République et canton de Genève

Grand Conseil

P 1425-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier la pétition "Stop Bouchons"
Rapport de M. André Reymond (UDC)

Débat

M. André Reymond (UDC), rapporteur. Dans le cas présent, il ne s'agit plus de 2664 signatures, mais seulement de 180 ... Mais cette pétition «Stop Bouchons» concerne toujours le quartier des Eaux-Vives, avec la même problématique de la circulation. Il faut maintenant absolument résoudre les problèmes de ce quartier qui font l'objet, vous le verrez, d'autres points de notre ordre du jour.

Il s'agit en l'occurrence des petits commerçants qui se plaignent car les commerces sont en péril dans le centre-ville et les habitants du manque de places de parking. Nous allons donc certainement parler à nouveau du parking de Pré-l'Evêque, mais le problème est un petit peu délicat.

Je vous propose donc de prendre acte de ce rapport.

Mme Ariane Wisard-Blum (Ve). Avant d'intervenir pour donner la position des Verts, permettez-moi, Monsieur Reymond, de vous dire que, si vous trouvez qu'il n'est pas respectueux de classer une pétition signée par 2000 ou 3000 personnes, il n'est pas non plus très respectueux de faire un rapport aussi peu complet, qui tient en trois lignes, sur une pétition qui a recueilli 22 000 signatures ! (Applaudissements.)

J'en viens au fond de la pétition. C'est vrai, ça bouchonne à Genève, tout comme il est vrai que nous sommes chaque année de plus en plus nombreux à emprunter les routes de notre canton en deux ou quatre-roues, que nous soyons habitants de Genève ou frontaliers. Il est également vrai que de gros chantiers sont en cours de réalisation, afin d'améliorer l'offre de transports publics pour permettre à Genève, actuellement étouffée par la circulation pléthorique, de retrouver une certaine qualité de vie.

Par ailleurs, plus l'offre de transports publics sera augmentée et améliorée, plus les bus et les trams seront utilisés, plus les déplacements des gens obligés d'utiliser leur voiture seront facilités. Cette situation difficile d'encombrements n'a pas été programmée par quelques décideurs à l'esprit tortueux !

Par contre, il n'est pas inutile de rappeler les recours téméraires lancés par le TCS contre le projet du tram de la rue de Lausanne. Ces oppositions ont retardé le démarrage des travaux; ils ont alors dû se dérouler en même temps que ceux de la ligne des Acacias, occasionnant effectivement des bouchons. Et le TCS a ensuite l'outrecuidance de déposer une pétition contre la situation qu'il a lui-même provoquée ! Bel exemple de pompier pyromane ! Heureusement, le TCS a perdu depuis sa qualité pour agir en matière de recours !

Par contre, la droite a perdu la mémoire: elle a voté intelligemment les budgets pour développer les transports publics et construire de nouvelles lignes de tram. Imaginait-elle que ces travaux importants, aussi bien pour la qualité de vie à Genève que pour les entreprises de la construction et le secteur économique, n'allaient occasionner aucun désagrément ? C'est comme si on proposait à un malade du coeur... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)... une transplantation cardiaque pour améliorer sensiblement sa qualité de vie et que celui-ci ,ensuite, refuse l'hospitalisation et les désagréments liés à cette intervention. C'est une réaction caractérielle d'enfant gâté et frustré !

Les Verts souhaitent classer cette pétition, mais, dans un esprit conciliateur, nous proposons à l'Entente de se ressaisir et de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

M. Roger Deneys (S). Votre rapport sur cet objet, c'est vrai, Monsieur Reymond, est franchement lacunaire ! Vous évoquez le court débat qu'il y a eu en commission... Mais un rapport devrait précisément permettre au moins de connaître la nature du débat, quels ont été les arguments avancés et relater le pourquoi et le comment des positions des différents intervenants. C'est vraiment dommage de ne pas mieux comprendre la position des partis ! (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)C'est d'autant plus dommage que, comme vous allez peut-être le dire tout à l'heure, cette pétition a recueilli plus de 20 000 signatures... Et même si son contenu est relativement surréaliste - comme c'était le cas pour la pétition précédente - dans la mesure où l'on veut tout et son contraire, je me demande, là encore, sur quoi nous pourrions nous baser si elle était renvoyée en commission, car le texte de la pétition ne propose rien... Je suis désolé de vous le dire, mais ce n'est pas très sérieux !

Pour le groupe socialiste, cette pétition n'est ni réaliste ni réalisable, et elle exprime même un certain nombre de contre-vérités. Dans ce sens-là, on ne peut que la déposer sur le bureau du Grand Conseil. Il est principalement fait mention de la nécessité de prendre des mesures pour améliorer la fluidité de la circulation... Peut-être faut-il le rappeler: le principal ennemi de la fluidité, c'est la voiture !

Une voix. C'est l'homme !

M. Roger Deneys. C'est la voiture ! Le principal ennemi de la voiture, c'est la voiture... Et vous pouvez bien créer toutes les routes ou autoroutes que vous voulez, ouvrir toutes les douanes que vous voulez, plus il y a de voitures plus il y a de bouchons ! On le constate tous les jours. Il n'est même pas nécessaire de limiter la circulation à 30 km/h, quand il y a des bouchons on ne roule même pas à 5 km/h... Avec mon petit vélo, je vais bien plus vite que les voitures ! (Exclamations.)

Si vous voulez, Mesdames et Messieurs de l'Entente, faire appliquer cette pétition, la seule mesure envisageable serait de limiter le nombre de voitures... Alors, je ne sais pas si c'est ce que vous souhaitez, mais je suis d'ores et déjà très heureux des potentielles propositions que vous allez nous faire dans ce sens: un péage urbain, un quota limitant le nombre de voitures dans la République et canton de Genève... Ce sont des mesures très intéressantes. En tout cas, à mon avis, ce sont les seules susceptibles d'améliorer la fluidité de la circulation en ville de Genève.

Je crois toutefois que ce n'est pas ce que vous souhaitez, et je ne pense pas que ce soit réaliste, car la voiture individuelle a aussi sa raison d'être. Tout est question de proportion, tout est question de modération. Or, cette pétition n'est ni modérée ni applicable.

Je vous invite donc, au nom des socialistes, à déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. (Applaudissements.)

M. René Desbaillets (L). Je suis quelque peu offusqué des propos de notre collègue Christian Bavarel, qui propose de mettre carrément à la poubelle une pétition approuvée par 22 000 signataires. C'est quand même bien plus que les 14 000 mentionnés tout à l'heure par M. Spielmann... (Rires et exclamations.)

Je pense qu'à l'heure actuelle on est conscient de la nécessité d'augmenter l'offre des transports publics, de réaliser le CEVA... J'étais personnellement à Satigny l'un des moteurs pour la création du RER, pour qu'il soit une colonne vertébrale en direction de la Plaine, pour essayer d'abaisser le nombre de pendulaires... Mais il ne faut quand même pas exagérer ! Aujourd'hui, les professionnels qui doivent circuler dans la journée en ville de Genève pour leur travail, notamment ceux qui sont dans le commerce et doivent effectuer des livraisons - je ne parle pas de ceux qui se rendent à leur travail et en repartent - rencontrent beaucoup de difficultés de circulation. Et l'on ne peut que constater que les bouchons sont «organisés».

Au niveau des chantiers, la désorganisation prévaut et la signalisation est lacunaire. Quand vous arrivez à Vernier en direction de Genève, vous êtes déjà quasiment sur l'autoroute quand vous vous apercevez qu'elle est fermée... Il est scandaleux qu'un semi-remorque soit obligé de reculer parce qu'il s'est engagé sur une autoroute qui est fermée, alors qu'il aurait été facile, 100 mètres avant, de lui signaler d'obliquer à gauche et de prendre l'autoroute par une autre entrée ! Regardez ce qui se passe ces jours-ci au carrefour de la place des Vingt-Trois-Cantons... S'il n'y a eu aucun mort à cet endroit, c'est un miracle ! Je ne sais pas si un drone surveille depuis en haut ce qui se passe... (Rires.)Vous savez évidemment que les voitures polluent en ville de Genève, mais davantage encore dans les bouchons... Un commerçant qui effectue des livraisons toute l'année va utiliser 3000 litres de carburant en plus, en une année, pour livrer exactement au même nombre d'établissements, tout cela à cause des bouchons, sans parler du temps perdu...

Moi qui suis viticulteur, je pense qu'il faut dire oui à Stop Bouchons, car il y a un réel problème en matière de circulation. Il faut absolument améliorer la fluidité de la circulation sur certains axes à Genève.

En ce qui me concerne, je vous propose de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.

M. Ivan Slatkine (L). Je vais être très bref. Le mérite de cette pétition est de demander qu'une hiérarchisation du réseau routier soit faite... Le président Cramer nous a effectivement dit que nous avions voté ici, à la majorité, un projet de loi allant dans ce sens. Mais nous attendons toujours la concrétisation de ce projet par une carte mentionnant cette hiérarchisation. Pour le moment, nous n'avons rien vu venir...

En renvoyant cette pétition au Conseil d'Etat, nous montrerons que 22 000 personnes dans ce canton attendent avec impatience la mise en application de ce qui a été décidé dans ce parlement: la hiérarchisation du réseau routier. J'ose espérer que cette carte nous sera bientôt proposée.

M. Roger Deneys (S). Les propos de M. Desbaillets m'ont fait relativement plaisir dans la mesure où je partage ses préoccupations au sujet des déplacements professionnels, étant moi-même concerné par le sujet.

Il est vrai que si les professionnels pouvaient se déplacer de façon correcte à Genève, ce serait merveilleux. Et hiérarchiser le réseau routier ne consiste pas seulement à déterminer les grands et les petits axes, il faudrait que certaines personnes puissent bénéficier d'une sorte de priorité - ce qui n'est malheureusement pas le cas. Mais il faudrait pouvoir l'assumer au niveau politique. Si vous nous disiez que seuls les professionnels qui doivent faire des livraisons peuvent circuler en ville de Genève, je serais peut-être d'accord avec vous, mais je ne crois pas que ce soit l'objectif de cette pétition, et c'est dommage...

Je terminerai en disant qu'il est également possible d'effectuer des livraisons - peut-être pas pour des bouteilles, certes - en vélo.

M. Jean-Marc Odier (R). Je serai également très bref. Je pense que nous pourrions avoir mille fois l'occasion d'avoir la même discussion en ce qui concerne la circulation à Genève, qui se détériore de jour en jour.

J'approuve les propos de M. Slatkine: nous avons voté une loi pour hiérarchiser le réseau routier et nous attendons la carte correspondant à cette loi. Monsieur le chef du département, il faut que l'OTC travail ardemment à la création de cette carte - je crois que c'est en cours - mais, en attendant, la Ville ne devrait pas essayer de mettre en place toutes les mesures qu'elle propose pour bloquer la circulation en ville de Genève.

Je prends l'exemple de Cluse - Roseraie... Une motion a été déposée - d'ailleurs par des députés de la gauche de ce parlement - pour démontrer que les mesures mises en place dans ce secteur sont complètement inadéquates.

Alors, essayons d'organiser le transport, les déplacements, la circulation et évitons que les gens s'affrontent. Mais, s'il vous plaît, avancez dans la réalisation de cette carte et attendez pour prendre des mesures limitant la circulation en ville !

M. André Reymond (UDC), rapporteur. Il faut tout de même souligner que l'action des autorités contredit la volonté populaire... En effet, il a été décidé en votations du libre choix du mode de transport. Ce n'est évidemment pas à la commission de donner des directives au Conseil d'Etat, c'est au Conseil d'Etat, qui reçoit cette pétition, de faire des propositions et de prendre des décisions !

Tout à l'heure, j'ai oublié de citer un chiffre très important... Ce sont bien 22 000 personnes qui demandent que quelque chose se passe au niveau de la circulation, et la hiérarchisation du réseau routier a été soulignée: nous attendons cette carte dans l'espoir que ce quartier des Eaux-Vives se désengorge. Vous me direz que ce n'est pas le seul quartier, mais la pétition «Stop Bouchons» concerne particulièrement celui des Eaux-Vives.

Nous demandons donc que cette pétition soit renvoyée au Conseil d'Etat.

M. Robert Cramer, président du Conseil d'Etat. Plus de 20 000 signatures... Il va de soi que le Conseil d'Etat répondra à cette pétition, ce qui nous permettra de faire le point sur un certain nombre de travaux. En effet, si je lis les trois invites de la pétition, je vois que, depuis la date à laquelle les signatures ont été récoltées, les travaux ont bien avancé, et, même, certaines demandes des pétitionnaires sont déjà concrétisées. Je pense que nous sommes en mesure de faire les premiers bilans.

Qu'avons-nous fait ? S'agissant de la fluidité de la circulation - M. le député Odier l'a rappelé très opportunément - la loi a fixé le principe de la hiérarchie du réseau routier et, avec ardeur - comme cela a aussi été relevé - l'OTC est en train de réaliser... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)... une carte mentionnant cette hiérarchie. Cette carte fait l'objet d'une vaste consultation auprès des communes genevoises. Cette consultation étant terminée, je pense que cette carte va être finalisée ces prochaines semaines, avec nos partenaires associatifs dans le cadre du Conseil des déplacements.

Pour ce qui est de la planification des chantiers, c'est terminé. Ceux qui ont la curiosité de consulter le site Internet de l'Etat ou ceux qui lisent la «Tribune de Genève» une fois par semaine, le jour où elle traite de mobilité, peuvent découvrir les cartes sur lesquelles sont reportés tous les quartiers de la ville avec toutes les indications utiles en ce qui concerne le début et la fin des chantiers, voire les itinéraires de contournement.

Quant à la planification de l'avenir du réseau routier, vous savez aussi que la loi en fixe dorénavant le principe et que les premiers textes sur la planification du réseau routier circulent au sein des milieux intéressés. C'est donc dire que sur tous ces points, la réponse à la pétition consistera à faire le bilan des travaux dont je vous parle, et ceci, de façon un peu plus développée.

Enfin, s'agissant du libre choix des transports, vous savez que nous y sommes attachés... Ce qui me préoccupe, à vrai dire, c'est de savoir quel choix on offre aux personnes qui se déplacent à pied, qui doivent souvent attendre de longues minutes pour traverser une route à grande circulation, minutes qui sont encore plus longues lorsque c'est l'hiver ou qu'il pleut. Et puis, en matière de libre choix des moyens de transport, je pense aussi aux cyclistes qui risquent leur vie dans la circulation. Cela fait aussi partie du libre choix des moyens de transport, Mesdames et Messieurs les députés.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets d'abord la proposition majoritaire de la commission, soit le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat. Selon le résultat du vote, nous nous prononcerons quant à son dépôt sur le bureau du Grand Conseil.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des transports (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées par 47 oui contre 33 non.