République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2287-B
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. Jean-Michel Bugnion, Lisa Mazzone, Mathias Buschbeck, Sarah Klopmann, Sophie Forster Carbonnier, Boris Calame, Frédérique Perler, Yves de Matteis, Jean-Marc Guinchard, Jean-Luc Forni, Anne Marie von Arx-Vernon, Béatrice Hirsch pour développer le sens civique et la participation aux votations chez les jeunes

Débat

Le président. Nous nous penchons maintenant sur la M 2287-B et je passe la parole à Mme Frédérique Perler.

Mme Frédérique Perler (Ve). Merci, Monsieur le président. J'aimerais souligner que les Verts ont été agréablement surpris par cette réponse du Conseil d'Etat, ce dont nous le remercions, et nous observons qu'au fond un rapport de minorité a toute sa pertinence. En effet, lors des auditions, notamment du DIP, il s'avérait assez compliqué de mettre en place ces votations en blanc pour les jeunes, or on découvre dans le rapport du Conseil d'Etat sur cette motion qu'il est effectivement question de garantir l'expérience d'une votation en blanc pour chaque élève avant ses 18 ans. Le Conseil d'Etat va même beaucoup plus loin que ce qui était demandé dans le rapport de minorité, dans la mesure où il se propose d'effectuer un projet pilote avec trois votations en blanc par année. Nous souhaitions donc simplement le remercier pour cet effort. Merci.

M. Jean Burgermeister (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, il est évident que le groupe Ensemble à Gauche prendra favorablement acte de ce rapport du Conseil d'Etat. C'est un élément positif, il est bon d'encourager les jeunes à voter, mais il faut quand même faire le constat qu'il y a là un manque et que cette motion ne résoudra pas la question sur le fond. Les études scientifiques qui se sont penchées sur la non-participation aux votations chez les jeunes ont largement mis en avant la notion de moratoire politique des années de jeunesse. Ce phénomène est en réalité largement dû à une précarisation accrue des jeunes qui, ne trouvant ni emploi ni logement, peinent à entrer dans le «monde des adultes», entre guillemets, et ne s'y sentent pas intégrés, avec comme conséquence qu'ils participent beaucoup moins aux votations. A mon sens, il est donc important de rappeler ici qu'encourager les jeunes à voter et favoriser leur participation aux votations passe aussi par une lutte contre la précarité de la jeunesse.

En outre, il faut que tout le monde puisse voter, pas seulement les jeunes, mais les gens de tous âges, or quand on fait signer des initiatives et des référendums dans la rue, on entend bien souvent: «Mais de toute façon, à quoi bon ? Ils font ce qu'ils veulent, au parlement ou au gouvernement !» Il faut du reste rappeler que, lors de la dernière session, la majorité de droite est passée en force sur un projet de loi qui va à l'encontre de ce qui a été voté par la population. On pourrait aussi parler des tarifs des TPG, sur lesquels le peuple a été amené à voter trois fois en l'espace de deux ans, ou encore de la RIE III, qui a été balayée dans les urnes et qui revient sur la table sous la même forme, mais avec un autre nom. Je pense qu'il est donc important de prendre acte de la volonté populaire et de la respecter. Encourager les gens à voter passe aussi par le respect de leurs choix lorsqu'ils se sont exprimés, et clairement.

Un dernier point: beaucoup d'études ont également mis en avant que la plupart des jeunes qui votent le font notamment parce qu'ils ont vu leurs parents voter; on peut donc de nouveau regretter le fait que de nombreuses personnes ne verront jamais leurs parents voter parce qu'on ne leur octroie pas ce droit, les conditions d'accès à la nationalité suisse étant très difficiles.

En conclusion, cette motion est évidemment positive, mais sur le fond il reste des problèmes structurels à résoudre, et tant qu'on n'aura pas pris ces problèmes au sérieux, la question du vote des jeunes ne pourra pas être réellement résolue. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Romain de Sainte Marie (S). Le groupe socialiste salue le fait que l'initiative du vote en blanc dans les établissements scolaires puisse être mise en oeuvre et qu'une phase test ait lieu. En effet, cette démarche était laissée au bon vouloir des professeurs, et je pense d'ailleurs que plusieurs d'entre nous ici ont pu expérimenter le processus du débat dans des établissements scolaires et même ensuite assister à des votes. Le principe du vote est extrêmement bénéfique pour les jeunes, car cela les encourage et les habitue très tôt à cet exercice démocratique essentiel. Du reste, on voit hélas que par la suite cet acte n'est pas toujours effectué par les jeunes puisque, on le sait, le taux de participation n'est en général pas des plus élevés dans cette tranche d'âge, malheureusement. Ce qu'a dit mon préopinant tout à l'heure est dès lors juste, et il existe des conditions-cadres pour encourager les jeunes à participer. Bien évidemment, les sujets politiques resteront toujours des sujets politiques, c'est donc à nous aussi, pouvoir politique, d'encourager cette participation en rendant les sujets plus attractifs. On se souvient du Parlement des jeunes genevois qui nous avait interpellés sur le principe d'easyvote pour faciliter la compréhension des sujets; c'est une étape indispensable, tout comme l'est ici l'exercice du vote en blanc dans les établissements scolaires.

C'est vrai qu'on peut regretter - vous vous en souvenez - que ce Grand Conseil, durant la précédente législature, n'ait pas voulu aller un peu plus loin en abaissant l'âge du droit de vote à 16 ans, comme le canton de Glaris l'a fait en votant à main levée, ce qui constitue d'ailleurs un exercice démocratique intéressant. On se rappelle aussi que le conseiller fédéral PLR Didier Burkhalter avait lui-même pris position pour le droit de vote à 16 ans. En effet, une démocratie fonctionne bien lorsque la base du peuple vote, lorsque la plus grande partie de ce peuple peut voter, ce qui implique d'étendre les droits démocratiques de la façon la plus large possible, y compris au niveau de l'âge.

Aujourd'hui, c'est donc un constat d'échec de voir une si faible participation, et en tant que politiques nous devons être préoccupés par ce sujet et faire en sorte que les plus jeunes votent davantage. Nous ne devons pas simplement rester les bras croisés en prenant acte de ce constat, mais tout faire pour intéresser au maximum les jeunes à la politique, et surtout pour les entendre dans le débat public. (Quelques applaudissements.)

Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Puisque maintenant l'usage veut qu'on parle durant la séance des extraits, eh bien je tiens moi aussi à relever combien cette motion est importante pour le parti démocrate-chrétien, qui en est cosignataire et qui maintient son grand enthousiasme pour inciter les jeunes à voter. Nous remercions donc le Conseil d'Etat et la chancellerie de tous les travaux effectués pour motiver les jeunes, de même que leur famille - parce que l'inverse existe aussi, des jeunes peuvent être plus motivés que leur entourage - et renforcer chez eux l'intérêt pour le vote, afin que les autres ne décident pas à leur place. Je vous remercie, Monsieur le président.

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, qu'il est agréable d'entendre tous ces remerciements et toutes ces louanges de la part de tous les bords politiques, ou presque ! J'aimerais simplement vous dire que le Conseil d'Etat est très attentif à l'intérêt que les jeunes portent à la politique, mais il ne saurait imaginer qu'il suffise d'organiser des votes en blanc dans les écoles pour résoudre la question de la participation. En ce qui me concerne, je suis persuadée que cette participation se construit dès le plus jeune âge, bien sûr dans la famille, mais aussi à l'école, c'est pourquoi la loi sur l'enfance et la jeunesse que vous avez votée il y a quelques mois - plus précisément le 1er mars dernier - comporte un article sur la participation, de même que la volonté de renforcer tout ce qui touche aux instances participatives dans les écoles. Il ne s'agit pas de faire des tout jeunes des enfants rois, comme on l'entend parfois, mais nous sommes convaincus que si, lorsqu'ils sont petits, on offre la possibilité aux enfants de s'exprimer sur des sujets qui les concernent - même si ce sont des thèmes tout bêtes comme la cour de récréation ou ce qui se passe dans la classe - en leur apprenant à attendre leur tour pour parler, etc., ce genre de démarche en fera à terme des citoyens et des citoyennes engagés. Voilà simplement le message que je voulais vous faire passer.

Je vous rappelle aussi que lors du vote du projet de loi sur l'enfance et la jeunesse, vous aviez malencontreusement - c'était probablement un égarement dû à la période préélectorale, qui sera sans doute rétabli dans quelque temps, je l'espère - supprimé le conseil de la jeunesse, or il constitue aussi un moyen de favoriser la participation des jeunes. Je vous remercie de votre attention.

Le président. Je vous remercie, Madame la conseillère d'Etat. La parole n'étant plus demandée, il est pris acte de ce rapport.

Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2287.