait même plutôt se porter garant de ces lois, les faire appliquer à tout un chacun: aux privés, à tous les services de l'Etat et surtout à lui-même. Son manque d'anticipation en matière de planification pénitentiaire ne l'autorise pas à user et abuser d'un régime dérogatoire afin de masquer son inaction politique et le retard qu'il a pris ces dernières années. Je conclurai, Mesdames et Messieurs les députés, en vous citant les mots de Montesquieu dans son célébrissime ouvrage «De l'esprit des lois»: «Tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser. Il faut donc que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir.» Ce sont là les fondements même du principe de séparation des pouvoirs et, dans le cas présent, le Conseil d'Etat a abusé de son pouvoir en outrepassant ses compétences, en ne respectant pas les prérogatives du Grand Conseil. Aujourd'hui, le parlement doit jouer son rôle de contre-pouvoir en refusant ce projet de déclassement. Je vous remercie.

Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)

Mme Christina Meissner (HP), rapporteuse de troisième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, l'impact des sites pénitentiaires sur le voisinage est énorme, et on n'en voit pas la fin. J'aimerais rappeler que Champ-Dollon comprend 376 places pour une surface de 42 000 mètres carrés, soit 111 mètres carrés par détenu; l'établissement de Favra, ce sont 30 places, soit 176 mètres carrés par détenu; à la Brenaz I, il y a 191 mètres carrés par détenu, à la Brenaz II, 125 mètres carrés par détenu, et à Curabilis, 387 mètres carrés par détenu.

Or à quelques centaines de mètres du périmètre des prisons, les projets de construction de plusieurs centaines de logements dans la commune de Puplinge - vous pouvez consulter les documents annexés dans mon rapport de minorité - ont été bloqués par les autorités cantonales car jugés insuffisamment denses ! Pour quelle raison une modification de zone de près de 40 hectares de zone agricole, dont environ 18 000 mètres carrés destinés à 325 places de parking, à la densité 0, ne choque-t-elle pas ces mêmes autorités cantonales ? Ne faudrait-il donc pas préserver ce quota de surfaces d'assolement pour le logement des habitants non détenus ? Ne pourrait-on pas envisager de construire des prisons plus compactes afin d'éviter leur étalement sur la zone agricole ?

Ou alors ne faudrait-il pas admettre de collaborer au-delà des frontières, avec d'autres cantons moins à l'étroit que le nôtre, pour accueillir ces prisonniers en exécution de peine, sachant que la très large majorité d'entre eux sont des étrangers sans aucune attache dans notre canton ? L'idée de renforcer la collaboration intercantonale est imaginable sur le principe, tout à fait possible et légale; même le conseiller d'Etat Hodgers, conscient que les établissements pénitentiaires prennent de la place, est prêt à accorder une compensation financière pour les hectares de SDA qui seraient pris ailleurs, dans d'autres cantons. Mais M. Hodgers a aussi souligné en commission que, malgré la pertinence de ces réflexions, les décisions dépendaient d'un autre conseiller d'Etat, Pierre Maudet - espérons donc que ce rapport interpellera le magistrat chargé de la sécurité !

Mais revenons au projet de loi 11695. Ce projet de loi du Conseil d'Etat vise à déclasser des terrains sur lesquels des bâtiments sont déjà construits et de la zone agricole pour partie déjà transformée en parking. Légalement, le déclassement aurait dû avoir lieu avant le début des travaux, et non après. Dans ce cas précis, le Conseil d'Etat a jugé inutile d'attendre le déclassement de ces terrains et a autorisé la construction d'une prison et d'un parking au beau milieu d'une zone agricole et d'une zone des forêts, deux zones légalement inconstructibles. Il a ainsi outrepassé, comme l'ont rapporté mes collègues rapporteurs de minorité, le cadre légal de la loi sur l'aménagement du territoire qui garantit aux citoyens de pouvoir faire valoir leurs droits. Par ailleurs, il s'est octroyé des compétences attribuées au Grand Conseil, pouvoir législatif de notre canton et seule autorité habilitée à rendre une zone constructible...

Le président. Il vous reste trente secondes.

Mme Christina Meissner. Je prendrai sur le temps du groupe.

Le président. Mais... Il n'y a pas de groupe, Madame ! (Rires.)

Mme Christina Meissner. S'il veut bien l'accepter !

Une voix. Ah, ça fait mal !

Mme Christina Meissner. Je reprends: le Grand Conseil, pouvoir législatif de notre canton, est la seule autorité habilitée à rendre une zone constructible par l'adoption d'une loi de déclassement. Pour justifier cette chronologie inversée, le Conseil d'Etat a évoqué l'urgence et le fait que notre parlement était au courant car il avait voté le crédit d'étude en novembre 2013. Sauf que le crédit ne prévoyait pas la construction d'un parking...

Le président. Il vous faut conclure.

Mme Christina Meissner. ...lequel est aujourd'hui pérennisé en parfaite illégalité. Ce projet de modification de zone...

Le président. C'est terminé, Madame la rapporteure de troisième minorité.

Mme Christina Meissner. Nous ne pouvons pas, en tant que Grand Conseil, endosser à notre tour la responsabilité...

Le président. C'est terminé !

Mme Christina Meissner. ...du non-respect de la loi, c'est un comble pour un pouvoir législatif ! (Quelques applaudissements.)

M. François Lefort (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, nous n'avons pas de peine, ce qui est rare, à être d'accord avec la rapporteure de majorité aussi bien qu'avec les trois rapporteurs de minorité. Le centre de détention de la Brenaz a été inauguré en octobre 2015 et, à ce moment-là, quelqu'un a dû se rappeler que la procédure légale n'avait pas été suivie ni respectée. (Remarque.) C'est ballot, vous en conviendrez, c'est ballot ! Pour cette raison, nous avons dû traiter a posteriori les modifications de zones concernant ces territoires, une fois que tout avait été construit - le parking, mais surtout la prison.

Nous sommes tous d'accord ici pour dire qu'une succession de conseillers d'Etat ont été pris en flagrant délit de non-respect de nos propres lois. Imaginez comment serait traité le moindre quidam qui se permettrait de construire quelque chose de non autorisé: pas de la même façon, c'est bien clair ! Quels que soient les votes aujourd'hui, nous avertissons très clairement les magistrats et leur demandons de ne plus jamais refaire cela, c'est-à-dire de ne plus traiter des projets de modifications de zones une fois que tout est construit; il en va du respect de ce parlement comme de la population qui les a élus.

Mais revenons maintenant sur le point particulier du parking - provisoire, à l'origine - pour lequel une demande de renseignement avait été effectuée en 2008: on savait donc dès cette année qu'il y aurait un parking provisoire en zone agricole, lequel a été construit en 2010 ! A l'époque, nous nous sommes émus de cette construction, mais on nous a répondu qu'il s'agissait d'un parking provisoire en dérogation à la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, et qu'il disparaîtrait plus tard. Nous y avons cru; eh bien, nous n'y croirons plus !

Il se trouve que des parkings provisoires de ce type-là, il y en a suffisamment en zone agricole, malheureusement: nous en avons découvert un au CERN - et nous l'avons dénoncé - qui a été autorisé pour cinq ans; il est peut-être provisoire, mais il est très, très construit, et ce sera difficile de le déconstruire - d'ailleurs, lorsque le moment viendra, nous vous rappellerons que vous nous aviez dit qu'il s'agissait d'un parking provisoire ! Récemment, nous en avons remarqué un autre, le P+R Meyrin-Gravière, appartenant à la Fondation des parkings et utilisé également par le centre commercial de Meyrin; il s'agit là aussi d'un parking provisoire en dérogation à la loi fédérale sur l'aménagement du territoire. Il y a comme une épidémie de parkings provisoires dérogatoires, et ceci n'est pas acceptable: il va falloir trouver d'autres solutions, nous demandons au Conseil d'Etat de ne plus construire en catimini des parkings provisoires en zone agricole.

Pour le reste, il est évident que si la majorité accepte avec gentillesse la mise en conformité de ces zones - parce que tout est déjà construit - la minorité, elle, n'accepte pas d'être gentille et de faire ce cadeau au Conseil d'Etat. Les Verts ont oscillé; je me rappelle pour ma part avoir voté pour la mise en conformité, non pas par gentillesse mais tout simplement par souci d'économie. Cependant, les Verts ont décidé ce soir de rejoindre la minorité et de la transformer en majorité; charge au Conseil d'Etat de faire quelque chose dans ces zones construites mais pas déclassées. Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie donc de suivre aussi les Verts sur ce projet de loi.

Mme Nathalie Fontanet (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce projet de loi s'inscrit dans le cadre de la planification de la détention 2012-2022, confirmée dans le discours de Saint-Pierre en 2013, tout comme dans le plan directeur cantonal adopté par le Conseil fédéral en avril 2015. Il concerne un périmètre de 40 000 mètres carrés au nord de la prison de Champ-Dollon et des maisons d'arrêt de Favra et de la Brenaz, et intègre les nouveaux bâtiments prévus pour l'administration pénitentiaire.

Il est effectivement important de relever que les bâtiments ont déjà été construits sur le terrain à déclasser, qu'un parking est déjà aménagé sur la zone agricole et que la forêt a déjà été défrichée. Sur ces derniers points, Monsieur le président, le PLR déplore qu'ait été consommée autant de terre agricole pour un parking et des compensations forestières alors que d'autres solutions auraient pu être trouvées. Nous désapprouvons également d'avoir été mis devant le fait accompli s'agissant de la procédure, même si nous comprenons que cela est dû à la complexité du dossier pénitentiaire. Le Conseil d'Etat a fait son mea culpa sur ce point et s'est engagé à ce que ce type de situation ne se reproduise plus à l'avenir; nous formons le voeu que tel soit réellement le cas.

Le PLR comprend que certains se montrent réticents à la présence d'établissements pénitentiaires, respectivement d'un parking, dans ce périmètre. Pour le parking, nous estimons pour notre part qu'il est proportionné au nombre de collaborateurs sur le site, soit plus de 800, lesquels doivent pouvoir se garer et disposer d'un lieu sécurisé à cet effet compte tenu de leur fonction. En ce qui concerne les lieux de détention, le PLR souligne la nécessité de les développer, que ce besoin est une réalité et que nous ne pouvons pas, au vu de la surpopulation carcérale, procéder différemment. A toutes fins utiles, on peut rappeler qu'en raison de la surpopulation et des conditions de détention, notre canton a été condamné à indemniser des détenus.

Le PLR est évidemment attaché à l'Etat de droit et donc favorable à la construction de nouveaux lieux de détention dans leur dimensionnement prévu afin de réduire la surpopulation carcérale mais également de permettre aux gardiens et autres employés concernés de travailler dans de meilleures conditions, notamment de sécurité. Attachés à l'Etat de droit - je l'ai déjà dit - nous le sommes également dans ce type de procédure, et nous déplorons - je le répète étant donné que d'aucuns semblent ne pas l'avoir compris - d'avoir été mis devant le fait accompli.

Nonobstant cela, nous relevons que la commission a examiné avec attention l'ensemble des oppositions, a estimé qu'elles étaient infondées et les a levées. Enfin, Monsieur le président, je souhaite rappeler que si ce projet n'est pas accepté, nous en resterons à la situation acquise, et cela ne sera pas complètement satisfaisant, notamment en cas de travaux futurs. Pour ces motifs ainsi que d'autres évoqués, même si nous condamnons la situation à laquelle nous sommes confrontés, nous vous encourageons, chers collègues, à accepter ce projet de loi qui ne fait que régulariser une situation existante. Merci, Monsieur le président.

M. Christian Zaugg (EAG). Monsieur le président, chers collègues, à tous ces griefs très partagés il faudra ajouter ceux du groupe Ensemble à Gauche qui refusera catégoriquement ce projet de loi du Conseil d'Etat, lequel a autorisé la construction d'un très grand parking en zone agricole et en zone des bois et forêts sans attendre le déclassement des parcelles. Le vote par notre Grand Conseil d'un crédit d'investissement pour la Brenaz II ne donne pas le droit de déclasser des terrains pour y réaliser un vaste parking de surface !

De plus, l'affectation de la Brenaz à des détenus placés en détention administrative appelle des réserves quant au fond et à la forme. En effet, est-il pertinent de consacrer une aussi vaste prison à des détenus qui, le plus souvent, n'ont pas commis de délit et sont en attente d'un renvoi dans leur pays d'origine ? Cela alors que la prison de Champ-Dollon, sise à quelques centaines de mètres à peine, reste encore aujourd'hui très inutilement surpeuplée, avec des détenus en attente d'un jugement ou en exécution de peine qui partagent à plusieurs une cellule trop petite et dont le format non légal de moins de quatre mètres carrés a été invalidé à plusieurs reprises par le Tribunal fédéral, annulant ainsi les arrêts de la Cour pénale de la Cour de justice.

Est-il enfin opportun, alors même que le bus 1 dessert régulièrement Champ-Dollon, de construire un aussi grand parking de surface à cet endroit, hélas déjà partiellement réalisé ? C'est donner un signe dévastateur en matière de développement durable et de mobilité au personnel, qui va être encouragé à utiliser la voiture individuelle plutôt que les transports collectifs. Voilà les raisons pour lesquelles le groupe Ensemble à Gauche s'opposera résolument à ce projet de loi déclassant une belle zone agricole et des forêts afin de l'affecter à la construction d'un parking pour l'établissement pénitentiaire de la Brenaz. Merci.

M. Michel Baud (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, il existe une formule pour décrire la situation que nous vivons actuellement: on appelle ça une escroquerie à l'italienne, c'est-à-dire qu'on construit d'abord et on demande l'autorisation après ! Ce procédé que nous combattons est employé depuis des décennies dans certains pays européens. Il est clair que c'est totalement inadmissible de la part de nos autorités, qui sont censées faire respecter la loi... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Là, au contraire, elles se contentent de se... (Un instant s'écoule.) ...de se...

Une voix. De se...?

M. Michel Baud. ...de s'en moquer, voilà. Il y a trois possibilités pour expliquer cet état de fait: il s'agit soit d'une manoeuvre volontaire - auquel cas c'est extrêmement grave - soit d'incompétence, soit de négligence. Dans tous les cas, il est totalement impensable d'accepter un tel projet de loi, voilà pourquoi l'UDC vous demande de le refuser. Faisons un parallèle: si un citoyen lambda se permettait une telle hérésie, il serait immédiatement condamné par les autorités, donc je ne vois pas pourquoi il y aurait deux poids, deux mesures. Encore une fois, Mesdames et Messieurs, je vous encourage à refuser ce projet.

Cela étant, quelle que soit l'issue du vote de ce soir, que le parlement soit pour ou contre le projet, rien ne changera s'agissant du terrain puisque tout a déjà été construit, ça n'aura pas de conséquences pour la prison. Il n'y a donc aucune raison d'accepter ce projet de loi; au contraire, en l'adoptant, vous endossez la responsabilité du non-respect de la loi. Je vous remercie.

Une voix. Bravo ! (Quelques applaudissements.)

M. Bertrand Buchs (PDC). Je suis un peu étonné par ce débat. En effet, si ma mémoire est bonne, lorsqu'on a discuté du crédit pour une nouvelle prison, tout le monde poussait le Conseil d'Etat à construire; pourtant, on savait déjà que les lois n'étaient pas respectées - dans notre groupe, en tout cas, une députée nous avait parlé des zones des bois et forêts, des zones agricoles et de la problématique de leur déclassement. Excepté les Verts qui ont le droit de se plaindre parce qu'ils ont toujours été contre cet ouvrage, l'ensemble des groupes avaient défendu la construction de ce centre de détention en soulignant qu'il fallait aller de l'avant, notamment les socialistes avec Mme Bolay. Rappelons-nous qu'on dénombrait 900 détenus à la prison de Champ-Dollon à cette époque, qu'il fallait aménager rapidement de nouveaux établissements en raison des risques d'émeute, et tout le monde dans cette enceinte était d'accord de construire. Alors on a construit ! Maintenant, chacun ici s'indigne parce que le Conseil d'Etat a mal fait les choses, mais la Brenaz a été construite parce qu'il y avait urgence. Pour une fois que les choses se font rapidement dans ce canton... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...on ne va pas s'en plaindre ! Merci.

M. François Baertschi (MCG). Encore un problème dans le domaine carcéral, encore un ! Ça n'arrête pas depuis quelques mois voire quelques années: les gardiens de prison sont tout à fait démotivés, il y a un absentéisme bien réel dû à des erreurs de gestion caractéristiques, nous vivons une véritable crise tandis que le personnel pénitentiaire subit un certain mépris concernant notamment la caisse de pension mais également à d'autres niveaux, comme on a pu en débattre. Nous nous trouvons face à une irresponsabilité globale du milieu politique s'agissant du pénitentiaire et là, c'est vraiment la cerise sur le gâteau.

Qu'est-ce que nous apprenons ? Nous apprenons que l'Etat, qui doit faire respecter la loi - il s'agit tout de même de l'une de ses tâches - n'a même pas été fichu de se mettre en conformité avec celle-ci pour le parking d'une prison ! Mais c'est invraisemblable, ça mérite d'être publié dans «Le Canard enchaîné» ou d'autres journaux qui raffolent de ces éléments anecdotiques. On se ridiculise, on se ridiculise véritablement ! (Remarque.) Est-ce qu'on va mettre les conseillers d'Etat à Champ-Dollon parce qu'ils n'ont pas été fichus de respecter la loi ? (Quelques applaudissements.) Non, je ne le souhaite pas, mais enfin... Soyons un peu... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Soyons un peu crédibles !

L'Etat doit respecter la loi, s'il ne le fait pas à proximité d'une prison pour des questions de déclassement de terrains, même s'il s'agit d'un parking, on est véritablement dans la situation la plus ridicule qui soit, et je m'étonne qu'on ait pu laisser de telles circonstances d'abord ne serait-ce qu'exister, ensuite perdurer pareillement. (Applaudissements.)

M. Cyril Mizrahi (S). Mesdames et Messieurs les députés, le collègue de l'UDC nous parlait tout à l'heure de pratique à l'italienne; pour ma part, j'ai souvent entendu des gens qui prenaient de haut d'autres cantons de notre merveilleux pays où, par exemple, on commence par raser toute une forêt pour faire une piste avant de demander l'autorisation d'abattage, ou alors on construit des logements - pis, des logements de vacances ! - et on sollicite ensuite une autorisation. Eh bien, aujourd'hui, il faut plutôt regarder la poutre qui est chez nous, et je crois qu'elle est du côté du Conseil d'Etat.

La question qui se pose tout de même, c'est celle du précédent: en suivant cette pratique, le Conseil d'Etat va-t-il pouvoir construire des prisons n'importe où dans le canton ? Fera-t-on la même chose pour des écoles ou des EMS ? Bien sûr que non. Cela dit, ce ne sera pas le premier précédent de ce genre puisqu'on sait que le respect de la loi par le Conseil d'Etat est un peu à géométrie variable.

Je vous donne l'exemple, dans le même domaine, du convoyage: une nouvelle loi sur la police a été votée à une majorité extrêmement courte - à 54 voix près - et on a ensuite vu le même conseiller d'Etat s'asseoir tout simplement sur la volonté inscrite dans ce texte de limiter drastiquement la privatisation du convoyage, ce qui fait qu'on a dû revenir devant ce parlement pour enfoncer le clou une deuxième fois. Je peux encore citer l'exemple de la médiation administrative: nous avons adopté une loi qui, bien que promulguée par le Conseil d'Etat, n'a pas été appliquée par la suite - je pense que je vais m'en tenir à ces deux exemples.

On nous dit que le Grand Conseil était au courant, mais est-ce suffisant ? A l'évidence, non. Il y a ici un devoir d'exemplarité de la part du Conseil d'Etat: quand on exige des justiciables de respecter la loi, notamment en matière d'aménagement du territoire, le premier qui doit montrer l'exemple est le gouvernement.

Une dernière chose: arrêtez de nous rebattre les oreilles avec le manque de place au sein des établissements pénitentiaires car ce n'est pas une réalité s'agissant de la détention administrative. Or à quoi prévoit-on d'affecter bientôt cette prison-ci ? A de la détention administrative, domaine carcéral dans lequel il n'y a aucun problème de surpopulation. Voilà, j'en terminerai par là. Merci, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député, et passe la parole à M. Roger Deneys pour une minute vingt-six.

M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président, pour votre générosité ! Mesdames et Messieurs les députés, il faut effectivement insister sur le fait que, depuis plusieurs années, le conseiller d'Etat chargé du domaine pénitentiaire montre une volonté de ne respecter ni les procédures habituelles ni les lois et ne fait tout simplement pas ce qu'il devrait pour que les choses se passent correctement.

Je prends un autre exemple similaire, celui de la cuisine de Champ-Dollon: notre Grand Conseil a voté une nouvelle cuisine pour cette prison à hauteur de 6,5 millions - c'était compris dans le crédit de Curabilis - qui n'a pas été réalisée; nous avons donc remis cet argent dans le projet de budget 2015 mais, une fois encore, le Conseil d'Etat n'a rien fait du tout ! Il fait des rénovations minimalistes, il ne fait rien quand le parlement l'y exhorte et, dans le cas présent, il ne respecte pas la loi. Mesdames et Messieurs les députés, le Grand Conseil doit fermement s'opposer à ces pratiques !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole revient à la rapporteure de majorité, Mme Geneviève Arnold... Ah non, pardon. Monsieur Eric Stauffer ?

M. Eric Stauffer (HP). Présent ! (L'orateur rit.) Ma collègue me soufflait quelque chose, et c'est vrai qu'on aurait bien voulu entendre M. le conseiller d'Etat Antonio Hodgers, puisque c'est lui qui est chargé des autorisations - à moins qu'il n'ait changé de dicastère entre-temps - ou, à défaut, M. Maudet qui le remplace au sein du Conseil d'Etat, mais ils ne sont pas là. On aurait aimé avoir une variante de la situation de la part du Conseil d'Etat.

En ce qui me concerne, à titre totalement indépendant - je tiens à le préciser - il y a des prisons, des parkings, le débat est vaste... Bon, à la fin, que faut-il faire ? La gauche refuse de construire des prisons comme de compléter les effectifs aux douanes, donc je suis en train de me demander si la meilleure solution, Monsieur le président - vous transmettrez aux bancs de gauche - ne serait pas l'anarchie totale car, au final, leur modèle de société tend à converger vers cette solution anarchique - du reste, il doit bien y avoir quelques altermondialistes destructeurs de Grand Théâtre parmi les factions des bancs d'en face !

Bref, je répète ma requête: on aimerait bien entendre le Conseil d'Etat sur ce sujet de l'aménagement, des autorisations, c'est-à-dire soit M. le conseiller d'Etat Antonio Hodgers, soit M. Maudet, soit... Qui remplace M. Maudet au sein du Conseil d'Etat ? Nous attendons une réponse avec impatience.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je donne la parole à la rapporteure de deuxième minorité, Mme Caroline Marti, à qui il reste une minute en prenant sur le temps du groupe.

Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de deuxième minorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je souhaite juste répondre à l'interpellation de M. Buchs - vous transmettrez, Monsieur le président: le parti socialiste n'était pas opposé au crédit d'investissement de la Brenaz tant qu'il s'agissait d'un établissement d'exécution de peine. Nous considérions en effet qu'il y avait un réel besoin dans ce domaine, notamment pour désengorger la prison de Champ-Dollon et offrir des conditions de détention décentes aux détenus. Or, au fil du temps, le projet de la Brenaz a été transformé en centre de détention administrative, ce à quoi nous nous sommes opposés - vous pourrez retrouver notre vote du 8 novembre 2013 dans le Mémorial.

Cela étant, qu'il s'agisse d'une prison d'exécution de peine ou de détention administrative, ce genre d'établissement doit être construit en conformité aux normes en vigueur, notamment celles d'aménagement; mais qu'elles n'aient pas été respectées est d'autant plus grave dans le cas d'un centre de détention administrative qui, selon nous, ne se justifie pas. Je vous remercie.

Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Francisco Valentin, rapporteur de première minorité, vous avez la parole pour trois minutes.

M. Francisco Valentin (MCG), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Pour répondre à l'interrogation du député Baertschi quant à savoir s'il fallait mettre les conseillers d'Etat en prison, je lui rappellerai cette petite phrase de Coluche: «Y a un truc qu'on est sûr quand on est ministre, c'est qu'on retournera pas à l'école, tandis qu'en prison, faut voir !» On comprend maintenant pourquoi les magistrats mettent plus d'argent dans les prisons que dans les écoles !

Cela étant dit, pour bien me démarquer de mes amis de circonstance, je précise que notre groupe n'a aucun problème avec la construction de la prison qui était prévue, planifiée et nécessaire, même en sous-capacité; ce qui nous interpelle et nous pose un très gros problème, en revanche, c'est ce parking absolument illégal qui n'a jamais figuré sur aucun plan, qui n'a jamais été proposé ni présenté et apparaît mystérieusement comme ça, du jour au lendemain.

D'autre part, il y a un deuxième problème qu'il pourrait être intéressant de soulever, à savoir que ce parking étant relativement illégal, il n'y est perçu aucun loyer pour les gens qui s'y garent, ce qui constitue un avantage en nature direct pour les fonctionnaires; c'est totalement interdit ! Alors je ne sais pas si le département essaie d'embellir... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...l'image d'une profession qui a bien besoin d'être un peu plus attractive parce qu'il peine à recruter, mais le fait est que tous les fonctionnaires travaillant à la prison ne paient pas le parking, ce qui n'est pas non plus acceptable. Je vous remercie et vous encourage donc à ne pas accepter ce projet de loi - peut-être que je reprendrai la parole plus tard. Merci.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. La parole est à M. Michel Ducret pour cinquante secondes.

M. Michel Ducret (PLR). Merci, Monsieur le président. Ce sera suffisant pour rappeler aux représentants situés à la gauche de la table des rapporteurs que leurs trois partis respectifs ont bel et bien voté le crédit de construction de ce parking en sachant pertinemment qu'il était hors zone, et maintenant ils viennent dire: «Ah, on est surpris, on n'avait jamais entendu parler de ça !» Mais arrêtez de vous moquer du monde ! Vous vous moquez tout simplement du monde, Mesdames et Messieurs, et c'est une position malhonnête. Tout le monde était pressé...

Une voix. C'est hypocrite !

M. Michel Ducret. Oui, c'est de l'hypocrisie totale ! Tout le monde était pressé de réaliser cette prison, et il fallait le parking qui allait avec, alors s'il vous plaît ! Le seul parti qui a le droit de s'opposer au projet aujourd'hui s'y était déjà opposé à l'époque, c'est le groupe des Verts.

Une voix. Excellent !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je cède la parole à M. Eric Stauffer pour trente-cinq secondes.

M. Eric Stauffer (HP). Largement suffisant, Monsieur le président ! Je viens d'entendre qu'il était inadmissible que les gardiens de prison ne paient pas leur parking; pour ma part, je trouve plutôt inadmissible le fait qu'ils doivent le payer ! L'établissement se situe à Perpète-les-Oies; même nous, chez Medinex - société que tout le monde connaît - nous offrons le parking à nos employés alors que nous nous trouvons au centre-ville. Alors franchement, chers collègues, faire payer aux agents de détention leur place de stationnement, c'est vraiment se montrer tout petit !

Le président. Merci, Monsieur le député... (Brouhaha.) Un peu de silence, s'il vous plaît ! (Le président agite la cloche.) Je passe la parole au rapporteur de première minorité, M. Francisco Valentin, pour une minute et treize secondes.

M. Francisco Valentin (MCG), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Ce sera également largement suffisant. Si les gardiens de prison ne paient pas leur parking au bout du monde, à ce moment-là, par équité de traitement, je demande que tous les fonctionnaires dont le lieu de travail est situé au centre-ville bénéficient également de places gratuites. Merci, Monsieur Stauffer !

Maintenant, pour rebondir sur l'intervention du député Ducret, le crédit... (Commentaires.) Oui, oui, on peut y aller, on peut jouer un moment ! (Commentaires.) Pour répondre au député Ducret, donc, tous les partis sauf celui des Verts avaient accepté le crédit d'étude pour la prison, personne ne s'y opposait. Je recentre le débat encore une fois, Monsieur Ducret, au cas où mes interventions précédentes vous auraient échappé: je parle du parking qui ne figurait sur aucun plan, pour lequel il n'a jamais été question de voter le moindre crédit. Alors merci de lire les rapports comme il faut ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Monsieur Stauffer, vous ne disposez plus que de dix secondes.

M. Eric Stauffer (HP). Merci, Monsieur le président. Vous prônez l'équité, Mesdames et Messieurs ? Chaque député ici présent possède un abonnement de parking gratuit à Saint-Antoine ou un abonnement de bus... (Exclamations. Commentaires.) ...alors commencez déjà par montrer l'exemple ! (Commentaires. Le président agite la cloche.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole revient maintenant à la rapporteure de majorité, Mme Geneviève Arnold, pour deux minutes quarante-cinq... (Brouhaha.) Patientez un instant, Madame. (Un instant s'écoule. Brouhaha.) Ça va, l'ambiance est bonne ? (Le silence se rétablit.) Merci. Allez-y, Madame Arnold.

Mme Geneviève Arnold (PDC), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. En préambule, j'avais annoncé que cela allait être chaud; eh bien je ne suis pas déçue, la tournure que prend le débat ne m'étonne nullement. Certes, nous pouvons réagir en marquant notre désapprobation pour l'exemple car nous sommes fâchés - je crois que nous le sommes tous, les rapporteurs de minorité comme moi-même; en revanche, restons conscients que la situation était connue et qu'il est maintenant un peu tard pour réfléchir.

Nous devons penser à l'avenir et notamment à l'entretien futur de ces bâtiments et de ces espaces. Aussi, je préfère vous encourager à accepter ce projet de loi en vous souvenant des propos des différents conseillers d'Etat auditionnés - rappelons que nous en avons entendu quatre, deux qui étaient à l'origine du projet et deux autres qui les ont rejoints en héritant de cet état de fait qui, je le souligne, n'était pas du tout confortable pour eux non plus. Nos quatre conseillers d'Etat nous ont expliqué à quel point ils souhaitaient qu'un tel fonctionnement ne se reproduise pas, et ils s'y sont engagés par leur parole; osons les croire ! Nous demandons que cela ne se reproduise plus à l'avenir.

Tout en déplorant les entorses à la bonne pratique et les infractions mises à jour lors des débats en commission, je vous invite à accepter ce projet de loi, à suivre attentivement les prochains travaux afin de faire respecter les procédures et à penser à la suite, notamment s'agissant de l'entretien de la Brenaz et du parking. Il y aura en effet des coûts supplémentaires dans les décennies à venir, et on se doit d'avoir un projet de loi qui soutienne la réalité actuelle. Je vous encourage donc à voter ce texte.

M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat. Madame Arnold, vous m'ôtez les mots de la bouche ! Vous venez de décrire avec exactitude la conséquence d'un potentiel refus de ce projet de loi, qui serait de ne pas permettre l'entretien du bâtiment et de l'équipement public. Cela dit, ce serait là la seule conséquence car si la situation n'est pas idéale, tant s'en faut - le Conseil d'Etat l'a concédé par la voix de quatre de ses magistrats - elle n'en est pas illégale pour autant.

Mesdames et Messieurs, nous sommes convenus tous ensemble - je ne vais pas vous faire l'affront de vous relire les rapports de la commission des visiteurs officiels ou les nombreuses motions sur la surpopulation carcérale qui ont été discutées - qu'il y avait un problème majeur de surpopulation carcérale à Genève et que la situation de la prison de Champ-Dollon n'était pas satisfaisante. Nous avons donc décidé de construire le plus rapidement et le plus légalement possible une prison, celle de la Brenaz dont vous êtes aujourd'hui en train de voter les règles d'aménagement du territoire. Nous vous avons présenté un crédit de construction permettant précisément de régler cette difficulté, crédit que, pour l'essentiel d'entre vous, vous avez voté.

Nous avons dû coordonner une situation parmi les plus complexes du point de vue urbanistique, notamment en raison de la présence d'une forêt - une forêt bien particulière puisqu'il s'agissait en réalité des arbres qui avaient poussé sur les remblais de construction de l'établissement pénitentiaire de Champ-Dollon et pour qui, du fait de leur densité, un constat de nature forestière avait été établi. Tenez-vous bien, Mesdames et Messieurs: la forêt est plus sacralisée en Suisse que la zone agricole, ce qui est tout de même curieux quand il s'agit d'une forêt de cette nature en milieu urbain. Résultat des courses, il a fallu déclasser des zones agricoles et les utiliser pour replanter cette forêt - dans le canton de Genève, Mesdames et Messieurs ! - afin de répondre aux exigences de la loi fédérale sur les forêts.

Nous nous y sommes attelés avec l'appui d'une commune qui a été déterminant dans cette affaire, non pas celle de Puplinge, contrairement à ce que les gens pensent, mais celle de Choulex, laquelle a mis à disposition un terrain permettant à l'agriculteur qui exploitait jusqu'ici ces terres agricoles - celles-là même que nous devions transformer en zones des bois et forêts afin de construire la Brenaz dessus ! - de poursuivre son activité. Nous avons délivré des autorisations de construire, ces bâtiments ont été conçus avec une autorisation de construire en force, et tout cela a été effectué en parfaite transparence. En effet, lorsque vous avez examiné le crédit de construction, Mesdames et Messieurs, il vous a été indiqué la situation telle qu'elle était, le fait que nous agissions et construisions par voie dérogatoire sur le plan urbanistique et que, le moment venu, nous viendrions bien évidemment devant vous avec un projet visant à modifier cette zone.

Mesdames et Messieurs les députés, celles et ceux d'entre vous qui se sont toujours opposés à la Brenaz peuvent aujourd'hui venir dire ce qu'ils ont dit, et c'est notamment le cas de M. Lefort - où est-il ? - que j'ai entendu tout à l'heure; mais je n'accepte pas d'écouter tous les autres, ceux qui nous enjoignaient de construire en urgence une prison afin de régler les problèmes de surpopulation carcérale au plus vite. Vous souvenez-vous, Mesdames et Messieurs, lorsqu'un pic de plus de 900 détenus - oui, 900 détenus ! - a été atteint durant un été à la prison de Champ-Dollon et qu'il y avait des interpellations urgentes à chacune des séances du Grand Conseil ? Quand je vous entends, Madame Meissner, vous prêter à des élucubrations sur le nombre de mètres carrés à disposition des détenus... Ne pensez-vous pas qu'il faudrait aussi compter les mètres carrés pour les gardiens de Champ-Dollon ? Qu'il s'agirait de considérer que des gens travaillent dans ces établissements et qu'ils ont droit à certains espaces, notamment parce que leurs conditions de travail ne sont pas des plus faciles - c'est le moins qu'on puisse dire - eu égard justement à la surpopulation carcérale ?

Mesdames et Messieurs, que le Conseil d'Etat vous propose quelque chose qui n'est pas idéal, je suis le premier - et mes collègues avec moi - à l'admettre; mais que le Conseil d'Etat vous propose quelque chose qui est illégal, cela n'est pas exact. Partant, celles et ceux qui, dès l'abord, sont venus nous dire qu'il fallait construire un centre de détention de toute urgence - ils se sont d'ailleurs précipités à la cérémonie lorsqu'il s'est agi de l'inaugurer - et qui s'indignent aujourd'hui, durant un aimable après-midi du mois de mars, en criant haut et fort que ce projet suscite leur crainte et leur effroi, devraient - comment dirais-je ? - quelque peu y réfléchir. Je vous remercie.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie de bien vouloir vous prononcer sur l'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 11695 est rejeté en premier débat par 53 non contre 30 oui et 4 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)