République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 10213-A
Rapport de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Jean-Marc Odier, Gabriel Barrillier, Michel Ducret, Michèle Ducret, Jacques Follonier, Frédéric Hohl, Jacques Jeannerat, Pierre Kunz, Patricia Läser, Patrick Saudan, Charles Selleger, Louis Serex, Jacques Baudit, Mario Cavaleri, Béatrice Hirsch Aellen, Nelly Guichard, Anne-Marie von Arx-Vernon, Pascal Pétroz, Michel Forni, Guillaume Barazzone, Guy Mettan modifiant la loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève (B 1 01) (Rapport divers)

Premier débat

La présidente. La parole est au rapporteur, M. Pablo Garcia. Je la lui donne «en seguida» !

M. Pablo Garcia (S), rapporteur. «Muchas gracias» ! (Commentaires. Rires.) Mesdames et Messieurs les députés, en préambule, permettez-moi de saluer le travail fourni par le député Odier qui nous présente aujourd'hui une série de propositions ayant pour ambition d'améliorer le fonctionnement de notre parlement. Il est important que les représentants du peuple que nous sommes se soucient constamment des risques de blocages institutionnels du Grand Conseil.

La commission des droits politiques s'est penchée avec intérêt sur ces projets, proposant des amendements ou refusant des objets qui ne répondaient pas à cette exigence d'efficience. C'est le cas du projet de loi 10213, ce dernier porte sur les rapports divers. L'auteur et les signataires souhaitent que les rapports divers soient traités comme des projets de lois renvoyés sans débat en commission. Pour la majorité de notre commission, ce projet de loi, en englobant la totalité des rapports, n'est pas une bonne réponse aux quelques rapports divers posant des difficultés, notamment liées aux délais de dépôt et de vote. En effet, la plupart des rapports divers sont traités durant les séances des extraits. Avec une procédure de demande d'urgence, nous risquons de perdre plus de temps pour prendre acte d'un rapport. En ce sens, le remède serait pire que le mal.

Aujourd'hui, il existe des moyens à disposition pour traiter ces rapports en laissant notamment la possibilité aux chefs de groupe de les sortir des extraits, d'interpeller sur d'éventuelles urgences. Il suffit d'utiliser ces moyens correctement plutôt que de rigidifier ou alourdir la loi.

Ce projet de loi présente un risque réel d'introduire une lourdeur supplémentaire dans le règlement, alors que la procédure actuelle permet la résolution rapide et efficace des rapports divers.

Pour toutes ces raisons, simples et évidentes, la majorité de la commission des droits politiques vous invite à refuser ce projet de loi. Je vous remercie.

La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur. Avant de passer la parole à celles et ceux qui l'ont demandée, je salue à la tribune la présence de Mme Marie-Claire Hutin, ancienne élue du Conseil général de l'Isère. Bonjour Madame ! (Applaudissements.) Je donne la parole à M. Jean-Marc Odier.

M. Jean-Marc Odier (R). Effectivement, la commission des droits politiques a examiné avec intérêt cette proposition, et je lui en sais gré. Cependant, les travaux de la commission n'ont pas abouti à une amélioration de dispositions réglementaires visant à régler le problème soumis par l'auteur du projet de loi. En l'occurrence, effectivement peu de rapports divers posent problème; cependant, ceux d'entre eux qui en soulèvent sont vraiment importants, puisque, si l'on prend l'exemple du rapport des transports publics, il arrive que la commission des transports soit saisie de ce dernier pratiquement une année et demie, voire deux ans, après qu'il a été mis à l'ordre du jour du Grand Conseil.

Je pense que la commission a examiné avec intérêt ce projet de loi mais qu'elle n'est pas allée au bout de ses travaux; on aurait pu trouver des solutions, elle n'a pas voulu. Ce n'est pas aujourd'hui que je vais vous proposer, comme auteur, le renvoi en commission. Par contre, je crois que nous reviendrons avec une proposition complémentaire sur cet objet, puisqu'il y a réellement un problème à ce niveau-là. Et je pense que si nous avions déposé un amendement indiquant simplement: «A moins qu'ils ne soient traités en procédure de débat accéléré, les rapports sont renvoyés en commission sans débat», nous aurions certainement retrouvé une majorité. Ainsi, probablement reviendrons-nous avec cette proposition.

M. Philippe Guénat (UDC). De l'avis du groupe UDC, ce projet de loi est compliqué, lourd - voire mammouth - dans son élaboration. Et l'on cherche tout bonnement et systématiquement à mettre tous les rapports aux extraits pour, ainsi, éviter le débat parlementaire. Ce n'est pas du tout comme cela que l'UDC conçoit la démocratie dans notre République et canton de Genève, Messieurs !

Le groupe UDC refusera donc énergiquement ce projet de loi.

M. Pascal Pétroz (PDC). Le groupe démocrate-chrétien votera ce projet de loi même si, au vu des majorités qui se sont exprimées en commission, nous serons malheureusement battus. Pour nous, le raisonnement est simple: toute façon de faire permettant de modifier notre règlement afin que nos travaux s'effectuent le plus rapidement possible, sans porter atteinte au droit d'expression de chacun et chacune, mérite d'être soutenue. Si vous voulez que nous siégions désormais tous les jours pour des sessions interminables, ne votez pas ce projet de loi ! A l'inverse, si voulez que nos travaux soient plus diligents, je vous remercie de l'accepter !

M. Olivier Jornot (L). Tout d'abord, je remercierai le groupe radical de son bouquet de projets de lois - j'aurai l'occasion d'en défendre l'un ou l'autre tout à l'heure dans la suite de l'ordre du jour - car la plupart d'entre eux apportent des améliorations qui ne sont pas négligeables dans la façon de travailler de ce parlement.

S'agissant du projet que nous examinons maintenant, celui sur les rapports divers, j'ai le regret de dire à M. Pascal Pétroz qu'il se trompe lorsqu'il imagine, à l'instar des auteurs du projet de loi, voir dans le renvoi automatique des rapports divers en commission une possibilité d'accélération de nos travaux. Pour la simple et bonne raison - cela a été relevé tout à l'heure par le rapporteur - que l'essentiel de ces rapports vont aux extraits où il en est pris acte. Et s'il s'agit de renvoyer tous ces rapports en commission, on aura le bonheur, ensuite, d'avoir une heure de débat chaque fois que ces derniers reviendront de la commission concernée. Donc, trouver des moyens d'accélérer les travaux du parlement: oui ! Réfléchir ensemble à des façons de faire en sorte d'éviter de se prendre les pieds dans la barbe de la procédure: oui ! Mais faisons attention à ne pas nous tromper et à ne pas, au contraire, sous prétexte de vider l'ordre du jour de la plénière, obstruer celui des commissions avec un effet boomerang qui, ensuite, serait tout à fait nuisible !

Mme Elisabeth Chatelain (S). Je résumerai en quelques mots notre position, qui est celle d'employer les moyens mis à notre disposition. En général, la procédure des extraits nous satisfait. Si un rapport doit être renvoyé en urgence en commission - on oublie parfois que ce fut le cas - afin d'y être étudié, il l'est. Le procédé actuel nous semble donc suffisant.

Nous n'avons pas besoin d'accélérer à tout prix nos débats, je suis d'accord qu'ils sont souvent trop longs, mais ce n'est pas forcément à cause de la procédure: il y a souvent confusion entre le droit d'expression et le débordement dont nous abusons parfois dans cet hémicycle - qui n'en est pas un ! Nous avons d'autres moyens, nous devrions peut-être faire preuve d'attention quant à notre temps de parole et, à ce moment-là, nous pourrions accélérer nos travaux.

C'est pourquoi nous estimons ne pas avoir forcément besoin de ce projet de loi.

La présidente. Je vous remercie, Madame la députée. Monsieur Pétroz, vous avez redemandé la parole ?

M. Pascal Pétroz (PDC). Oui, très brièvement, et je vous remercie, Madame la présidente. J'ai essayé d'être très succinct mais, au vu de ce qui a été dit ensuite, quelques précisions s'imposent.

La pratique actuelle est que le rapport commence par dormir un certain temps à l'ordre du jour de notre Grand Conseil - à peu près entre trois mois, si l'on a de la chance, et une année, si l'on en a moins - cela en fonction de la rotation des départements. Et puis, on arrive finalement au point concerné, par exemple le rapport annuel concernant les TPG. Ensuite, il y a des déclarations de tous les groupes. Certains disent: «C'est très bien, on se réjouit d'examiner tout ça en commission.» D'autres disent: «Non, ce n'est pas bien du tout, on se réjouit de le démontrer en commission.» Après, le dossier part en commission... On a déjà perdu une année. La commission travaille: elle étudie le dossier avec l'attention requise, elle rapporte au Grand Conseil, et l'on attend à nouveau une année avant que ce rapport soit traité en plénière.

Voilà la situation que nous connaissons aujourd'hui ! Sauf pour certains cas où, heureusement, nous arrivons à nous mettre d'accord sur les procédures d'extraits. Or je rappelle qu'il faut l'accord de tous les groupes pour qu'un point soit traité en extraits ! Il suffit donc que pour une raison ou une autre il y ait contestation, et l'on ne pourra pas traiter le dossier en extraits.

C'est la raison pour laquelle ce projet de loi, qui nous épargne deux débats mais n'en prévoit qu'un lorsque le rapport sort de la commission - après qu'elle a dûment étudié la question - ne préjudicie pas la liberté d'expression des députés: elle évite d'avoir deux débats, dont un est très souvent inutile puisqu'on se dit qu'on se réjouit d'étudier le rapport en commission avant de le déposer... C'est pourquoi, au lieu d'avoir deux débats, il vaudrait mieux n'en avoir qu'un sur la base de la position documentée d'une commission qui a traité le sujet.

On ne peut donc pas dire que ce projet de loi ne sert à rien, à l'évidence cela n'est pas exact.

Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Je vais être brève, et assez dure néanmoins... (Exclamations.) Pour changer!

Encore aujourd'hui, nous avons passé trois quarts d'heure sur un projet de loi, et tout cela pour que chacun appuie sur le même bouton puisque tout le monde est d'accord ! Si certaines personnes arrêtaient de prendre la parole... (Exclamations.) ...et de la conserver durant sept minutes - pour parler pour ne rien dire, parce qu'il y a les caméras et qu'on se croit dans un théâtre de boulevard - eh bien, je pense qu'on avancerait beaucoup plus vite !

Et si les gens faisaient aussi l'effort de travailler dans les commissions qui siègent toutes les semaines, au lieu de refaire systématiquement le débat en plénière ou de présenter des amendements sur le siège pour essayer de faire des coups de force, eh bien, je pense que, là aussi, on avancerait bien plus vite ! Au lieu de passer une journée entière à traiter cinq projets de lois, il y aurait de fortes chances qu'on puisse en traiter une trentaine. Que certains ou certaines d'entre nous méditent là-dessus ! Quant à moi, je refuse ce projet de loi.

M. Gilbert Catelain (UDC). J'ai bien entendu les arguments des uns et des autres. Concernant les auteurs de ce projet de loi, je relève que les travaux de la commission n'ont pas fait apparaître d'analyses statistiques sur le nombre de rapports renvoyés en commission, respectivement sur le nombre de ceux qui ont été directement adoptés par le Grand Conseil. Il est donc impossible de prendre position.

En revanche, je relève que nous avancerions beaucoup plus vite dans notre ordre du jour si nous n'étions pas pollués par un nombre inconsidéré de motions PDC: elles ne sont que du réchauffé sur des projets discutés en commission et transformés en motions par le groupe PDC.

Donc, si le PDC a des propositions à faire pour accélérer les débats de notre ordre du jour, je l'invite à déposer moins de motions... (Brouhaha.) ... et nous aurons ainsi résolu notre grand problème de gestion de l'ordre du jour. (Commentaires.)

Des voix. Bravo !

Mis aux voix, le projet de loi 10213 est rejeté en premier débat par 46 non contre 17 oui et 2 abstentions.