République et canton de Genève

Grand Conseil

No 36/V

Jeudi 19 septembre 1996,

soir

Présidence :

M. Jean-Luc Ducret,président

La séance est ouverte à 17 h.

Assistent à la séance : MM. Guy-Olivier Segond, président du Conseil d'Etat, Jean-Philippe Maitre, Claude Haegi, Olivier Vodoz et Philippe Joye, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

Le président donne lecture de l'exhortation.

2. Personnes excusées.

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Gérard Ramseyer, Mme Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Florian Barro, Fabienne Blanc-Kühn, Marlène Dupraz, Laurette Dupuis, Henri Gougler, Geneviève Mottet-Durand, Elisabeth Reusse-Decrey, Marie-Françoise de Tassigny et Pierre-François Unger, députés.

3. Correspondance.

Le président. La correspondance suivante est parvenue à la présidence :

 Le Tribunal fédéral nous informe que M. Max Knodel a déposé un recours contre le projet de loi PL 7271 (modifiant le régime des zones de construction sur le territoire des communes de Collonge-Bellerive et Meinier - création d'une zone de développement industriel et artisanal) adopté le 27 juin.

C 481
Le Tribunal fédéral nous informe que le WWF a déposé un recours contre le projet de loi PL 7271 (modifiant le régime des zones de construction sur le territoire des communes de Collonge-Bellerive et Meinier - création d'une zone de développement industriel et artisanal) adopté le 27 juin. ( )  C481

Il en est pris acte.

Par ailleurs, la pétition suivante est parvenue à la présidence :

P 1127
Entrave à l'action pénale. ( )  P1127

Elle est renvoyée à la commission des pétitions.

4. Annonces et dépôts:

a) de projets de lois;

Le président. Le projet de loi suivant est parvenu à la présidence :

PL 7515
de MM. Bernard Clerc (AG), Christian Grobet (AG) et Jean Spielmann (AG) modifiant la loi en matière de chômage (J 4 5). ( )  PL7515

Il figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.

b) de propositions de motions;

Le président. Les propositions de motions suivantes sont parvenues à la présidence :

M 1083
de Mme et MM. Fabienne Bugnon (Ve), Andreas Saurer (Ve), Dominique Hausser (S), Laurent Moutinot (S), Jacques Boesch (AG), Christian Grobet (AG) et Pierre Vanek (AG) sur l'utilisation des locaux vides au profit d'associations sans but lucratif et pour favoriser les activités des jeunes. ( )  M1083

Elle figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.

M 1084
de Mmes et MM. Fabienne Blanc-Kühn (S), Nicole Castioni-Jaquet (S), Liliane Charrière Urben (S), Micheline Calmy-Rey (S), Sylvie Châtelain (S), Pierre-Alain Champod (S), Jean-François Courvoisier (S), Alexandra Gobet (S), Mireille Gossauer-Zurcher (S), Dominique Hausser (S), René Longet (S), Laurent Moutinot (S), Elisabeth Reusse-Decrey (S), Christine Sayegh (S) et Claire Torracinta-Pache (S) concernant la réforme du statut de la fonction publique. ( )  M1084

M. Laurent Moutinot(S). Cette motion s'inscrit dans la problématique du projet de loi de modification du statut de la fonction publique, point 106 de notre ordre du jour. Je vous demande, par conséquent, de bien vouloir la traiter conjointement, si nous arrivons à ce point de l'ordre du jour !

Mise aux voix, cette proposition est adoptée. 

c) de propositions de résolutions;

Le président. La proposition de résolution suivante est parvenue à la présidence :

R 319
de Mmes et MM. Claire Torracinta-Pache (S), Claude Howald (L), Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve), Michèle Wavre (R), Jacques Boesch (AG) et Pierre-François Unger (DC) concernant le respect de la laïcité de l'école genevoise. ( )  R319

Mme Claire Torracinta-Pache(S). Cette résolution est déposée par des représentants de toutes les formations politiques, et nous souhaiterions, vu le caractère d'urgence de l'affaire, qu'elle puisse être discutée ce soir encore, à la fin des points concernant le département de l'instruction publique.

Mise aux voix, cette proposition est adoptée.

 

d) de demandes d'interpellations;

Néant.

e) de questions écrites.

Néant.

M 1082
5. Proposition de motion de MM. Christian Grobet et Jean Spielmann sur l'adjudication des travaux de la ligne de tram 16. ( )M1082

LE GRAND CONSEIL,

Vu les très graves difficultés rencontrées par les entreprises genevoises dans le secteur de la construction;

Vu la volonté exprimée par le Conseil d'Etat que les crédits d'investissement de l'Etat, bien qu'en baisse par rapport aux années précédentes, servent à favoriser la relance dans le domaine de la construction;

Vu les déclarations du Conseil d'Etat à l'occasion de la votation sur la traversée de la rade selon lesquelles ce projet aurait permis de garantir de nombreux emplois dans notre canton, ce qui avait été mis en doute en raison de la nature particulière et de l'ampleur des travaux en cause avec le risque de voir une grande entreprise étrangère en bénéficier;

Vu l'intérêt qu'il y a, en conséquence, que l'Etat engage des travaux à la mesure des capacités des entreprises genevoises pour que les crédits - déjà insuffisants dont il dispose - bénéficient réellement à l'emploi dans notre canton, durement frappé par le chômage;

Vu la nature des travaux portant sur l'extension du réseau des transports publics qui répondent précisément à ce critère, ce d'autant plus en raison de l'expérience acquise par les entreprises genevoises avec la prolongation de la ligne de tram 12 de Carouge au Bachet de Pesay et le premier tronçon de la ligne 13 reliant le Rond Point de Plainpalais à Cornavin;

Vu les risques, en raison de la crise dans le secteur du bâtiment, de sous-enchère lors de la mise en soumission de travaux d'une certaine importance et d'offres faites par des entreprises en dessous des prix de revient pour arracher le marché, compte tenu des charges des entreprises locales résultant des conventions collectives de travail;

Attendu que le règlement L 6 2 concernant la mise en soumission et l'adjudication des travaux publics par l'Etat de Genève prévoit que les entreprises genevoises ou de l'extérieur, qui n'ont pas adhéré à une convention collective de travail et qui veulent soumissionner pour des travaux de l'Etat, doivent joindre à leur offre un engagement de respecter les conventions collectives et usages de la profession applicables à Genève, dès la date (au moins) à laquelle l'engagement a été signé;

Attendu qu'il s'avère que les travaux de la ligne de tram 16 ont été adjugés pour une part importante à une entreprise hors du canton privant ainsi les entreprises genevoises d'un important volume de travaux, ce qui est incompréhensible vu leurs besoins, les possibilités de trouver une solution concurrentielle de la part de ces entreprises et les intentions exprimées par le Conseil d'Etat quant à l'affectation des crédits d'investissement de l'Etat;

Vu les conséquences particulièrement graves de la décision du Conseil d'Etat pour les entreprises genevoises de la branche avec la mise probable de personnel au chômage, ce que les syndicats n'ont pas manqué de dénoncer dans le cadre d'une prise de position publique,

invite le Conseil d'Etat

à lui présenter un rapport sur l'adjudication de travaux de la ligne de tram 16 à une entreprise extérieure au canton et de lui indiquer notamment:

1) si la commission consultative instituée par le règlement L 6 2 et dans laquelle siège des représentants des partenaires sociaux a été convoquée pour évoquer cette importante soumission et les conséquences pour l'industrie du bâtiment en cas d'adjudication des travaux à des entreprises hors du canton;

2) si une analyse des coûts des soumissionnaires a été faite et si le Conseil d'Etat s'est assuré que l'offre la plus favorable permettait effectivement de couvrir les coûts des travaux et qu'il ne s'agissait pas d'une offre de dumping;

3) si l'entreprise vaudoise bénéficiaire de la soumission offre, pendant toute l'année, et au moins depuis la signature de l'engagement de respecter les conventions collectives genevoises, des conditions de travail équivalentes à celles des entreprises genevoises soumises aux conventions collectives de travail applicables à Genève, afin que les entreprises genevoises et les entreprises extérieures soient mises sur un véritable pied d'égalité;

4) si les entreprises bénéficiaires des travaux disposent réellement des effectifs engagés à l'année suffisants pour un chantier de cette taille sans engager de la main d'oeuvre supplémentaire de caractère temporaire et sans recourir à des heures supplémentaires;

5) s'il est exact que les entreprises adjudicataires ont adressé une demande d'effectuer des travaux hors des horaires normaux, notamment pour des travaux de nuit du fait qu'elles ne seraient pas en mesure de tenir le plan des travaux, ce qui serait le signe qu'elles ne disposent pas des effectifs nécessaires pour ce chantier;

6) s'il est exact qu'une entreprise genevoise qui devait être associée aux entreprises adjudicataires a été écartée par ses partenaires d'une manière pour le moins insolite;

7) si les entreprises adjudicataires étaient à jour, comme le prescrit le règlement L 6 2 , avec le paiement de leurs charges sociales au moment de l'adjudication des travaux;

8) si les entreprises adjudicataires ont l'expérience nécessaire pour accomplir les travaux en cause;

9) si une solution concurrentielle n'aurait pas pu être trouvée avec les entreprises genevoises et les motifs pour lesquels elles auraient été écartées;

10) si les entreprises genevoises non retenues devront mettre du personnel au chômage.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le Conseil d'Etat s'est fait élire en promettant un emploi pour chacun. Plus le temps avance, plus il ressort qu'il est incapable de poursuivre une politique répondant à cet objectif. A vrai dire, l'action du Conseil d'Etat se caractérise par une absence de politique en matière d'emploi avec les très graves conséquences qui en résultent pour l'économie locale. Les multiples propositions faites dans ce domaine par les syndicats et les partis de gauche sont écartées d'un revers de main, mais rien de concret n'est mis en place en contrepartie. Le Conseil d'Etat continue à faire miroiter le bénéfice que les entreprises genevoises vont retirer de certains grands chantiers alors que des travaux d'un important chantier, celui de la ligne de tram 16, sont confiés à une entreprise extérieure au canton !

Cette décision est particulièrement grave pour l'économie locale et met en évidence les risques que présente le projet de concordat intercantonal en matière d'adjudication des travaux publics dont le Conseil d'Etat a saisi le Grand Conseil avec la proposition d'abroger la loi cantonale sur les soumissions et adjudications publiques des travaux de l'Etat, en application de laquelle le règlement L 6 2 sur la mise en soumission et l'adjudication des travaux publics a été édictée sur la base d'un texte élaboré en collaboration étroite avec les partenaires sociaux. Nous considérons non seulement que la concurrence exacerbée à laquelle l'économie est de plus en plus soumise en raison de la politique de déréglementation en cours est totalement suicidaire, mais encore que l'Etat doit lutter contre la sous-enchère pour arracher des commandes en dessous du prix de revient et les pratiques relevant finalement de la concurrence déloyale. C'est la raison pour laquelle, il est non seulement indispensable, contrairement à ce que propose le Conseil d'Etat, de maintenir la réglementation genevoise en matière d'adjudication des travaux publics et de la renforcer comme nous le proposons dans le projet de loi 7416 dont nous avons saisi le Grand Conseil le 13 février 1996, mais encore est-il essentiel d'appliquer cette réglementation. C'est la raison pour laquelle la présente motion demande un rapport circonstancié de la part du Conseil d'Etat sur l'adjudication des travaux de la ligne de tram 16 et la manière dont celle-ci a été faite.

Nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que cette motion recevra bon accueil de votre part.

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission des travaux.

M 1027-A
6. Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier la proposition de motion de Mme et MM. Sylvie Châtelain, René Koechlin et Chaïm Nissim concernant les compensations de zone agricole. ( -)  M1027Rapport de M. Daniel Ducommun (R), commission d'aménagement du canton
Mémorial 1995 : Développée, 6189. Commission, 6190.
Rapport de M. Hervé Dessimoz (R), commission d'aménagement du canton

Le Grand Conseil a décidé de confier à la commission d'aménagement l'étude de la motion de Mme Sylvie Châtelain et de MM. René Koechlin et Chaïm Nissim concernant les compensations de zone agricole.

La commission a traité le sujet au cours de ses séances des 13 et 20 décembre 1995, puis 17 et 31 janvier 1996, sous la présidence de M. Florian Barro.

Assistaient aux séances: M. Philippe Joye, chef du DTPE, M. G. Gainon, chef de la division des plans d'affectation, M. J.-Ch. Pauli, juriste, Mme Lin, cheffe du service du plan directeur, M. B. Trottet, adjoint.

1. Préambule

Les motionnaires ont saisi l'occasion du débat politique qui s'est développé lors du déclassement des terrains dits «Reuters», à Vésenaz, pour demander une réflexion sur les compensations de zone agricole.

Tout en acceptant le déclassement des terrains précités, le Grand Conseil avait demandé des compensations sous diverses formes, notamment des compensations agro-environnementales ou sous forme de surfaces reclassées en zone inconstructible.

Désireux d'offrir aux autorités, au Grand Conseil notamment, un instrument pour décider ces mesures compensatoires, les motionnaires souhaitent inviter le Conseil d'Etat:

- à dresser l'inventaire des terrains sis en zone à bâtir non encore construits, qui ne se prêtent manifestement pas à la construction et qui pourraient par conséquent faire l'objet de tels échanges;

- établir la liste des lieux ou secteurs où des mesures possibles d'amélioration ou de réhabilitation agro-environnementale peuvent être prises.

2. Les premiers débats et les auditions

Tout d'abord les représentants du DTPE indiquent que depuis 1972, toutes sortes de mesures législatives, réglementaires et décisions ponctuelles ont été adoptées. Ces mesures sont relatées dans un rapport du Conseil d'Etat (RCE 15).

Citons quelques-unes de ces mesures:

- modifications légales qui provoquent des compensations (le long des cours d'eau, par exemple);

- compensations dans les plans de quartier (espaces verts);

- remise en zone agricole de 43 430 m2 à Bellevue en compensation du déclassement Reuters;

- les rives de l'Arve, mise en territoire protégé de l'ensemble du périmètre, avec des secteurs mis en zone de verdure alors qu'ils étaient en zone villas.

De surcroît, les représentants du DTPE annoncent qu'une étude est en cours sur tout ce qui se fait en espace rural.

Si les postulats de la motion sont plutôt bien accueillis par les commissaires, les motivations politiques, les moyens proposés sont diversement appréciés. Citons quelques morceaux choisis des débats:

«... des lieux avec peu de maisons et beaucoup d'arbres, c'est préférable à des constructions; c'est une compensation réelle...»

«... si l'on veut être constructif, il faut aussi prévoir un fonds de compensation, car on devra faire des échanges avec des parcelles privées...»

«... personne ne veut faire mourir la ville! Mais il y a des gens qui s'intéressent un peu plus à la qualité de la vie que d'autres!...»

«... dans les communes, les cas de déclassement de zone villas en zone agricole sont bien connus ainsi que les contraintes en découlant. A Genthod, par exemple, en 1982, 15 hectares de terrains en zone villas ont été déclassés en zone agricole par la seule volonté des propriétaires concernés...»

2.1 Le plan directeur cantonal

Le nouveau plan directeur cantonal, actuellement à l'étude, serait-il susceptible de gommer les divergences, in fine de répondre aux préoccupations des motionnaires?

Les représentants du DTPE semblent pouvoir l'affirmer à l'appui des plans provisoires présentés ou encore de la méthode d'approche mise en oeuvre.

M. Joye, président du DTPE, confirme que les plans sont provisoires et que le Conseil d'Etat proposera un plan définitif des compensations agro-environnementales dans le cadre du plan directeur. Il conclut en souhaitant que la motion soit renvoyée au Conseil d'Etat, afin que ce dernier puisse intégrer les invites à l'étude en cours et élaborer des plans plus détaillés.

Enfin, il est précisé que:

- le concept, soit les principes politiques seront adressés au Grand Conseil dans le premier semestre 1996;

- un document plus technique sera rédigé pour la fin de l'année 1996.

2.2 Audition de M. Charles Bosson, président de la Chambre genevoise d'agriculture

M. .

- cette motion n'apportera rien de satisfaisant à l'agriculture;

- les mesures agro-environnementales seront faites presque au détriment de l'agriculture et sont surtout écologiques. Les terres doivent être cultivées pour la revitalisation de l'agriculture. La création des espaces vierges se fait au détriment de la zone agricole;

- à l'avenir, il faudra parler «d'agricole ou d'environnement» sans lier les deux notions;

- il n'est pas possible de traiter de l'environnement et de la protection de l'agriculture en même temps. Il s'agit de discuter ensemble pour voir où et comment on doit agir. C'est l'agriculture qui s'est approchée des milieux de protection de la nature pour instaurer un dialogue;

- la Chambre genevoise d'agriculture n'est pas favorable à cette motion et espère que d'autres solutions pourront être trouvées, au coup par coup, pour la gestion de notre territoire.

2.3 Audition de l'AGPN et du WWF, Mme C. Meissmer et MM. von Arx et Dunant pour l'AGPN, M. W. Wetterli pour le WWF

Les commentaires et observations suivants sont formulés:

- il est rappelé l'importance de l'agriculture et de la nature du canton de Genève;

- la surface des éléments naturels par rapport aux surfaces agricoles doit être appréhendée. L'AGPN s'occupe de la connexion de ces milieux entre eux et il est utile de revitaliser les réseaux de biotopes;

- il faut aussi dresser l'inventaire des surfaces agricoles utilisées. Le plan du réseau de biotopes demandé dans une motion déposée à fin 1994 doit être établi;

- le WWF et l'AGPN appuient cette motion mais le WWF précise rester attaché au principe que la zone agricole doit rester productive et un lieu d'épanouissement et de production des écosystèmes, ajoutant que les déclassements doivent rester exceptionnels.

3. La poursuite des débats

C'est donc un contexte pour le moins riche d'ambitions et de motivations contradictoires qui anime les protagonistes du débat.

Si certains commissaires pensent que le nouveau plan directeur cantonal donnera satisfaction aux motionnaires, d'autres pensent qu'il faut justement utiliser la période de «latence» jusqu'à la mise au point du plan directeur pour que soient précisées par la commission les exigences sur ce sujet.

Plusieurs pistes sont alors proposées pour que la motion puisse couvrir le délai jusqu'à l'adoption du nouveau plan directeur cantonal, pour mieux préciser le statut des hameaux dans ce contexte, pour préciser le rôle des communes, ou encore pour financer les compensations notamment lorsqu'elles mettent en scène le particulier et l'Etat. Ces pistes semblent trop sinueuses ou trop longues. Elles sont abandonnées, pour le moment pour le moins.

4. Conclusions

Malgré la conjoncture controversée de ce projet, une majorité se dessine en faveur des postulats de la motion.

Il est alors décidé d'amender cette motion, afin de trouver un accord négocié.

Ainsi une majorité de la commission (8 oui, 4 non, 3 abstentions) approuve les modifications suivantes:

- l'invite no 2, nouvelle teneur, dirait ce qui suit:

 «à établir la liste des secteurs et des mesures de compensation (nature-agriculture)»;

- l'alinéa 3 de l'exposé des motifs «Cet outil de travail sera notamment utilisé par le Grand Conseil et sa commission d'aménagement chaque fois qu'un projet de loi de déclassement, principalement de la zone agricole, sera soumis à son approbation» serait supprimé.

Pour une meilleure compréhension de ces deux décisions, disons:

- que l'invite no 2 proposée par les motionnaires demande un travail considérable aux services concernés du DTPE. Au-delà des moyens à mettre en oeuvre, l'éventail très large de situations à prendre en considération pourrait conduire à l'arbitraire ou encore à la présentation d'une liste incomplète des lieux à considérer.

La version acceptée par la majorité de la commission est moins ambitieuse, mais certainement plus réaliste:

- que la suppression de l'alinéa 3 a pour but de clarifier le débat. Le principe des compensations doit être appliqué lors des déclassements de terrains sis en zone agricole, et pas, a priori, lors des autres formes de déclassement.

Décidée à doter le Grand Conseil d'un outil de travail pour traiter les compensations lors des déclassements de terrains sis en zone agricole, la majorité de la commission vous recommande, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer au Conseil d'Etat la motion 1072 amendée comme ci-dessus.

Débat

Mme Martine Roset (PDC). En commission le PDC a refusé de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat. En voici les raisons :

Le nouveau plan directeur cantonal, actuellement à l'étude, incorpore cette donnée de compensation. Pourquoi ne pas attendre que ce plan directeur nous soit présenté, afin de mieux visualiser tous les paramètres d'aménagement ?

Faire l'inventaire des terrains sis en zone à bâtir non encore construits pour d'éventuels échanges, c'est bien; mais de l'inventaire à la concrétisation d'échange, il y a un paramètre financier qui est loin d'être résolu ! Qui va supporter les moins-values ? L'Etat, les communes, les particuliers ? Je vous rappelle que l'IN 21 se trouve toujours en commission.

Concernant les mesures de compensation, on s'aperçoit, suite aux auditions, que le mot compensation n'a pas la même définition pour tout le monde. Pour certains c'est remplacer de la zone agricole par de la zone agricole; pour d'autres c'est remplacer de la zone agricole par une zone de réseaux de biotopes ! Ne vaudrait-il pas d'abord se mettre d'accord sur le principe avant d'en établir la liste ?

Les zones à bâtir actuellement non construites pourraient-elles se prêter à de telles mesures ? Quels seront les critères de choix ?

L'outil de travail demandé par cette motion a un but louable, mais c'est demander l'inventaire d'un paramètre d'aménagement sans tenir compte de tous les autres qui lui sont étroitement liés.

Pour toutes ces raisons, le PDC vous demande de renvoyer cette motion en commission de l'aménagement, afin de la lier aux travaux sur le plan directeur cantonal.

Le président. Vous avez la parole, Monsieur Nissim !

M. Chaïm Nissim (Ve). J'aurais très bien pu parler après M. Joye ! (Rires.) Aucun article de notre règlement ne stipule que c'est au conseiller d'Etat de parler en dernier !

Le président. Ne faites pas attention, c'est un nouveau !

M. Chaïm Nissim. Nous sommes favorables au renvoi de cette motion au Conseil d'Etat. En effet, nous avons consacré de nombreuses séances à ce sujet, et il est vrai que toutes les questions posées par Martine Roset n'ont pas de réponse, car il n'est pas possible de répondre à toutes les questions à l'avance.

Nous demandons simplement de faire un inventaire des éventuelles zones pouvant être réservées à des compensations, puis le département s'occupera de gérer cet inventaire en essayant, cas par cas, de répondre aux questions que vous vous posez, financières, qualitatives ou quantitatives. Cet outil de toute façon n'empêche en rien l'élaboration d'un futur plan directeur. Au contraire, ce plan directeur pourra s'appuyer sur cet outil.

M. René Koechlin (L). Je retiens bien les propos de Mme Roset, mais vouloir noyer un outil - que nous voudrions aussi pratique que possible, notamment pour les travaux de la commission d'aménagement de ce parlement et, par elle, les travaux du parlement lui-même - dans le plan directeur cantonal, c'est le rendre totalement inefficient.

C'est la raison pour laquelle nous vous engageons à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat, pour qu'il se mette tout de suite au travail. Que cela se fasse dans le cadre plus général des mesures du plan directeur à retenir par le parlement, pourquoi pas ? Mais la mise sur pied d'un tel outil prend du temps, car cela exige des recherches fouillées, et nous pensons qu'il n'est pas trop tôt de s'atteler à cette tâche immédiatement.

Nous vous demandons donc de bien vouloir renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.

M. Daniel Ducommun (R), rapporteur ad interim. Je partage les propos tenus par M. Koechlin.

Je m'étonne du rapport de minorité oral de Mme Roset développé ce soir, qui est en contradiction avec le résultat des travaux de la commission d'aménagement du canton. La majorité de la commission d'aménagement était très évidente dans sa décision de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat et aucun fait nouveau n'est apparu depuis.

Le rapporteur ne peut donc que respecter cette volonté devant vous !

M. Christian Ferrazino (AdG). Si je peux comprendre la motivation des motionnaires, qui souhaitent obtenir des garanties - comme M. Koechlin l'a rappelé tout à l'heure - en matière de compensations, je considère toutefois que la démarche qui nous est proposée est quelque peu dangereuse, car elle pourrait encore inciter, si cela est possible, le département des travaux publics et de l'énergie à procéder à de nouveaux déclassements. Vous me direz qu'il est peut-être difficile de respecter encore moins la zone agricole que ça n'est le cas actuellement ! En effet, les récentes autorisations délivrées par le département pour permettre des exploitations industrielles en zone agricole - décisions annulées par les tribunaux - le démontrent, ainsi que les projets de lois que nous avons traités à la séance de la semaine dernière proposant de nouveaux déclassements agricoles.

Comme Mme Roset l'a rappelé tout à l'heure, le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat comporte un certain danger si, dans cette motion elle-même, n'est pas réaffirmé le principe fondamental suivant qui figure dans le plan directeur actuel : il ne devrait pas y avoir de déclassement de terres agricoles tant et aussi longtemps que des terrains situés en zone à bâtir n'ont pas été utilisés.

Alors voyez-vous, Monsieur Nissim - je l'ai déjà exprimé en commission - dire dans l'invite qu'à l'avenir, je cite : «...de telles compensations seront demandées de plus en plus souvent...» me paraît incroyable. D'abord on peut s'interroger pourquoi ces compensations ne seraient pas demandées systématiquement, et cela laisse penser que des déclassements en zone agricole sont prévus dans l'avenir. Ce faisant, vous ne réaffirmez justement pas le principe figurant dans l'actuel plan directeur déjà mentionné.

Pour l'ensemble de ces raisons, nous considérons que la proposition de Mme Roset se justifie. Si tel n'était pas le cas, le Grand Conseil renverrait finalement cette motion au Conseil d'Etat sans avoir absolument aucune garantie sur l'application actuelle du plan directeur qui, je l'ai rappelé tout à l'heure, est respecté avec quelque difficulté, dans sa lettre et dans son esprit, par M. Joye ! Ce soir, il sourit; pourtant certaines de ses décisions sont annulées par les autorités judiciaires et les déclassements qu'il propose sont parfois refusés par le Grand Conseil. Notre débat de ce soir reflète précisément l'ambiguïté soulevée par cette motion. Elle peut effectivement être renvoyée au Conseil d'Etat, mais il ne me semble pas judicieux de le faire dans la mesure où cette motion comporte une ambiguïté sur une question très fondamentale.

Mon groupe soutiendra donc le renvoi de cette motion en commission, comme proposé par Mme Roset.

M. Chaïm Nissim (Ve). Nous sommes une fois de plus pris en tenaille entre deux groupes assez puissants pour faire échouer cette motion. M. Ferrazino vous a expliqué, comme il l'avait déjà fait en commission, qu'il refuse cette motion, car il est contre tout déclassement futur. Mme Roset accepte les déclassements, mais sans compensations. Entre l'extrême gauche et une partie du centre qui ne sont pas du même avis, sans parler du nombre des absents de ce soir qui ne reflétera pas les proportions de la commission, cette motion risquera bien d'être renvoyée aux calendes grecques, ce qui serait tout à fait dommage.

En effet, et je le répète pour ceux qui ne font pas partie de la commission, nous ne refusons pas les déclassements; nous ne voulons pas non plus des compensations systématiques à tout déclassement, comme le craint Mme Roset; pas plus d'ailleurs que nous refusons ces dernières systématiquement. Nous souhaitons simplement - mon excellent collègue Koechlin l'a exprimé tout à l'heure - qu'un inventaire des terrains se prêtant à d'éventuelles compensations soit établi. Nous ne demandons rien d'autre, puisque nos travaux se sont arrêtés à ce stade. Un tel inventaire nous permettrait de proposer, cas échéant, des compensations comme cela a été le cas pour Reuters.

M. René Koechlin (L). Je souligne le caractère extrêmement simpliste de la vision de M. Ferrazino en matière d'aménagement du territoire !

Pour lui, l'aménagement du territoire consiste à construire dans les zones constructibles tant et aussi longtemps qu'il restera quelques mètres carrés utilisables, sans procéder à aucun déclassement de terrain sis en zone agricole. Votre conception est bien rigide et irréaliste, Monsieur Ferrazino : ce sont les «yakatistes» de votre genre qui considèrent ainsi l'aménagement du territoire. Pourtant, vous le savez fort bien, la demande d'implantation de personnes ou d'activités ne correspond pas forcément aux terrains disponibles en zone constructible. C'est donc une question de réalisme face à la demande et aux besoins réels de la population.

Evidemment, si on fait abstraction de ces besoins on peut aménager le territoire comme vous le préconisez, Monsieur Ferrazino, mais - nous le savons - cela implique un blocage de plus en plus considérable et malfaisant. Cela va exactement à l'encontre des intérêts de notre canton et de la collectivité. Je vous demande donc, Mesdames et Messieurs les députés, d'appréhender les problèmes liés aux zones et aux déclassements avec réalisme et souplesse.

C'est précisément pour se donner les instruments nous permettant de prendre des décisions à l'avenir de façon plus adaptée à la réalité que nous demandons le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. L'idée de base de la motion est intéressante, mais elle soulève tout de même deux problèmes.

Tout d'abord, nous avons indiqué que nous fournirions cet outil de travail, à savoir la liste des terrains disponibles. Cette liste est en cours d'élaboration, et je me suis engagé à ne pas présenter de déclassement de la zone agricole en dehors de la liste précédemment établie lors de l'affaire Reuters.

Mais qui doit faire les propositions de compensation ? A notre avis, cette tâche relève de l'exécutif et non pas de la commission. Lorsque ces propositions sont faites par le Conseil d'Etat, elles sont transmises à la commission via le Grand Conseil. Au dernier paragraphe de la page 5, il est dit : «Décidée à doter le Grand Conseil d'un outil de travail pour traiter les compensations lors des déclassements de terrains sis en zone agricole...». Cette phrase pourrait en effet laisser penser que c'est la commission d'aménagement qui doit procéder à ces répartitions, ce qui n'est vraiment pas possible. L'exécutif doit garder ses prérogatives et la commission les siennes.

Faut-il, comme l'a dit Mme Roset, exclure toute compensation ou, au contraire, en admettre : cela est bien difficile à dire. Il faut considérer que les compensations ne sont pas exclusivement quantitatives mais aussi qualitatives. Si on ne tient pas compte de ce facteur on bloque tout l'aménagement du territoire, car dans la réalité aucune zone n'est figée qu'elle soit industrielle, constructible ou autre. C'est dans cet esprit que j'aurais aimé que la commission reprenne son travail pour clarifier ses opinions, parce qu'elles ressortent de façon très peu limpide de la motion.

M. Chaïm Nissim (Ve). C'est tout à fait dans cet esprit, Monsieur Joye, que la commission a travaillé ! C'est notamment pour cette raison que nous avons supprimé, comme M. Dessimoz l'évoque dans son rapport, l'alinéa 3 de l'exposé des motifs, avant-dernier paragraphe de la page 5, précisément parce qu'il pouvait laisser penser que la gestion de cet outil reviendrait à la commission de l'aménagement. Nous avons parfaitement accepté en commission, à l'exception de M. Koechlin, que cette tâche revienne au département.

Il est donc inutile de renvoyer cette motion en commission.

M. Pierre Meyll (AdG). Il serait souhaitable de tenir compte des circonstances dans lesquelles la commission est informée en matière d'aménagement du territoire. Je pense notamment au déclassement de Compois. Je me suis abstenu dans certains cas et j'ai refusé la réponse du Grand Conseil au Tribunal fédéral, s'agissant de l'effet suspensif.

En fait des éléments nouveaux sont intervenus, que j'avais signalés en commission d'aménagement. Je considère qu'en matière d'aménagement du territoire toutes les cartes doivent être sur la table, ce qui n'a pas été le cas de Compois. En effet, une pression peu admissible a été exercée par Orbisphère qui menaçait tout simplement de quitter le canton. Mais Orbisphère a toujours caché - en tout cas je ne l'ai jamais su - qu'elle possédait un terrain de 36 000 m2 à Cologny, tout en prétendant qu'elle n'en avait pas à proximité pour s'installer. Ce terrain est en vente pour le Forum international de Davos - je ne connais pas le titre exact - organisation non gouvernementale qui va s'y installer. En effet, un bâtiment va être construit sur une surface d'environ 2 000 m2, mais je trouve assez déplaisant de ne pas avoir été mis au courant de ce fait.

Cela prouve, si besoin était, qu'Orbisphère avait la possibilité de s'installer sur un terrain, même si celui-ci revient plus cher que le droit de superficie de celui de Collonge-Bellerive. Je ne sais pas si les centimes additionnels et les taxes professionnelles sont plus élevés à Cologny qu'à Collonge-Bellerive, mais je trouve absolument inadmissible qu'on se permette de nous «promener» de cette façon. Nous l'avons déjà été dans l'affaire Reuters, et voilà que ça recommence ! Il faut que cela cesse. Je le répète, en matière d'aménagement toutes les cartes doivent être sur la table et les affaires ne doivent pas être traitées avec autant de laxisme que dans l'affaire de Compois.

C'est pourquoi nous serons particulièrement attentifs à tout déclassement de territoire.

M. Hervé Dessimoz (R), rapporteur. Je vous prie d'excuser mon retard; certains jours les choses vont plus vite, et le rapporteur n'est pas là pour défendre son rapport !

M. Daniel Ducommun, rapporteur ad interim. Je l'ai bien défendu !

M. Hervé Dessimoz, rapporteur. Merci !

Effectivement, ce rapport n'est pas un rapport de majorité, mais un rapport de commission. Je suis donc très étonné qu'une majorité plutôt confortable de l'ensemble des partis soit contestée sans qu'un rapport, soit-il de minorité, n'ait été annoncé.

Comme l'a dit M. Nissim et peut-être d'autres intervenants, la motion a été fortement amendée à la demande des représentants du département des travaux publics, puisque, à leurs dires, l'invite N° 2 était très lourde à gérer, et que, parallèlement, à la demande de l'un des commissaires, l'alinéa 3 de l'exposé des motifs a été supprimé, indiquant que le principe des compensations doit être appliqué uniquement dans les déclassements de zone agricole à zone à bâtir et non pas dans les autres cas.

En conclusion, le président du département des travaux publics, qui assistait à la séance du 20 décembre, a exprimé son accord avec cette motion à condition qu'elle soit à nouveau rédigée. C'est le sens du travail effectué par les commissaires. C'est la raison pour laquelle je comprends mal pourquoi on renverrait cette motion en commission, alors que le président nous avait dit - c'est ma mémoire qui parle - être prêt à recevoir cette motion pour y intégrer son invite dans le cadre des réflexions du plan directeur.

Je défends donc la position de la commission, comme cela figure dans le rapport.

M. Olivier Vaucher (L). Cher ami Meyll, je souhaiterais que vous vous assuriez de la source de vos affirmations, avant de les exprimer en public.

Je suis particulièrement bien placé pour parler d'Orbisphère, puisque je connais ce dossier depuis trente ans. La parcelle de Cologny dont M. Meyll fait état n'appartient absolument pas à Orbisphère, mais à une fondation dont le fondateur est décédé, qui, lui, était à l'époque propriétaire des terrains sur lesquels Orbisphère exerçait autrefois son activité. Mais depuis la mort dudit fondateur, M. Wright, la fondation, elle, est propriétaire des terrains et son siège se trouve aux Etats-Unis. Orbisphère est totalement en dehors de cette fondation; elle ne peut donc pas jouir de ces terrains.

Pour la gouverne de M. Meyll, cette information est de source sûre; il ne faut donc pas tout mélanger !

M. Pierre Meyll (AdG). Si j'en crois la «Feuille d'avis officielle» du 16 août 1996, en page 15, je lis : «Autorisations préalables : 17 138 - Excusez-moi pour l'accent, mais je n'ai pas eu le temps d'aller à Oxford ! - World Economic Forum est le requérant, M. Bugnat, architecte, est le mandataire; nature de l'ouvrage : World Economic Forum; Bâtiment administratifs, garage souterrain, parking; Dérogation, zone de construction, art. LaLAT 26, zone de construction 5; Cologny 91-93, route de la Capite; Propriétaire de la parcelle : Orbisphere Corporation Wilmington».

J'aimerais donc bien savoir, Monsieur Vaucher, comment vous arrivez, sur la base de telles informations, à affirmer que ces terrains ne sont pas la propriété d'Orbisphère ! Je tiens à votre disposition tous les documents, maquettes, etc., que j'ai consultés, et je ne crois pas me tromper, à moins qu'il ait eu une confusion absolue. Il aurait peut-être été bon de vous renseigner !

M. Christian Grobet (AdG). Monsieur Koechlin, comme d'habitude, vous avez parodié notre position; elle est pourtant très simple.

Il n'est pas question, comme vous l'avez laissé entendre, d'attendre qu'il n'y ait quasiment plus de terrains constructibles, à Versoix ou à Chancy, pour déclasser un terrain agricole. Nous avons la volonté, et nous croyons que tel est le désir de la population, de préserver la campagne genevoise. Pour cela il faut éviter de déclasser des terrains sis en zone agricole au coup par coup, souvent pour des raisons purement économiques. Cela a été le cas pour Reuters qui a très bien su exercer son chantage, puisqu'il a marché.

D'autres projets de déclassement, comme celui de la route de Compois qui vient d'être évoqué, ne répondent pas à des besoins réels ou qui sont pour le moins surdimensionnés par rapport à ces besoins. Quant à la liste de terrains qui pourraient encore être déclassés, avant une éventuelle modification du plan directeur établie par le Conseil d'Etat, je ne me souviens pas d'y avoir vu, par exemple, le terrain de la Gambade à Laconnex ni le projet de déclassement à Avusy. Peut-être ai-je mal examiné cette liste... Mais toujours est-il qu'il reste aujourd'hui des réserves considérables de terrains à l'intérieur des zones à bâtir existantes, qui peuvent être utilisées avant d'engager des procédures de déclassement qui sont, comme on a pu le constater dans les cas soumis ces deux dernières années, uniquement dictées par les intérêts économiques de certaines personnes.

M. Meyll a tout de même mis le doigt sur une question réelle au sujet de laquelle il serait intéressant d'obtenir des éclaircissements. Monsieur Vaucher, en consultant le «Savoir» j'ai pu constater qu'il y avait deux sociétés Orbisphère inscrites au registre du commerce. La société Orbisphere Corporation Wilmington, même si elle a un siège aux Etats-Unis, en a un à Genève, vu qu'elle est inscrite au registre du commerce. (M. Vaucher interrompt l'orateur.) Mais, Monsieur, je ne vous ai pas interrompu; je vous ai même écouté avec beaucoup d'intérêt ! Je disais donc qu'il y a deux sociétés Orbisphère. Vous avez indiqué que l'une avait son siège aux Etats-Unis, mais, je le répète, elle est inscrite au registre du commerce de Genève. Il y a donc bien une société suisse intitulée Orbisphere Corporation Wilmington.

L'autre société se nomme Orbisphère Laboratoire SA, dont l'administrateur unique siège également dans le conseil d'administration d'Orbisphere Corporation Wilmington... (M. Vaucher acquiesce de la tête.) Vous voyez, vous semblez tout à fait au courant ! C'est tout de même curieux que vous fassiez la leçon à M. Meyll, avec arrogance comme d'habitude. Vous auriez pu donner quelques renseignements complémentaires, puisque vous êtes si bien renseigné !

L'administrateur unique d'Orbisphère Laboratoire SA siège donc également dans le conseil d'administration d'Orbisphere Corporation Wilmington. J'en déduis, par conséquent, que des liens existent entre ces deux sociétés et que ce fait n'est pas dû à un concours de circonstances ou le fruit du hasard, pas plus d'ailleurs que la similitude du nom.

Orbisphere Corporation Wilmington est propriétaire d'une importante parcelle sur le coteau de Cologny où, du reste, Orbisphere avait ses activités précédemment. Maintenant, devant une telle situation, le Conseil d'Etat doit donner des informations très précises sur les liens réels entre les deux sociétés, s'agissant notamment de l'administrateur unique... (M. Vaucher interrompt à nouveau l'orateur.)

Le président. Monsieur Vaucher, s'il vous plaît !

M. Christian Grobet. La façon dont vous intervenez, Monsieur Vaucher, m'incite à croire que l'affaire vaut la peine d'être examinée de plus près ! En effet, vous ne seriez pas aussi énervé... (M. Vaucher réagit.)

Le président. Ah, Monsieur Vaucher, ça suffit !

M. Christian Grobet. Votre attitude me laisse penser qu'effectivement il y a peut-être du grain à moudre et un lièvre à soulever ! M. Joye nous en dira peut-être plus long tout à l'heure... La commission pourrait également auditionner l'administrateur d'Orbisphère Laboratoire SA, pour mieux connaître les relations entre les deux sociétés.

M. Hervé Dessimoz (R), rapporteur. Si d'aucuns ont envie de s'opposer aux déclassements ou à la politique menée par le Grand Conseil et le Conseil d'Etat en matière d'aménagement du territoire c'est leur droit.

Je rappelle toutefois que la motion ne parle pas de déclassement, au sens premier du terme; elle cherche à proposer des solutions, lors d'une demande de déclassement. Je vous en rappelle les considérants : la motion prend référence du déclassement de Reuters et considère qu'à l'avenir de telles compensations seront demandées de plus en plus souvent pour préserver la zone agricole, la nature et les espaces vierges; elle invite le Conseil d'Etat à dresser l'inventaire des terrains sis en zones à bâtir non encore construits, qui ne se prêtent manifestement pas à la construction et qui pourraient, par conséquent, faire l'objet de tels échanges.

Cela va parfaitement dans le sens de ce que vous dites, Monsieur Grobet, puisque vous avez déclaré que les zones à bâtir comportaient suffisamment de terrains pour éviter des déclassements. L'invite de cette motion n'a précisément pas été touchée d'une virgule. Seule la deuxième invite, demandant que le travail consistant à se charger d'établir la liste des lieux ou secteurs où des mesures possibles d'amélioration de réhabilitation agroenvironnementales pouvaient être prises, était trop lourde pour l'administration. M. Joye a alors indiqué qu'il effectuerait ce travail dans le cadre de l'étude du plan directeur.

Si une large majorité de la commission a décidé de voter cette motion c'était simplement à la demande des motionnaires d'occuper l'espace temps qui allait se dérouler entre les études sur cette motion et l'adoption du plan directeur, de manière que le Grand Conseil soit informé - si des déclassements devaient lui être soumis dans l'intervalle - pour pouvoir apprécier si des terrains disponibles étaient utilisables plutôt que de déclasser des terrains agricoles; et sur quels lieux et sur quels secteurs on pouvait demander des compensation, en cas de déclassements de terrains agricole. Nous ne disposions malheureusement pas de telles informations pour l'affaire Reuters.

A mon avis, le travail de la commission est positif et logique par rapport au problème posé par la motion.

M. Pierre Meyll (AdG). Devant les affirmations de M. Vaucher, je me vois contraint, et sans dévoiler aucun secret, de dire que les documents relatifs à l'autorisation préalable, se trouvant au département des travaux publics, précisent qu'il s'agit de World Economic Forum, une fondation à but non lucratif. Il y est également précisé que le propriétaire de ce terrain est la société Orbisphere Corporation Wilmington, succursale de Collonge-Bellerive. Un acte notarié... (M. Vaucher discute.) Vous devriez écouter, Monsieur Vaucher, c'est très intéressant ! Un acte notarié atteste ce fait, et prévoit que l'on ne pourra vendre cette parcelle que lorsque la conclusion de l'autorisation préalable sera accordée. Je pense que les notaires sont tous honnêtes...

Le président. Oui, oui ! (Rires.)

M. Pierre Meyll. Vous pouvez consulter ces documents - mais peut-être sommes-nous en dehors des délais - et vous verrez qu'Orbisphere Corporation Wilmington est bien la succursale de Collonge-Bellerive ! Alors, profonde erreur ?

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, Madame et Messieurs les conseillers d'Etat... (M. Philippe Joye est seul sur le banc des conseillers d'Etat. Rires.)

Pour plus de clarté, je dissocierai les deux problèmes.

Avant votre venue, Monsieur le rapporteur, le débat a fait ressortir ce que quelqu'un définissait comme étant un rapport de minorité. Je précise que ce rapport, plein de sagesse, est de Mme Roset.

La discussion a aussi révélé les différentes interprétations de la notion de compensation totale ou partielle.

Enfin, je me suis permis de dire que la séparation des pouvoirs entre l'exécutif et le législatif semblait vous poser un problème. Il faut bien savoir qui fait quoi : l'outil de travail provient de l'exécutif; nous faisons le travail et vous communiquerons les résultats obtenus.

La Pallanterie appartient aux objets qui font partie du groupe de terrains étudiés, je crois, en 1991, c'est-à-dire bien avant la parcelle Reuters. Il avait été admis que les projets en cours pouvaient être poursuivis.

J'en viens au deuxième sujet avec la problématique d'Orbisphère. Elle est différente, en ce sens qu'Orbisphère est une usine qui devait se redéployer, se réinstaller et se moderniser.

Orbisphère-Cologny, comme je la dénommerai, est certainement juridiquement liée à Orbisphere Corporation Wilmington.

Si vous vous référez aux documents consultés par M. Meyll, qui appartiennent au dossier complet établi lors de l'enquête préalable, vous constaterez que ce déclassement particulièrement ardu est dû au fait que World Economic Forum entendait trouver de nouveaux locaux. Sous le gouvernement de M. Grobet, il a été décidé de l'installer à côté du château de Tournay. Puis World Economic Forum a tourné casaque, parce que mécontent, entre autres, des conditions financières qui lui étaient faites. Ensuite, il a tenté d'acquérir la villa sise en contrebas pour éviter les ennuis d'un déménagement. Malheureusement, les voisins ont fait opposition et cette solution n'a pu être retenue.

Enfin, la commune de Cologny, qui ne voulait à aucun prix perdre le contribuable intéressant qu'est World Economic Forum, a pensé à la parcelle d'Orbisphère, celle-ci devant être mise en vente pour être remise aux héritiers. Du moins, c'est ce que l'on m'a dit. Je ne peux rien affirmer à ce sujet, pas plus que pour les liens juridiques qui uniraient les deux sociétés Orbisphère. Bref, le but de la commune était de satisfaire le canton, elle-même et le principal intéressé. Je ne vous cacherai pas que répondre négativement à World Economic Forum nous aurait placés dans une situation délicate. A défaut, et cela a été souvent évoqué, l'organisation aurait pu quitter Genève.

Dans le cas d'espèce, nous avons traité le problème de Cologny de manière tout à fait indépendante. Je puis même vous dire que les emplacements de Cologny ont servi à une vocation industrielle pendant de longues années. M. Wright y procédait à des essais relatifs à l'hydrogène. Le bâtiment est abandonné depuis 1980 et je ne pense pas que l'on aurait pu y réinstaller une usine, la zone étant classée 5.

A mon avis, si un lien juridique peut exister entre les deux sociétés, aucun lien fonctionnel, en revanche, ne les unit. Il y a surtout une impossibilité technique : je me demande ce que vous auriez dit si je vous avais proposé d'implanter une usine sur le territoire de Cologny !

Pour être en accord avec des vocations spécifiques, l'affaire Orbisphère doit être traitée dans le cadre de La Pallanterie et celle de World Economic Forum dans le cadre de Cologny.

M. Hervé Dessimoz (R), rapporteur. Depuis les travaux de la commission, je n'ai pas noté de fait réellement nouveau. Ne restent que les faits essentiellement politiques qui nous opposent régulièrement en matière d'aménagement du territoire.

Je me pose également des questions sur la qualité des travaux en commission, lesquels sont systématiquement mis en doute en plénière; et cela pas seulement en matière d'aménagement du territoire ! Je l'ai encore constaté récemment, lors d'un débat sur la santé...

J'apporte la précision que d'aucuns m'ont reproché ne pas avoir fait figurer dans mon rapport : la motion amendée a été acceptée par huit personnes - trois libéraux, deux radicaux, deux socialistes, un écologiste; refusée par quatre personnes - deux PDC, deux libéraux. Les trois abstentions provenaient de l'Alliance de gauche.

M. Christian Grobet (AdG). Il n'a jamais été question de construire une usine sur le coteau de Cologny ! Il ne faudrait tout de même pas déformer nos propos, bien que l'on nous ait souvent dit que les activités d'Orbisphère étaient compatibles avec des bâtiments de type administratif !

A vrai dire, la localisation d'Orbisphère à Cologny sur la parcelle d'Orbisphère - permettez-moi ce jeu de mots ! - aurait eu un impact négatif semblable à celui de World Economic Forum qui s'est bien moqué du Conseil d'Etat. Il est vrai que la parcelle Orbisphère à La Capite, comme vous l'avez dit, comporte des bâtiments qui auraient vraisemblablement pu accueillir les activités de la société.

Toutefois, nous ne pouvons pas laisser cette affaire dans le flou. Contrairement à ce qu'affirme M. Vaucher, Orbisphere Corporation Wilmington, comme son nom l'indique, n'est pas une fondation mais une société anonyme. C'est écrit noir sur blanc dans le «Savoir» ! Monsieur Vaucher, vous avez perdu une belle occasion de vous taire et de ne pas interrompre les intervenants !

M. Ion Bals, l'administrateur unique d'Orbisphère Laboratoire Genève/Collonge-Bellerive, qui siégeait, en 1965, dans le conseil d'administration d'Orbisphere Corporation Wilmington, succursale de Collonge-Bellerive, détient toujours la signature pour le compte de cette société. Il est évident que les deux sociétés Orbisphère sont liées ! Nous poserons une question écrite au Conseil d'Etat, ce qui lui donnera l'occasion de nous dire exactement quels sont les liens juridiques et économiques de ces deux sociétés, car la situation doit être éclaircie.

M. Pierre Meyll (AdG). Juste une précision ! Je tiens le dossier que j'ai constitué à la disposition de chacun des députés. Il révèle que la construction prévue par World Economic Forum n'a rien d'une villa et que l'on pourrait y intégrer des ateliers sans aucune difficulté.

Il est vrai, Monsieur Vaucher, que les vieux bâtiments ne pouvaient pas être utilisés par Orbisphère en l'état. Mais il n'empêche que ceux qui sont prévus se prêtent aussi bien à des activités industrielles qu'administratives; il suffit de voir les photos de la maquette. Je ne m'y oppose pas, mais souhaite que l'on nous informe de toutes les situations, afin d'être à même de juger en connaissance de cause.

Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce rapport à la commission d'aménagement du canton est rejetée.

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

MOTION

concernant les compensations de zone agricole

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

- que le déclassement «Reuters» avait été accepté par notre Grand Conseil en prévoyant des compensations sous diverses formes, notamment des compensations agro-environnementales ou sous forme de surfaces reclassées en zone inconstructibles;

- qu'à l'avenir de telles compensations seront demandées de plus en plus souvent, pour préserver la zone agricole, la nature et les espaces vierges,

invite le Conseil d'Etat

- à dresser l'inventaire des terrains sis en zones à bâtir non encore construits, qui ne se prêtent manifestement pas à la construction et qui pourraient par conséquent faire l'objet de tels échanges;

- à établir la liste des secteurs et des mesures de compensation (nature-agriculture).

M 1009-A
7. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. Florian Barro, Sylvie Châtelain, Hervé Dessimoz, Marlène Dupraz, John Dupraz, Christian Ferrazino, Yvonne Humbert, René Koechlin, Liliane Maury Pasquier, Geneviève Mottet-Durand, Jean Opériol, Chaïm Nissim, Martine Roset et Olivier Vaucher demandant au Conseil d'Etat d'entreprendre, en collaboration avec la commune du Grand-Saconnex, l'étude nécessaire, puis d'engager la procédure en vue d'un déclassement en zone 5 de développement de la bande de terrain, construite de villas, le long du chemin de Machéry. ( -)  M1009
Mémorial 1995 : Annoncée, 3101. Développée, 3475. Adoptée, 3488.

Le Grand Conseil a adopté, le 22 juin 1995, la motion citée en référence.

Donnant suite à celle-ci, notre Conseil vous informe qu'il a élaboré un projet de modification des limites de zones pour le secteur concerné, cela d'entente avec le Conseil administratif de la commune du Grand-Saconnex.

Ce projet prévoit, d'une part, la mise en zone de développement 5 (villas) de la bande de terrains comprise entre le chemin de Machéry et la zone de verdure qui a fait l'objet de la loi no 7194, du 22 juin 1995, et, d'autre part, la mise en zone de développement 4B destinée à des activités sans nuisances des parcelles accueillant un centre de maintenance Hertz SA et une station électrique destinée aux Services industriels.

Ce projet, qui a reçu l'agrément des services et commissions concernés, est mis à l'enquête publique conformément aux dispositions de l'article 16 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987.

(M 1009)

MOTION

demandant au Conseil d'Etat d'entreprendre en collaboration avec la commune du Grand-Saconnex, l'étude nécessaire, puis d'engager la procédure en vue d'un déclassement en zone 5 de développement de la bande de terrains, construite de villas, le long du chemin de Machéry

LE GRAND CONSEIL

- vu le projet de loi 7194;

- vu les oppositions des propriétaires riverains, suscitées par ce projet de loi,

invite le Conseil d'Etat

à entreprendre, en collaboration avec la commune du Grand-Saconnex, l'étude nécessaire, puis d'engager la procédure en vue d'un déclassement en zone 5 de développement de la bande de terrains, construite de villas, le long du chemin de Machéry.

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.

M 1022-A
8. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de la commission LCI concernant l'assainissement des ascenseurs et monte-charge. ( -)  M1022
Mémorial 1995 : Développée, 5694. Adoptée, 5698.

Lors de sa séance du 12 octobre 1995, le Grand Conseil a adopté la motion 1022, dont la teneur est la suivante:

LE GRAND CONSEIL,

considérant:

- les dramatiques accidents survenus récemment dans les ascenseurs;

- le projet de loi 7283 de MM. Pierre Vanek, René Ecuyer et Christian Ferrazino,

invite le Conseil d'Etat

- à conduire, par voie réglementaire comme le lui impose l'article 151 LCI, un programme d'assainissement rapide et réaliste des ascenseurs qui ne répondent pas aux exigences du règlement concernant les ascenseurs et monte-charge, du 22 septembre 1961 (L 5 5) ;

- à présenter dans les 6 mois un rapport au Grand Conseil sur les mesures qui ont été effectivement prises et le calendrier du programme d'assainissement.

Préalablement, il est rappelé que le projet de loi 7283, modifiant la loi sur les constructions et les installations diverses, du 14 avril 1988 (ci-après LCI), sur la question des ascenseurs et monte-charge, a été déposé le 28 août 1995 au Grand Conseil.

Ce projet de loi a été examiné par la commission LCI lors de sa séance du 5 octobre 1995.

Considérant en substance qu'il y avait urgence à limiter les risques d'accidents dans les ascenseurs, vu les événements dramatiques survenus lors des derniers mois, d'une part et, d'autre part, qu'une modification de la LCI n'était pas la solution la plus appropriée, la commission a proposé de transformer ce projet de loi en motion.

Cette proposition a été acceptée par le Grand Conseil lors de sa séance du 12 octobre 1995.

Donnant ainsi suite à cette motion, le Conseil d'Etat expose ce qui suit:

Le 30 juin 1995, un accident s'est produit dans l'ascenseur d'un immeuble situé avenue de Feuillasse, à Meyrin.

A la suite d'une glissade en patins à roulettes, lesquels ont brisé un vitrage d'une des portes palières de l'ascenseur, un enfant a eu le pied arraché par ledit vitrage.

Ce tragique accident est dû principalement au fait que l'immeuble en cause était équipé d'un ascenseur dit «à face lisse», c'est-à-dire sans porte de cabine.

Dans ce cas, comme dans d'autres accidents dénombrés ces dernières années, il a été constaté que le vitrage des portes palières des ascenseurs en cause, installé conformément à la réglementation de l'époque, ne répondait plus aux exigences actuelles.

Cela étant, un assainissement généralisé des ascenseurs sans porte de cabine n'était toutefois pas possible en l'état de la réglementation, les propriétaires d'installations existantes n'étant tenus de faire adapter ces dernières au règlement que si:

a) par sa vétusté, une installation n'offrait plus la sécurité requise;

b) un accident était dû au fait que l'installation ne répondait pas au règlement;

c) une transformation importante était apportée à l'installation.

Considérant dès lors qu'une telle situation n'était absolument pas satisfaisante et qu'il y avait lieu d'agir, et agir rapidement de surcroît, diverses mesures concrètes ont été immédiatement mises en oeuvre.

Ainsi, dès le mois de juillet 1995, le département des travaux publics et de l'énergie (ci-après: DTPE) a procédé à une information très large, auprès des régies, agences immobilières et propriétaires d'immeubles, sur les dangers que présentaient les ascenseurs sans porte de cabine. Par la même occasion, il les invitait - à défaut de pouvoir ordonner - à prendre notamment les mesures d'assainissement nécessaires.

Deux nouveaux accidents d'ascenseurs étant malheureusement survenus dans le courant du mois d'août 1995, le DTPE s'est à nouveau adressé, en date du 4 septembre 1995, aux gérants et propriétaires d'immeubles afin non seulement de leur rappeler la teneur de son information antérieure, mais en leur demandant également d'afficher immédiatement des avis à l'attention des enfants et de leurs parents, les informant des dangers liés à l'utilisation de ce type d'ascenseur et leur interdisant l'accès en patins à roulettes.

Parallèlement à ces diffusions répétées d'informations, le DTPE a engagé une étude visant à modifier le règlement sur les ascenseurs, qui ne lui permettait pas en l'état - rappelons-le - d'exiger formellement des propriétaires d'immeubles qu'ils procèdent à un assainissement des installations en cause.

Cette étude ayant été rapidement menée à bien et compte tenu de la volonté du Grand Conseil, le Conseil d'Etat a adopté le 25 octobre 1995 une disposition réglementaire nouvelle, soit l'article 66A du règlement concernant les ascenseurs et monte-charge.

En substance, cette disposition réglementaire contraint désormais les propriétaires d'immeubles à modifier, dans un délai de 2 ans à compter du 2 novembre 1995, date d'entrée en vigueur de la nouvelle disposition, les regards et attiques de portes palières présentant un danger et, dans un délai de 5 ans, de faire installer des portes de cabine à tous les ascenseurs à face lisse.

L'introduction de cette disposition a par ailleurs été accompagnée d'une campagne d'information auprès des divers milieux immobiliers et auprès des constructeurs d'ascenseurs. Des directives ont été également émises par le DTPE sur les plans technique et administratif afin de faciliter la mise en oeuvre des conditions fixées par la nouvelle disposition.

Enfin, le DTPE a invité les gérants et propriétaires d'immeubles ainsi que les fabricants d'ascenseurs à procéder aux travaux d'assainissement désormais imposés par la réglementation, en respectant un ordre de priorité déterminé en fonction du degré de danger présenté par chaque type d'installation, qui est le suivant:

1. cabines d'ascenseurs sans dispositif de sécurité anti-coincement;

2. portes palières d'ascenseurs à petits et grands vitrages en verre ordinaire ou armé;

3. ascenseurs munis de faces intérieures frontales en verre ordinaire ou armé;

4. cabines d'ascenseurs munies d'un garde-pieds rétractile;

5. cabines d'ascenseurs munies d'une liste de sécurité pneumatique;

6. cabines d'ascenseurs munies d'une liste de sécurité à clapet métallique;

7. ascenseurs à grande vitesse ascensionnelle (>1,0 m/s);

8. ascenseurs se déplaçant le long de faces intérieures frontales à protubérances.

Aujourd'hui, le DTPE commence à enregistrer les premières modifications d'installations suite à l'adoption de l'article 66A nouveau du règlement sur les ascenseurs et monte-charge.

Tels sont les mesures effectivement prises par le Conseil d'Etat et le calendrier du programme d'assainissement prévu suite à l'adoption de la motion 1022.

Débat

M. Pierre Vanek (AdG). Ce rapport découle du dépôt d'une motion, elle-même issue des considérants d'un projet de loi que nous avions déposé, certains collègues de l'Alliance de gauche et moi-même, à la suite d'une série d'accidents survenus - ils surviennent toujours ! - dans des ascenseurs.

Cette motion invitait le Conseil d'Etat à conduire par voie réglementaire, selon l'article 151 de la LCI, un programme d'assainissement rapide et réaliste des ascenseurs ne répondant pas aux exigences légales.

Or, dans son rapport, le Conseil d'Etat nous répond avoir adopté un règlement imposant l'installation, dans un délai de cinq ans, de portes de cabine pour tous les ascenseurs à face lisse. Cette mesure devant être prise de toute évidence, le délai de cinq ans me semble excessivement long.

Si je ne fais erreur, cette disposition a été introduite il y a près d'une année. Combien d'installations ont-elles été assainies depuis ?

La longueur de ce délai ne peut qu'inciter les propriétaires à attendre son échéance pour procéder à l'assainissement de leurs installations.

Cet été encore, de graves accidents se sont produits. Alors pourquoi un tel délai ?

C'est un accident survenu dans la cité où j'habite qui m'a conduit à proposer un projet de loi. Récemment, des portes inférieures ont été posées sur l'ascenseur de mon immeuble. Cette installation ayant été réalisée en un jour par un technicien, j'en conclus que la masse globale de travail est relativement modeste. Même s'il y a cinq à six mille ascenseurs à assainir, à raison de deux jours par modification, cela donne approximativement du travail à une quarantaine de personnes pendant un an ou à une vingtaine pendant deux ans. A mon sens, cela ne nécessite pas cinq ans d'attente.

Le rapport du Conseil d'Etat ne nous satisfait donc pas. Il y aurait lieu, à mon avis, de revenir à une disposition légale du type de celle que nous avions proposée, il est vrai dans l'urgence, et qui fixait un délai de six mois. Nous pourrions entrer en matière sur un délai d'une année. Des dérogations pourraient être accordées aux propriétaires qui n'auraient pu accomplir les transformations dans le délai prescrit, à cause d'entreprises débordées.

Nous devons aller dans ce sens et ne pas nous contenter du rapport du Conseil d'Etat.

Encore une fois, ce délai de cinq ans est beaucoup trop long et ne peut qu'inciter les propriétaires à retarder les mesures qui s'imposent pour éviter les accidents graves qui ne manqueront pas de se produire.

Le président. Votre conclusion, Monsieur Vanek ?

M. Pierre Vanek. Ma conclusion est que je ne suis pas du tout content du rapport du Conseil d'Etat. Par conséquent, nous déposerons sans doute une nouvelle mouture de notre projet initial, et la logique veut que nous renvoyions ce rapport au Conseil d'Etat.

Mme Nicole Castioni-Jaquet (S). Le 18 juin dernier, un petit garçon de quatre ans, ayant voulu rattraper son ballon, a eu un bras entier et son autre main entièrement arrachés. Il se trouvait avec sa soeur aînée dans la cabine d'un ascenseur dépourvu de porte intérieure. Dernièrement, un autre enfant a été mutilé. Cet effroyable accident est le quatrième en moins d'une année. Nous nous devons de réagir !

Si nous nous réjouissons de l'article 66 A du règlement sur les ascenseurs et monte-charge contraignant les propriétaires d'immeubles à faire installer des portes de cabine sur tous les ascenseurs à face lisse, nous regrettons que le délai d'application soit de cinq ans.

Si l'on se réfère aux quatre accidents qui ont eu lieu d'août 1995 à ce jour, cinq ans correspondent à vingt accidents.

Comme demandé, ce programme d'assainissement doit être rapide et réaliste. Nous sommes persuadés que les fabricants d'ascenseurs ont avantage à entreprendre ces travaux au plus vite. Ils peuvent ainsi obtenir des contrats et, par-là même, sauvegarder ou créer des emplois.

La sécurité des usagers, en particulier celle des enfants, doit être une priorité.

Ce rapport nous indique que le département des travaux publics commence, au terme de huit mois, à enregistrer les premières modifications. Mais si les propriétaires n'entreprennent que maintenant ces assainissements, pas grand-chose n'aura été fait à échéance du délai de cinq ans, soit en l'an 2000.

Combien d'accidents surviendront durant les quatre années à venir ? Afin d'éviter d'autres drames, les socialistes vous demandent de réduire ce délai.

Mme Erica Deuber-Pauli (AdG). Je ne reviendrai pas sur l'intervention de ma collègue qui rejoint ma préoccupation.

Je voudrais suggérer au Conseil d'Etat de suivre la voie tracée par l'association Pro Juventute qui a fait paraître, cet été, des petits cartons à apposer sur les ascenseurs non équipés de portes intérieures pour en signaler les dangers. Il y est mentionné : «ascenseur non conforme et dangereux».

Je voudrais que cette information soit diffusée partout où ce genre d'ascenseurs existent, y compris dans les bâtiments publics. Elle mettra en garde les enfants qui les utilisent.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Je suis de l'avis des personnes qui viennent de s'exprimer, mais je dois vous livrer quelques explications :

1. Cinq mille cinq cents installations sont concernées. A ma première proposition, les régies et compagnies d'ascenseurs ont répondu qu'il leur était impossible de faire tout le travail durant le délai de quatre ans que j'avais prévu, et elles m'ont demandé un délai de cinq ans.

2. Dans mes prescriptions à tous les régisseurs, Madame Deuber-Pauli, j'ai demandé la pose d'autocollants. Cela n'a été fait que très partiellement, ces autocollants étant, paraît-il, régulièrement arrachés.

3. Je me suis enquis, il y a un mois, de l'état de l'avancement des travaux. J'ai été effaré d'apprendre que sur les huit cents modifications demandées pour la première année - cinq mille cinq cents étant prévues - seules quatre-vingts avaient été effectuées. C'est très grave. J'ai donc demandé par écrit aux régies de me communiquer, sur le champ, leur planning pour l'année 1996 et les années suivantes, et de m'indiquer nommément les installations qu'elles ont l'intention de réparer pour que nous puissions suivre ce travail et être renseignés avec précision.

Il est possible que quatre-vingts autres modifications aient été effectuées entre-temps, mais quoi qu'il en soit, ce serait largement inférieur aux huit cents à mille installations annuelles que nous avions prévues.

Nous enverrons à toutes les régies de nouveaux autocollants en les priant de les faire poser et de les remplacer si nécessaire. En dernier lieu, nous avons l'intention de demander à Mme Brunschwig Graf de diffuser une information dans les écoles, surtout dans les petites classes, puisque le dernier blessé était âgé de trois ans.

Nous avons un projet de loi en cours pour les bâtiments de l'Etat : il nous permettra d'intervenir en force pour assurer la sécurité dans les ascenseurs.

Restent les ascenseurs pour les handicapés. Le professeur Rossier m'a rendu attentif au fait qu'il ne pourrait plus pénétrer dans l'ascenseur de son immeuble s'il était modifié. Nous étudions également des solutions pour ces cas particuliers.

Je conclus en disant que je partage entièrement votre avis, comme l'ensemble de ce Grand Conseil. Il faut que tout le monde s'y mette pour que ce problème soit résolu au plus vite. En attendant, j'ai déjà émis toutes les réserves du Conseil d'Etat si, à fin 1996, un progrès notoire n'était pas enregistré dans l'avancement des travaux.

La proposition de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat est mise aux voix.

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Cette proposition est rejetée.

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.

I 1967
9. Interpellation de Mme Mireille Gossauer-Zurcher : Les lois sont-elles aussi faites pour M. Philippe Joye ? ( ) I1967
 Mémorial 1996 : Voir l'interpellation urgente 218, 4626.

Mme Mireille Gossauer-Zurcher (S). Je serai brève, ayant développé mon interpellation en urgence la semaine passée.

Je souhaite juste conserver un droit de réponse en fonction de ce que me dira M. Segond, lors d'une prochaine session, au point 73 bis, si je ne fais erreur, de notre ordre du jour.

Le président. M. Segond vous répondra dès son arrivée.

Cette interpellation a été développée comme interpellation urgente 218.

P 1073-A
10. a) Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier la pétition concernant le secteur Sécheron-Prieuré. ( -)P1073
Rapport de majorité de M. René Koechlin (L), commission d'aménagement du canton
Rapport de minorité de Mme Alexandra Gobet (S), commission d'aménagement du canton
M 1076
b) Proposition de motion de Mmes et MM. Yvonne Humbert, Geneviève Mottet-Durand, Martine Roset, Florian Barro, Hervé Dessimoz, Michel Ducret, René Koechlin, Jean Opériol et Olivier Vaucher concernant l'aménagement du quartier de Sécheron-Prieuré. ( )M1076

Jugeant que la pétition citée en titre portait essentiellement sur un sujet d'urbanisme, le Grand Conseil a décidé de la renvoyer à la commission d'aménagement.

Celle-ci l'a traitée au cours de ses séances des 29 mai, 5 et 19 juin 1996, sous la présidence de M. Florian Barro.

Assistaient aux séances, MM. Denis Dufey, secrétaire général du département des travaux publics et de l'énergie, Georges Gainon, chef de la division des plans d'affectation, Jean-Charles Pauli, juriste du département.

Préambule

La pétition concernant le secteur Sécheron-Prieuré porte sur trois sujets distincts, ce qui en rend le traitement difficile, faute d'unité de la matière.

La première question est de nature urbanistique et concerne principalement l'aménagement du territoire municipal de la ville de Genève.

Le deuxième revêt un caractère purement technique. Elle évoque en effet les mesures que prend - ou ne prend pas - Ecotox dans le quartier.

Enfin, la troisième invite de la pétition est de nature économique et concerne les rapports privés entre une entreprise, en l'occurrence Sécheron SA, une société d'investissement, Noga-Invest, et la banque cantonale.

Cette diversité de matière nuit à l'efficacité de la démarche, en dépit de son bien-fond et de la pureté des intentions de ceux qui l'ont entreprise. Nous verrons d'ailleurs qu'elle pourrait à satisfaction se limiter à la question d'aménagement, tant celle-ci oblige à traiter aussi, le moment venu, les autres problèmes soulevés.

La commission a d'abord procédé à l'audition des pétitionnaires, puis à celle du Conseil administratif de la ville de Genève, représenté par Mme Jacqueline Burnand, conseillère administrative.

Audition des pétitionnairesreprésentés par MM. Jeanmairet et Monney

Les habitants du quartier, signataires de la pétition en question, se sont constitués en association le 5 mai 1994. Ils sont préoccupés par la progressive dégradation de leur quartier, dont une partie importante des terrains est en friche - industrielle ou autre. Ils ignorent s'il existe un plan d'urbanisme ou non et déplorent les nuisances de bruit et d'émission de gaz provenant des véhicules à moteur qui transitent par la rue de Lausanne et l'avenue de France. Ils craignent en outre la gène que risque de leur causer à l'avenir le passage du tram 13 sur cette dernière avenue.

Les pétitionnaires se plaignent en somme des inconvénients que leur procure la surabondance du transit des personnes et des véhicules à travers leur quartier, et à la fois du manque d'animation dont souffre ce dernier par la progressive désaffectation dont il est l'objet.

De plus, aucun programme ni aucun projet concret de construction autre que celui d'une organisation internationale, d'urbanisation ou simplement d'aménagement ne leur offre la moindre perspective d'avenir, proche ou lointain, qui leur laisse entrevoir quelque amélioration. Ils se sentent enfin tenus à l'écart de tout processus de décision à propos du sort de leur propre environnement.

Ce malaise, les commissaires l'ont tous clairement ressenti et enregistré, même si leur différentes sensibilités ne les polarisaient pas nécessairement sur les mêmes objets.

Ainsi les uns, par exemple, ont-ils davantage mis l'accent sur les nuisances, tandis que d'autres considèrent que ces dernières ne constituent qu'un des aspects du problème qui porte pour l'essentiel sur l'aménagement - ou le réaménagement - et sur la revitalisation de ce quartier.

Il convient de relever que les habitants ont adressé la même pétition au Conseil Municipal, qui pour l'heure n'y a pas encore donné suite.

Audition de Mme Jacqueline Burnand, conseillère administrative

Le Conseil administratif persiste à souhaiter élaborer avec le concours du DTPE un plan global d'aménagement du quartier. Mais les circonstances ne s'y sont guère prêtées jusqu'à ce jour. Par ailleurs, le Conseil administratif entend maintenir à cet endroit la zone industrielle, bien qu'il reconnaisse la nécessité d'en assouplir l'affectation, notamment en ville.

Il convient de relever ici que le quartier par deux tiers - si non la moitié - est situé en zone industrielle dont la majeure partie est actuellement désaffectée.

Il ressort de l'audition que le Conseil administratif ne s'opposerait pas nécessairement au déclassement de la dite zone si le besoin et un projet concret le justifiaient. Il s'agit d'une question d'opportunité. Or, en matière d'urbanisme, il appartient précisément aux autorités de susciter cette opportunité. Dans cet esprit, le Conseil administratif est prêt à lancer conjointement avec l'Etat une étude d'aménagement du quartier. Reste à la mettre sur pied; et pour le moment, personne n'en prend l'initiative. Chacun se cantonne dans l'expectative et n'agit que très ponctuellement en fonction de quelques projets très spécifiques, dont certains - tels celui de la maison Europa - sont de surcroît contestés et combattus.

Il ressort de cette audition qu'à l'évidence, la volonté d'entreprendre à brève échéance quelque chose dans ce quartier n'anime guère le Conseil administratif, qui voue son attention et son énergie à d'autres questions plus opportunes ou plus brûlantes comme l'aménagement de la place des Nations ou, à l'heure de l'audition, le combat contre la traversée de la rade.

Débat de la commission

La diversité de matière qui caractérise la pétition eut pour effet de confiner le débat dans un dialogue de sourds. Les uns parlaient d'aménagement du territoire, d'autres de mesures écotoxicologiques, d'autres encore du projet avorté de l'usine de Sécheron SA et du sort de cette entreprise.

En réalité, le problème soulevé par les pétitionnaires, précisément parce qu'il touche à tous les domaines qui viennent d'être évoqués, s'avère bel et bien de nature urbanistique. Car s'il existe dans sa diversité et dans toute sa complexité, c'est par défaut d'urbanisation.

Non seulement aucun plan d'aménagement abouti ne régit le quartier, mais aucun programme n'en trace la destinée et les études qui visent à l'établir sont pour le moins fantomatiques.

Dans ces conditions, les habitants ont raison de réagir et leur pétition constitue davantage un cri d'alarme qu'un plan d'action.

C'est cet appel aux accents désespérés que la majorité de la commission a entendu.

C'est pourquoi, plutôt que de renvoyer telle quelle la pétition à l'exécutif qui ne saurait quelle suite lui donner, les commissaires, dans leur majorité, ont préféré recommander au Grand Conseil de la déposer sur son bureau et lui proposer une motion de synthèse à renvoyer au Conseil d'Etat.

Cette motion vise à promouvoir l'aménagement du quartier en mettant en place - à l'instar de la FAG aux Grottes - l'organe exécutoire du projet.

Conclusions

Pour les motifs qui viennent d'être évoqués, la majorité de la commission d'aménagement vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés:

1. de déposer la pétition 1073 sur le bureau du Grand Conseil;

2. de renvoyer au Conseil d'Etat la motion jointe au présent rapport et qui répond globalement aux voeux des pétitionnaires.

(P 1073)

PÉTITION

concernant le secteur Sécheron-Prieuré

Au Grand ConseilAu Conseil municipalAux autorités compétentes

Les habitants de Prieuré-Sécheron signataires de cette pétition demandent impérativement:

1. un plan d'urbanisme pour l'ensemble de la zone qui tienne pleinement compte des intérêts des habitants, des enfants et des jeunes des différentes écoles;

2. une station de mesures de Ecotox au centre du quartier (angle rue de Lausanne-avenue de France) avec comptage précis et périodique du trafic motorisé pour tout le quartier;

3. une transparence complète sur le dossier «Sécheron-Noga Invest-BCG, etc.»;

s'opposent absolument à:

- tout projet de nature à dégrader encore les conditions de vie dans le quartier;

- l'implantation de nouveaux parkings destinés à gonfler davantage le trafic pendulaire;

- l'idée d'une traversée de la rade dans le prolongement de l'avenue de France.

Association des habitants de Prieuré-Sécheron

Case postale 2003

1211 Genève 2

Roger Deneys, président

RAPPORT DE LA MINORITÉ

La minorité de la commission s'est rassemblée sur les trois demandes formulées par les habitants du quartier de Prieuré-Sécheron et vous invite à envoyer la pétition au Conseil d'Etat.

Le déroulement des séances figurant au rapport de la majorité, il ne sera repris qu'en tant qu'il est nécessaire.

I.0Présentation de la pétition (annexe)

Les habitants de Prieuré-Sécheron demandent:

- Un plan d'urbanisme allant des quais à la Place des Nations et de Prieuré-Sécheron jusqu'au Reposoir.

- Une station Ecotox angle rue de Lausanne, avenue de France, avec comptage périodique du trafic motorisé.

- Une transparence complète sur le dossier ABB-Sécheron/Noga Invest et autres. Les pétitionnaires déclarent maintenir cette demande nonobstant l'absence d'une commission d'enquête parlementaire.

La pétition a recueilli plus de 400 signatures.

Elle rappelle l'opposition des citoyens à toute nouvelle dégradation de leur environnement.

II.0Les raisons de soutenir la pétition

1. Pour un plan d'urbanisme global à Prieuré-Sécheron

Les terrains classés «industriels» à Sécheron couvrent une surface de près de 8 hectares. Mais comme le soulignent les pétitionnaires, l'abandon de l'activité secondaire produit des effets négatifs sur le quartier bien au-delà des limites de cette zone.

Le périmètre suggéré pour un plan d'urbanisme s'étend jusqu'aux dernières habitations et comprend la zone ferroviaire dont les CFF sont propriétaires.

Il jouxte également les sites de prédilection des organisations internationales.

Pour les habitants, ce plan d'urbanisme marque la recherche d'une identité pour leur cadre de vie:

Certains citoyens sont désemparés par la perte des repères du passé et se battent pour conserver aux Pâquis les éléments de sa mémoire de quartier, populaire et animé.

D'autres sont las d'attendre l'issue d'imbroglios politico-financiers pour voir leur environnement se structurer en tenant compte de leurs besoins, d'une certaine qualité de vie à laquelle ils aspirent.

Pour le député, c'est l'occasion de balayer tout un fatras de plans mort-nés, de projets de lois tacitement enterrés, d'ébauches repoussées par quelque et anonyme potentat.

Le peuple n'a-t-il pas commencé à faire lui-même le ménage puisqu'il a fait tomber à l'eau les hypothèques qui grevaient le dessin de l'Avenue de France?

2. Pour une mesure régulière du trafic et des pollutions à l'angle rue de Lausanne/avenue de France

Ces dernières années, le service d'ecotoxicologie et l'office des transports ont déjà effectué des mesures relatives au bruit et au passage des véhicules à l'intersection désignée. Le plus souvent, les résultats (dépassement des valeurs de bruit, d'autres et lointaines normes fédérales) sont rendus véritablement publics dans le contexte de dossiers politiques quelque peu retentissants: Sécheron II (aménagement de la parcelle du Foyer), rénovation de l'école de Sécheron ou traversée de la rade.

En commission l'examen de la pétition n'a fourni aucune garantie sur le suivi régulier d'une situation incontestablement préoccupante, une fois que les projecteurs médiatiques se sont éteints.

Aucune objection solide n'a été présentée à l'encontre du déplacement de la station de mesure d'air «Wilson» au carrefour de l'avenue de France.

La minorité estime notamment que le champ d'action de l'équipement(1 km) est une explication à son amarrage actuel mais pas un obstacle à sont transfert au point sensible visé par la pétition.

A souligner que la commission n'a disposé, sur ce point, que d'une information indirecte.

Il n'a été procédé à aucune audition.

3. Pour une transparence démocratique sur le dossier ABB-Sécheron/Noga-Invest et autres.

«Ça ne les regarde pas» ont courageusement susurré les chantres de la majorité.

La minorité est d'un avis différent.

Des conditions auxquelles ABB-Sécheron a lâché ses reliefs urbains à une société d'investissements de la place, jusqu'à la paralysie glauque qui règne actuellement sur l'avenir de ces parcelles, rien n'a été une pure affaire de «privés».

Si l'implication du Conseil d'Etat - et d'autres élus du peuple, portant casquette - est un fait connu, l'usage qu'il a été fait de la puissance publique et de l'influence politique demeure obscur.

Il est peut-être difficile, pour un gouvernement, de résister à la pression d'une entreprise qui met en balance la récupération d'une plus-value foncière avec le nombre des licenciements.

Au-delà d'un petit tribut oratoire à «la volonté du souverain» certains dimanches soirs de défaite, la minorité de la commission estime toutefois que l'élu se doit, par essence, de fournir de véritables explications sur sa conduite, lorsque des représentants du corps électoral en demandent.

III.0L'envoi au Conseil d'Etat, la bonne voie pour sortir de l'ornière.

1. En ce qui concerne le plan d'urbanisme.

Des divergences d'objectif correspondent-elles aux divergences de moyens qui ont séparé la majorité et la minorité de la commission? Toutes les déclarations d'intention ont en tout cas convergé sur la nécessité de remettre sur le métier un nouveau plan d'urbanisme mais...

A qui l'initiative?

· A la Ville de Genève?

Si un plan doit être élaboré, c'est dans une perspective de développement et d'adaptation du quartier.

La Ville de Genève souhaite un large maintien des activités secondaires

Toutefois, un simple gel des limites de zones en l'état entrave les possibilités d'action, pour de nombreuses raisons qui seront oralement explicitées.

Modifier des limites de zone, convertir de la zone industrielle ordinaire en zone de développement industriel, installer du logement social sur une ancienne zone primaire, toutes ces décisions n'appartiennent pas au législateur communal.

Il n'est donc pas étonnant que le Conseil administratif veuille apporter sa contribution à l'élaboration d'un plan, mais qu'il en décline l'initiative.

· Aux propriétaires?

Dans ce secteur, une large part des inconnues repose sur les décisions d'intention d'une poignée d'acteurs:

Les CFF réaliseront-ils la halle d'entretien du Pendolino pour laquelle ils ont sollicité une autorisation? Ont-ils d'autres projets?

Les organisations internationales et autres entités publiques internationales ont-elles besoin de surfaces? Les moyens financiers nécessaires à leurs besoins sont-ils disponibles ou le seront-ils à moyen terme?

La société Noga-Invest, recomposée, a-t-elle de nouvelles perspectives de construction?

Dans son courrier du 11 janvier 1989 à ABB-Sécheron, le Conseil d'Etat prévoyait:

«3. a) L'affectation des parcelles déclassées fera l'objet d'une étude d'aménagement complète, effectuée par ABB ou Aprofim à ses frais, risques et périls, couvrant l'ensemble du périmètre de Sécheron [...]

6. La mise en valeur des terrains concernés du périmètre de Sécheron ne pourrra intervenir que dans la mesure ou l'acheteur présente un projet détaillé [...].»

 Mémorial de la Ville de Genève,

 146e année, page 3355

Il faut néanmoins avouer que les déboires successifs des différents plans proposés par l'acquéreur incitent la minorité de la commission à ne pas réclamer l'application de ces clauses pour la mise en oeuvre du plan d'urbanisme global de Prieuré-Sécheron.

Il serait vain d'espérer que la juxtaposition des plans des uns et des autres - fondés sur des intérêts particuliers - puisse donner naissance à une image répondant aux besoins collectifs.

· Aux habitants?

Les pétitionnaires appellent à la prise en compte de leurs besoins; comme dans le cas de la Ville de Genève, leurs aspirations devraient influencer la mise en forme du plan d'aménagement ou le choix entre les variantes.

Pourquoi pas dans le cadre d'un concours?

Hors ce contexte, les habitants des quartiers ne disposent que rarement des moyens financiers nécessaires à un projet.

· Au Conseil d'Etat?

Le Conseil d'Etat est l'interlocuteur naturel ou privilégié de la Ville de Genève, des CFF, de la Banque Cantonale, des Organisations Internationales, de Noga-Invest et... du Grand Conseil.

Le Conseil d'Etat ou le Grand Conseil peuvent, théoriquement, accueillir la première demande de la pétition de façon égale.

Seul le gouvernement, toutefois, dispose des services de l'administration, un avantage écrasant.

La science et le travail de très nombreux fonctionnaires seront, en l'occurrence, indispensables pour servir la volonté politique d'une nouvelle image coordonnée du développement de Prieuré-Sécheron.

En regard, le Parlement fait figure d'ensevelisseur de toute première classe de la pétition, qui ne dispose d'aucun moyen à son service.

L'impossibilité, enfin, de connaître l'état des cogitations du groupe de travail (?) Ville/Etat, déjà créé sur le sujet, démontre, pour le surplus, que l'aménagement de Sécheron est un dossier qui supporte mal la dilution politique.

Le Conseil d'Etat doit prendre lui-même le dossier en main avec les autres acteurs du périmètre.

La création d'une fondation est prématurée (la fondation ne pourrait fonctionner qu'après le dessin de la zone par voie délibérative ou, au moins, accord entre toutes les parties) ou, plus prosaïquement, dilatoire (voir plus loin, point III 3).

2. Pour déplacer la station Ecotox de Wilson et compter périodiquement le trafic.

Le Conseil d'Etat chapeaute les deux services dont dépend la seconde demande des pétitionnaires.

L'acquisition de matériel supplémentaire n'est pas indispensable.

Le déplacement de la station Wilson et l'établissement d'une périodicité des autres mesures suffisent.

Ce point de la pétition ressort donc, comme le premier, de la compétence du Conseil d'Etat.

3. Pour apporter, de l'intérieur, un éclairage sur le dossier ABB-Sécheron/ Noga-Invest et autres.

C'est au Conseil d'Etat le premier, qu'ABB-Sécheron a fait part, il y a dix ans, de son intention de «valoriser» ses terrains en ville, suscitant quasi instantanément la création d'une délégation ad hoc de l'Exécutif et l'ouverture de négociations. Depuis lors, et pour cause, la liaison n'a guère été interrompue.

Naturellement, le gouvernement n'a jamais eu la compétence d'intervenir directement dans le processus de restructuration industrielle de cette entreprise, ni, plus tard, dans celui de la société reprenante; il s'est limité à parrainer la réimplantation d'ABB et à accueillir avec bienveillance son marché financier.

Evidemment, c'est le hasard qui conduit l'actuel Conseil d'Etat à figurer, à la faveur des renouvellements successifs, dans l'une des compositions les mieux informées sur ce dossier.

Mais les pétitionnaires ne demandent rien d'autre que le bénéfice d'une si heureuse conjonction. A quoi la collectivité publique a-t-elle renoncé, qu'a-t-elle cédé, soutenu, influencé? Autant d'interrogations en suspens.

Face au gouvernement, le Grand Conseil est un bien pâle interlocuteur pour répondre à la pétition: somme anonyme de ceux qui ne savent pas et n'ont donc rien à dire, de ceux qui savent mais qui ne le diront pas, de ceux qui ne savent pas, mais qui diront sûrement quelque chose et de ceux qui, de toute façon, comme les pétitionnaires, aimeraient bien savoir.

Une fondation ou une martingale?

Fer de lance de la création d'une Fondation d'aménagement, tenant lieu de succédané à la pétition, le rapporteur de majorité et sa suite interpellent la raison.

Reine sans couronne, portée sur les épaules de mécènes aux allures de collectivités publiques, une Fondation serait, par sa seule grâce, en mesure de révéler aux propriétaires égarés le destin de leurs terres?

Ne s'agirait-il pas plutôt, d'une martingale, d'un simulacre de table rase, avec coup d'éponge sur les ardoises et rangement des cadavres dans les placards?

Une façon comme une autre d'occuper l'avant-scène, à quelques mois des élections...

Toute favorable qu'elle soit à redonner vie à ce quartier, la minorité ne croit pas qu'une seule pierre puisse jamais être posée à Sécheron si les bases politiques ne sont pas assainies.

En répondant, notamment, à la pétition.

La création d'une Fondation brouillerait un peu plus les cartes, sans qu'en l'état on puisse espérer davantage d'elle que d'un «groupe de travail».

Cette position pourrait évidemment être revue si le Conseil d'Etat éclairait la situation et trouve un accord entre toutes les parties.

Sous ces réserves pour l'avenir, la minorité refuse d'entrer en matière sur la motion de la majorité.

IV.0Conclusions.

Pour l'ensemble des motifs précités, la minorité de la commission de l'aménagement vous engage, Mesdames, Messierus les députés, à adresser la pétition 1973 au Conseil d'Etat pour qu'il y donne suite et à rejeter les conclusions du rapport de majorité, ainsi que tous ses accessoires.

Annexe: Extrait du mémorial de la Ville de Genève, 146e année, pages 3354, 3355 et 3356.

ANNEXE

16

17

Débat

M. René Koechlin (L), rapporteur de majorité. En dépit de ses qualités et autres bonnes intentions, cette pétition tend à perpétuer la partie de ping-pong à deux, puis à quatre joueurs, engagée, il y a des lustres, entre l'Etat et la Ville de Genève. Ces quatre joueurs sont le Conseil d'Etat et notre Grand Conseil, d'une part, le Conseil administratif et le Conseil municipal, d'autre part.

A l'évidence, Madame la rapporteuse de minorité, vous aimez ce sport, puisque votre rapport tend à soutenir cette pétition, laquelle, il faut le souligner, a été adressée non seulement à notre parlement mais également au Conseil municipal de la Ville de Genève.

De deux choses l'une : ou bien nous poursuivons cette partie de ping-pong, fort agréable pour certains mais pas pour tous, notamment pas pour les habitants de Sécheron; ou bien nous décidons de mettre fin à une situation dont précisément se plaignent les pétitionnaires.

Il nous appartient aujourd'hui - et lesdits pétitionnaires nous en donnent l'occasion - d'empoigner le problème en engageant le Conseil d'Etat à se doter de l'instrument lui permettant de le résoudre. L'alternative est aussi simple que cela ! C'est précisément le but poursuivi par la motion que la majorité de la commission a décidé de joindre au présent rapport. Cette motion ne propose rien moins que de constituer un organe similaire à la FAG, aux Grottes. Je vous rappelle que cette fondation a permis de trancher un noeud gordien, celui de l'aménagement de ce quartier, après des décennies de tergiversations et d'interminables parties de ping-pong entre les diverses autorités concernées.

Cet organe permettra de promouvoir, en collaboration avec la Ville de Genève, et non sans impliquer les habitants du quartier, l'aménagement coordonné du secteur en cause.

Soutenir votre rapport, Madame, revient à stériliser l'action des pétitionnaires, ce dont ils ne se rendent pas compte. Naïvement, ils adressent leur pétition à toutes les autorités possibles et imaginables, sans réaliser que, sur le plan de l'efficacité de leur action, ils vont exactement à fin contraire.

Vous faites mine de soutenir ces pétitionnaires. Si vous le faisiez réellement, vous appuieriez notre motion; vous leur procureriez cet organe indispensable pour aller de l'avant et les satisfaire !

Soutenir notre rapport constitue un acte politique clair et constructif pour l'avenir du quartier de Sécheron et de ses habitants. C'est pourquoi, au nom de la majorité de la commission, je vous invite à déposer la pétition sur le bureau du Grand Conseil, à titre de renseignement, et de renvoyer notre motion au Conseil d'Etat.

Mme Alexandra Gobet (S), rapporteuse de minorité. Il est un secret des lieux, un secret qu'on peut leur faire livrer.

Pour les pétitionnaires, l'avenir du quartier Prieuré/Sécheron se confond avec le leur. Pour nous, les politiques, c'est quasiment l'angle mort de notre rétroviseur. Pourtant, majorité et minorité s'accordent, du moins dans leurs propos, à vouloir remettre un plan d'urbanisme sur le métier.

Nous disons que cette opération doit être pilotée par le Conseil d'Etat, et par lui seul, ceci pour plusieurs raisons :

1. A cet endroit, aucune modification valable pour l'avenir ne peut avoir lieu sans une modification préalable des limites de zones. Il est vrai que jusqu'aux années 80, la zone industrielle ordinaire a permis de maintenir le coût des terrains à des valeurs correspondant aux possibilités objectives des entreprises, et c'était très bien. Mais dans la perspective d'un redéploiement d'activités, tel que nous l'avons souhaité en commission, les équipements seraient totalement à reprendre. En effet, les terrains en mains privées ne disposent que de voiries élémentaires et d'accès non utilisables. Si le périmètre est sis en zone industrielle ordinaire, le financement du réseau serait à la charge des collectivités publiques, et vous le savez, Monsieur Koechlin ! En zone de développement industriel, la charge financière peut être ventilée; des cessions de terrains peuvent être obtenues.

Ce sont les exécutifs de la Ville et de l'Etat qui sont les plus aptes à définir ce type d'appréciation sur l'opportunité des changements de zone, et non une fondation ou un autre organe, tout compétents qu'ils puissent être en matière d'aménagement.

2. Par le biais des PLQ, l'indice d'utilisation du sol pourrait être fixé en fonction de la volonté politique et non - comme pour les zones ordinaires - selon la possibilité maximale des règles de construction pour autant qu'elles soient appliquées !

C'est un acte politique du ressort du Conseil d'Etat et du Grand Conseil.

Un plan, qui redéfinirait librement les zones sur un tel périmètre, permettrait, pour une fois, d'assortir une zone de développement industriel des commodités nécessaires à un lieu de travail comme à un lieu de vie. Nous en avons suffisamment discuté quand nous avons évoqué le problème des zones industrielles.

Ce plan permettrait donc de sortir de la «monofonctionnalité» chronique attribuée aux zones industrielles.

3. Le Conseil d'Etat a une longue pratique - et c'est un euphémisme - des propriétaires agissant dans ce périmètre. D'autre part, une fois assurés d'une volonté politique claire, les services du DTP sont parfaitement compétents pour élaborer des projets solides et valables, répondant aux souhaits des collectivités.

Pourquoi vouloir déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil et transmettre le paquet ailleurs ? A nos yeux, c'est une dérobade politique. Ce quartier a besoin d'une image où travailleurs et habitants, commerces de proximité et équipements publics, puissent trouver leur place. Nous disons que le Conseil d'Etat et le Grand Conseil ont les compétences pour la dessiner.

La seconde demande de la pétition concerne le traitement régulier des pollutions à l'angle de l'avenue de France et de la rue de Lausanne. Cette demande nous semble également relever de la compétence du Conseil d'Etat et de l'administration, pour les raisons qui figurent dans notre rapport. Ce point ne pose aucun problème et peut donc aussi être renvoyé au Conseil d'Etat.

J'en viens au troisième point de la pétition. Il s'agit là d'un «objet sportif» que la majorité actuelle de ce Grand Conseil a cru pouvoir mettre à la porte et qui rentre maintenant par la fenêtre. Je ne referai pas ici la genèse, les débats, l'interprétation de tout ce qui s'est dit, écrit et chuchoté sur le dossier de Sécheron. Il n'en demeure pas moins que la demande des pétitionnaires est claire et dépourvue de toute équivoque. Des centaines de pétitionnaires veulent savoir, à bon droit, ce qui s'est passé dans l'affaire ABB-Sécheron, Noga Invest et autres.

C'est élu par le peuple que le Conseil d'Etat est intervenu, dès le début de cette affaire, avec un investissement certes constant mais dont les contours restent flous - pour le moins - à l'heure actuelle. Ce sont donc bien ceux qui siègent aujourd'hui au gouvernement qui ont agi et détiennent les réponses aux questions des pétitionnaires.

Si l'exécutif n'a pas mésusé de ses facultés, s'il n'a pas outrepassé les limites de son pouvoir, s'il a servi l'intérêt collectif avant de servir l'intérêt particulier, pourquoi refuserait-il de s'expliquer ? De décrire les mécanismes d'un échec autant urbanistique que politique ?

Concernant ce point, la majorité de la commission s'est également exercée à la pirouette. Eludant soigneusement la demande des citoyens, elle tente de détourner leur attention sur autre chose. C'est gentil, une fondation ! Ça ne mange pas de pain ! Parfois, c'est utile ! Ce n'est pas comme ces groupes de réflexion «bidon» créés pour les besoins de la cause ! Mais cela ne répond pas du tout à la demande d'explications des pétitionnaires !

Ce soir, nous disons notre conviction qu'aussi longtemps que le Conseil d'Etat n'aura pas répondu le dossier risquera de finir en rade, quelle que soit la volonté que l'on puisse mettre dans un nouveau plan d'urbanisme pour l'avenir du quartier de Sécheron.

Au nom de la minorité, Monsieur le président, je vous prie d'inviter le Grand Conseil à renvoyer cette pétition au gouvernement.

M. Bernard Lescaze (R). En tant que députés, nous ne pouvons qu'être surpris en entendant certains arguments invoqués par la rapporteuse de minorité. Si nous reprenons les termes exacts de la pétition, nous nous apercevons, non sans un certain amusement, que les pétitionnaires demandent impérativement et s'opposent absolument ! En vérité, cette pétition n'est pas une oeuvre constructive en faveur du quartier de Sécheron.

Ils veulent surtout savoir ce qui s'est passé dans un dossier qui n'a qu'un lointain rapport avec le problème essentiel posé par eux-mêmes et la majorité de la commission, à savoir celui du futur, car avec un projet de ce genre, il s'agit, effectivement, de se tourner vers l'avenir.

C'est écarter d'une manière assez légère la possibilité, non pas la nécessité, de créer une fondation qui ne brouillerait pas forcément les cartes. J'accorde à la rapporteuse de minorité que la fondation n'est sans doute pas la panacée dans la mesure où pourraient refuser d'y entrer ceux qui ont, actuellement, la maîtrise réelle du sol. La grande différence d'avec la fondation d'aménagement des Grottes est qu'en faisaient partie ceux qui avaient la maîtrise du sol.

Nous regrettons, par exemple, que l'on n'ait pas créé une fondation, à l'instar de celle des Grottes, pour l'aménagement du quartier de Saint-Gervais. Je crois qu'il ne faudrait pas écarter cette possibilité pour le quartier de Sécheron.

On nous dit encore qu'il s'agit d'une dérobade politique. Je ne crois pas que c'est le cas. Il appartient à la Ville et à l'Etat de prendre leurs responsabilités. Le rapport de majorité, de l'avis du groupe radical, y répond totalement.

Je rappelle que la Ville de Genève n'a pas été capable de dégager une image cohérente et unanime, ni dans les plans d'utilisation du sol ni dans l'approbation ou le rejet de plusieurs des PLQ préparés par le département des travaux publics pour ce quartier. Cela prouve que les habitants de Sécheron - et qui sont-ils ? - et ceux de la ville de Genève, ou leurs représentants, ne se sont pas mis d'accord.

Je m'étonne du rejet, par la rapporteuse de minorité, de la proposition qui consiste à informer régulièrement les habitants des démarches entreprises pour un aménagement progressif - ne nous faisons pas d'illusions, la situation économique ne permettra pas de grandes transformations au cours des prochaines années ! - et à les associer dans la mesure du possible. Alors que le parti que représente la rapporteuse ne cesse de réclamer davantage de démocratie de quartier, il nous paraît que les propositions de la motion vont dans ce sens.

Bien entendu, nous avons affaire à l'histoire du verre à moitié plein ou à moitié vide ! La majorité estime que le verre est à moitié plein et qu'il suffit de s'en tenir là pour le moment. La minorité estime que le verre est à moitié vide.

Pour notre part, soucieux de l'avenir de Prieuré/Sécheron, quartier important de notre ville, nous préférons choisir le côté constructif et le verre à moitié plein.

M. Luc Gilly (AdG), rapporteur. Contrairement à M. Koechlin, rapporteur de majorité, et à M. Lescaze, porte-parole du groupe radical, je trouve cette pétition parfaitement cohérente. C'est un cri d'alarme lancé par les habitants de Prieuré/Sécheron.

Ce n'est pas la motion qui va éclairer les débats sur l'avenir de ce quartier, Monsieur Koechlin ! Vous avez dit vouloir préparer cette motion en «concertation avec les habitants pour remettre», je vous cite, «le projet d'aménagement en route». Vous n'avez rien fait de tel, puisque aucun contact avec les habitant n'a été pris, à moins que tous les signataires de la motion n'habitent le quartier, sauf M. Koechlin. Les résidants apprécieront ! Cela fait douter de la généreuse collaboration que M. Koechlin propose aux habitants pour la suite des événements.

Dans cette saga, il importe surtout que le Conseil d'Etat réponde au point 3 de la pétition, qu'il sorte de son mutisme à propos de ce dossier politico-financier plus opaque de jour en jour. L'affaire Sécheron/Noga Invest/BCG and Co n'a que trop duré, Monsieur Joye ! La population a le droit de savoir - pas seulement les habitants de Sécheron - et d'être informée au plus vite.

Que deviennent les millions avancés par la BCG ? La «Tribune de Genève» du 10 février 1995 rapportait les propos de M. Joël Herzog, administrateur de Noga Invest, je cite : «Nous avons des accords avec le Conseil d'Etat, à lui d'en parler !» et le journaliste de poursuivre : «Malheureusement, M. le conseiller d'Etat, Philippe Joye, n'a pas souhaité nous répondre et M. Vodoz est inatteignable». Quels sont ces accords, Monsieur Joye ? Ce n'est pas lors de son audition en commission que la conseillère Burnand nous a appris quelque chose, puisqu'elle a déclaré n'être ni pour ni contre, bien au contraire. Bref, on n'a rien appris sur ce dossier ! De plus, Monsieur Joye, votre absence en commission ne nous a pas aidés à voir plus clair dans ce délicat dossier. En saurons-nous un peu plus ce soir ?

Au point 2, les habitants de Prieuré/Sécheron demandent une station de mesures Ecotox. Il existe deux stations mobiles sur les dix existantes, et M. Landry ne s'oppose pas du tout à en installer une, pour une année au minimum, à l'endroit précisé par les pétitionnaires. Leur coût est de 20 000 F et non de 300 000 F, comme indiqué en commission. Le comptage des véhicules ne devrait pas poser de problèmes. Je rappelle que le dernier plan de charges date, à notre connaissance, de 1988. Entre-temps, la circulation a certainement beaucoup augmenté dans le secteur.

Je précise que les pétitionnaires ne s'opposent pas au tram 13, comme le laisse entendre le rapport de M. Koechlin. Ils ont simplement dit qu'un trolleybus serait moins bruyant et sa réalisation plus rapide.

Reste le point 1, à savoir le plan d'urbanisme. Nous pensons que si les points 2 et 3 sont résolus, ils fourniront des indications fiables sur les futures directives du plan d'urbanisme impérativement réclamé par les pétitionnaires. Ce plan exige une vision globale et non une politique de «saucissonnage» ! Il doit être accompagné d'une sérieuse étude d'impact et écarter la construction de parkings tous azimuts. Nous demandons qu'un soin particulier soit apporté au bien-être des habitants de ce quartier. Quid donc de l'utilisation de la zone industrielle, voulue et réclamée par la Ville ?

Avant de conclure, je voudrais ajouter ceci : nous ne pouvons accepter, Monsieur Koechlin, que ce dossier, aussi important pour la Ville que pour le canton, tombe dans les mains de la fondation voulue par votre motion. Cette fondation empêcherait tout regard démocratique de notre parlement et surtout du Conseil municipal sur ce dossier dont les énormes enjeux ne sont plus à citer.

Voilà les réflexions dont je voulais vous faire part. Nous vous demandons de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. Notre groupe et la minorité rejettent la motion 1076 qui ne fera que compliquer un dossier déjà fort lourd et retarder les travaux d'aménagement que le quartier Prieuré/Sécheron mérite depuis longtemps.

M. René Koechlin (L), rapporteur de majorité. Je voudrais d'abord dire à Mme la rapporteuse de minorité qu'elle propose des solutions d'aménagement - déclassement, aménagement de voies, répartition d'activités, etc. - avant même qu'elles n'aient été étudiées ! Nous, nous demandons des études et, pour les mener à bien, un unique maître d'ouvrage.

Les autorités prendront des mesures clairement définies au préalable. Pour le moment, il n'en est rien. Or, pour définir ces mesures, il faut un seul et même organe.

Vous parlez de dérobade politique, mais c'est vous qui vous dérobez, Madame, en renvoyant une pétition au Conseil d'Etat, sans du tout vous préoccuper de savoir ce qu'il en fera ! Or vous savez ce que le Conseil d'Etat fait des pétitions : en général, cela se termine par des rapports au Grand Conseil ! Dites-moi quelle suite concrète ces rapports ont-ils jamais reçue ? Dites-le moi !

Pour ma part, je me préoccupe de la suite et de l'aménagement de ce quartier, et c'est pour cela que nous voulons créer l'organe exécutoire apte à nous garantir que cette suite aboutira, un jour, à la réalisation de projets concrets.

De plus, en renvoyant cette pétition au Conseil d'Etat, vous ignorez ce que le Conseil municipal et le Conseil administratif en feront à leur tour, puisqu'ils en sont saisis eux aussi.

Nous en serions à notre première tentative en matière de fondation que nous pourrions douter de son efficacité mais, dans ce domaine, nous sommes forts d'un certain nombre d'expériences, et savons qu'elles sont concluantes.

Pour ce qui est du dialogue avec les habitants, ce sont précisément ces fondations qui sont le mieux placées pour l'engager. Ce fut le cas aux Grottes, Monsieur Gilly. Je m'inscris donc en faux contre l'interprétation que vous donnez de mes propos en commission. Je n'ai jamais dit que nous, députés, allions collaborer avec les habitants du quartier pour rédiger une motion ! Voyons, Monsieur Gilly, vous rêvez ! J'ai parlé d'une collaboration entre les habitants du quartier et la fondation que nous appelions de nos voeux, un point c'est tout ! C'est la seule collaboration qui ait des chances d'aboutir à quelque chose de concret et de constructif.

Cette fondation aura un cahier des charges qui définira, précisément, la mission que nous lui confierons. Cela étant, nous pourrons espérer que ce quartier soit, un jour, aménagé de manière harmonieuse, selon les voeux des habitants, exprimés par les pétitionnaires.

M. Christian Grobet (AdG), rapporteur de majorité. Le rapporteur de majorité déclare être préoccupé par l'aménagement du quartier de Sécheron. Je vous crois volontiers, Monsieur Koechlin, puisque vous avez effectué une étude d'aménagement pour le compte de Noga Invest SA, propriétaire des terrains sur le plan formel. J'ignore si vous êtes toujours mandaté par cette société ou si vous espérez un nouveau mandat en vous déclarant préoccupé par l'aménagement du quartier. Toujours est-il que je me permets de considérer que vous n'étiez pas la personne indiquée pour rédiger le rapport de majorité, vu les liens que vous avez entretenus avec Noga Invest.

Je vous vois sourire, Monsieur Lescaze. Mais quand vous évoquez les intérêts des habitants et leur désir d'une bonne qualité de vie, vous savez de quoi vous parlez, puisque, dans votre propre quartier du Mervelet, vous avez pris la tête d'un référendum qui s'opposait à une très modeste opération d'urbanisation. Vous devriez, vu votre cadre de vie, être sensible à la préoccupation des habitants de Sécheron qui voudraient éviter, non pas la petite opération envisagée dans votre quartier, mais une monstrueuse transformation !

Monsieur Koechlin, vous connaissez beaucoup de choses, mais vous en énoncez parfois de fausses avec beaucoup d'aplomb. Votre référence à la fondation des Grottes est des plus malencontreuses. Je siégeais au Conseil municipal lors de sa création. Eu égard à votre âge, plus respectable que le mien, vous savez, Monsieur Koechlin, que cette fondation avait pour but d'exécuter la volonté conjointe du Conseil d'Etat et du Conseil administratif, à savoir raser complètement le quartier des Grottes pour ériger un énorme édifice en forme de croix gammée. C'était cela, la politique de la fondation, présidée à l'époque par M. Ducor, et ce n'est pas elle qui a viré à 180 degrés. Ce sont l'initiative populaire et l'action des habitants du quartier qui ont forcé les autorités à revoir leur position et à confier une nouvelle mission à la fondation. Cette mission ayant été déterminée, la fondation a fait du bon travail.

Je n'exclus pas, personnellement, le principe d'une fondation, mais dans le cas d'espèce, une fondation, vous le savez comme moi, ne fera rien tant que des décisions politiques n'auront pas été prises par les autorités compétentes que sont le Conseil municipal et le Grand Conseil.

Votre tentative de confier le dossier à un autre organe, pour des raisons que nous saisissons parfaitement, est vaine, parce que ces deux autorités-là n'admettront pas d'être dessaisies de leurs compétences. D'ailleurs, rien ne se fera tant que la situation n'aura pas été assainie.

La commission écarte les demandes de la pétition dont une des plus justifiées, à savoir l'installation d'une station de mesures. Même cela, vous ne l'acceptez pas !

L'autre demande a trait à la situation de Sécheron. C'est la moindre des choses que d'en être informés, mais cela ne suffit pas. Maintenant, il faut absolument que des mesures d'assainissement soient prises au niveau foncier, car rien ne se fera tant que la situation n'aura pas été épurée. Noga Invest a acheté ces terrains à un prix hautement spéculatif. Il est dommage que le Conseil d'Etat, à l'époque, ait accepté cette opération, aujourd'hui si lourde de conséquences. Les terrains étaient inconstructibles au prix où ils avaient été achetés; ils le sont d'autant plus aujourd'hui. Noga Invest les a acquis sans sortir un sou, grâce aux prêts consentis par les banques. A ce sujet, je vous recommande la lecture d'un article émanant des milieux de la construction et publié dans l'organe de la Fédération immobilière. Interviewé, un spécialiste d'une fiduciaire a très bien expliqué le mécanisme du financement bancaire de ces opérations spéculatives à la fin des années 80, les banques ne sachant plus que faire de l'argent dont elles regorgeaient. Je ne lis pas régulièrement la prose de la Fédération immobilière, mais je dois dire que celle-ci est excellente et fort évocatrice !

Depuis quelques années, Noga Invest n'a plus un centime. Aprofim n'est pas en mesure de payer régulièrement ses employés. Elle est lourdement obérée, et il serait bon de faire le point de ses dettes, à l'office des poursuites. On maintient ces sociétés artificiellement en vie, les banques ne voulant pas assainir la situation.

Cette situation est extrêmement grave. Il nous intéresse vivement de connaître la réponse du département des travaux publics pour savoir si c'est l'Etat - ce qui serait énorme ! - qui a pris le relais de Noga Invest et de M. Gaon pour payer la suite des études sur ces terrains, et cela au profit de Noga Invest. Voilà où nous en sommes !

Ne parlons même plus d'information, le minimum du minimum, quoique nous aimerions savoir, par exemple, si l'Etat a récupéré la parcelle qu'il avait cédée, bien légèrement, en droit de superficie à Noga Invest. On nous avait dit que Sécheron SA n'avait pas construit d'usine fantomatique et que Noga Invest refusait de restituer ce terrain.

Où en est-on aujourd'hui ? J'ai constaté que le terrain était occupé par des voitures, j'ignore qui encaisse les loyers. L'ancien bâtiment qui devait être démoli ne l'est qu'à moitié. Bref, tout cela est pitoyable. L'Etat a-t-il au moins récupéré le terrain dont il est resté miraculeusement propriétaire, bien que l'ayant cédé en droit de superficie à Noga Invest ?

Un certain nombre de bâtiments sis sur ces terrains peuvent être réutilisés. D'ailleurs, M. Gaon, recourant à ses vantardises habituelles, avait déclaré devant le Conseil municipal : «Bof ! cela m'est égal si mon projet n'aboutit pas. J'utiliserai les bâtiments actuels.» Ces bâtiments ont, effectivement, une certaine valeur et pourraient être réemployés.

Aujourd'hui, il nous faut traiter la situation tout différemment. Monsieur Koechlin, et vous en êtes conscient, ce n'est pas votre pseudo fondation qui va faire quoi que ce soit, ni même le Conseil d'Etat. Ce sont les banques qui détiennent la clé de la solution et qui doivent prendre des mesures de transparence financière, quitte à faire mal à leur bilan. A mon avis, les tromperies, sur le plan financier, frisent actuellement le pénal. Les banques doivent prendre leurs responsabilités et assumer le «bouillon», comme elles l'ont fait dans d'autres cas !

Mme Alexandra Gobet (S), rapporteuse de minorité. J'ai pris acte de ce que pense le rapporteur de majorité quant aux aptitudes du Conseil d'Etat à mettre en oeuvre des plans d'aménagement. Je lui laisse la responsabilité de ses affirmations. Naïvement, je pensais que le gouvernement était encore en mesure de faire un plan d'aménagement, si on le lui demandait !

Quant à la fondation, je m'efforcerai d'être précise pour en démontrer l'inutilité. Une fondation doit avoir le pouvoir et pas seulement un cahier des charges. Or le pouvoir sur ces parcelles - même M. Lescaze l'a dit - est en main de propriétaires privés. C'est un obstacle majeur à l'efficacité d'une fondation. Alors lancez un concours d'architecture et dites que c'est pour la beauté du geste ! Quitte à me répéter, j'affirme qu'une fondation, pour être efficace, doit avoir le pouvoir sur les terrains. Il lui faut aussi des moyens. Qui les fournira à cette fondation ? Les collectivités publiques ? Estimons-nous n'avoir pas assez donné, politiquement ? Devons-nous accorder une rallonge financière pour satisfaire à votre petit dada ? La minorité refusera de donner un seul centime pour financer une fondation ayant pour but d'éluder la demande de la pétition.

Une fondation, toujours pour être efficace, doit avoir un projet politique. Or le projet politique se dessine ici et nulle part ailleurs ! Vous auriez beau réunir les meilleurs professionnels de la construction au sein d'une fondation, cette dernière ne pourra rien faire sans argent et sans pouvoir. C'est pourquoi cette proposition de fondation est un leurre.

J'aimerais aussi entendre la majorité en ce qui concerne la troisième demande de la pétition. Une fois de plus, vous passez dessus comme chat sur braise. Si le dossier est bloqué aujourd'hui, c'est en partie à cause de l'inaction des racheteurs de ABB-Sécheron et de l'imbroglio politico-financier de cette affaire. Sans parler des CFF qui ont fini par mettre une sourdine à leurs nombreux projets.

Je voudrais quand même que vous répondiez à la demande d'éclaircissements des pétitionnaires concernant la «paralysie» de leur quartier. Vous ne dites rien et c'est bien dommage ! Pour quelle raison le Conseil d'Etat ne répond-il pas ? Je tiens également à l'entendre !

M. Luc Gilly (AdG). Il va sans dire que j'appuie les propos de Mme Gobet et de M. Grobet.

J'invite M. Koechlin à relire les procès-verbaux dressés en commission, lors du débat sur la pétition 1073. Il a proposé de rédiger la motion en concertation avec les habitants. Il n'en a rien fait, et il le sait bien !

M. Michel Ducret (R). De nombreuses études ont été faites sur ce site de Sécheron. Elles n'ont pas abouti. Cette friche urbaine subsiste, alors qu'elle reste un site intéressant sur le plan industriel, sur celui d'activités plus générales et d'autres aménagements complémentaires.

C'est un projet politique honorable que de refuser que cette situation perdure !

Certes, des problèmes ont surgi entre la Ville, l'Etat et les propriétaires, mais ils doivent être résolus. Or je n'ai jamais entendu que l'on puisse modifier des affectations de zone, Madame Gobet, avant d'avoir étudié le problème, surtout lorsqu'on souhaite - et mon parti la souhaite aussi - une «multifonctionnalité» sur le site.

C'est dans un souci de concertation avec la Ville de Genève - dont la volonté de maintenir des activités sur son territoire ressort du désir légitime de s'assurer des revenus fiscaux suffisants - que nous suggérons la création d'une fondation pour gérer ce problème relativement complexe.

Vous savez que les activités d'aujourd'hui et de demain ne sont plus celles qui nécessitaient des implantations du type «monofonctionnel», donc une zone industrielle «pure et dure» telle que nous la connaissons à Sécheron.

Il nous faut aller de l'avant en réunissant autour d'une même table les différents acteurs intéressés au devenir de ce quartier. Il ne s'agit pas d'inviter exclusivement les représentants du monde politique, du canton et de la Ville, mais d'y convier aussi les représentants des propriétaires privés du secteur. Je ne vois pas en quoi cette suggestion serait émise pour détourner le débat, puisqu'une fondation ne pourra que faire des propositions aux autorités politiques, au Grand Conseil et au Conseil municipal. C'est à ce moment seulement que des décisions politiques pourront être prises sur la base d'études sérieuses.

A mon sens, cette fondation pourrait gérer, outre l'aménagement de cette zone, les réalisations qui pourraient s'y faire, à l'image des sociétés d'économie mixte françaises. Ce serait une forme nouvelle de gestion des zones de ce type à aménager dans notre canton.

Quant à la pétition fourre-tout - à l'origine de tous les refus de changements, traversée de la rade et autres - elle présente au moins l'avantage de demander un plan d'urbanisme. Cela nous paraît plus ambitieux, plus porteur d'avenir, que d'installer une station de mesures de la pollution ou de nommer une commission d'enquête. C'est le sens de notre motion, ce sera celui de notre vote de ce soir.

M. René Koechlin (L), rapporteur de majorité. Je ne reviendrai pas sur la tentative de coup bas de M. le député Grobet à propos de mes mandats. Il y a huit ans, j'ai effectivement fonctionné en qualité de conseil dans le quartier, cela pendant une année. J'affirme n'avoir reçu aucun mandat depuis et n'en attendre aucun à Sécheron.

En revanche, Monsieur Grobet, je vous sais friand, en tant qu'avocat, de mandats émanant d'associations de quartier et autres groupements d'habitants. J'espère, cependant, que vous ne comptez pas uniquement sur eux pour vivre...

Cette question étant évacuée, je dirai à Mme la rapporteuse de minorité que si l'on ne donne à une fondation ni pouvoir ni moyens elle risque fort d'être peu efficace. Aux Grottes, la fondation a été dotée de pouvoir et de moyens et, pour commencer, ceux de maîtriser le sol. Ce fut sa première mission, et elle l'a menée à terme avec succès. Les Grottes se trouvaient dans la même situation que Sécheron, avec un terrain majoritairement en mains privées. Il a fallu que la fondation acquière une quantité de terrains pour pouvoir réaliser le quartier tel qu'il est aujourd'hui. (L'orateur est interpellé par un député.) Monsieur, vous connaissez bien mal le cas des Grottes ! J'ai encore sous les yeux le découpage des propriétés publiques et des propriétés privées au moment où la fondation a été créée. Je puis vous assurer que le travail essentiel de M. Ducor, pendant les premières années, a été d'acquérir les terrains manquants, pour que l'on puisse enfin faire quelque chose de valable dans ce quartier. Par conséquent, ce type de mission pourrait parfaitement être confié à la fondation que nous appelons de nos voeux.

Vous parliez des banques. Nommez-moi l'interlocuteur des banques pour ce quartier ! Il n'existe pas ! Ce n'est pas l'Etat, pas la Ville, pas un privé quelconque : il n'y en a simplement pas ! C'est le vide total. Or, nous désirons «créer» cet interlocuteur qui, chaque fois qu'il s'agit de nos autorités, d'où qu'elles soient, se dérobe non seulement face aux banques et aux propriétaires, mais aussi au nom des habitants qui attendent d'avoir quelqu'un en face d'eux, avec qui ils puissent s'entretenir, quelqu'un qui tienne les promesses qu'il pourrait formuler.

M. Dominique Hausser (S). Je constate qu'au terme de quelque cinquante minutes de débat M. Koechlin exprime, à haute et intelligible voix, le rôle qu'il attribue à la fondation qu'il entend créer : celui d'acheter des terrains !

La première fois que j'ai entendu M. Koechlin, ce n'était pas à la commission de l'aménagement, mais à la commission des travaux. Le plan de la zone de Prieuré/Sécheron y était affiché. En le voyant, M. Koechlin s'est exclamé : «Ah ! pour résoudre ce problème, il faut créer une fondation.». Puis nous avons parlé d'autre chose. Il avait tenté d'expliquer que cette fondation aurait le rôle de celle du quartier des Grottes. Je suis désolé, l'histoire du quartier de Sécheron n'est pas celle de celui des Grottes. S'il est vrai que le développement des Grottes a connu des débuts chaotiques, je ne suis pas certain qu'à l'origine la fondation avait pour but d'aménager ce quartier dans l'intérêt de ses habitants. M. Grobet l'a dit tout à l'heure.

A l'ouverture des débats, M. Koechlin a dit qu'il fallait associer les habitants et rechercher leur collaboration. Or la troisième invite de la motion précise : «On doit les y associer dans la mesure du possible.»

M. Christian Grobet. Comme pour la rédaction de la motion !

M. Dominique Hausser. C'est une perversion du texte et du discours, puisque la formule «dans la mesure du possible» sous-entend que chaque fois que cela sera possible on n'associera pas les habitants.

J'entends maintenant soulever le troisième argument défendu ici par la plupart des membres de la majorité, à savoir l'étude des problèmes avant toute prise de décision politique ou technique. Vous vous moquez de nous ! Les problèmes du quartier sont connus et la solution, ne serait-ce que pour commencer à y remédier, est aussi connue : il faut assainir cette situation pourrie par l'imbroglio politico-financier cité tout à l'heure.

D'évidence, c'est ce que nous devons faire. Le parlement doit donner ce signal, et pour le donner, il doit renvoyer la pétition au Conseil d'Etat, afin qu'il réponde, en particulier, à la demande de transparence complète sur le dossier, ainsi qu'à la demande d'un plan d'urbanisme, en prenant les mesures nécessaires et en amenant les banques à ne plus faire de profit sur une société qui est déjà quasiment morte.

M. Pierre Meyll (AdG). En tant qu'ancien habitant des Grottes, je me souviens que, lors de la création de la FAG, beaucoup de problèmes étaient pendants à cause de terrains voués à la spéculation. De grands tracés d'urbanisme inséraient le quartier, que l'on voulait raser complètement, dans un triangle délimité par Fort-Barreau, la rue de la Servette et les voies CFF.

La FAG était intervenue dans ce sens, notamment en prenant position lors d'une votation populaire, ce qui était contraire à la démocratie, la FAG émanant de l'Etat. Et c'est à l'issue de nombreux débats contradictoires que l'APPAS fut fondée. L'APPAS ou Association populaire pour l'aménagement des Grottes était, elle, d'expression véritablement populaire. Je me rappelle encore les débats contradictoires qui ont eu lieu. Je me souviens que M. Segond - c'est bien dommage qu'il soit parti ! - avait participé à l'un d'eux. La FAG n'a pu agir face à l'opposition populaire qui s'était manifestée.

Par conséquent, Monsieur Koechlin, une fondation en la matière reviendrait à réitérer, quoique différemment, ce que nous avons connu aux Grottes. Je reste donc persuadé qu'il faut renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Le projet des Grottes était un mauvais projet. Je l'avais dit à mon parti présidé, à l'époque, par M. Milleret.

La situation de Sécheron/Prieuré est différente. Nous avons affaire à une loi que nous avons votée et selon laquelle nous avons accepté des échanges de terrains, du droit de superficie, etc., au prix de 6 000 F le m2 pour la parcelle du Foyer et au prix de 1 850 F le m2 pour la grande parcelle.

Le problème est d'ordre financier. Contrairement à ce qu'affirment certains, l'interlocuteur des banques existe : c'est une délégation du Conseil d'Etat. Nous avons rencontré dix fois, au moins, les représentants des banques. Il est difficile de trouver quelqu'un qui accepte d'assumer cette affaire.

Pourquoi ces dizaines de plans de quartier qui n'ont jamais abouti ? Parce qu'au départ des prix de 6 000 et 1 850 F précités, tout projet de rentabilité exagérée du terrain était vain et que les oppositions, les aller et retour entre la Ville et l'Etat, entre les promoteurs et leurs architectes, furent innombrables.

Notre dialogue avec les banques engagées - la BCG à raison de 46%, le Crédit Suisse et l'UBS à raison de 27% chacun - consiste à leur dire que l'endettement de cette parcelle est de 300 millions, soit 80 millions peut-être empruntés bien que libellés «fonds propres», 50 millions d'intérêts et le solde en capital. C'est tout simplement insupportable !

Le montant que nous estimons pour une solution financièrement viable est de l'ordre de 70 à 80 millions.

Le propriétaire du terrain - il l'est toujours, juridiquement parlant, bien qu'ayant des démêlés avec la justice - doit entamer des négociations avec les banques, négociations qui iront plus loin que celles portant sur les terrains de Sécheron et du Prieuré. A leur tour, les banques devront accepter nos propositions qui, elles, seront extrêmement arrêtées.

Pour repartir d'un bon pied dans cette affaire, nous devons, comme nous le disons en architecture, «faire terrain propre». Si la question du terrain n'est pas réglée, la meilleure des fondations ne pourra rien faire. Personnellement, j'espère obtenir un résultat avant le mois de décembre.

Nous avons des contacts avec le Conseil administratif de la Ville de Genève. J'ai en main une lettre au Conseil administratif, datant de fin juillet et répondant à un courrier de Mme Burnand. Elle propose de contribuer au règlement rapide du dossier en mettant sur pied un groupe de travail Etat/Ville. Au stade où nous en sommes, il est difficile de créer un groupe Etat/Ville et de propriétaires autrement que sous l'égide des organes politiques, les nombreuses décisions à prendre étant de nature essentiellement politique. Ces décisions concerneront le Grand Conseil et le Conseil municipal.

Nous avons ébauché notre propre organisation de travail en commun. Mais le préalable indispensable est l'accord entre les banques et le propriétaire.

Quelques problèmes annexes, concernant cette parcelle, sont encore en suspens. Nous avons récupéré le droit de superficie, ce qui rassurera M. Grobet, et nous avons effectivement placé des voitures sur le terrain. Nous prêtons ces voitures à l'OMC en vertu des accords que nous avons signés avec cette organisation qui exigeait un parking à «walking distance».

Nous avons renoncé à l'implantation d'un parking en sous-sol à proximité de l'usine existante. Nous la ferons en sous-sol, sur une surface de l'Etat, conformément à l'autorisation de l'OMC de changer l'emplacement initialement convenu contractuellement. Nonobstant l'opposition de la pétition «à tout projet d'implantation de nouveaux parkings destinés à gonfler davantage le trafic pendulaire», une servitude contractuelle existe concernant le parking de l'OMC.

Notre département et la Ville de Genève n'ont plus de prise sur le problème posé par le plan localisé de quartier pour la Maison de l'Europe, sise sur la parcelle du Foyer. Ce plan est pendant devant les tribunaux, les oppositions se sont manifestées, les recours vont être examinés au niveau intermédiaire; d'autres seront peut-être déposés.

Je reviendrai sur la contribution de 50 000 F de l'Etat pour terminer un travail que le maître d'ouvrage, comme l'a dit M. Grobet, n'était pas en mesure de payer. Il fallait absolument modifier les corrections déjà nécessitées par le gabarit, et qui ont fait précisément l'objet du recours. Ce montant est infime par rapport à celui des honoraires concernés.

J'en viens à la conservation des édifices. Le bâtiment administratif a belle allure, et il n'est pas exclu que le groupe Etat/Ville déclare qu'il mérite d'être conservé.

La notion de zone touche essentiellement la problématique des PUS. L'incertitude, en matière d'affectation des bâtiments, est si grande à Genève, et en Suisse en général, qu'il nous est difficile de promettre la création d'une zone industrielle de 12%, d'une zone d'habitation de 13%, d'une zone commerciale de 5%, etc. Il faut introduire la notion des PUS, telle que pratiquée dans la plupart des villes suisses, c'est-à-dire disposer d'une fourchette indiquant un minimum, quitte à l'infléchir quelque peu. Par exemple, il faut pouvoir adapter les PUS si un acquéreur veut prendre le risque de construire. La fondation que vous proposez ne pourra pas résoudre ce problème, en tout cas pas en l'état. Comme l'a dit un député, un programme d'intentions urbanistiques claires doit être établi pour que cette fondation voie le jour. Mais c'est aux politiques de décider s'ils sont d'accord ou non d'entrer dans ce genre de discussions.

La pétition demande «un plan d'urbanisme pour l'ensemble de la zone qui tienne pleinement compte des intérêts des habitants, des enfants et des jeunes des différentes écoles». Je ne puis m'y opposer et, à la limite, ce serait un pléonasme, car un PLQ doit précisément tenir compte de ces éléments. Je ne vois également pas d'objection à l'installation d'une station de mesures Ecotox. Croyez-moi sur parole et évitez de renvoyer la pétition au Conseil d'Etat !

Pour ce qui est de la transparence complète sur le dossier Sécheron/Noga, accordez-moi, je vous prie, un délai pour vous communiquer les résultats de la négociation sur le plan foncier. Actuellement, nous discutons avec un acquéreur potentiel qui serait d'accord de reprendre la totalité, mais pas au niveau des engagements bancaires. Je vous demande de patienter quelque peu, le temps que nous ayons réglé la question foncière.

S'opposer à «tout projet de nature à dégrader encore les conditions de vie dans le quartier» est tout à fait normal. On peut prétendre que la Maison de l'Europe dégrade les conditions de vie dans le quartier, mais je ne suis pas de cet avis, et c'est aux conseils qu'il appartient de réagir. Je répète que nous sommes obligés de construire le parking de l'OMC. Ce problème ne se serait pas posé si la traversée de la rade avait été acceptée, mais comme vous n'en avez pas voulu...

La motion entend promouvoir, en collaboration avec la Ville de Genève, l'aménagement coordonné du quartier en question. C'est exactement ce que je vous propose. Pour ma part, j'aurais remplacé le texte de la deuxième invite «à constituer l'organe qui - à l'instar de la FAG aux Grottes...» par «...à laisser la Ville et l'Etat proposer l'organisation ultérieure, une fois le programme de base défini, et à informer régulièrement le Grand Conseil et les habitants de l'état d'avancement des travaux».

Voilà ce que j'avais à dire à ce sujet.

M. Christian Grobet (AdG). Nous avons écouté les déclarations de M. le conseiller d'Etat Joye avec beaucoup d'intérêt. Elles nous ont partiellement rassurés, en tout cas par rapport aux propos tenus par la majorité de la commission. Nous sommes heureux que M. Joye ait remis l'église au milieu du village en rappelant que le premier problème à résoudre est celui du prix des terrains.

Monsieur Joye, vous avez fourni une indication intéressante en relevant que la valeur de ces terrains, pour réaliser une opération ayant des chances de réussir, ne devrait pas dépasser 70 à 80 millions de francs.

J'aimerais quand même rappeler ce secret de polichinelle : le montant de 80 millions était exactement le maximum considéré comme admissible par l'ancien conseiller d'Etat Robert Ducret dans le cadre d'une transaction financière portant sur les terrains de Sécheron. Huit ans plus tard, justice est rendue à ceux qui avaient refusé que l'on double la mise. Dans les faits, les terrains n'ont pas été vendus à 80 millions, mais en tout cas à 165 millions ! La vérité sera peut-être connue un jour !

Vous faites prudemment allusion, Monsieur Joye, à un montant de 80 millions de fonds propre, et promettez de tenir le Grand Conseil au courant - ce qui est naturel - de l'évolution de ce dossier qui a suscité beaucoup d'interrogations dans la population. La nature exacte de ces 80 millions de fonds propres sera donc définie dans votre rapport. Votre hypothèse qu'ils émanent d'un prêt sera certainement la bonne. En effet, je suis convaincu que non seulement Noga Invest n'a pas mis un sou sur la table mais a réussi le tour de force de se faire prêter un montant supérieur à celui nécessaire à l'achat des terrains. C'était l'époque où les banques prêtaient à 120%, et, dans cette affaire, je doute que cette pratique ait été abandonnée !

Nous notons avec satisfaction que vous ferez installer une station de mesures Ecotox dans le quartier. Cela justifie, à mon sens, que la pétition soit renvoyée au Conseil d'Etat. Vous pourrez ainsi faire votre rapport et nous rendre compte des résultats des négociations avec les banques, puisque, comme vous l'avez fort justement dit, rien ne se fera tant que la situation financière n'aurait pas été assainie et que ceux qui ont spéculé rendent gorge pour que l'on puisse enfin faire quelque chose de ces terrains.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Ce que j'ai dit à propos des fonds propres était en rapport avec ce qui se faisait à l'époque et qui ne se fait plus aujourd'hui. M. Ducret avait une juste vision des choses, mais il aura fallu une crise économique sans précédent pour que les gens raisonnent différemment.

Quel que soit le lieu où se trouvent les fonds, il faut savoir qu'ils ont été perdus en grande partie et que la punition que vous semblez demander s'appliquera d'elle-même. Ceux qui ont voulu faire une opération rentable dans cette affaire en sont pour leurs frais !

P 1073-A

Mises aux voix, les conclusions de la commission d'aménagement du canton (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.

M 1076

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

MOTION

concernant l'aménagement du quartier de Sécheron-Prieuré

LE GRAND CONSEIL,

considérant:

- la pétition 1073 concernant le secteur Sécheron-Prieuré, déposée le 7 juin 1995 par les habitants;

- la progressive désaffectation dont le quartier et plus particulièrement sa zone industrielle sont l'objet;

- les nuisances que subit ce dernier;

- les incertitudes qui pèsent sur le caractère et la destinée des activités à cet endroit, qu'elles soient liées ou non à une entreprise ou à un projet d'implantation;

- l'urgence que revêt la nécessité de trouver une solution à l'ensemble des problèmes qui se posent dans ce secteurs, du fait qu'il est habité, que ses habitants sont insatisfaits et que de nombreux et précieux terrains sont en friche,

invite le Conseil d'Etat

- à promouvoir, en collaboration avec la ville de Genève, l'aménagement coordonné du quartier en question;

- à constituer l'organe qui - à l'instar de la FAG aux Grottes - réunisse les compétences et les moyens de promouvoir l'urbanisation de tout le secteur dans un périmètre à définir,

- à informer régulièrement les habitants des démarches qui sont entreprises et à les y associer dans la mesure du possible.

L'argumentation contenue dans le rapport de majorité de la commission d'aménagement chargée d'étudier la pétition 1073 susmentionnée, offre les explications qui justifient la présente motion. Elle tient lieu d'exposé des motifs.

 

La séance est levée à 19 h 10.