République et canton de Genève

Grand Conseil

P 1654-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition : Pas de squatter au 28, route des Franchises
Rapport de majorité de Mme Béatrice Hirsch (PDC)
Rapport de minorité de M. Alain Etienne (S)

Débat

Le président. Nous sommes au point 46 de notre ordre du jour. Y a-t-il quelqu'un au PDC pour remplacer Mme Hirsch ? (Remarque.) C'est Mme Guichard, qui vient à la table des rapporteurs. Voulez-vous prendre la parole, Madame la députée ? Non. Je donne alors la parole à M. Etienne.

M. Alain Etienne (S), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, effectivement, c'est un peu spécial, car j'aurais bien voulu entendre quelques commentaires de la part de la rapporteure de majorité. Je vais toutefois vous donner quelques éléments, parce que, pour la minorité, l'heure est tout de même grave. J'ai essayé de l'expliquer dans mon rapport, cette majorité, composée du PDC, des radicaux, des libéraux et de l'UDC, se prépare en fait, si la motion est renvoyée au Conseil d'Etat, à cautionner des pratiques illégales.

M. Meyrat - pour le citer, puisque c'est lui qui a déposé cette pétition - qui est directeur administratif de la Fondation des logements pour personnes âgées et isolées - la FLPAI - demande tout simplement à l'Etat «d'approuver les mesures prises par la FLPAI pour ne pas inciter les squatters à occuper l'immeuble» sis au 28, route des Franchises - ce fameux immeuble qui a défrayé la chronique. Cette pétition a d'ailleurs un titre terrible: «Pas de squatters au 28, route des Franchises». Avec un titre pareil, pas de problème pour récolter des signatures auprès des personnes âgées dans le quartier !

Quelles sont ces mesures ? Le dépôt des boiseries des fenêtres pour murer ces dernières et le percement intentionnel du toit pour que le bâtiment s'abîme beaucoup plus rapidement, alors qu'il y avait en même temps un recours sur une demande de classement qui était en cours d'instruction. Donc M. Meyrat ne pouvait pas, au nom de la FLPAI, agir comme il l'a fait ! Et notre parlement ne peut pas dire à la FLPAI: «Oui, nous approuvons ce que vous avez fait, même si c'est illégal»... Nous ne pouvons pas envoyer ce signal au Conseil d'Etat.

La majorité fait également le procès de l'administration, alors que c'est le Tribunal fédéral qui a demandé au Tribunal administratif de produire une expertise financière pour la rénovation du bâtiment de ce fameux 28, route des Franchises. Or cette expertise a été demandée à un expert indépendant, non à l'administration cantonale ! Alors oui, il y a la crise du logement; oui, il faut construire; mais l'Entente ne peut pas critiquer l'administration quand elle n'est pas en cause. Là, il y a eu erreur d'interprétation.

J'aimerais aussi, dans le cadre de ce débat, relever que, non, tous les habitants de la cité Vieusseux ne sont pas en faveur de la destruction de cet immeuble ! Oui, un projet de construction de logement est possible tout en maintenant ce bâtiment. Cet immeuble est un rare témoin de l'architecture du mouvement moderne à Genève, et il doit être conservé. Plus grave, c'était l'une des conditions de l'autorisation de construire du 15 novembre 1985, et j'ai produit dans mon rapport de minorité l'autorisation de construire qui avait été donnée à l'époque. Et cette autorisation de construire mentionne qu'il faut absolument maintenir le 28, route des Franchises ! Alors, si la FLPAI a pu construire son nouvel immeuble en démolissant la «Cité-Vieillesse», c'était à la condition de garder le numéro 28.

Les partis de la minorité ont fait la proposition de geler cette pétition, car il y avait une procédure juridique en cours...

Le président. Il faudra terminer, Monsieur le député.

M. Alain Etienne, Je termine tout de suite ! ...c'est une pratique courante de la commission des pétitions. Cette proposition a été refusée. Il y a également eu le refus de l'audition du directeur du Service des monuments et des sites, pour qu'il nous explique où en était la demande de classement. Voilà pourquoi nous ne ferons pas le débat ici sur la protection du patrimoine. Mais il est faux de vouloir renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, car il y a eu des pratiques illégales. Et c'est pour cela que la minorité vous demande de classer cette pétition. Je vous remercie.

M. René Desbaillets (L). Je pense que cette pétition est l'exemple même des abus de la Société d'art public dans notre république. Imaginez-vous, chers collègues, un immeuble qui date des années 1950, comme l'a relaté M. Etienne, un immeuble où il n'y a pas de sanitaires privatifs, mais des WC et des douches à l'étage. Et la Société d'art public voudrait conserver cet immeuble pour un maintien du patrimoine, mais surtout pas pour y habiter elle-même ! On va installer là je ne sais qui, mais surtout pas ces gens-là. Ce qu'il y a de sûr, c'est que dans notre canton, à force d'user des possibilités juridiques pour déposer des recours, faire opposition, etc., cela fait depuis 2003 que la FLPAI attend l'autorisation de démolir cet immeuble. Plus exactement, elle avait eu l'autorisation, mais elle attend l'issue du recours...

Je vois que M. Meyrat doit protéger cet immeuble pour empêcher les squatters d'y pénétrer. Alors quelle solution adopter ? Engager des Securitas, comme l'a dit le groupe de gauche en commission des pétitions, pour empêcher les squatters d'entrer dans l'immeuble ? Depuis 2003, si vous faites le calcul, cela ferait plus d'un million de frais de Securitas pour empêcher les squatters d'entrer dans cet immeuble. Qu'a fait M. Meyrat ? Il a tout simplement démonté les huisseries et les portes et il a muré les fenêtres afin que l'on ne puisse pas entrer. Non seulement je suis opposé - personnellement, de même que mes collègues majoritaires de la commission - à ce qu'une amende soit infligée à M. Meyrat, mais je pense qu'au contraire on doit lui donner une subvention pour avoir conservé et mis de côté les huisseries, les fenêtres, les volets et tout ce que vous voudrez que la Société d'art public juge comme un élément inoubliable de notre république.

Je crois qu'il faut maintenant arrêter de faire du juridisme et passer à la pratique ! Ce dont on a besoin à Genève, c'est de logements. Donc, le 28 des Franchises doit être rasé au plus vite afin que l'on puisse construire de nouveaux logements. Dans l'ensemble de ce quartier des Franchises, à l'heure actuelle, il y a de très beaux immeubles, et arrêtez de vouloir conserver ce qui n'est pas conservable !

M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe radical va bien évidemment soutenir le renvoi au Conseil d'Etat. Je vous rappelle la teneur de cette pétition, qui tient en une ligne: «Les soussignés demandent à l'Etat d'approuver les mesures prises [...] pour ne pas inciter les squatters à occuper l'immeuble cité.» On ne parle que de cela.

Vous trouverez l'historique dans le rapport. En juin 2007, résiliation des baux pour le 31 décembre 2007. Ensuite, accompagnement des locataires pour la recherche de nouveaux logements. Puis infractions en nombre, alors le propriétaire a placé des panneaux pour interdire l'entrée; ils ont été démolis. Par la suite, décision de murer les ouvertures et de peindre les murs pour améliorer l'esthétique.

Le propriétaire demande que sa propriété soit protégée. Nous allons donc simplement suivre ce que souhaitent les pétitionnaires: demander à l'Etat d'approuver cette mesure. Et nous vous remercions de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.

Mme Michèle Künzler (Ve). M. Hohl l'a rappelé, il ne s'agit pas de parler du classement de cet immeuble. Personnellement, je n'y suis pas favorable. L'immeuble est certainement extrêmement intéressant et il avait été prévu d'être maintenu. Maintenant, la question porte sur le classement de cette pétition.

Cette dernière, il faut le savoir, demande simplement de revenir sur une amende administrative, infligée à juste titre. En effet, il est interdit d'enlever les huisseries et de murer des logements pendant que d'autres locataires sont encore dans l'immeuble ! Or cet immeuble n'était pas entièrement vide: il y avait des locataires en place, et ce n'est pas ainsi qu'il faut agir... (Remarque.) Si, il y avait encore des locataires en place ! A la fin, tout le monde est parti, mais la méthode utilisée est complètement stupide. Actuellement, il y a des possibilités de faire recours à la Ciguë, une association d'étudiants qui, avec des baux de six mois en six mois, occupent les logements. Cela, on le fait. Toutes les autres fondations ou propriétaires font appel à ces logements d'urgence pour les étudiants. On aurait ainsi pu loger, tout à fait tranquillement, en attendant de trancher sur le recours concernant la conservation de ce patrimoine.

Peut-être faut-il aussi réfléchir sur l'esthétique. Il est vrai qu'à l'époque on avait fait appel à des architectes extrêmement renommés pour construire une cité destinée au logement social. Actuellement, c'est simplement de la densification: on fait des m2  et des m3 sans réflexion esthétique. Peut-être faudrait-il creuser là aussi, mais ce n'est pas l'objet de cette pétition.

Cette pétition doit être classée, parce que nous n'avons pas, nous, à interférer avec les amendes administratives: elles sont infligées à juste titre ! Et si elles ne le sont pas, les personnes concernées peuvent parfaitement faire un recours administratif ! Mais pas une pétition ! Ce n'est pas à nous de déterminer si une amende est justifiée ou non. A un moment donné, il faut suivre des procédures légales, et rien d'autre. Par conséquent, cette pétition doit simplement être classée, quoi que l'on pense de cet immeuble et de toute la procédure.

Mme Lydia Schneider Hausser (S). Je tenterai de ne pas répéter tout ce qui s'est dit jusqu'à maintenant. On a effectivement un problème de logement. Le territoire genevois rétrécit. Si l'on part du principe que soit les immeubles sont habités - et c'est bien - soit les immeubles ne le sont pas - et c'est inadmissible - on a quand même toujours une zone grise à Genève. Alors quand il s'agit d'occupation illicite - surtout des squats, mais pas seulement: il y a aussi des personnes en instance de devoir quitter leur logement parce qu'elles n'arrivent plus à le payer - les bancs d'en face sont très sensibles, cela va très vite et on parle beaucoup.

Par contre, de l'autre côté... Actuellement, on insiste non seulement au sujet de cet immeuble, mais de beaucoup d'autres à Genève. Je vous demande d'aller voir Jipeka, qui est en désuétude totale, et les Pâquis, où des immeubles à ne plus pouvoir les compter sont laissés dans un état inadmissible, seulement parce que l'on ne veut pas que des gens, des étudiants ou même des squatters, occupent ces surfaces pour les habiter. Eh bien là, on se trouve dans une zone grise de principes. Pour cet immeuble-là, par exemple, cela consiste à résilier des baux, à ne pas remplacer les gens ou à ne pas leur permettre de profiter du local et à saborder les locaux. Alors oui, il y a eu amende, et c'est de cela que l'on parle. Et quand il s'agit de cette zone grise provenant de propriétaires ou de gérants d'immeubles, là il faudrait se taire, là il faudrait enlever les amendes qui ont été infligées de manière juste par l'administration, à qui on demande de faire un travail égal dans toutes les situations ?! C'est inadmissible ! Nous refuserons ce principe-là. C'est pourquoi nous classerons la pétition.

M. Pascal Pétroz (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, en somme, les tenants du rapport de minorité nous expliquent ce soir, sans le dire très clairement, que squatter, ce n'est pas très bien, mais que, en même temps, mettre des squatters dehors, comme cela a été fait, c'est encore moins bien. On nous explique également que la décision que notre Grand Conseil pourrait prendre aurait pour effet de revenir sur les amendes administratives qui ont pu être infligées. Mais en réalité, ce soir, nous pouvons prendre toutes les décisions que nous voulons, aucune d'entre elles ne va faire en sorte qu'une amende administrative qui a été infligée soit levée. Je crois qu'il faut le dire clairement ! Des amendes administratives ont été infligées. La personne considérée a fait valoir ses droits dans le cadre d'une procédure judiciaire - c'est son droit le plus strict - et c'est à la justice de faire son travail, et non au parlement.

Le débat que nous avons ce soir est par conséquent politique et symbolique. Le message et le titre de cette pétition l'expriment d'ailleurs bien, c'est en ces termes que le débat se pose. Finalement, c'est un débat sur le squat. Voilà l'enjeu ! Les tenants du rapport de majorité ont décidé par leur vote d'exprimer une opinion politique qui consiste à dire que, à Genève, il n'est plus possible, comme il l'a été auparavant, de squatter des immeubles, et qu'il appartient à un propriétaire immobilier de prendre les mesures adéquates et utiles, dans le respect strict de la loi, pour protéger son bien immobilier. C'est la raison pour laquelle le groupe démocrate-chrétien suivra le rapport de majorité.

M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, on l'a déjà dit à maintes reprises, le MCG est totalement opposé à toute occupation illicite d'immeuble. Il va de soi, en revanche, que nous ne pouvons soutenir cette pétition, et nous en demandons également le classement. Je relis l'invite: «Les soussignés demandent à l'Etat d'approuver les mesures prises par la FLPAI pour ne pas inciter les squatters à occuper l'immeuble cité.» Il faut dire que l'on demande, contrairement à ce qu'a dit M. Hohl, d'approuver la construction de ces murs - illégaux, puisque sans autorisation. Pourtant, en tant que députés, nous votons des lois. Vous les votez, vous les approuvez, et pour certains cas, quand cela vous arrange, parce qu'il s'agit d'un propriétaire, alors nous devrions faire fi de ces lois ?! Il n'est pas admissible au sein d'un parlement de désapprouver un département qui applique les lois et règlements. M. Meyrat a reçu une amende administrative, il n'a qu'à la payer et à se conformer à cette décision.

D'autre part, le MCG est aussi en défaveur du classement de cet immeuble, et il souhaite même qu'il soit rasé le plus vite possible afin que l'on puisse construire des immeubles neufs et de qualité par rapport à ce qui existe aujourd'hui. Cet immeuble est une verrue dans ce site - cela déplaira certainement à M. Etienne, puisqu'il y a habité et y est très attaché - mais c'est l'impression qu'ont beaucoup de citoyens au sujet de ce site. Donc, nous sommes en faveur du classement de la pétition, pour les raisons que je vous expliquées. Il n'est pas tolérable de faire fi des lois et règlements que l'on vote. Le pétitionnaire a fauté, il doit être sanctionné.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Hohl. (Quelques instants s'écoulent.) Monsieur Hohl ? C'est à vous, Monsieur le député.

M. Frédéric Hohl (R). Merci, Monsieur le président. Je m'étais assoupi... (Rires.) ...je suis désolé !

Monsieur le président, j'aimerais que vous disiez à Mme Künzler qu'il est absolument inexact que les propriétaires ont muré l'immeuble alors que des locataires l'habitaient ! C'est complètement faux ! C'était pour éviter les squatters... (Remarque.) Non, c'est ce que vous avez dit, et c'est totalement faux. Ensuite, cela nous amuse beaucoup d'entendre le MCG dire: «Il faut raser au plus vite cet immeuble. Mais par contre, laissons-le ouvert pour qu'il y ait des squatters à l'intérieur.» Il faut être cohérent, s'il vous plaît ! Donc je vous demande, Mesdames et Messieurs, de renvoyer au plus vite cette pétition au Conseil d'Etat.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Etienne, rapporteur de minorité, à qui il reste deux minutes.

M. Alain Etienne (S), rapporteur de minorité. Il est extrêmement difficile d'être dans la minorité. J'aimerais seulement vous rappeler les propos de Mme Bietenhader, ancienne directrice de la police des constructions du DCTI. «Mme Bietenhader insiste sur le fait qu'il s'agit de respecter la loi qui est claire dans ce cas précis: il est interdit de toucher un immeuble en cours de procédure de classement. Elle pense que cette pétition est avant tout politique.» J'aimerais aussi rappeler que, dans l'autorisation de construire, ce bâtiment doit être maintenu.

Quant à la discussion sur les squats, j'aimerais tout de même rappeler à M. Pétroz que, avant de parler de squats, il existe ce que M. Haegi avait mis en place: les contrats de confiance. Ainsi, le propriétaire aurait pu, avant de murer son immeuble, arriver à des accords avec les habitants en place pour qu'ils puissent rester un peu plus longtemps, jusqu'à ce que l'autorisation de construire du 15 novembre 1985 soit en force et que, effectivement, on doive démolir l'immeuble pour construire l'autre projet. On aurait donc pu avoir ces contrats de confiance. Mais je le rappelle, renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, c'est véritablement cautionner des pratiques illégales.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, quand le Conseil d'Etat reçoit une pétition ou une motion, un texte sur lequel il est amené à rédiger un rapport, naturellement, il l'effectue. En l'occurrence, ce que réclament les pétitionnaires, ce n'est pas de faire lever une amende qui leur aurait été infligée, mais d'approuver les mesures prises par la FLPAI. Alors on vous répondra là-dessus, sur la question de savoir si ces mesures sont acceptables ou pas.

En revanche, je peux vous dire immédiatement qu'il y a un point sur lequel on ne vous répondra pas, si c'est le voeu de la majorité de ce Grand Conseil, c'est sur celui de lever des amendes. Cela ne s'est jamais fait par la voie de la pétition. La pétition est utilisée pour s'adresser à l'autorité lorsque l'on ne peut pas s'y prendre autrement pour demander, au fond, au Grand Conseil d'intervenir auprès du Conseil d'Etat pour rectifier des injustices que l'on n'arrive pas, par un autre biais, à corriger. Ici, il s'agit d'une amende, et nous vivons dans un état de droit. La personne qui se voit infliger une amende, si elle estime que cette amende est infondée, a la possibilité de recourir à la justice. Et bien que la justice confirme généralement les décisions du Conseil d'Etat ou de l'administration, il arrive aussi qu'elle nous désavoue. C'est exactement pour cela que le système judiciaire est établi. Il arrive que l'autorité se trompe, et il y a dans notre système de séparation de pouvoirs un organe de contrôle: les tribunaux.

Cependant, si l'on a décidé, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, de ne pas saisir les tribunaux, on ne peut pas ensuite réparer cette omission en essayant d'avoir une espèce de voie de réexamen qui n'est pas prévue par la loi. Vous comprenez que ce serait extrêmement choquant, parce que cela ferait basculer tout notre système, fondé sur la séparation de pouvoirs, dans un système fondé sur le fait du prince: je fais une pétition, on actionne ensuite une manette en fonction de divers critères, de sorte que si l'on me trouve sympathique ou antipathique, on trouve que la cause est bonne ou mauvaise, et je peux arriver à éviter de passer par la justice ordinaire pour me faire entendre... Cela ne fonctionne pas comme cela dans un état de droit. Chacun de nos organes a une fonction. Le parlement fait des lois, ce ne sont pas les tribunaux ni le Conseil d'Etat. Le Conseil d'Etat pilote pour l'essentiel l'administration. Et les tribunaux jugent - très rarement le parlement, mais cela arrive, par exemple lorsqu'il s'agit de déclassement - et régulièrement le Conseil d'Etat, puisque nous sommes amenés à rendre des décisions administratives. Cet exposé sur la séparation des pouvoirs, vous le retrouverez assurément dans notre réponse. Que l'on n'espère pas, toutefois, par le biais de cette pétition, trouver une nouvelle voie de droit pour contester les amendes !

Au-delà de cela, bien sûr, si vous nous renvoyez cette pétition, nous vous dirons tout ce que nous pouvons penser en bien ou en mal des classements, des squatters, des opérations de construction à Genève, de la nécessité de créer des logements... Soyez-en convaincus, nous nous exprimerons sur tous ces points si vous désirez que nous en parlions encore une fois.

Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 1654 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 35 oui contre 31 non.