République et canton de Genève

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PL 12428-A
Rapport de la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat chargée d'étudier le projet de loi de Christian Dandrès, Jean-Charles Rielle, Thomas Wenger, Sylvain Thévoz, Léna Strasser, Diego Esteban, Cyril Mizrahi, Jocelyne Haller, Xhevrie Osmani, Youniss Mussa, Pierre Bayenet, Helena Verissimo de Freitas, Salima Moyard, Caroline Marti, Nicole Valiquer Grecuccio, Jean Burgermeister modifiant la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux (LPAC) (B 5 05) (Pour garantir le traitement des membres du personnel du service public en cas de maladie ou d'accident)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XI des 23 et 24 mars 2023.
Rapport de majorité de Mme Xhevrie Osmani (S)
Rapport de première minorité de M. Pierre Conne (PLR)
Rapport de deuxième minorité de M. Christo Ivanov (UDC)

Troisième débat

La présidente. Nous passons au PL 12428-A, classé en catégorie II, soixante minutes. Je vous rappelle que nous sommes au troisième débat; nous nous prononcerons uniquement sur le projet dans son ensemble, après avoir voté sur l'amendement de Mme Alimi que vous avez reçu par messagerie. Je précise à ce propos que c'est la version bis de cet amendement qui est pertinente.

Amendement général

La présidente. Je donne la parole à Mme Osmani.

Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. Merci, Madame la présidente. Nous voilà en troisième débat sur un projet de loi qui a fait l'objet de quatre ans de travaux !

La présidente. Si vous tournez votre micro vers vous, on vous entendra mieux !

Mme Xhevrie Osmani. Moi, en tout cas, je m'entendais bien... Le but de ce projet de loi est de donner enfin une base légale à la perception d'une cotisation auprès du personnel soumis à la LPAC afin de financer la perte de gain maladie à l'Etat. Malgré le rapport 119 de la Cour des comptes signalant l'absence de base légale pour la perception, la prime continuait d'être prélevée. Ce projet de loi permet de fixer une prime corrélée aux absences pour maladie tout en maintenant le principe de solidarité.

C'est aussi une réponse aux velléités du département de privatiser cette assurance et de punir celles et ceux qui sont malades en facilitant leur licenciement. La majorité s'est battue pour maintenir un droit au salaire et pour la protection contre le licenciement.

Aujourd'hui, un amendement consensuel, qui est un bon compromis, nous permet de garantir un niveau de prestations important pour les employés de l'Etat en mettant fin au projet de privatisation, puisque cette assurance resterait en mains publiques, avec l'instauration d'une caisse cantonale. Par ailleurs, cet amendement permet pour le personnel un maintien des cotisations aux assurances sociales pendant le versement du traitement la première année, donnant par exemple droit aux pleines indemnités chômage s'il y a possibilité de travailler dans une nouvelle activité après la maladie.

L'amendement garantit également la protection contre le licenciement en cas de maladie pendant les deux premières années et pendant 365 jours si les motifs de résiliation ont été communiqués avant l'incapacité de travail, ce qui permet à l'employeur de repourvoir le poste.

La caisse est aussi un outil permettant l'octroi des indemnités après la fin des rapports de service et une opportunité d'offrir dans le futur une alternative publique, transparente et non lucrative, au-delà des entités soumises à la LPAC.

Les employés en première année obtiennent enfin une couverture digne et comparable à ce qui est pratiqué dans le privé, droits qui justifient une augmentation acceptable de la participation du personnel.

Je vous invite donc à accepter ce projet de loi avec l'amendement. Merci.

M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de première minorité. Chers collègues, je ne reviendrai pas sur le fond de ce projet de loi, sauf peut-être pour rappeler que le fait d'être assuré par l'employeur en première année d'emploi est un élément sur lequel tout le monde est d'accord et qui n'a jamais été contesté. Les difficultés se situent vraiment à un autre niveau.

Toutefois, ce soir, nous n'en sommes pas là, nous sommes en troisième débat. Nous sommes saisis d'un amendement général, reçu il y a quelques minutes. J'aimerais attirer votre attention sur l'importance que revêt la possibilité d'analyser correctement un tel amendement et ses effets sur la loi. Je rappelle simplement que dans le cadre des travaux sur ce projet de loi, qui, je vous le rappelle, a été déposé en 2019, nous avons déjà eu l'occasion en commission de traiter quatre amendements généraux, notamment la veille du vote en deuxième débat. En effet, le 16 février, nous avons reçu un amendement général et nous n'avons pas eu le temps de le traiter. Le département avait également proposé un amendement général, qui n'a pas été pris en compte. Je le dis, car si nous voulons respecter notre mandat et le «remplir consciencieusement», la moindre des choses que nous puissions faire, c'est d'analyser correctement en commission cet amendement général, qui apparaît effectivement tout à fait prometteur.

Il nous faut entendre l'employeur: ce ne sont pas nous qui sommes employeurs, mais l'Etat. (Remarque.) Nous allons transmettre de nouvelles règles à l'employeur qui est le Conseil d'Etat, raison pour laquelle il faut qu'il ait pu analyser correctement les effets de cet amendement général. Il y a les effets financiers et aussi les effets sur des institutions de droit public majeures, qui nous en ont expliqué l'importance. Je pense à l'IMAD, aux HUG, à l'université, qui a à la fois du personnel académique et du personnel technique; pour le personnel soignant, des situations très particulières d'épuisement ou de violences subies de la part de patients nécessitent la possibilité d'être assuré de manière spécifique. Tous ces éléments doivent vraiment être pris en compte afin que nous soyons sûrs des effets de cet amendement général.

Vous m'avez compris, Mesdames et Messieurs les députés, ce que je vous demande, c'est de renvoyer ce projet de loi en commission. Je m'exprime au nom de mon groupe: nous n'avons évidemment pas eu l'occasion d'étudier ce nouvel amendement en commission. Le groupe PLR s'engage à traiter en priorité et avec célérité ce projet de loi et propose, le moment venu, en tout début d'année, de revenir en plénière une fois les travaux terminés. Je confirme ma demande de renvoi à la commission du personnel de l'Etat. Je vous remercie de votre attention.

La présidente. Merci. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission. Monsieur le rapporteur de seconde minorité, vous avez la parole sur cette demande.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Madame la présidente. Il faut accepter le renvoi en commission. En effet, il s'agit de traiter les relations employeur-employé, notamment, comme cela a été dit, avec des entités publiques comme l'IMAD, les HUG et l'université. L'amendement général vient d'arriver, nous n'avons pas eu le temps de l'étudier. (Remarque.) Par conséquent, il convient de renvoyer ce texte à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat. Merci.

La présidente. Je vous remercie. Je me permets de préciser que la commission en question a changé de nom: il s'agit désormais de la commission sur le personnel de l'Etat. Madame la rapporteure de majorité, vous avez la parole pour vous exprimer sur le renvoi en commission.

Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. Madame la présidente, je refuse le renvoi en commission et invite les députés à en faire de même. Pendant quatre ans, ils n'ont pas eu plus de volonté que cela de voter cette loi. Ce n'est donc pas maintenant qu'ils vont traiter avec célérité cet amendement général. Je vous invite à refuser le renvoi en commission et à procéder au vote sur cet amendement. Merci.

La présidente. Je vous remercie. (Brouhaha.) Nous votons sur le renvoi à la commission sur le personnel de l'Etat.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12428 à la commission sur le personnel de l'Etat est rejeté par 93 non contre 4 oui et 1 abstention. (Commentaires pendant la procédure de vote.)

La présidente. Nous continuons donc le débat et je donne la parole à M. Christo Ivanov, pour qu'il se prononce sur le fond.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Madame la présidente. Ecoutez, comme cela a été dit par la rapporteure de majorité, les travaux sur ce texte ont duré quatre ans. Comme l'a dit mon préopinant, M. Pierre Conne, il y a eu plusieurs amendements généraux, notamment envoyés en catastrophe le 16 février dernier. Nous avons traité cela lors du deuxième débat. Ce soir, un nouvel amendement général est proposé. Je pense qu'il convient de le refuser et, par conséquent, de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi. Merci, Madame la présidente.

Une voix. On est déjà au troisième débat !

Mme Masha Alimi (LJS). Le groupe LJS n'est pas favorable à pérenniser le système actuel, qui est obsolète et trop hétérogène entre les nombreuses entités parapubliques et qui fait porter la quasi-totalité de la charge sur les finances publiques en l'inscrivant dans la loi de manière définitive.

D'un autre côté, nous ne sommes pas convaincus qu'une assurance privée contractée par l'Etat soit la meilleure solution, sachant qu'une assurance privée cherchera d'abord à maximiser sa rentabilité et qu'il n'y a aucune garantie que l'intérêt des assurés soit respecté, ni que leurs données soient protégées.

C'est pourquoi nous proposons un amendement général au projet de loi afin d'assurer les membres du personnel du service public en cas d'incapacité de travail pour cause de maladie ou d'accident, dès le premier jour de travail, via une caisse publique qui aurait un fonctionnement similaire à celui d'un organisme d'assurance sur la base d'une cotisation prélevée sur le salaire et fixée à un dixième du taux moyen d'absence maladie des employeurs, entourée de cautèles strictes pour éviter les abus, par exemple avec l'assouplissement des conditions de licenciement pour certains.

Nous vous invitons donc à accepter l'amendement LJS en matière d'assurance perte de gain, qui s'avère un compromis équilibré répondant à la nécessité de protéger les employés tout en préservant les finances publiques et en luttant efficacement contre l'absentéisme. Je vous remercie de votre attention.

M. Sandro Pistis (MCG). Ce soir, on est pris en otages. On est pris en otages par un amendement, déposé par le groupe LJS, qui redéfinirait de manière très fondamentale la prestation des APG. Nous, au sein du MCG, nous ne sommes pas d'accord d'être pris en otages et de voter ce type d'amendement au troisième débat. Pour nous, il est préférable d'avoir le statu quo, car ce dernier préserve les intérêts de celles et ceux qui sont affiliés pour les pertes de gain. Aujourd'hui, on nous prend en otages avec un amendement qui fait plusieurs pages; je voudrais quand même le montrer. (L'orateur montre l'amendement.) Zéro étude en commission ! (Commentaires.) Oui, nous refusons le renvoi, car nous sommes pris en otages: c'est soit on accepte le renvoi et il n'y a pas de majorité, soit nous acceptons ce torchon.

Pour le MCG, il est exclu de mettre en péril la fonction publique ! Il est exclu que l'on soit pris en otages. Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, nous ne voterons pas cet amendement, qui n'a pas été discuté. Nous sommes des députés sérieux, il est important d'aller jusqu'au bout de notre travail, de ne pas soutenir ce type de torchon et de ne pas nous laisser prendre en otages. Le MCG ne votera donc pas l'amendement et ne votera pas non plus cette loi, vu qu'il n'y a pas de majorité. Le groupe Libertés et Justice sociale a dit clairement qu'il n'était pas d'accord de soutenir ce projet de loi tel que sorti de commission. Soit nous votons le projet de loi tel que sorti de commission, soit nous ne votons rien.

M. Stéphane Florey (UDC). Exactement... Ce qu'a dit M. Pistis est très juste. Très franchement, à ce stade, le projet est mort et enterré. J'aimerais dire au groupe LJS - vous transmettrez, Madame la présidente - que nous savons très bien de qui proviennent ces amendements. Arrêtez de faire comme si vous veniez sauver la république en proposant une solution définitive. Mais arrêtez ! Nous ne sommes pas dupes. Arrêtez de nous prendre pour des imbéciles, Madame Alimi ! (Vifs commentaires.)

La présidente. S'il vous plaît, adressez-vous à la présidence, Monsieur Florey !

M. Stéphane Florey. On sait très bien de qui proviennent ces amendements. Arrêtez de nous inonder...

La présidente. S'il vous plaît, vous vous adressez à la présidence !

M. Stéphane Florey. ...avec ces propositions de dernière minute - vous transmettrez, Madame la présidente. Refusons ce projet de loi, parce que très franchement, ça devient agaçant.

Une voix. Et les amendements !

M. Stéphane Florey. Ce n'est pas sérieux, ce n'est pas la manière qu'a ce parlement de travailler; ça, vous l'apprendrez. Merci. (Applaudissements.)

La présidente. Je vous remercie. Ce n'est pas non plus la manière de vous adresser aux collègues du parlement. Monsieur Jacques Jeannerat, vous avez la parole, pour une minute trente.

M. Jacques Jeannerat (LJS). Merci, Madame la présidente. Permettez-moi, Madame la présidente, et je vous prie de transmettre: il y a des mots, «imbécile» et «torchon», que je ne peux pas accepter. Je ne suis pas un imbécile, je suis un élu du peuple - vous transmettrez à M. Florey, s'il vous plaît. (Applaudissements.) S'agissant du torchon dont M. Pistis parle, il l'a depuis une semaine dans sa boîte mail. Nous avons déposé un deuxième amendement dans la matinée où seules quatre virgules ont été changées. Il ne faut donc pas parler de torchon - vous transmettrez, Madame la présidente, à M. Pistis également.

Je trouve que ces termes sont un manque de respect cruel envers les élus du peuple que nous sommes. Je suis choqué par les mots «torchon» et «imbécile». Evidemment, nous sommes un nouveau groupe, un nouveau mouvement, nous avons un conseiller d'Etat qui a une certaine personnalité, que certains trouvent dérangeante. Nous sommes quand même indépendants sur un certain nombre de choses... (Rires.) ...mais je ne peux pas accepter... (Commentaires.) ...je ne peux pas accepter de me faire traiter d'imbécile et qu'un amendement déposé il y a une semaine sur lequel nous n'avons changé que trois virgules soit qualifié de torchon. Merci, Madame la présidente, de transmettre ces propos à mes honorables collègues que j'apprécie beaucoup, les députés Pistis et Florey. (Applaudissements.)

Mme Caroline Renold (S). J'aimerais recentrer l'enjeu de ce débat, puisque la question que nous avons à trancher aujourd'hui, c'est de savoir comment seront traités les salariés du secteur public lorsqu'ils sont malades. Le projet de loi et l'amendement général, qui modifie quelques éléments de ce projet de loi tel que sorti de commission, sont excellents dans le sens de leur protection.

Ce texte comporte trois volets. Le premier est qu'un salarié du secteur public malade ne peut pas être licencié pendant 730 jours. Cela n'est pas le cas actuellement. Le Conseil d'Etat nous l'a dit, notamment dans la justification de son amendement général. Lorsqu'il y a un autre motif de résiliation, il est possible de licencier. Or, là n'est pas la question ! Une personne malade ne doit pas être licenciée pendant sa maladie. L'amendement général déposé par le groupe LJS, qui flexibilise la question, est un compromis tout à fait acceptable pour le parti socialiste, raison pour laquelle nous le voterons. Cet amendement prévoit qu'il est possible de licencier après 365 jours si le motif de licenciement a été communiqué à l'employé avant le début de l'incapacité de travail.

Le deuxième volet de ce projet de loi, c'est que tout salarié du secteur public a droit, en cas de maladie attestée, à 730 jours de revenu, au maximum. (Remarque.) La question, c'est évidemment de savoir comment se concrétise ce revenu. Le Conseil d'Etat souhaitait faire des économies sur le versement des prestations du premier pilier. (Cela revient à économiser sur le financement de l'AVS pour ensuite dire qu'il faut réformer les rentes parce qu'il n'y a pas encore assez de financement...) Le projet de loi proposait deux années de traitement; l'amendement propose quant à lui une année de traitement et une année d'indemnité, ce qui nous semble à nouveau être un compromis acceptable pour les salariés du secteur public.

Le troisième volet concerne le financement. Tout cela part d'une volonté du Conseil d'Etat de faire des économies en concluant une assurance privée. Peut-être que certains pensent que les assurances privées sont de grandes entreprises philanthropes qui offriront un service de qualité à moindre coût. Ce n'est pas mon cas. De deux choses l'une: soit la prime d'assurance sera élevée et l'économie pour l'Etat inexistante, soit le service sera au rabais, au détriment des collaborateurs malades. Pour travailler dans la défense des assurés, je peux vous dire que les assurances privées fonctionnent ainsi: elles coupent les prestations du jour au lendemain, après quelques mois d'arrêt de travail, laissant les travailleurs sur le carreau. Puis elles mandatent un expert, qui leur plaît parce qu'il statue toujours dans leur sens - on se souvient de l'exemple de la clinique Corela - pour démontrer que le travailleur est capable de travailler.

Est-ce là le régime que l'on souhaite offrir aux salariés du service public ? Non ! La conclusion d'une assurance privée est une grave péjoration des droits des fonctionnaires, sans aucun bénéfice financier ! Il faut donc maintenir cette compétence au sein de l'Etat. C'est pour toutes ces raisons que nous vous invitons à adopter ce projet de loi avec l'amendement déposé par Mme Alimi. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Mme Louise Trottet (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les bras m'en tombent quand j'entends certains changements de position in extremis dans cette salle - je ne citerai personne. Pourtant, ce projet de loi sur lequel nous votons ce soir est extrêmement important, comme l'a dit ma préopinante, la députée Renold. Ce texte vise à combler une des lacunes dans la protection contre le licenciement, en particulier chez les collaborateurs malades. Il s'agit d'une population spécialement vulnérable dans sa première année d'emploi. A l'heure où les troubles musculosquelettiques, les covids longs et les troubles psychiques connaissent une importante hausse, ces personnes peuvent se retrouver sans rentrées financières du jour au lendemain, avec l'impossibilité de recourir au chômage et avec une assurance-invalidité qui, comme on le sait, peut mettre beaucoup de temps à se mettre en place.

Ce projet de loi est donc extrêmement important pour combler ces lacunes. A titre personnel, je trouve assez navrante la direction que prennent nos débats ce soir - mais je ne m'éterniserai pas. Le groupe Vert votera ce projet de loi, tout comme l'amendement déposé par le groupe Libertés et Justice sociale. Je préciserai que le groupe Vert est extrêmement attaché au respect dans l'enceinte de ce parlement. Merci. (Applaudissements.)

La présidente. Je vous remercie. La parole est à M. Mauro Poggia, pour une minute vingt.

M. Mauro Poggia (MCG). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je voudrais simplement faire remarquer que le député de mon groupe qui a parlé de torchon ne parlait pas du document lui-même, mais de la manière dont les choses se sont déroulées. Je pense effectivement que c'est un travail bâclé. On ne peut pas venir en troisième débat avec un amendement aussi élaboré et demander de voter des textes de façon aussi rapide, précipitée, alors qu'il y a des conséquences importantes.

Personnellement, je n'ai pas tout l'historique de ce texte à l'esprit, mais quand je vois qu'on propose même la possibilité de créer une assurance publique qui verserait les indemnités perte de gain maladie et accident, ça me rappelle quelque chose ! On est en train de faire un texte à la gloire d'une idée, idée qui sans doute est mort-née... (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...puisque je ne vois pas qui aurait l'idée aujourd'hui, économiquement parlant, de créer une assurance publique et d'engager des fonctionnaires pour calculer les indemnités de perte de gain pour les fonctionnaires malades ou accidentés, alors que le travail se fait déjà aujourd'hui par les services de l'Etat. Je pense effectivement que ce texte est saugrenu et je n'en vois pas la finalité.

La présidente. Il vous faut conclure.

M. Mauro Poggia. Pour le reste, j'ai entendu dire qu'on voulait punir les malades; évidemment que ce n'est pas le cas ! Par contre, devoir payer un salaire à quelqu'un à qui on dit: «Maintenant, ça ne va pas» et qui se met en arrêt maladie, cela pose quand même un petit problème.

M. Souheil Sayegh (LC). Cher parlement... (Brouhaha.) ...comme j'ai eu l'occasion de l'expliquer lors du deuxième débat - je le répète pour les personnes qui n'étaient pas présentes -, ce projet de loi est dangereux, et dangereux à bien des égards. Il est tellement dangereux qu'il n'a trouvé ni la faveur des entités auditionnées, ni celle du Conseil d'Etat dans sa majorité, majorité antérieure, qui n'est pas forcément fondamentalement différente de la majorité actuelle. (Rires. Commentaires. L'orateur rit.) Il est même dangereux pour les personnes qu'on cherche soi-disant à protéger, et aussi pour celles qui n'ont rien demandé et qui font le job. En résumé, ce projet de loi n'a rien de bon, ou plutôt si: il nous a permis de fédérer une alliance autour de son refus. (Remarque.)

Si on voulait nuire à la fonction publique - on parle de celle qui travaille -, on ne pourrait pas mieux s'y prendre. Qui fait le job des absents ? Les présents. Qui va payer la part de l'assurance perte de gain des absents ? Les présents. Et qui va tomber malade ? Du coup, ce sera les présents... qui deviendront absents à leur tour. (Rires. Commentaires.)

Qui va prendre demain le risque d'engager en CDI une personne, sachant qu'au bout d'une semaine, si elle devait tomber malade, l'employeur l'aurait sur le dos pendant deux ans ? Quelle plus grande lourdeur dans les rapports de services ? Comment pourra-t-on demain licencier une personne qui dysfonctionne et qui, par hasard, tomberait malade après qu'on lui aurait signifié ce dysfonctionnement ?

Pour les personnes qui sont nouvelles au sein de ce parlement, je rappelle que nous avons eu l'occasion d'entendre les propos de la vice-rectrice de l'Université de Genève, Mme Galliot, qui nous a expliqué que sur environ dix mille collaborateurs à l'université, certaines personnes étaient sous un régime de droit public, d'autres sous un régime de droit privé. En tout, un tiers du personnel de l'université - un tiers de ces dix mille collaborateurs - a été engagé sous un régime de droit privé. En 2020, ce tiers a consommé pour environ 960 000 francs d'assurance perte de gain. Pour les deux autres tiers des collaborateurs, donc 60%, si on faisait une simple règle de trois, on arriverait à une perte de gain d'environ 3 millions. Eh bien non: l'assurance perte de gain pour les personnes engagées sous un régime de droit public a coûté 10 millions, Mesdames et Messieurs, 10 millions ! Ce n'est donc plus une règle de trois qui s'applique pour arriver à ce résultat. De là à dire qu'il y a une différence de régime et de traitement entre le droit privé et le droit public, c'est un pas que je ne franchirai pas, mais cela explique à quel point ce projet de loi peut être dangereux. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)

L'amendement déposé en une heure cet après-midi, et d'ailleurs modifié deux fois, ne peut pas résumer des années de travail en commission. Il s'agit d'une maladresse que nous pardonnerons très facilement. Nous constatons donc que ce projet de loi ne rencontre pas les faveurs de la majorité, mais qu'il est important pour la protection des collaborateurs et collaboratrices. Je sais que le Conseil d'Etat est sensible à cette thématique, et j'imagine facilement que Mme la conseillère d'Etat et ses services nous reviendront prochainement avec un projet de loi qui pourrait satisfaire une majorité de ce parlement.

La présidente. Merci.

M. Souheil Sayegh. Pour cette raison, Mesdames et Messieurs, le groupe Le Centre refusera et l'amendement et le projet de loi. Je vous remercie de m'avoir écouté. (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

La présidente. Merci. Madame Alimi, il n'y a plus de temps de parole pour le groupe LJS.

Une voix. Elle est mise en cause !

La présidente. Son chef de groupe a déjà répondu. Est-ce que les rapporteurs souhaitent s'exprimer ? Monsieur Ivanov ? Monsieur Conne ? (Remarque.) Oui, alors vous avez la parole pour une minute cinquante.

M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de première minorité. Merci, Madame la présidente. Pour ne pas allonger les débats, je fais miens les propos de notre dernier préopinant, M. Souheil Sayegh. Je remercie notre préopinant et collègue député M. Mauro Poggia d'avoir souligné que l'amendement que certains essaient de nous faire adopter a simplement pour but de créer une base légale pour une assurance publique; nous ne sommes pas dupes.

Cela étant, je vous invite à refuser l'amendement et à refuser le projet de loi en troisième débat, tel qu'il était sorti de commission. Je vous remercie.

La présidente. Merci. Madame Osmani, pour la majorité, vous avez la parole pour quarante-cinq secondes.

Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. Merci, Madame la présidente. Vous voudrez bien transmettre, Madame la présidente, au parti sérieux de cet hémicycle: plus que son sérieux, il nous a montré ce que vaut une parole donnée. Il vient d'ouvrir au Conseil d'Etat le champ des possibilités pour concrétiser ses appels d'offres, dont nous sommes tous au courant. (Remarque.) Si si, on a été mis au courant de cela en commission ! Je ne sais pas combien de temps la fonction publique sera nantie de cette situation, mais voilà ce que j'avais à dire au parti des fonctionnaires et au défenseur des assurés. Je vous invite à accepter cet amendement et le projet de loi. Merci.

Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je souhaite rappeler l'historique. Le Conseil d'Etat était soucieux de revoir le traitement et la protection des personnes engagées à l'Etat depuis moins d'une année et qui se retrouvaient dans une situation extrêmement compliquée en cas de maladie, car pas suffisamment protégées. Dans ce contexte-là, et d'ailleurs avant que je n'arrive au Conseil d'Etat, la volonté d'externaliser une assurance perte de gain, conformément aux recommandations de la Cour des comptes, avait été envisagée comme mesure d'économie.

Puis nous n'avons pas déposé de projet de loi à cet égard; nous sommes venus expliquer en commission de quoi il en retournait. Nous avons très rapidement compris qu'il n'y avait pas de volonté de la majorité de la commission, voire même de l'ensemble du parlement, que l'Etat aille de l'avant avec une externalisation de l'assurance perte de gain.

Dans ce contexte, et avant d'engager des frais, contrairement à ce qui vous a été indiqué il y a quelques instants, le Conseil d'Etat n'a pas lancé d'appel d'offres et n'a pas poursuivi ce projet. En revanche, ce que je peux vous dire aujourd'hui, c'est que je m'engage à titre personnel et au nom du Conseil d'Etat à revenir avec un projet de loi qui prenne en compte une meilleure protection des travailleurs et travailleuses, des collaborateurs et collaboratrices de l'Etat, en particulier quand ils sont dans leur première année d'engagement, car ces personnes-là le méritent.

J'aimerais aussi relever que nous devrons trouver des solutions pour avoir une assurance perte de gain créée par l'Etat lui-même, et nous irons dans cette direction, parce que cela est nécessaire pour les collaboratrices et les collaborateurs. Par ailleurs, le projet de loi, aussi bien tel qu'il est sorti de commission qu'avec l'amendement proposé, entraînerait une moins bonne protection de l'ensemble des travailleurs et des travailleuses qui aujourd'hui bénéficient d'une assurance perte de gain maladie et accident surobligatoire. C'est le cas des collaboratrices et collaborateurs des HUG, c'est le cas des collaboratrices et collaborateurs de l'IMAD, dont les employeurs seraient contraints de résilier l'assurance perte de gain, alors que ces personnes-là sont exposées à des dangers particuliers: on le sait pour les médecins avec l'exposition au sang, on le sait aussi pour les collaboratrices et collaborateurs de l'IMAD, mais pas seulement, pour les assistantes en soins également ainsi que pour le personnel hospitalier. Mesdames et Messieurs, avec le projet de loi tel qu'il est sorti de commission, respectivement avec son amendement, tout cela ne serait plus possible, cela figure dans le projet de loi et tout en bas de l'amendement.

J'aimerais aussi rappeler qu'on ne peut pas, sur un sujet tel que celui-ci, en troisième débat, revenir avec un amendement qui demande la création d'une caisse publique pour une assurance perte de gain de collaboratrices et collaborateurs, alors qu'aujourd'hui, c'est justement l'Etat qui tient ce rôle et qui assure cette protection. C'est contradictoire, et penser qu'on peut faire ce vote sur le siège sans l'avoir soumis à des services compétents, même s'ils devaient dire oui - ils pourraient aussi dire non, ou feraient au moins des modifications -, ce n'est pas digne de nos travaux, Mesdames et Messieurs. Je vous encourage à refuser ce projet de loi, à refuser cet amendement et je prends l'engagement devant vous de revenir avec un projet de loi qui pourra remporter une large adhésion. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

La présidente. Merci. Je vous rappelle que nous sommes en troisième débat. Nous votons d'abord sur l'amendement de Mme Alimi, qui est un amendement général, raison pour laquelle je le mets aux voix en une fois.

Amendement général

Mis aux voix, cet amendement général est rejeté par 56 non contre 42 oui.

Mis aux voix, le projet de loi 12428 est rejeté en troisième débat dans son ensemble par 66 non contre 32 oui (vote nominal).

Vote nominal