République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1745-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Guy Mettan, Pierre Weiss, Francis Walpen, Jacques Jeannerat, Anne-Marie von Arx-Vernon, Alain Meylan, Beatriz de Candolle, Fabienne Gautier, Olivier Jornot, René Desbaillets, Christiane Favre, François Gillet, Daniel Zaugg, Jean-Michel Gros, Michel Forni, Pascal Pétroz, David Amsler, René Stalder, Mario Cavaleri, Renaud Gautier, Marcel Borloz pour la création de nouvelles zones d'activités à Genève
RD 685-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur l'état de situation de la gestion des zones industrielles du canton

Débat

La présidente. Les rapporteurs sont M. Jacques Jeannerat pour le point 85 et M. Gabriel Barrillier pour le point 133. Tout d'abord, pour le point 85, Monsieur Jeannerat, avez-vous quelque chose à ajouter à votre rapport ? Ce n'est pas le cas, alors je donne la parole à M. Gabriel Barrillier qui souhaite s'exprimer.

M. Gabriel Barrillier (R), rapporteur. Logiquement, d'après la numérotation, c'est mon collègue qui devrait prendre la parole, mais le rapport - que j'ai rendu tardivement, je m'en excuse auprès de vous - est en somme le bilan d'une discussion qui a eu lieu sur plusieurs séances en commission de l'aménagement au sujet des zones industrielles, de leur avenir. Et cet examen a eu lieu suite au renvoi devant cette commission du rapport 687 du Conseil d'Etat. Je dois dire, pour ceux qui ont eu le temps de lire mon texte, que cet exercice a été extrêmement utile et bénéfique, dans la mesure où il nous a permis d'établir un inventaire de la problématique des zones industrielles... (Remarque.) Oui, il y a une année de cela. Je sais que j'ai une année de retard, mais la situation n'a pas beaucoup évolué depuis lors !

En quelque sorte, ce rapport est le hors-d'oeuvre précédant le plat principal qui est la motion 1745-A, dont le rapporteur est mon collègue Jacques Jeannerat, puisque c'est la commission de l'économie qui, en quelque sorte, a matérialisé par des propositions concrètes l'examen effectué en commission de l'aménagement du canton.

Sans vouloir m'étendre là-dessus, j'aborderai quand même un aspect. Vous aurez compris que mon rapport est le résultat d'une discussion et du travail qui ont eu lieu en commission de l'aménagement du canton. Il s'agit donc de l'examen des zones industrielles sous l'angle de l'aménagement du territoire, tandis que le rapport de mon collègue Jeannerat est le fruit du travail de la commission de l'économie sur les zones industrielles en fonction de leur rôle économique.

Pour terminer, je dirai que nous avons eu la conviction que le département en charge de l'aménagement et celui en charge de l'économie travaillaient bien la main dans la main en ce qui concerne la problématique des zones industrielles - même si l'on peut, dans certains cas, déceler des divergences d'opinion, non pas entre les deux chefs de département, mais sur la mixité, sur la densification... Je crois que nous avons là un bon exemple de travail transversal. C'est la raison pour laquelle je demande au Grand Conseil de prendre acte de mon rapport et de passer la parole à mon collègue pour finir le travail !

M. Jacques Jeannerat (R), rapporteur. Effectivement, la commission de l'économie a été saisie de cette motion qui, dans sa version originale, demandait simplement de créer des nouvelles zones d'activités mixtes. Pris comme ça, de manière brute, on a rapidement constaté le clivage habituel entre la gauche et la droite, la gauche regrettant que l'on veuille encore prendre des terrains agricoles pour les transformer en zones industrielles. Puis, au fil des auditions, un travail constructif a été mené, qui a donné lieu à plusieurs amendements et à un vote final unanime sur cette motion ainsi amendée.

Différents éléments ont été analysés, d'abord sur le principe qu'il ne reste actuellement que 2% de terrains à disposition sur ceux qui sont classés en zone industrielle. Même si la promotion économique réalise un travail extraordinaire, plus elle accomplit un travail de promotion extraordinaire, moins elle a de terrains à mettre à disposition, parce qu'il y en a de moins en moins !

Alors, quand le budget de l'Etat nous a été, dans ses grandes priorités, présenté l'autre jour, un de ses points était intitulé «Consolider les instruments de promotion économique et renforcer la politique touristique cantonale». Or, pour consolider les instruments de promotion économique, il faut pouvoir mettre des bâtiments ou des surfaces à disposition des entreprises demandeuses !

Ensuite il y a un caractère d'urgence, aussi. C'est la raison pour laquelle nous avons demandé l'urgence pour cette motion. Toute une réflexion est menée autour du projet Praille-Acacias-Vernets, avec une consultation des communes de Lancy, de Carouge et de la Ville de Genève, pour que le Grand Conseil soit ensuite saisi sur le principe du déclassement de l'ensemble de cette zone. En commission de l'économie, il nous paraissait important de pouvoir définir le concept de la mixité - de la mixité d'activités économiques - tout en respectant le principe, bien sûr, qu'il faudra continuer de mettre à disposition, pour le monde industriel, des surfaces à des prix permettant à l'industrie genevoise de rester concurrentielle sur le marché mondial. Donc, cela, en mettant l'accent sur une mixité de ces zones, que l'on pourrait d'ailleurs cesser d'appeler «industrielles», pour les renommer zones «d'activités économiques». Au fond, la motion amendée demande que l'on aboutisse à une vision globale du problème.

Je me permets juste de relever les éléments figurant dans les trois invites. D'abord, il faut effectivement créer quelques nouvelles petites zones. On nous a présenté des projets dans la zone de Plan-les-Ouates ou dans la zone de Bernex-Est, mais, avant tout, la motion demande de définir rapidement, par le biais d'un projet de loi, le concept de la mixité dans les zones d'activités. Parce qu'actuellement trop de demandes ou de problèmes liés à l'établissement, dans les zones industrielles, d'entreprises qui ne sont pas spécifiquement industrielles sont résolus grâce au régime des exceptions, et cela n'est plus acceptable.

Enfin, la motion demande la densification des zones industrielles. Quand on se promène dans la zone industrielle Zimeysa, on voit certes des bâtiments de quatre ou cinq étages, mais souvent, aussi, des édifices d'un seul étage...Et là, on pourrait absolument densifier, avec des bâtiments accueillant une activité industrielle au rez-de-chaussée et des activités de service aux deuxième, troisième et quatrième ou cinquième étages.

C'est pourquoi je vous invite à accepter cette motion, comme la commission l'a fait.

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Mesdames et Messieurs les députés, je m'exprimerai plutôt sur la motion 1745. Je trouve que le rapport de M. Barrillier est extrêmement intéressant et il propose un bon état des lieux de la situation sur cette question extrêmement importante. Cette proposition de motion a effectivement été l'occasion pour tous les groupes d'exprimer à nouveau leurs préoccupations par rapport à la raréfaction des terrains en zones industrielles, en regard des besoins pour l'accueil de nouvelles entreprises, besoins qui se font sentir régulièrement.

Les auditions, en particulier celle de la Fondation pour les terrains industriels de Genève - FTI - et celle du service de la promotion économique ont mis en évidence des aspects incontournables: l'exiguïté du territoire cantonal, évidemment, contrastant avec les demandes pour l'implantation de nouvelles entreprises, mais aussi le profond changement du tissu économique genevois.

On a aussi beaucoup parlé de mixité dans cette commission, M. Jeannerat l'a dit. C'est là où il est effectivement nécessaire de clarifier les choses et c'est bien l'objectif d'une des invites de cette motion. Et c'est aussi un point d'achoppement entre nous parce que, pour certains, notamment les auteurs de la motion initiale, la mixité revient quand même à mélanger allègrement les activités industrielles, artisanales et commerciales. Or, pour les socialistes, il faut vraiment être extrêmement attentif à ne pas accepter tout et n'importe quoi sous le prétexte de la flexibilité et de la demande. On risquerait ainsi d'aboutir à des résultats qui seraient à l'inverse de ce que nous souhaitons. Les représentants de la FTI et de la promotion économique du canton - ceux de M. Cramer aussi, je l'ai lu dans le rapport de M. Barrillier - ont notamment exprimé de très grandes réserves, pour ne pas dire d'oppositions, sur le fait d'encourager la cohabitation d'activités commerciales avec des activités industrielles dans ces zones. Ce que l'on entend par «activité commerciale», ce n'est pas l'implantation d'un coiffeur ou d'un petit commerçant, c'est plutôt celle de centres commerciaux, qui sont très gourmands en terrain mais créent généralement peu d'emplois - et ce sont des emplois avec peu de valeur ajoutée, même s'il ne faut pas les dénigrer car nous en avons aussi besoin.

En tout cas, en termes de surfaces, les centres commerciaux exigent beaucoup d'espace. Je crois que nous l'avons dit et répété, notamment du côté de la gauche, il faudrait étudier avec beaucoup d'attention l'éventualité de l'implantation de nouveaux centres commerciaux, parce que je crois que le canton de Genève arrive maintenant bientôt à saturation. Avec la mixité se pose évidemment aussi la question du prix du terrain: il y a un risque de distorsion de la concurrence avec le commerce, étant donné que les prix des terrains industriels sont beaucoup moins élevés.

On a dit aussi que les solutions étaient essentiellement à rechercher dans la densification des zones industrielles existantes, ainsi que dans le projet d'agglomération, qui va prendre du temps et est confronté à certaines contraintes - notamment à cause de systèmes politiques et juridiques différents des deux côtés de la frontière. Néanmoins, nous avons réussi à nous mettre d'accord par rapport à cette motion 1745 et nous soutiendrons donc son renvoi au Conseil d'Etat ainsi que la prise en considération du rapport 685-A.

M. Guy Mettan (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, le parti démocrate-chrétien se félicite naturellement du travail qui a été accompli dans les deux commissions, d'abord la commission de l'économie, qui a traité de la motion que nous avions déposée l'année dernière, et puis, la commission de l'aménagement avec l'étude du rapport du Conseil d'Etat. Lorsque nous avons déposé cette motion, en 2007, nous, les motionnaires, étions effectivement tout à fait préoccupés par le manque d'espace qui commençait à se faire sentir dans les zones industrielles du canton.

Il faut d'abord saluer la célérité avec laquelle les commissions ont travaillé et, aussi, le résultat, le consensus qui nous est proposé ce soir. Je pense que l'on peut insister sur quelques points qui me paraissent intéressants. D'abord, la motion telle qu'elle nous est présentée permet la création de nouveaux sites et encourage la création de nouvelles zones industrielles et d'activités. On peut penser, par exemple, au site de Bernex, que nous avons déjà évoqué à de multiples reprises depuis quelques mois; on peut penser à la zone de la Pallanterie, qui serait la première à être déployée sur la rive gauche; il y encore la zone de Perly-Certoux. Ce sont de nouveaux emplacements qu'il vaudrait la peine d'étudier.

Ensuite, un autre intérêt de cette motion, c'est qu'elle met en avant la densification des zones d'activités. Je crois que c'est un concept tout à fait important ! Nous avons eu peur de densifier dans les zones d'activité et dans les zones industrielles, or je pense que c'est nécessaire. Par exemple, on préconise la construction de tours... Il faut voir la situation avec un peu de hauteur, dans tous les sens du terme ! Comment peut-on encore densifier ? Il faut densifier en développant des zones d'activités mixtes, c'est-à-dire des zones avec de l'activité industrielle, d'abord; de l'artisanat, ensuite; des services, en troisième lieu; et du commerce, tout à la fin. C'est dans cet ordre que nous devons densifier ! Et je suis tout à fait d'accord qu'il ne faut pas que les zones commerciales, même si elles peuvent aussi trouver place dans des zones industrielles et d'activités, soient prioritaires.

Enfin, troisième élément de la motion, ce développement permettra de reloger évidemment les locataires actuels de la zone Praille-Acacias-Vernets. Puisqu'on veut faire un effort particulier avec le développement de cette zone, il faut que les actuels occupants de ces terrains puissent être relogés dans les futures zones que nous allons créer.

Pour toutes ces raisons, nous appelons évidemment à soutenir cette motion et à prendre acte de ce rapport.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je salue à la tribune nos amis du Groupe Suisses-Etrangers de Moudon et région qui sont venus nous rendre visite. Bienvenue chez nous ! (Applaudissements.) Je donne la parole à M. Damien Sidler.

M. Damien Sidler (Ve). Merci, Madame la présidente. Je n'irai pas par quatre chemins, je dois concéder que les Verts ont fait une erreur de positionnement sur la motion en commission de l'économie. (Commentaires.) Effectivement, en procédure finale de vote, un amendement global a été proposé et une bonne partie de cet amendement pouvait convenir aux Verts. Seulement, à la relecture de cet amendement global, nous considérons qu'il ne va vraiment pas dans le sens que nous entendions donner à ce dossier. C'est pourquoi nous refuserons cette motion aujourd'hui. (Exclamations.)

C'est assez flagrant, aujourd'hui nous avons trois rapports dans nos mains: celui du Conseil d'Etat, celui de M. Barrillier sur ce rapport du Conseil d'Etat et celui de M. Jeannerat sur la motion. Si on lit le rapport du Conseil d'Etat, on voit qu'un inventaire assez clair de la situation a été établi et des propositions formulées, si bien que l'on comprend difficilement comment, ensuite, en commission de l'économie, le département en charge de cette dernière nous a proposé de soutenir cette motion avec autant de vigueur. On se demande si quelqu'un a perdu une écharpe blanche au passage, parce qu'il nous semble que le rapport du Conseil d'Etat propose différentes pistes, sans toutefois en privilégier une de façon aussi prononcée que le fait la motion.

Il nous paraît important de constater les erreurs du passé: il y a plus de trente ans, on a procédé à un déplacement massif des zones industrielles; aujourd'hui, quand on s'y balade, que constate-t-on ? Que ces surfaces sont effectivement pleines ! Il ne reste que deux, trois ou quatre pourcents, selon les sources et le moment. Mais pourquoi reste-t-il aussi peu de surfaces que cela ? Il reste aussi peu de place disponible parce que vous pouvez, quand vous allez vous balader dans la Zimeysa, voir des champs de voitures à n'en plus finir... Des champs de voitures neuves, qui restent là, simplement stockées, cela à moins de 4 km du centre-ville. Cette façon de faire n'est tout de même pas acceptable !

Quand on va se balader dans une zone industrielle qui est beaucoup plus récente, la Ziplo, on constate que, là aussi, il y a beaucoup d'espaces de verdure. Il y a des parcelles qui, carrément, ne sont même pas construites; elles sont prétendument «en réserve», parce que des industries ont décidé d'acheter le terrain à des privés pour construire d'ici dix ans. C'est pour cela que nous aboutissons à des taux d'occupation qui sont aussi faibles et à des surfaces qui sont totalement occupées. Donc, un trop-plein, comme dit M. Barrillier. Effectivement, il y a un trop-plein, mais, à notre sens, il s'agit d'un trop-plein de vide ! A notre avis, il faut revoir les priorités, se donner le temps de réfléchir et ne pas partir à fond de train - comme le propose M. Jeannerat avec son amendement global - dans des projets de lois qui vont permettre des déclassements en vitesse, et cela sans poser les bonnes conditions. Les bonnes conditions, nous vous l'avons dit, se trouvent dans le rapport du Conseil d'Etat, qui est validé par le président du Conseil d'Etat et signé par lui-même. Nous ne comprenons pas pourquoi nous ne privilégierions qu'un seul axe et pourquoi nous ne suivrions pas toutes les recommandations et la manière de procéder qui figurent dans ce rapport.

Il est important de densifier - je crois que tout le monde l'a dit - c'est très important, mais dans une optique différente. On voit qu'il est aussi urgent de réorganiser ces zones, notamment pour arriver à plus de mixité - ce qui nous permettra probablement d'aboutir à une densité plus importante - et pour arriver à voir comment nous pouvons réorganiser tout cela, notamment avec la région transfrontalière. Il n'est pas forcément utile que toute l'activité industrielle se développe au centre de Genève; la région peut offrir des zones tout à fait adaptées, proches d'équipements autoroutiers, ferroviaires ou autres qui sont intéressants.

Finalement, il nous semble qu'il faut, s'ils doivent avoir lieu, planifier très rigoureusement ces déclassements selon le plan directeur. Ce n'est pas en pressant le pas, comme le demande cette motion, que nous y arriverons.

C'est pour cela que nous vous proposons de refuser la motion et de s'en tenir au rapport du Conseil d'Etat qui, pour nous, est le seul à proposer une vision durable et globale sur cette problématique.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je propose que nous arrêtions là les travaux, huit ou neuf personnes sont encore inscrites. Nous nous retrouvons à 20h30 très précisément et, dans l'intervalle, je vous souhaite un bon appétit !

Fin du débat: Session 12 (octobre 2008) - Séance 71 du 10.10.2008