République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1493
Proposition de motion de MM. Gabriel Barrillier, Pierre-Louis Portier, Thomas Büchi, Guy Mettan, Luc Barthassat, Hugues Hiltpold, Alain Meylan, René Koechlin, Florian Barro pour lutter contre la pénurie de logements en utilisant mieux les sites constructibles situés en zone urbaine et péri-urbaine

Débat

M. Jean Rémy Roulet (L). Monsieur le président, j'aimerais que vous fassiez état d'un article de notre règlement qui clôt nos travaux le plus rapidement possible. Vous nous avez dit, il y a quelques secondes, que vous souhaitiez, si possible, que le point que nous traiterions serait le dernier. Je vous conjure de transformer ce «si possible» en une décision définitive, et que nous cessions nos travaux. Nous avons travaillé depuis 8h, ce matin, cela fait onze heures que nous siégeons et je crois que tout le monde n'attend que de retrouver son petit chez-soi.

Le président. Monsieur le député, je suis tout à fait d'accord mais je me fixerai, indépendamment de ce point, une limite, entre 19h15 et 19h30, si jamais les gens voulaient prolonger la discussion sur cette motion.

Mme Anne Mahrer (Ve). Dans cette motion, les signataires demandent tout ce qu'il était possible de faire avec le projet de Chêne-Bougeries. Ils dénoncent, de la part du département, une politique du timbre-poste: exactement celle qu'ils ont mise en pratique à Chêne-Bougeries. Bref, ils ne sont pas à une contradiction près.

J'espère que, dans un bel élan de cohérence, les signataires retireront cette motion.

Quant à nous, nous vous demandons de la refuser. Merci.

M. Rémy Pagani (AdG). J'aurais encore eu quelque considération pour cette motion avant notre débat d'avant l'été, en ce qui concerne le terrain de La Tulette qui visait un déclassement en vue d'y construire plus de 1 000 logements. Malheureusement, nous sommes sortis de ce débat avec un déclassement de 230 logements - et quel type de logements: des logements de luxe !

Je considère que cette motion est quasiment une pantalonnade, parce qu'il y est prétendu qu'il est difficile de trouver des terrains constructibles rapidement. En voici un des considérants: «la nécessité de revitaliser le tissu urbain construit» et, surtout, une des invites au Conseil d'Etat «à proposer toutes mesures de déclassement et/ou d'initier avec les communes concernées les mesures d'aménagement nécessaires, dans le cadre du plan directeur cantonal, en vue de planifier la réalisation de logements et des équipements nécessaires d'ici 2010.»

Mesdames et Messieurs les députés, vous aviez un projet de plus de 1 000 logements, si on prend le terrain de La Tulette, plus les terrains qui avaient déjà été rabotés par le Conseil d'Etat ! Vous aviez l'occasion de concrétiser cette motion que la majorité de ce parlement a refusée !

On peut se payer de mots, toujours. C'est très facile de dire qu'il faut faire des études et inventorier, face aux citoyens qui se disent: «Je vis dans un petit logement de 60 m2, j'ai trois enfants, j'aimerais quand même avoir un logement de 90 m2, ce n'est pas trop demander.» On peut donc se payer de mots en disant: «Ce sont les autres qui organisent la pénurie. C'est la gauche, parce qu'elle était majoritaire au Grand Conseil, c'est la gauche qui a tout bloqué.» Mais, lorsqu'il s'agit, concrètement, de faire des actes de déclassement, et de proposer réellement des logements bon marché pour satisfaire aux besoins de la majorité de la population, il n'y a plus personne.

En effet, et malheureusement, les intérêts de certains privilégiés passent par-dessus les intérêts de la majorité de notre collectivité. Je le regrette, et c'est pour ça que je trouve que c'est une escroquerie intellectuelle que de proposer ce genre de motions. C'est de l'esbrouffe, et je ne vous propose même pas de renvoyer cette motion en commission, mais de la jeter à la poubelle, parce qu'elle ne vaut que ça.

M. Carlo Sommaruga (S). Ce matin, nous avions déjà, à l'ordre du jour, une motion qui était un peu du même acabit. On nous demandait déjà que le Conseil d'Etat produise au Grand Conseil des statistiques et des inventaires. La première invite de cette motion demande que le Conseil d'Etat nous donne la liste des plans localisés de quartier en force et les lieux où il y encore du potentiel à construire.

Le 15 novembre 2002, bon nombre des signataires de cette motion bénéficiaient déjà de l'information qui avait été diffusée par les services du DAEL, lors d'une séance à laquelle j'ai également participé. Ainsi, les différentes associations professionnelles de la construction, les syndicats, les représentants des milieux immobiliers et des locataires savaient exactement quels étaient les plans localisés de quartier qui étaient en force, tout comme ils savaient où il y avait des difficultés. La séance visait à rechercher des solutions pour résoudre ces difficultés. En résumé, le 15 novembre 2002, vous étiez déjà en possession de ces informations. C'est donc effectivement un coup d'épée dans l'eau, et le dépôt de cette motion revient simplement à faire de la propagande politique pour rien, comme ce matin.

J'ai déjà dit, ce matin que l'on ne construit pas de logements en entassant des rapports et des statistiques: il faut déclasser des terrains. On arrive ainsi à la deuxième invite dont la teneur est: «proposer toutes mesures de déclassement et/ou d'en initier avec les communes concernées». Cela a été dit. Il y a eu plusieurs projets de déclassement qui sont arrivés en commission puis en plénière. Vous, de la majorité, à chaque fois, vous avez mis les pieds au mur pour vous opposer à la densification de la zone villa pour la construction de logements. On a parlé d'escroquerie à propos de cette motion: oui, c'est une escroquerie politique qui est en train de se passer.

Vous voulez avoir bonne conscience avec des mots, mais, en réalité, c'est ce que je dénonçais avant l'été, il y a une conspiration des pleutres. Parce que vous, au moment où il faut agir, où il faut déclasser, vous disparaissez tous. Ceux qui défendent la construction et l'immobilier, ceux qui défendent les intérêts immobiliers, au moment où il faut assumer les responsabilités cantonales, pour faire face à la crise du logement, vous disparaissez et on ne vous entend plus, dans cette salle, si ce n'est pour vous cacher derrière une prétendue autonomie communale.

Je vous rappelle que les communes ont des préavis à donner, et que le pouvoir décisionnel appartient à ce canton. Et lorsqu'il faut décider et qu'il faut prendre ses responsabilités, vous n'êtes pas là. Alors naturellement, M. Barrillier, radical, viendra faire une grande théorie sur la nécessité de déclasser, sur la nécessité de concertation, etc. Mais au moment où il faut décider, Monsieur Barrillier, où êtes-vous ?

M. Gabriel Barrillier. Ici !

M. Carlo Sommaruga. Pour assumer les décisions, vous n'êtes jamais là, Monsieur Barrillier. Vous n'êtes pas là avec les radicaux, et vous n'êtes pas là avec l'Entente. Et c'est ça, le problème.

Par conséquent, et comme cela a été demandé par les Verts, je vous demande aussi de retirer, par décence, par cohérence et par respect des citoyennes et citoyens de ce canton, cette motion, qui n'est qu'un bout de torchon. Merci. (Applaudissements.)

M. Gabriel Barrillier (R). Je vois que le débat s'échauffe un peu, lorsqu'on parle de logement. J'aimerais rappeler deux ou trois choses.

La première, c'est que cette motion fait partie d'un paquet de motions que nous avions déposées - il y en a, sauf erreur, quatre. Nous aurons l'occasion d'y revenir. Il y en a une qui demande de faire un inventaire des possibilités de construction, de densification des combles; une qui demande de faire un inventaire des possibilités d'utiliser des arpents de zone agricole, qui sont contigus de zones à bâtir. Bref, il y a une volonté, de la part des motionnaires, de demander qu'on fasse enfin ce type d'inventaires pour avoir une vision globale de tous les endroits où l'on peut construire. Cela c'est la première chose. Donc il n'y a pas que cette motion, il y en a plusieurs autres.

Ensuite, les PLQ et l'inventaire des PLQ. Oui, Monsieur Sommaruga, nous avons eu des séances. Je le confirme. Le problème, c'est qu'il ne s'est rien passé. Il ne s'est rien passé. (L'orateur est interpellé.)Mais pas du tout ! (Le président agite la cloche.)On a eu des inventaires, mais ces inventaires n'étaient pas tout à fait définitifs, et ensuite, il ne s'est rien passé. Donc moi j'aimerais qu'ensuite il y ait une volonté de débloquer ces PLQ. Ces inventaires sont utiles, mais encore faut-il les utiliser.

Quant à la politique de déclassement, nous avons pris une décision sur la Gradelle. On ne va pas refaire le débat ici, puisqu'il y avait une procédure de plan d'aménagement concertée. Moi j'appelle de mes voeux ce type de procédure de concertation à d'autres endroits. Et je souhaite que la volonté des communes soit prise en compte.

Chers collègues, nous avons pris une décision sur la parcelle de Caillat. J'ai voté le déclassement. Et Dieu sait si on s'est fait sonner les cloches par la commune de Meyrin. Et vous avez vu quelle a été la réaction de cette commune, suite à la décision du Grand Conseil. Ne venez donc pas nous dire qu'on ne fait rien, qu'on ne tient pas compte de la volonté des communes. Il est extrêmement difficile de déclasser, puisque, quelque décision que nous prenions, on se heurte à un certain nombre d'oppositions, notamment celle des communes. Je le constate.

Les propositions que nous faisons sont évidemment des propositions d'inventaire. Mais gouverner, c'est prévoir et nous parlons de l'horizon 2010. Ne venez donc pas nous dire que c'est de l'esbrouffe et reconnaissez que nous avons le courage - en tout cas en ce qui me concerne - de prendre des décisions. Parce que j'étais là pour la votation sur Meyrin et j'ai voté le déclassement. Alors ne venez pas nous dire que l'on n'a pas le courage de nos décisions !

M. René Koechlin (L). Chaque fois qu'on parle de déclassement, de construire des logements et que l'on aborde ce type de questions, M. Pagani, M. Sommaruga se mettent à rêver à haute voix. Ce sont de doux rêveurs. Ils répondent «il suffit de déclasser, il suffit de déclasser et vous vous opposez au déclassement !» Je l'ai déjà dit, je le répète, ce genre de discours revient à dire à un affamé qui demande du pain, «il suffit de semer du blé.» (L'orateur est interpellé.)Oui. On ne répète pas la messe aux ânes ? Malheureusement, il faut bien que je le fasse dans le cas particulier.

Cela ne sert à rien de déclasser sans l'accord des communes, sans l'aval des propriétaires et sans la collaboration des constructeurs, car, dans ce cas on ne construit rien. On peut déclasser des hectares de terrain, mais ça n'est qu'un coup d'épée dans l'eau. Il y a des dizaines d'hectares, en zone de développement, qui, aujourd'hui, ne sont pas construits. Il y en a un certain nombre, qui font l'objet d'un plan localisé de quartier, qu'on ne réalise pas.

Ce que nous demandons, à travers cette motion, c'est de savoir le pourquoi de la non-réalisation de maints plans localisés de quartier. Pourquoi tant de ces plans demeurent en attente dans une surface importante du territoire qui est déjà en zone de développement ? C'est ce que nous demandons au Conseil d'Etat. C'est le but de cette motion. On peut la mettre à la poubelle, naturellement, comme le suggère M. Pagani. Car dès que l'on demande de faire quelque chose de positif en matière d'aménagement, parce que ça vient de nous, M. Pagani propose qu'on le jette à la poubelle.

Ce que je demande, Mesdames et Messieurs les députés, c'est que l'on examine cette motion sereinement en commission d'aménagement, et qu'on l'y renvoie, Monsieur le président. C'est la raison pour laquelle on devrait, maintenant, orienter le débat sur le renvoi en commission.

M. Pierre-Louis Portier (PDC). Décidément, tous les débats concernant l'aménagement du territoire me donnent l'occasion de me chamailler avec M. Pagani. C'est triste, Monsieur Pagani. Parce qu'une nouvelle fois je me dois de dénoncer, au nom du groupe démocrate-chrétien, votre extrême mauvaise foi. Je vous en avais déjà fait le reproche avant l'été, au moment du débat sur Pré-Babel, et vous réitérez une telle attitude ce soir.

Vous affirmez, Monsieur Pagani, faussement, une nouvelle fois, que nous avons empêché le déclassement, et donc la construction, de mille logements au Pré-Babel. C'est totalement erroné, et vous le savez parfaitement. Au contraire, Monsieur Pagani, au contraire. (L'orateur est interpellé.)Monsieur Pagani, laissez-moi terminer. Je vous rappelle que nous avons non seulement pris l'engagement, mais que nous l'avons voté, de renvoyer la deuxième partie du projet de loi qui prévoit le déclassement total de l'ensemble du périmètre Pré-Babel. Les 230 ou 240 logements ne sont qu'une première étape. Une première étape réussie, parce que justement, Mesdames et Messieurs les députés, nous nous sommes concertés avec la commune. La commune a donné son accord, après bien des discussions, je vous le concède, mais elle a donné son accord. Alors cessez de nous faire des procès de mauvaises intentions, Monsieur Pagani, s'il vous plaît.

Quant à l'attitude que vous prônez. Les décisions à prendre ! On a vu le résultat. La dernière fois, le groupe démocrate-chrétien, a souhaité, suite à l'intervention de la commune de Meyrin, le renvoi en commission du projet Caillat - qui a, pour finir, été voté, comme l'a rappelé M. Barrillier. On voit le résultat: il se passe, quelques semaines après, exactement ce que nous craignions, à savoir un blocage total de la situation. En effet, la commune de Meyrin, durant l'été, dans les jours qui ont suivi notre vote, a déjà fait un recours. Vous le savez, parce que nous en avons parlé mercredi dernier en commission d'aménagement. Par conséquent tout est bloqué. Et non seulement tout est bloqué mais on a très fortement indisposé la commune de Meyrin, et il sera désormais très difficile de négocier avec elle le déclassement, ô combien plus important, de la parcelle dite des Vergers. Et vous le savez également, Monsieur Pagani. Voilà le résultat de votre politique. Voilà le résultat de la politique que vous avez menée toute la législature précédente et voilà ce que ça donne... (Exclamations.)...nous manquons de logements, à Genève, et c'est de votre faute.

Alors, Mesdames et Messieurs les députés, cessez de nous faire la leçon, laissez-nous débattre et discuter des quatre projets de motion, que nous devrions débattre, d'ailleurs, ensemble, et non pas les unes après les autres, pour que le débat soit complet. Nous avons encore des tas de choses à vous dire, des responsabilités à prendre que nous souhaitons prendre, notamment en matière de zone agricole, que vous n'avez jamais osé prendre. Vous savez très bien, nous sommes prêts à vous faire des propositions à ce sujet. (Applaudissements.)

Le président. Je rappelle aux orateurs qu'ils s'adressent à l'assemblée ou au président.

M. John Dupraz (R). Ce départ est un éternel recommencement, et je dois dire que M. Sommaruga et M. Pagani ne manquent pas de culot.

Je voudrais tout de même rappeler quelques événements. Tout d'abord, alors jeune député à la commission des pétitions, tous les mois nous recevions M. Pagani et Mme Beffa, qui étaient membres de toutes les associations de quartier de la ville et qui s'opposaient à tous les plans localisés de quartier. Alors, Monsieur Pagani, quand vous venez nous faire la leçon, il faut vous prendre par le bout du nez, parce que le premier opposant aux constructions dans cette ville de Genève, et dans cette République, c'est vous-même.

Monsieur Sommaruga, vous êtes bien gentil. Mais je vous rappellerai qu'à Meyrin, notamment, il y avait un projet qui faisait l'unanimité sur le terrain dit de la Gravière. Qui est-ce qui s'y est opposé et qui a lancé le référendum ? C'est un socialiste, M. Pachoud, pour ne pas le nommer. Alors, vous comprenez, dans les problèmes de construction de logements, nous portons tous notre responsabilité. Et de dire «c'est la faute de la droite, nous, on est des saints, nous, on est des bons types, nous, on veut des logements», ça me fait doucement sourire. Les communaux d'Ambilly, depuis le temps qu'on en parle. Et alors ? Eh bien, oui, j'attends.

Mesdames et Messieurs les députés, il y a aussi des sites, en ville de Genève, que l'on pourrait construire. Est-ce que vous pensez qu'il est judicieux de maintenir un dépôt d'autobus à la Jonction, lieu idéal pour la construction de logements. C'est complètement absurde de maintenir des autobus, dans un quartier qui serait approprié pour le logement.

Parlons du site d'Artamis, ce scandale. C'est la gauche qui bloque, c'est la Ville de Genève. C'est pas nous. Alors prenez-vous par le bout du nez, Mesdames et Messieurs les députés de gauche. De vos leçons, nous en avons marre et plus qu'assez. Je vous cite encore un exemple de blocage, qui a été cité ce matin. L'école de Bardonnex, de Compesières. Qui est l'instigateur de l'opposition...?

Une voix. Celle-là c'est la meilleure !

M. John Dupraz. Un nommé Marcelin Barthassat, le seul Barthassat de la République qui ne vaut rien... (Exclamations. Huées.)...qui est plus à gauche qu'à droite. Nous n'avons pas à recevoir de leçons de votre part, vous êtes autant, sinon plus, responsables que les autres. Nous en avons marre de vos discours et nous voterons cette motion

Le président. Je prie les députés, par simple correction, de ne pas citer des noms de personnes qui ne sont pas dans cette assemblée.

M. Rémy Pagani (AdG). Je constate une fois de plus que M. Dupraz fait fi des droits des citoyens de pouvoir s'exprimer dans ce canton... (Rires. Exclamations.)...et de pouvoir agir en connaissance de cause. Cela étant, Monsieur John Dupraz, vous feriez bien de revoir vos classiques, parce que... (L'orateur est interpellé.)...en l'occurrence, vous vous êtes adressé à moi pour que j'en fasse de même. Cela étant, Monsieur John Dupraz, je vous citerai deux exemples, parce qu'il y en a une multitude.

Vous le dites, à très juste titre, que j'ai été un des fervents opposants à tout ce qui se construisait dans les années septante en ville. Et pour cause, car il s'agissait de construire la ville en ville. Et je revendique encore d'avoir participé à faire en sorte que le quartier des Grottes, par exemple, soit un quartier où il fait encore bon vivre et où on trouve encore des logements bon marché. Il en est de même pour le quartier de la Terrassière, aujourd'hui. Nous avons effectivement fait des référendums pour changer les plans localisés de quartier et j'en suis très fier. Aujourd'hui, cela fait partie du patrimoine. Les citoyens de notre République peuvent encore vivre et habiter au centre-ville, à la différence de la cité des banques, où il n'y a plus un seul logement - d'ailleurs, vous vous en plaignez autant que nous. De ce point de vue, à savoir celui de l'aménagement urbain, vous n'avez aucune leçon à me donner.

Venons-en à la politique suburbaine ou de la couronne urbaine. Contrairement à vous, Monsieur John Dupraz, je suis pour laisser la ville se développer. En l'occurrence, le terrain de Frontenex-La Tulette, près de la Gradelle, fait partie intégrante de la zone de la couronne urbaine que l'on doit développer. On doit donner des signes - on ne va pas refaire le débat d'avant l'été - on doit donner des signes politiques importants pour dire «oui, c'est là que nous voulons développer la ville.» Nous voulons que nos concitoyens s'associent à cette procédure, à cette problématique, parce que, là-bas, il y a des capacités constructibles, là-bas, il y a des capacités de transports collectifs très importantes.

C'était un terrain idéal, Monsieur John Dupraz. Ne venez pas nous dire le contraire. Vous le savez très bien. Vous avez décidé autre chose, Monsieur Portier. Vous avez décidé de privilégier 240 logements, cela veut dire, peut-être, 300 ou 400 nouveaux habitants, qui vont, et c'est bien naturel, user de leur droit d'opposition pour empêcher la densification de ce terrain. Vous le savez très bien et vous n'avez pas non plus de leçons à me donner à ce propos. Je sais très bien comment ils pourront agir pour empêcher toute densification sur ces terrains. Je le redis, vous avez introduit un cheval de Troie sur ce terrain, pour empêcher la construction de mille logements, à terme. Et lorsque je parle de terme, je ne parle pas de six mois ou une année mais dix ans. C'est pour cela que nous vous critiquons, s'il faut donner des exemples concrets.

J'étais naïf, je pensais que des statistiques... (L'orateur est interpellé.)...oui, ça m'arrive encore de temps en temps. Je pensais que le fait de se mettre autour d'une table et d'analyser les choses telles qu'elles se pratiquent - on en a fait l'exercice à la commission d'aménagement ou à la commission des travaux - en ce qui concerne les procédures. En effet, tout le monde critiquait la lenteur des procédures. Le département a fait un gros effort, et j'en remercie l'administration, pour nous montrer une enquête sur le rythme des procédures. Monsieur Koechlin, vous en êtes témoin, il nous a été montré, dossiers à l'appui, que les procédures n'étaient pas si longues que ça. Au maximum elles duraient deux ans, et ce lorsqu'il n'y avait pas d'accords. Nous en avons conclu que l'administration faisait bien son travail. Malheureusement, quand on se retrouve en plénière ou dans des débats publics... (Gros coup de tonnerre. Exclamations.)Contrairement à ce que je pensais, on a trouvé n'importe quel prétexte pour dire «oui mais, ce ne sont pas les bons dossiers, l'administration n'a pas fait ce qu'il fallait.» On est ainsi restés convaincus de ce dont on était convaincus au départ. C'est pour ça que je trouve que c'est, quelque part, se foutre de la gueule du monde. Pardonnez-moi l'expression !

Il faut appeler un chat, un chat: proposer des enquêtes et des études, en l'occurrence, vous avez eu recours à la même procédure en commission du logement. On a donné une statistique sur l'ensemble des PLQ du canton qui pourraient être urbanisés. En fait, tout ça, ce sont des tigres de papier qui servent à montrer aux gens qu'on fait quelque chose. Toutefois, concrètement, quand il s'agit de prendre des mesures, de montrer, parce que c'est notre rôle de parlementaires, dans quelle direction on va, il n'y a plus personne. En tout cas la majorité de ce parlement n'assume pas ses responsabilités, Monsieur Portier, et je maintiens: vous n'assumez pas vos responsabilités, qui sont de défendre les intérêts de la majorité des habitants de ce canton.

M. Carlo Sommaruga (S). Tout à l'heure, un député radical disait «gouverner, c'est prévoir». Je remarque qu'à part quatre ans pendant lesquels il y a eu, dans ce Grand Conseil, une majorité de gauche... (L'orateur est interpellé.)...non, les déclassements relèvent de la compétence de ce Grand Conseil. L'on n'a pas assisté à une politique de déclassement. Une telle politique entamée il y a vingt ou trente ans permettrait, aujourd'hui, de disposer des terrains suffisants pour construire et répondre aux besoins actuels. Qu'on ne vienne donc pas, aujourd'hui, nous faire la leçon sur les carences que vous, Mesdames et Messieurs de l'Entente, avez commises pendant ces deux voire ces trois dernières décennies. (L'orateur est interpellé.)

Cela dit, je ne peux pas laisser passer les déclarations de M. Portier. Il est faux de prétendre que, lors du débat que nous avons eu sur La Tulette/Frontenex, vous avez accepté de renvoyer le tout et de revenir sur le tout ou sur le solde. Vous savez pertinemment que, sur un cent pour cent de départ, ce qui est aujourd'hui renvoyé en commission, c'est l'équivalent du cinquante pour cent. Vous avez bradé un vingt-cinq pour cent de la zone pour une densification de très bas indice. C'est exactement ce qui s'est passé là et c'est ce qui va arriver ailleurs.

Aujourd'hui, Monsieur Portier, soit on siège dans un conseil municipal et on défend les intérêts locaux - qui peuvent être contradictoires avec ceux du canton, ou bien on siège dans l'enceinte cantonale, et on assume des responsabilités cantonales. Il est possible que les décisions de notre parlement n'auront pas un effet immédiat. Elles peuvent avoir un effet dans deux, trois, cinq ou six ans. C'est donc une prévision qu'il faut faire pour l'avenir. Il y a ici des déclassements qui sont immédiats, d'autres qui sont pour l'avenir.

Parlons un peu des Communaux d'Ambilly. Sauf erreur de ma part, lors des dernières élections municipales, les candidats de l'Entente figuraient, pour l'exécutif, sur une liste qui s'appelait «Sauvegardons les communaux d'Ambilly». Alors quoi ? On vient aujourd'hui, au niveau cantonal, nous dire qu'il faut faire quelque chose aux Communaux d'Ambilly, alors que, finalement, on n'arrive pas à maîtriser ses propres troupes sur le terrain. Nous avons chacun une pierre dans le jardin, ici ou là, dans notre propre parti. Cependant, en ce qui concerne les Communaux d'Ambilly, nous attendons, tous, que tout le monde se mobilise pour qu'on puisse procéder rapidement à d'autres densifications, car on ne peut pas concentrer l'effort cantonal uniquement sur cette zone.

Le problème de cette motion, ça n'est pas de dire «il faut favoriser les Communaux d'Ambilly» ni de dire qu'il faut déclasser. Le problème de cette motion, c'est qu'elle demande d'initier un certain nombre de procédures. Or je rappelle que le Conseil d'Etat a déjà lancé deux trains de déclassement qui sont en consultation, alors que vous demandez que le Conseil d'Etat les lance. Voici l'opportunisme politique qu'il y a derrière cette motion. Et voici ce que, nous, socialistes, dénonçons.

En ce qui concerne les PLQ et leur inventaire, je rappelle que la liste en a déjà été donnée et que les difficultés liées à ces PLQ ont été cernées.

Pourquoi n'ont-ils pas été réalisés ? Peut-être parce qu'il y a une ville à acheter, peut-être parce qu'il y a des servitudes croisées qu'il faut encore racheter pour pouvoir construire, peut-être qu'il y a même des contrats d'architectes qui bloquent la densification ou le projet qu'une fondation de droit public pourrait avoir sur tel ou tel périmètre.

Il y a donc derrière cette motion, le double discours: des mots qui ne sont pas suivis par des actes. Lorsqu'il faut passer aux actes, il n'y a plus personne, plus rien. C'est cela que nous dénonçons et nous vous invitons donc à rejeter la motion.

M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Cette motion demande deux choses. Faire l'inventaire des sites urbains et périurbains faisant l'objet de PLQ. L'inventaire est fait, il est tenu à jour et il est communiqué systématiquement aux milieux intéressés de la construction, syndicats et patrons, et des milieux immobiliers, propriétaires et locataires.

Quand vous dites, Monsieur Barrillier, que rien n'est fait, c'est que, apparemment, vous avez quelque peine à convaincre certains qui ont des droits à bâtir dans ces plans localisés de quartier de les mettre en oeuvre. Vous me demandez de faire cela, c'est fait, et vous le savez tous.

La deuxième chose est plus étonnante, c'est de prendre des mesures de déclassement. Vous êtes signataire de cette motion, Monsieur Koechlin, et vous venez d'expliquer que les déclassements ne servaient à rien. Dois-je suivre ce que vous proposez dans la motion ou ce que avez déclaré ? Peu importe, les trains de déclassement sont en route. Vous en avez un certain nombre qui sont ici, vous en avez d'autres qui sont à l'enquête publique. Les derniers, conformément au plan directeur cantonal, viendront dans les mois qui viennent.

Maintenant, cette motion est l'occasion de vous dire qu'on dit quelquefois que les politiques ne sont pas représentatifs de la population. Mais vous êtes, Mesdames et Messieurs les députés, tous extrêmement représentatifs de la population, parce que vous voulez tous résoudre la pénurie de logements sans construire un seul immeuble. (Applaudissements.)

Le président. Je mets aux voix la prise en considération de cette motion et son renvoi à la commission de l'aménagement par vote électronique. Le vote est lancé.

Mis aux voix, le renvoi de cette proposition de motion à la commission d'aménagement du canton est adopté par 39 oui contre 34 non.