République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 10646-A
Rapport de la commission du logement chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat déclarant d'utilité publique la réalisation d'un plan localisé de quartier situé à l'angle des rues Maurice Braillard et Moillebeau, sur le territoire de la commune de Genève, Petit-Saconnex, et des bâtiments prévus par ce plan

Premier débat

M. François Haldemann (R), rapporteur. Mesdames et Messieurs les députés... (Brouhaha.) ...le projet de loi 10646 consiste en une déclaration d'utilité publique d'un plan localisé de quartier. Cette déclaration d'utilité publique concerne la réalisation de logements subventionnés, notamment HM et LUP. Cette déclaration d'utilité publique permettra ainsi l'expropriation de servitudes croisées qui ont été constituées entre différents propriétaires et qui empêchent la réalisation de ces logements. Je tiens à rappeler que l'expropriation ne concerne que des servitudes croisées et aucunement des terrains de ces personnes propriétaires. Il faut aussi relever que les opposants en question ne résident pas dans le périmètre du plan localisé projeté.

Ce PLQ concerne la construction de 2 immeubles de 5 étages sur rez, ainsi qu'un troisième bâtiment de 2 étages sur rez, plus attique, ce qui correspond à 55 logements, ce qui est loin d'être négligeable.

Ce projet de loi a été préavisé à la commission du logement par 11 voix pour et 1 abstention. Il n'y a d'ailleurs pas eu de rapport de minorité. Cet objet ne devrait pas nous prendre trop de temps de délibération, et on pourrait avancer quelque peu dans notre ordre du jour.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. La parole est à Mme Buche. Je rappelle que le temps de parole est limité à trois minutes par groupe.

Mme Irène Buche (S). Mesdames et Messieurs les députés, comme l'a dit le rapporteur, il ne s'agit pas de toucher au droit de propriété. On cherche simplement, on demande simplement à exproprier les servitudes croisées qui permettent à des propriétaires de villas de dire: «Ne construisez pas plus de tant d'étages devant chez moi.» Donc on ne touche pas grand-chose, on ne touche pas vraiment au droit de propriété de ces personnes, qui disent simplement: «Construisez, mais pas devant chez moi.» Or un tel comportement dans notre crise du logement actuelle n'est pas admissible, et il faut absolument que ces immeubles puissent être construits. Même s'il ne s'agit que de 55 logements, ce sont 55 logements de plus sur le marché.

Malheureusement, ces servitudes croisées sont assez fréquentes, et on n'est probablement pas à notre premier projet, mais je pense qu'il faut aller de l'avant et vraiment montrer l'exemple pour qu'un maximum de logements puissent être construits et qu'il y ait une densification suffisante, parce que c'est bien cela, le problème. Alors les socialistes vous invitent par conséquent à voter ce projet de loi et vous en remercient.

Mme Christina Meissner (UDC). Ce que je trouve absolument incroyable avec ce projet de loi, c'est que tout le monde s'obstine à penser que les propriétaires de villas du Point du Jour ne veulent pas ce projet de logements, de construction de logements, ce qui est totalement faux. Ces personnes ont essayé par tous les moyens de dire: «Nous sommes prêts à lever nos servitudes croisées, mais pas pour le projet de l'Etat; pour le projet que nous essayons de montrer au magistrat depuis un certain temps et qui a exactement la même densité, le même nombre de logements, voire plus.»

C'est une fin de non-recevoir: la commission n'a pas voulu les recevoir sous prétexte que, en fait, ils n'avaient rien de nouveau à présenter. C'était totalement faux. Ils réclament encore et toujours cette possibilité d'être reçus pour présenter leur projet. Donnez-leur cette chance en renvoyant ce projet en commission, pour qu'ils puissent vous montrer qu'ils ont un projet équivalent. Ils veulent du logement, ils sont prêts à faire du logement. Ils sont prêts à lever leurs servitudes croisées pour cela. Ils sont même en ce moment en train de faire une pétition pour y arriver. Donnez-leur cette chance. Je vous remercie donc de renvoyer ce projet de loi en commission.

Le président. Merci, Madame la députée. Nous sommes donc saisis d'une demande de renvoi en commission. Monsieur Haldemann, peut-être souhaitez-vous prendre la parole pour vous positionner à ce sujet ? Nous passerons ensuite au vote.

M. François Haldemann (R), rapporteur. A priori, il n'y a pas de raison de renvoyer ce projet de loi en commission. Nous l'avons dit dans le rapport, les opposants ne sont pas concernés par ce périmètre, ne sont pas parties prenantes de ce périmètre. C'est pourquoi il n'y a pas de raison d'entrer en matière.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Nous nous prononçons à présent sur le renvoi de ce projet de loi en commission. Le vote est lancé... pardon: le scrutin est ouvert, Monsieur Gros !

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10646 à la commission du logement est rejeté par 67 non contre 7 oui et 1 abstention.

M. Serge Dal Busco (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, chers collègues, nous avons, à l'examen de ce point de l'ordre du jour, l'occasion de démontrer notre cohérence par rapport à ce que nous avons déclaré il n'y a pas si longtemps que cela dans ce débat-fleuve concernant le déclassement de la zone agricole aux Cherpines-Charrotons. Il y a ce parallélisme des efforts qu'il nous faut faire. Nous nous trouvons dans une zone destinée à la construction de logements collectifs depuis plusieurs dizaines d'années. Et il y a une situation où cela ne peut pas se réaliser à cause, précisément, d'un certain nombre de servitudes, qui empêchent le projet.

Donc exposer le problème sous cet angle, c'est reprendre effectivement les conclusions auxquelles je suis arrivé tout à l'heure, auxquelles nombre d'entre nous sont arrivés précédemment. Sous peine de perdre notre crédibilité par rapport à ce que nous avons décidé s'agissant des Cherpines-Charrotons, il nous faut accepter ce projet de loi, qui permettra ensuite au Conseil d'Etat, le cas échéant, de faire avancer ce projet, un projet qui se justifie pleinement - plus que pleinement ! - lorsqu'il est situé en zone urbaine, avec des infrastructures à proximité, avec des transports publics. Enfin, il n'y a pas de démonstration à faire sur la nécessité, sur la possibilité de faire des logements collectifs à cet endroit. (Remarque.)

Donc le groupe démocrate-chrétien vous incite à voter ce projet de loi et à le faire de la manière la plus déterminée et la plus forte possible.

Une voix. Très bien !

Mme Jacqueline Roiz (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, faire un rapport avec les Cherpines-Charrotons est à mon avis déplacé, puisque ce projet de loi traite d'une zone qui était déjà prévue pour être construite. A partir de là, l'intérêt public prime, étant donné que 60% de la surface seront réservés au logement et que l'occupation du sol sera donc suffisamment densifiée. En conclusion, les Verts recommandent d'accepter ce projet de loi.

Mme Nathalie Schneuwly (R). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe radical est aussi tout à fait d'accord avec ce projet de loi. Les opposants n'ont pas été entendus en commission parce qu'ils avaient déjà fait des recours, et c'est allé jusqu'au TF. Donc nous n'avons pas jugé nécessaire d'entendre encore une fois leurs arguments. Les radicaux sont pour l'intérêt public. Construisons la ville en ville. Nous sommes donc en faveur de ce projet.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Meissner, à qui il reste une minute et trente secondes.

Mme Christina Meissner (UDC). Je rappelle que les parcelles sont déjà construites. Il y a déjà des immeubles sur ces parcelles. Ils sont juste plus petits. Donc l'objectif est de faire plus dense à cet endroit. En l'occurrence, ma préopinante dit que les opposants avaient déjà été déboutés. Mais c'était pour le plan localisé de quartier, non pas pour la construction elle-même. La construction, ils la veulent, ils sont pour. Mais pas n'importe laquelle: une construction qui respecte, aux niveaux architectural et paysager, ce qui existe déjà dans le quartier. C'est une construction de logements qu'ils acceptent.

Alors maintenant, en votant ce projet de loi avec lequel vous allez exproprier les servitudes croisées, vous n'allez pas gagner du temps; vous allez en perdre. En effet, ces gens qui étaient prêts à tous signer pour un projet de logements avec la même densité, le même nombre de logements, vont maintenant s'opposer avec la dernière énergie du monde. Et là, quel message donnez-vous ? Au lieu de travailler en concertation avec les gens qui habitent sur le terrain, les Genevois qui ont vraiment leur logement à cet endroit-là et qui veulent construire, on part en guerre et on perd du temps. On ne va pas construire du logement comme cela.

Une voix. Bravo Pic-Vert !

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Barrillier, à qui il reste deux minutes et quelques.

M. Gabriel Barrillier (R). Ce sera suffisant, merci, Monsieur le président. Je relie mon intervention avec le débat-fleuve sur les Cherpines-Charrotons. J'ai dit hier, et vous transmettrez à Mme la députée UDC...

M. Pierre Weiss. Secrétaire de Pic-Vert...

M. Gabriel Barrillier. Bon, tout le monde le sait, tout le monde a lu le GHI; il y aurait presque l'article 24. L'UDC et Mme notre collègue sont opposées à la levée des servitudes croisées. Elle est opposée, au nom de son association, dont elle est la secrétaire générale, à la densification des zones de développement où il y a encore quelques villas. Elle est opposée au déclassement de quelques hectares agricoles.

J'ai demandé hier à l'UDC: «Quelle est votre solution pour construire ?» Oui, quelle est votre solution pour construire ? Je suis désolé, chers collègues, vous n'avez pas de cohérence; aucune cohérence. Vous jouez la montre. Vous prétextez la défense de la propriété privée. (Remarque.) Je suis désolé de vous dire que, à l'endroit, en ville de Genève, où les propriétaires s'opposent à la densification, c'est l'expression d'un égoïsme ! (Commentaires. Le président agite la cloche.) C'est l'expression d'un égoïsme abusif, et je pense que là vous exagérez la défense des intérêts. Je comprends que vous soyez la secrétaire générale d'une association puissante. C'est vrai, elle est puissante. (Commentaires.) Mais en ville de Genève, à l'endroit en question, je suis désolé de vous dire que vous jouez contre les jeunes, contre la construction de logements, contre la densification, et vous êtes complètement bloqués. Je vous demande donc d'accepter ce projet de loi.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, c'est avec détermination que le Conseil d'Etat cherche à débloquer les différents projets qui existent à Genève et à en initier de nouveaux; nous y avons passé beaucoup de temps cette session. Et il existe un certain nombre de cas où des projets pourraient démarrer mais sont bloqués par l'opposition farouche des voisins, qui s'organisent en se concédant mutuellement des servitudes de non-bâtir.

Lorsque nous sommes confrontés à ce type de situation, nous cherchons évidemment à obtenir à l'amiable de la part de ces propriétaires la levée des servitudes. Et c'est le moment qui permettrait à ces propriétaires de formuler des propositions, de négocier. C'est aussi le moment que ces propriétaires devraient saisir pour s'adresser au promoteur, pour faire une proposition de projet alternatif. Malheureusement, de telles propositions, à l'époque de ces négociations, n'ont jamais été formulées. En dernière extrémité, nous venons devant le Grand Conseil avec ce projet de loi d'expropriation des servitudes. Ce n'est pas de gaieté de coeur, Mesdames et Messieurs les députés ! C'est tout simplement parce qu'il n'y a pas d'autres possibilités pour faire avancer le projet en question.

Alors très bien, nous prenons note que, aujourd'hui, comme par miracle, les propriétaires en question auraient une proposition à faire. C'est trop tard, je suis désolé: nous en sommes au stade de l'expropriation de ces servitudes. Et pour nous permettre d'aller de l'avant, je vous prie, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir adopter ce projet de loi.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. La parole n'étant plus demandée, nous allons voter l'entrée en matière de ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 10646 est adopté en premier débat par 63 oui contre 6 non et 10 abstentions.

L'article unique de la loi 10646 est adopté en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 10646 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 65 oui contre 8 non et 6 abstentions.

Loi 10646