République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7338-A
15. Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit complémentaire pour le bouclement du compte de l'extension de la maison de Loëx. ( -) PL7338
Mémorial 1995 : Projet, 6336. Commission, 6544.
Rapport de M. Claude Blanc (DC), commission des travaux

La commission des travaux, chargée d'étudier le fameux train de crédits de bouclement, s'est réunie le 30 avril 1996 pour examiner le projet de loi 7338, sous la présidence de M. Hervé Burdet, en présence de M. R. de Senarclens, adjoint à la direction des bâtiments, et M. Andrié, chef de la division des études et constructions.

Il s'agit donc de ce qui s'appelait alors la maison de Loëx, aujourd'hui hôpital de Loëx.

Le Grand Conseil avait voté en 1985 une loi ouvrant un crédit de 25 925 000 F. Le dépassement s'élève à 3 847 484 F, soit 14,8%.

Ce dépassement s'explique en grande partie par l'acceptation par le département des travaux publics en janvier 1988 d'un devis complémentaire de 3 389 000 F.

Vous trouverez en annexe le détail du coût des travaux non prévus au devis estimatif de novembre 1984 établi par les architectes en vue de la demande d'un crédit complémentaire. En ce qui concerne l'objet 1.1, il faut préciser que les architectes avaient cru comprendre que l'augmentation du volume à construire avait été demandée par la commission des travaux du Grand Conseil, ce qui n'était pas le cas. Les travaux supplémentaires ont été exécutés, le département des travaux publics ayant décidé de demander un crédit complémentaire au Grand Conseil en même temps que le crédit de construction de la 2e étape. Or, ce crédit n'a pas été demandé, la 2e étape ayant été abandonnée.

D'autre part, il faut relever que le pavillon du Lagnon, prévu dans le crédit initial pour une valeur de 1 051 700 F, n'a pas été exécuté, ce qui aggrave d'autant le dépassement de crédit sur l'ensemble. Il faut relever à ce sujet que les dépassements «expliqués» par l'indexation et les hausses payées s'élèvent à 1 896 849 F. La commission a estimé que l'on se trouvait là devant le schéma classique du mode de fonctionnement du département des travaux publics à cette époque; sur la base d'un crédit voté par le Grand Conseil, on remanie le projet, ajoutant ou retranchant au gré des demandes des uns et des autres. Elle relève que le 1er septembre 1989, les travaux étant presque terminés, on décide de présenter une demande de crédit supplémentaire, et que l'on ne l'a pas fait.

Certains députés estiment que cela est inacceptable et déclarent qu'ils ne voteront pas ce projet de loi.

La majorité de la commission juge toutefois que cela ne changera rien à rien, et animée d'une colère intérieure, elle vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, par 9 voix contre 2 (1 lib., 1 Ve) et 2 abstentions, (soc.) d'accepter ce projet.

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9Premier débat

M. Daniel Ducommun (R). Nous ne reviendrons pas sur notre déclaration critique. Il s'agit de traiter septante-cinq objets, totalisant environ 80 millions de dépassements, qui ne sont que la pointe de l'iceberg.

Nous demeurons inquiets quant à la suite de ces rapports, en raison des dépassements de crédit pour des grands travaux traités en marge de toute référence légale ou parlementaire.

Le fait que l'ancien président du département des travaux publics plaide coupable ne nous explique pas les mécanismes qui ont conduit à ces dérapages.

C'est pourquoi une partie de notre groupe s'abstiendra de voter le présent projet et s'en tiendra là tant qu'elle n'aura pas reçu les éclaircissements que la commission des travaux doit obtenir par toutes les voies dont elle dispose.

M. Chaïm Nissim (Ve). M. Koechlin et moi-même avons refusé ce projet en commission. Je ne peux parler des raisons de M. Koechlin, mais j'exprimerai les miennes et celles des Verts.

A l'issue de nos études à propos de ces septante-cinq dépassements de crédit, nous avons constaté deux ou trois faits évidents. Mon collègue Ducommun vient d'en décrire un, à savoir que la loi de 1966, en vigueur à l'époque, n'a pas été respectée par le Conseil d'Etat.

Aujourd'hui, nous ne pouvons pas accepter un projet illégal du fait qu'à l'époque le Conseil d'Etat n'a pas respecté la loi. Nombreux sont ceux qui ont utilisé ces dépassements et entendent continuer à le faire pour régler des comptes politiques et embêter une personne aujourd'hui député. Ce n'est pas mon intention. Je veux simplement que la loi soit respectée.

J'ai beaucoup de doutes quant à l'efficacité de la nouvelle loi, comme je l'ai dit à l'occasion d'un autre débat sur le même sujet. Preuve en est que M. Joye a déjà dépassé le crédit de 8 millions qui lui avait été attribué pour l'information sur la traversée de la rade.

D'autres possibilités existent pour contourner la loi et la seule façon pour nous, députés, de marquer le coup est de refuser systématiquement ces dépassements de crédit. Désormais, les Verts le feront pour placer le Conseil d'Etat actuel devant les contradictions résultant d'un système où le Grand Conseil n'est pas informé et est considéré comme une chambre d'enregistrement. Nous venons d'en avoir un excellent exemple avec les Services industriels. Une fiduciaire a rédigé un rapport et le Grand Conseil n'en a même pas été informé. Il n'est là que pour accepter, et le Conseil d'Etat fait ce qu'il veut.

Nous ne pouvons pas, nous écologistes, participer à ce jeu pipé.

M. René Koechlin (L). Ayant été interpellé par mon excellent collègue M. Nissim, je vais vous donner les raisons pour lesquelles j'ai voté contre ce projet de loi.

Il me paraissait devoir être classé parmi les projets que nous avons décidé de traiter de façon beaucoup plus approfondie, parce qu'ils révélaient un abus évident. Or certains commissaires ont estimé, compte tenu des montants relativement peu importants, que l'on pouvait passer outre et voter ce projet.

M. Blanc le dit en page 2 de son excellent rapport : un crédit d'environ 2 millions aurait dû être soumis au Grand Conseil. Il a été question de le présenter, puis, par commodité ou que sais-je, on ne l'a pas fait. Il s'agit là d'une faute grave et pas d'une erreur. C'est une volonté délibérée de déroger aux règles les plus élémentaires qui lient l'exécutif à ce parlement. J'ai trouvé que c'était suffisamment flagrant pour ne pas accepter de voter ce crédit de bouclement.

Voilà la raison de mon refus !

M. Dominique Hausser (S). Les socialistes se sont abstenus, parce qu'un crédit de bouclement clôt une affaire déjà réglée, et ce avant même que les projets y relatifs nous soient renvoyés.

Nous avons examiné septante-cinq projets de lois portant sur des crédits de bouclement. Plus de la moitié n'était pas en conformité avec la procédure à suivre.

Nous en avons voté un certain nombre, parfois à l'unanimité, parfois sous la pression de la majorité, alors même que nous supputions une erreur de procédure.

Lors d'un précédent rapport sur ces crédits de bouclement, M. Florian Barro a dit que la commission des travaux travaillait à modifier la loi sur la gestion administrative, dite D 1 9, afin de faciliter la communication entre le Conseil d'Etat et ce Grand Conseil, sachant que les principales décisions doivent être prises par le législateur et que le Conseil d'Etat n'est là que pour les concrétiser.

Il est évident que des demandes de crédits complémentaires ou des projets de lois visant à modifier des programmes présentent souvent un caractère d'urgence, alors qu'une procédure parlementaire dure de six à douze mois, quand cela se passe plus ou moins bien. Quand cela se passe mal, les projets restent dans le congélateur des commissions; certains y sont depuis 1987.

Le projet 7338 démontre un grave manquement à la procédure, raison pour laquelle les socialistes s'abstiendront. En revanche, ils insistent pour que la commission avance rapidement dans ses travaux devant aboutir à la modification de la loi sur la gestion administrative. Ils espèrent que ce parlement pourra se prononcer lors de la session de décembre, sinon lors de la session de janvier 1997.

M. Claude Blanc (PDC), rapporteur. Tout le monde motivant son opposition à ce projet de loi, je vous expliquerai pourquoi mon collègue Duvillard et moi-même l'acceptons. Je vais essayer de vous convaincre, sans beaucoup d'illusions d'ailleurs.

Si nous l'avons voté, c'est que nous avons relevé que le même mécanisme, que j'ai décrit dans un autre rapport, s'applique à tous les projets qui nous ont été présentés. Nous pouvons en penser ce que nous voulons, mais les dépenses étant faites, nous sommes bien obligés de les entériner.

Par contre, la commission des travaux a décidé de traiter différemment les cinq projets restants qui accusent également des dépassements importants. Elle a demandé, n'étant pas elle-même en mesure de le faire, une analyse financière et technique approfondie, de façon à savoir si d'autres processus sont en route, parallèlement au mécanisme dont je viens de parler.

C'est là le véritable enjeu. Nous avons voté dix projets découlant de ce même mécanisme. Nous l'avons condamné, nous le condamnons toujours, mais il faut en finir.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Tout d'abord, je réponds à M. Nissim. Un représentant de son parti se trouve aux Services industriels, qui n'est autre que M. Alain Vaissade. Celui-ci est au courant de toutes les discussions qui ont eu lieu, du rapport Ofor, etc. Je lui recommande de se renseigner auprès de lui.

Je suis de l'avis de M. Blanc en ce qui concerne le travail. J'irai plus loin en disant que c'est un travail au cours duquel on a joué, de manière très théorique, avec les indexations et les hausses, comme cela se faisait à l'époque.

Nous avons complètement changé de méthode. Nous n'accordons plus systématiquement une hausse de x% sous prétexte que l'année est passée, si nous ne détenons pas la preuve de sa nécessité pour l'entreprise. Cela représente des milliers, voire des millions de francs par objet, et c'est à ces coûts que nous nous attachons.

Vous relevez un dépassement de 8 millions au budget de publicité pour la traversée de la rade; vous vous trompez : il s'agit de 800 000 F. Inversement et dans le même temps, nous avons économisé 84 millions en contrôlant à la source les projets tant sur le plan du programme que du point de vue architectural. Nous avons ainsi décelé les devis surestimés de certaines corporations, qui entendaient être payées lors du bouclement de l'avant-projet. Entre leur évaluation et la réalité de la soumission, la différence était parfois de 100%.

Il est évident que je ne paie pas ces gens sur la base de leur devis estimatif erroné. Je n'ai pas besoin d'eux si je constate un écart de 100%. Je paie selon la valeur du soumissionnaire moyen.

Les choses changent. En commission, vous pourrez auditionner M. Cheminat, le «monsieur Soumission» à qui je confie les études chaque fois que j'ai un doute ou un problème.

C'est ainsi qu'à l'issue de trois rencontres nous avons économisé 12 millions dans l'affaire des tunnels et des équipements électromécaniques de l'autoroute. Cela est significatif.

Toute récemment encore, je me suis vu proposer 159 MW d'éclairage pour 1 100 m d'autoroute hors tunnel. Je vous donne à penser à ce que cela représente en mètres linéaires ! On a cité la norme de 28 m d'espacement de la Schweizerische Lichtsgesellschaft, que je préside, mais on a oublié de préciser qu'elle n'est valable que s'il y a tant de facteurs d'éblouissement, tant de facteurs de répartition de la lumière, et que l'on peut prévoir des espacements de 40 m si l'on tient compte d'autres facteurs. C'est dire que les normes sont souvent employées à mauvais escient et qu'il faut y veiller.

C'est ce que nous faisons et je puis vous assurer que les résultats sont positifs.

M. Bernard Annen (L). Je ne voterai pas ce projet pour une raison bien simple. Il y a un dysfonctionnement évident entre la demande de crédit et la réalité des faits. Un projet n'a pas à être accepté parce qu'un dépassement est signalé en fin de travaux, mais parce qu'il tient compte du crédit accordé par ce Grand Conseil.

Je ne cherche pas un bouc émissaire. A mon avis, ce n'est pas uniquement l'ancien chef du département qui doit être...

Une voix. Pendu !

M. Bernard Annen. Si vous voulez, cher collègue; je préfère «fustigé» ! ...mais l'ensemble du Conseil d'Etat. Si le programme a changé - les entreprises ne doivent pas être mises au pilori ! - c'est l'Etat qui est responsable de sa modification. L'ampleur des dépassements que nous devons accepter n'est pas due à une seule personne, mais également au département utilisateur.

Si le Conseil d'Etat entend modifier le programme de base et qu'il dépasse, de manière substantielle, ce que le Grand Conseil a demandé, ce n'est pas le président du département des travaux publics, l'ancien ou l'actuel, qui doit en être rendu responsable, mais l'ensemble du Conseil d'Etat qui est en dernier ressort solidairement responsable.

Pour les raisons évoquées par MM. Koechlin et Ducommun, je ne voterai pas ce projet de loi. Charge à ceux qui l'acceptent de prendre leurs responsabilités.

M. Claude Blanc (PDC), rapporteur. Cela m'étonnerait que le Conseil d'Etat ait eu l'occasion de se prononcer sur toutes les modifications intervenues au programme en cours de route. Ce sont des changements qui interviennent au fur et à mesure de l'avancement des travaux.

Dans le cadre du crédit, le Conseil d'Etat n'en prend connaissance qu'à la fin. Par conséquent, Monsieur Annen, je trouve que vous exagérez. Cela étant, si vous prenez ce prétexte pour ne pas voter le crédit, vous êtes libre, mais je pense que chacun doit prendre ses responsabilités.

Cet argent a été dépensé. Nous allons régulariser la situation, mais je répète que les cinq projets restants à la commission des travaux ont fait l'objet d'une analyse approfondie. Nous attendrons d'en connaître les résultats avant de nous prononcer.

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

(PL 7338)

LOI

ouvrant un crédit complémentaire pour le bouclement du comptede l'extension de la maison de Loëx

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Crédit complémentaire

Un crédit complémentaire de 3 847 484 F est ouvert au Conseil d'Etat pour couvrir le dépassement du compte de l'extension de la maison de Loëx.

Art. 2

Financement complémentaireà l'emprunt

Le financement complémentaire par rapport au montant voté, soit 3 847 484 F, sera assuré par le recours à l'emprunt.

Art. 3

Loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique, du 11 janvier 1964.