République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 9265-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat sur les augmentations annuelles dues aux membres du personnel de l'Etat ainsi que sur la progression de la prime de fidélité (B 5 17)

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 5.

Troisième débat

Le président. Monsieur Mouhanna, vous avez la parole.

M. Souhail Mouhanna (AdG), rapporteur de minorité. Je voulais dire deux mots sur cette prime de fidélité et sur les augmentations annuelles. Il s'agit d'un projet de loi déposé par le Conseil d'Etat qui fait partie d'un lot de projets de lois concernant la fonction publique, déposés aussi bien par le Conseil d'Etat que par la droite. L'ensemble de ces projets de lois vise essentiellement les conditions de travail et de salaire du personnel. Je parlerai de manière chiffrée du projet de loi suivant tout à l'heure. Je voudrais simplement dire, pour l'instant, que le Conseil d'Etat prend une fois de plus des mesures contre la fonction publique, contre le personnel, sans aucune négociation, sans qu'il y ait le moindre accord, et que la majorité de droite de ce parlement ne fait qu'encourager ce comportement. De ce fait, cette majorité et ce Conseil d'Etat prennent une lourde responsabilité dans la dégradation du climat social.

M. Rémy Pagani (AdG). Face à cette problématique, on doit se poser la question de savoir ce qui est en train de se passer au sein de notre administration. Comme vous le savez, depuis quelques années déjà, le Conseil d'Etat a mis en place un PLEND qui a permis à toute une série d'anciens fonctionnaires - qui avaient fait de nombreuses années d'activités au sein de l'Etat - de prendre une retraite anticipée bien méritée. Cela a permis à un certain nombre de jeunes employés d'être engagés. Puisque l'on avait déjà déstructuré le statut, ces employés doivent, pendant trois ans, faire la preuve de leur efficacité. Au bout de trois ans, ils peuvent accéder au statut de fonctionnaire. Je rappelle qu'il y a deux ans, ils étaient encore engagés deux classes en dessous, alors que maintenant ils sont engagés une classe en dessous de la classe à laquelle ils devraient théoriquement accéder. Le parcours du combattant ne se termine cependant pas à ce stade, pour eux. En effet, après qu'ils ont accompli des miracles, puisque l'on a vu combien il était difficile de travailler dans l'enseignement ou à l'hôpital, on leur sucre la moitié de leur prime de fidélité. La prime de fidélité est une petite partie du treizième salaire auquel ils accèderont au bout de quinze ans, la totalité du treizième salaire étant perçue au bout de vingt ans.

Nous protestons donc avec énergie contre cela, parce que cette coupe dans les salaires de la fonction publique n'a jamais été négociée - à ce jour, personne ne s'est assis à la table des négociations pour dire: «voici dans quel cadre nous entendons discuter.» Dans le secteur privé ainsi que le service public, les membres de nos syndicats n'ont pas l'habitude de négocier de cette manière. Même si un employeur décide de baisser les salaires, il nous convie à la table des négociations et nous engageons des discussions pour faire valoir d'autres propositions. D'ailleurs, la loi sur le travail, la loi sur la participation le prévoient. Alors qu'ici le Conseil d'Etat n'a jamais engagé de concertation avec qui que ce soit sur cette réduction de salaire - parce qu'il s'agit bien de réduction de salaire. Bien évidemment, nous en prenons acte. Cela va avec ce que nous dénoncions.

Il y a à mener une réflexion avec ce que nous dénonçons de la politique salariale du Conseil d'Etat. Cette politique salariale ne vise pas à fidéliser le personnel; bien au contraire, les personnes compétentes ont trois ans pour espérer un autre statut, puis, lorsque l'on arrive à des mesures comme celle-là, cela implique que les personnes les plus compétentes trouvent du travail ailleurs. On ne saurait le leur reprocher. Cependant, l'Etat se prive de compétences importantes et nous le regrettons. Nous estimons que cela ne revient pas à faire preuve d'une politique salariale ou d'une politique du personnel qui soient cohérentes et qui pérennisent les activités de l'Etat ainsi que la qualité des prestations, que l'Etat se doit pourtant de fournir à la population.

Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente

M. Jean Spielmann (AdG). Les partis de l'Alternative ont écrit au Conseil d'Etat pour lui dire dans quelle optique ils souhaitaient discuter et prendre position par rapport au budget. Nous considérions dans cette lettre, et nous considérons toujours, que c'est une grave erreur de ne pas avoir ouvert de négociations avec le personnel, de ne pas avoir discuté avec ses membres pour conduire les réformes nécessaires et pour les faire participer à l'administration ainsi qu'à la gestion du service public. Nous paierons cette erreur très cher parce que c'est avec le personnel - et non pas contre lui - que nous pourrons résoudre les problèmes de notre collectivité. C'est le premier point et le point le plus important que je voulais relever. Nous avions posé comme condition d'acceptation du budget que le Conseil d'Etat aille dans cette direction. Jusqu'à maintenant cela n'a pas été le cas. Le Grand Conseil va se prononcer sur le budget en troisième débat, mais notre groupe ne le votera pas.

Par rapport au budget et par rapport aux conséquences du vote de ce budget, les réductions et la politique qui a été conduite par les partis qui me font face ont en priorité attaqué la santé, l'éducation, la formation, le logement social, la politique sociale en général ainsi que la culture. Autant de domaines dans lesquels il eût été intelligent d'investir et de doter notre collectivité de moyens pour faire face à la crise. Vous avez fait le contraire. Cela ne correspond pas aux besoins de la population genevoise, ne permettra pas de résoudre les problèmes financiers ni de rembourser la dette que vous avez constituée. Il y a donc une série de contradictions qui font que nous ne voterons pas ce projet de loi, que nous nous y opposerons et que nous invitons d'ores et déjà la population à se mobiliser contre la politique que vous êtes en train de mettre en place et que je viens de définir.

M. Alberto Velasco (S). Le parti socialiste constate, avec ces coupes, après tout ce qui a été précédemment voté dans le budget, qu'il ne pourra pas voter ce projet ni le budget. En l'occurrence, ce sont 21 millions que l'on soustrait à la fonction publique, donc à la rétribution du personnel de l'Etat, sans aucun accord ni aucune négociation. C'est une des conditions que le parti socialiste avait émises dans la lettre envoyée au Conseil d'Etat. Par conséquent, puisque rien n'a été fait dans ce sens-là, nous ne voterons évidemment pas ce projet de loi, et de ce fait nous ne pourrons plus voter ce budget.

M. Souhail Mouhanna (AdG), rapporteur de minorité. Le projet déposé par le Conseil d'Etat, s'il est voté aujourd'hui, nous sommes le 26 juin, fait que le délai référendaire dépassera la fin du mois de juillet. Selon moi, cette initiative unilatérale de la part du Conseil d'Etat devrait, malgré tout, si son projet est voté, se trouver en contradiction avec l'actuelle loi en vigueur, puisque le fait de différer de six mois les annuités qui sont dues à fin janvier, implique qu'elles devraient être payées fin juillet avec effet rétroactif.

Le Conseil d'Etat manque de tact - c'est le moins que je puisse dire, pour ne pas dire qu'il fait preuve de beaucoup d'hypocrisie - lorsqu'il écrit, en fin de son exposé des motifs que, «en dépit des conditions difficiles, l'Etat a toujours pu compter sur un personnel dévoué et capable d'assumer sa mission de service public au profit de tous, il faut lui en être reconnaissant.» C'est une drôle de manière de se montrer reconnaissant à l'égard de gens qui sont dévoués et qui font correctement leur travail: on ponctionne sur leurs salaires !

Pour un salaire de 6 000 F, Madame la vice-présidente, vous savez certainement que le décalage de six mois de l'annuité représente près de 1 000 F. Faites votre calcul - je peux le faire, si vous le voulez ! Et les 2,5% de progression de la prime de fidélité que vous prenez sur un salaire de 6 000 F, cela fait 150 F. Les 250 F vont se répercuter pendant pas mal de temps, il y a des effets induits, comme vous le dites.

A supposer, Madame, que vous payiez les mécanismes salariaux - annuités et primes de fidélité - l'année prochaine, et qu'il ne s'agisse simplement que d'un décalage de six mois, j'aimerais que vous nous disiez, Madame, comment vous allez faire pour respecter l'indexation annuelle, puisque l'annuité et la prime de fidélité représentent ce que vous avez décidé comme limite maximum de l'accroissement de la charge salariale quand vous dites que c'est justement dans ce même ordre de grandeur. Par conséquent, vous savez parfaitement que vous n'allez pas respecter les mécanismes salariaux. Et vous savez que ce que vous dites dans l'exposé des motifs sont de purs mensonges.

Je tenais à le dire pour que cela soit enregistré dans le Mémorial. L'avenir démontrera que le Conseil d'Etat fait usage d'un certain nombre de procédés qui sont véritablement indignes d'un patron, qui doit mériter la confiance du personnel.

M. Gilbert Catelain (UDC). La fonction publique genevoise devra malheureusement faire un léger sacrifice pour participer au redressement des finances de ce canton. C'est pure logique puisque tout le monde va y participer d'une manière ou d'une autre: on a vu que les communes, les établissements autonomes et même certains bénéficiaires de prestations, eux aussi, allaient y participer. C'est un projet qui engage l'ensemble du Conseil d'Etat et qui est modéré, de notre point de vue. (Manifestation dans la salle.)On aurait même pu imaginer qu'il aille plus loin.

Je vous citerai, Monsieur Mouhanna, d'autres cantons, comme les cantons de Vaud ou de Neuchâtel, qui ont pris des mesures beaucoup plus drastiques, notamment par le biais de suppressions totales d'indexation. C'est vrai qu'il y aura des répercussions sur les années suivantes mais, si vous prenez un autre employeur comme la Confédération, cela fait dix ans qu'elle a introduit une réduction de salaire de moins 10% à l'embauche, qui est toujours en vigueur et qui, au vu de la situation financière de la Confédération, n'est pas prête d'être levée.

Le groupe UDC considère que ce n'est pas forcément la meilleure chose à faire que de participer de cette manière mais, vu que vos membres, les représentants de l'Alternative, n'ont pas proposé au Conseil d'Etat d'autres mesures d'assainissement des finances de ce canton, je crois que l'on ne peut pas faire la fine bouche et qu'il faudra bien passer par là.

Le groupe UDC vous a proposé tout à l'heure une réduction de l'aide internationale de sept millions de francs. Vous avez crié au scandale, vous avez dit que cela était inadmissible que l'on ose réduire la solidarité destinée aux pays en voie de développement; d'un autre côté, les mêmes députés qui s'opposent à une réduction de l'aide internationale - en lisant la Feuille d'avis officielle, j'ai calculé qu'entre ce que la Confédération et uniquement le canton de Genève avaient donné pour le Darfour, si cette somme était proportionnellement élargie à l'Europe occidentale et aux Etats-Unis, le Darfour devrait être milliardaire; autant dire, donc que l'on verse beaucoup.

On aurait pu imaginer que nous les réinjections pour la fonction publique, vous ne l'avez pas voulu. Par conséquent, à partir du moment où vous ne voulez pas entrer en matière sur des réductions de subventions, cela signifie que vous devez accepter tacitement ce genre de réductions sur la masse salariale. Je répète que la masse salariale de ce canton représente 50% du budget de l'Etat. Il est donc impensable de penser à un redressement des finances publiques sans vouloir toucher aux postes, alors que ce budget prévoit quand même un accroissement de la masse salariale. De même qu'il est impensable de ne pas imaginer une réduction de l'augmentation de cette masse salariale, puisque l'on ne touche qu'aux mécanismes qui touchent à l'augmentation de la masse salariale.

Le groupe UDC soutiendra donc ce projet de loi, il n'entrera en matière sur aucun amendement et prie les différents groupes de faire de même.

Présidence de M. Pascal Pétroz, président

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. Lorsque nous en sommes au troisième débat, cela signifie que le temps de l'épure est arrivé. Nous en sommes à l'essentiel. L'essentiel, dans cette affaire, c'est de décider de 20 millions, qui représentent un demi-pourcent de la masse salariale totale versée par l'Etat. Il ne s'agit nullement d'une réduction de salaire, il s'agit d'un composé de deux mesures: d'une part, d'un délai mis à certains versements, d'autre part, d'une augmentation réduite pour d'autres prestations.

Dans cette affaire, nous tenons à marquer un soutien unanime de l'Entente et de la droite au Conseil d'Etat.

M. Souhail Mouhanna (AdG), rapporteur de minorité. M. Catelain n'arrête pas de s'en prendre à la fonction publique en donnant des exemples d'autres secteurs où, paraît-il, il y a eu plus de sacrifices. (L'orateur est interpellé.)

Monsieur Catelain, vous oubliez ce qui s'est passé pendant toutes les années 90. Votre présence dans ce Grand Conseil n'a nullement comme objectif de contribuer à construire quelque chose de positif. Votre présence a plutôt le but de démolir tout ce qui peut représenter la fierté de Genève, c'est-à-dire une République avancée sur le plan social et au niveau des rapports sociaux. Vous êtes ici pour détruire cette construction, vous en porterez donc la responsabilité, avec d'autres d'ailleurs.

Lorsque vous parlez, Monsieur, du Darfour, et que vous mettez en parallèle le fait que l'Alternative aurait dû accepter la suppression de l'aide à cet endroit pour que les employés de la fonction publique soient payés, vous n'avez strictement rien compris. Les fonctionnaires sont beaucoup moins égoïstes que vous parce que... (L'orateur est interpellé.)Monsieur Catelain, vous allez être servi, un peu de patience, vous savez très bien que lorsque j'interviens, je donne des preuves ! Vous connaissez bien cela, Monsieur Catelain, puisque vous suivez tous les ordres de Genève-place financière: vous êtes ici pour cela. (L'orateur est interpellé.)

Monsieur Catelain, vous savez, et l'ancien directeur de banque, M. Iselin, le dit souvent: les banques font vivre des dizaines de milliers de personnes, ici. Il y a trois mille milliards de francs qui se trouvent déposés dans les maisons financières, banques et autres en Suisse. Ces trois mille milliards, d'où viennent-ils, Monsieur Catelain ? Beaucoup proviennent de l'étranger ! Ils disent d'ailleurs que cela contribue, rien qu'au niveau du PIB, à raison de 15% du PIB. 400 milliards de PIB multiplié par 15%, cela fait 60 milliards, Monsieur Catelain. Parmi ces 60 milliards, combien viennent des pays du tiers-monde, et du Soudan, notamment ? On a pillé les pays du tiers-monde, on a pillé beaucoup de pays, on les a mis dans la pauvreté, dans la misère, on leur a imposé des guerres et l'argent qui, comme vous le dites, Monsieur Iselin, fait vivre des dizaines de milliers de personnes ici, contribue à la richesse de la Suisse. Les touristes qui viennent ne sont bons qu'à remplir les poches de quelques-uns... (L'orateur est interpellé.)...mais quand il s'agit d'avoir un minimum d'esprit civique, en rendant une infime partie de ce dont ces gens-là ont été spoliés, eh bien, là, non: selon vous, il faut non seulement prendre leur argent mais aussi foutre les étrangers dehors et taxer tous ceux qui ne sont pas dignes de votre considération, et qui seraient tous des délinquants, des criminels ou que sais-je encore. Sans les étrangers, Monsieur Iselin, la Suisse serait un pays du tiers-monde. (L'orateur est interpellé. Manifestation dans la salle.)

Messieurs, vos emplois ne sont pas plus honorables que ceux du personnel de la fonction publique, vous ne l'avez pas encore compris. Par ailleurs, Monsieur Catelain, vous oubliez de dire que le personnel du service public est composé de contribuables comme vous et moi. Ils paient des impôts et se payent ainsi une partie de leur salaire. Lorsqu'ils paient leur loyer, leurs médicaments, leurs assurances, ils paient également vos salaires. Arrêtez donc de les considérer comme une charge pour vous. C'est vous qui êtes une charge pour les citoyens, sur l'ensemble des contribuables. C'est vous qui pillez les richesses produites par les travailleurs. Il faut arrêter de nous donner des leçons, c'en est vraiment trop.

Monsieur, vous faites ce que vous voulez, vous êtes une majorité, vous faites ce que vous voulez. Vous êtes des fauteurs de troubles sociaux, des fauteurs de guerre sociale. Vous ne la faites pas seulement aux employés du service public...

Le président. Monsieur Mouhanna, s'il vous plaît...

M. Souhail Mouhanna. ...vous la faites aux employés du secteur privé et vous la faites à la population.

Le président. ...restez un peu convenable.

Une voix. Oh !

M. Souhail Mouhanna. J'en ai fini.

Une voix. Ah !

M. Robert Iselin (UDC). Je suis simplement attristé parce que j'ai de l'amitié pour Souhail Mouhanna. J'ai de l'amitié parce que je considère qu'il est sincère et authentique. Parfois, cependant, son tempérament l'emporte. Je n'irai pas plus loin parce que je pourrais revenir aux traditions de ma famille, qui sont profondes. Le nombre de choses que nous avons faites dans le cadre de ma famille, pour des étrangers et pour des tiers, est énorme.

M. Rémy Pagani (AdG). Aujourd'hui, nous nous affrontons avec deux logiques différentes. La logique de la majorité parlementaire, accompagnée de l'UDC, qui veut, après avoir réduit les caisses de l'Etat, réduire le pouvoir d'achat d'une masse importante d'employés: les fonctionnaires. Cette logique prétend laisser accumuler de l'argent aux riches et faire croire, laisser planer l'illusion que ces riches vont investir dans l'économie réelle. Il a été démontré par passablement d'économistes, ô combien plus compétents que la totalité d'entre nous, que ces riches n'investissaient pas dans l'économie réelle mais dans l'économie de casino, dans la bourse, dans des bulles spéculatives. On a notamment vu le dernier effet de cela, il y a deux ans, avec l'explosion de la bulle spéculative de l'informatique. Demain, ce sera une autre bulle. Dans les années nonante, c'était une bulle spéculative liée à l'immobilier.

Nous, nous défendons le salaire de la fonction publique, non seulement pour des questions d'équité, mais aussi parce que, chacun d'entre vous s'en rend compte, les charges sociales de chacun d'entre nous augmentent. Que ce soient les primes d'assurances, les loyers - et on passera peut-être, en septembre, d'un système de loyer à la pièce, à un système de loyer au mètre carré, avec des augmentations de loyers à la clé, si on suit vos prémisses - l'essence, toute une série de charges sociales qui ont fait monter à plus de 18 000 le nombre des commandements de payer, c'est une réalité de notre canton. Mesdames et Messieurs les députés, 18 000 commandements de payer par mois sont envoyés par l'office des poursuites et faillites. Imaginez combien cela fait de poursuites envoyées par l'administration par année. En effet, si les personnes poursuivies mettent en rapport leur salaire et les charges qu'elles ont, il arrive un moment où elles ne peuvent plus payer et c'est donc leur loyer, leurs assurances qu'elles paient en retard.

La logique que nous défendons, consiste à faire en sorte que ces gens, qui créent des richesses - les fonctionnaires y compris, en créant des richesses immatérielles mais aussi matérielles, en éduquant nos enfants ou en nous soignant - aient un pouvoir d'achat, qu'ils investiront, eux - parce qu'ils n'ont pas les moyens de faire de la spéculation et qu'ils devront payer leurs charges - immédiatement dans l'économie réelle. Ces deux logiques, ces deux pratiques économiques s'opposent. C'est bien de cela dont il est aujourd'hui question.

C'est pourquoi nous vous invitons à refuser ce projet de loi parce qu'il nous semble anti-économique et antisocial.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. J'ai presque envie de dire à M. Iselin que je suis d'accord avec lui sur un point: c'est l'amitié que je peux porter au député Souhail Mouhanna. C'est peut-être à ce titre que je vais oublier rapidement, puisque nous sommes dans un débat politique, le mot «mensonge» s'adressant au Conseil d'Etat. Je pense que, dans cette salle, des choses sont parfois dites, certains esprits s'échauffent, et ce sont les causes qui tiennent le plus à coeur qui, malheureusement, condamnent à quelques dérapages.

Nous avons déjà fait le premier débat avant-hier. Les choses essentielles ont été dites, y compris de la part du Conseil d'Etat: ce n'est pas de gaieté de coeur que nous ayons pris, et de surcroît dans l'urgence, ce projet de loi. Nous avons en effet espéré, je ne vous le cacherai pas, jusqu'au dernier moment, ne pas avoir à prendre cette décision. Le calendrier qui nous y a contraints n'a pas permis non plus d'arriver à une négociation, et il y aurait eu quelque hypocrisie, je vous l'ai dit, à venir négocier quelque chose que nous ne pouvions pas négocier. C'est la raison pour laquelle... (L'oratrice est interpellée.)...c'est la vérité, Monsieur Pagani, que cela vous plaise ou non. (L'oratrice est interpellée.)Je l'ai dit jeudi soir. Je l'ai dit à la fonction publique lorsque nous en avons parlé et cela est parfaitement clair.

J'aimerais tout de même rappeler deux choses. Quel que soit le déplaisir qu'apportent ces mesures, il n'est pas vrai que cela entraîne une diminution de salaire. Personne ici ne peut le dire. Il s'agit de diminuer de moitié la progression de la prime de fidélité dans son versement, et il s'agit de diminuer de moitié le versement de l'annuité, tout en reconnaissant sa progression. Cela n'est pas tout à fait la même chose que de diminuer le salaire de quelqu'un, même si cela a des conséquences sur les salaires de la fonction publique et sur ce que les employés peuvent attendre de l'application des lois générales, que personne ne niera ici.

Je ne rentrerai pas, à l'issue de ce troisième débat, dans d'autres considérations, pas même celles qui concernent les bulles spéculatives dont parle M. Pagani. Je crois que cette tribune n'est pas le lieu, s'agissant des collaboratrices et collaborateurs de la fonction publique, pour que chacun en profite pour exprimer sa politique et se payer un dernier affrontement dans des débats qui durent maintenant depuis longtemps.

Malheureusement, le Conseil d'Etat doit vous encourager à adopter ce projet de loi, tout comme le suivant, parce qu'il est le gage de la possibilité de tenir des engagements plus généraux. Nous l'avons déjà dit.

Nous souhaitons vivement trouver des solutions et des accords, nous avons fait les démarches nécessaires depuis lors, vous le savez. Ces démarches sont en cours, les rendez-vous sont fixés ou, en tout cas, offerts. Nous espérons vivement que ces rendez-vous seront tenus et que nous pourrons trouver, pour 2005, des possibilités d'accord qui nous permettent de voir l'avenir avec un peu plus de sérénité, les uns et les autres, dans une période difficile.

Le président. Merci, Madame la vice-présidente du Conseil d'Etat. Nous allons procéder au vote d'ensemble de ce projet de loi. Nous allons voter à l'appel nominal.

La loi 9265 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix à l'appel nominal, la loi 9265 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 46 oui contre 35 non et 1 abstention.

Appel nominal