République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1712-B
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de MM. Gabriel Barrillier, David Amsler, Hugues Hiltpold, René Desbaillets, Jean-Marc Odier, Alain Meylan, Christophe Aumeunier, Luc Barthassat, Pierre Ducrest pour une politique de soumission et d'adjudication durable et non plus basée sur le seul prix

Débat

M. Gabriel Barrillier (R). Monsieur le président, chers collègues, après ce débat-fleuve et passionné, nous revenons sur terre ! Alors, le Conseil d'Etat nous rend un rapport; c'est le deuxième rapport sur la politique de soumission et d'adjudication conduite par les autorités. Si le premier rapport avait été considéré comme insuffisant, notablement insuffisant, je dois ici attester que la copie est acceptable. Sans entrer trop dans le détail, car je pense que nous n'avons pas tous la patience de rediscuter de problématiques relativement compliquées, je constate simplement que le rapport est complet. D'une part, il donne un inventaire bien fait des aspects juridiques et économiques de la politique de soumission et d'adjudication des travaux. Cela concerne des centaines de millions de francs par année, c'est donc quelque chose d'important.

Seconde observation, ceci est nouveau et je le dis en présence du chef du département: il y a des engagements, notamment en ce qui concerne la prise en compte des critères de la formation professionnelle - la règle des 5%; il y a les critères du développement durable, les critères de l'application des conditions sociales de rémunération. Sur ce dernier point, je dois dire que, depuis plusieurs années, le contrôle des conditions salariales, des conditions sociales en matière d'adjudications, sont effectivement appliquées. Et pourquoi sont-elles effectivement appliquées ? C'est parce que l'Etat n'est pas tout seul ! C'est parce que les partenaires sociaux font ce travail. Donc, sur ce plan-là, nous sommes satisfaits.

Le rapport rappelle également le rôle de la jurisprudence en matière d'AIMP. Evidemment, il y a des arrêts des tribunaux et la jurisprudence qui indiquent qu'il est clairement interdit de prendre uniquement en considération le prix pour l'attribution des marchés. Et ça, c'est vraiment fondamental, puisque les AIMP et les accords OMC prévoient qu'on donne la préférence à l'offre économiquement la plus avantageuse ! Et l'offre «la plus avantageuse», ça ne veut pas dire la moins chère ! L'offre la plus avantageuse, c'est celle qui tient compte d'un certain nombre de critères, à côté du prix - critère le plus important - critères que j'ai évoqués tout à l'heure, comme la formation professionnelle, et ceux liés au développement durable.

J'ajoute que l'Agenda 21, qui a été renouvelé et a fait l'objet d'un rapport examiné par la commission de l'économie, a mis le doigt sur cette problématique du respect de critères tels que les transports et la protection de l'environnement. En un mot comme en cent, j'aimerais vous dire, encore une fois, que ce rapport est positif et que sa conclusion est dynamique. Il fallait bien que je termine par un point un peu plus intéressant, pour dire qu'on souhaiterait que les crayons fournis pour nos séances de commissions soient, si possible, originaires du canton. Vous connaissez tous la marque...

Des voix. Caran d'Ache !

M. Gabriel Barrillier. Caran d'Ache, effectivement ! Ça tombait bien ou mal, mais, lorsque nous avons examiné le rapport sur le développement durable en commission de l'économie, nous avons pu voir que les crayons mis à disposition viennent de je ne sais où - il paraît qu'ils viennent de Chine ! Sur ce point, la centrale d'achats a des progrès à faire ! (Commentaires.) Je le dis ici, et ça n'a rien à voir avec le libre échange, il est inadmissible d'aller chercher des fournitures je ne sais où lorsqu'on a, à Genève, une fabrique de crayons qui est presque centenaire et mondialement connue ! (Applaudissements.) C'est vraiment une erreur qui a été faite !

Une voix. Ecologiste !

M. Gabriel Barrillier. Donc, le groupe radical va prendre acte de votre rapport, en souhaitant que vous appliquiez véritablement ses conclusions, qui sont, encore une fois, très positives.

Le président. Merci, je passe la parole à M. Bertrand Buchs.

M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le président. Le groupe démocrate-chrétien va prendre acte de ce rapport. Nous avons fait très attention à la première invite de la motion, sur la formation professionnelle et continue qui était pour nous essentielle. En lisant le rapport, la réponse au troisième point nous satisfait puisque la règle des 5% est introduite, ce qui est très important, et les entreprises qui vont former des jeunes pourront ainsi obtenir un avantage au niveau du marché. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Hiltpold.

M. Serge Hiltpold (L). Mesdames et Messieurs les députés, après un déclassement, un projet naît et il y a les adjudications de marché. Déposé il y a plus de trois ans, ce projet de motion s'inquiétant des conditions de soumission et d'adjudication qui constituent toujours un enjeu majeur pour les entreprises et les citoyens de notre canton, tant en termes d'emploi que sur les plans économique et de la formation professionnelle pour nos jeunes, est toujours d'actualité.

Les organismes et la clientèle privés ont la parfaite liberté de pratiquer leurs adjudications comme ils l'entendent, notamment en se basant sur les critères de compétence, de qualité, de formation professionnelle et d'application de mesures environnementales et une certaine proximité. Le privé place le curseur et prend ses responsabilités: c'est le libre arbitre dont je suis un fidèle défenseur.

Pour les collectivités publiques et s'agissant du contenu du rapport, il y a des éléments que j'aimerais clarifier et préciser. Dans les attestations de soumission, s'il est à mon avis important de prendre en compte la main-d'oeuvre, il faut considérer tout le personnel d'exploitation, et non le seul personnel administratif: il y a un tout dans une entreprise.

Actuellement, le coefficient de formation professionnelle admis est de 5%, et c'est ici que l'effort devrait être soutenu pour la formation. Premièrement, pour valoriser l'apprentissage à Genève, ce qui me semble être la volonté de la majeure partie de ce parlement, les entreprises ont besoin de travail pour honorer leur rôle formateur. Deuxièmement, concernant les matériaux, je pense qu'il est également nécessaire de soutenir certaines filières, notamment pour la mise en valeur de déchets, tels que le béton recyclé, par exemple, pour les infrastructures de travaux de tram et autres grosses infrastructures. Il y a d'ailleurs un projet, ECOMAT, qui a été soutenu par une motion récemment.

Finalement, et comme toile de fond, nous nous interrogeons sans cesse sur la traçabilité des produits, avec les labels «bio», sur le développement durable et sur l'impact environnemental. Transposons cela dans le concret en nous posant la bonne question et plaçons le curseur au bon endroit ! Qu'en est-il des prestations durables ? Il n'existe rien, et c'est peut-être là que la politique et «les politiques» ont leur carte à jouer avec des entreprises citoyennes, sans tomber dans un mercantilisme mal éclairé.

Mesdames et Messieurs les députés, nous prenons acte de ce rapport en appelant une politique volontariste et responsable. Je vous remercie de votre attention.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Serdaly Morgan.

Mme Christine Serdaly Morgan (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, en trois ans, la motion 1712 B a fait du chemin, l'Etat également, et c'est tant mieux ! Les critères et les instruments de l'Etat, dans sa politique de soumission et d’adjudication, sont aujourd'hui bien heureusement plus précis pour des adjudications qui ne sont plus basées uniquement sur le prix le plus bas.

Les efforts consentis par l'Etat sont importants et personne ne conteste qu'il reste toujours du chemin à faire. Etre convaincu et produire les outils nécessaires est évidemment essentiel. Toutefois, diffuser cette pratique et, surtout, influencer et inciter les communes, les partenaires de l'Etat et les entreprises en général, reste un défi. Adapter l'ensemble de ses propres pratiques également.

Cette motion, qui permet d’effectuer un bilan intermédiaire, concret, avant une prochaine discussion sur l'Agenda 21 et sa loi, donne ainsi une image plutôt réjouissante. Nous ne pouvons aussi que nous réjouir que la durabilité ne relève plus uniquement de critères environnementaux. De même, si la formation professionnelle, qui ne constitue pas encore un critère à part entière au regard des règles fédérales, ne sert encore qu'à départager des offres, elle pondère au moins la seule prévalence du prix. Mais, de la poule et de l’œuf… L'important est que la question du prix soit mise en regard d'un tel critère qui contribue à une responsabilité sociale des entreprises à l'égard de la vie locale.

On peut aussi espérer que la réalité des pratiques cantonales permettra à terme de changer la loi sur le marché intérieur de 1995 et d'adapter celle-ci aux nouvelles exigences de notre société en matière de durabilité, mais aussi à l’évolution du fonctionnement du marché avec sa globalisation accrue. En tous les cas, on peut saluer la détermination du Conseil d'Etat avant que la LMI n’évolue !

On peut toutefois relever que c'est surtout dans le domaine de la construction et dans les pratiques de la centrale d'achats de l'Etat que les résultats sont au rendez-vous. Le secteur des services, les mandats concernant d'autres secteurs devront aussi suivre et s'adapter, et nous attendons du Conseil d'Etat qu'il œuvre, dans ces domaines, avec autant de succès et en une collaboration aussi active avec les secteurs concernés, à l'instar de ce qu'il a entrepris pour la construction. Dans cette perspective, le groupe socialiste, acceptera ce rapport.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Gauthier.

Mme Morgane Gauthier (Ve). Je vous remercie, Monsieur le président. Le groupe des Verts fait une lecture bien plus mitigée de ce rapport émis par le Conseil d'Etat. Bien que les Verts aient largement soutenu cette motion issue des rangs libéraux et radicaux, nous attendions en effet autre chose du Conseil d'Etat. Nous attendions des critères précis et une modification du règlement d'application. Et là, nous sommes très déçus parce que nous ne voyons rien !

Nous avons écouté avec beaucoup d'attention les préopinants, qui ont dit que l'Etat avait bien fait du chemin ces trois dernières années, cela sous l'impulsion de ce Grand Conseil, c'est vrai, grâce à la loi sur l'Agenda 21, c'est vrai aussi, et grâce à une multitude de nouvelles normes mises en place pour la protection de l'environnement. Effectivement, le critère de formation professionnelle est représenté dans les critères d'adjudication.

Les critères environnementaux, en revanche, ne le sont pas. Ils sont considérés comme de la paperasse administrative, un surplus de travail pour les entreprises, alors que pour nous, bien évidemment, c'est le contraire. C'est un gage de qualité, une plus-value pour le canton, une plus-value lors de l'adjudication !

Ce soir, nous sommes tous d'accords sur le fait que le prix ne doit pas être le seul élément ou l'élément déterminant pour l'attribution d'un marché public, mais d'autres éléments doivent le pondérer. Or, malheureusement, les critères ne sont pas définis. Nous n'avons vu aucune modification des règlements d'application des AIMP, et c'est bien là que le bât blesse ! C'est pour cette raison que les Verts refuseront d'adopter ce rapport du Conseil d'Etat. (Brouhaha.) Nous estimons qu'il ne répond pas aux trois invites que vous avez formulées, Messieurs ! Je relis votre invite: «à mener dorénavant une politique d'adjudication des marchés publics [...] en fixant des critères d'adjudication [...]» ! Aujourd'hui, les critères d'adjudication au niveau environnemental ne sont pas fixés !

Voilà les raisons pour lesquelles nous refuserons ce rapport du Conseil d'Etat et nous vous proposons de lui renvoyer la copie, pour qu'il nous propose une modification du règlement d'application des AIMP. Je tiens à vous dire encore une chose, Mesdames et Messieurs les députés, c'est que d'autres cantons, en Suisse alémanique, sont bien plus exigeants que le nôtre en ces domaines-là. Je parle de Zurich, je parle des Grisons. Bien sûr, tout est plus compliqué et tout est plus difficile à Genève, mais ces cantons ont réussi à faire inclure et appliquer des critères environnementaux plus rigoureux, plus précis qu'ailleurs. Alors qu'à Genève on nous dit que ce n'est pas possible, à Zurich et dans le canton des Grisons, c'est possible !

Alors là, nous nous interrogeons et proposons au Conseil d'Etat d'aller voir ce qui se passe ailleurs, ce qui se passe dans d'autres cantons, en Suisse allemande notamment, et, pour une fois, de prendre exemple sur ce qui se passe de l'autre côté de la Sarine. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Stauffer.

M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames, Messieurs, chers collègues, vous avez joué aux apprentis sorciers, vous avez joué avec la boîte d'allumettes, et aujourd'hui vous avez mis le feu ! Cette motion est bien la preuve de votre impuissance, de votre inefficacité, par rapport à vos slogans habituels ! Mesdames et Messieurs les libéraux, Mesdames et Messieurs les radicaux, et de temps en temps les PDC, oui, vous prônez à longueur d'année l'ouverture des frontières, la libre concurrence. Maintenant, vous dites qu'il faut considérer les performances en termes d'emplois, en termes de salaires, pour toutes ces PME qui doivent gagner de l'argent. Et puis, oups, les marchés publics vous passent sous le nez ! Et pourquoi ? Parce que vous n'êtes pas concurrentiels par rapport aux entreprises européennes ! Vous savez, celles que vous chérissez à chaque élection - «Vive l'Europe !», «La Suisse doit entrer dans l'Europe !», n'est-ce pas, Mesdames et Messieurs les libéraux et radicaux ?! L'économie... Eh bien, aujourd'hui, vous n'êtes pas armés pour lutter contre ces sociétés et vous vous inventez une motion pour demander des critères plus «citoyens». J'ai entendu ce mot venant d'un libéral ! Excusez-moi, pour le Mouvement Citoyens Genevois, c'est ici que ça se passe ! Il faut des critères plus genevois. Il faut des critères pour la formation. Tout ça pour quoi ? Pour bloquer les entreprises européennes, qui sont plus performantes que vous ! Alors, à force de jouer les apprentis sorciers, cette fois, le boomerang, vous vous l'êtes pris en pleine figure !

Finalement, les citoyens constateront que la politique du MCG n'est pas si à côté de la plaque que cela quand elle veut préserver l'emploi local face à la «surconcurrence» européenne, lorsqu'il s'agit de favoriser les citoyens genevois, envers et contre tout, dans l'octroi des emplois ! C'est quand même magique, il nous a fallu cinq ans pour vous prendre la main dans le sac, en train de venir pleurer avec cette motion et de demander des critères plus genevois pour nos entreprises ! N'est-ce pas, Monsieur Barrillier, président du syndicat de la construction ou de je ne sais plus quelle association...

Le président. Monsieur Stauffer, vous vous adressez à la présidence !

M. Eric Stauffer. Oui, Monsieur le président, je m'adresse aussi un petit peu à l'assemblée, mais enfin, profitez, je crois que c'est votre dernière séance pour fustiger le MCG...

Le président. L'avant-dernière !

M. Eric Stauffer. ...ou pour fustiger le modeste député que je suis ! Alors, Mesdames et Messieurs, qu'est ce qui se passe ? Sous le sapin de Noël, on n'a plus mis votre petit cadeau: quelques attributions de marchés publics ? Oui, c'est ça ! Eh bien, nous allons suivre les Verts, c'est la deuxième fois en vingt-quatre heures... (Exclamations.)

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !

M. Eric Stauffer. Je vais conclure, Monsieur le président ! Et nous n'allons pas prendre acte de ce rapport. Mieux, Mesdames et Messieurs: nous demandons le renvoi en commission pour l'étudier plus à fond encore.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Desbaillets. (Commentaires.) C'est déjà demandé ! Monsieur Desbaillets, vous avez la parole.

M. René Desbaillets (L). Je pense que vous vous êtes étonnés de voir que 25% des signataires de cette motion sont des paysans. Qu'est-ce que des paysans viennent se mêler d'AIMP et d'adjudications ? Eh bien, au moment du dépôt de cette motion, mon collègue Luc Barthassat - qui était encore sur ces bancs avant de passer au Conseil national - et moi-même avons décidé de montrer que nous soutenions l'industrie genevoises et les entreprises genevoises, pour que des critères plus éthiques, environnementaux, et des critères liés à la formation professionnelle notamment soient pris en compte dans les constructions, car nous sommes confrontés perpétuellement au problème de la proximité et de la qualité, avec la concurrence de produits qui viennent du monde entier.

C'est pour cela que, Monsieur le président, vous avez parmi les signataires de cette motion des agriculteurs, et nous voulons, comme les entreprises, ne plus voir l'Hôpital cantonal chercher et acheter du lait à Saint-Gall parce qu'il est un centime moins cher...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. René Desbaillets. ...ou voir la Ville de Genève servir du vin espagnol sur un stand genevois ! C'est un scandale, et nous soutiendrons donc cette motion !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Meissner. (Commentaires.) D'accord, Madame !

Mme Christina Meissner (UDC). Merci, Monsieur le président. L'UDC sourit, car ce sont les mêmes, qui hier réclamaient ardemment l'ouverture des frontières et des marchés, qui s'offusquent aujourd'hui lorsque leurs entreprises ne sont pas choisies. L'UDC pourrait rire et dire que, ma foi, ces offusqués mangent leur pain noir... Mais l'UDC se soucie de la Suisse, des Suisses et des entreprises suisses. Aussi, nous nous réjouissons des efforts faits par l'Etat dans sa politique en matière d'adjudications et de soumissions.

Mais malheureusement, comme cela a déjà été dit, l'Etat promet ! Or, en matière de critères, on n'a pas vu grand-chose venir. Les critères environnementaux n'ont pas été déterminés. Et c'est regrettable. Parce qu'ils existent ailleurs et qu'il suffirait de s'en inspirer ! Quant à la sous-traitance, le rapport de la Cour des comptes à ce sujet est éloquent: on est loin des pratiques vertueuses en ce qui concerne la main-d'oeuvre employée par ces entreprises adjudicatrices.

Ainsi, pour ces deux raisons, environnementales et sociales, l'UDC vous propose également de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Bolay, à qui il reste quarante secondes.

Mme Loly Bolay (S). Merci, Monsieur le président ! Attendez, j'ai un problème avec mon fauteuil... (Mme Loly Bolay tente de dégager sa veste coincée dans le siège.) C'est M. Tornare ?

M. Manuel Tornare. Ah non, ce n'est pas moi ! (Rires. Commentaires.)

Le président. Monsieur Tornare... (Brouhaha.)

Mme Loly Bolay. Voilà ! Merci, Monsieur le président !

Le président. Je vous en prie !

Mme Loly Bolay. Moi, j'adore le MCG lorsque M. Stauffer nous donne des leçons de morale ! J'aimerais quand même faire une remarque à M. Stauffer au sujet de son «bulletin paroissial», le journal du MCG: vous l'imprimez où, votre bulletin, Monsieur Stauffer ?

Une voix. Dans le canton de Vaud !

Mme Loly Bolay. «Dans le canton de Vaud !»... Pourquoi ? (Commentaires.) Parce que c'est bien meilleur marché ! (Commentaires.)

M. Eric Stauffer. Edipresse. Chez Edipresse ! (Brouhaha.)

Mme Loly Bolay. Alors arrêtez ! Arrêtez de donner des leçons de morale ! Vous l'imprimez dans le canton de Vaud parce que vous y obtenez des prix ! Voilà, Monsieur le député !

M. Eric Stauffer. Edipresse Genève ! (Brouhaha.)

Le président. Merci, Madame la députée. Pour conclure, je passe la parole à M. Barrillier. (Brouhaha.)

Des voix. Hou ! Dans le canton de Vaud ! (Le président agite la cloche.)

M. Gabriel Barrillier (R). Monsieur le président, chers collègues... (Brouhaha. Commentaires.)

Le président. Allez-y, Monsieur Barrillier ! Monsieur Stauffer, c'est M. Barrillier qui a la parole !

M. Gabriel Barrillier. Loin de nous de penser que ce thème allait enflammer cette enceinte ! Pourtant, c'est la seconde fois que ce rapport est soumis à notre assemblée. J'aimerais juste rappeler que notre parti, en tout cas sur le plan national, n'est pas favorable à l'adhésion à l'Union européenne. Nous sommes favorables à la poursuite des relations bilatérales, qui ont été prônées par l'UDC en 1992. (Commentaires.) Celles-ci sont plutôt oubliées pour le moment. Ça, c'est la première chose.

La deuxième chose, c'est que cet AIMP est un accord qui vise d'abord et en premier lieu à assurer l'égalité de traitement à l'intérieur de la Suisse. On a parlé d'imprimeries situées dans le canton de Vaud, entre autres. Il s'agit en fait d'avoir une politique d'égalité de traitement pour les entreprises et pour les travailleurs en Suisse.

Troisièmement, en ce qui concerne les conditions de travail et les conditions de concurrence - je précise en passant que je suis à la retraite depuis deux mois, je ne suis donc plus président, secrétaire général, etc. (Commentaires.) Toutefois, je puis vous assurer que, à performances égales, les entreprises que je connais le mieux, nos entreprises, sont parfaitement capables d'être concurrentielles. Effectivement, nous avons à Genève des conventions collectives d'avant-garde qui font que le coût du travail est légèrement plus élevé. Dès lors, je puis assurer ici qu'en tout cas sur ce plan-là, sur ce critère-là, les contrôles nous permettent de garantir cette égalité de traitement. D'ailleurs, on va peut-être en parler avec la motion suivante.

C'est vrai que pour les critères environnementaux, de transports, pour les critères de développement durable, il y a un effort à faire. Je l'ai dit en prenant comme exemple les crayons; c'était un peu facile, mais enfin, il faut quand même le dire ! Là, il faut que les responsables dans les départements, qui préparent les documents de soumission et d'adjudication - et la centrale d'achats, pour d'autres produits - prennent conscience de cette dimension ! Parce que ça ne sert à rien de voter des lois sur le développement durable si on ne les applique pas !

Donc, je l'ai dit tout à l'heure dans ma prise de position, ce deuxième rapport est une copie acceptable et il manifeste les bonnes volontés du gouvernement; toutefois, maintenant, on l'attend au contour !

Une voix. Faut l'imprimer à Genève ! (Commentaires.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Est-ce qu'il reste encore des temps de parole... Pour Mme Engelberts, qui l'a demandée ? (Remarque.) Non, c'est fini. Pour Mme Gauthier, c'est fini aussi. Pour M. Stauffer aussi. C'est parfait ! (Remarque de M. Eric Stauffer.) Non, pas du tout ! On passe la parole à M. Muller.

M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Ce n'est pas fini pour moi ?

Le président. Non, vous pouvez commencer ! (Rires.)

M. Mark Muller. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, quelques mots sur cette politique d'adjudication de l'Etat de Genève. Tout d'abord, j'ai trouvé les propos de Mme Gauthier sévères à l'égard du Conseil d'Etat - et même à l'égard du Grand Conseil, dirais-je. D'une part, le Conseil d'Etat a modifié le règlement de la centrale commune d'achats par l'article 9, alinéa 2, qui dit ceci: «La centrale adopte une politique d'achat conforme aux critères du développement durable, en favorisant notamment l'utilisation économe et rationnelle des ressources naturelles». Mais ça n'est pas tout ! Votre Grand Conseil a modifié la loi sur l'action publique en vue d'un développement durable - la loi sur l'Agenda 21 - pour exiger de l'Etat qu'il respecte les principes du développement durable dans le cadre de sa politique publique d'investissements. Les textes légaux et réglementaires applicables ont donc bel et bien été modifiés pour orienter notre politique de marchés publics dans le sens que vous souhaitiez.

Maintenant, quelques éléments pour évoquer le dossier des crayons qui, effectivement, parle à tout citoyen genevois parce que nous avons une entreprise éminemment connue et extrêmement bien implantée dans notre économie, entreprise qui produit des crayons, des stylos et autres plumes. Le problème est que les entreprises qui souhaitent soumissionner pour nous vendre des produits - qu'il s'agisse de crayons, qu'il s'agisse d'imprimantes, qu'il s'agisse d'oeufs de Pâques ou autres denrées - doivent remplir un certain nombre d'attestations, doivent fournir un certain nombre de pièces attestant que les denrées en question sont en conformité avec les conventions collectives et un certain nombre de normes en matière d'assurances sociales. Il se trouve que certaines entreprises ne souhaitent pas remplir ces formulaires, refusent de le faire, considérant ne pas avoir à se soumettre à ce type d'exigences qui sont prévues par nos lois et règlements. Cette attitude réfractaire, malheureusement, les exclut de nos procédures de marchés publics, ce que personnellement je regrette beaucoup. Mais nous ne désespérons pas de reprendre le dialogue avec ces entreprises, pour qu'elles puissent à nouveau soumissionner. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons donc voter d'abord sur la demande de renvoi au Conseil d'Etat. Si cette demande est acceptée, la motion sera renvoyée au Conseil d'Etat. Sinon, nous prendrons acte de ce rapport.

Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur la motion 1712 est rejeté par 42 non contre 40 oui et 2 abstentions.

Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 1712.