République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 11559-A
Rapport de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil chargée d'étudier le projet de loi de Mme et MM. Thierry Cerutti, Jean Sanchez, Francisco Valentin, Pascal Spuhler, Bernhard Riedweg, Christian Flury, Sandra Golay, Jean-François Girardet, André Python, Patrick Lussi, Henry Rappaz modifiant la loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève (LRGC) (B 1 01) (Membres suppléants du Bureau)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IV des 16 et 17 avril 2015.
Rapport de majorité de M. Murat Julian Alder (PLR)
Rapport de minorité de M. Thierry Cerutti (MCG)

Premier débat

Le président. Nous abordons le PL 11559-A en catégorie II, quarante minutes. Je passe la parole au rapporteur de majorité, M. Murat Julian Alder.

M. Murat Julian Alder (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, vous allez peut-être ressentir, tout comme moi, une sensation de déjà-vu. A l'image des frères Igor et Grichka, nous sommes amenés à traiter aujourd'hui le projet de loi jumeau du projet de loi MCG qui voulait que tous les amendements soient lus avant d'être soumis au vote. Ces jumeaux ont pour papa M. le député Thierry Cerutti et pour maman la date du 10 octobre 2014. En effet, il ne s'agit de rien d'autre que de répondre aux suites de l'esclandre d'octobre dernier en s'assurant qu'en tout temps, il y ait un représentant par groupe au sein du Bureau. Sur le papier, cela pourrait paraître une idée intéressante; toutefois, c'est méconnaître profondément la nature exacte du Bureau, qui ne prend pas de décisions d'ordre politique et est en quelque sorte l'organe exécutif de notre Grand Conseil. Dès lors, il n'y a absolument aucune raison d'imposer au Bureau les mêmes règles que celles qui régissent les travaux d'un organe politique comme le parlement.

Ce projet de loi est inspiré de l'institution des députés suppléants par l'Assemblée constituante. L'objectif prioritaire de la création de ces députés suppléants était de permettre à tout un chacun de mieux concilier ses vies privée, politique, familiale et professionnelle, mais en aucun cas de permettre aux députés suppléants de venir gagner des jetons de présence le vendredi soir et de donner ainsi la possibilité aux députés titulaires de partir plus tôt en week-end. Ce système n'est pas comparable avec des institutions comme le Conseil d'Etat, le Conseil fédéral, les comités d'associations ou d'autres exécutifs institutionnels pour lesquels la suppléance n'est pas prévue. Le Bureau est un collège... (Brouhaha.)

Le président. Monsieur le rapporteur, je me permets de vous interrompre un tout petit instant. Quantité de conciliabules se tiennent à gauche comme à droite...

Une voix. Surtout à droite !

Une autre voix. Mais pas au centre !

Le président. Non, en effet: au centre, c'est calme pour le moment ! Mesdames et Messieurs, je vous demande un peu de silence. Plusieurs personnes sont venues suivre les débats à la tribune, et j'espère qu'elles arrivent à entendre quelque chose. (Un instant s'écoule.) Poursuivez, Monsieur le rapporteur.

M. Murat Julian Alder. Je vous remercie, Monsieur le président, pour cette magnifique prise d'influence ! Je disais que le Bureau est un organe collégial - à tout le moins est-il censé l'être. Alors peut-être certains, en tout cas ceux qui représentent la minorité au Bureau, n'ont-ils pas compris cette nature collégiale; dont acte. Mais le fait est que le Bureau est censé fonctionner de manière collégiale et ne pas prendre de décisions de nature strictement politique. Enfin, la dernière raison pour laquelle la majorité s'oppose à ce projet de loi, c'est que l'expérience a démontré jusqu'ici que les présidents du Grand Conseil issus de cette même majorité sont tout simplement irremplaçables ! Je vous remercie de votre attention.

M. Thierry Cerutti (MCG), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, il est étonnant d'entendre s'exprimer notre camarade et tout jeune député Murat Julian Alder puisqu'il siège au sein de ce parlement depuis deux ans seulement; il connaît donc très mal le fonctionnement du Bureau. S'il doit certes être collégial, le Bureau, en tant qu'organe exécutif, prend aussi des décisions d'ordre politique, parfois contre nature suivant les groupes politiques qui y sont représentés. Mais là n'est pas le débat, il ne s'agit pas de savoir ce que fait ou non le Bureau; il s'agit surtout de souligner que le Bureau, en tant qu'exécutif, doit prendre des décisions, rédiger des courriers... (Brouhaha.)

Des voix. On n'entend rien !

Une voix. Avec le brouhaha de la salle...

Le président. Pouvez-vous faire silence, s'il vous plaît ? (Un instant s'écoule.) Voilà. Poursuivez, Monsieur, je suis sûr qu'on entendra mieux.

M. Thierry Cerutti. Merci, Monsieur le président. Je disais donc que le Bureau doit prendre des décisions, rédiger des courriers ainsi qu'engager des sanctions, puisque c'est son rôle, lorsque l'un d'entre nous dérape ou commet un acte pas très légal dans le cadre de sa fonction. Le Bureau a donc un rôle important. Et pour que ce Bureau fonctionne de manière collégiale, comme l'a relevé mon collègue, il faut qu'il puisse être représenté par tous les partis siégeant au sein de cet hémicycle. Bien naturellement, il arrive que certains membres du Bureau ne puissent siéger pour des raisons qui leur sont propres, qu'elles soient professionnelles ou d'un autre ordre - qu'importe. De fait, le groupe de la personne manquant au Bureau n'est pas représenté et celui-ci perd alors un esprit critique, une visibilité, de l'information voire la possibilité de défendre l'une de ses positions.

Je ne réinvente pas la roue en proposant ce projet de loi, et le Mouvement Citoyens Genevois non plus, puisque cela se pratique dans d'autres cantons, où le Bureau comprend des suppléants; on trouve également ce système à Genève dans une commune qui n'est autre que Vernier, où le Bureau comporte des membres fixes et suppléants de façon que ce collège exécutif soit composé de tous les partis siégeant au sein du Conseil municipal. Voilà pourquoi ce projet a été déposé, il s'agit de faire en sorte que le travail s'effectue de manière positive, pragmatique et transparente pour tous les groupes, et je vous encourage à le voter.

Enfin, ce projet de loi sera amendé car il comporte une petite coquille s'agissant du président. A la base, en effet, on avait imaginé que le président serait automatiquement remplacé par le vice-président en cas d'absence mais, dès lors, son groupe ne serait plus représenté au sein du Bureau. Il faudra ainsi juste ajouter un amendement précisant que le président du Grand Conseil est remplacé par un membre de son groupe lors de son absence, lequel siégerait en tant que membre et non pas comme président.

M. Pierre Vanek (EAG). J'ai écouté avec attention le rapporteur de majorité nous expliquer que ce projet de loi était le jumeau d'un autre projet de loi qui demandait la lecture intégrale de tous les amendements; mais ce n'est manifestement pas le cas. Ces deux textes ont peut-être la même origine en termes de parti mais n'ont rien à voir l'un avec l'autre. Si nous nous étions opposés à la lecture intégrale de tous les amendements, ce projet pose une autre question qui nous semble intéressante, à savoir s'il est raisonnable et intelligent de prévoir que le Bureau puisse voir ses membres remplacés par des suppléants en cas d'absence de l'un ou l'autre d'entre eux. On nous dit ici que non, qu'il n'y a pas lieu de remplacer les membres absents tant la collégialité du Bureau serait forte et les contradictions absentes en son sein. A la limite, avec un raisonnement pareil, il n'y aurait même pas besoin que les différents partis soient représentés au Bureau, il suffirait d'élire un présidium qui fonctionnerait seul et, le cas échéant, le président prendrait toutes les décisions !

Non, nous pensons que la représentation des différents partis, quels qu'ils soient, avec leurs qualités et leurs défauts - parfois de grandes qualités, parfois de grands défauts - est nécessaire, utile, et nous avons d'ailleurs une logique de remplacement possible dans toutes les commissions. Alors je sais bien que le Bureau est une instance auguste, importante, glorieuse, mais quand même ! La commission des finances l'est tout autant, un certain nombre d'autres commissions sont aussi importantes et glorieuses pour le fonctionnement de ce parlement, elles ont des logiques qui ne sont pas forcément collégiales, mais enfin ce sont des logiques de continuité dans le fonctionnement, et on accepte bien qu'un député débarque au pied levé pour remplacer son collègue dans telle ou telle commission. Nous ne voyons donc absolument aucune raison pour qu'on ne mette pas en oeuvre la proposition de bon sens qui nous est faite ici.

S'agissant en outre de l'argument de la collégialité, je me permettrais, s'il daignait m'écouter, de dire au rapporteur de majorité, par votre entremise, Monsieur le président, que nous allons élire ce week-end des exécutifs dans un certain nombre de communes, qui, de manière générale, sont réputés fonctionner selon les règles de la collégialité. On nous dit que le Bureau est collégial et pas du tout politique. Mais non ! On peut très bien avoir un fonctionnement collégial dans le cadre d'une instance qui reflète une représentation politique. Par ailleurs, la collégialité n'est pas quelque chose qui se décrète... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...c'est quelque chose qui peut se construire dans une instance comme le Bureau mais aussi être rompue, c'est un droit. Nous ne sommes donc pas d'accord avec l'idée que les membres du Bureau seraient irremplaçables; nul n'est irremplaçable et, puisqu'ils sont remplaçables, il faut prévoir des remplaçants. C'est tout simplement ce que propose ce projet de loi, et il n'y a pas de raison de ne pas l'accepter; nous voterons pour.

M. Gabriel Barrillier (PLR). Chers collègues, en tant qu'ancien président, j'ai eu l'occasion et l'honneur de présider le Bureau du Grand Conseil et je me permets, sur la base de cette modeste expérience, de vous dire ceci: bien sûr, le principe de collégialité est décrié, il n'est plus à la mode et tout le monde veut le faire sauter, on préfère la confrontation. Mais je vous rappelle que le Bureau doit assurer le bon fonctionnement du premier pouvoir de la république, rien d'autre, et cela doit se faire notamment sur la base - et c'est l'expérience qui dicte ici mes paroles - d'un état d'esprit de l'ensemble de ses membres, lequel repose sur la confiance mutuelle et la bonne foi. Cette bonne foi, cette confiance mutuelle reposent sur la continuité de l'action du Bureau.

Or, et je crois qu'il faut bien le rappeler, si les membres du Bureau sont présentés par les groupes, ils sont élus par le plénum, c'est donc une élection ad personam. De plus, je vous rappelle que l'élection porte sur la fonction: on élit un président, un premier vice-président, un deuxième vice-président et des membres du Bureau. C'est extrêmement important ! Si on votait ces suppléants, on se retrouverait avec quatorze membres potentiels. Imaginez-vous que la moitié d'entre eux se fasse remplacer régulièrement: le principe de continuité serait battu en brèche et on ne pourrait pas conduire ce parlement qui, vous le savez, n'est pas facile à conduire, il y aurait sans arrêt des personnes qui ne seraient pas au courant des dossiers, voire, chers collègues, des membres du Bureau qui s'abstiendraient ou se feraient remplacer spécialement pour des raisons... Ah, tiens, il est là, justement je vous regarde, cher collègue ! (Remarque.) Enfin, tout cela pour vous dire que s'il s'agit d'un projet de loi qu'on peut comprendre, celui-ci procède toutefois d'une vision, d'une politique de la canonnière, et le Bureau du Grand Conseil ne peut pas fonctionner de cette façon. Nous refuserons l'entrée en matière. Je vous remercie.

M. Romain de Sainte Marie (S). Comme l'a souligné le rapporteur de majorité, on peut parler de deux projets de lois jumeaux. Tous deux ont été étudiés à la commission des droits politiques, et je pense qu'il faut leur reconnaître un certain mérite car ils soulèvent de réelles questions auxquelles notre parlement doit amener des réponses. Le système des députés suppléants est nouveau, nous testons cette méthode qui peut avoir certaines qualités et certains défauts, et nous devrons certainement apporter des améliorations à ce mode de faire qui n'existe pour l'instant qu'au niveau du Grand Conseil. On a évoqué un aspect particulier du Bureau, et c'est un peu le débat de ce soir, puisqu'on parle de collège; je crois qu'il faudrait avant tout parler d'exécutif de ce Grand Conseil. Ce n'est pas l'exécutif du canton mais, d'une certaine manière, celui du Grand Conseil puisque le Bureau... (Remarque.) Si vous me permettez, Monsieur le président...?

Le président. Monsieur Stauffer ! Poursuivez, Monsieur le député.

M. Romain de Sainte Marie. Je n'aime pas parler dans le dos des autres, mais c'est le cas maintenant et vous m'en voyez désolé. Je disais qu'il vaudrait mieux parler d'exécutif de ce Grand Conseil puisque, d'une certaine manière, qu'il s'agisse d'un collège ou non - on peut difficilement se prononcer - chaque membre du Bureau est présent pour représenter les intérêts ou la position de son groupe. Mais chaque membre du Bureau est bien là aussi pour constituer une équipe et veiller au bon fonctionnement de ce Grand Conseil; de fait, on pourrait en effet considérer cette équipe comme un collège.

En commission, je n'avais pas pu m'empêcher de faire le parallèle avec notre exécutif cantonal et de poser la question suivante: le MCG aimerait-il instaurer des conseillers d'Etat suppléants ? Peut-être cela en vaudrait-il la peine à certains moments - j'en doute quand même. Je crois que c'est un peu la même chose pour les membres de ce Bureau, qui ont pour mission d'assurer le bon fonctionnement du Grand Conseil. Comme le soulignait M. Barrillier précédemment, assurer le bon fonctionnement du Grand Conseil, c'est garantir une cohésion avec un nombre limité de membres. Or quatorze membres du Bureau sur cent députés, ça commence à faire beaucoup, presque tout le monde est membre du Bureau et on n'a plus réellement d'équipe qui a pour mission de mener le parlement.

Un autre aspect se révèle extrêmement important, celui de la confidentialité. On le voit, beaucoup de sujets et de dossiers qui devraient rester confidentiels au sein du Bureau ne le sont malheureusement plus, alors qu'il serait pourtant extrêmement important de maintenir cette confidentialité. Mais cela ne se fera clairement pas en augmentant la taille du Bureau avec des membres remplaçants. Enfin, j'aimerais souligner un dernier aspect, souvent très cher à la droite, à savoir celui de la responsabilité individuelle: être membre du Bureau est un choix, on choisit le fait de s'engager, de dégager un certain nombre d'heures pour participer aux activités de cet organe; du coup, ne pas être présent aux séances du Bureau, c'est faire preuve d'irresponsabilité. Le fait de proposer des membres suppléants au Bureau, c'est légitimer une irresponsabilité. M. Vanek disait que les membres du Bureau...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Romain de Sainte Marie. ...sont tous remplaçables; certes, ils le sont, mais ils n'ont qu'à démissionner s'ils ne souhaitent plus ou n'ont plus suffisamment de temps pour s'engager au sein du Bureau. Le groupe socialiste vous invite à refuser ce projet de loi.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. J'informe le bloc du fond, c'est-à-dire le PDC et le PLR, que nous sommes confrontés à un problème de son qui sera probablement résolu à 20h30 - nous l'espérons ! La parole revient à Mme la députée Béatrice Hirsch.

Mme Béatrice Hirsch (PDC). Merci, Monsieur le président. Le rapporteur de minorité a évoqué la jeunesse parlementaire du rapporteur de majorité pour dire qu'il avait de la peine à appréhender le fonctionnement du Bureau; j'aimerais pour ma part souligner le fait que le rapporteur de minorité fait partie de ce parlement depuis dix ans et que, à mon sens, il n'appréhende toujours pas le fonctionnement du Bureau ! Celui-ci, comme il a déjà été relevé, ne prend pas de décisions politiques même si certaines d'entre elles revêtent, on peut le dire, un certain caractère politique; mais à la base, il s'agit purement de décisions opérationnelles et exécutives. Au-delà de cela, le Bureau n'est de toute façon pas représentatif des forces en présence dans ce parlement puisqu'il comporte un membre par parti, ce qui ne reflète pas du tout les majorités du Grand Conseil.

Le Bureau, et cela a également été souligné, est censé non seulement travailler en équipe mais surtout effectuer le suivi des objets. Comment peut-on imaginer le suivi des objets si, à chaque séance, les membres du Bureau sont susceptibles de changer ? Par ailleurs, il a été fait mention des raisons d'absence des membres du Bureau. Or les dates de réunion sont connues plus d'une année en avance, elles sont prévisibles selon le calendrier du Grand Conseil, sauf cas exceptionnel. En quinze mois de Bureau, j'ai pour ma part connu une seule séance extraordinaire. M. de Sainte Marie a également soulevé le fait qu'il relève de la responsabilité des membres du Bureau d'être présents, de réaliser le travail qu'ils ont en l'occurrence demandé de faire et pour lequel les a élus notre assemblée. Honnêtement, si on réfléchit au mode de fonctionnement que pourrait avoir le Bureau avec des députés suppléants, je pense qu'il serait délétère pour le travail de ce même Bureau et pour le suivi des objets dont il s'occupe. Pour toutes ces raisons ainsi que celles invoquées par le rapporteur de majorité, le groupe démocrate-chrétien n'entrera pas en matière sur ce projet de loi. Je vous remercie.

M. Michel Amaudruz (UDC). Ah, Monsieur le président, il faut que je vous fasse une confession !

Le président. Je vous écoute !

M. Michel Amaudruz. En écoutant tant le rapporteur de majorité que celui de minorité, je me suis profondément ennuyé; dans les débats qui ont suivi, je me demandais si on voulait faire accoucher une montagne d'une souris car ce n'était pas plus excitant. Je m'ennuyais tellement que je me suis posé une question: le rapporteur de majorité, à mon avis - il m'excusera de remettre en cause sa science universelle à 360 degrés - a fait une petite faute en disant que le Bureau est l'exécutif du parlement; non, ce n'est pas possible, ça ! Le parlement n'a pas d'exécutif. Si on respecte la hiérarchie, l'exécutif est le Conseil d'Etat, notamment M. Maudet que je vois s'ennuyer aussi, mais ce n'est pas le Bureau.

Or puisqu'il faut bien donner une qualification à votre Bureau, laquelle allons-nous lui donner ? Pour ma part, je n'en sais rien. En général, on est toujours du même avis, mais enfin ça ne fait rien, on peut avoir deux avis différents. Non, selon moi, le Bureau n'est qu'une délégation. A partir du moment où c'est une délégation, tout le reste de ce qui a été dit - M. Barrillier ne s'en offusquera pas - m'a laissé assez indifférent. Mais si c'est une délégation, elle ne peut avoir que les attributs de celui qui délègue. Ça vous ennuie qu'ils soient au nombre de quatorze; mais ce n'est pas un drame, les équipes de rugby comptent quinze joueurs et elles se défendent bien. C'est une délégation, pas un exécutif ! Si c'est une délégation, ceux qui sont au Bureau, en bonne logique, devraient avoir les mêmes attributs que ceux qui ont délégué, moyennant quoi il devrait y avoir des suppléants.

Sur un plan plus constructif, la confidentialité et toutes ces choses-là, c'est du bla-bla. (Remarque.) Non, franchement, c'est du bla-bla ! Ça voudrait dire que nous tous ici sommes des commères, alors que nous avons prêté serment. Nous ne sommes pas des commères, tout de même ! A mon avis, des suppléants présentent concrètement, indépendamment de toute autre considération, un avantage, c'est le fait de mettre en place un Bureau qui soit au complet. Maintenant, on peut espérer que les remplaçants jouent aussi bien que les titulaires - en effet, quand une équipe ne fonctionne pas, on fait en général appel à un remplaçant pour marquer des buts. Je ne crois pas que cette continuité, cette sérénité et cette confidentialité soient liées au nombre de députés et que sept soit un chiffre sacro-saint. C'est pour ça, mon Dieu, qu'avec bonhomie, Monsieur le président, j'appuierai personnellement le rapport de minorité parce que dans son propos que j'ai mal compris, il n'y a rien qui m'ait réveillé. Je vous remercie, Monsieur le président.

Mme Frédérique Perler (Ve). J'ai écouté les interventions des uns et des autres et ne vais pas rappeler ce qui a motivé la décision de commission et qui fera que le groupe des Verts invite cette assemblée à refuser ce projet de loi. Mais tout de même ! Certes, à la première lecture, ce projet de loi peut sembler intéressant, pourquoi pas ? Nous nous sommes intéressés à la question d'avoir des députés suppléants. Mais, Mesdames et Messieurs, chers collègues, je crois qu'il faut être réaliste. On peut comparer le Bureau à une association avec un comité qui lui-même a un Bureau. Notre assemblée de cent députés élit un Bureau avec un membre par parti, c'est tout à fait correct. Imaginez un droit de siège à deux têtes: ça ne ferait qu'alourdir notre fonctionnement !

On a étudié cette question-là; pourquoi pas ? Mais il s'avère, et cela a été relevé par plusieurs d'entre vous, que ça ne cadre pas avec le fonctionnement du Bureau, qui doit savoir faire preuve d'une certaine continuité dans le suivi des dossiers. Il y a également un certain nombre de dossiers sensibles voire confidentiels qui font que, ma foi, ce projet de loi, et l'épreuve des auditions en commission l'a démontré, ne ferait qu'introduire une grande complication de plus au sein de ce Grand Conseil. Pour toutes ces raisons, le groupe des Verts vous invite à refuser ce projet de loi.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Patrick Lussi pour une minute.

M. Patrick Lussi (UDC). Merci, Monsieur le président, j'essaierai de faire avec. J'aimerais simplement rappeler, Mesdames et Messieurs les députés, que nous avons affaire, au sein du Bureau, même si ça déplaît à certains d'entre vous, à une représentation des groupes politiques qui se veut restreinte. On a dit que nous étions des commères; mais rappelez-vous ceci: suite aux incidents, que je réprouve aussi, le Bureau a décidé de ne pas punir M. Stauffer et, dans les minutes qui suivaient, on savait qu'il y avait des défections. Alors quand les bancs de la gauche disent qu'ils ne sont pas d'accord avec ceci, si ce projet de loi avait été accepté, une certaine personne ici aurait certainement reçu les foudres du Grand Conseil ! Mais il ne s'agit pas de créer un antagonisme contre une personne ou une autre. Mesdames et Messieurs, ce sont les partis qui désignent les candidats, et il y a une élection. Mais si une personnalité ne vous plaît pas, le parti a l'obligation...

Le président. Il vous reste dix secondes.

M. Patrick Lussi. ...de la remplacer par une autre. Où donc est le drame de proposer des remplaçants ? Pour moi, c'est le bon fonctionnement de notre démocratie qui est en jeu, loin des arguments que j'ai entendus.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député.

M. Patrick Lussi. L'UDC soutiendra ce projet de loi.

M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, j'ai écouté, tout comme M. Amaudruz, les arguments des uns et des autres, et je dois vous dire que la majorité de ce Grand Conseil a tort. Mais peut-être ne faut-il pas en chercher la raison dans le projet de loi; ce serait plutôt simplement parce que c'est le MCG qui a déposé ce projet de loi ! Alors laissez-moi vous dire ceci: d'abord, à l'étage supérieur, c'est-à-dire à l'exécutif cantonal, tous les conseillers d'Etat ont leur suppléant, et lorsque l'un d'entre eux n'est pas là ou ne peut pas être présent pour une raison de santé ou à cause d'une obligation étatique, c'est son remplaçant qui vient et reprend ses dossiers au pied levé.

Ensuite, Mme Hutter - ce n'est pas elle qui va me contredire - a toujours mis un point d'honneur à ce que nous soyons cent députés à siéger, ce qui n'était pas le cas dans l'ancienne législature. C'est bien cette réflexion qui a mené les constituants à mettre en place des députés suppléants, c'est la même chose. Les députés sont élus, tout comme les suppléants, et nous sommes interchangeables dans toutes les commissions - sauf à la commission de grâce parce qu'il s'agit d'une élection du Grand Conseil et que seul un titulaire élu peut y siéger. Finalement, vos arguments selon lesquels le Bureau est autre chose ne tiennent pas la route. Si vous élisez les membres du Bureau, vous devez bien être capables d'élire des suppléants des membres du Bureau.

Imaginons - je ne nous le souhaite pas - qu'une épidémie de varicelle se déclare et que, sur les sept membres du Bureau, cinq ne puissent pas être là. C'est l'institution qui est mise à mal, le Bureau ne pourrait pas siéger avec deux membres - enfin, légalement, il le pourrait. Mais alors expliquez-moi, Mesdames et Messieurs, quelle est la logique de ne pas vouloir entrer en matière sur ce projet de loi alors que nous avons des suppléants à peu près partout et que le Conseil d'Etat en a aussi ? Franchement, ça confine au ridicule ! Si on veut que les institutions fonctionnent bien, il est tout à fait normal que cette assemblée élise sept suppléants au Bureau. Le Grand Conseil doit fonctionner à cent députés, le Bureau doit fonctionner à sept membres.

Je suis le plus ancien membre de ce Bureau, Mesdames et Messieurs, alors que dire quand j'entends M. Barrillier évoquer la continuité pour le suivi des dossiers ? Chaque année, les membres du Bureau changent, c'est valable pour tous les partis. Quelle est la valeur de votre argument, cher collègue Gabriel Barrillier ? D'une année à l'autre, on recommence à zéro, on jette tout le travail qui a été fait avant, il n'y a pas de continuité. Non, encore une fois, ça ne tient pas la route. Je vous demande donc, Mesdames et Messieurs, de faire preuve de bon sens...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Eric Stauffer. Je conclus, Monsieur le président. ...et de changer votre position parce que ce qui nous importe à tous, au final, c'est le bon fonctionnement des institutions.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je cède la parole au rapporteur de minorité, M. Thierry Cerutti, à qui il reste quarante et une secondes.

M. Thierry Cerutti (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Je laisserai le rapporteur de majorité s'exprimer et je prendrai la parole ensuite.

Le président. C'est le rapporteur de minorité qui s'exprime en premier.

M. Thierry Cerutti. Ah, c'est le rapporteur de minorité qui s'exprime en premier ? Bon, d'accord. J'aimerais dire tout d'abord que j'ai bien écouté les uns et les autres, et on voit bien la mauvaise foi qui habite certains, je m'en désole. On parle d'augmenter le volume du Bureau - ce sont les propos de M. Romain de Sainte Marie; or il sait très bien que c'est faux puisqu'un suppléant remplace un titulaire, ce qui veut dire que les membres du Bureau seront toujours au nombre de sept, ils ne seront jamais cinq ou huit mais toujours sept, c'est donc faux.

De plus, parler de perversité lorsque les gens sont absents est aussi d'une malhonnêteté intellectuelle crasse parce qu'il peut y avoir un imprévu, un inconvénient, ce n'est tout simplement pas correct de condamner quelqu'un qui s'absente du Bureau pour des raisons prétendument futiles et qui ne le sont peut-être pas. On parle également de confidentialité...

Le président. Il vous faut conclure.

M. Thierry Cerutti. ...pour revenir aux propos de Mme la députée PDC. J'ai siégé au Bureau, donc je connais très bien son rôle. Les membres du Bureau ont pour mission d'informer et de représenter leur parti, d'un côté comme de l'autre...

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur.

M. Thierry Cerutti. ...il n'y a donc pas de confidentialité. Enfin...

Le président. Monsieur le rapporteur de minorité, il vous faut conclure: il n'y a plus de temps de parole.

M. Thierry Cerutti. Qui a parlé des forces obscures au sein de ce parlement ? (L'orateur rit.)

Le président. Je vous remercie, Monsieur, et donne la parole au rapporteur de majorité, M. Murat Julian Alder, qui dispose encore d'une minute.

M. Murat Julian Alder (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Tout d'abord, vous transmettrez à M. Vanek que l'on sait bien que depuis peu, du moins à Carouge, les représentants d'Ensemble à Gauche et ceux du MCG sont devenus interchangeables, de sorte que la position de son groupe ne me surprend absolument pas. (Remarque.) Ensuite, s'agissant de M. le député Amaudruz, si le Bureau est au Grand Conseil ce que la direction est à une association, alors je lui laisserai le soin d'expliquer au comité directeur de son parti qu'il n'est qu'une simple délégation. Enfin, le rapporteur de minorité pointait du doigt ma jeunesse, ce que je trouve plutôt flatteur; j'aimerais pour ma part lui poser la question suivante: où est-elle, la jeunesse du MCG ?

Une voix. C'est méchant, ça ! (Remarque. Rires.)

Le président. Je vous remercie, Monsieur le rapporteur de majorité, et lance le vote sur l'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 11559 est rejeté en premier débat par 52 non contre 39 oui.