République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1099
5. Proposition de motion de MM. Jean Spielmann, Christian Grobet et Pierre Vanek concernant le stade des Charmilles et le projet de stade de Blandonnet. ( )M1099

LE GRAND CONSEIL,

- vu le refus des propriétaires du stade des Charmilles d'entrer en matière sur le projet de démolition-reconstruction du stade, tel qu'il résulte de la loi votée le 26 avril 1996 par le Grand Conseil;

- vu le refus des mêmes propriétaires de céder la propriété de ce stade selon les conditions fixées par la loi précitée;

- vu les déclarations de ces mêmes propriétaires qu'une somme de 1 million de francs suffirait pour rénover les installations du stade des Charmilles (rénovation légère);

- vu les incertitudes quant à l'avenir financier du Servette FC;

- vu les conditions posées par la Confédération pour subventionner la construction de stades de football;

- vu le projet de stade de Blandonnet,

invite le Conseil d'Etat

à lui faire rapport sur:

- l'état de ses négociations avec les propriétaires du stade des Charmilles et les dépenses qui auraient pu être engagées depuis l'adoption de la loi du 26 avril 1996;

- le projet de stade de Blandonnet et sa compatibilité avec les critères de subventionnement de la Confédération.

EXPOSÉ DES MOTIFS

L'alliance de gauche rappelle qu'elle a refusé de voter le crédit de20 millions de francs pour le stade des Charmilles pour les motifs suivants.

Tout d'abord, nous considérons qu'il est inconcevable que des constructions importantes soient financées par l'argent des contribuables sur des terrains privés, qui de ce fait deviendront propriété de particuliers et ne bénéficieront donc pas de la garantie de servir au but pour lequel elles sont destinées. L'alliance de gauche a donc considéré que la condition préalable à un investissement public aux Charmilles, c'est que le terrain qui avait été donné par la famille Hentsch pour le sport soit cédé gratuitement à l'Etat, afin de garantir la pérennité du stade et que le projet ne serve pas à une éventuelle opération immobilière au profit de certains particuliers.

Aujourd'hui, les faits ont donné raison à l'alliance de gauche. Il se confirme, malgré la campagne d'intoxication menée par certains milieux, que M. Léonard Hentsch non seulement ne veut pas céder le terrain des Charmilles, mais surtout refuse tout projet sur le terrain dont il est le propriétaire économique. Les péripéties de cette affaire et la récente démission de M. P.-A. Weiler de la présidence du Servette FC démontrent à quel point l'opinion publique a été, une fois de plus, «menée en bateau» et trompée sur les possibilités réelles de réaliser un projet encore une fois mal étudié par le Conseil d'Etat et n'ayant pas obtenu l'accord de certaines parties directement intéressées.

Deuxièmement, le projet ne porte pas sur la rénovation du stade des Charmilles, qui peut se faire à un coût relativement modeste, puisqu'un rapport d'ingénieurs atteste que les structures des tribunes sont en bon état, mais sur une démolition-reconstruction totale de ces tribunes dans le but de construire un nouveau stade de 25 000 places assises répondant aux normes UEFA.

Ici, également, on a tenté de tromper l'opinion publique sur l'importance des travaux de sécurité à exécuter pour répondre aux exigences posées pour les matches de championnat. Après le chantage de la fermeture du stade, on voit que, moyennant quelques modestes réadaptations, les matches continuent à avoir lieu !

Aujourd'hui, les milieux intéressés finissent par admettre que les travaux de rénovation nécessaires, comme l'alliance de gauche l'avait affirmé à plusieurs reprises, coûteraient environ 1 million de francs seulement !

Il est donc absurde de vouloir démolir les tribunes existantes dans le but de construire un nouveau stade, qui n'a pas été étudié comme la loi l'exige avant d'accorder le crédit de construction, alors qu'il est manifeste que le terrain disponible n'est pas suffisant pour réaliser le projet envisagé. Ici également, on a trompé l'opinion publique et cela d'autant plus facilement que le projet invoqué n'a pas été étudié.

Dans la mesure où Genève veut se doter d'un nouveau stade de 25 000 places assises dont l'utilité reste toutefois à démontrer, au vu notamment des résultats du Servette FC que la collectivité ne saurait subventionner. L'alliance de gauche partage l'avis de ceux qui considèrent que le nouveau stade doit de toute évidence être construit ailleurs qu'aux Charmilles. En effet, l'espace n'est pas suffisant, à l'emplacement du stade actuel, pour réaliser un tel projet dont le concept constructif serait onéreux (nécessité notamment de parois moulées), mais surtout il est intolérable de créer une telle source de nuisances en plein quartier d'habitation. D'autre part, les liaisons en matière de transports sont défavorables et il n'y a pas de parkings disponibles à proximité.

L'alliance de gauche n'a, toutefois, pas voulu se rallier au projet de stade à La Praille, d'une part parce qu'il sacrifiait des terrains industriels très bien localisés et indispensables à l'emploi, mettrait en péril la réalisation de la future gare sud de Genève et enfin aurait créé des nuisances supplémentaires pour les habitants du plateau de Lancy qui souffrent déjà du bruit nocturne de la gare de La Praille, sans parler du coût des parkings à réaliser.

Le seul endroit acceptable pour un nouveau stade de football est le site inhabité situé entre l'autoroute et l'aéroport, et c'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat serait bien inspiré d'étudier le projet de stade à Blandonnet plutôt que de s'entêter avec celui des Charmilles, qui fait du surplace depuis des années.

Le Conseil d'Etat est arrivé, à juste titre, à la conclusion qu'il n'était pas possible de maintenir en ville certaines activités attirant les grandes foules, ce qui l'a amené à construire Palexpo, puis la salle de spectacles Arena à côté de l'aéroport, de l'autoroute et de la gare terminus de Cointrin. Ces deux centres d'activités bénéficient d'accès particulièrement favorables pour le public venant tant du canton que de l'extérieur. Des parkings, offrant des milliers de places, ont été construits dans le périmètre de Cointrin.

Il est évident que le raisonnement effectué pour Palexpo et la salle de l'Arena doit également l'être pour le nouveau stade de football que le Grand Conseil a décidé de construire en un lieu inadéquat et qui n'est pas disponible en raison du refus du propriétaire.

Le site de Blandonnet offre par contre le grand avantage d'être situé à la sortie de l'autoroute au niveau de la route de Meyrin, sur des terrains appartenant en grande partie à l'Etat et ayant, semble-t-il, une surface suffisante pour réaliser un stade polyvalent, avec un anneau d'athlétisme et puisse avoir les dimensions nécessaires pour accueillir 25 000 spectateurs assis avec de bonnes conditions de visibilité, répondant ainsi aux critères qui viennent d'être fixés par le Conseil fédéral pour les quelques stades qui pourraient bénéficier d'un financement de la Confédération. En outre, le site de Blandonnet est situé en bordure des voies CFF où une halte pourrait être aménagée et à proximité des nombreux parkings de la zone aéroportuaire. Les immeubles d'habitation les plus proches sont distants d'au moins un kilomètre.

L'alliance de gauche est convaincue que si les pouvoirs publics veulent avancer dans la réalisation du stade décidée par le Grand Conseil, le crédit voté et le financement promis par une grande banque doivent être affectés à un projet réaliste, bien localisé, ne créant pas des nuisances supplémentaires en ville et indépendant des intérêts particuliers de certaines personnes.

Mais avant de prendre une décision définitive dans ce sens, l'alliance de gauche demande, une fois de plus, qu'une étude sérieuse d'une rénovation légère du stade des Charmilles soit effectuée et que son coût fasse l'objet d'un devis précis afin de savoir si cette solution, aujourd'hui préconisée par les propriétaires du stade, n'est pas la plus appropriée. Il faudrait aussi avoir un rapport exact sur la situation financière de l'utilisateur du stade, le Servette FC, suite à la démission de son président, et savoir si des sponsors s'engagent à couvrir l'important déficit du club dans la durée.

Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre à votre bienveillante attention la présente proposition de motion.

Débat

M. Dominique Hausser (S). Je demande le renvoi de cette motion à la commission des travaux.

M. Jacques Boesch (AdG). Nous ne pouvons pas nous permettre de renvoyer cette motion sans autre à la commission.

Durant plusieurs séances, les avocats, les architectes et les professionnels de la construction ont occupé ce terrain, en insistant sur l'importance des projets de lois proposés.

Je crois que celui-là a beaucoup d'importance et que les débatteurs doivent maintenant prendre la relève. Je propose de passer la parole à mon collègue Pierre Meyll.

La présidente. Ecoutons M. Pierre Meyll !

M. Pierre Meyll (AdG). A cette heure, les séances sont parfois houleuses et les digestions difficiles.

En l'occurrence, il a fallu une longue et lente démarche pour parvenir jusqu'ici.

Je regrette l'absence de M. Joye, car il lui aurait été utile de relire le rapport de deuxième minorité dont je suis l'auteur. Il aurait constaté que dès le mois d'avril nous avions un point de vue sur la voie à prendre similaire à celui, semble-t-il, du Conseil d'Etat, mais avec presque un an de retard pour l'exécutif.

Si mon amendement avait été accepté, nous serions dans une situation plus confortable. Avant d'entreprendre quoi que ce soit, et, en l'occurrence, je considère les projets... (L'orateur est interrompu par M. Olivier Vaucher.) Ecoute, Vaucher, il y a du béton à brasser ! Rien d'étonnant à ce que les entrepreneurs soient plus intéressés par le passage du stade que par le passage du ballon !

Une voix. Tu parles de quoi ?

La présidente. J'attendais la motion d'ordre. Allez-y, Monsieur le député !

M. Pierre Meyll. Je continue, Madame la présidente. J'en étais au stade...

La présidente. Et pas encore au penalty !

M. Pierre Meyll. Si un concours doit être lancé - et là, je m'adresse au Conseil d'Etat - il devrait l'être par la fondation et non pas par l'Etat dans ces circonstances ! Nous nous trouvons dans une situation quelque peu abstraite.

Une voix. Ça risque d'être long !

La présidente. Nous en sommes au point 31 de l'ordre du jour !

M. Pierre Meyll. Je parle du stade de La Praille pour lequel le Conseil d'Etat a prévu un concours. Celui-ci ne doit pas être organisé par le Conseil d'Etat, mais par la fondation qui sera chargée de son occupation...

Des voix. On ne comprend rien ! (Brouhaha.)

La présidente. A défaut de sifflet, il nous faut un arbitre ! Monsieur Meyll, avez-vous terminé votre intervention ?

M. Pierre Meyll. Non, mais j'y reviendrai, car cette intervention non programmée n'avait pour but que de permettre à un des trois motionnaires d'arriver en ce début de séance bien chahuté !

M. Bernard Lescaze (R). M. Meyll n'a pas réussi à dire qu'il était contre tout. Il est contre La Praille, les Charmilles et Blandonnet.

Je propose purement et simplement le rejet de cette motion.

M. Dominique Hausser (S). Il aurait été passionnant de débattre de cette motion en commission...

Une voix. Quel enthousiasme !

M. Dominique Hausser. Comme nous devons en débattre maintenant, permettez-moi quelques commentaires.

Un projet, deux projets, trois projets : Charmilles, Praille, Blandonnet... Peut-être devrions-nous dire : Zschokke, Ambrosetti, Belloni ! Quand le Servette occupait le terrain, on ne voyait déjà pas grand-chose, aujourd'hui, on ne voit plus rien du tout...

Il y a six mois, le Grand Conseil a voté un crédit de 20 millions pour la rénovation ou la démolition/reconstruction d'un stade de football sur le terrain des Charmilles qui ne serait débloqué que si certaines conditions étaient remplies.

L'analyse de ce dossier, en commission des travaux, avait conduit à retenir les Charmilles, seul terrain accessible dans les meilleurs délais, en dépit de plusieurs points critiquables. A l'époque, aucun projet n'existait pour Blandonnet, et, pour La Praille, les problèmes fonciers et financiers étaient insolubles.

Le 29 novembre 1996, M. Joye a informé la commission des travaux que la situation des Charmilles était bloquée et que celle de La Praille était susceptible d'évoluer sur le plan foncier. Il nous a aussi rapporté son entretien avec le responsable technique de l'UEFA, entretien que je résume ici :

L'UEFA estime qu'il faut concevoir un stade pour cinquante ans, couvert et polyvalent, sans cohabitation avec des commerces. La capacité de vingt-cinq mille places n'est pas un critère pour l'UEFA qui préconise, à Genève, un stade de quinze mille à vingt mille places assises pour des compétitions nationales. Un stade de dix-huit mille places limiterait nos ambitions, car nous n'entrerions plus dans le concept national des stades qui exige quelque vingt-cinq mille places... (Brouhaha.)

La présidente. Malgré cette heure «post-repas», puis-je vous demander un peu de silence ?

M. Dominique Hausser. Les dégagements constituent l'inconvénient majeur des Charmilles qui se trouvent au centre-ville, tout comme La Praille et Blandonnet. Néanmoins, il n'est pas nécessaire de construire une multitude de parkings, vu que ces trois secteurs sont très bien desservis par les transports publics.

A quoi joue-t-on finalement ? Certainement pas au football, comme M. Meyll l'a laissé entendre. On ne joue pas dans l'intérêt des habitants de la cité, ni pour promouvoir le sport auprès des jeunes ou pour satisfaire les nombreux amateurs de foot de notre République.

Nous devons en parler et nous devons agir ! La saturation des terrains de football disponibles à Genève est telle que l'organisation des matches est un véritable casse-tête. Les plages horaires pour les entraînements ont dû être limitées. Plusieurs clubs doivent jouer sur différents terrains éloignés de leur quartier ou de leur commune. Cela ne favorise évidemment pas la convivialité associée à cette activité.

Un exemple : le stade de Vessy/Champel a reçu plus de trois cents matches, saison 1995/1996, pour le deuxième tour de la ligue. Autre exemple : les enfants de la Servette ne s'inscrivent plus au club de leur quartier, car il évolue au bord de l'Arve. Il faut relever que ces clubs de deuxième ligue, en dépit de toutes ces difficultés, ont attiré autant de spectateurs que les matches du Servette.

Une voix. Une équipe phare !

M. Dominique Hausser. Oui, les socialistes y sont favorables, mais d'une manière raisonnable. Les équipes phares pourraient être Meyrin, Etoile Carouge ou Chênois. (Brouhaha.). Certains experts me soufflent Lancy ! Il ne faut pas que le sacrifice financier consenti pour un nouveau stade prétérite les infrastructures des «petits» clubs, pendant des années.

Il est donc urgent d'attendre que le Conseil d'Etat continue à nous démontrer son incapacité à faire plier une fondation - Hippomène pour ne pas la nommer - dont le but est officiellement la promotion du sport, plus particulièrement le football, mais qui, en fait, ne cherche qu'à s'enrichir sur le dos des contribuables.

Attendons l'étude comparative de la rénovation et de la démolition/reconstruction, demandée dans le projet de loi que nous avons voté en juin dernier. Jusqu'à preuve du contraire, un stade aux Charmilles demeure le projet réaliste défendu par les socialistes, il y a quelques mois. Il ne nécessite pas d'investissements démesurés de la part des collectivités publiques tant du canton que de la Ville de Genève.

Les socialistes défendent la logique du sport populaire. Ils se refusent à signer un chèque en blanc, comme ils l'ont dit en juin dernier, pour un projet démesuré qui relève plus de la mégalomanie que du réalisme.

M. Jean Spielmann (AdG). Nous avions refusé de voter le crédit de 20 millions, lors du débat sur le projet de loi concernant la rénovation du stade des Charmilles. Nous avions aussi exposé les motifs de notre désaccord, à savoir que cet investissement était injustifié pour un périmètre ne permettant pas les réalisations nécessaires et un développement futur. Néanmoins, ce projet de loi a été voté à une très large majorité.

Maintenant, je constate que le Conseil d'Etat et la majorité de ce parlement reviennent déjà sur leurs positions dans un sens que nous jugeons positif.

Notre proposition de motion a pour premier objectif d'examiner la possibilité de réaliser un stade qui réponde aux exigences actuelles et s'insère dans un plan d'aménagement du territoire, avec des transports publics adéquats. Ce stade devra être conçu non seulement pour le football mais pour d'autres pratiques sportives. En effet, aujourd'hui, un tel équipement ne peut se concevoir que polyvalent, afin de répondre aux besoins du sport et aux exigences exprimées.

Nous devons examiner deux propositions : celle du stade de La Praille, qui a ses avantages, et celle que nous proposons. Il serait judicieux d'examiner ces propositions à la lumière d'une enquête sérieuse portant sur les liaisons et le futur aménagement. En effet, la région de Lancy Sud / Bachet connaît de gros problèmes, et il n'est pas évident qu'elle se prête à la construction d'un stade polyvalent et des liaisons nécessaires sans porter atteinte à l'environnement immédiat.

Le site que nous préconisons est précisément celui que voulait ce Grand Conseil lors de la réalisation de l'autoroute, sur un périmètre interdit à l'urbanisation. En tant que zone non constructible, ce périmètre se prête particulièrement bien à ce type d'activités, parce que ne créant pas de nuisances pour le voisinage. Il s'inscrit dans la ligne de l'Arena, de Palexpo et de toute une série d'équipements qui nécessitent des liaisons et des exploitations, sans que cela nuise au voisinage au niveau du bruit et des transports.

Ce site nous semble parfaitement adapté, et le Conseil d'Etat, avant de se lancer tête baissée comme il l'a fait pour le projet de rénovation des Charmilles à 20 millions, serait bien inspiré de pousser la réflexion avant d'entreprendre une opération d'une telle importance. Il ne faut pas des mois pour examiner les tenants et aboutissants des deux projets, à la lumière des conclusions de notre motion, afin de choisir entre Blandonnet et La Praille, dans la mesure où ce Grand Conseil décide de réaliser un stade polyvalent. Le moment venu, nous discuterons du contenu, du financement et des utilisations. Le propos, aujourd'hui, ne porte que sur le choix du site le plus approprié à une telle réalisation.

M. David Hiler (Ve). Voici la position des Verts, telle qu'elle s'est dégagée de leur assemblée générale consacrée à cet objet.

Nous nous réjouissons que la fondation ait tenu bon et nous ait ainsi évité la grosse bourde urbanistique qu'aurait été la construction d'un stade de grandes dimensions aux Charmilles.

L'important, pour nous, est qu'après la catastrophe urbanistique qu'est le complexe des Charmilles l'on puisse panser quelque peu les plaies en transformant l'emplacement du stade en espace vert. C'est la première condition que nous mettrons à notre acceptation de tout projet.

Autre condition sur le plan urbanistique : le stade doit être bien desservi par les différents moyens de transport qu'utiliseront les gens désireux d'assister à un match de football. De ce point de vue, Blandonnet et La Praille font l'affaire.

Nous n'avons pas tranché sur l'opportunité définitive de l'un ou de l'autre site, mais nous ne nous opposerons pas à l'un ou l'autre des projets pour autant que les critères que je viens d'énoncer soient respectés.

Cela dit, nous avons nos préférences. Certains regrettent la perte de la zone industrielle qu'implique le projet de La Praille. D'autres, constatant la peine à trouver un industriel pour acquérir cette zone, estiment, dès lors, que la réalisation d'un établissement de caractère public ne poserait pas un grave problème.

En revanche, Blandonnet semble susciter une difficulté : celle d'un délai de réalisation extrêmement long, lié à des problèmes d'acquisition des terrains. L'information que nous avons reçue s'arrête là. Vous en savez peut-être plus, car vous avez des amis mieux placés que nous.

Une autre question s'est posée à notre groupe. Certains pensent que vingt-cinq mille places c'est trop pour les affluences enregistrées aux Charmilles. D'autres - dont votre serviteur qui se rappelle avoir assisté à des matches réunissant vingt-deux mille spectateurs, alors que les normes étaient fort différentes - estiment que parler de gigantisme pour un stade de vingt-cinq mille places est quelque peu absurde, puisque la ville a doublé depuis l'époque où le stade accueillait ces vingt-deux mille spectateurs.

Nonobstant l'agacement compréhensible manifesté par certains d'entre vous après l'intervention de M. Meyll, il ne serait pas déraisonnable que cette motion soit renvoyée en commission, afin que nous soyons informés des deux projets, même si je pense, en l'état, que le projet de La Praille est meilleur. En effet, j'estime normal de suivre les faits autrement que par le biais de la «Tribune de Genève», car ce n'est que par ce quotidien que j'ai été informé des descriptifs de Blandonnet. Ceux de La Praille nous ont été envoyés par M. Benedict Hentsch. C'est dire qu'il est véritablement très compliqué d'être renseigné dans cette République !

Nous appuyons donc le renvoi de la motion en commission, et je vous suggère d'oublier votre agacement d'après repas pour revenir à la procédure normale, soit un débat serein en commission.

M. Olivier Lorenzini (PDC). Cette motion est en retard de deux ou trois guerres, vu l'allure à laquelle les points de notre ordre du jour sont traités.

Le seul avantage que je vois à cette motion, abstraction faite des réactions émotionnelles, est que l'Alliance de gauche a intégré la nécessité d'avoir, pour Genève, un stade de vingt-cinq mille places. Je retiens cela, et j'espère qu'elle votera avec nous, quand le projet de La Praille sera en voie de concrétisation.

M. Bernard Annen (L). Etait-il vraiment nécessaire de rallumer une guerre de religion, alors que nous sommes à la veille de trouver une issue à ce douloureux problème ?

D'aucuns pourraient se rappeler toutes les propositions qui ont été faites, notamment celles, datant d'une dizaine d'années, estimées mégalomanes pour certains, judicieuses, parce que financées par le privé, par d'autres.

Ce n'est pas la motion, en tant que telle, que nous trouvons exagérée, mais son exposé des motifs, qui lance des anathèmes que je pourrais aisément réfuter en développant ma propre argumentation.

Comme je l'ai dit, nous sommes sur le point de trouver une solution. Il est vrai, Monsieur Hausser, que la majorité de ce Grand Conseil, dont nous étions, avait voté pour les Charmilles. Mais les choses ont changé. Aujourd'hui, un consensus, qui ne satisfait jamais pleinement personne, pourrait être trouvé pour La Praille, et je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas l'envisager. Vous parlez, Monsieur Hausser, d'un certain nombre de clubs de sport en général et de football en particulier. A Genève, il y a plus de quatre cents clubs, environ douze mille licenciés et - plus important à mes yeux - six mille juniors de plus qu'il faut privilégier.

A partir de là, Monsieur Hausser, c'est tout le monde du football qui s'attend à ce projet-ci. Bien qu'ayant été plutôt favorable à la rénovation des Charmilles, je suis prêt à rallier l'unanimité qui se dégage pour défendre le projet de La Praille. Non pas que cette proposition de motion soit totalement infondée, mais, comme M. Lorenzini l'a dit, elle est trop tardive, sans que cela soit de la faute de M. Spielmann et des autres motionnaires. Elle a été différée de mois en mois. Entre-temps, un certain nombre d'événements ont eu lieu.

C'est dire que nous, parlementaires, n'avons pas à parler des 20 millions pour la rénovation du stade des Charmilles, puisqu'un projet de loi demandera à ce qu'on les «ripe» en faveur de La Praille, voire de Blandonnet.

Concernant Blandonnet et sans vouloir rallumer une guerre de religion, je relève un problème dont les motionnaires ne parlent pas : les terrains que l'Etat devra acquérir. Sous peine de se contredire, l'on ne peut pas affirmer que les frais supplémentaires ne doivent pas être supportés par la collectivité, en sachant que des terrains devront être acquis, à des prix relativement élevés, pour un stade à Blandonnet.

Aujourd'hui, nous devons nous rallier à un projet pour faire avancer...

Une voix. Le «schmilblick» !

M. Bernard Annen. ...le dossier ! Nous avons une motion tardive pour les raisons que je viens de donner. Je pense, Monsieur Spielmann, que vous devriez la retirer, sinon nous serons obligés de la refuser. Non pas parce qu'elle est fondamentalement mauvaise, excepté l'exposé des motifs, mais parce qu'elle ralentira le projet. Cela m'inquiète, car, ce faisant, vous fournirez, Monsieur Spielmann, des arguments à ceux qui ne veulent rien du tout. Personnellement, je ne vous soupçonne pas de ne vouloir rien faire, mais je ne suis pas convaincu que votre groupe pense de même.

Pourquoi repartir sur une étude de Blandonnet, alors que ce projet est impossible en termes de faisabilité, à moins d'un investissement supplémentaire de plusieurs millions de la part de l'Etat pour acquérir les terrains ? En revanche, on sait, par définition, qu'avec La Praille on parviendra à un résultat, correspondant aux normes UEFA, tant en termes de localisation qu'en termes de coût global.

Monsieur Hausser, vous ne pouvez pas vouloir, en même temps, une aura internationale pour Genève et un stade de sport de niveau cantonal, voire communal.

Nous devons relever ce défi, par ailleurs fort intéressant, puisque nous pourrions bénéficier de subventions, dès lors que ce stade national serait agréé. C'est dire que la Confédération acceptant de contribuer au projet de La Praille, nous devons en profiter. Si nous tergiversons continuellement, la Confédération portera son choix sur un autre canton, et nous aurons raté un nouveau virage.

Arrêtons la guerre de religion ! Nous, libéraux, sommes les premiers à nous rallier à une majorité. Nous voulons un stade digne de Genève et j'espère que nous serons suivis.

M. René Koechlin (L). Je constate que M. Spielmann est mal informé et que M. Hiler dit qu'il est difficile d'être informé, ce qui revient à peu près au même.

La commission des travaux, elle, est bien informée. Elle a reçu bon nombre des réponses que les motionnaires appellent de leurs voeux.

Je constate aussi que la circulation des informations fonctionne assez mal au sein de certains groupes.

Ainsi, Monsieur Spielmann, vous demandez que le Conseil d'Etat réfléchisse. Il y a des années qu'il réfléchit au stade des Charmilles, Monsieur ! Vous demandez qu'il analyse les avantages et inconvénients des trois implantations envisagées, à savoir aux Charmilles, à La Praille et à Blandonnet. Laissez-moi vous informer, Monsieur ! Mes renseignements émanent de ceux que nous avons reçus à la commission des travaux.

M. Jean Spielmann. Depuis quand ?

M. René Koechlin. Taisez-vous et écoutez pour une fois ! Je sais que ce n'est pas votre habitude, mais une fois n'est pas coutume ! Pour l'implantation d'un stade aux Charmilles, suite au vote de ce Grand Conseil d'un crédit de 20 millions, le Conseil d'Etat s'est heurté au refus du principal actionnaire de la société propriétaire du terrain.

M. Pierre Meyll. Lisez le procès-verbal, tout y est écrit !

M. René Koechlin. Merci, Monsieur Meyll, de me le rappeler. Vous auriez dû le dire à M. Spielmann, ainsi l'auriez-vous informé ! Lorsque nous avons voté le crédit de 20 millions pour les Charmilles, la Ville de Genève, propriétaire du terrain de La Praille, avait refusé catégoriquement l'implantation d'un stade à cet endroit. Faut-il le rappeler ? Depuis, la Ville a changé d'avis. Tout devient de nouveau possible et l'implantation d'un stade à La Praille entre dans les opportunités qu'il convient d'exploiter. Pourquoi ?

1. Parce que le terrain de La Praille présente l'avantage de pouvoir faire l'objet d'échanges, c'est-à-dire d'obtenir un terrain sans débourser de cash-flow, ce qui ne serait pas le cas pour Blandonnet qui nécessite l'achat de parcelles pour un montant avoisinant 12 millions. C'est là le premier inconvénient d'un stade à Blandonnet.

2. Parce qu'il y a convergence d'affluences à Blandonnet. Dans le même secteur, nous avons l'Arena, Palexpo et l'aéroport qui impliquent des afflux de trafic ingérables en cas de manifestations simultanées. Implanter à Blandonnet un stade de football qui génère un trafic automobile extrêmement important, pouvant s'ajouter à celui destiné à d'autres manifestations, serait des plus déraisonnables. Il y a donc de bons motifs pour de ne pas envisager l'implantation d'un stade à cet endroit.

La Praille ne présente pas seulement l'avantage de pouvoir obtenir le terrain sans débourser de cash-flow mais celui de réaliser l'opération en plusieurs étapes, vu l'espace disponible. Je vous assure que cet aspect-là n'est pas négligeable. Il l'est d'autant moins qu'il représente un moyen d'obtenir un consensus, sinon une large majorité, au sein de ce parlement en faveur de cette implantation; car nous avons bien compris qu'un stade de quinze mille places, dans un premier temps, est jugé suffisant par nombre de députés et de citoyens.

On pourrait passer, lors d'une étape ultérieure et en fonction des besoins, à un stade de vingt-cinq mille places pour aboutir, dans un futur très lointain, à un stade de trente-cinq ou quarante mille places. Tout cela est faisable sur le site de La Praille, par étapes, et sans que la réalisation d'une étape ultérieure ne nuise à l'exploitation du stade déjà en fonction. C'est un avantage considérable, qui fait totalement défaut aux Charmilles.

Je vous rappelle qu'en commission nous avions relevé les avantages de ce projet lors de sa présentation. Malheureusement, à l'époque, les propriétaires de La Praille refusaient cette implantation. On ne peut aller contre la volonté d'un propriétaire, surtout quand il s'agit d'une commune.

Nous nous apprêtons à discuter de ces problèmes à la commission des travaux. C'est pourquoi j'estime inintéressant et inopportun d'y renvoyer cette motion.

M. Dominique Hausser (S). Il y a quelques mois, le ralliement à un projet du gouvernement a été fort difficile, Monsieur Annen. Aujourd'hui, vous nous demandez de nous rallier à un nouveau projet. Je veux bien, mais pour autant que je l'aie sous les yeux ! Maintenant, je ne sais pas de quoi on parle.

Si nous avions débattu de la motion de l'Alliance de gauche au mois de novembre, nous ne serions pas en train de parler de La Praille. Si nous en discutons, c'est parce que le Conseil d'Etat, dans son point de presse de mercredi dernier, a annoncé qu'il lançait une étude de ce site. D'où l'orientation du présent débat.

Je suis heureux d'entendre M. Koechlin dire qu'il n'est pas nécessaire de construire d'emblée un méga-stade, et que l'on peut en bâtir un de dimensions raisonnables, adapté aux besoins locaux. Je retiens cette information tout comme M. Lorenzini en a retenu une autre. Nous en débattrons en commission des travaux.

M. Claude Blanc (PDC). Il convient de remettre, sinon l'église, du moins le stade au milieu du village !

A l'initiative du parti socialiste, manifestement absent ce soir, nous nous sommes réunis à plusieurs reprises dans une salle de l'Hôtel de Ville pour déterminer la position à adopter. Les représentants du parti démocrate-chrétien furent les seuls à défendre le projet de La Praille.

Une voix. Ce sont les meilleurs ! On a gagné, on a gagné !

M. Claude Blanc. Ensuite, et toujours à l'initiative de la présidente du parti socialiste, des réunions se sont tenues au plus haut sommet, entre des gens initiés qui nous ont bien fait comprendre que les Charmilles constituaient la meilleure option.

D'autre part, la Ville de Genève - soit M. le conseiller administratif Hediger, chargé des sports, et Mme la conseillère administrative Burnand, chargée de l'urbanisme et des travaux publics - nous a clairement signifié qu'elle ne voulait pas que l'on prenne possession des terrains de La Praille à n'importe quelles conditions pour y construire un stade. Placés devant cette évidence, nous nous sommes ralliés à ce qui était possible à ce moment-là, c'est-à-dire que nous avons voté le projet des Charmilles.

Dès l'instant où Mme Burnand et M. Hediger ont changé d'avis, nous sommes venus à leur rencontre...

M. Dominique Hausser. Nous n'en avons pas la preuve !

M. Claude Blanc. Ils l'ont affirmé à plusieurs reprises... (Interruption de M. Dominique Hausser.) Monsieur Hausser, vous êtes de mauvaise foi ! M. Joye a déclaré, en commission des travaux, qu'il avait reçu l'assurance de Mme Burnand que la Ville de Genève avait changé d'avis. Par conséquent, il nous a demandé... (Brouhaha.)

La présidente. Je vous informe que nous avons pris un retard de trente-cinq minutes.

M. Claude Blanc. Madame la présidente, j'ai quand même le droit de parler !

La présidente. Parfaitement ! Mon information s'adressait à l'ensemble des députés.

M. Claude Blanc. M. Joye a demandé à la commission des travaux l'autorisation de préparer un nouveau projet de loi en faveur de La Praille, après nous avoir démontré que cette solution était la seule réaliste, par rapport aux frais engagés et aux délais à tenir. La commission des travaux a acquiescé à sa demande. Maintenant, nous attendons ce projet de loi.

Si bien que votre motion, Monsieur Spielmann, n'a plus de raison d'être, et ce d'autant moins que, si nous la votions, nous donnerions l'impression à la presse et au public que nous cherchons encore à tergiverser, à «dribbler», si j'ose m'exprimer ainsi, et à tirer en corner...

Maintenant, il faut avancer dans la seule direction possible : celle indiquée par M. Joye à la commission des travaux. Il faut oublier cette motion et attendre avec impatience le projet de loi du Conseil d'Etat pour adopter définitivement La Praille.

M. Pierre Meyll (AdG). Je suis heureux d'apprendre que tout le monde était pour La Praille ! Il n'en demeure pas moins que je reprends la parole pour mettre certaines choses au point :

Si vous consultez mon rapport de deuxième minorité, qui figure à la page 2277 du Mémorial, vous y trouverez tous les arguments que vous avancez ici !

D'autre part, vous aurez constaté que la motion n'est pas signée de Pierre Meyll. C'est clair, c'est net : je reste sur les positions que j'ai défendues le 25 avril, pour la bonne raison que c'est les seules défendables.

Maintenant, les Charmilles sont hors course. C'est bien, mais reconnaissez que le projet de loi que vous avez voté à une écrasante majorité est sans valeur, parce que nul et non avenu. Dès lors, le Conseil d'Etat doit demander l'annulation de cette loi et se hâter d'en préparer une autre ou présenter un amendement à la loi du 26 avril 1996, puis de la faire voter. Que s'ensuivra-t-il ? Le lancement d'un référendum, et vous l'aurez, ce référendum, par votre faute !

D'autre part, je rappelle à M. Joye qu'il avait déclaré que tout objet de concours devait être lancé par la fondation et non par le Conseil d'Etat. Or que se passe-t-il ? Le concours annoncé pour La Praille pille les idées d'un groupe d'architectes qui ont déjà fait le travail. Ce n'est pas normal du tout. Le Conseil d'Etat n'a pas le droit de lancer un concours sur un projet qui n'est même pas passé devant le Grand Conseil; pour le lancer, il doit, avant tout, annuler la loi ou voter un amendement.

Si vous aviez accepté mon amendement lors de ce fameux vote du 29 avril - amendement consistant à remplacer «les Charmilles» par «canton de Genève» - vous seriez maintenant à l'aise. Mais, bien sûr, il ne fallait surtout pas écouter Pierre Meyll ! C'est possible, mais, en attendant, nous sommes dans l'impasse.

Quant à vouloir lancer un concours pour La Praille, sans en avertir ceux qui se sont acharnés à présenter un projet tout à fait valable, c'est les spolier purement et simplement. Si vous persistez dans votre idée de concours, vous risquez d'avoir des problèmes d'ordre légal. Il est inacceptable de n'avoir pas averti les personnes concernées d'une telle éventualité.

Les concepteurs de La Praille ont proposé un projet de quinze mille places, comme l'a dit M. Koechlin, mais qui ménageait la possibilité d'en ajouter pour parvenir au chiffre de vingt-cinq mille. Ce projet retient l'attention des spécialistes; il a été examiné, des études de pré-impact et d'impact ont été faites. Tout ce travail de prospection est l'oeuvre de gens intelligents que vous n'avez pas voulu recevoir, ni retenir, et maintenant vous vous trouvez dans une situation qui ne vous laisse aucun choix pour revenir à la ligne droite. Vous devez faire annuler cette loi ou déposer un amendement et attendre le délai référendaire.

Alors, s'il vous plaît, allez de l'avant ! Surtout ne dites pas que je suis contre le football. J'ai vu le Servette jouer sur le stade des Charmilles bien avant vous, Monsieur Annen...

Une voix. Ça se voit !

M. Pierre Meyll. J'ai vu de grands joueurs suisses au Servette, et je regrette que l'on n'ait pas trouvé, dans cette République, des gens aptes à diriger un club que l'on veut glorieux, mais qui a été mené à sa perte par des tergiversations politiques relevant de la maniaquerie ! Devoir aller chercher des gens à l'étranger pour retirer un club genevois de l'ornière politique et affairiste où l'ont conduit quelques «politicards», c'est honteux !

M. Jean Spielmann (AdG). Tout à l'heure, M. Koechlin me demandait de l'écouter et, dans son envolée, déclarait que je m'étais prononcé, tout à la fois, pour La Praille, les Charmilles et Blandonnet.

A mon tour de lui demander de me lire, s'il en est capable ! En effet, j'ai constaté, lors des discussions en commission, qu'il était peu réceptif aux idées émises oralement par les représentants de notre groupe, et encore moins à celles qu'ils écrivaient. Permettez-moi de lui demander de quoi parle cette motion et quel est son but !

M. Koechlin a parlé de problèmes d'acquisition de terrains et de l'incertitude d'une construction à Blandonnet. Que demandons-nous au Conseil d'Etat, par voie de motion ? Tout simplement un rapport sur l'état des négociations avec les propriétaires du stade des Charmilles et les dépenses éventuellement engagées depuis l'adoption de la loi, puis d'examiner les possibilités d'une réalisation à Blandonnet et sa compatibilité avec les critères de subventionnement de la Confédération, au niveau du financement.

Vous pouvez faire l'économie de cette étude, vous lancer tête baissée dans le projet de La Praille sans examiner les autres possibilités, comme cela a été le cas pour les Charmilles, en dépit de nos mises en garde. Alors, foncez sans autre sur La Praille, refusez toute autre alternative en matière de perspectives ou de développements futurs. Vous irez au devant d'un référendum qui vous fera comprendre que ce projet n'est pas le meilleur que vous aurez présenté !

Actuellement, je suis d'avis, moi aussi, que le projet de La Praille peut être bon. Et si la Ville a évolué sur certains sujets, notamment celui-ci, sachez que je n'y suis pas totalement étranger.

Si vous voulez gagner, vous devriez écouter les autres, conserver votre esprit critique et établir un dossier crédible. Foncer tête baissée, c'est faire comme M. Joye, qui a échoué dans tous ses projets. Agissez de même pour La Praille ! Je vous souhaite bon succès, mais le référendum vous l'aurez, et la défaite avec !

M. Luc Gilly (AdG). Je n'avais pas l'intention d'intervenir ce soir, mais pour éviter le dénigrement habituel dont je suis victime, je vous dirai que j'ai longtemps joué au football et que je me suis fréquemment rendu au stade des Charmilles. J'y vais moins souvent maintenant, à cause de mon travail. Néanmoins, j'ai assisté à quelques matches, cette saison.

Je demande à tous - autant à l'Alliance de gauche qu'aux Verts, au parti socialiste et à la majorité qui se trouve en face de moi - de réfléchir à ma proposition :

Vous connaissez l'existence d'un méga-projet pour un nouveau stade, du côté de Monthey, préparé par M. Constantin, président du FC Sion. Le football évoluant dans un sens que je regrette, nous serons bientôt confrontés à ce méga-stade. Vous savez aussi que la municipalité ou la Ville de Lausanne s'apprête à voter un crédit de 16 millions pour rénover le stade mixte de La Pontaise. Et maintenant, de surcroît, 1 ou 2 millions ont été injectés pour rénover provisoirement le stade des Charmilles.

Ma proposition est donc la suivante : Ne pourrait-on pas réaffecter ailleurs les 20 millions dont nous disposons pour le stade des Charmilles ?

Une voix. Dans l'armée !

M. Luc Gilly. Merci, je ne m'attendais pas à moins ! On nous prône sans arrêt des échanges entre Genève et Vaud; on nous parle de HES, de travailleurs se déplaçant quotidiennement de Genève à Lausanne et de Lausanne à Genève; de jeunes étudiant dans toute la Suisse romande; bref, de cette fameuse mobilité.

Pourquoi ne serait-il pas possible de réfléchir, trente secondes, à la possibilité suivante : Servette participant à un match international une fois tous les dix ans, celui-ci ne pourrait-il pas être joué à La Pontaise ? Serait-ce un crime de lèse-majesté de demander aux supporters et aux sportifs de faire 120 bornes aller et retour ? N'en sont-ils pas capables, dès lors que des travailleurs et des étudiants font ce trajet tous les jours ? Réfléchissez, ne serait-ce que trente secondes !

Pour obtenir des subventions de la Confédération, comme certains le prétendent, vous devrez construire un stade polyvalent et non un simple terrain de foot. Ni La Praille ni Blandonnet ne se prêtent à cette polyvalence. Ce sont des terrains pour le foot, un point c'est marre !

Par conséquent, je vous propose de donner un coup de main financier aux Vaudois pour faire un très beau stade à La Pontaise, de consacrer encore éventuellement plus d'un million à l'amélioration des Charmilles et d'affecter donc ces 20 millions :

1. à un grand stade à Lausanne, qui serait central pour toute la Suisse romande - aide genevoise;

2. à l'amélioration du stade des Charmilles qui reçoit rarement plus de quinze mille personnes;

3. aux stades des juniors et pour toutes les sportives et sportifs genevois qui pratiquent le sport hors compétition. (Applaudissements.)

M. René Longet (S). Monsieur Blanc, vous avez cité le parti socialiste. Effectivement, notre parti s'est fortement impliqué - vous le savez pour avoir participé à certaines réunions - pour que ce problème ne débouche pas sur de nouvelles divisions, pour que nous ne nous battions pas, chaque fois qu'une décision doit être prise, sur trente-six mille solutions dont la moitié ne sont pas du tout réalistes.

Monsieur Blanc, vous avez bien fait de le rappeler. Ce travail de concertation, initié par le parti socialiste, a conduit à une première plate-forme, soit les 20 millions de crédit votés ici.

Nous n'allons pas oublier ce vote et nous livrer à un bradage, parce que de nouvelles idées surgissent du côté du Conseil d'Etat. Cette plate-forme, qui constituait un point de départ, n'a pas été facile à obtenir.

En quoi cette plate-forme était-elle intéressante ? Par les idées qu'elle a suscitées, dont celle de la dimension. Il ne suffit pas de se lancer des chiffres à la figure, encore faut-il savoir à quoi ils renvoient. Il faut connaître les besoins et disposer de la totalité des éléments.

Nous n'admettons donc pas de foncer, tête baissée, dans un changement complet de stratégie, simplement parce d'aucuns pensent qu'il faut nécessairement aller à La Praille, parce que la Genève internationale existe et que nous y tenons. C'est un peu court comme raisonnement !

Il nous incombe d'opérer des choix valables pour les prochaines décennies. Par conséquent, nous devons savoir ce que nous faisons en termes d'équipements et de développement.

Maintenant, nous devons avoir toutes les cartes en main. Beaucoup ont dit que les données n'était pas suffisantes pour un débat cohérent. Pas une personne, ici, ne peut se prévaloir de tout connaître dans ce domaine, et s'il y en a une qu'elle se lève ! (M. Bernard Annen lève la main.) Monsieur Annen, dites-nous tout, bien que je présume que vous ne sachiez pas tout ! Certes, vous avez déclaré ce que vous saviez, chacun connaissant un élément du dossier. Il n'empêche que ce Grand Conseil se ridiculiserait s'il changeait d'avis sans avoir réellement tous les éléments en main.

Dès lors que la motion permettra de recueillir toutes les informations, nous pensons qu'elle sera fort utile en commission. La dimension constituera, pour nous, l'élément clé par rapport au projet annoncé, car nous ne sommes pas favorables à un équipement surdimensionné. Le compromis obtenu sur les 20 millions représente, pour nous, un élément important pour la suite du débat.

Vous aurez donc compris notre intérêt pour la motion proposée ce soir.

M. Chaïm Nissim (Ve). Je ne peux m'empêcher de répondre à mon préopinant, j'étouffe !

Il y a six mois, Monsieur Longet, nous avons pris, à l'initiative de Mme Micheline Calmy-Rey, une série de décisions dans le cadre d'une sous-commission - à laquelle appartenait M. Blanc - qui se réunissait de manière informelle. Les travaux de cette sous-commission ont abouti, en fait, à une proposition totalement irréaliste.

Vous, les socialistes, sans le dire clairement, vous vouliez un petit stade de quinze mille places aux Charmilles, sur la surface déjà disponible. Les partis de l'Entente, eux, désiraient, toujours aux Charmilles, un grand stade de vingt-cinq mille places. Je leur avais conseillé - mon rapport de minorité en fait foi - l'usage d'un chausse-pied pour intégrer un tel stade dans un quartier déjà surdensifié.

Vous vous êtes tous focalisés sur une solution irréaliste, parce que vous ne parliez pas du même stade et qu'un grand stade ne pouvait être construit à cet endroit.

Le Conseil d'Etat et d'autres se sont avisés ensuite de cette impossibilité due à un forcing et au dialogue initié par la présidente du parti socialiste qui ont débouché sur deux projets totalement différents. Vous ne vouliez pas admettre que les choses n'étaient pas claires et que vous vous mentiez les uns aux autres. Par conséquent, vous avez simulé un accord et vous nous avez exclus, Pierre Meyll et moi-même, pour vous avoir dit la vérité.

Nous vous disions que la construction d'un grand stade était impossible aux Charmilles.

Aujourd'hui, il s'avère que nous avions raison. Je suis désolé, mais c'est comme ça !

Une voix. C'est tout ce que tu avais à dire ?

Mme Claire Chalut (AdG). Je n'entendais pas intervenir dans ce débat. On parle depuis trois quarts d'heure des Charmilles, du Servette, et je ne sais de quoi encore.

Je constate simplement une chose : des responsables ont été à la tête de ce club et ils n'ont rien fait pendant dix ans. Tout à coup, on découvre la vétusté du stade et que les tribunes risquent de nous tomber sur la tête !

D'autres priorités existent dans ce canton; elles sont bien plus importantes que celle de se demander s'il faut un stade grand, moyen ou petit.

Nous avons une proposition de réfection pour environ un million. Très bien ! On repeint, on retape, et je suis certaine que c'est possible, parce que je constate... (Brouhaha.) Je peux crier plus fort ! (Rires.) On n'a jamais d'argent pour le social, l'emploi, l'aide aux entreprises, mais on trouve toujours, comme par hasard, 20, 30, 60 millions, 1 milliard pour toutes sortes de travaux qui ne seront pas réalisés, parce que ne répondant à aucun besoin objectif.

Dès lors, pourquoi ne pas collaborer à la réfection du stade olympique de La Pontaise ? Quant à faire 60 kilomètres pour s'y rendre, la belle affaire ! Bien des gens couvrent une telle distance à vélo ou à pied par esprit sportif, sans parler de ceux qui sont obligés d'aller travailler à Romanshorn et de revenir le soir.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Tout d'abord, je vous prie d'excuser mon retard. J'ai cru que la séance commençait à 21 h 15, mes oreilles devaient être bouchées !

La proposition de motion est bonne. Malheureusement, elle date de novembre. Après novembre, il y a eu décembre et, maintenant, il y a janvier... (Rires et applaudissements.)

La présidente. Et il y aura février !

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Permettez que je réponde ! La motion invite le Conseil d'Etat à faire rapport sur l'état de ses négociations avec les propriétaires du stade des Charmilles. Je suis à même de vous le présenter très rapidement.

Ce n'est que le 3 décembre que nous avons reçu le dernier avis de droit de M. Manfrini. Il corrobore à 100% l'avis de droit de M. Junod - avis élaboré, en juillet, par l'équipe de M. Hentsch - qui excluait, pour nous, la possibilité de demander l'éviction de M. Hentsch, de nous substituer à lui pour procéder à des réparations ou de lui demander de modifier l'architecture de son stade. Bien plus : l'avis de droit laissait entendre que M. Hentsch pouvait décider seul d'en déplacer l'assiette !

Dès lors, nous nous sommes accordés, avec M. Hentsch, sur les principes suivants :

1. M. Hentsch a dit vouloir assumer personnellement les réparations. J'ai, ici, la proposition qui m'a été faite. A la demande conjointe de M. Hentsch, de Canal + et des experts du Paris/Saint-Germain, nous devons procéder immédiatement à la réhabilitation du stade actuel, des travaux de caractère provisoire. Le programme est le suivant : études sommaires en ce qui concerne la tribune A, ce qui recoupe étonnamment la proposition de la motion; mise au point définitive du cahier des charges; requêtes et travaux; reprise de la compétition, en principe, le 9 mars 1997. Le délai est extrêmement bref, mais nous espérons pouvoir commencer les travaux au plus vite pour livrer un stade en état de fonctionnement dès la première compétition.

2. M. Hentsch a pris cet engagement quand il a su que nous avions trouvé l'emplacement de La Praille. Pour que l'entraînement des jeunes puisse commencer immédiatement, M. Hentsch a accepté de faire don de sa part de Balexert à la fondation à constituer. Notre délégation, composée de M. Haegi, de M. Ramseyer et de moi-même, a obtenu l'aval du Conseil d'Etat pour que les travaux débutent rapidement et pour que la fondation soit mise sur pied, afin que les projets de La Praille et de Balexert puissent être étudiés simultanément.

3. M. Hentsch fera don de son stade à la Ville quand le nouveau sera construit.

Monsieur le député, je vous assure que nous écoutons les membres de tous les partis quand ils émettent des idées positives. Je voudrais rendre ici hommage à M. Hediger qui nous a beaucoup aidés à trouver une bonne solution pour La Praille. Tout le monde étant d'accord pour ce site, je suis à même de renseigner les motionnaires sur le projet de Blandonnet et sa compatibilité avec les critères de subventionnement de la Confédération.

Comme l'ont dit MM. Koechlin et Annen, ce projet ne convient pas pour plusieurs raisons, dont celle d'un investissement foncier d'environ 28 millions. En revanche, nos négociations avec la Ville sont à bout touchant. Avec Mme Burnand et ses services, notamment celui de M. Ruffieux, nous avons établi un programme d'échange de terrains portant sur environ 19 millions de francs, le terrain industriel de La Praille intervenant pour environ 12 millions dans la composition générale de ces échanges. Ce programme implique une caserne de pompiers, une école et l'échange des terrains de Balexert et de Vessy, qui sera très difficile à négocier. Si les équipes de football de la Ville, qui jouaient à Balexert, ne peuvent le faire à Vessy, nous aurons un gros problème susceptible de mettre en péril le fonctionnement du stade de Balexert.

Le stade de Blandonnet ne convient pas pour des raisons de trafic et de dégagement. A l'époque, dans le cadre de notre délégation, M. Ramseyer avait démontré la nécessité de construire des passerelles au-dessus de l'autoroute pour créer un dégagement conforme aux normes de sécurité.

J'en viens au stade de La Praille. Le site n'a pas été choisi en fonction d'un projet, dont je salue par ailleurs le bonne facture. Je tiens à rappeler qu'en architecture, et cela dans tous les pays du monde, aucun droit n'est conféré à quiconque établissant un projet sur un terrain ne lui appartenant pas, sans qu'une forme de dédommagement ne soit prévue pour le propriétaire. Cette règle est valable pour La Praille, pour Blandonnet et pour les Charmilles.

Le projet des associés Portier et de l'ingénieur Dal Busco est intéressant. Il l'est d'autant plus qu'il est la réplique d'un projet de M. Piano, architecte italien renommé, déjà auteur de deux stades, dont celui de Nîmes que j'ai visité.

Votre Grand Conseil a estimé ne pas devoir dédommager quiconque, pour quelque projet que ce soit, dans le cadre de La Praille, de Blandonnet et des Charmilles. Nous pensons, nous, qu'il faut intégrer d'office les trois personnes concernées - au niveau de l'appel par préqualification - au concours d'entreprise générale globale que nous avons l'intention de lancer.

Les prochaines étapes du stade de La Praille sont les suivantes :

1. Un projet de loi au Grand Conseil modifiant la loi du 26 avril, afin de pouvoir utiliser la subvention de 20 millions déjà votée pour la réalisation d'un stade à La Praille. Nous aimerions le présenter au Grand Conseil en février.

2. Tout le monde s'accorde sur une capacité de vingt-cinq mille places assises, répondant aux normes de l'UEFA, pour un stade essentiellement consacré au football, ne comportant pas de piste cendrée et pouvant accueillir occasionnellement d'autres manifestations. Nous avons renoncé à l'idée de créer une société d'exploitation similaire à celle de M. Michael Drieberg, car les entretiens de M. Haegi avec Canal + ont fait ressortir que de telles manifestations ne diminuaient pas les coûts d'exploitation, le maximum à espérer étant la couverture des frais induits.

3. Un concours élargi est organisé. Il sera ouvert à des groupements constitués d'architectes, d'ingénieurs, d'entreprises générales et de partenaires financiers. La publication de l'avis de préqualification sera faite la semaine prochaine. Les trois bureaux ayant déjà présenté des projets seront retenus d'office, dans la mesure où ils s'intégreront, comme leurs concurrents, dans un groupement pluridisciplinaire. Le jury sera constitué.

4.  Dans la perspective d'un financement éventuel, nous entendons soumettre le projet de stade aux autorités fédérales le plus tôt possible. D'ores et déjà, le DTPE entreprend les démarches nécessaires auprès des autorités fédérales.

5. La rénovation du centre sportif de Balexert, pour sa mise à disposition du Servette FC, sera engagée incessamment, avec le nouveau comité du Servette, sous réserve de l'accord de la Fondation Hippomène et de la Ville de Genève. La Fondation Hippomène a décidé d'entreprendre les travaux nécessaires, et l'avis de préqualification a été envoyé à la «Feuille d'avis officielle».

Concernant La Praille, l'échange des terrains donnera lieu à des précisions ultérieures. La surface comportant ce qu'on appelle «les baraquements du Lignon» pourrait faire l'objet d'un échange foncier avec la Ville.

J'espère que les motionnaires sont satisfaits de ma réponse. Le mois prochain, nous pourrons vous présenter le nouveau projet modifiant l'assiette des 20 millions et, je le souhaite, des 3 millions de la Ville de Genève.

M. Christian Grobet (AdG). Je remercie M. Joye de son rapport. Il répond ainsi à l'invite première de notre motion.

Ce Grand Conseil a voté une loi ambiguë, portant sur un projet quasiment inexistant. La moindre des choses était donc d'informer directement le Grand Conseil de son état d'avancement, afin que nous ne soyons pas renseignés par le seul canal de la presse, en raison des déformations et des manques d'information inévitables.

M. Joye a eu raison de faire appel à une logique que nous acceptons tous, à savoir qu'après le mois de novembre il y a le mois de décembre, et qu'après le mois de janvier, il y a le mois de février !

Nous reconnaissons que notre motion est quelque peu dépassée par les événements, son dépôt ayant coïncidé avec l'intention du Conseil d'Etat de réaliser le projet des Charmilles.

De brillants juristes siégeant au Conseil d'Etat, j'avoue être surpris que l'on ait dû solliciter des avis de droit à l'extérieur pour savoir si l'Etat pouvait imposer un projet sur un terrain privé. M. Meyll, comme il l'a dit, aurait pu les fournir bénévolement !

Indépendamment de la nécessité de l'accord du propriétaire qui, je le rappelle, constituait le point principal de nos précédents débats, parce que certains doutaient de cet accord, nous étions plusieurs à souligner qu'un projet de stade de vingt-cinq mille places aux Charmilles n'était possible qu'en acquérant des terrains supplémentaires du côté de Tavaro, des voies CFF, du chemin des Sports, et j'en passe. De plus, on parlait pudiquement de réhabilitation du stade, alors qu'il s'agissait d'une démolition/reconstruction.

Pendant des années, on a maintenu l'illusion d'un stade de vingt-cinq mille places aux Charmilles et j'ai été heureux d'apprendre, par voie de presse, que certains, au Conseil d'Etat, avaient reconnu qu'un tel projet ne passerait pas l'étude d'impact obligatoire demandée, voici six ans, par un certain conseiller d'Etat. A l'époque, cette demande avait été jugée abusive ! Aujourd'hui, on a trouvé d'excellentes raisons pour trouver ce stade absolument irréalisable. Dont acte !

Nous sommes heureux que le Conseil d'Etat reconnaisse l'infaisabilité de ce projet mégalomane et que le stade des Charmilles peut faire l'objet d'une rénovation légère, ce que nous disions depuis longtemps.

Madame Chalut, vous-même avez été victime de la campagne d'intoxication : les tribunes du stade des Charmilles ne sont pas sur le point de s'effondrer. Le rapport du bureau d'ingénieurs Trembley confirme le bon état des structures. Les travaux de rénovation étaient estimés entre 1 et 4 millions, mais, finalement, M. Hentsch nous a informés qu'il pouvait les faire pour un million. Tant mieux, cela ne fait que confirmer ce que nous disions !

Compte tenu de la rénovation légère du stade des Charmilles, nous devons nous demander si un nouveau stade de vingt-cinq mille places est nécessaire. La question est délicate. Tout dépend de la faisabilité du projet et des moyens financiers à disposition. On nous annonce un prêt sans intérêts du Crédit Suisse, un élément essentiel, et l'on avance la possibilité d'une subvention fédérale, autre élément intéressant. En effet, si le canton ne participe que peu au financement, le reste étant payé par des tiers, le projet pourrait être avantageux.

Vous avez dit, Monsieur Joye, avoir donné satisfaction aux motionnaires. Je vous rappelle que la motion demandait surtout à connaître les conditions de l'aide fédérale. Dès lors que l'on raconte beaucoup de choses à ce sujet, je me suis procuré, en tant que conseiller national, les documents que vous avez certainement obtenus de votre côté. Vous savez donc que les projets en l'état du stade de La Praille et du stade de Blandonnet ne peuvent pas être pris en considération dans le cadre d'un subventionnement fédéral, en vertu des critères figurant dans les documents officiels.

Vous savez encore, Monsieur Joye, qu'il ne saurait être question de certitude. Avec sa prudence coutumière, le Conseil fédéral ne promet pas de subventions pour les stades de football. Il les présente comme des éventualités à partir de l'an 2000, et seulement pour trois stades, dont un de vingt-cinq mille places en Suisse romande, et pour autant qu'ils soient polyvalents et adaptés à l'athlétisme. Or aucun des deux projets prévus ne comporte de piste d'athlétisme ! Je sais que certains Genevois disent que c'est l'histoire de la rade qui recommence et que l'on ira à Berne solliciter la modification des conditions actuelles.

Il est important, Madame et Messieurs, membres du Conseil d'Etat, que vous énonciez clairement à ce Grand Conseil, lors de la présentation du projet de loi sur La Praille, les conditions exactes posées par la Confédération pour bénéficier d'un subventionnement et le pourcentage envisageable. Il ne dépassera pas 30%.

On ne peut plus, dans cette affaire, continuer à nous mener en bateau comme on l'a fait durant des années. Il vous faudra préciser, avec exactitude, les modalités d'une aide fédérale.

Enfin, il faut savoir que Genève ne sera pas seule en lice. Le stade de La Pontaise, fort bien placé, pourra être adapté, pour 16 millions seulement, aux conditions posées par la Confédération.

Par voie de conséquence, nous pensons, aujourd'hui, que ce stade coûtera extrêmement cher. Nous examinerons attentivement les devis et j'ajoute que M. Meyll a bien raison de conseiller de ne pas s'engager sans avoir au moins voté un crédit d'étude.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Lors de la préparation du projet de subventionnement de diverses installations sportives, soumis en préconsultation à Berne, personne ne parlait de la reconstruction d'un stade.

Ne vous étonnez donc pas qu'en l'état du projet, dans l'ignorance de l'emplacement même du stade, nous ne puissions vous garantir une subvention fédérale. Il serait tout à fait exagéré d'affirmer que nous sommes certains de l'obtenir.

La polyvalence est très discutée. Nous avons reçu M. Walker, président de l'Association internationale et du comité de la construction des stades qui a rédigé les normes. Il nous a dit que la polyvalence n'était pas nécessairement liée à des pistes cendrées, mais qu'elle englobait différents sports se pratiquant sur un périmètre engazonné. Pour les joueurs de football - tout le monde le sait ! - le périmètre de jeu idéal jouxte les limites du stade.

D'autre part, ce projet de loi est censé subventionner une construction pour du hockey sur terre, une salle de tennis à Berthoud, une nouvelle halle à Macolin, un centre nautique je ne sais pas où et un autre à La Pontaise, etc. D'ores et déjà, les possibilités du crédit-cadre, initialement prévu, sont largement dépassées.

Le projet de financement en l'état comprend :

1. 3 millions de la Ville. Nous espérons qu'elle les maintiendra et les amplifiera;

2. 20 millions votés par votre Grand Conseil; j'espère que vous accepterez d'en changer l'assiette;

3. 20 millions prêtés par le Crédit Suisse à deux conditions : un amortissement annuel de 250 000 F, sur une période de quatre-vingts ans, et des droits sur la publicité. Ce prêt peut être discuté, notamment avec les nouveaux repreneurs Canal + et Paris/Saint-Germain.

Ne pouvant pas demander à la société locataire d'assumer les charges d'entretien, nous devrons, comme tout propriétaire d'un immeuble, prévoir le montant nécessaire au maintien du stade en état de fonctionnement. Puisque vous avez été conseiller d'Etat, Monsieur Grobet, vous savez que ce montant représente l,5 à 2% du coût de construction de l'objet, terrain non compris. Je vous le dis pour que vous ne nous accusiez pas, M. Haegi et moi-même, de ne pas vous avoir exposé le projet dans sa totalité.

En ce qui concerne le concours, nous demanderons aux huit à douze concurrents sélectionnés de nous fournir un projet que j'intitulerai «projet sec», parce que sans variante excessive et sans équipement supplémentaire. Les variantes soumises devront être comptabilisées à part. Les frais d'exploitation seront comptabilisés hors le budget de l'enveloppe destinée au stade peu onéreux que vous souhaitez.

Mise aux voix, cette proposition de motion est rejetée.