République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1002-A
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. Fabienne Bugnon, Marie-Françoise De Tassigny, Christian Ferrazino, Mireille Gossauer-Zurcher, Philippe Schaller, Sylvia Leuenberger concernant la mise à disposition de cassettes vidéo aux mineurs (vente et location)
Proposition de motion: Mémorial 1995, p. 2543
P 1072-B
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la pétition : protégeons nos enfants
Rapport A: Mémorial 1995, p. 3524
M 1391-A
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. Marie-Paule Blanchard-Queloz, Loly Bolay, Fabienne Bugnon, Marie-Françoise De Tassigny, Pierre Marti, Louiza Mottaz, Nicole Castioni, François Courvoisier concernant la publicité pornographique
Proposition de motion: Mémorial 2001, p. 2511

Débat

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Ce rapport ne nous satisfait en fait pas du tout. J'avais été l'auteur de la première motion, qui demandait que l'on harmonise l'âge dans les salles de cinéma. Il existe en effet une commission Cinéma qui a justement pour but d'indiquer un âge pour les salles de cinéma du canton. Par contre, lorsqu'on achète une cassette vidéo dans un magasin, il n'y a pas d'âge indiqué.

La demande de la motion était simplement d'introduire dans le règlement sur la surveillance des mineurs une clause concernant l'usage des cassettes vidéos. La réponse du Conseil d'Etat nous dit des choses certainement intéressantes, mais elle précise qu'il y a une déréglementation, que l'on ne peut donc pas aller dans ce sens-là et que l'on s'occupe de la sphère privée des gens. Je suis désolée. Les magasins de cassettes vidéo ne font pas partie de la sphère privée, mais se trouvent sur la voie publique. En page 7 du rapport, Mme Mireille Gossauer, qui fait partie de la commission Cinéma, fait une proposition tout à fait intéressante, qui recueille l'unanimité de la commission Cinéma Cette proposition demande que l'on institue une limite d'âge sur les cassettes vidéo, ce qui ne devrait pas poser de problème pour les films qui sont déjà passés en salle. Elle demande aussi d'exiger des vendeurs ou des loueurs qu'ils indiquent cette limite d'âge sur les cassettes sous forme d'étiquettes et qu'ils contrôlent la limite d'âge.

Pour donner un seul exemple, "Urban Legend" est un film violent qui est classé 16 - 18 ans dans les cinémas. Si vous l'achetez dans un magasin de vidéos, il est marqué "tout public". Dès lors, soit l'on supprime la commission Cinéma, soit l'on va dans ce sens-là.

Je demande donc que ce rapport soit renvoyé au Conseil d'Etat pour que l'on réponde à notre motion qui avait été acceptée à l'époque.

Le président. Il y a trois rapports, Madame. Pouvez-vous me dire lequel vous voulez que l'on renvoie en commission.

Mme Sylvia Leuenberger. Je pensais à la motion 1002. Mais c'est le rapport.

Le président. C'est le même rapport, mais je dois prendre acte des trois objets.

Mme Anne-Marie Von Arx-Vernon (PDC). Nous ne pouvons qu'approuver les conclusions du présent rapport, même s'il n'est pas suffisamment abouti. Dans ce sens, je rejoins ce que Mme Leuenberger a dit précédemment.

Même si nous ne pouvons pas tout contrôler en matière de pornographie, il est indispensable de protéger les mineurs par rapport à la banalisation de la pornographie et surtout de tout faire pour dénoncer et entraver les risques majeurs que représente la pédophilie qui peut en être une dérive. Ce tabou commence à se briser. Mais ce crime effroyable envers les enfants n'a pas encore suffisamment suscité les moyens nécessaires à son éradication. Tout doit être mis en oeuvre, tous les moyens doivent être utilisés, doivent être mobilisés. L'information en est un, important et à notre portée. C'est l'affaire de tous et de chacun de lutter contre cette horreur qui est faite aux enfants.

C'est pourquoi le PDC prend acte du présent rapport et remercie le Conseil d'Etat de s'atteler vigoureusement à cette grave problématique.

Mme Loly Bolay (S). J'aimerais m'exprimer sur la motion 1391 et remercier Mme la conseillère d'Etat en charge du département de justice et police d'avoir si vite donné réponse à cette motion. Je lis dans le rapport que la police n'est pas restée inactive et que plusieurs contrôles ont été effectués dans les kiosques qui posaient problème à cause de cette pornographie. Je regrette cependant le fait que ce Grand Conseil soit obligé de déposer des motions pour voir appliquer des lois que nous votons nous-mêmes ici.

M. Gilbert Catelain (UDC). Le groupe UDC a pris connaissance de ce rapport avec intérêt. Il estime, comme le groupe des Verts, que ce rapport, même s'il prête une attention au phénomène de la pédophilie et des cassettes vidéo à caractère pornographique en général, ne va pas assez loin et nous l'assimilons à une sorte de refus d'agir, puisqu'il n'est pas suffisamment contraignant.

M. Thierry Apothéloz (S). Je peux rejoindre en partie les propos qui ont été exprimés à l'instant et par les différents préopinants. Le rapport du Conseil d'Etat nous indique que l'on ne peut pas faire l'amalgame entre la cyber-pédophilie et la mise à disposition des livres et des cassettes, voire des DVD, à des mineurs. Ce rapport est assez avancé sur le problème des magazines et des cassettes. Un certain nombre de propositions ont été faites, tant par la commission que par le département. On peut s'en réjouir. En revanche, en ce qui concerne la cyber-pédophilie, je reste, je dois vous l'avouer, un peu sur ma faim. En effet, je trouve que le rapport est un peu pauvre sur ce thème-là, alors qu'il mériterait effectivement que nous puissions nous y attarder un peu plus. Pourquoi, n'est-ce pas, ne pas proposer un système de fiches, comme celui qui existe pour les hôtels, dans les différents cyber-cafés pour permettre à un moment donné de savoir qui utilise des photos pédophiles.

En revanche, je n'ai pas retrouvé trace d'une réponse à la motion 1396, qui mériterait aussi un certain nombre de réponses quant aux invites déposées.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Tout d'abord, j'aimerais souligner que ce débat intervient au bon moment. Je rappelle à celles et ceux qui ont à coeur la lutte contre les crimes commis à l'égard des enfants, y compris la pédophilie, qu'elle soit cyber ou autre, qu'ils auront l'occasion de témoigner leur solidarité et leur préoccupation à l'occasion de la Marche blanche, manifestation qui se déroulera sur la place des Nations demain après-midi à 15 h 30. J'engage donc celles et ceux qui se font aujourd'hui les porte-parole de ces problèmes à y venir.

Cela m'amène à répondre ceci à M. le député préoccupé par la motion 1396. Je vous annonce d'ores et déjà, Monsieur Apothéloz, qu'une réponse sera apportée à cette motion, mais vous comprendrez qu'elle demandait une approche beaucoup plus complémentaire et plus diversifiée que celle-ci. Ma collègue chargée du département de justice et police pourra, le moment venu, vous présenter les conclusions du rapport du Conseil d'Etat.

S'agissant de l'intervention faite ici, j'aimerais que l'on prenne conscience de deux éléments. La problématique actuelle des cassettes vidéo s'axe davantage sur la façon de faire respecter la loi et sur la protection des mineurs. Je rappelle que nous ne sommes pas tout à fait dans la même problématique lorsqu'il s'agit de se procurer à titre individuel un produit quelconque. C'est le cas pour les kiosques qui vendent certains produits du même ordre, sauf que ces produits sont en fait sur des supports écrits. C'est aussi le cas lorsque vous êtes gérant d'une salle de projection publique au bénéfice d'une autorisation, salle dans laquelle une réglementation s'applique à toutes celles et ceux qui la fréquentent. C'est la raison pour laquelle je ne lis pas cette réponse, Madame la députée, de façon aussi négative que vous. Il a en effet été décidé, grâce aux travaux interparlementaires qui ont été menés, des éléments qui vont dans votre sens. Tout d'abord, premier élément, c'est de s'adresser à tous les commerces concernés - vous pouvez édicter mille règlements, s'ils ne sont pas appliqués, cela ne sert à rien - pour leur proposer divers moyens pour faire respecter la loi qui, je le rappelle, existe à l'heure actuelle. Parmi ces moyens, il y en a un qui est tout simple, puisqu'il s'agit d'informer par rapport aux règles fixées au sujet des films, mais d'autre part de proposer la pose d'étiquettes autocollantes qui portent sur l'âge et la nature du film et qui pourraient être indiquées sur les cassettes et les journaux pornographiques violents. Ce sont là deux mesures importantes et intéressantes. Il s'agira de voir si cette mesure est suffisante et de contrôler par la suite son application permet justement d'enrayer ce phénomène.

Je crois que nous visons tous le même objectif, c'est-à-dire lutter contre ces actes insupportables à l'égard des enfants. Mais je vous mets en garde contre l'idée que des articles de lois ajoutés à d'autres articles de lois viennent à bout de ce phénomène s'il n'y a pas un engagement sur le terrain, pour contrôler, inciter et encourager. C'est ce chemin qu'a choisi le groupe interdépartemental sous la houlette du Conseil d'Etat. Je pense que nous pouvons mettre en oeuvre ceci. Pour le vérifier, la première étape est d'indiquer sur les cassettes l'âge limite tolérable, ou plutôt l'âge limite autorisé pour les jeunes.

J'ajoute enfin une dernière chose, parce que chacun a une responsabilité dans cette problématique. J'ai eu l'occasion de le répéter à d'autres moments. L'Etat peut faire beaucoup, y compris par des lois, des règlements et des contrôles. Mais il y a, dans cette République, un bon nombre de choses qui sont faites par les jeunes, et pas seulement dans des familles défavorisées, hors contrôle des parents ou dans l'indifférence parfois totale des parents. Il y a une première responsabilité à l'égard des mineurs, c'est de veiller à ce qu'ils font, à ce qu'ils achètent, à ce qu'ils regardent et à ce qu'ils utilisent. Quelles que soient les mesures que nous serons amenés à prendre, cette responsabilité-là, l'Etat ne peut pas la prendre en charge et remplacer les parents dans leur rôle.

Le président. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi au Conseil d'Etat de ces trois objets, si j'ai bien compris Mme Leuenberger.

Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat est adoptée.

Le président. Je souhaite que la coalition Alliance de gauche - libérale aille discuter ailleurs, parce que l'on ne s'entend plus !