République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 12201-A
Rapport de la commission de l'enseignement supérieur chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur la Haute école spécialisée de Suisse occidentale-Genève (LHES-SO-GE) (C 1 26)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XIV des 26 et 27 avril 2018.
Rapport de M. Jean Romain (PLR)

Premier débat

Le président. L'ordre du jour appelle maintenant le PL 12201-A, que nous traiterons en catégorie II, trente minutes. Le rapport est de M. Jean Romain, à qui je passe la parole.

M. Jean Romain (PLR), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi a été déposé par le département de l'instruction publique afin d'apporter une plus grande agilité administrative en ce qui concerne la HES-SO Genève. Le financement de la HES-SO est complexe, entre subventions intercantonales, subventions fédérales et revenus propres. La redistribution cantonale de l'enveloppe financière est contrôlée par une convention d'objectifs quadriennale - ce sera important pour la suite. Cette convention d'objectifs est elle-même contrôlée par la commission interparlementaire HES-SO.

Or les contrats LIAF - je rappelle qu'il s'agit de la loi sur les indemnités et les aides financières - durent quatre ans alors que les réalités financières sont variables: elles sont liées au nombre d'étudiants annuellement inscrits ou aux arbitrages budgétaires. Au fond, il y a donc une sorte de décalage chronologique, que l'on comprend. Afin de gagner en légèreté administrative, ce texte propose de «déliafer» le système, qui demande trop de travail administratif. Il faut en effet déposer un nouveau projet de loi chaque fois que les montants changent, ce qui implique un passage devant la commission puis évidemment devant le Grand Conseil afin qu'il l'adopte.

Le DIP voudrait éviter cette lourdeur. Or la LIAF permet justement à notre parlement d'exercer un contrôle: supprimer cette prérogative, c'est en l'occurrence lui demander de renoncer à la LIAF alors que le contrôle exercé par la seule commission interparlementaire se réduit très souvent à une acceptation pure et simple. Pourquoi ? Parce que la complexité de la structure fait que le budget de la HES-SO Genève est noyé dans la masse de la HES-SO entière. Ne plus soumettre la HES-SO Genève à la LIAF, c'est renoncer à rendre des comptes aux députés - à nous rendre des comptes ! Or, et c'est là le point le plus important, l'autonomie de la HES-SO Genève a justement pour contrepartie cette information aux députés; pour ce faire, la LIAF est le moyen le plus efficace.

Certes, aucun autre canton romand ne possède un contrôle de type LIAF; certes, les contrôles genevois sont nombreux et lourds dans de multiples domaines; certes, les sommes dont il est ici question demeurent assez modestes. Si nous mettons le doigt dans cet engrenage, nous risquons toutefois de voir arriver demain un autre projet de loi qui reprendra les mêmes arguments, mais pour un tout autre domaine. La majorité de la commission a refusé ce projet de loi, et cette majorité vous demande évidemment de la suivre. Je vous remercie.

M. André Pfeffer (UDC). Comme c'est clairement indiqué à la page 7 du projet de loi, l'objectif du département est de supprimer un contrôle, un moyen de surveillance des dépenses, afin d'éviter une forte charge administrative pour les hauts fonctionnaires genevois. Le département signale également qu'il estime ce contrôle, ce moyen de surveillance des dépenses inutile car Genève devra de toute façon payer la facture. Cette approche laisse le groupe UDC perplexe.

Le groupe UDC aimerait rappeler au département de l'instruction publique qu'il faudrait au contraire renforcer et développer le contrôle de ses dépenses. Il faut rappeler certains dérapages de ce département: les professeurs du secondaire II enseignent 30% de moins que la moyenne suisse et il y a moins d'élèves par classe à Genève qu'en Suisse. Alors qu'il y a 1,4 poste d'enseignement par classe en Valais, il y en a 2,1 à Genève. Le taux d'absentéisme de l'administration est en outre deux à trois fois supérieur à Genève qu'ailleurs. Les collèges genevois proposent plus de 3000 options ou cours spécifiques tandis que Zurich n'en propose que trente ! Le nombre de cadres dans l'administration genevoise est très largement supérieur à celui des autres cantons, etc., etc.

Ces dérapages non contrôlés - et surtout non suivis ou maîtrisés - sont malheureusement connus de tous les Genevois. Ce qui l'est moins, c'est que, sans maîtrise des coûts, cette gestion coûte excessivement cher. Le budget annuel du département de l'instruction publique est de 2,1 milliards, dont au minimum 700 à 800 millions seraient assimilables à du gaspillage. Le problème n'est pas le gaspillage en tant que tel: chacun sait que s'il y a du plus cher, du mieux et du meilleur sur toutes les lignes de dépense, l'addition finale est évidemment conséquente.

Le vrai problème de ce texte est que le Conseil d'Etat propose à un organe de contrôle de supprimer un instrument de contrôle à cause d'une forte charge administrative pour les hauts fonctionnaires. Cette approche est surréaliste ! Pour cette raison, notre groupe refusera ce projet de loi. Merci.

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, je crois que l'essentiel a été dit. Il n'est effectivement pas du tout adéquat de supprimer, pour la partie genevoise de la HES-SO, ce passage par la LIAF. On le voit bien au niveau de la HES-SO en tant que telle: la commission interparlementaire a finalement assez peu de pouvoir et assez peu la possibilité de voir et de comprendre comment se répartissent les coûts et comment tout cela est géré. A travers ce contrat LIAF, on a au moins l'avantage de savoir ce qui se passe à Genève.

Je pense qu'il est extrêmement important que cela reste, et d'ailleurs le directeur général de la HES lui-même l'a bien compris: il dit que ce contrat LIAF demeure finalement le meilleur moyen de procéder, de façon à pouvoir discuter du financement à la commission de l'enseignement supérieur puis en plénière du Grand Conseil. En conséquence, il est très rapidement apparu que ce projet de loi était en effet totalement inadéquat. Une majorité de la commission l'a refusé, ce que nous vous invitons aussi à faire au nom du MCG. Je vous remercie.

M. Jean-Luc Forni (PDC). On l'a entendu: le gros du financement des établissements genevois de la HES-SO vient donc de la HES-SO, qui lui verse environ 146 millions, alors que les contributions de notre canton à la HES-SO dans son ensemble s'élèvent à 100 millions de francs. Le canton de Genève a un contrôle sur la commission interparlementaire par le biais d'une délégation composée d'un membre par parti. Cette commission vérifie et adopte les objectifs stratégiques de cette HES-SO, vérifie les résultats et les planifications financières; tout cela n'est pas remis en question par le projet de loi. C'est effectivement le «core business», si j'ose dire, de la HES-SO et cela continuera à fonctionner.

Ce dont nous parlons ici, c'est des conventions locales particulières, de l'ordre de 20 millions pour le canton de Genève. Ce montant est donc soumis à un contrat LIAF, avec une convention d'objectifs. Que trouve-t-on là-dedans ? Des loyers, des salaires, des stages rémunérés. S'il est vrai qu'il y a une certaine complexité administrative, il faut mettre ça en regard avec toutes les entités subventionnées - parfois à hauteur de 1 million - qui doivent se soumettre au même exercice.

Le rapporteur de majorité l'a évoqué, si d'aventure toutes les organisations subventionnées venaient à tenir le même discours, eh bien il n'y aurait plus de contrôle LIAF et il n'y aurait plus de contrôle du parlement sur cette LIAF. Le directeur général de la HES-SO Genève, on l'a aussi entendu, considère également que c'est à travers la LIAF que s'exerce au mieux le contrôle parlementaire. Gardons par conséquent ce contrôle parlementaire, même s'il est un petit peu lourd: je pense que toutes les entités subventionnées doivent être traitées sur un pied d'égalité, quel que soit le montant de la subvention. Je vous remercie.

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Je voudrais vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, que le département avait déjà pris acte du mauvais accueil réservé à ce texte en commission; entre-temps, en septembre dernier, vous avez voté le projet de loi sur ces 20 millions relatifs aux conditions locales particulières et à la stratégie cantonale en matière de HES-SO.

A travers le présent objet, il ne s'agissait toutefois pas, pour nous, d'empêcher le contrôle parlementaire ! Ce contrôle s'exerce notamment au moment du budget; je crois d'ailleurs que vous avez montré cette année que votre parlement contrôle en effet les demandes du Conseil d'Etat. A mon sens, il n'y avait donc pas de soucis notables de ce côté-là. Je m'adresse là à M. Pfeffer en particulier: nous essayions de supprimer une genevoiserie. Les autres cantons de la HES-SO ne font pas ratifier par leurs parlements respectifs les conditions locales particulières ou leurs stratégies cantonales: c'est du ressort de l'exécutif.

Nous avons par conséquent simplement voulu nous aligner sur les autres cantons; j'ai pris acte, tout comme le Conseil d'Etat, du fait que ce n'était pas votre souhait. Nous avons entre-temps réglé la question en vous proposant le projet de loi que vous avez voté en septembre dernier.

Le président. Merci. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote sur l'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 12201 est rejeté en premier débat par 57 non contre 29 oui.