République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7321-A
7. a) Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit complémentaire pour le bouclement du compte de construction pour l'extension de l'école de commerce de Saint-Jean. ( -) PL7321
Mémorial 1995 : Projet, 6334. Commission, 6544.
Rapport de M. Florian Barro (L), commission des travaux
PL 7327-A
b) Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit complémentaire pour le bouclement du compte de construction pour l'extension de l'école des arts décoratifs et de dépôts et d'ateliers pour le service des loisirs de la jeunesse. ( -) PL7327
Mémorial 1995 : Projet, 6335. Commission, 6544.
Rapport de M. Florian Barro (L), commission des travaux
PL 7336-A
c) Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit complémentaire pour le bouclement du compte pour la construction d'une pension et de logements pour personnes âgées à la Jonction. ( -) PL7336
Mémorial 1995 : Projet, 6336. Commission, 6544.
Rapport de M. Claude Blanc (DC), commission des travaux

(PL 7321)

La commission des travaux du canton sous la présidence de M. Hervé Burdet a étudié ce projet de loi au cours de la séance du 26 mars 1996.

Assistaient également aux travaux: MM. F. Reinhard directeur des bâtiments, R. de Senarclens adjoint à la direction des bâtiments et E. Bieler directeur du service technique en matière de bâtiments et locaux scolaires.

Selon l'exposé des motifs, le projet de loi demande l'octroi d'un crédit complémentaire de 1 646 803 F pour couvrir des dépenses non prévues au devis général telles la réfection de l'étanchéité de la terrasse, le remplacement de diverses conduites de chauffage et sanitaires et la remise en état de locaux sanitaires. Ces travaux ont été engagés sans l'aval du Grand Conseil. Il est expliqué que ces travaux revêtaient un caractère d'urgence, ne pouvaient souffrir d'aucun retard et que la pause estivale était le moment propice pour leur exécution.

Le département n'a pas jugé utile de déposer un projet de loi de crédit complémentaire préalablement aux travaux, quand bien même le problème de l'étanchéité était lancinant. De plus, le département n'a jugé utile non plus de déposer ce projet de loi à la fin des travaux d'urgence. C'est chose faite aujourd'hui, quelques 10 ans après. Ce qui a permis à la commission de relever différents critères d'appréciation du caractère d'urgence. En effet, la commission ne peut pas reprocher au département d'avoir mis en oeuvre toutes les mesures urgentes de préservation du bâtiment, mais par contre n'accepte pas que celui-ci n'ait respecté la loi «en urgence»...

Il a été également évoqué, pour des travaux qui relèvent dans un certain sens de l'entretien, d'avoir recours aux crédits affectés à celui-ci. Il n'est pas raisonnable de financer par l'investissement des travaux qui aurait pu ou du, pour tout ou partie, passer par le compte de fonctionnement. Le département nous a informé que les crédits alloués à l'entretien (25-26 millions par an) ne permettaient a priori pas d'absorber de telles dépenses sans une prévision budgétaire préalable.

Tout en manifestant son mécontentement pour la manière dont le département a (mal)traité le Grand Conseil, la commission a voté l'entrée en matière et le projet de loi à l'unanimité de ses 13 membres présents (3 adg - 4 lib - 2 pdc - 1 rad - 2 soc - 1 v). Elle vous recommande donc, Mesdames et Messieurs les députés d'en faire de même.

(PL 7327)

La commission des travaux du canton sous la présidence de M. Hervé Burdet a étudié ce projet de loi au cours de la séance du 26 mars 1996.

Assistaient également aux travaux: MM. F. Reinhard directeur des bâtiments, R. de Senarclens adjoint à la direction des bâtiments et E. Bieler directeur du service technique en matière de bâtiments et locaux scolaires.

Selon l'exposé des motifs, le projet de loi demande l'octroi d'un crédit complémentaire de 797 323 F pour couvrir des dépenses liées aux modifications et améliorations de projet intervenues avant et au début du chantier (dispositions statiques prévisionnelles pour l'aménagement d'une3e voie CFF, transformations de salles, escalier supplémentaire, arrêt de chantier...).

Le département n'a pas déposé de projet de loi de crédit complémentaire préalablement aux travaux. Pourtant, certains d'entre eux faisaient l'objet d'une nouvelle requête en autorisation de construire, permettant l'instruction concomitante d'un projet de loi de crédit complémentaire.

Tout comme le projet de loi 7321, la commission estime que le département devait respecter les dispositions de la loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique du 11 janvier 1964 (D 3 17), en vigueur à l'époque, qui prévoyait à l'article 5 alinéa 4:

4 Si après le vote du crédit d'exécution, un projet subit une transformation importante entraînant une dépense supérieure au montant voté, celle-ci ne peut être engagée qu'après l'octroi par le Grand Conseil d'un crédit complémentaire, demandé dans les formes prévues au présent article.

Cette disposition est éloquente et suffit à démontrer que, malgré les excellentes justifications et explications fournies, le département des travaux publics ne se croyait pas du tout obligé envers le Grand Conseil. Aux yeux de certains commissaires, voilà une curieuse pratique du respect des valeurs démocratiques et de la loi.

Tout en étudiant, en collaboration avec le département, des solutions pour éviter, à l'avenir, la répétition de tels projets de loi, la commission a voté l'entrée en matière et le projet de loi à l'unanimité de ses 13 membres présents (3 adg - 4 lib - 2 pdc - 1 rad - 2 soc - 1 v). Elle vous recommande donc, mesdames et messieurs les députés de voter ce projet de loi.

(PL 7336)

La commission des travaux, chargée d'étudier le fameux train des crédits de bouclement s'est réunie le 16 avril 1996 pour examiner le projet de loi 7336, sous la présidence de M. Hervé Burdet, en présence de M. R. de Senarclens, adjoint à la direction des bâtiments, et de M. André Rivoire qui fut l'architecte de cette réalisation.

Il s'agit donc de la résidence des Arénières et de la loi de 1981 ouvrant un crédit de 11 316 000 F. Le dépassement s'élève à 1 439 041 F, soit 12,7%.

Il est précisé que le bâtiment a été construit par l'Etat et remis à la Fondation La Vespérale.

M. Rivoire, architecte, déclare que le dépassement ne lui incombe pas, car l'exécution des travaux pour lesquels il avait été mandaté s'est soldée par un dépassement minime de 27 350 F.

Le problème, c'est qu'en cours de route le directeur des Arénières a demandé des travaux supplémentaires dans le but, en soi louable, d'augmenter la capacité d'hébergement de la maison.

M. Grobet a commencé par lui répondre le 1er juin 1987 que cela n'était pas possible, vu que le crédit de construction était épuisé. Cependant, on est étonné de voir apparaître plus tard, dans le dossier, une lettre du chef du département de la prévoyance sociale et de la santé remerciant son cher collègue des travaux publics d'avoir accepté les travaux supplémentaires.

On en est donc une fois de plus au schéma habituel des années Grobet. On fait voter un crédit au Grand Conseil, on commence les travaux, on change d'avis, on décide d'apporter des modifications, qui sont souvent d'ailleurs des améliorations, et on se moque du parlement, à qui on fera présenter l'addition par son successeur dix ans plus tard.

Et ce n'est même pas tout. On a encore agrandi le restaurant. Mais cela, on n'a pas osé l'ajouter au crédit de construction, on a quand même des scrupules. Alors, on l'a pris dans le compte entretien et transformations à disposition du département. Tout simplement.

La maison est construite. Elle fonctionne, semble-t-il, à satisfaction. Les factures sont payées. Il ne reste qu'à régulariser la situation. Bafoué, mais impuissant, le parlement n'a plus qu'à s'exécuter. C'est ce que la commission vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, par 10 voix et2 abstentions (socialistes).

Premier débat

M. Florian Barro (L), rapporteur. Mon rapport ne précise pas que le projet de loi 7321 a ouvert un crédit, sous le N° 5702, de 7 288 000 F au Conseil d'Etat. Ce projet a été voté en 1985. En revanche, l'exposé des motifs rappelle que le dépassement représente 22,6%.

Il nous a été dit que l'architecte avait rigoureusement respecté ses engagements et que les travaux supplémentaires avaient été ordonnés par le département.

De multiples dérapages et le non-respect de la loi, parfois cumulés, ont stigmatisé les dépassements de ce projet et des deux autres. Comme évoqué en commission, les utilisateurs obtenaient des prestations exagérées et n'avaient aucune raison de se gêner pour demander des compléments. Certains mandataires n'ont pas tiré la sonnette d'alarme quand ils auraient pu et dû le faire. Le département, connaissant le dépassement des montants votés, parce qu'additionnant devis et commandes, n'a pas demandé de crédits complémentaires. Le conseiller d'Etat en charge, à l'époque, du DTP ne maîtrisait pas ses services et ordonnait l'engagement de travaux sans s'assurer de leur couverture financière. De même, le Conseil d'Etat n'a pas ordonné au DTP de faire son ménage et le Grand Conseil n'a pas réclamé, avec suffisamment de virulence et de détermination, l'état de la situation.

Alors, qui est responsable ? M. Grobet, comme le dit mon collègue Blanc dans son rapport ? Ou est-ce la faute à personne ou à pas de chance ?

Il est indéniable que le département, de par sa mission, avait la gestion de l'encadrement des crédits et qu'il ne devait pas engager plus que ce qui lui avait été alloué, sous réserve des dispositions de la loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique. Dans ce cas précis, il a failli, peut-être pour faire plaisir aux utilisateurs, ou aux entreprises et mandataires, ou encore aux porteurs de parapluie de l'Aula les jours de pluie ! Qui sait ?

Si vous vous sentez floués, bafoués, humiliés, maltraités, ridiculisés, octroyez-vous les moyens de contrôle pour que cela ne se reproduise plus.

Dans ce contexte, la commission des travaux et le département vous proposeront, prochainement, certaines adaptations de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, ainsi qu'une information sur les directives internes du DTP.

Dans la foulée, le Grand Conseil devra prendre ses responsabilités s'il veut accroître ses moyens de contrôle.

Pour en revenir au projet 7321, nous devons, par cet acte législatif, tirer un trait sur le passé et utiliser cette expérience pour l'avenir.

M. Daniel Ducommun (R). Ce projet suscite les plus vives inquiétudes du parti radical, tout comme les deux autres que j'associe dans mes commentaires, puisque nous avons convenu de les traiter ensemble.

Ces trois rapports concernent des dépassements de crédits totalisant plus de 85 millions pour une centaine de dossiers déposés par le Conseil d'Etat, en novembre 1995, et cela sans tenir compte des dossiers pas encore bouclés, comme ceux du Bachet-de-Pesay ou de la halle 7 de Palexpo.

Notre parlement est appelé à revivre la grande légende du nettoyage des écuries d'Augias par Héraclès qui y fit passer un fleuve, car, aujourd'hui, d'autres écuries devront être récurées à grande eau !

Nous remercions les rapporteurs de leur franchise et de leurs conclusions éloignées de toute complaisance. Si le devoir de réserve nous interdit, pour l'heure, d'impliquer quiconque d'abus de biens publics, il n'en reste pas moins que le terme de négligence peut être utilisé pour le ou les responsables des travaux publics de l'époque concernée.

Il n'est, en effet, pas acceptable que... (Intervention de M. Christian Ferrazino.) Ferrazino, taisez-vous, vous étiez dans le fleuve, avec Augias... (Rires.) Vous y étiez nu-pieds, vous êtes donc bien mal placé pour intervenir maintenant ! Il n'est pas acceptable que la plupart de ces projets de lois n'aient pas été bouclés, alors que les ouvrages ou les prestations d'étude sont achevés depuis plusieurs années. L'Asloca devrait aussi s'occuper de cela ! De plus, les changements de programme, en cours de travaux, relèvent d'une légèreté coupable de gestion.

Plus grave encore, Monsieur Ferrazino, est la violation de la loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique, laquelle... (Interruption de M. Christian Ferrazino.) Vous avez fait dix ans de droit, mais vous faites tout le reste de travers, Monsieur Ferrazino ! Aussi vais-je vous rappeler la teneur de l'article 5 de la loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique. Encore une chance pour les responsables de vivre en Suisse, car s'ils vivaient en France savez-vous où ils seraient à présent ? On irait leur apporter des oranges ! Maintenant, je vous lis cet article 5 : «Si après le vote du crédit d'exécution un projet subit une transformation importante entraînant une dépense supérieure au montant voté, celle-ci ne peut être engagée qu'après l'octroi, par le Grand Conseil, d'un crédit complémentaire demandé dans les formes prévues au présent article.» Voilà ! (Rires.) On se marre avec la loi, hein ? C'est le jeu de l'oie !

A notre grand soulagement, Monsieur Ferrazino, la nouvelle loi des finances supprimera ce type de situation.

Compte tenu des réserves et des inquiétudes dont je viens de vous faire part, notre groupe s'abstiendra lors du vote. Pour les «casseroles» à venir, il n'est pas sûr que son humeur sera aussi pondérée !

Mme Sylvie Châtelain (S). Je n'ai rien de particulier à ajouter au sujet des deux premiers projets. En revanche, j'interviendrai au sujet du projet 7336 concernant le bouclement de crédit pour la construction d'une pension et de logements pour personnes âgées, à la Jonction. Pour ce faire, j'aimerais sortir du cadre, pour le moins réducteur, dans lequel M. Blanc a placé son rapport.

Les commissaires socialistes avaient clairement expliqué leur position en commission, et je vais donc revenir sur quelques points qui ont échappé à la plume du rapporteur.

De nombreux dépassements de crédits dans le train de bouclement, actuellement à l'examen en commission des travaux, sont dus à une sous-estimation ou à une augmentation des coûts, à une adaptation de ceux-ci au renchérissement ou encore à des modifications d'orientation en cours de chantier. Dans bien des cas, il aurait été préférable que ces hausses de coût fussent soumises à l'approbation du Grand Conseil, par le biais de demandes de crédits complémentaires de la part du Conseil d'Etat.

Or la situation est très différente dans le cas de la résidence des Arénières, à la Jonction. En effet, le dépassement de crédit est dû, pour sa presque totalité, à des transformations entreprises en 1987, soit bien après la clôture du chantier et alors que la maison était déjà occupée depuis deux ans. Les utilisateurs ont souhaité, à ce moment, augmenter le nombre de chambres de la résidence, en supprimant notamment une infirmerie peu appropriée.

A l'évidence, ces transformations effectuées après la fin du chantier auraient dû faire l'objet, de la part du Conseil d'Etat, d'une demande de nouveaux crédits.

Plus tard encore, au début des années 90, il fut procédé à l'agrandissement du restaurant. Les montants nécessaires à l'exécution de ces nouveaux travaux ont été prélevés dans le poste du budget affecté à l'entretien et à la transformation des bâtiments de l'Etat, et cela pour ne pas gonfler encore plus le dépassement qui atteignait près de 13% du crédit voté par le Grand Conseil en 1981 !

A l'évidence, une seconde fois, ces travaux auraient dû faire l'objet, par le Conseil d'Etat, d'une demande de nouveaux crédits.

C'est donc pour ces motifs que les commissaires socialistes se sont abstenus, lors du vote en commission, sur ce bouclement de crédit.

M. René Koechlin (L). Je serai moins lyrique que M. Ducommun, mais non moins avide de rigueur.

Ces trois projets de lois de bouclement sont révélateurs d'une pratique illicite qui confirme la multiplicité d'autres projets semblables, dont certains portent sur des montants beaucoup plus importants. Nous aurons l'occasion d'y revenir, lors des prochaines sessions de ce Grand Conseil.

Je dis que cette pratique est illicite, parce qu'elle consiste à engager une dépense découlant d'une transformation importante d'un projet de construction, sans avoir obtenu préalablement du Grand Conseil le crédit complémentaire correspondant.

Cette distorsion, comme le rappelle le rapporteur du projet de loi 7327, est une violation de l'article 5, alinéa 4, de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat. Ça l'était dans sa formulation alors en vigueur; ça l'est dans son actuelle mouture qui ne fait que renforcer le principe qu'elle défend.

Or, en matière de construction, il appartient au département des travaux publics, et à lui seul, sous la haute responsabilité du conseiller d'Etat qui en a la charge, de diriger, de superviser l'exécution des travaux et de gérer le budget qui lui est alloué. A cet égard, je ne partage pas totalement les propos et l'avis, relativement édulcorés, émis par le rapporteur de première majorité, mon très cher collègue et ami Barro.

C'est dans l'exercice de cette tâche essentielle - car nécessaire à la saine gestion des deniers publics - c'est dans l'accomplissement de cette mission cardinale - même si elle ne l'est pas pour tous - dévolue à sa fonction, que M. Grobet, alors chef du département des travaux publics, a constamment, systématiquement et délibérément failli.

On ne peut se retrancher derrière les désirs ou les demandes d'utilisateurs, puisqu'il appartient précisément au département chargé de la gestion budgétaire des opérations de construction de mettre un holà à ces demandes.

Si la commission des travaux a finalement voté ces trois projets de lois, c'est parce que, contrairement aux nombreux autres qui suivront, ils bénéficient de circonstances atténuantes.

Premièrement, ils portent sur des montants relativement modestes, si l'on en déduit, de surcroît, l'indexation et les hausses.

Deuxièmement, certains des travaux en question consistent en des réfections urgentes d'étanchéité, d'installations sanitaires et de chauffage, dont l'exécution ne pouvait être différée ni attendre l'octroi d'un crédit complémentaire.

Troisièmement, ces travaux, ainsi que d'autres modifications, s'inscrivirent d'abord dans le crédit d'entretien courant et de transformation, dont dispose le département, avant de figurer, en fin de compte, à charge du crédit de bouclement soumis au Grand Conseil.

Mais explication n'est pas raison ! Et si la commission des travaux vous invite, ce soir, à voter ces trois projets de lois - et je souscris à cette proposition - c'est que les distorsions et les montants qu'ils impliquent sont d'une faible ampleur en regard d'autres projets, dont cette commission vous saisira au cours du prochain semestre.

Mme Evelyne Strubin. Accélérons, accélérons !

M. Christian Ferrazino. Concluez !

M. René Koechlin. Pour ces motifs, les députés du groupe libéral tantôt voteront ces projets de lois tantôt s'abstiendront, afin de marquer leur désapprobation mêlée de l'amertume qu'éprouve quiconque lorsqu'il est placé devant le fait accompli. Les factures relatives aux dépassements en question sont, en effet, payées depuis belle lurette, ce qui démontre, si besoin est, le peu de cas que faisait M. Grobet - j'ignore s'il le fait encore - du parlement et de l'obligation qu'il avait, en tant que conseiller d'Etat, de lui faire approuver tous les projets complémentaires.

Dans les cas qui nous occupent ce soir, il bénéficie, comme je l'ai dit, de circonstances atténuantes, mais dans maints autres cas, hélas, je crains qu'il ne doive plaider coupable, sans la moindre explication.

M. Chaïm Nissim (Ve). Il ressort des rapports de majorité que la commission des travaux a voté ces projets ou s'est abstenue.

En effet, le débat doit concerner des projets plus importants, notamment celui de la halle de fret.

Les membres de la commission des travaux et les membres de tous les partis s'étant exprimés, je vous indique ma position et celle de mon groupe.

Il est manifeste que la loi a été violée par l'administration, le Conseil d'Etat et les fonctionnaires. Après que M. Ducommun lui eut lu l'article 5, alinéa 4, de la loi, M. Ferrazino lui a demandé de lui lire également l'alinéa 5, ce que je vais faire : «Si l'exécution des travaux, tels qu'ils ont été étudiés avant la demande d'ouverture de crédit, rend indispensable une dépense supérieure au montant voté, le dépassement fait l'objet, au moment de l'achèvement des travaux - et pas dix ans après - d'une demande complémentaire au Grand Conseil, dans les formes prévues au présent article.»

La commission a reconnu, à l'unanimité, que la loi avait été violée; je ne suis pas certain qu'elle l'ait été par M. Grobet personnellement, et c'est là où je veux en venir.

Des conseillers d'Etat et toute une bande de fonctionnaires s'occupaient de la gestion de ces crédits. Les fonctionnaires ont déclaré en commission qu'ils étaient dépassés par les événements, parce que pas assez nombreux. C'était l'époque de la croissance, de la vache folle dont M. Lorenzini a parlé. C'était l'époque où nous votions 400 millions d'investissements par an, et où il n'y avait pas de capitaine à la barre du bateau. Personne ne savait piloter; personne ne savait gérer ces crédits et l'argent filait... Qui demandait une salle «d'op», qui demandait une mezzanine, etc., en recevait ! C'est ainsi que les dépassements de crédits ont atteint les 100 millions en dix ans.

L'Entente nous dit, et M. Ducommun vient de le répéter, qu'avec la nouvelle loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat ces faits ne pourront plus se produire. Malheureusement, je ne peux pas vous suivre, Monsieur Ducommun. Voyez ce que vient de faire M. Joye avec la traversée de la rade : il a dépassé le crédit de 8 millions voté pour l'information, reconnaissant, en commission, qu'il en était déjà à 10,5 millions, soit approximativement 28% de dépassement. C'est dire que la nouvelle loi sur la gestion administrative ne résout pas tout. M. Barro a annoncé des amendements pour l'améliorer, mais je ne pense pas que cela suffira.

Ma première idée était la création d'une instance qui, à l'exemple de la Cour suprême des Etats-Unis, serait chargée de sanctionner le Conseil d'Etat quand il ne respecte pas la loi, mais M. Blanc m'a dit, à la buvette, qu'il n'est pas forcément sain, en démocratie, qu'une instance juridique sanctionne une instance politique. Je peux vous entendre, Monsieur Blanc, et mon idée n'était peut-être pas bonne.

Mais, dès lors, que proposer à ce Grand Conseil pour que de tels faits ne se reproduisent pas ?

La première chose à faire est d'essayer de comprendre, et je puis vous assurer, Mesdames et Messieurs les députés, que nous sommes loin d'avoir tout compris! Exemple : pourquoi ces crédits complémentaires n'ont-ils pas été connus à temps ? Nous avons posé plusieurs questions en commission, nous nous sommes interrogés pour finalement retenir l'idée de l'interview.

En effet, pourquoi ne pas interviewer les conseillers d'Etat Grobet et Maitre qui se sont occupés de la halle de fret qui accuse un dépassement de 30 millions, le deuxième en importance après celui du Bachet-de-Pesay qui, lui, culmine à 50 millions. On nous a donné lecture d'une lettre de M. Grobet à M. Maitre disant à peu près ceci : «Attention, il faudra demander un crédit complémentaire, car nous sommes en train de dépasser les crédits de beaucoup - 17 millions à l'époque ! - je ne peux pas continuer ainsi, il nous faut retourner devant le Grand Conseil.» Nous ne connaissons pas la réponse de M. Maitre, mais, deux ans plus tard, il remerciait M. Grobet d'avoir signé l'autorisation d'ouvrir un crédit complémentaire de 30 millions. Nous ignorons ce qui s'est écrit entre-temps, et c'est pourquoi nous aimerions interviewer les principaux protagonistes. M. Meyll nous a dit - et je voudrais savoir si c'est vrai, Monsieur Maitre - que M. Grobet avait accepté d'ouvrir ce crédit complémentaire, en dépit de votre désaccord.

M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. On ne m'a rien demandé !

M. Chaïm Nissim. Alors, je propose que nous interviewions M. Maitre et M. Grobet sur ce courrier manquant, afin de savoir qui, en définitive, a signé. (Interruption de M. Koechlin.) C'est un autre projet, certes, mais il importe, alors que nous faisons le point devant le public et les journalistes, que nous disions tout ce que nous avons sur le coeur. Il faut que la commission dispose d'informations pour bien fonctionner.

Je vous présente une deuxième suggestion : ne serait-il pas opportun de tester le bon fonctionnement de la commission de contrôle des politiques publiques en la saisissant du projet de la halle de fret, par exemple ? La commission des finances peut la mandater, paraît-il. Il serait intéressant de savoir où ont filé tous ces millions !

M. Claude Blanc (PDC), rapporteur. Il me semble que ce débat dérape quelque peu !

Tout d'abord, je remercie Mme Châtelain qui, après avoir traité mon rapport de réducteur, en a fait une excellente synthèse sans rien y ajouter, preuve que j'y avais mis tout ce que j'avais à dire. Sans nous être concertés, M. Barro et moi-même, nous nous apercevons que nos deux rapports se ressemblent, et vous verrez que ceux qui suivront se recouperont aussi, car, malheureusement, le schéma est toujours le même.

Il n'est pas question de faire la chasse aux sorcières, mais, après bientôt quarante ans de vie politique, je ne me fais plus beaucoup d'illusions sur l'estime dans laquelle les gouvernants tiennent les parlementaires. Toutefois, il me semble que, ce soir, on a dépassé ce que je n'osais pas imaginer ! D'ailleurs, je dis dans mon rapport que les causes de ces dépassements suivent toujours le même schéma.

En effet, on construit sans prévoir que, en cours de route, des éléments nouveaux viendront se greffer, surtout si l'on tient compte de l'avis de ceux qui utiliseront les locaux. Sur le fond, on peut comprendre que les maîtres du chantier tiennent compte de l'avis des utilisateurs et fassent ce qu'ils demandent. Mais il ne faut pas oublier - et c'est là le drame du système parlementaire - qu'il appartient au parlement de décider de l'octroi des crédits et que personne ne peut passer outre la volonté de ce dernier sous le seul prétexte que ce qu'il va faire est mieux que ce qui a été voté. Je suis attristé, car tous les projets qui seront soumis à ce parlement sont de la même eau !

D'abord, on se moque du parlement et, ensuite, en toute bonne conscience, on lui fait entériner ces dépassements. Enfin, je suppose que c'est en toute bonne conscience, car il n'y a pas eu, à proprement parler, de «magouilles», mais le fait de gouverner de cette manière est affligeant. On décide d'abord et on consulte le parlement ensuite, lorsque tout est terminé pour payer l'addition. J'avoue que je ne comprends pas, ou plutôt si, je comprends trop, comment on peut gouverner de cette manière. Mais, malheureusement, nous sommes devant le fait accompli, et il faut bien reconnaître que nous avons été bafoués.

M. Christian Grobet (AdG). Ayant été mis plusieurs fois en cause, vous comprendrez que je tienne à m'exprimer.

En guise de préambule, j'admets parfaitement ma part de responsabilité dans ces dépassements, mais je n'entends pas l'assumer seul, car, comme M. Barro l'a fort justement relevé, une foule de facteurs interviennent dans la prise en considération de ces dépassements de crédit.

En réponse à M. Ducommun qui a si aimablement fait des rapprochements de situation avec la France, je dirai que, en ce qui me concerne et en ce qui concerne les collaborateurs du département des travaux publics ou d'autres départements, je n'ose pas croire qu'aucune de ces personnes ait mis de l'argent dans sa poche ou ait favorisé des versements à des amis ou à d'autres groupements.

En premier lieu, je tiens à rappeler que, lorsque l'on parle d'affaires pénales, il s'agit de détournement d'argent, et non pas des dépassements de crédits dont nous parlons ce soir. Il faut dire que la gestion des crédits d'ouvrage est une tâche extrêmement difficile. D'ailleurs, je pense que M. Joye est en train d'en fait l'expérience. Il est vrai que le chef du département est formellement responsable pour ses actes et pour ceux de ses collaborateurs. Mais, lorsque plusieurs centaines de chantiers sont en cours, des petits et des gros comme l'autoroute de contournement, le chef du département est incapable de vérifier personnellement l'état des comptes de ces chantiers, il est donc forcé de déléguer.

En second lieu, il est bon de savoir que le département des travaux publics, sauf pour les travaux routiers pour lesquels je constate qu'il y a eu très peu de demandes de dépassement de crédit, agit surtout pour le compte d'autres départements utilisateurs. Certes, le département des travaux publics gère le crédit, mais il construit pour le compte de tiers. Il réalise des ouvrages pour lesquels les collaborateurs du département et son chef ont des connaissances techniques qui ne sont pas celles des utilisateurs.

En effet, les architectes et ingénieurs du département ne peuvent pas dire aux TPG comment concevoir leurs ateliers ou indiquer à l'exploitant de l'aéroport la manière dont il faut construire ce bâtiment. Par contre, j'ai constaté de telles pratiques chez certaines personnes des milieux de l'Entente. On m'a raconté que d'aucuns voulaient soi-disant dire à l'entreprise Sécheron SA comment réaliser une usine. Il est évident que le département-utilisateur est le mieux à même d'apprécier ce qui doit être fait. D'ailleurs, lorsque j'ai repris le département des travaux publics, mes collaborateurs ne mettaient jamais en cause ce que demandait le département-utilisateur, considérant qu'ils n'avaient pas les compétences pour juger si une demande était justifiée ou non.

Il est vrai que les utilisateurs exerçaient de très fortes pressions, et j'ai demandé que le département puisse intervenir sur certains points auprès du département-utilisateur. Je me permettrai de donner un exemple qui n'a pas été évoqué, celui de la zone sud de l'hôpital, dont le crédit d'origine a été voté en 1980 sous l'égide de MM. Donzé et Vernet. Lorsque je suis arrivé au département des travaux publics, le projet avait été «retoqué» à Berne. Il a fallu recommencer à zéro. On a voté en 1985 ce projet qui concernait une construction devant durer huit ans.

Dans le domaine médical - et quelqu'un sur les bancs d'en face sait de quoi je parle - les choses évoluent très vite. Aurions-nous pu terminer la zone sud de l'hôpital en faisant des salles d'opérations obsolètes ? Vous imaginez-vous inaugurer un tel bâtiment et vous entendre dire que ce que vous avez fait est aberrant. Je puis vous assurer que d'innombrables modifications ont été demandées pour cette zone sud. M. Vernet m'a demandé de prendre en considération les demandes des utilisateurs tout en m'efforçant de respecter le crédit. J'ai pensé qu'il était légitime de le faire, et, en cela, j'ai assumé mes responsabilités. Lorsque je suis parti, car je présidais la commission de construction de cette zone sud, nous n'avions pas dépassé le crédit.

J'ai suivi avec intérêt le projet de la nouvelle halle 7 de Palexpo, puisqu'il a été évoqué, et je ne mets pas en doute la parole de M. Reinhardt, au moment où j'ai quitté le département, il n'y avait pas de dépassement de crédit. (Brouhaha.)

M. Daniel Ducommun. Et la halle de frêt ?

M. Christian Grobet. Et je n'ai pas commandé le restaurant dans la halle 7, dont je ne conteste pas du tout la légitimité, d'ailleurs. Mais votre Grand Conseil avait refusé le restaurant, et je constate qu'il a été réalisé. Je ne critique pas cette décision, au contraire, puisque ce restaurant y était indispensable. Je ne sais pas quelle solution le Conseil d'Etat a trouvé pour ce faire, mais je le félicite d'en avoir trouvé une. (Brouhaha.) Je vous félicite, Monsieur Maitre !

M. Daniel Ducommun. Et qui paie ?

M. Christian Grobet. Monsieur Ducommun, vous avez raison de poser cette question. Je dis simplement qu'il n'est pas simple de ne pas dépasser un crédit lorsqu'on réalise un ouvrage, car les choses ne se déroulent pas comme dans la théorie. D'ailleurs, je ne pense pas que M. Joye aurait fait cesser les études de la traversée de la rade, parce qu'il ne fallait pas dépasser 8 millions.

Par conséquent, je ne pouvais pas interrompre le chantier de la halle de fret pour des questions de dépassement de crédit. Et, puisque vous avez évoqué la question de la halle de fret, je regrette que M. Maitre et moi-même n'ayons pas été entendus par la commission. Non seulement, j'ai proposé d'être entendu auprès de certains députés, mais j'ai dit à M. Joye que s'il avait des questions et des doutes à éclaircir j'étais prêt à y répondre par une audition en commission.

La halle de fret est un cas particulier, en ce sens que... (Brouhaha.) - excusez-moi, mais on a évoqué la halle de fret; je tiens donc à en dire quelques mots - le Conseil d'Etat avait décidé que les loyers des utilisateurs, tous des entreprises privées, devraient couvrir les frais financiers des dépenses engagées; M. Maitre pourra le confirmer. Il est vrai que nous avons donné suite à des demandes d'utilisateurs, car... (Intervention de M. Lombard.) Monsieur Lombard, c'est facile de nous faire la leçon ! Mais, lorsque des locataires de locaux sous le toit nous disent avoir besoin d'installation de ventilation et qu'ils sont d'accord de payer un loyer qui couvre les frais d'installation de cette installation, la refuseriez-vous ? Je dis que l'on ne pouvait pas... (Brouhaha.) Chaque cas est particulier et mérite d'être examiné.

Pour en revenir aux trois cas qui nous occupent ce soir, je remercie M. Koechlin d'avoir relevé qu'à l'école de Saint-Jean des problèmes sont apparus en cours de travaux. Lorsque l'on fait des transformations, on n'est pas à l'abri de surprises. Du reste, le département des travaux publics est venu devant le Grand Conseil pour demander un complément de crédit dans le cadre d'une transformation d'un bâtiment qui était l'institut Jaques-Dalcroze que la majorité de ce Grand Conseil avait refusé, mettant évidemment le département dans une position impossible pour terminer ce chantier. Je puis vous dire qu'il est vrai que certains collaborateurs, suite au vote de l'institut Jacques-Dalcroze, ont dit n'avoir pas envie de recommencer cet exercice.

Monsieur Blanc, vous avez raison de dire qu'il faut respecter le parlement, mais, lorsque le parlement se comporte comme il l'a fait dans l'affaire de l'institut Jaques-Dalcroze, vous pouvez peut-être aussi comprendre que certains collaborateurs aient très mal réagi.

En ce qui concerne l'immeuble pour personnes âgées, il est vrai que j'ai fait l'objet de demandes réitérées de la part de mon ancien collègue M. Vernet. (Brouhaha.) Cela figure dans le rapport; il a fait les demandes, et il est vrai que, dans un premier temps, j'ai écrit que l'on avait atteint le seuil du crédit. Entre M. Vernet et moi-même, car je ne suis pas le seul à être responsable... Je regrette mais, comme vous l'avez dit hier soir, Monsieur Blanc, nous n'avons pas le monopole du bon coeur, il peut arriver que le bon coeur soit partagé. Nous avons finalement décidé, dans cette affaire de pension pour personnes âgées, de réaliser ces transformations indispensables d'après la direction.

Quant à la cafétéria, je m'étonne que l'on nous reproche d'avoir pris ce montant d'environ un million de francs sur les crédits ordinaires du département, alors qu'il avait été admis que l'on pouvait utiliser ces crédits pour des objets ne dépassant pas 1,5 million.

Aujourd'hui, je constate que des transformations vont être engagées à la rue du Stand pour la somme de 4,5 ou 6 millions, et ce Grand Conseil n'a pas été consulté. Jusqu'à 1,5 million, les montants étaient prélevés sur les crédits ordinaires du département, et je ne vois pas en quoi la réalisation de ce projet de restaurant était critiquable. Allez peut-être demander aux personnes âgées de cet immeuble et au directeur ce qu'ils pensent de cet élément supplémentaire qui leur a été donné dans ce cadre de vie.

M. Claude Blanc (PDC), rapporteur. J'ai écouté M. Grobet avec beaucoup d'intérêt. Je ne l'accablerai pas, ayant été moi-même, à une échelle infiniment plus modeste, à la tête d'une administration. Je connais donc les problèmes qui, se présentant au cours de l'exécution d'un long chantier, obligent les responsables à prendre une décision, souvent très rapidement.

Mais je réagis, Monsieur Grobet, quand vous parlez de délégation de compétences. Je n'avais jamais entendu cela de votre bouche. Vous ne passiez pas pour un homme particulièrement délégateur ! Tout le monde savait qu'une tuile n'était pas placée sur un toit sans que vous ayez donné votre signature.

Autant je comprends ce que vous dites aujourd'hui pour justifier ce qui s'est passé, autant je conteste que vous ayez délégué vos compétences. Ce n'était pas du tout votre fait.

Vous avez déclaré également que vous et votre état-major n'avez jamais mis en cause les demandes des utilisateurs... (Intervention de M. Christian Grobet.) Je l'ai compris ainsi ! Cela partait, probablement, d'un bon sentiment et du fait que vous pensiez, comme beaucoup d'autres et moi-même, que les utilisateurs des locaux savaient peut-être mieux que nous, les constructeurs, ce qu'il fallait y mettre. C'est incontestable.

Mais alors, pour revenir à ce que je disais tout à l'heure, qu'est-ce que le parlement ? On nous présente des projets, on connaît leur coût, leur contenu, leur programme. Vous avez reproché au parlement d'avoir refusé certaines choses indispensables. Peut-être le parlement vous a-t-il mal compris, peut-être lui avez-vous mal expliqué et qu'il vous a «retoqué», comme vous disiez dans le temps. C'est possible, mais c'est son droit, Monsieur Grobet. Le parlement dit oui ou non, mais s'il dit non il faut faire avec. Il est grave d'ignorer son avis.

Qu'il y ait eu des choses justifiables, nous sommes d'accord ! Mais une fois les projets bouclés, que tout a été dit et fait, qu'il ait fallu attendre si longtemps, parfois dix, voire douze ans, pour entériner des objets dont plus personne ne se rappelle, c'est autre chose !

Par exemple, nous avons dû sortir M. Rivoire de sa retraite pour l'auditionner sur le projet 7336-A, dont nous débattons présentement. Ayant cessé de pratiquer, il n'avait plus de dossier. Néanmoins, il nous a relaté comment les choses s'étaient passées. Même justifiés, ces crédits supplémentaires auraient dû être demandés tout de suite au Grand Conseil. Et il y en a un si grand nombre que l'on ne peut s'empêcher de supposer que l'on se soit dit : «Le jour viendra où le Grand Conseil devra entériner cette affaire que j'ai conduite au mieux. Tant pis pour lui !». En fait, c'est cela qui ne passe pas.

M. René Koechlin (L). Il est évident que le chef du département des travaux publics n'a pas à surveiller personnellement l'utilisation des crédits qui lui sont alloués. En revanche, comme l'a dit M. Grobet, il doit déléguer, mais en s'assurant de la rigueur du contrôle.

Le chef de ce département n'a pas à définir - c'est évident aussi - les besoins des utilisateurs. Il appartient aux futurs usagers et aux utilisateurs des autres départements d'émettre leurs voeux et d'établir les programmes les concernant.

En revanche, il appartient au gestionnaire du crédit de construction de limiter les velléités des futurs usagers, de manière à les contenir dans l'enveloppe dudit crédit. Si cette attitude rigoureuse ne convainc pas les utilisateurs, il faut chiffrer la plus-value et subordonner l'exécution des travaux correspondant à l'obtention du crédit complémentaire qui s'y rapporte.

Il est vrai que cette rigueur est difficile, et je peux vous dire, en tant que professionnel, que j'en sais quelque chose. Elle dépend d'abord de l'attitude des responsables des services du département des travaux publics, laquelle dépend évidemment de celle de leur chef.

Or, Monsieur Grobet, vous nous avez montré, en d'autres circonstances - et je vous le reconnais volontiers - que vous étiez capable de cette rigueur. C'est indiscutable, et je l'ai moi-même vécue à diverses reprises, notamment en ce qui concernait l'examen des autorisations de construire et leur octroi, le respect de la loi sur les constructions et installations diverses, le respect des plans localisés de quartier. Je vous sais gré, Monsieur, d'avoir été extrêmement rigoureux dans ces domaines, c'est tout à votre honneur.

En revanche, nous regrettons - et c'est ce que nous évoquons ce soir - que vous n'ayez pas fait preuve de la même rigueur dans la gestion des crédits qui vous étaient confiés.

M. John Dupraz (R). Ce débat me fait penser à mes collègues agriculteurs qui se plaignent du Conseil fédéral et qui, chaque année, engrangent les paiements directs et les fruits de la protection de la politique agraire pratiquée dans notre pays.

Il est étonnant d'entendre, ce soir, les récriminations de ceux, nombreux, qui ont profité d'une situation où tout le monde vivait confortablement.

Certes, les procédures n'ont pas été respectées. Et la leçon essentielle à retenir de ces rapports est qu'il faut plus de rigueur dans les procédures et leur application.

M. Grobet a fait amende honorable et reconnu qu'il prenait sa part de responsabilité dans cette affaire. (Brouhaha.) En période de haute conjoncture, quand nous avons décidé de construire le dépôt des TPG au Bachet-de-Pesay, je me souviens d'avoir dit à M. Fontanet père que je ne voterai pas le crédit présenté, le trouvant trop élevé. Il m'a répondu : «Toi, quand tu achètes un tracteur, tu construis d'abord le garage !». Je lui ai rétorqué que je m'assurais que le tracteur entrait dans mon hangar avant de l'acheter. C'est une autre mentalité et une façon différente d'apprécier les problèmes.

A l'époque, rien n'était assez beau, rien n'était assez grand, et on votait allègrement des crédits, parce que l'argent coulait à flots et que les utilisateurs et tous les autres en réclamaient toujours davantage.

Maintenant, il est facile de faire des procès aux uns et aux autres. Je suis certain de l'honnêteté de M. Grobet et des autres conseillers d'Etat de l'époque, ainsi que de celle de leurs fonctionnaires. Par conséquent, je pense aussi que les sommes dépensées, dont les montants dépassent les crédits votés par le Grand Conseil, l'ont été pour des travaux réellement effectués.

La leçon à retenir est que la haute conjoncture est derrière nous. Maintenant, la rigueur est de mise. Nécessité faisant loi, on devient plus raisonnable en matière de dépenses!

M. Pierre Ducrest. Je vous prierai d'excuser mes propos : ils seront plus brutaux que ceux de mes collègues !

Dans une communauté de près de quatre cent mille personnes avec un législatif de cent personnes et un exécutif de sept personnes, un chef de département est responsable des dépassements de crédit et des fonctionnaires qui les gèrent. S'il n'est pas capable d'assumer ses responsabilités, qu'il quitte son poste !

Les propos tenus à l'époque de haute conjoncture sur les dépassements de crédit et les personnes irresponsables ne dévoilent en fait que la pointe de l'iceberg, qui sera plus grande encore l'année prochaine. Lorsque la capacité, l'énergie et la responsabilité font défaut, le chef doit être sanctionné par le peuple, comme ce fut le cas en 1993 !

M. Chaïm Nissim (Ve). Dans un discours de trois minutes, M. Dupraz - comme d'autres - emploie quatre fois le mot «rigueur». Mais l'applique-t-il vraiment au projet de la traversée de la rade qui coûtera 1 000 millions alors qu'il n'en annonce que 430 ou 490 ? S'agit-il là réellement d'une gestion rigoureuse ?

M. Pierre Meyll (AdG). Ayant assisté à toutes les séances de la commission et de la sous-commission, je peux affirmer que cela exige une certaine dose de patience. Ce n'est pourtant pas ma qualité première !

Je trouve les propos de M. Ducrest scandaleux : il met en doute la capacité des fonctionnaires... (Brouhaha.) ...d'autant plus que certains sont toujours en place. Ils accomplissent leur travail avec une parfaite rigueur; on ne peut rien leur reprocher. Ils ont expliqué les dépassements de budget en raison de la hausse des coûts et des difficultés à trouver des architectes souhaitant s'occuper des bâtiments de l'Etat, car le privé était plus lucratif.

C'était la folle époque où seul le bénéfice importait. Les normes SIA étaient allègrement dépassées : on votait des crédits supplémentaires pour l'équipement des locaux, entre autres. M. Grobet vous citait l'exemple type de l'hôpital où l'on a confondu équipement et construction. Un conseiller d'Etat ne peut pas mettre en doute le travail des architectes et suivre tous les dossiers, ainsi que l'exécution des travaux.

Si l'on considère la correspondance et les propos des hauts fonctionnaires déjà en place à l'époque, on constate que le département des travaux publics a fait des remarques dont le Conseil d'Etat n'a pas tenu compte. La commission des finances n'a pas accompli sa tâche, elle non plus : elle aurait pu «remettre» beaucoup plus vite ces crédits «complémentaires».

En sous-commission et en commission des travaux, vous avez cherché le bouc émissaire Grobet pour essayer de le torpiller. Je me suis plaint à maintes reprises des propos inacceptables tenus dans cette enceinte qui relèvent d'un «anti-grobétisme» primaire !

Comprenant la situation, l'Alliance de gauche avait accepté les crédits de la résidence des Arénières, par exemple. En effet, la recherche du bien-être des personnes âgées justifiait parfaitement le dépassement. Par ailleurs, il était indispensable d'accélérer les programmes à la fin du mandat de M. Vernet pour obtenir les subventions fédérales.

Vous avez donc suffisamment mis en doute les capacités de l'ancien président du département. Selon le cahier des charges fixé par M. Ducrest, M. Joye pourra-t-il suivre tous les travaux ? Il lui reste à faire la démonstration de ses capacités !

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. De 1975 à nos jours, nous avons vécu une période facile où tous les partenaires de la construction - administration comprise - avaient une attitude laxiste. On ne regardait pas à la dépense !

J'ai refusé d'assister aux séances concernant le bouclement de ces crédits pour éviter d'être soupçonné d'«anti-grobétisme» primaire. Les travaux de cette commission - où j'ai le privilège d'être invité - ont été conduits de façon correcte. J'aimerais remercier les fonctionnaires qui se sont donné beaucoup de peine pour fournir les renseignements nécessaires.

Il est difficile de tirer les conclusions au sujet d'un chantier commencé dans les années 70, les partenaires ayant disparu. Mais les dépassements - s'ils sont justifiés sur le plan comptable - sont en réalité plus élevés, et j'ai été choqué en examinant les premières évaluations. Ces dépassements «complets», «sociaux», et pas seulement financiers, représentent l'écart entre le programme initial et la réalité construite. On admettait qu'un objet valant 10 au départ pouvait atteindre l'indice 12 par les hausses et les indexations. Raisonnement erroné, mais d'usage à Genève, ainsi que dans toutes les administrations fédérales, cantonales, communales ! Ces indexations «autorisées» ne sont pas un droit automatique à la dépense; il en va de même pour les hausses légales. Une saine gestion des adjudications permet de réaliser de substantielles économies, en réduisant la durée par exemple.

Par ailleurs, on «gonflait» allègrement les programmes vers la fin du chantier si l'on n'avait pas atteint la dépense pour user d'un prétendu droit à la dépense. On rattrapait les postes où les prix «giclaient» à l'aide d'indexations et de hausses non dépensées. Je ne prétends pas pouvoir toujours exercer un contrôle rigoureux, mais je m'y efforce.

Monsieur Nissim, vous m'obligez à revenir sur la question de la rade. Je suis en mesure de justifier chaque franc dépensé à la suite de l'évolution, de la modification, de la régression, de la transformation d'un projet, découlant de décisions politiques ou d'un jury. Ne confondez pas un crédit de construction pour faire sortir de terre un projet supposé clairement défini par des plans, suivi de soumissions et d'adjudications, avec l'ouverture d'une ligne de crédit de 8,2 millions destinés à des projets non définis à l'époque, soumis à plusieurs modifications d'implantation - cinquante-sept variantes - ainsi qu'à des expertises juridiques sans fin, et j'en passe !

M. Grobet a raison d'évoquer les modifications en cours de chantier. Mais les frais qui en découlent, en particulier pour la halle 7, l'Arena, le parking, le musée de l'automobile, se montent malheureusement à plusieurs millions. Si le résultat est bon - comme l'a mentionné M. Blanc - je regrette la vitesse à laquelle on a procédé à ces modifications. On n'a, d'une part, pas assez tenu compte des coûts, et, d'autre part, omis d'informer le parlement. Je devrai revenir sur ces questions de dépassements et de leur coût élevé pour vous donner toutes les explications.

S'il est nécessaire de déléguer, le contrôle doit néanmoins s'exercer rigoureusement. En raison des difficultés économiques, l'esprit de la «maison» a changé. Nous avons mis sur pied des procédures entre l'utilisateur et le département des travaux publics, afin de fixer les travaux, les matériaux et les prix, tout en demandant aux partenaires, maîtres d'oeuvre, utilisateurs, subventionnants, de cosigner les documents, comme c'est le cas pour les autorisations de construire.

Je m'attelle actuellement aux procédures de subventions accordées par l'Etat pour restaurer, innover, etc. Au stade de l'offre, de l'adjudication et des décomptes, il est indispensable de vérifier la marche du chantier, afin de s'assurer que les subsides ne servent pas d'«oreiller de paresse». En organisant des vérifications fouillées, j'ai eu des surprises très désagréables, sur lesquelles je reviendrai. Pour l'instant, je vous propose de suivre les conclusions de la commission.

PL 7321-A

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

(PL 7321)

LOI

ouvrant un crédit complémentaire pour le bouclement du comptede construction pour l'extension de l'école de commerce de Saint-Jean

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Crédit complémentaire

Un crédit complémentaire de 1 646 803 F est ouvert au Conseil d'Etat pour couvrir le dépassement du compte de construction pour l'extension de l'école de commerce de Saint-Jean.

Art. 2

Financement complémentairepar l'emprunt

Le financement complémentaire par rapport au montant voté, soit 1 646 803 F, sera assuré par le recours à l'emprunt.

Art. 3

Loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique, du 11 janvier 1964.

PL 7327-A

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

(PL 7327)

LOI

ouvrant un crédit complémentaire pour le bouclement du comptede construction pour l'extension de l'école des arts décoratifs et de dépôtset d'ateliers pour le service des loisirs de la jeunesse

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Crédit complémentaire

Un crédit complémentaire de 797 323 F est ouvert au Conseil d'Etat pour couvrir le dépassement du compte de construction de l'extension de l'école des arts décoratifs et de dépôts et d'ateliers pour le service des loisirs de la jeunesse.

Art. 2

Financement complémentairepar l'emprunt

Le financement complémentaire par rapport au montant voté, soit 797 323 F, sera assuré par le recours à l'emprunt.

Art. 3

Loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique du 11 janvier 1964.

PL 7336-A

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

(PL 7336)

LOI

ouvrant un crédit complémentaire pour le bouclement du compte pour la construction d'une pension et de logements pour personnesâgées à la Jonction

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Crédit complémentaire

Un crédit complémentaire de 1 439 041 F est ouvert au Conseil d'Etat pour couvrir de dépassement du compte pour la construction d'une pension et de logements pour personnes âgées à la Jonction.

Art. 2

Subvention fédérale

Les subventions fédérales ont été estimées à 2 800 000 F; elles ont été effectivement de 3 197 493 F, soit supérieures au montant prévu de 397 493 F.

Art. 3

Financement complémentairepar l'emprunt

Le financement complémentaire par rapport au montant voté, soit 1 041 548 F, sera assuré par le recours à l'emprunt.

Art. 4

Loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique, du 11 janvier 1964.