République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 12551-A
Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant des crédits d'étude et d'investissement de 219 560 000 francs et un crédit au titre de la subvention cantonale d'investissement de 25 500 000 francs relatifs à la mise en oeuvre du Projet d'agglomération de troisième génération (PA3)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 11 et 12 mai 2020.
Rapport de majorité de M. Serge Hiltpold (PLR)
Rapport de minorité de M. François Baertschi (MCG)

Premier débat

Le président. Nous abordons la prochaine urgence, classée en catégorie II, trente minutes: le PL 12551-A. Je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Serge Hiltpold.

M. Serge Hiltpold (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, comme pour les autres projets d'agglomération, la commission des travaux a examiné ces crédits d'étude et d'investissement d'un montant global de 245 060 000 francs, ce qui correspond à l'addition des deux sommes indiquées dans l'exposé des motifs; ils concernent spécifiquement le PA3. Il n'est pas inutile de rappeler que ces projets d'agglomération touchent les cantons de Genève et de Vaud ainsi que les départements de l'Ain et de la Haute-Savoie. Ils sont par ailleurs massivement soutenus par la Confédération.

Le rapporteur de minorité a utilisé, dans son rapport, des termes que je trouve parfaitement excessifs. Il en donnera très certainement lecture, mais il y a un passage que je ne peux pas admettre: «c'est un coup d'Etat technocratique qui force la main du pouvoir politique». Sur ce point, je crois qu'il faut être clair: les projets d'agglomération ont été exposés de manière très circonstanciée à la commission des travaux. Je vous fais grâce de la lecture; vous vous référerez au rapport, qui est extrêmement complet. Il comporte tous les détails de chaque mesure, de chaque financement et des différentes interventions. Tous les commissaires ont eu la possibilité de poser des questions; nous ne pouvons certes pas modifier ces projets en soi, mais nous sommes en tout cas bien informés et rien n'empêche les commissaires - ou les députés de manière générale - de faire d'autres propositions par le biais de textes distincts. A cet égard, l'administration a fait son travail correctement: toutes nos questions ont reçu des réponses et les demandes complémentaires ont été chiffrées et étayées. Je pense donc que cet argument n'est absolument pas valable.

Ces projets d'agglomération sont toujours sujets à débat quant au rôle de la région, au rôle de Genève, à la prédominance, à la rivalité avec le canton voisin ou la France voisine. J'aimerais toutefois vous rappeler une chose: s'ils sont soutenus par la Confédération, c'est qu'on doit avoir une vision régionale, voire nationale. Ces projets d'agglomération ont surtout un effet multiplicateur: les montants cités sont relativement importants, mais il faut savoir que cette vision a un impact sur le territoire, les entreprises et de nombreux collaborateurs pour pratiquement dix ans ! On travaille déjà maintenant sur le projet d'agglomération de quatrième génération alors que des lots des PA1 et 2 sont encore en cours de construction. C'est donc fondamental: c'est une politique importante avec des montants importants. Je crois que la commission des travaux n'a pas été dupe, elle a été quasi unanime là-dessus, et je vous invite, au nom de la majorité, à soutenir ce projet de loi avec enthousiasme. Merci.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. J'aimerais tout d'abord répondre au rapporteur de majorité par un propos liminaire. Il estime que mon discours est excessif; c'est son droit. Je trouve en revanche plus contestable, disons, qu'il n'admette pas que j'exprime de manière vive une opinion différente de la sienne. Mais il y a quelque part une différence de fond ! On a un homme politique honorable qui se place dans une logique technocratique: c'est le pouvoir technocratique qui donne des ordres au politique. Il lui dit: c'est comme ci ou comme ça, obéissez ! Je pense que nous sommes dans une pyramide inversée, et nous devons adopter une logique tout à fait différente: c'est le politique qui doit décider ! Nous devons décider, sur mandat de l'électeur ! C'est l'électeur, le citoyen, qui doit avoir le pouvoir - le pouvoir final - et non la technocratie qui donne des ordres au politique et aux citoyens ! Nous avons deux philosophies différentes de la vie publique et de la vie politique, exprimées de manière très claire; nous avons une divergence. Que je le dise avec vigueur est à mon sens un élément positif parce qu'il faut donner du sens à notre vie politique et non rester dans quelque chose de tiédasse !

Ma grande critique, c'est que le projet d'agglomération relève d'un grave déficit démocratique. C'est un véritable fourre-tout, avec un mélange d'objets que l'on doit accepter ou refuser en bloc, et c'est pourquoi j'ai parlé de coup d'Etat institutionnel. Je maintiens qu'il s'agit d'un coup d'Etat institutionnel et je suis contre cette manière de faire ! Je m'y oppose, comme mon mouvement, le MCG - le Mouvement Citoyens Genevois - qui de longue date déjà s'oppose au principe du projet d'agglomération et à l'utopie transfrontalière. C'est vrai qu'il y a là derrière une utopie transfrontalière: ce ne sont plus les citoyens qui décident mais la technostructure, la technocratie, qui dirige. Nous avons à ce propos, au MCG, une divergence de fond avec la presque totalité - je devrais peut-être dire avec la totalité - du parlement qui a, lui, une vision sacralisée de la technocratie.

On verra aussi le résultat de cette politique - quel est-il ? C'est un bétonnage systématique de nombreux espaces. Il suffit d'aller devant la gare des Eaux-Vives pour s'apercevoir que la politique de «saint Béton», l'écologie du bétonnage...

Le président. Vous parlez sur le temps de votre groupe, Monsieur le rapporteur.

M. François Baertschi. Je vais bien sûr me taire pour éventuellement reprendre la parole sur le temps du groupe. Merci, Monsieur le président.

M. Stéphane Florey (UDC). Il n'est pas question ici d'être dupe, comme le dit le rapporteur de majorité, mais tout simplement réaliste. La réalité, c'est qu'on nous présente en commission des packages tout ficelés pour ces projets d'agglomération, avec un certain nombre de mesures qui s'imbriquent les unes dans les autres, ce qui ne laisse pas le choix à la commission de ne voter que l'une ou l'autre d'entre elles. Car si vous en refusez une, vous êtes finalement obligé de toutes les refuser puisqu'on vous explique que le fait de toucher à telle mesure aura forcément des implications sur les autres. Et c'est pour ça que nous sommes, à l'UDC, insatisfaits de ce type d'objets bien qu'un certain nombre de projets soient malgré tout utiles pour notre canton et notre collectivité - nous le reconnaissons et l'acceptons.

On nous dit en plus qu'il ne faut surtout pas refuser ce texte, sans quoi on va perdre les subventions fédérales. Peut-être, mais il faudra bien avoir un jour le courage de dire non et arrêter de se faire marcher sur les pieds, à la fois par la Confédération, l'Etat français et les autres cantons concernés par ces projets d'agglomération ! Parce que finalement, c'est ça la réalité: nous ne sommes plus véritablement maîtres de notre aménagement, nous subissons la volonté de nos pseudo-partenaires. Je rejoins là parfaitement les propos de M. Baertschi, rapporteur de minorité: il a raison, nous subissons en réalité les desiderata des technocrates ! On s'aperçoit également que le Conseil d'Etat n'a aucune vision dans cette affaire et que lui-même subit la pression de Berne. On lui dit simplement: si vous ne faites pas, eh bien il n'y a pas de sous ! Voilà la réalité aujourd'hui; on verra ce que voteront mes collègues, entre abstention et refus, mais je refuserai pour ma part ce projet de loi. Je vous remercie.

Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Vous l'aurez compris, le groupe socialiste est par contre en faveur d'une vision foncièrement régionale et concertée de l'aménagement du territoire. Il se félicite au contraire de ces projets d'agglomération: ils permettent de construire la région ensemble, de manière coordonnée, pour favoriser la qualité des espaces, résoudre les problèmes de mobilité et offrir finalement des lieux de vie de qualité. Nous profitons de ce moment pour remercier M. Baradel, chef de projet d'agglomération, et son équipe: comme l'a dit M. Hiltpold, nous avons pu bénéficier de présentations extrêmement détaillées.

J'aimerais reprendre quelques éléments entendus tout à l'heure. Non, ce n'est pas un projet technocratique, à moins que l'on décide, comme l'UDC, que le projet devient technocratique dès que l'on parle de Berne, du gouvernement fédéral et des subventions - le cofinancement se monte à pas moins de 500 millions. Est-ce qu'il est technocratique - et je reprends les propos du MCG - du moment qu'on intègre la région frontalière et la France ? Non: résoudre les problèmes de mobilité, proposer des projets d'aménagement urbain et des aménagements de qualité n'est pas technocratique. C'est au contraire construire une région où on accompagne les projets d'urbanisation et de logement.

J'entends dire que ce projet d'agglomération permet de bétonner et on cite les Eaux-Vives. Je dirai à M. Baertschi que je me félicite quant à moi des projets de logements de qualité quand je vais dans le quartier des Eaux-Vives. Je suis contente de voir la gare du CEVA et la Comédie de Genève. Je ne vois donc pas du béton mais des activités culturelles, la résolution des problèmes de mobilité et des logements qui répondent au besoin prépondérant de la population.

Pour toutes ces raisons, je pense que nous avons le devoir de réaliser ces projets d'agglomération. Je ne comprends d'ailleurs pas pourquoi l'UDC et le MCG les refusent et méprisent finalement les subventions fédérales qui pourraient nous être accordées. Je relève que pérorer sur ces projets est un bien grand luxe; on devrait au contraire s'en réjouir, car ils améliorent au quotidien la qualité de vie de l'ensemble des citoyennes et des citoyens de ce canton et de la région. Je vous remercie.

M. David Martin (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, notre agglomération est celle qui se trouve la plus démunie de Suisse en infrastructures de transport. Pour s'en rendre compte, il suffit de prendre une carte et d'observer le réseau ferré qui nous entoure. On cite souvent Zurich, qui a un réseau ferré extrêmement développé - mais on dira qu'à Zurich, c'est différent puisque ce n'est pas un canton transfrontalier. On peut faire l'exercice avec Bâle, agglomération transfrontalière et même trinationale: on voit du premier coup d'oeil que Bâle a un réseau ferré extrêmement bien développé. Ce projet d'agglomération est donc une fabuleuse aubaine pour Genève: les subventions fédérales lui permettront de rattraper un retard historique.

Jusqu'à maintenant, cela a été dit, les PA1, 2 et 3 ont permis d'attirer 500 millions de financement fédéral. C'est quand même le comble de s'opposer à ces financements fédéraux qui font du bien à notre agglomération ! Le retard est historique mais a aussi des causes récentes: nous avons perdu plus ou moins l'intégralité de la législature précédente à cause justement des tergiversations du MCG et de l'UDC, qui viennent de dire qu'on leur marche sur les pieds. En ce qui me concerne, j'ai plutôt envie de dire que ce sont le MCG et l'UDC qui nous marchent sur les pieds puisqu'une majorité soutient maintenant ce projet d'agglomération, ce dont on peut à mon sens se réjouir. On peut également se réjouir des efforts déployés par le Conseil d'Etat pour rehausser de 35% à 40% la part du financement fédéral, qui était récemment menacé.

Le projet d'agglomération, c'est bien connu, inclut des financements pour les infrastructures de transports publics - pour le CEVA et ses futures extensions, que nous appelons de nos voeux. Ce que l'on sait moins, c'est que ce paquet ficelé critiqué par certains - on se demande bien pourquoi - comprend aussi plein d'autres mesures très intéressantes en faveur de la mobilité douce. On peut citer la passerelle destinée aux vélos et aux piétons, prévue dans le lot du PA3, qui va permettre de franchir l'autoroute le long de la route de Meyrin pour relier Genève à Meyrin. Est-ce que c'est une chose foncièrement mauvaise ? Je ne crois pas. Par ailleurs, toute une série de mesures paysagères et de soutien à la biodiversité reçoivent des financements dans le cadre de ce paquet, par exemple le réaménagement du parc des Franchises ou encore le contrat corridors du Mandement.

Pour toutes ces raisons, les Verts soutiennent avec détermination ce projet de loi ainsi que tous les efforts qui permettront d'améliorer notre cohabitation à l'échelle de la région transfrontalière. Je vous remercie.

M. Olivier Cerutti (PDC). Mesdames et Messieurs, ce troisième projet d'agglomération a effectivement toute son importance dans l'édifice régional. Il structure de manière très forte un pack d'investissements avec la région Rhône-Alpes notamment, et je m'arrêterai trente secondes là-dessus: vous savez, quand vous demandez à un Savoyard de mettre deux francs de côté, c'est quelque chose qui a toute son importance. Je crois donc qu'on est obligé d'en tenir compte dans ce pack d'investissements. Celui-ci va plus loin parce qu'il prend en compte les fonds que vont verser la Confédération, les cantons de Genève et Vaud, qui participent aussi, et l'ensemble de nos communes - tous sont amenés à participer à cet axe structurant d'investissements.

Mesdames et Messieurs, on a compris ! Nous pouvons remercier le MCG parce qu'un vrai débat s'instaure aujourd'hui en plénière, et je pense qu'il était nécessaire de pouvoir dire quelques mots au vu de l'importance du projet. On peut inviter le MCG, et peut-être l'UDC avec lui, à nous présenter un projet de loi pour éventuellement réaliser un mur comme au Mexique ou en Israël ! Nous avons appris que les Romains ont mis les premières défenses sur le bastion de Saint-Laurent pour se protéger de l'extérieur. On a continué au XIIIe siècle, on en a refait au XVIe siècle pour les démolir au XVIIe. Vous m'excuserez, Mesdames et Messieurs, je suis démocrate-chrétien, et les démocrates-chrétiens n'aiment pas beaucoup les frontières... (Remarque.) ...mais ce qu'il est important de rappeler aujourd'hui, c'est qu'on peut faire la région ensemble. C'est à mon sens le point fort de ce troisième projet d'agglomération.

Nous avons loupé le deuxième projet d'agglomération ! Il a fallu aller rechercher des sous parce qu'on n'a pas réussi à se comprendre et à se mettre d'accord ! Le tram de Saint-Julien était programmé dans le deuxième pack d'agglomération déjà, Mesdames et Messieurs; il ne s'est pas réalisé. On ne reviendra pas là-dessus, mais on a perdu du temps - ce temps-là, qu'on le veuille ou pas, représente des francs supplémentaires d'investissement. Et je ne suis pas sûr qu'on ait toujours la capacité de faire les investissements qu'on est en train de réaliser à ce stade.

Oui, Mesdames et Messieurs, ce projet d'agglomération a toute son importance. On a beaucoup cité les projets qu'il permettra de réaliser; j'en ai pour ma part retenu un: celui de Cornavin. Quand on voit la place de Cornavin et le nombre de piétons qui la traversent chaque jour, je pense effectivement que si on arrive à la restructurer au travers de ce projet d'agglomération, eh bien on aura réussi ! Le parti démocrate-chrétien soutiendra ce projet de loi. Je vous remercie.

M. Rémy Pagani (EAG). J'ai participé treize ans au projet d'agglomération - j'ai vu passer les plans 1, 2, 3 et maintenant le plan 4 - et je m'étonne d'entendre les inepties de ceux qui n'y ont pas participé. Dire que ce sont des bureaucrates qui auraient monté ces projets n'est absolument pas conforme à la réalité. La réalité, c'est que ces projets structurants ont été imaginés il y a bien des années - bien trop d'années - et mis en place à travers le projet d'agglomération. L'ensemble des magistrats de la région, dans une parfaite bonne entente, se sont accordés pour faire en sorte que cette région puisse résoudre un de ses problèmes: la mobilité.

Alors quand j'entends certains... (Remarque.) Je trouve aussi qu'un certain nombre de députés devraient au moins avoir l'objectivité, disons, de reconnaître que les députés ont été tenus à l'écart, puisque en fait deux représentants de notre parlement prennent part à des séances une fois par année, et en plus ça change toutes les années ! Il y a donc là un véritable problème; il faudrait que ces deux ou trois députés soient attachés à ces projets d'agglomération pour en avoir une réelle connaissance plutôt que de lancer des idées en l'air - surtout quand leur objectif est de dénigrer une fois de plus la collaboration transfrontalière, internationale, qui s'est établie dans le cadre de ces projets.

Malheureusement, un certain nombre de magistrats sont aussi responsables d'avoir freiné ces investissements, notamment, on l'a dit, pour le tram de Saint-Julien: certains magistrats, tout comme la majorité du Grand Conseil d'une époque, n'ont pas voulu investir dans l'infrastructure et nous faisons maintenant les frais de ce retard. Je souhaite donc que le tram aille jusqu'à Ferney et pas seulement jusqu'à l'aéroport, qu'il aille également jusqu'à Bernex - enfin, il y va déjà, mais qu'il aille encore plus loin - qu'il aille à Saint-Julien. Tout cela est nécessaire pour faire fonctionner notre région: plus de 100 000 personnes viennent tous les matins et repartent tous les soirs - on parle de 600 000 passages aux douanes. Si on veut lutter contre la dégradation du climat, la moindre des choses est à mon sens de soutenir ce projet d'agglomération ! Je vous remercie de votre attention.

M. Patrick Dimier (MCG). Puisque notre collègue, qui vient de nous faire un brillant exposé, a participé aux plans 1, 2, 3, 4 et 5, je me demande si à la fin il aura une «rente en plans» ! (Rires. Applaudissements. Commentaires.) Plus sérieusement, Monsieur le président, vous me permettrez de dire qu'on parle de déficit démocratique, parce que c'est un système qui fonctionne à l'européenne ! Il est «top down» et non «bottom up» comme on a l'habitude de faire chez nous ! C'est clair qu'il y a des représentations parlementaires, mais ce n'est pas le souverain qui dicte et ordonne les choses, alors que chez nous, c'est lui. Quand on a des projets aussi importants - que j'apprécie pour bonne partie, je ne suis pas du tout dans la négation - j'estime que c'est au souverain de nous dire s'il est d'accord ou pas. Merci.

M. Jacques Béné (PLR). Vu la complexité des mesures qui nous ont été proposées, je vois mal le souverain se prononcer sur l'ensemble d'entre elles. Dans certaines communes, les mesures concernent de petites routes afin d'y installer là une piste cyclable, là une voie de bus pour quelques centaines de milliers de francs ou quelques millions; je vois mal le souverain se prononcer là-dessus. C'est notre travail à nous, parlementaires, de suivre ces mesures comme nous l'avons fait à la commission des travaux ! Lors de ces séances, nous avons largement pu poser toutes nos questions.

Ce que j'attends des groupes opposés aux mesures du projet d'agglomération 3, c'est de venir avec des propositions différentes de celles qui nous ont été faites en commission. Celles-ci ont été validées par la Berne fédérale auprès de laquelle, on le sait, le Conseil d'Etat doit se battre régulièrement pour obtenir des financements. Je crois que c'est là-dessus qu'il faut insister, et on peut féliciter l'exécutif d'aller se battre à Berne pour obtenir des financements - entre parenthèses, le PLR aimerait bien qu'il le fasse aussi pour la traversée du lac. (Rires.) Si le mécanisme des projets d'agglomération, dont le coût s'élève à 1,3 milliard pour les PA1, 2 et 3, permet à la Confédération d'en financer 509 millions, ce n'est pas rien ! C'est en faveur du Grand Genève, oui: c'est un projet d'agglomération. On doit faire avec nos voisins et c'est tant mieux si la Confédération nous y aide.

Pratiquement toutes les mesures qui nous ont été présentées prévoient des pistes cyclables. Au niveau de la mobilité douce, je crois par conséquent qu'un effort considérable a été fait; s'agissant des mesures paysagères aussi. Le point qu'il faut à mon sens souligner, c'est que certaines mesures des projets d'agglomération 1 et 2 pourraient ne pas être financées par Berne si elles ne sont pas mises en oeuvre rapidement. On peut donc insister auprès de l'administration - et c'est notre rôle - pour que ces délais soient respectés.

Mesdames et Messieurs, ces investissements amélioreront la qualité de vie des Genevois, beaucoup plus que d'autres projets politiques également importants, mais qui n'amélioreront en rien leur qualité de vie. Je pense par exemple au projet de loi sur les Dardelles dont on parlera certainement ce soir ou demain, pour lequel nous devrons investir 258 millions de francs: ce n'est politiquement pas intéressant. Il ne va pas améliorer la qualité de vie des Genevois, contrairement à ce projet d'agglomération 3; bienvenue au PA3, et on se réjouit d'ores et déjà du projet d'agglomération 4 que nous proposera le Conseil d'Etat. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Hiltpold, je suis désolé, il n'y a plus de temps de parole ni pour le rapporteur de majorité ni pour le PLR. La parole est maintenant à M. le député Daniel Sormanni.

M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je dois dire qu'on est dans une sorte de délire: le Grand Genève, quoi que vous en pensiez, ça reste dans vos rêves ! Nous sommes dans deux systèmes politiques et juridiques complètement différents et ce sont des choses difficiles à combiner. On s'est quand même aperçu, avec ces projets d'agglomération 1 et 2, que Berne nous a menacés - M. Béné vient d'ailleurs de le dire: «On ne va plus soutenir vos projets d'agglomération, parce qu'on les vote, mais vous ne les réalisez pas !» Le taux de réalisation des PA1 et 2 est absolument famélique. Je ne suis pas dans la commission - je ne sais pas si le sujet a été évoqué ni où on en est - mais il reste probablement encore, à ce stade, énormément de choses à réaliser. On en est pourtant au troisième - voire au quatrième - projet d'agglomération, c'est par conséquent bien joli de tirer des plans sur la comète, comme ça, pour les réaliser.

Il y a effectivement un déficit démocratique. C'est facile de dire: «Vous n'avez qu'à présenter des propositions alternatives !» Je crois qu'avec tout ce qui a été dit et proposé aujourd'hui, notamment par M. Pagani - vous transmettrez, Monsieur le président - avec tous ces projets, on n'a réussi qu'une seule chose: bloquer totalement la ville et faire fuir les entreprises. Voilà à quoi on va aboutir au bout du compte, parce que les projets d'aménagement de Cornavin vont juste être complètement catastrophiques ! (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) C'est un petit peu facile de critiquer comme ça. Non, ce n'est pas une bonne idée ! Ce n'est pas une bonne manière de faire. Est-ce que nos collègues français vont réaliser les parkings qu'ils avaient promis pour le CEVA ? Nada ! Rien du tout n'a été réalisé !

Le président. Merci, Monsieur le député, c'est terminé !

M. Daniel Sormanni. On est donc loin d'être vraiment efficaces dans ces projets d'agglomération et c'est pourquoi nous dirons non. Nous ne nous faisons pas d'illusions: la majorité va dire oui...

Le président. C'est terminé.

M. Daniel Sormanni. ...mais vous ne pourrez pas non plus espérer de la gauche qu'elle... (Le micro de l'orateur est coupé.)

Le président. La parole est à Mme la députée Christina Meissner.

Mme Christina Meissner (PDC). Merci, Monsieur le président. On a testé la frontière qui nous sépare; il est temps de revenir à la frontière qui nous rassemble en votant ce projet d'agglomération.

Le président. Parfait, vous l'avez fait en dix secondes - bravo, Madame la députée ! La parole va à M. le député Rémy Pagani pour quinze secondes. Il va falloir être aussi bref que Mme Meissner !

M. Rémy Pagani (EAG). Je suis rapporteur de minorité, Monsieur le président. Je voudrais juste dire que je trouve un peu contradictoire de prétendre que ce parlement n'a rien eu à faire puisque tous les projets d'agglomération passent par lui ! Et c'est parce qu'il a refusé de voter le tram ONU-Ferney, sous prétexte qu'il fallait...

Le président. Voilà...

M. Rémy Pagani. ...construire le tunnel...

Le président. ...c'est terminé.

M. Rémy Pagani. ...que nous avons pris du retard et que Berne nous a supprimé ses subventions.

Le président. C'est terminé, et je vous rappelle que vous n'êtes pas le rapporteur de minorité puisque c'est M. Baertschi !

M. Rémy Pagani. Je suis rapporteur... Ah, non, excusez-moi ! (Rires. Commentaires.)

Le président. Ce n'est pas grave ! La parole est enfin à M. le député Stéphane Florey pour quinze secondes.

M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Je veux juste dire que si on avait pris les mesures séparément, avec un réalisme certain, eh bien je ne suis pas sûr qu'elles auraient toutes été acceptées. Et c'est dans ce sens-là que ce type de projet est mauvais: on nous oblige à voter un paquet ficelé.

Une voix. Bien dit !

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Hiltpold, je suis désolé: il n'y a plus de temps de parole pour le PLR ou pour le rapporteur de majorité. La parole n'étant plus demandée, je cède maintenant le micro à M. le conseiller d'Etat Antonio Hodgers.

M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat. Merci, Monsieur le président. L'essentiel ayant été dit, Mesdames et Messieurs les députés, j'interviendrai brièvement. J'aimerais répondre aux détracteurs de ce crédit d'investissement, qui ont finalement peu critiqué les mesures contenues dans le projet de loi. On peut aborder le fond, puisqu'il s'agit effectivement d'un objet qui regroupe toute une série de mesures urbaines, de mesures relatives aux transports, à l'environnement, à la nature.

Les arguments qu'on nous oppose sont les suivants: «Il n'y a pas de mandat politique, c'est un paquet ficelé, l'agglomération est une utopie ! Les gens ne l'ont pas voté; le Grand Genève est un rêve !» Ceux qui rêvent, Mesdames et Messieurs, ce sont ceux qui pensent que Genève est une île ! Ce sont ceux qui pensent que Genève fonctionne en autarcie dans ses frontières cantonales ! Ceux-là rêvent et nient que 650 000 passages ont lieu chaque jour aux frontières cantonales - 650 000 passages par jour à nos frontières !

Le Grand Genève est une réalité - une réalité historique, comme l'a encore récemment rappelé l'historien Bernard Lescaze. Cette réalité a plusieurs siècles puisque Genève s'est toujours construit avec son environnement, autrefois savoyard et aujourd'hui français, mais il est dans le fond «grand genevois» - c'est l'appellation que nous avons choisie ensemble.

Pourquoi ce texte comporte-t-il toute une série de mesures ? Parce que c'est ce que nous demande la Confédération, Mesdames et Messieurs ! La Confédération fait des appels à projets aux agglomérations et leur demande, en échange de son aide - ce sont 100 millions de francs qui sont ici en jeu - de lui proposer un paquet de mesures. Genève pourrait s'en passer ! C'est vrai que nous n'avons pas de problèmes budgétaires, n'est-ce pas ! Nous pourrions tout à fait rejeter cette proposition de Berne ! Non, Mesdames et Messieurs: Berne pose ses conditions et requiert de nous une liste de mesures conjointes.

Et le canton de Genève se taille la part du lion ! Regardez les mesures proposées - on les a évoquées, mais écoutez-les: réaménagement de la place de Carantec au Grand-Saconnex, aménagement multimodal au P+R P47-P49 vers l'aéroport, aménagement pour piétons à la route de Veyrier, réaménagement de la route de Colovrex, pôle d'échange à Châtelaine, etc. Ce sont des mesures purement genevoises en faveur de la mobilité dont vous parliez ! Il y a par ailleurs le contrat corridors pour la nature qui, elle, traverse les frontières sans passeport - et c'est heureux - et les restaurations du milieu naturel. Tout cela est inclus dans ce projet.

Récemment, Mesdames et Messieurs, le peuple s'est prononcé indirectement sur cette question du Grand Genève. Il a dit oui à 69% à la libre circulation des personnes ! Qu'ont voulu dire par là les Genevoises et les Genevois ? Qu'ils veulent, bien sûr, que notre pays garde des relations stables avec ses voisins, mais aussi que la réalité transfrontalière de notre agglomération soit reconnue. C'est à un score très large que cette vision-là a été reconnue ! Vous dites que ce n'est pas démocratique, Mesdames et Messieurs de l'UDC et du MCG: je me réjouis que vous lanciez un référendum contre ces mesures d'amélioration de la qualité de vie dans tout le canton, dans tous les secteurs. Il vous faudra expliquer aux Genevois que vous crachez sur les 100 millions venus de Berne, destinés à des projets locaux sur le territoire.

Voilà la force de notre canton: notre canton s'est toujours enrichi de ses rapports avec l'extérieur. Il s'est toujours alimenté de ses rapports avec son voisin direct, qu'on appelle la France voisine. Si ce projet d'agglomération est reconnu à Berne dans sa première, deuxième et, là, troisième génération, c'est bien parce qu'il a une histoire bien plus ancienne que celle de notre débat. C'est l'histoire de Genève, qui a toujours travaillé avec son arrière-pays. Merci de faire bon accueil à ce crédit. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote.

Mis aux voix, le projet de loi 12551 est adopté en premier débat par 74 oui contre 16 non et 3 abstentions.

Le projet de loi 12551 est adopté article par article en deuxième débat.

Mise aux voix, la loi 12551 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 74 oui contre 16 non et 3 abstentions.

Loi 12551