République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 10447-A
Rapport de la commission judiciaire et de la police chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat sur la prostitution (LProst) (I 2 49)

Premier débat

Le président. Nous sommes au point 79 de notre ordre du jour, que les chefs de groupe ont accepté d'ajouter aux extraits.

Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC), rapporteuse. Mesdames et Messieurs les députés, permettez-moi tout d'abord de remercier les commissaires, qui ont travaillé avec le plus grand respect et dans un état d'esprit très constructif, pour aboutir à un vote quasiment unanime de ce projet de loi, qui est extrêmement important quand on doit se positionner dans le domaine de la lutte contre la prostitution forcée. Ce projet de loi va permettre à la police genevoise d'avoir un outil de travail encore plus efficace et performant pour offrir une meilleure protection aux victimes de traite des êtres humains notamment, ainsi que d'actes de contrainte et d'usure. C'est l'ambition de cette loi, et je me permets de réitérer mes remerciements en tant que rapporteure et de relever encore une fois l'état d'esprit extrêmement respectueux qui a présidé aux travaux de la commission. Nous devons soutenir à l'unanimité cette loi qui est extrêmement utile, voire indispensable, pour que la police genevoise puisse faire son travail dans les meilleures conditions et ainsi protéger les victimes de la prostitution forcée.

Mme Loly Bolay (S). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste salue ce projet de loi, même si les amendements que nous avons proposés en commission n'ont pas tous été acceptés. En effet, je crois que Genève fait un grand pas en avant, comme d'ailleurs l'ont fait d'autres cantons romands, à l'instar des cantons de Vaud ou de Neuchâtel.

La rapporteure l'indique dans son rapport, ce projet de loi va garantir l'exercice de la prostitution, garantir que les personnes qui exercent ce type d'activité soient mieux protégées et garantir que la prostitution dite de salon ou d'escorte ait un cadre. Cela va ainsi permettre à l'autorité de contrôle, c'est-à-dire à la brigade des moeurs, de véritablement faire un travail avec des mesures coercitives. C'est extrêmement important parce que, on le sait, cette activité a pris énormément d'ampleur dans notre canton, particulièrement depuis que l'on a voté en faveur des bilatérales.

On a inscrit à l'article 4 de ce projet de loi qu'il faut être majeur à Genève pour pouvoir exercer la prostitution. Je rappelle que, dans le code pénal, cette possibilité existe pour les jeunes dès 16 ans, et j'aimerais dire qu'aujourd'hui plusieurs demandes sont faites à Berne pour que cette activité ne puisse être exercée que par les plus de 18 ans. Apparemment, des conseillers nationaux souhaiteraient même que la Suisse s'aligne sur certains pays européens qui ont interdit ces pratiques aux moins de 21 ans. Pourquoi ? Parce qu'aujourd'hui de nombreux jeunes se prostituent pour pouvoir acheter de petites choses, pour faire des voyages, pour avoir un portable plus moderne, etc. Donc je pense que ce serait une bonne chose que de s'aligner sur certains pays européens, mais nous, nous ne pouvons rien faire, parce qu'il faut suivre le droit fédéral.

En résumé, je trouve que cette loi est déjà un grand pas, même si nous déplorons que la commission pluridisciplinaire, qui a réalisé un travail énorme, n'ait pas trouvé une base légale à l'article 23, parce que cela aurait été une reconnaissance énorme vis-à-vis de ces associations qui ont accompli un véritable travail dans ce domaine.

Pour conclure, j'aimerais dire que si l'on veut que cette loi soit appliquée avec pertinence sur le terrain, il faudra aussi - et le groupe socialiste l'a indiqué en commission - que la brigade des moeurs puisse être dotée d'un effectif supplémentaire.

Le groupe socialiste votera donc ce projet de loi, même s'il regrette que certains amendements n'aient pas été adoptés.

M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs les députés, c'est nous qui avons voulu, il y a quelque temps, que le Conseil d'Etat nous propose une loi sur la prostitution. En effet, nous lui avons renvoyé une motion dans laquelle, sur suggestion de la commission judiciaire, nous demandions que l'actuel règlement soit remplacé par une loi moderne. Il s'agit effectivement d'un règlement désuet, qui ne s'applique véritablement qu'à la prostitution de rue, alors que nous savons tous que ce mode de prostitution n'est aujourd'hui plus le mode principal, et c'est l'un des mérites les plus importants de cette loi que nous allons voter maintenant que de combler des lacunes dans le domaine de la prostitution de salon et dans celui de la prostitution d'escorte.

La commission judiciaire - et Mme la rapporteure l'a rappelé tout à l'heure - a travaillé dans un état d'esprit positif mais rigoureux, puisqu'elle a notamment renforcé, et souvent de manière notable, les conditions qui sont posées à l'exercice non pas de la profession en tant que telle, mais des responsabilités, par exemple des tenanciers de salons ou des responsables d'entreprises d'escorte. Il y aura désormais des conditions strictes qui garantiront notamment la possibilité pour les autorités de mieux vérifier sur le terrain les conditions d'exercice de la prostitution.

Je n'aimerais pas terminer sans faire allusion à un amendement qui a été proposé par les libéraux et dont je suis, je dois le dire, assez fier qu'il ait été accepté par la commission et qu'il figure désormais dans le projet de loi: il s'agit de l'amendement qui en modifie le champ d'application. En effet, Mesdames et Messieurs, vous savez que la Suisse, à l'instar de quelques pays nordiques, est en avance dans le domaine de l'assistance sexuelle aux personnes handicapées. A teneur de la loi telle qu'elle avait été proposée, ces assistants sexuels auraient été considérés comme s'adonnant à la prostitution et soumis aux mêmes règles. Or nous avons estimé que cette activité méritait non pas une réglementation en tant que telle, parce que c'est une activité nouvelle et qui ne peut pas encore faire l'objet d'une réglementation, mais une reconnaissance particulière, sous la forme d'une exclusion du champ d'application de cette loi. C'est, je crois, une façon pour Genève d'être en avance sur la Suisse, qui elle-même est en avance sur le reste de l'Europe sur ce point. Au nom des libéraux, je vous recommande donc d'accepter ce projet de loi.

M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe MCG va soutenir ce projet de loi. En effet, comme cela a été dit par mes préopinants, le travail a été accompli d'une manière vraiment sérieuse, et il faut relever que tous les aspects ont été étudiés de façon approfondie. Le MCG a aussi pu faire passer un amendement qui lui tenait à coeur, à savoir que les exploitants de salons de massage doivent faire fonctionner leurs établissements d'une manière effective, c'est-à-dire être présents sur place à tout moment pour répondre à toute réquisition et requête de la police ou d'autres autorités.

Nous sommes contents que les socialistes aient remis ce projet de loi à l'ordre du jour des extraits et qu'il soit traité aujourd'hui, car la brigade des moeurs attend impatiemment cette loi pour pouvoir intervenir, puisque les salons de massage et les salons d'escorte ne sont actuellement sous aucun contrôle de l'autorité. Il est donc vraiment important que, par rapport à ce phénomène, on puisse régler la question, raison pour laquelle nous vous encourageons vivement à soutenir ce projet de loi, comme cela a été le cas en commission.

Mis aux voix, le projet de loi 10447 est adopté en premier débat par 71 oui (unanimité des votants).

La loi 10447 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 10447 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 75 oui (unanimité des votants). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Loi 10447