République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1863-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Christophe Aumeunier, Gabriel Barrillier, Jacques Jeannerat, David Amsler, René Desbaillets, Nathalie Fontanet, Ivan Slatkine, Daniel Zaugg, Fabienne Gautier, Claude Aubert, Christiane Favre, Pierre Weiss, Michel Forni pour une nouvelle zone industrielle à Cointrin
Rapport de majorité de M. Bertrand Buchs (PDC)
Rapport de minorité de M. Olivier Norer (Ve)

Débat

M. Bertrand Buchs (PDC), rapporteur de majorité. Nous avons un petit doute: nous sommes bien au point concernant la nouvelle zone industrielle de Cointrin ? Vous n'avez pas énoncé le projet, Monsieur le président. C'est juste ?

Le président. Bien sûr, mais je veux bien répéter. Il s'agit du rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Christophe Aumeunier et autres pour une nouvelle zone industrielle à Cointrin.

M. Bertrand Buchs. Merci beaucoup, Monsieur le président. Pour commencer, j'aimerais juste rectifier une petite erreur de plume à la page 7: j'ai annoncé un amendement radical qui était UDC, modifié ensuite par le parti radical. Je vous remercie.

Cette motion est importante, parce qu'elle nous oblige à repenser le développement des zones industrielles du canton de Genève en se disant qu'il faut les augmenter, que la zone Praille-Acacias-Vernets va se faire, qu'il va falloir délocaliser les entreprises qui s'y trouvent et repérer des lieux pour les reloger. Actuellement les zones existantes à disposition ne sont pas assez importantes pour ce relogement, donc il faut imaginer autre chose. D'autres solutions sont possibles: l'augmentation des zones qui existent déjà et l'aménagement différent de celles-ci. Je relève ici que le Grand Conseil nous a donné un projet de loi très intéressant pour la modification des zones industrielles, projet qui sera renvoyé à la commission de l'aménagement.

Pourquoi cette zone de Colovrex ? Parce qu'elle est idéale pour plusieurs raisons. Premièrement, elle est grande et correspond à peu près à la même taille que celle de la Praille-Acacias-Vernets. Deuxièmement, elle appartient à quelques propriétaires, donc on peut négocier au niveau de l'achat des lieux. Troisièmement, elle est idéalement située à côté de l'aéroport, près de l'autoroute, et donne une relation avec le reste de la Suisse, relation qui n'existe pas tellement pour les autres zones industrielles à Genève. Ainsi, il peut y avoir une relation directe avec le reste de la Suisse.

Il y a un bémol, c'est qu'il n'y a pas de relation avec le train. Mais on peut imaginer - et cela a déjà été discuté - qu'enfin on puisse parler du raccordement de la voie CFF de l'aéroport avec la voie de chemin de fer Genève-Lausanne, ce qui déboucherait sur une autre façon de voir le développement de notre canton.

Il est important de ne pas rejeter cette idée de motion, simplement parce qu'actuellement il n'y a pas de possibilité d'avoir un raccordement au rail. Il peut être discuté et envisagé, il faut l'imaginer, même si cela peut être compliqué. Il est vrai aussi que les communes ne sont pas très chaudes pour avoir cette zone industrielle. Mais, là aussi, je crois qu'il faut faire un effort, car il nous faut absolument développer notre canton et continuer à pouvoir s'ouvrir et loger nos industries.

Pour toutes ces raisons, la majorité de la commission vous recommande de voter cette motion. Je vous remercie.

M. Olivier Norer (Ve), rapporteur de minorité. Le rapporteur de majorité a émis trois idées intéressantes que je me permettrai de relever. La première est le bon sens de cette motion dans l'intérêt de se poser des questions sur les zones industrielles. Effectivement, dans le cadre du déclassement de Praille-Acacias-Vernets, nous avons besoin de relocaliser les entreprises situées sur cet espace. Il est donc important de se poser de nombreuses questions et d'éviter d'en occulter une ou deux. Les deux autres points positifs que le rapporteur de majorité a soulevés, c'est qu'en effet la proposition souffre de deux bémols importants: le premier, c'est la question du ferroviaire - il n'y en a effectivement aucun sur cet espace et cela prétérite l'idée d'une zone industrielle; le deuxième bon argument qu'il a relevé, c'est que la proposition souffre d'un autre bémol, en l'occurrence l'opposition des communes. De toutes celles qui sont situées sur le territoire ! Que ce soit Bellevue, sur laquelle la zone de Colovrex est prévue, mais également Collex-Bossy et Ferney-Voltaire, que nous avons eu l'occasion d'auditionner en commission.

A cela - ces deux bémols - j'en rajouterai six autres. Premièrement, la zone industrielle de Colovrex, telle qu'elle est prévue sur cet emplacement, est loin d'être idéale, puisqu'elle n'est de loin pas plate. Le ravin du Gobé... Le ruisseau du Gobé offre un certain ravin, quand on passe à proximité de l'aéroport. Que ce soit en voiture, à vélo ou en transports publics, on a l'occasion d'affronter la montée de l'aéroport et on se rend bien compte que le terrain est loin d'être plat. Et s'il ne l'est pas, il est loin d'être idéal pour l'échange de marchandises et, donc, pour la justification d'une zone industrielle. Ensuite, un autre bémol est important, car, à proximité de l'aéroport, nous sommes soumis à toute une série de législations contraignantes en matière d'aménagement, notamment dans le cadre du respect des normes de l'OPB. Celles-ci imposent de ne pas réaliser n'importe quoi à n'importe quel endroit. Nous avons la même problématique à proximité de l'autoroute, et là nous ne pourrons pas réaliser n'importe quoi. In fine, seules une ou deux petites parcelles, actuellement agricoles, de cette vaste zone de Colovrex pourraient être potentiellement importantes pour y réaliser différentes entreprises. Le solde serait plutôt dévolu à stocker des plots de béton, des silos, car pas grand-chose d'autre ne serait possible.

Ensuite, le rapporteur de majorité a énoncé le fait qu'au niveau ferroviaire nous n'avions pas grand-chose. Mais ce n'est pas seulement sous cet angle que nous n'avons pas grand-chose, c'est également au niveau routier. Actuellement, la zone est traversée par une simple route cantonale ! La route de Colovrex a une voie de chaque côté, il n'y pas beaucoup d'espace pour réaliser autre chose; il n'y a pas d'accès à l'autoroute, par exemple. Les accès prévus notamment le long de la route des Fayards souffrent d'oppositions. D'autres propositions sont faites sur la route de Sauverny, du côté de Versoix, mais, là également, il y a des oppositions. Donc, en termes d'accès routiers, nous endurons des problèmes. Puis, corrélativement à ces deux soucis, la réalisation d'une zone industrielle à Colovrex imposerait un coût très important pour le canton, puisqu'il s'agirait de construire ex nihilo une infrastructure ferroviaire complète, un réseau routier conséquent, et cela se chiffre en milliards. Les CFF ont établi une sorte de bilan financier d'une éventuelle liaison ferroviaire avec la zone de Colovrex: nous en avons pour un minimum d'un milliard d'investissement dans ce domaine, c'est conséquent.

De plus, une zone industrielle n'est pas exempte de problèmes en elle-même. Elle génère du trafic: du trafic interne de marchandises, mais également du trafic d'origine et de destination, notamment par rapport aux pendulaires. Ceux qui vont travailler dans cette zone proviennent principalement - et on l'a vu dans toutes les zones industrielles existantes - du sud du canton, de la Haute-Savoie par exemple. Cela veut dire que nous amènerons des pendulaires à traverser l'ensemble de l'agglomération pour aller travailler au nord du canton, parce qu'on se focalise sur le seul transport des marchandises qui, lui, irait sur le reste de la Suisse, ce qui est à ne pas oublier. Ensuite, point particulièrement non négligeable à nos yeux...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur.

M. Olivier Norer. ...et particulièrement aux yeux des Verts, c'est que le terrain n'est pas vierge. Nous avons un terrain agricole qui est occupé - et bien occupé - par une exploitation de bisons, ce qui fait la fierté de toutes les communes avoisinantes. S'il y a une possibilité de relocation, c'est uniquement sur le très long terme, ce qui prétérite l'intérêt de cette zone agricole pour y réaliser une zone industrielle. Et il y aura d'autres solutions, nous y travaillons en commission de l'aménagement.

Le président. Il vous faut vraiment conclure, Monsieur le rapporteur !

M. Olivier Norer. Cette motion est mauvaise, nous vous proposons de la refuser.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Dans la mesure où je ne peux pas passer la parole à mon fils Arthur, je la donne à M. le député Roger Golay.

M. Roger Golay (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, on tient à féliciter l'excellent rapport de majorité présenté par M. Bertrand Buchs; il est complet. Cela démontre bien qu'aujourd'hui nous n'avons pas grand-chose à nous mettre sous la dent dans le domaine des terrains pour reloger les entreprises se trouvant sur la zone Praille-Acacias-Vernets. Cela commence à devenir urgent, puisqu'on a déjà déclassé un grand périmètre sur le PAV. On doit donc aussi, pour les reloger, apporter des solutions aux entreprises qui y sont implantées, et le terrain proposé dans la zone de Colovrex s'y prête absolument et merveilleusement bien !

Vous l'avez dit, il y a des accès d'autoroute, c'est proche de l'aéroport pour le fret. Les accès, Monsieur Norer, vont se créer ! Il ne faut pas dire qu'il n'y a pas d'accès aujourd'hui ! Il n'y en a pas, puisqu'on n'a rien décidé ! C'est évident ! On ne va pas en créer avant d'entamer un quelconque débat. Mais ce sont des accès qui seront tout à fait faciles à réaliser. D'autre part, il faut le reconnaître, c'est une zone où l'on ne peut rien produire, sauf à y faire paître des vaches ou des bisons, etc. Alors dans le domaine du paysage, on veut bien concevoir que c'est regrettable, mais aujourd'hui il est urgent et prioritaire de trouver des terrains.

Je pense que, par rapport à la proposition faite par le groupe libéral - PLR, excusez-moi ! PLR ! - d'envisager de lancer ce périmètre dans une étude, c'est une opportunité qui est présentée. L'avantage que nous aurions de voter cette motion, c'est de pouvoir déjà inscrire cette zone dans le futur plan directeur cantonal. C'est un plus qu'on pourrait avoir en inscrivant cette zone industrielle dans ce plan directeur.

En ce qui nous concerne, au groupe MCG, nous allons soutenir pleinement cette motion et nous vous invitons à en faire autant.

Mme Anne Mahrer (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion est une fausse bonne idée, mais la préoccupation est réelle. Je voudrais rappeler que la zone agricole n'est pas un grand vide en attente d'être rempli.

La préoccupation réelle quant aux zones industrielles et artisanales, les Verts la prennent en compte. Et ils soutiendront, bien sûr, toute densification que l'on pourrait trouver - et elles sont nombreuses - dans les zones industrielles existantes, par exemple à la ZIMEYSA et dans d'autres zones qui sont très bien desservies par le rail notamment. Les Verts ont soutenu le déclassement du PAV; ils espèrent d'ailleurs que ce projet, majeur pour Genève, avance. Le potentiel de densification existe, j'en veux pour preuve que sur les zones industrielles de très très grandes surfaces sont occupées par des voitures en vente. Je me demande ce qu'elles font sur ces zones, elles pourraient être mises ailleurs ou dans des silos à voitures.

De plus, lorsqu'en commission nous avons eu la présentation - et le rappel du PACA St-Julien - dans laquelle la zone est incluse, il a été clairement dit qu'il ne s'agissait pas de retenir ce périmètre, que la faisabilité n'était pas démontrée et que les coûts étaient extrêmement importants. Donc, Mesdames et Messieurs les députés, je vous propose de rejeter cette motion.

M. Serge Dal Busco (PDC). Mesdames et Messieurs, chers collègues, il y a quelques mois, nous votions, dans une belle unanimité, le déclassement du PAV avec la perspective - hélas, pour l'instant, seulement une perspective - de construire des milliers de logements. Il ne faut pas que cette belle volonté reste lettre morte ou, pire, un voeu pieux. Il faut absolument mettre en oeuvre tout ce que l'on a à disposition pour libérer ces fameux terrains de la Praille-Acacias-Vernets tout en évitant, mais vraiment de manière déterminée, de péjorer l'activité économique des entreprises, dont nous avons évidemment largement besoin.

Il y a plusieurs possibilités de le faire. J'observe qu'il y a d'ailleurs une symétrie assez intéressante entre la problématique du logement et celle de la relocalisation des places de travail, puisqu'il faut agir sur les deux aspects. D'une part, il faut densifier les zones industrielles existantes - comme nous proposons de le faire pour le logement aussi - et il faut également envisager de nouveaux périmètres, sinon on n'arrivera jamais à atteindre les objectifs que nous nous sommes nous-mêmes fixés.

Cette motion - tout en reconnaissant qu'il y a effectivement beaucoup de problèmes à résoudre, qu'il y a certainement de grands investissements à faire, qu'il y a des vérifications techniques à apporter - eh bien, cette motion ne demande rien d'autre, dans le fond, que l'on envisage cette perspective et que l'on étudie tous les aspects présents pour pouvoir créer cette zone d'activité à cet endroit-là, qui, en tout cas dans une première analyse, revêt un certain nombre d'atouts que personne ne peut contester.

C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, nous souhaitons, nous les démocrates-chrétiens, que cette étude, cette analyse approfondie puisse être faite. Aussi, nous vous demandons d'accepter cette motion.

M. Christian Dandrès (S). Mon collègue Dal Busco l'a indiqué: la situation qui prévaut sur le marché des locaux commerciaux n'est guère plus enviable que celle qui prévaut sur le marché du logement. Nous avons auditionné, lors des travaux de commission, le directeur de la Fondation pour les terrains industriels; il a expliqué les difficultés qui étaient les siennes pour pouvoir mener à bien ses missions. La fondation doit pouvoir répondre aux besoins des entreprises, alors que la disponibilité des terrains s'élève à peine à 3%. Je pense que les artisans - et nous y sommes particulièrement sensibles, au parti socialiste, puisque nous en avons plusieurs dans nos rangs - exigent des surfaces importantes pour pouvoir mener à bien leurs activités professionnelles et économiques; je pense notamment aux carrossiers et aux menuisiers.

Dans ce contexte, Mesdames et Messieurs les députés, l'approche préconisée par le plan directeur cantonal, qui va nous être soumis prochainement, est intéressante. A mon sens, il en va de même pour les surfaces commerciales que pour les logements. Il faut donc agir sur deux axes: d'abord densifier les zones existantes et, ensuite, déclasser de nouvelles parcelles. Ces deux piliers sont complémentaires et doivent être mis en oeuvre parallèlement.

Sous cet angle, les démarches des auteurs de la motion que nous traitons ce soir doivent être saluées. Mais il faut quand même relever un élément essentiel: c'est que le projet ne peut pas être considéré comme prioritaire, puisque la mise en oeuvre de celui-ci va prendre des années, si tant est qu'il soit faisable. Or, comme on l'a relevé lors des travaux de la commission, les infrastructures routières et ferroviaires - le rapporteur de minorité l'a rappelé - n'existent pas aujourd'hui et ne verront pas le jour prochainement. Le raccord entre Cointrin et Versoix n'est, de loin, pas une priorité des CFF et nous risquerions de travailler à un horizon 2030. De même, nous avons les contraintes de l'aéroport ainsi que la topographie des lieux. Donc, la faisabilité de ce projet - je le répète - est plus que douteuse. Demander un rapport au Conseil d'Etat ne va pas changer ces obstacles qui sont intrinsèques à cette surface.

Il y a également un autre problème que les socialistes ont mis en avant, c'est que le développement de la zone industrielle ne doit pas aggraver la pénurie de logements. C'est une bataille que nous menons depuis plusieurs mois et c'est la raison pour laquelle nous avons déposé un amendement afin que la motion intègre une nouvelle invite, à savoir d'inscrire dans cette éventuelle étude le principe «un emploi, un logement». Cet amendement a été balayé par l'Entente, par l'UDC et par le MCG, et ce de manière assez surprenante, puisque ce principe d'équilibre avait été accepté à l'unanimité par ces partis, lors des votes sur le projet Praille-Acacias-Vernets et lors du vote sur la motion 1941, intitulée: «Pénurie de logements: où sont les grues ?», motion acceptée en mai 2010 et pour laquelle nous sommes toujours sans nouvelles du Conseil d'Etat.

Pour ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes ne soutiendront pas ce projet.

M. Stéphane Florey (UDC). Oui, il s'agit de la zone agricole ! Mais, contrairement à d'autres secteurs qui ont été dernièrement déclassés, comme les Cherpines, elle n'a vraiment pas la même valeur. C'est une terre - selon ce qu'on a pu nous rapporter - de piètre qualité. La preuve, c'est qu'actuellement on y fait paître des bisons. Donc on voit que ce n'est pas de la terre destinée à de l'agriculture intensive.

Vous tenez absolument à faire déménager - en tout cas, vous y êtes très attachés - les sociétés et les entreprises qui se trouvent actuellement sur le PAV, et, dès qu'on vous propose une éventuelle solution, vous faites la fine bouche... Je dis «éventuelle», parce que, si vous relisez bien la conclusion du rapport, il ne s'agit pas d'inviter le Conseil d'Etat à proposer un projet de loi, ce qui figurait dans la motion initiale, il invite simplement «à étudier l'opportunité de [...]». Donc, nous ne pouvons qu'être favorables à cette motion, laquelle demande justement s'il est opportun ou pas de tout délocaliser - ou en tout cas un maximum - sur place. Pour ces raisons, nous soutenons cette motion et vous invitons à en faire de même.

M. Christophe Aumeunier (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, c'est bien la localisation particulière qui a incité les auteurs de cette motion à inviter le Conseil d'Etat à étudier l'opportunité d'un déclassement. Cette localisation est tout à fait extraordinaire.

Elle est extraordinaire, parce qu'en contrepoids de ce qu'est prévu actuellement dans le plan directeur cantonal qui oriente énormément le développement de Genève sur la France voisine, eh bien, on a là une porte ouverte sur la Suisse; 70% des échanges se font avec la Suisse. Ce que souhaitent les Verts ce soir, c'est que tous les camions transportant des marchandises traversent Genève, jusqu'à Bernex, pour aller de l'autre côté du canton, plutôt que d'avoir une porte industrielle à Genève.

Ensuite, on nous dit qu'il y a trop de déclivité dans le terrain. Mais, Mesdames et Messieurs les Verts, la déclivité, c'est un avantage énorme pour permettre d'amener des poids lourds au premier étage d'un immeuble; il suffisait d'y penser. La relocalisation des entreprises du PAV, c'est quelque chose de stratégique pour l'Etat, c'est quelque chose dont vous convenez pour créer du logement et c'est donc la raison pour laquelle il est essentiel que des études soient menées sur le déclassement du périmètre incriminé.

Maintenant, je dis simplement que ce sont des arguties qui nous sont présentées par les Verts ! Car, ce qu'il faut bien savoir, c'est que ceux-ci sont opposés à tout déclassement de zones agricoles. C'est ce qu'ils font tous les jours et c'est ce qu'ils ont fait hier, au Conseil national ! Les Verts souhaitent un moratoire de vingt ans sur tout déclassement; ils désirent la décroissance, le ralentissement de notre économie et la diminution de notre bien-être.

Voilà pourquoi le groupe libéral et le groupe radical souhaitent que cette motion soit acceptée.

M. Jacques Jeannerat (R). Cette nouvelle zone d'activités économiques doit répondre à deux besoins: premièrement - plusieurs d'entre vous l'ont déjà dit - reloger les entreprises qui sont actuellement situées sur le secteur du PAV. C'est une alternative tout à fait crédible de pouvoir mettre ces entreprises là-bas.

Mme Mahrer a parlé tout à l'heure du problème du stockage des voitures. C'est vrai que quand on voit actuellement le quartier des Acacias, avec toutes ces voitures sur des hectares et des hectares, c'est absolument ridicule. Eh bien justement, dans cette nouvelle zone industrielle qui doit aussi servir de lieu de stockage pour ce genre d'industrie - puisque l'industrie automobile est importante dans notre canton - mettons les voitures qui sont dans le quartier des Acacias et qui n'ont rien à faire dans cette zone, afin de les installer à l'extérieur de la ville.

Le deuxième besoin, c'est un manque de surfaces. Même si l'on fait abstraction du premier argument du PAC, eh bien, nous sommes dans un cruel manque de mètres carrés pour le développement économique de Genève. Je ne parle pas du fait d'attirer d'éventuelles entreprises nouvelles à Genève, mais simplement du développement des entreprises actuelles. Regardez l'économie horlogère par exemple, l'industrie horlogère qui ne cesse de construire de nouveaux bâtiments ! Et l'on est arrivé à la limite des zones industrielles de la ZIMEYSA et de la ZIPLO pour pouvoir offrir à un fleuron de l'économie genevoise, à un atout de l'économie genevoise, la possibilité de développer son outil de production. M. Loeffler, le directeur de la promotion économique, disait ce printemps dans les médias que, par manque de mètres carrés à destination de l'industrie, ces cinq dernières années, on a dû renoncer à environ 10 000 emplois.

Je voudrais insister sur un élément. Cette nouvelle zone d'activités doit être mise en parallèle avec le projet de loi que le Conseil d'Etat a déposé - ou va déposer tout prochainement - sur le nouveau régime des zones industrielles, qui introduit la notion de mixité des activités dans les zones industrielles, rassurez-vous - et j'ai été rassuré en découvrant le projet de loi - en garantissant un certain nombre de mètres carrés pour l'industrie, mais en permettant également de diversifier l'activité et, justement, de mieux économiser le territoire du canton. Actuellement, dans la ZIMEYSA ou la ZIPLO, on a des bâtiments industriels d'un ou deux étages sur rez-de-chaussée. On pourrait très bien imaginer des étages supplémentaires avec des entreprises de services. Eh bien, c'est ce qui est prévu, parallèlement à ce projet de motion, avec le projet de loi que le Conseil d'Etat a déposé tout à l'heure.

M. Norer a relevé deux oppositions. Celle des communes: je vous rappelle, pour ceux qui étaient déjà dans la marmite politique à l'époque, que, quand on a voulu créer la ZIMEYSA, la commune de Satigny aussi voyait d'un mauvais oeil qu'on construise une zone industrielle dans cette région. La même chose avec la ZIPLO et Plan-les-Ouates ! Eh bien, les réticences de ces communes, elles ont fondu, Mesdames et Messieurs, comme neige au soleil, quand elles ont vu qu'avec les recettes fiscales elles étaient largement bénéficiaires. Plusieurs d'entre vous, et M. Norer en particulier, ont parlé d'un manque d'accès à l'autoroute: mais, pour ceux qui connaissent le projet d'agglomération, il y a justement l'idée de créer un nouvel échangeur autoroutier dans cette région.

Quant à l'amendement auquel M. Dandrès faisait référence tout à l'heure - amendement qui a été refusé, par lequel on demandait que, pour chaque place de travail créée dans cette zone nouvelle industrielle, il soit construit un logement dans le territoire du canton - mais, Monsieur Dandrès, ceux qui vont refuser que le Conseil d'Etat fasse une étude pour une nouvelle zone industrielle condamnent le développement du PAV et bloquent les logements qu'on pourrait y construire ! Donc, si vous voulez des logements, vous votez cette motion...

Le président. Il vous reste quinze secondes, Monsieur le député.

M. Jacques Jeannerat. ...et comme ça, on pourra construire davantage de logements dans le secteur du PAV. Donc, le groupe libéral et le groupe radical vous recommandent d'accepter cette motion.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Bertrand Buchs, à qui il reste une minute quinze.

M. Bertrand Buchs (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais juste rectifier quelque chose. Il a été dit qu'on pourrait très peu construire dans ce périmètre parce qu'il y a des problèmes de bruit et des soucis liés à l'aéroport. Ce n'est pas vrai, les gens qui sont venus en commission ont démontré que l'on pouvait construire sur tout le périmètre de cette région.

Maintenant, même si l'on pense à l'horizon 2030 ou 2040, il est essentiel qu'au niveau de ce canton on imagine une autre manière de le développer, on imagine une autre façon de localiser les entreprises; il est essentiel de repenser complètement ce périmètre de l'aéroport et de faire quelque chose de tout à fait valable à cet endroit-là. On peut le faire, on peut se donner les moyens de le faire. Il est parfois important d'avoir des idées qui semblent un peu difficiles. Mais si la difficulté arrête toutes les idées, on ne fait plus rien dans ce canton.

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur le rapporteur, il vous reste deux minutes sur le temps de votre groupe.

M. Olivier Norer (Ve), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Je tiens à rappeler deux ou trois faits aux différents députés qui ont eu l'occasion de saluer ce projet - notamment, par exemple, aux députés Dal Busco et Florey. Effectivement, il concerne une étude. Soit ! Donc ce n'est pas la réalisation concrète de l'objet. Toutefois, l'étude a déjà eu lieu d'une certaine manière en commission, puisque nous avons eu l'occasion d'avoir des éléments très concrets sur les différentes problématiques. Que l'on ne se leurre pas, ce n'est pas après une étude approfondie que le milliard pronostiqué par les CFF va fondre comme neige au soleil !

Concernant la question des communes, effectivement, M. Aumeunier a pu saluer le fait que les Verts étaient assez pugnaces concernant la zone agricole. Je dirais que, concernant les communes, certains maires du PLR le sont aussi, puisqu'ils sont également parmi les rangs des opposants.

A propos du nouveau projet de loi sur les zones industrielles, il est à saluer. Malheureusement, je crois que la CCIG a eu l'occasion de le faire d'un côté, mais de le déplorer de l'autre; cela ne concerne que les nouvelles zones industrielles, pas les existantes. Malheureusement, il y a encore beaucoup de bémols, et, pour cela, il n'y a pas de raison de changer d'avis.

M. Mark Muller, président du Conseil d'Etat. La proposition consistant à réaliser une zone industrielle du côté de Colovrex devient presque un serpent de mer; cela fait quasiment autant de temps que l'on parle de cela que des Communaux d'Ambilly. Cela étant, on en arrive à une phase où l'on examine sérieusement l'opportunité de déclasser ce périmètre en zone industrielle et artisanale, et le Conseil d'Etat a eu l'occasion de se pencher sur cette question lors de l'examen du projet de plan directeur cantonal. Celles et ceux d'entre vous - nombreux, je n'en doute pas - qui ont pris connaissance du projet de plan directeur cantonal, qui est à l'enquête publique, auront constaté que nous proposons effectivement d'étudier l'opportunité, la possibilité, la faisabilité, de la création d'une zone industrielle à cet endroit. Il y a un grand nombre d'avantages à y réaliser de l'activité industrielle, mais il y a aussi des inconvénients qui, d'ailleurs, sont liés aux avantages.

En fait, les avantages, c'est essentiellement la localisation de cette parcelle, de ce périmètre, à proximité immédiate de plusieurs moyens de transport: l'autoroute, le rail et l'aéroport. Maintenant, cette proximité avec ces moyens de transport, c'est aussi un peu la faiblesse de ce périmètre, notamment la proximité de l'aéroport, qui, bien évidemment, ne présente pas que des avantages: il faut faire attention à conserver toute la performance et tout le potentiel de développement de l'aéroport. Et puis, s'agissant de l'accès à la route et au rail, même si ces deux moyens de transport sont très proches physiquement de la parcelle des bisons, le passage jusqu'à cette dernière n'existe pas aujourd'hui; il faudra prévoir cela, ce qui représente des projets de très longue haleine, notamment s'agissant d'une sortie d'autoroute ou d'un embranchement ferroviaire.

Donc on parle d'un horizon éloigné pour ce projet, raison pour laquelle je relativiserai quelque peu les propos de ceux qui font un lien direct entre le PAV et ce potentiel éventuel de création de zone industrielle. On n'est pas tout à fait dans les mêmes horizons de temps; on aura besoin de nouvelles zones industrielles bien avant que l'on en ait créé une à Colovrex pour délocaliser les entreprises du PAV, et on recherche d'autres terrains, d'autres endroits, d'autres zones pour ce faire. Alors, où vous avez accepté le déclassement des Cherpines-Charrotons, là une zone industrielle est prévue; du côté de la ZIMEYSA, nous envisageons également une extension; à Plan-les-Ouates, il y a encore du potentiel. Bref, il existe d'ores et déjà quelques possibilités de délocaliser les entreprises qui se situent aujourd'hui dans le périmètre du PAV.

A plus long terme, bien évidemment, nous devons penser au développement de notre industrie, au développement de notre économie, et nous aurons besoin, de manière continue, d'identifier de nouveaux terrains pour ce type d'activités économiques. Et c'est dans cet esprit-là principalement que nous proposons, et que nous proposerons, dans le cadre du projet de plan directeur cantonal, d'identifier ce périmètre comme étant à étudier.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes en procédure de vote.

Mise aux voix, la motion 1863 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 48 oui contre 27 non et 1 abstention.

Motion 1863