République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 8785-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi de Mmes Françoise Schenk-Gottret, Loly Bolay attribuant une subvention de 200'000F à l'association "Rien ne va plus" (prévention du jeu excessif)
Rapport de majorité de M. Pierre Weiss (L)
Rapport de minorité de M. Alberto Velasco (S)

Premier débat

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Ce projet de loi revêt pour le groupe socialiste une certaine importance puisqu'il concerne un phénomène non négligeable dans notre canton, à savoir la question des jeux de hasard. Ce problème concerne des milliers de personnes. A ce titre, il nous a semblé très important que l'on puisse voter ce projet de loi.

M. le conseiller d'Etat Unger nous a certes expliqué en long et en large qu'il existait une ordonnance du Conseil Fédéral, selon laquelle une redevance était prélevée sur les casinos pour être redistribuée aux cantons; un projet de loi a, de ce fait, été déposé par le Conseil d'Etat afin que les prestations en matière de lutte contre le jeu excessif puissent être subventionnées par ce biais. Il a malheureusement fallu attendre près d'une année avant que le rapport sur ce projet de loi ne soit déposé. Un certain nombre de mois s'étant écoulés entre la décision de la commission de ne pas entrer en matière et le dépôt du rapport PL 8545-A par M. Lescaze, nous avions demandé que, durant cette période transitoire, l'on verse une subvention à l'association «Rien ne va plus» en attendant que M. Lescaze veuille bien déposer son rapport. Entre-temps, M. Lescaze a déposé son rapport et nous avons voté le projet de loi 8545, lequel est entré en force.

Je reviens par conséquent sur mes remarques en fin de rapport. En premier lieu, je maintiens la remarque selon laquelle la mission exercée par l'association «Rien ne va plus» peut être considérée comme d'utilité publique. S'agissant de ma deuxième remarque - selon laquelle le retard pris par ce parlement avec le projet de loi 8545 rendait impossible tout financement de cette activité autre que celui prévu par le projet de loi - le projet de loi en question entre maintenant en force. Ma troisième remarque précisait que le refus d'entrer en matière entraînerait de factoune suspension des activités de l'association, voire la fin de celle-ci. Or, selon une information du 6 février 2004 de la Commission fédérale des maisons de jeu, quelque 37 millions de francs ont été versés aux cantons d'implantation des casinos - notamment à Genève, pour le casino de Meyrin. Je souhaite, Monsieur le président, que vous réagissiez à cette information. J'espère que vous pourrez nous indiquer si cette association pourra être financée, puisqu'un versement a été effectué et que le projet de loi 8545 a été voté.

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). La commission fédérale des maisons de jeu a recensé 8520 machines à sous. La Suisse détient le triste record de la plus forte concentration de casinos en Europe: en deux ans, on est passé de rien à trop. La Loterie Romande a disséminé 560 Tactilos dans les cantons romands. L'offre suscite la demande, les exploitants des jeux de hasard le savent très bien. La roulette a une image véhiculée dans la littérature du XIXe siècle, mais les machines représentent une manne plus précieuse pour les maisons de jeu. 80% des bénéfices du casino de Montreux ont leur source dans les bandits-manchots. Le casino de Mendrisio a encaissé 81 millions depuis l'automne 2002, la Loterie Romande 80 millions en un an grâce au Tactilo. Voilà de forts mouvements d'argent malsains, et l'Etat en est le premier bénéficiaire. C'est ainsi qu'au Tessin le canton et la Confédération se répartiront 47 millions.

Les médecins tirent la sonnette d'alarme, que ce soit au Centre du jeu excessif à Lausanne ou au Centre de prévention du jeu excessif à Genève. Ces centres ne peuvent plus répondre aux appels tragiques qui leur sont lancés. Ils sont obligés de reporter leurs consultations dans le temps. A Genève, le budget du centre n'a pas pu s'étoffer, alors que la demande de soins a doublé. Comment rester indifférent quand des personnes sont dans un état de détresse tel dû à leur dépendance pathologique qu'il faut les envoyer dans les services psychiatriques des HUG - puisque le centre, débordé, ne peut plus répondre à leurs besoins ?!

Je regrette l'attitude de la majorité de la commission - qui sera aussi certainement celle de ce Grand Conseil. Leur indifférence aux drames personnels et familiaux liés à la toxicomanie du jeu est incompréhensible. Subventionner une association aurait coûté moins cher à l'Etat que la prise en charge qui se fera inéluctablement dans les services psychiatriques hospitaliers.

Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente

Mme Salika Wenger (AdG). Il y a des jours où je me demande de qui l'on se moque ! Depuis toujours, on joue; depuis toujours, il y a des petits malins qui en profitent. Ce n'est cependant que très récemment que les Etats se font les complices de ces petits malins. Je suis bien d'accord sur le fait que ce n'est pas le lieu pour ce débat, mais je ne peux m'empêcher de l'évoquer. Aujourd'hui, qui ignore que, quel que soit le jeu, c'est toujours la table - c'est-à-dire le casino - qui gagne ? Ces entreprises engrangent des fortunes colossales en misant sur le besoin de rêve, sur la perspective de gains faramineux immédiats ou simplement sur l'adrénaline de nos concitoyens. C'est dommage !

On sait également que, dans le monde entier, plus il y a de casinos, plus il y a de joueurs et que, plus il y a de joueurs, plus il y a de joueurs compulsifs. C'est évident ! Or, non content de nous avoir imposé sa vision libérale de l'augmentation et de la répartition des lieux de jeu, le gouvernement fédéral vient de nous annoncer hier soir, par la bouche de M. Blocher, qu'il autorisait l'augmentation des mises et des gains - et probablement aussi l'augmentation des pertes...

Il n'est plus à démontrer que les maisons de jeu favorisent certains phénomènes peu glorieux comme la prostitution ou la délinquance - des phénomènes dont on n'aime guère parler et que l'on prétend vouloir juguler...

Une voix. Et le blanchiment !

Mme Salika Wenger. Et le blanchiment, en effet ! Car il est probable que l'accroissement des gains et des pertes permettra un blanchiment beaucoup plus rapide ! Nous sommes tous d'accord. J'imagine bien que M. Blocher envisage la répartition des richesses de cette manière: par le jeu ! Et que lui, qui se fait le chantre de la sécurité à toutes les sauces, va s'attaquer aux problèmes de délinquance en autorisant l'ouverture de plus de casinos, permettant ainsi le développement de plus de délinquance... C'est son problème !

Compte tenu - ou plutôt: non tenu... - de tout ce qui précède, on voudrait que le contribuable passe à la caisse... C'est un peu fort ! Pourquoi le contribuable devrait-il passer à la caisse ? Pour tenter de juguler les conséquences induites par le jeu que l'on a autorisé ? Je ne suis pas certaine que le contribuable serait très content... Il le serait d'autant moins que les casinos ne font qu'empocher les bénéfices et qu'ils n'ont pas, contrairement à la Loterie Romande ou à la Ville de Genève, mis en place des mécanismes qui permettraient de traiter ces personnes. De ce point de vue, la commission des finances, dans sa grande sagesse, a eu entièrement raison de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi ! (L'oratrice est interpellée.)Mais ça, c'est sûr ! Pour une fois, on est d'accord !

Il me semble néanmoins que, dans les directives du gouvernement fédéral sur le jeu, il était fait référence à des plans sociaux qui auraient dû être présentés avec les demandes de concessions. Alors, on peut toujours rêver ! Et imaginer que ces plans sociaux prévoyaient la prise en charge de ces joueurs compulsifs ainsi qu'une politique d'information et de prévention... Je me tourne ici vers le Conseil d'Etat en lui demandant, d'une part quelles ont été ses relations avec la commission des maisons de jeu, d'autre part s'il sait si Berne est prête à entrer en matière sur cette question. Quoi qu'il en soit, il existe déjà à Lausanne un centre qui s'occupe de ce type de pathologies pour toute la Romandie. Soit ce centre est capable d'absorber toutes les personnes en difficulté, et cela va très bien ainsi, soit ce centre n'en est pas capable, car le nombre des personnes en difficulté va grandissant et, dans ce cas, ce sont les casinos qu'il faut fermer ! Mais il ne faut pas ouvrir une nouvelle clinique pour les joueurs, financée avec l'argent des contribuables !

On avance habituellement un argument relatif aux retombées fiscales... Je ne sais pas si c'est ainsi que l'on a l'intention de financer le déficit public mais, si c'est le cas, je vous rappelle que la prostitution et la drogue rapportent également beaucoup d'argent ! Je vous conseille donc de suivre les directives de vote de la commission et de ne pas entrer en matière sur ce projet de loi.

M. Jean Spielmann (AdG). On voit bien, dans le cadre de ce projet de loi, quels mécanismes ont été instaurés s'agissant du choix des salles de jeu. Il me paraît important de souligner que les choix opérés au niveau de la Confédération n'ont pas été démocratiques, puisqu'il n'y a pas eu de débat: ce sont des décisions administratives qui ont été prises - décisions qui ont consisté, dans le cas particulier, à mettre en place des casinos privés et à retirer quasiment toutes les concessions aux casinos publics.

Le Conseil d'Etat porte également une responsabilité dans le choix et la mise en place de ces maisons de jeu, notamment en ayant imposé au casino de Genève des directeurs qui ont tout fait pour couler ce dernier.

On se trouve aujourd'hui dans la situation suivante: une association qui joue un rôle positif, qui a accompli un travail important et qui a bénéficié entre 2000 et 2003 de subventions du casino de Genève n'en reçoit plus, car il a été décidé de fermer ce casino et d'en ouvrir un privé. Alors, aujourd'hui les privés empochent les donnes, et ce serait aux contribuables de ce canton de payer les dégâts causés par ceux qui pratiquent ces jeux ?! Auparavant, il existait un certain nombre de directives, il existait au moins des règles selon lesquelles les casinos devaient reverser une partie de leurs bénéfices - cette partie étant par la suite redistribuée. Or aujourd'hui, on nous dit que tout l'argent accumulé par les casinos va dans les caisses de la Confédération; cette dernière devrait normalement, par le biais de certains dispositifs, reverser une partie de cette somme aux cantons. Mes questions sont donc les suivantes: où arrive cet argent ? Comment est-il utilisé ? Et comment l'Etat entend-il répondre aux frais et aux coûts engendrés par la mise en place de telles maisons de jeu - avec les conséquences qu'elles entraînent ?

Tant que l'on ne connaît pas les réponses à ces questions, il n'est pas normal que nous tenions le discours suivant: «La situation a changé: les privés réalisent des bénéfices, on n'a plus les moyens de consacrer une partie des recettes engendrées par ces jeux aux soins des dégâts qu'ils provoquent, c'est donc le contribuable qui va payer». On partirait là dans un système de subventionnement - peu importe la provenance de cet argent et la manière dont le système fonctionne. Je ne suis pas d'accord avec cette procédure. Je pense, au contraire, que l'on devrait imposer une partie plus importante des bénéfices engendrés par ces jeux et redistribuer une partie de ces recettes fiscales afin de couvrir les frais des organismes traitant les problèmes de jeu excessif. Il incombe ensuite à ces organismes de remplir leur rôle social.

Au-delà des chiffres et des affirmations politiques du Conseil d'Etat, j'annonce d'emblée que je ne voterai pas l'entrée en matière sur un tel projet de loi. Ce n'est pas aux contribuables de se substituer aux personnes qui réalisent ces bénéfices et à qui il incombe d'assurer la couverture des dégâts sociaux qu'elles engendrent !

Présidence de M. Pascal Pétroz, président

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, je dois vous faire part de ma déception. Le chef de groupe du parti socialiste nous a annoncé hier, lors de la séance réunissant le Bureau et les chefs de groupe, que le rapport de minorité serait retiré. Or, tel n'est pas le cas et nous nous engageons dans un débat-fleuve qui n'a pas lieu d'être dans une procédure d'extraits. Cela me peine, car cette procédure ne peut fonctionner que si les députés jouent le jeu.

Le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants. Sont encore inscrits Mme Gauthier, M. Aubert, les rapporteurs de majorité et de minorité, MM. Blanc, Lescaze et Charbonnier, ainsi que M. le conseiller d'Etat Laurent Moutinot.

Mme Morgane Gauthier (Ve). Comme l'on se trouve effectivement dans une procédure d'extraits, mon intervention tendra avant tout à préciser la position du groupe des Verts. Suite au vote, lors de notre dernière session, du projet de loi 8545 par notre Grand Conseil, nous vous annonçons que nous refuserons l'entrée en matière sur le projet de loi 8785. Je ne veux revenir ni sur le fond, ni sur la forme de ce projet de loi. Nous ne voulons en rien dénigrer le travail absolument nécessaire réalisé par l'association «Rien ne va plus». L'un des buts du présent projet de loi ayant toutefois déjà été repris dans le projet de loi 8545, ce projet est obsolète à nos yeux. C'est pourquoi nous en refuserons l'entrée en matière.

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. Il est parfois agréable de constater qu'il n'est pas une condition suffisante que certains députés n'interviennent pas pour que d'autres se laissent aller à des flots d'interventions sur, précisément, sur un objet qui devait être retiré... Dans le cas présent, je remercierai simplement mon collègue Velasco pour avoir reconnu d'emblée que le projet de loi qu'il avait présenté était obsolète, compte tenu du rapport finalement déposé par notre collègue Lescaze sur le projet de loi 8545.

C'est la raison pour laquelle je vous suggère, Mesdames et Messieurs les députés, de ne pas entrer en matière sur ce projet. J'espère qu'avec le sens de l'élégance qui est habituellement le sien, M. Velasco se joindra à moi pour que nous puissions ainsi clore le débat sur ce projet de loi.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Je souhaite simplement annoncer à mon collègue rapporteur de majorité que nous nous abstiendrons lors du vote d'entrée en matière sur ce projet de loi, cela pour des raisons qu'il peut bien comprendre.

M. Pierre Weiss. Tout à fait !

M. Claude Blanc (PDC). Arrivant, une fois n'est pas coutume, légèrement en retard à cette séance du Grand Conseil, je tombe en plein débat sur les casinos. Suite aux propos tenus par M. Spielmann, je ne peux m'empêcher de prendre la parole. Bien que cela n'ait rien à voir avec le projet de loi stricto sensu, les propos tenus à l'instant par M. Spielmann sont inacceptables ! Ce dernier a déclaré que Conseil fédéral avait, au mépris des règles démocratiques, retiré le casino de Genève au secteur public pour le donner au secteur privé. Or, je tiens à lui rappeler que c'est grâce à l'incurie du Conseil administratif de la Ville de Genève, que c'est grâce à l'incurie de son collègue qu'il connaît bien que le casino a été retiré à la Ville de Genève. L'incurie de Monsieur... Comment s'appelle-t-il, déjà ?

Une voix. Hediger !

M. Claude Blanc. Hediger ! L'incurie de M. Hediger s'est par ailleurs vérifiée à d'autres endroits de notre vie politique, et elle nous coûte fort cher ! Elle s'est, par exemple, vérifiée dans la gestion catastrophique du stade de la Praille. La commission de contrôle de gestion prend maintenant connaissance de tous les dégâts causés par l'incurie de M. Hediger. Cette incurie s'est encore vérifiée, en Ville de Genève, dans tous les problèmes inhérents à la patinoire. Que M. Spielmann ne vienne donc pas nous dire que le Conseil fédéral a retiré le casino aux pouvoirs publics pour le confier à des privés, et cela au mépris des règles démocratiques ! Le Conseil fédéral n'a fait que constater l'incurie des dirigeants de la Ville de Genève !

Cela étant...

Une voix. Tu te fais attaquer, Spielmann, tu ne veux pas répondre ?

M. Claude Blanc. Je n'attaque pas M. Spielmann ! (Rires.) (Manifestation dans la salle.) (Vives protestations de M. Spielmann qui se lève.)

Le président. Monsieur le député, asseyez-vous et laissez parler M. Blanc ! (Brouhaha.)Vous laissez parler M. Claude Blanc ! (M. Spielmann continue de protester.)Monsieur le député, arrêtez ce cirque ! Laissez parler M. Blanc ! (M. Spielmann proteste toujours.)Vous laissez parler M. Blanc ! Monsieur le député, asseyez-vous ! (M. Spielmann proteste encore.)Monsieur le député, je vous avertis: cela fonctionnera comme je le déciderai ! Asseyez-vous et laissez parler M. Blanc ! (Vives protestations de M. Spielmann.)Vous n'avez pas le droit de couper ainsi la parole à M. Blanc !

M. Jean Spielmann. Soit vous me donnez la parole après, soit vous me la donnez tout de suite ! Il n'est pas normal que je me fasse attaquer sans pouvoir répondre ! C'est vraiment inacceptable !

Le président. Asseyez-vous !

M. Jean Spielmann. Non, je ne m'assieds pas !

Le président. Asseyez-vous, car vous êtes en train d'interrompre M. Blanc ! (Manifestation dans la salle.)Asseyez-vous !

Des voix. Dehors ! Dehors !

Le président. Asseyez-vous ! Je laisse parler M. Blanc, après quoi je vous répondrai. Mais je n'accepte pas que vous coupiez la parole à M. Blanc ! (M. Spielmann rétorque.)Poursuivrez, Monsieur Blanc ! Poursuivez !

M. Claude Blanc. Monsieur le président, je voudrais immédiatement préciser qu'à aucun moment je n'ai attaqué M. Spielmann ! (Protestations.)J'ai, en revanche, bien attaqué M. Hediger. Vous pouvez allez le chercher, car lui devrait avoir droit à la parole. Comme il a le courage d'être absent, il ne pourra certes pas répliquer. Mais je ne vous ai pas attaqué, Monsieur Spielmann ! J'ai simplement attaqué votre petit copain, que vous essayez de couvrir par tous les moyens ! (Applaudissements. L'orateur est interpellé. Le président agite la cloche.)

Cela étant dit, je tiens à vous signaler, Monsieur Spielmann, qu'il n'est pas tout à fait vrai de prétendre que le casino privé de Meyrin ne verse rien aux pouvoirs publics. J'aimerais rappeler à cette auguste assemblée... (L'orateur est interpellé par M. Spielmann. Le président agite la cloche.)Mais laissez-moi parler ! Je ne vous attaque pas, là ! Je n'attaque même pas votre petit copain ! (L'orateur est à nouveau interpellé par M. Spielmann.)Je relève simplement, Monsieur Spielmann... (M. Spielmann continue de parler.)

Une voix. Tu parleras quand ce sera ton tour !

Le président. Monsieur Spielmann, je vous rappelle à l'ordre en vertu de l'article 90 du règlement de notre Grand Conseil ! Si cela continue, je ferai application de l'article 91 ! Laissez parler M. Blanc !

M. Claude Blanc. Laissez-moi vous dire - à vous, Monsieur le président - que les propos tenus tout à l'heure par M. Spielmann au sujet du casino de Meyrin ne sont pas tout à fait exacts. Voici la réalité: ce casino a, conformément aux dispositions de la loi fédérale sur les maisons de jeu, conclu une convention avec la commune de Meyrin; une fondation a été créée, alimentée par le casino de Meyrin. En fonction du chiffre d'affaires réalisé sur les jeux, une contribution de 980 000 F était prévue pour la première année. Cette contribution atteindra en réalité 1,5 million, car le casino a fonctionné mieux que prévu. Alors, on ne peut pas dire que le casino de Meyrin ne contribue pas à la vie sportive et associative du canton de Genève, puisque cette fondation a été créée par la commune de Meyrin et par le casino afin de soutenir les activités culturelles et sportives de la commune et de la région de Meyrin ! Voilà la vérité ! Je ne pouvais pas laisser dire n'importe quoi à ce sujet !

Je tiens également à préciser que si la Ville de Genève ne possède plus le casino, elle n'a qu'à s'en mordre les doigts ! La commune de Meyrin - qui n'a rien entrepris pour obtenir le casino aux dépens de la Ville de Genève, mais qui n'a fait que l'accueillir, puisqu'il fallait bien que quelqu'un l'accueille compte tenu de la situation désastreuse dans laquelle s'était mis le casino de la Ville de Genève - en retire un certain profit pour ses activités sportives et culturelles, et nous nous en félicitons tous !

Le président. Merci, Monsieur le député. Messieurs Grobet et Spielmann, si vous croisez M. Hediger, sachez que, s'il s'inscrit, je lui donnerai la parole, car il a effectivement été mis en cause.

M. Bernard Lescaze (R). Le groupe radical n'entrera pas en matière sur ce projet de loi. Il est évident que l'association «Rien ne va plus» fait oeuvre utile, mais vous avez bien voulu accepter, lors de l'une de nos dernières séances, le projet de loi d'application de la loi fédérale sur les jeux de hasard et les maisons de jeu évoqué par MM. Weiss et Velasco. Vous l'avez, de surcroît, accepté sans débat. Certaines députées regrettaient qu'il n'y ait, à cette occasion, pas eu de débat sur le casino. Je constate, au vu de ce qui se passe actuellement, qu'elles avaient tort et qu'il n'aurait pas fallu lancer ce débat.

Le conseiller d'Etat chargé du département de l'action sociale et de la santé, qui disposera désormais d'un peu d'argent provenant du casino de Meyrin, saura donner à «Rien ne va plus» les moyens financiers qui pourraient lui être nécessaires sans que nous nous livrions ici à une grande polémique sur feu le casino de Genève. Je partage à cet égard, en grande partie, les propos de M. Blanc. Je constate par ailleurs que notre collègue Hediger était présent tout à l'heure; je l'ai moi-même croisé à la buvette. Je suis allé l'y chercher, mais il ne s'y trouve plus. Sans doute a-t-il entendu le débat et a-t-il disparu... (Commentaires.)

Je répète pour conclure que nous n'entrerons pas en matière sur ce projet de loi, car le financement de «Rien ne va plus» est désormais assuré par l'argent qui proviendra du casino de Meyrin.

M. Alain Charbonnier (S). En premier lieu, je regrette l'étendue de ce débat, ce n'était pas du tout le but de notre groupe.

En deuxième lieu, je tiens à préciser que je n'ai jamais annoncé que l'on retirerait le rapport de minorité, j'ai simplement indiqué que l'on ne ferait pas de débat sur ce sujet, malgré le rapport de minorité. C'est ce que le groupe socialiste a fait, puisqu'il s'est contenté d'une déclaration qui n'a pas duré plus de cinq minutes. Tel était le but de notre demande de mise en extraits de ce projet de loi, puisque tout semblait réglé suite au vote, à l'unanimité et sans débat, du projet de loi 8545 lors de la dernière session - et cela, après le dépôt effectivement un peu tardif du rapport de M. Lescaze.

Je répète en conclusion qu'il n'était pas du tout dans le but du groupe socialiste de provoquer un débat de cette ampleur sur ce projet de loi.

M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Permettez-moi, dans la mesure du possible, de recentrer vos propos sur le projet à l'examen ! Nous ne récrirons pas cet après-midi l'histoire du casino de Genève - ou de celui de Meyrin - la mémoire en est suffisamment vive pour que les uns et les autres puissent garder les faits à l'esprit.

Cela étant dit, lorsque la commission des finances m'a auditionné sur le projet qui vous est soumis, j'ai en premier lieu relevé que le jeu pathologique était un problème - et un vrai problème. On ne peut pas passer son temps à s'étriper sur l'histoire du casino sans remettre au centre du débat l'objet même du montant prévu de la subvention, à savoir le jeu pathologique. Ce dernier s'inscrit dans tout le spectre des toxicodépendances et est largement aussi grave que d'autres toxicodépendances plus stigmatisées. Ce point est important et doit être reconnu.

Le deuxième élément qu'il convient de souligner est la qualité du travail fourni depuis des années par l'association «Rien ne va plus». J'avais, à cet égard, prélevé - non pas sur une caissette, comme cela avait été suspecté en commission des finances, mais sur une ligne budgétaire à disposition du Grand Conseil et du Conseil d'Etat pour des actions ponctuelles - une somme pour garantir la survie de cette association, le temps que votre Conseil puisse, soit examiner le projet 8785, soit voir revenir le projet 8545. Bien que j'en aie été tancé, j'ai désobéi une deuxième fois, et cela à la demande des personnes souffrant de ces problèmes, à la demande du maire de St-Julien - qui découvre aussi dans sa population les préoccupations liées aux jeux du hasard - ainsi qu'à la demande de M. Borrel, maire d'Annemasse.

On constate que la multitude des casinos attire de plus en plus de joueurs et révèle de plus en plus de joueurs pathologiques. Il y a fort longtemps, lorsque nous avions débattu des projets de casinos - mais pas plus de celui de Genève que des autres - je m'étais opposé à ces projets pour des raisons de santé publique. Le peuple en a voulu autrement; nous respectons sa décision.

A l'heure actuelle, nous devons être en mesure de faire face à la prise en charge de ces joueurs pathologiques. Une partie de cette prise en charge peut se faire dans le cadre de l'assurance-maladie. Lorsque la thérapeutique existe pour une maladie donnée, il n'y a aucune raison de subventionner une association - quelle que soit la valeur de son travail - autrement que par le remboursement des actes thérapeutiques, et cela en vertu de la loi sur l'assurance-maladie. En revanche, il ne faut pas négliger le combat en matière de prévention - et c'est là ma préoccupation. Nous devons, avec «Rien ne va plus»; nous devons, avec l'association lausannoise qui s'en occupe; nous devons, avec les maires des villes françaises qui nous entourent, prendre langue et décider des actions que nous entendons mener en termes d'associations multisites ou de programmes complémentaires localisés à différents endroits, mais permettant tout au moins, dans la mesure du possible, la prévention de cette catastrophe qui constitue une addictionsupplémentaire dans le panorama de la santé genevoise.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons voter sur les conclusions... (Remarque de M. Spielmann.)La liste était close, Monsieur le député. S'il vous plaît, respectez les règles de délibération de ce parlement !

Une voix. On a le droit de demander le renvoi en commission !

Le président. Pour demander le renvoi de ce projet en commission, il faut avoir la parole. Or, on ne peut pas demander la parole si la liste est close ! (Le président est à nouveau interpellé.)Mais non, la liste est close ! La liste est close !

M. Jean Spielmann. Je prends acte du fait que vous ne me donnez pas la parole !

Le président. Non, je ne donne pas la parole à un député qui la demande lorsque la liste est close ! M. le député Grobet aurait eu tout le temps de s'inscrire avant la clôture de la liste. A défaut, il aurait pu le demander à d'autres. Efforçons-nous de travailler dans une certaine sérénité !

Je vous propose de voter sur les conclusions du rapport de majorité. Et la majorité de la commission vous suggère de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi.

Mis aux voix, ce projet est rejeté en premier débat.