République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 10290-A
Rapport de la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève (LSIG) (L 2 35)

Premier débat

M. Jean-Claude Ducrot (PDC), rapporteur. Mesdames et Messieurs les députés, le but de ce projet de loi est extrêmement important pour trois raisons fondamentales.

Premièrement, en application des nouvelles lois fédérales sur la distribution d'électricité et sur l'énergie, les Services industriels de Genève ont la chance, contrairement à d'autres cantons, de pouvoir être une zone de desserte pour l'ensemble du canton de Genève, à l'exception - pour des raisons géographiques - de la commune de Céligny.

Un deuxième élément extrêmement important, c'est la rétribution de l'électricité provenant d'énergies renouvelables. C'est un point essentiel, puisque le relais sera pris par le canton pour toutes les installations dont la Confédération, respectivement l'organisme compétent en cette matière, n'aura pas tenu compte.

Troisièmement, l'article 32 conforte une situation actuelle - qui a été acceptée par l'Association des communes genevoises - c'est-à-dire que les redevances qui sont dues tant à l'Etat qu'aux communes sont confirmées par ce projet de loi et ont obtenu l'approbation de l'ensemble des communes genevoises.

M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, si le MCG est d'accord avec la question du centime fédéral perçu pour financer les énergies renouvelables, il marque en revanche une claire opposition en ce qui concerne les redevances touchées par les communes. De quoi s'agit-il ? On parle de redevances pour le réseau de distribution d'électricité des Services industriels de Genève, qui détiennent un monopole d'Etat, c'est-à-dire que les SIG doivent payer 5% à l'Etat et 15% aux communes pour avoir un droit de passage afin de distribuer l'électricité à tous les citoyens genevois. Il est clair que les communes sont intéressées par cette redevance mais, malheureusement, cela correspond à un impôt déguisé puisque, dans une situation de monopole, les SIG vont devoir calculer sur le tarif facturé à chaque citoyen un amortissement par rapport à cette redevance.

Certes, on sait bien que les SIG ont l'habitude d'agir dans une opacité totale, j'en veux pour preuve les 100 millions versés à EOS ou - nous le savons depuis hier - les 74 millions payés sur la même base, c'est-à-dire sans intérêts, pour une durée de quinze à trente ans, à Gaznat, qui est le fournisseur exclusif des SIG pour le gaz... Nous en sommes donc déjà à 174 millions payés par les SIG, et cela avec quoi ? Avec ce que vous payez chaque fin de mois, Mesdames et Messieurs les députés, et vous, citoyens de ce canton ! Et là, il y a un problème institutionnel, parce qu'on ne peut pas d'un côté avoir un monopole d'Etat et donc obliger les clients à se fournir à un seul endroit et, de l'autre, payer comme ça, sans aucun contrôle, 174 millions - je dis bien 174 millions ! - sans intérêts et sans que cela passe devant ce Grand Conseil ou, encore mieux, devant le peuple. Ce n'est pas acceptable !

De plus, nous avons aussi découvert que les SIG ont perçu pendant cinq ans un timbre d'acheminement cantonal d'une manière arbitraire, ce qui avait pour conséquence que les Genevois avaient les tarifs d'électricité les plus chers d'Europe. Et ce n'est pas moi qui le dis, c'est l'autorité fédérale à Berne, la COMCO. Cette dernière a donc donné l'injonction au Conseil d'Etat genevois de faire rembourser les usagers à raison de 42 millions. Alors je vous laisse additionner, Mesdames et Messieurs les députés, 100 millions, 74 millions et 42 millions ! Et le dindon de la farce, c'est le citoyen qui, lui, doit se taire. En termes plus clairs, il doit fermer sa gueule et payer sa facture d'électricité à la fin du mois. Et ce n'est pas acceptable ! De plus, cette taxe de redevance est à nouveau un impôt déguisé dans une sorte de constellation absolument mirobolante de taxes et de montages financiers auxquels plus personne n'entend rien. Du reste, je mets au défi les citoyens genevois de comprendre la facture d'électricité qu'ils reçoivent à la fin du mois; entre les factures intermédiaires et les définitives, c'est incompréhensible ! Jamais personne n'y a rien compris, la seule chose que l'on sait, c'est ce qui est marqué dans la case «à payer» à la fin du mois. Et ça, ça ne va plus, Mesdames et Messieurs les députés ! Ce mode de gouverner, ce mode de faire n'est pas acceptable.

En outre, on parle aujourd'hui d'un projet important, comme l'a dit le rapporteur de la commission, M. Ducrot, or le ministre de tutelle Robert Cramer est à Berne et n'est donc pas là pour défendre son projet. Cela aussi, c'est inacceptable ! (Brouhaha.) On ne peut pas tolérer des choses pareilles ! Par conséquent, Mesdames et Messieurs, afin que l'on soit bien au clair sur ces redevances payées aux communes, que nous estimons être un impôt déguisé, je vous demande de renvoyer ce projet en commission et de prendre le problème des Services industriels de Genève dans sa globalité pour redéfinir une politique de transparence, parce que les citoyens de ce canton veulent de la transparence dans les comptes et dans la tarification des SIG. Cela ne peut plus durer ainsi, vous ne pouvez pas continuer à accepter que les Services industriels se moquent des citoyens, en payant des centaines de millions de francs, sans qu'on ait de contrôle...

La présidente. Excusez-moi, Monsieur le député ! Je vous demande de cesser vos dérives populistes, nous ne sommes pas au café du commerce mais dans un parlement !

M. Eric Stauffer. Madame la présidente, je n'ai pas de leçon à recevoir ! Je mène mon débat comme je l'entends et ce n'est pas vous qui allez me dire comment je dois m'exprimer dans cette séance ! Nous ne sommes pas en dictature mais en démocratie, Madame la présidente ! (Brouhaha.) Et avec tout le respect que je vous dois, vous n'avez pas à intervenir de cette manière et avec autant d'outrecuidance !

Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de renvoyer ce projet de loi en commission, afin que nous exigions la transparence que les Services industriels doivent à chaque citoyen et usager de ce canton.

M. Alberto Velasco (S). Chers collègues, en tant qu'administrateur, j'interviens très rarement dans les débats sur les SIG, et pour cause. Cependant, il y a des propos qui sont très durs à entendre ! Monsieur Stauffer, vous êtes administrateur... (Commentaires de M. Eric Stauffer, qui quitte la salle.) Madame la présidente, M. Stauffer est administrateur des SIG; à ce titre, il doit donc faire preuve de loyauté.

Aujourd'hui, je m'adresse au Conseil d'Etat. Je sais que le conseil d'administration s'est saisi, à travers la chancellerie, de la question de M. Stauffer et de sa pertinence au sein de ce conseil, et il vous revient, Messieurs les conseillers d'Etat, de prendre une décision à ce sujet. En effet, je trouve que les informations qui ont été données aujourd'hui, notamment sur la somme de 100 millions... Mais oui, Mesdames et Messieurs les députés, les SIG achètent de l'électricité et du gaz pour des centaines de millions ! Mais doivent-ils s'adresser à ce parlement chaque fois qu'ils vont engager un franc ? Est-ce que chaque fois que les Services industriels achètent pour 10 millions d'électricité, ils doivent demander l'autorisation à notre Conseil ? Mesdames et Messieurs les députés, vous vous imaginez devoir prendre une décision chaque fois que les SIG veulent acheter 100 mégawatts ? Mais où en est-on ?! Car c'est cela qu'est en train de dire M. Stauffer ! Je vous signale que ce dernier a reçu toutes les informations pertinentes - tout comme moi, puisque j'étais également dans ce conseil - mais, effectivement, l'énergie est un domaine complexe, de même que la tarification, et s'adresser aux citoyens s'agissant de domaines aussi compliqués et avec des informations aussi cachées, c'est très grave ! En effet, on est en train de mettre ici la probité des Services industriels en question, celle d'un service qui a nécessité des années et des années de mise en place.

Je crois que ce débat doit se terminer, Mesdames et Messieurs les députés ! Soit M. Stauffer donne des informations pertinentes, comme l'ont fait les Services industriels - et je les ai obtenues - soit il doit reconnaître qu'il a affirmé des contrevérités aux citoyens, attitude contre laquelle je m'élève. En conclusion, le Conseil d'Etat devrait aujourd'hui ou dans les prochains jours prendre des mesures adéquates.

M. Jacques Follonier (R). Madame la présidente, auriez-vous la bonté de bien vouloir faire un cours de politique générale du fonctionnement du Grand Conseil à M. Stauffer ? Car c'est un peu désagréable ! Nous sommes dans le cadre des extraits et il est dit que, normalement, on ne prend pas la parole; on peut, bien sûr, quand même s'exprimer, mais peut-être M. Stauffer ne sait-il pas qu'il est aussi possible de retirer un objet des extraits de manière à pouvoir en parler en plénière, comme certains aiment à le faire. Si vous pouviez le lui dire, je pense que ce serait une bonne chose ! Merci, Madame la présidente !

M. François Gillet (PDC). Nous sommes effectivement dans la procédure des extraits, et il est désolant de devoir prendre la parole pour contredire un certain nombre d'allégations de M. Stauffer. Il a été fait preuve de transparence en commission, nous avons obtenu toutes les précisions souhaitées sur le projet de loi qui vous est soumis aujourd'hui et l'Association des communes genevoises a été auditionnée. Alors si M. Stauffer veut maintenant, comme il en a l'habitude, refaire les débats du conseil d'administration, d'abord à la commission, puis en plénière... En tous les cas, j'observe que M. Stauffer a de plus en plus tendance à constituer un groupe à lui tout seul, puisqu'il contredit systématiquement les membres de son parti qui siègent dans les commissions concernées. En l'occurrence, ce projet de loi a été voté à l'unanimité de la commission, y compris par le commissaire MCG.

Je crois qu'il est urgent de reprendre le fonctionnement de notre parlement et de faire en sorte que les administrateurs siégeant dans les conseils des établissements publics autonomes ne le fassent plus dans les commissions parlementaires qui s'occupent de ces établissements. Ils devraient avoir la sagesse de le faire d'eux-mêmes, sinon le règlement devrait le leur imposer. En effet, il y a une confusion des rôles permanente; le peuple a tranché sur la gouvernance, nous en prenons acte, mais ce qui se passe aujourd'hui n'est pas normal et nous devons trouver le moyen de le faire cesser.

M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le débat qui a lieu en ce moment est un encouragement pour le Conseil d'Etat à accélérer ses travaux sur son projet de loi concernant la gouvernance des établissements publics autonomes.

Revenons maintenant au projet qui nous est soumis: il s'agit d'une obligation de droit fédéral de désigner les zones d'approvisionnement, avec un certain nombre de conséquences si on ne le fait pas. C'est la raison pour laquelle cette affaire est traitée dans le cadre des extraits, sinon elle aurait fait l'objet d'une urgence.

Par ailleurs, Monsieur Stauffer, ce que vous appelez des impôts n'en sont pas: c'est la rétribution d'une prestation publique. Toutes les entreprises, sauf à introduire des disparités, et surtout des subventions cachées, dont on ne voit pas la trace dans les comptes ni de l'Etat ni des entités, doivent faire l'objet d'une facturation. Comme le coût de ces mises à disposition du domaine public pour le transport des fluides était ancien et inadapté en fonction des canalisations posées sur le domaine communal et cantonal, on en a profité pour les réadapter en fonction de la réalité, ce que votre commission unanime a reconnu.

Pour finir, je voudrais dire que l'absence de M. Robert Cramer - il me semble que ma réponse le démontre - n'empêche pas le Conseil d'Etat de suivre les débats.

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons d'abord voter sur le renvoi en commission, tel qu'il a été demandé tout à l'heure.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10290 à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève est rejeté par 50 non contre 6 oui.

La présidente. Cette demande de renvoi ayant été refusée, nous votons à présent sur la prise en considération de ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 10290 est adopté en premier débat par 51 oui et 7 abstentions.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1, alinéa 7 (nouvelle teneur avec ajout d'une sous-note) et 1A (nouveau).

La présidente. A l'article 32, alinéas 2 et 3, nous sommes saisis d'un amendement de M. Stauffer, qui vise à abroger cet article. (Remarque de M. Eric Stauffer.) Non, Monsieur le député, vous ne pouvez pas vous exprimer ! Nous sommes en procédure des extraits et, selon l'article 72D, vous ne pouvez prendre qu'une fois la parole, pas deux, même si vous déposez un amendement. (Nouvelle remarque de M. Eric Stauffer.) Non, nous sommes dans le cadre des extraits ! J'applique le règlement ! Vous n'avez pas le droit à la parole, un point c'est tout !

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 53 non contre 7 oui.

Mis aux voix, l'article 32, alinéas 2 et 3 (nouvelle teneur), est adopté.

Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que les articles 2 et 3 (soulignés).

Troisième débat

La loi 10290 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 10290 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 52 oui contre 7 non et 1 abstention.

Loi 10290