République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 8885-A
Rapport de la commission du logement chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Antonio Hodgers, Michèle Künzler, Ueli Leuenberger, Ariane Wisard-Blum, Anne Mahrer, Esther Alder, Sylvia Leuenberger, Christian Bavarel, Morgane Gauthier, Stéphanie Nussbaumer pour un plan d'urgence en faveur du logement des personnes en formation

Premier débat

M. Jacques Baud (UDC). Il serait temps que ce Grand Conseil, y compris l'Etat, accepte enfin ses responsabilités ! Depuis des années, nous n'avons strictement rien construit pour les étudiants: il ne s'est quasiment rien fait depuis la Cité universitaire ! Le Grand Conseil, y compris l'Etat, a voulu agrandir son alma mater, développer ses HES et faire venir l'Ecole de pharmacie, mais nous n'avons rien fait pour nos étudiants ! Certains d'entre eux dorment dans la rue, dans leur voiture ! C'est inadmissible ! Nous savons que le marché compte 200 à 250 logements de libres - c'est-à-dire rien ! Nous savons que les régies ne veulent pas louer de logements aux étudiants, car ces derniers ne disposent pas d'un salaire. Il est temps que l'on prenne nos responsabilités ! Je vous demande donc d'accepter ce projet de loi et j'espère qu'il le sera à l'unanimité !

Mme Michèle Künzler (Ve). Les Verts saluent évidemment l'aboutissement de ce projet de loi, que nous avons voté à l'unanimité en commission. Pour une fois que l'on émet une proposition concrète au niveau du logement, je pense que cet événement mérite d'être souligné ! C'est, bien entendu, à un besoin tout à fait spécifique qu'il sera répondu: le problème du logement des étudiants.

Comme vient de le relever M. Baud, il s'agit d'une question urgente. La mobilité des étudiants est en effet accrue; ces derniers ne peuvent, de surcroît, pas bénéficier des logements sociaux, puisqu'ils sont soumis à des contraintes - telles celle de résider dans notre canton depuis deux ans - qui ne correspondent pas à leur situation.

Nous acceptons bien volontiers ce projet de loi qui a été totalement modifié en commission, mais nous restons persuadés de la nécessité d'une coordination entre les divers services s'occupant du logement pour étudiants. Nous espérons par ailleurs, lorsque l'Etat sera doté d'un budget, que la ligne promise y sera bien inscrite, de manière à permettre l'aménagement de logements provisoires pour les étudiants. Je me réfère ici à la ligne qui a été promise à hauteur de 300'000 francs. Cependant, vous vous invitons vivement à voter ce projet de loi !

M. Gilbert Catelain (UDC). J'ai lu ce rapport. J'ai compris qu'un budget supplémentaire de 10 millions avait été attribué à la Fondation pour permettre la réalisation d'un programme. J'ai également pris connaissance du fait que des projets étaient en cours. Mais, si j'ai bien compris - et je m'adresse ici à Mme la rappor... teuse ? (Commentaire.)Je ne sais jamais s'il s'agit d'une rapporteuse, d'une rapportrice ou... Je m'adresse donc à Mme la rapporteu... re.

Donc, je n'ai pas très bien saisi le lien entre les 10 millions et les projets en cours. Mes questions sont les suivantes: les projets prévus peuvent-ils démarrer sans autre forme de procès ? Et quel est le lien entre les 10 millions supplémentaires attribués à cette Fondation et la réalisation des projets ? Je me demande s'il ne s'agit pas d'une «usine à gaz»... Ne peut-on pas mettre en oeuvre ces projets sans passer par la Fondation ? Ne peut-on pas, soit économiser ces 10 millions, soit les consacrer à ces projets ? Pourriez-vous m'apporter des précisions quant à l'utilisation de ces 10 millions, puisque les projets prévus par la Fondation sont déjà en route ?

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle que nous sommes en procédure accélérée; or cinq personnes sont encore inscrites ! Il me semble qu'il n'y a pas lieu de refaire ici le travail réalisé en commission, et vous pouvez tout à fait adresser vos questions à Mme Künzler ou à Mme Nussbaumer dans le cadre du débat...

M. Hugues Hiltpold (R). C'est avec satisfaction que le groupe radical votera ce projet de loi tel qu'il ressort des travaux de la commission du logement. Je vous informe que cette dernière a travaillé dans un esprit pragmatique, puisqu'un seul des axes du projet de loi - en l'occurrence, la dotation de 10 millions - a été conservé dans le projet de loi tel qu'il vous est présenté aujourd'hui.

Je souhaite rendre hommage aux Verts. Par le biais de ce projet de loi, ces derniers ont en effet eu le mérite de «mettre sur la table» la problématique du logement pour étudiants. Je tiens également à vous faire savoir que la commission a effectué un travail rapide. Cela n'a, en revanche, pas été le cas du rapporteur, qui a mis près de huit mois à déposer son rapport, quand bien même il était important que ce dernier soit voté rapidement ! (Brouhaha.)

M. Souhail Mouhanna (AdG). Il va de soi que nous sommes favorables à ce que les conditions d'études des personnes en formation, notamment les conditions en matière de logement, soient assurées par la collectivité publique. Nous estimons que l'Etat devrait se montrer encore plus interventionniste dans ce domaine, car il y a encore bien davantage à faire que ce qui se réalise actuellement. Nous comptons donc sur le département responsable pour mener une politique plus interventionniste dans ce domaine.

Par ailleurs, les propos de M. Baud m'ont paru extrêmement intéressants, dans la mesure où il a souligné les difficultés - en particulier matérielles - des étudiants. J'espère que cette intervention annonce par exemple, le moment venu, une prise de position de l'UDC contre l'augmentation des taxes universitaires et contre les atteintes à la démocratisation des études. Nous verrons bien comment la situation évoluera.

M. Alberto Velasco (S). Evidemment que le groupe socialiste accueille favorablement ce projet, d'autant plus que la population étudiante de notre canton sera appelée à augmenter au vu des projets d'extension de notre université.

On a également pu lire dans la presse de hier que notre canton connaît pour la troisième année consécutive une hausse considérable de la population, ce qui ne fait qu'aggraver la situation du logement dans notre cité. Ce projet de loi vient donc à temps pour prévoir l'avenir !

M. Catelain a posé une question, mais il aurait dû lire dans le rapport que c'est, précisément, une commission qui décide. Et la réponse à votre question est là ! Quant aux projets futurs, il n'y a aucun problème: compte tenu des demandes qui nous ont été adressées en commission, je vous garantis que ces 10 millions seront très rapidement affectés !

Pour conclure, je répète que le groupe socialiste acceptera sans hésitation ce projet de loi.

M. Claude Blanc (PDC). En préambule, je dois remercier le groupe des Verts pour avoir pris l'initiative de ce projet de loi. D'autre part, je me rallie aux propos de M. Hiltpold concernant ce projet. La commission du logement a simplifié ce dernier, elle a surtout cherché à simplifier les procédures de manière à faciliter le travail de l'ensemble des intervenants dans ces dossiers.

Je précise par ailleurs à M. Catelain que les 10 millions prévus serviront, précisément, à faire face à des projets en cours qui souffraient d'un manque de financement. Et en accord avec la Cité universitaire, on confie par la même occasion à la FPLC le soin de gérer ces problèmes. On accorde une somme de 10 millions supplémentaires afin de permettre à des projets de démarrer grâce à l'intervention des banques. Ces 10 millions constitueront des fonds propres.

Ce projet, dont les Verts sont à l'origine, a été traité avec beaucoup de diligence par la commission du logement. Alors que l'on a fourni un effort important pour parvenir à rencontrer les proposants, ce projet a ensuite dormi dans des tiroirs... On s'était cru obligés de confier le dossier à un Vert, afin que ce groupe garde jusqu'au bout la paternité de ce projet, et, maintenant, le Grand Conseil traite ce projet en urgence parce que ce dernier a dormi six ou huit mois dans les tiroirs d'un Vert ! Il faudrait savoir ce que nous voulons ! Parfois, nous n'agissons pas, et vous nous en accusez, d'autres fois nous agissons, et vous freinez les débats ! (L'orateur est interpellé.)Voilà ce que je tenais à préciser, chère Madame ! Etant donné l'effort qui a été le nôtre pour venir à votre rencontre, vous auriez également pu vous efforcer de déposer un rapport à temps !

M. Rémy Pagani (AdG). Je vous rappelle, Monsieur Blanc, que nous sommes des députés de milice et que nous faisons tous des efforts pour rendre à temps nos rapports ! Il ne s'agit de faire ici le procès du rapporteur: des raisons impératives ont probablement retardé le dépôt de son projet.

Nous n'avons pas signé le projet de loi proposé par les Verts, car nous estimions qu'il faisait doublon avec la fondation chargée de «booster», si j'ose dire, la construction de logements dans notre canton. Cela a été ratifiée par la commission, qui défend aujourd'hui la position que nous défendions alors - à savoir de «booster» davantage encore cette fondation. En commission, nous nous sommes ralliés à cette position-là et, ces 10 millions étant acquis, nous espérons voir la «Fondation pour la promotion du logement bon marché et de l'habitat coopératif» (FPLC) prendre rapidement en charge ce dossier - même très rapidement ! - car les étudiants vivent une situation extrêmement difficile. Je trouve que les étudiants qui viennent de l'extérieur du canton ont beaucoup de mérite: pour accéder à leurs études, ils doivent en premier lieu se trouver un logement - et dans quelles conditions ! Ensuite, on leur demande de payer une taxe. Encore la semaine dernière, il nous a été proposé d'augmenter ces taxes ! C'est faire bien peu de cas de ces étudiants, alors que notre génération a bénéficié de conditions extrêmement favorables pour accéder à l'ensemble des études ! Je trouve quelque peu revanchard de la part de certains de faire payer à un tel point à cette nouvelle génération le fait d'accéder à des études, notamment universitaires.

Je souhaite profiter de ce que j'ai la parole pour dire la chose suivante: nous sommes extrêmement attentifs à la mise à disposition de logements à bon marché non seulement pour les étudiants, mais également pour les personnes en formation. J'insiste sur ce point, car certaines de ces personnes tentent de se former à côté de leur travail. Je pense notamment à une minorité d'apprentis et de jeunes travailleurs. Il s'agit de leur offrir des conditions leur permettant de subsister avec un salaire ultra-réduit ou une bourse d'étude. Et la construction de logements pour cette catégorie de personnes en formation nous paraît également importante. Nous espérons donc que M. Barro - qui, je crois, préside la FPLC - aura le souci de mettre très rapidement en oeuvre des projets pour satisfaire à la demande de logements extrêmement bon marché !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je donne la parole à M. Claude Blanc. S'exprimeront encore Mme le rapporteur, puis M. le conseiller d'Etat Laurent Moutinot. Ensuite, je vous proposerai de voter.

M. Claude Blanc (PDC). Je m'amuse d'entendre M. Pagani, car il me semble qu'il était, il y a quelques mois, l'un des coauteurs d'un projet de motion invitant le Conseil d'Etat à boycotter les produits américains lors des achats de l'Etat. (Brouhaha.)Or il a cité en exemple tout à l'heure, dans le cadre du débat sur les tags, la situation à Los Angeles et il introduit maintenant, dans le cadre du débat sur les logements pour les étudiants, un anglicisme désagréable ! On peut se demander, Monsieur Pagani, où vous allez chercher votre culture et si vous n'êtes pas devenu anglo-saxon de coeur... On parle français, ici ! En ce qui me concerne, je ne veux pas boycotter les produits américains, mais je ne veux pas non plus me laisser contaminer par une langue étrangère ! (Rires.)

Mme Stéphanie Nussbaumer (Ve), rapporteuse ad interim. Je souhaite répondre à M. Catelain, même si cela a déjà été fait. Il existe actuellement une fondation, la «Fondation pour la promotion du logement bon marché et de l'habitat coopératif», qui dispose déjà de projets. La somme de 10 millions vient simplement s'ajouter au budget de cette fondation. J'espère que les éclaircissements nécessaires vous ont été apportés et je me réjouis de l'adoption de ce projet de loi !

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Je me réjouis de l'accueil favorable que vous réservez à ce projet de loi dans la teneur qui est la sienne après son traitement en commission du logement. La procédure que vous avez choisie est simple: elle consiste à étendre le champ d'activité de la «Fondation pour la promotion du logement bon marché et de l'habitat coopératif» à la problématique du logement étudiants. Cette fondation, présidée par votre collègue M. Barro, est efficace. Nul doute qu'elle saura faire bon usage de la dotation supplémentaire de 10 millions que vous allez lui consentir pour répondre aux nouvelles tâches que vous lui confiez ! S'agissant de la liste des projets, vous la trouverez, Monsieur Catelain, en page 18 du rapport de M. Hiler. Cette liste a toutefois varié et comporte aujourd'hui des projets supplémentaires.

Il convient de souligner que cet effort ne sera probablement pas suffisant, d'autres instances sont appelées à fournir un effort; je pense notamment à l'Université elle-même, à la Fondation universitaire pour le logement des étudiants - qui pourrait, par exemple, travailler en partenariat avec la fondation présidée par M. Barro. Je pense également à la CIGUE. D'autres projets pourront, le cas échéant, vous être soumis.

Par votre vote - que je pressens positif - vous donnerez néanmoins un sérieux coup de pouce au logement étudiants. Ce dernier présente des spécificités dont il convient de tenir compte. J'avais cependant indiqué lors du débat de préconsultation - et je le répète aujourd'hui - que, même s'il convient de répondre à ce besoin précis, le logement demeure le logement de tous. Il n'est pas question que les efforts qui seront fournis privilégient une catégorie de la population. Le fait de passer par la «Fondation pour la promotion du logement bon marché et de l'habitat coopératif» - laquelle possède une vision globale du logement - permettra, à mon sens, d'éviter le risque que d'aucuns soient mieux servis que d'autres.

La loi 8885 est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.