République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1645
Proposition de motion de Mmes et M. Nicole Lavanchy, Jocelyne Haller, Rémy Pagani pour comprendre la politique cantonale en matière de logement des requérants d'asile
M 1619-A
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. David Hiler, Loly Bolay, Gabriel Barrillier, Hugues Hiltpold, René Koechlin, Edouard Cuendet, Pascal Pétroz, Jacques Baud, René Ecuyer, Marie-Paule Blanchard-Queloz, Françoise Schenk-Gottret, Alberto Velasco, Michèle Künzler concernant l'accueil et le logement des requérants d'asile

Débat

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Nous avons pris connaissance du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 1619 et nous rappelons qu'il s'agit là d'une motion de commission. La tâche difficile et ingrate de trouver un logement le plus digne possible aux requérants d'asile nous y est explicitée. A l'heure où le droit d'asile est démantelé à Berne, nous remercions le Conseil d'Etat de veiller à une certaine qualité d'hébergement de cette partie prétéritée de notre population.

En ce qui concerne la motion 1645, le groupe socialiste ne peut reprendre telle quelle la motion de l'Alliance de gauche. Le Conseil d'Etat y répond pour partie dans son rapport, dans sa réponse à la motion 1619 de la commission du logement.

Toutefois, la problématique du nombre d'assistants sociaux affectés aux réfugiés mérite une attention particulière. En effet, les communes qui, au départ, refusaient l'implantation de logements pour requérants d'asiles y ont finalement consenti, du moins pour certaines. Cela est assorti d'une condition: que les centres soient de petite taille. L'Hospice général nous a expliqué en commission du logement que les centres de petite taille leur posaient problème, car l'encadrement social y était plus difficilement «assumable» que dans un grand centre.

C'est pourquoi le groupe socialiste reprendra, dans une motion qui lui sera propre, le souci qu'il a de la qualité de l'encadrement des requérants.

M. Christian Bavarel (Ve). La problématique des logements des requérants d'asile et des personnes frappées de non-entrée en matière à Genève demeure cruciale. Je vous rappelle l'article 12 de notre Constitution fédérale, qui voudrait que l'on traite toute personne sur notre territoire avec un minimum de dignité. Je vous rappelle aussi que l'on évalue une démocratie à la manière dont elle traite les personnes les plus faibles.

Sans entrer en matière sur leur statut ni sur les décisions relatives à ces derniers, des gens sont ici, à Genève, et ils doivent pouvoir être logés dignement. Cette problématique est sérieuse. En effet, nous avions vu l'hiver passé que certaines difficultés pouvaient se présenter quant à leur logement, et nous souhaitons que, cet hiver-ci, les choses se passent de manière différente. J'ai l'impression que des mesures ont été prises, mais nous attendrons la fin de l'hiver pour pouvoir en juger.

Nous remercions le Conseil d'Etat de son rapport. Cependant, nous souhaiterions que les choses soient moins cloisonnées entre les différents statuts. Peut-être coûterait-il moins cher de loger ensemble, certaines fois, les gens se trouvant dans des conditions difficiles avec des statuts précaires, mais je pense que tout cela doit être étudié.

C'est pourquoi je vous propose de renvoyer cette motion à la commission des affaires sociales, aussi, de manière que l'on puisse examiner ce problème et réfléchir à tout cela.

M. Mario Cavaleri (PDC). Je voudrais d'abord remercier le Conseil d'Etat pour les réponses qu'il a apportées à la motion qui avait été discutée en commission du logement. Je pense que la motion 1645 n'a plus lieu d'être, compte tenu de la réponse du Conseil d'Etat à la motion 1619.

Bien que le sujet soit important, très sensible - dès lors qu'il s'agit du logement des requérants d'asile - lui accorder l'importance que souhaitaient lui donner les initiateurs de la motion 1645 reviendrait à discuter une nouvelle fois de ce sujet alors qu'il semble être tout à fait sous contrôle et maîtrisé par le Conseil d'Etat.

Par conséquent, je vous suggère de ne pas accepter de renvoyer la motion 1645 en commission, de laisser le nouveau gouvernement déployer ses activités dans ce domaine, et, si cela devait s'avérer nécessaire, que l'on puisse y revenir.

M. Eric Bertinat (UDC). La motion 1619 nous paraît quelque peu dépassée. A la lecture du rapport établi, on s'aperçoit que les chiffres datent de fin 2004, au mieux de début 2005. Depuis lors, force est de constater que le nombre des requérants d'asile a baissé parce que des mesures de restriction ont été prises au niveau fédéral, rendant ainsi ce statut moins attractif. Ce qu'on peut appeler «un tour de vis» doit également être pris en compte à Genève. La diminution du nombre de demandeurs d'asile libère des logements. Je pense qu'ici personne ne se plaindra de cet état de fait, surtout dans la situation que Genève connaît en matière de logement.

Nous souhaiterions que l'on puisse se pencher sur l'affectation de ces logements redevenus disponibles, à la manière dont l'UDC l'a fait à Vernier, plus précisément pour le bâtiment des Tattes qui libérera ainsi non seulement un certain nombre de mètres carrés mais, aussi, des possibilités d'utilisation de ces surfaces. On pourrait très bien en faire un EMS, ou des logements pour étudiants, ou les transformer en logements pour des personnes âgées. On peut comprendre le souci légitime de loger correctement des requérants, mais il convient de rappeler que le nombre des requérants admis est finalement modeste par rapport à celui de demandes que nous recevons. Et l'UDC souhaiterait, quant à elle, que ces logements - libérés donc - soient attribués directement et le plus rapidement possible selon la demande et l'affectation qui pourraient être faites.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je donne la parole à Mme la députée Dolorès Bolay.

Mme Loly Bolay (S). C'est la première fois que l'on m'appelle «Dolorès» dans cette enceinte, je vous en remercie.

Le président. Tournez votre micro devant vous, Madame la députée, et je continuerai à vous appeler «Loly ». (Rires.)

Mme Loly Bolay. Merci beaucoup, Monsieur le président ! J'aimerais, comme mes préopinants, remercier le Conseil d'Etat de sa réponse, somme toute assez rapide, concernant la motion 1619. Le Conseil d'Etat a parfaitement bien compris les demandes formulées dans cette motion, à savoir qu'il fallait tenir compte de l'avis des communes dans de telles procédures. On a vu à de nombreuses reprises que, lorsque le département déclenchait des procédures en APA non soumises à enquête publique, cela faisait monter aux barricades plusieurs communes parce que leur opinion n'avait pas été prise en compte lors des décisions. Aussi, je remercie le Conseil d'Etat de vouloir maintenant collaborer, anticiper et travailler en amont avec les communes.

Il était ressorti de nos débats à la commission des travaux que les structures d'accueil devraient être plus petites pour mieux s'intégrer dans les communes et les espaces affectés à cet effet. Et c'est le cas du Bois-Brûlé, au Grand-Saconnex, qui est une structure qui fonctionne très bien, qui est exemplaire.

Mme Michèle Künzler (Ve). Je voudrais faire suite à ce qu'a dit mon collègue Bavarel. Nous remercions le Conseil d'Etat pour la réponse qu'il a donnée à la motion de la commission du logement. Il y a dans cette réponse beaucoup de renseignements concernant les requérants d'asile, toutefois les problèmes demeurent pour les personnes ayant un statut précaire, que ce soient les personnes frappées de non-entrée en matière ou celles qui viennent ici dans l'espoir de faire soigner leurs enfants gravement malades. J'ai connaissance du cas d'une famille logée dans un studio à trois mille francs par mois alors qu'il y a des places libres aux Tattes... C'est absurde. J'aimerais donc que l'on étudie cela en commission, car on pourrait être plus souples dans l'attribution des logements. A l'Hospice Général, on nous dit: «On ne peut pas utiliser le foyer des Tattes, il est réservé aux requérants d'asile...»; alors, les autres ne peuvent pas y aller, on préfère les installer ailleurs que là où il y a de la place... Des gens qui viennent ici sont logés dans des structures très chères, ce qui est vraiment une absurdité vu l'état des finances publiques.

Il y a des places disponibles aux Tattes, alors profitons-en et ayons une vision plus souple de ces espaces ! Et il faut peut-être aller en commission pour que vous puissiez donner des réponses sur ce sujet. Sujet qui ne concerne pas que les requérants d'asile, puisqu'il comprend également les personnes ayant fait l'objet d'une non-entrée en matière et celles qui sont ici pour des raisons médicales sociales.

M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. On peut évidemment renvoyer ceci en commission mais, en réalité, ces problèmes ont souvent été discutés à la commission des affaires sociales et l'Hospice général a eu l'occasion de nous expliquer les difficultés de faire cohabiter des populations souvent - et je n'ai dit que «souvent» - délinquantes avec les communautés correspondantes formées de requérants qui n'ont rien à se reprocher. Il ne faut pas sous-estimer, Madame la députée, les querelles qui ont imposé des interventions extrêmement urgentes et graves au foyer des Tattes, alors que des communautés elles-mêmes défendaient leur manière d'être des gens parfaitement convenables en luttant contre quelques membres de leur communauté - qui, à leurs yeux, n'en faisaient pas partie.

On nous dit que c'est à cet endroit qu'il faut mettre, le cas échéant, pour des raisons d'économie, une famille et des enfants... Mais je vous jure qu'il faut réellement passer du temps là-bas pour se rendre compte que les choses sont plus compliquées que cela ! Je ne dis pas que cela ne sera jamais possible, je dis que c'est extrêmement difficile et qu'on nous reprocherait d'avoir pris des mesures au titre de l'économie si elles devaient déboucher sur des pépins qui, parfois, menacent d'être sévères.

En revanche, c'est vrai que ça n'est pas tout à fait l'objet de la question posée - notamment pas par la motion 1645 qui, au fond, reprend la question posée l'année d'avant. Alors, on peut recevoir et recevoir des motions... On peut aussi lancer un coup de fil à l'Hospice général - d'autant plus que, parmi les motionnaires, deux en font partie... Ce n'est peut-être même pas la peine de lancer un coup de fil. Il n'en reste pas moins qu'utiliser les termes qui le sont, notamment dans l'exposé des motifs - et je suis désolé que les motionnaires ne soient pas là pour qu'on puisse le leur dire - est totalement insupportable ! Au regard de la politique, très digne, que nous essayons de mener en faveur des requérants d'asile, des NEM ou de toute autre personne résidant de manière légale ou un peu moins légale sur notre sol.

Renvoyer cette motion soit en commission soit au Conseil d'Etat serait un signe que nous n'avons pas été compris et constituerait un signe d'encouragement pour redéterrer la hache de guerre entre un parlement, qui nous paraît beaucoup plus adéquat, et un gouvernement qui tâche de l'être lui aussi. C'est injurieux de voter des textes pareils à l'égard d'autorités qui, réellement, se donnent toute la peine possible pour traiter cette population avec toute la dignité qu'elle mérite ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons procéder dans l'ordre des textes. Au point 29, c'est la motion 1645 qui fait l'objet, par M. le député Bavarel, d'une demande de renvoi à la commission des affaires sociales.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1645 à la commission des affaires sociales est rejeté par 58 non contre 15 oui et 16 abstentions.

Mise aux voix, la proposition de motion 1645 est rejetée par 59 non contre 6 oui et 24 abstentions.

Le président. Nous passons donc au rapport du Conseil d'Etat.

Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 1619.