République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 27 août 2009 à 14h15
56e législature - 4e année - 10e session - 58e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 14h15, sous la présidence de M. Eric Leyvraz, président.
Assistent à la séance: MM. Laurent Moutinot, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. David Hiler, président du Conseil d'Etat, François Longchamp, Robert Cramer et Mark Muller, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. David Amsler, Christophe Aumeunier, Guillaume Barazzone, Caroline Bartl Winterhalter, Sébastien Brunny, Beatriz de Candolle, Maurice Clairet, Victoria Curzon Price, Jacques Follonier, Morgane Gauthier, Anne Mahrer, Yves Nidegger, Ariane Reverdin, Ivan Slatkine et Pierre Weiss, députés.
L'assemblée peut rester debout, nous allons immédiatement procéder à des prestations de serment.
Le président. M. Ernest Greiner est assermenté. (Applaudissements.)
Le président. M. Marc Henzelin est assermenté. (Applaudissements.)
Annonces et dépôts
Le président. La pétition suivante, parvenue à la présidence, est renvoyée à la commission des pétitions:
Pétition : Soutien au centre Grisélidis Réal (P-1693)
Le président. Le Conseil d'Etat nous informe qu'il répondra à l'interpellation urgente écrite suivante lors de notre prochaine session:
Interpellation urgente écrite de Mme Véronique Pürro : Justice 2011: sommes-nous prêts pour faire face aux différentes conséquences ? (IUE-804)
Il en est pris acte. Nous passons aux interpellations urgentes écrites ayant reçu une réponse.
Annonce: Session 09 (juin 2009) - Séance 47 du 12.06.2009
Cette interpellation urgente écrite est close.
Annonce: Session 09 (juin 2009) - Séance 47 du 12.06.2009
Cette interpellation urgente écrite est close.
Annonce: Session 09 (juin 2009) - Séance 47 du 12.06.2009
Cette interpellation urgente écrite est close.
Annonce: Session 09 (juin 2009) - Séance 47 du 12.06.2009
Cette interpellation urgente écrite est close.
Annonce: Session 09 (juin 2009) - Séance 47 du 12.06.2009
Cette interpellation urgente écrite est close.
Annonce: Session 09 (juin 2009) - Séance 47 du 12.06.2009
Cette interpellation urgente écrite est close.
Annonce: Session 09 (juin 2009) - Séance 47 du 12.06.2009
Cette interpellation urgente écrite est close.
Mémorial: réponse remplacée par IUE 798-A-1: Session 12 (octobre 2009) - Séance 65 du 08.10.2009
Annonce: Session 09 (juin 2009) - Séance 47 du 12.06.2009
Cette interpellation urgente écrite est close.
Annonce: Session 09 (juin 2009) - Séance 47 du 12.06.2009
Cette interpellation urgente écrite est close.
Annonce: Session 10 (juin 2009) - Séance 54 du 26.06.2009
Cette interpellation urgente écrite est close.
Annonce: Session 10 (juin 2009) - Séance 54 du 26.06.2009
Cette interpellation urgente écrite est close.
Premier débat
Mme Mathilde Captyn (Ve), rapporteuse de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi vise à apporter deux principaux changements. Il supprime d'une part la durée de six mois de la mesure d'exclusion de zone que prévoit la loi l'application de la loi sur les étrangers, la LaLEtr, et vise d'autre part à étendre le champ d'application de cette mesure par une liste exemplative, citant le vol, le brigandage, le dommage à la propriété et les lésions corporelles intentionnelles, afin d'améliorer la sécurité à Genève.
Nous avons étudié ce projet de loi à la commission judiciaire et de la police, nous avons procédé à plusieurs auditions, et il a été constaté que ces modifications ne permettent pas en réalité d'aller plus loin que la situation actuelle. Il est effectivement déjà possible aujourd'hui de prolonger de six mois en six mois une mesure d'exclusion de zone. Par ailleurs, le droit fédéral permet déjà d'ordonner une mesure d'interdiction de pénétrer lorsque l'étranger «trouble ou menace la sécurité publique.»
Les partis ont donc été assez dubitatifs quant à l'acceptation ce projet de loi, ce qui a amené le résultat que vous pouvez lire dans le rapport, c'est-à-dire 6 oui contre 6 non et 2 abstentions. La majorité de cette commission vous invite par conséquent à refuser ce projet de loi.
M. Frédéric Hohl (R), rapporteur de minorité. Le but de ce projet de loi, que nous avons déposé en septembre 2008 avec le parti libéral, a été rappelé. Il nous tient à coeur, surtout en cette période où l'insécurité va galopante, de traiter les problèmes d'insécurité, notamment ceux qui sont liés à la criminalité de rue. Et, Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi tend réellement à protéger les habitants de Genève. Bien évidemment, s'il n'y avait que ce projet de loi, cela ne suffirait pas. Or il s'agit d'un projet de loi supplémentaire, d'une mesure supplémentaire pour lutter contre la criminalité.
Mesdames et Messieurs les députés, je crois que nous sommes tous conscients de ce qui se passe à Genève depuis quelques mois, voire depuis quelques années. Je vous demande donc instamment de renvoyer ce projet de loi à la commission judiciaire, afin que l'on s'attelle véritablement au travail que nous devons effectuer autour de cette problématique qui nous tient tous à coeur ! (Remarque.) Une fois de plus, je vous demande de renvoyer cet objet à la commission judiciaire.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes ainsi saisis d'une demande de renvoi de ce projet de loi à la commission judiciaire et de la police. Peuvent s'exprimer les deux rapporteurs et le Conseil d'Etat.
Mme Mathilde Captyn (Ve), rapporteuse de majorité. Au vu du nombre d'auditions que nous avons faites et de l'ensemble de la matière que nous avons bien étudiée, il ne me semble pas nécessaire de renvoyer ce projet de loi en commission.
Le président. Personne ne demandant la parole, nous passons au vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10358 à la commission judiciaire et de la police est adopté par 32 oui contre 29 non.
Premier débat
Mme Béatrice Hirsch (PDC), rapporteuse de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi a un but assez simple: permettre au citoyen de se faire une idée rapidement, lorsqu'il reçoit la brochure de votation, de ce sur quoi il va voter et des modifications entraînées par les objets soumis au vote. Ce projet de loi radical a fait suite à l'annulation du scrutin de l'IN-134 pour cause de partialité de «L'essentiel en bref». C'était la première fois que l'on se trouvait confronté à quelqu'un qui a contesté la neutralité de «L'essentiel en bref». En commission, on a beaucoup débattu pour savoir si cela valait la peine de légiférer pour une fois, étant donné que l'on ne légifère en principe pas pour un seul cas. Pourtant, ce n'était certainement pas la première fois que cet «Essentiel en bref» était partial. Il suffit à cet égard de reprendre «L'essentiel en bref» concernant la votation en février 2008 de l'initiative sur la fumée passive. «L'essentiel en bref» commence simplement par: «La fumée des autres tue.» C'est assez clair sur la partialité de ce texte, que l'on soit pour ou contre cette initiative.
Le deuxième point dont on a longuement débattu en commission relevait du caractère indispensable ou facultatif de «L'essentiel en bref» pour le Conseil d'Etat lors de la rédaction du commentaire. Beaucoup ont dit: «Les citoyens savent faire la part des choses, un "Essentiel en bref" de quelques lignes ne vaut pas la peine si l'on peut résumer l'objet dans le commentaire en moins d'une page.» Je vous propose alors de reprendre un objet soumis à votation le 8 février 2009. Le titre indique simplement: «Loi modifiant la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation», suivi du titre de la loi modifiée et des dispositions concernées. Quand on regarde dans la brochure officielle l'explication de cet objet soumis au vote, avant le texte de commentaire on trouve d'abord le projet de loi lui-même, les articles modifiés, puis suit le commentaire des autorités concernant les modifications. Alors oui, si on s'y attelle vraiment bien, on peut en effet comprendre de quoi il s'agit. Mais pour beaucoup de gens, il est important, quand ils reçoivent la brochure de votation, de rapidement comprendre ce sur quoi ils vont voter. Or là, il faut vraiment rechercher, et l'objet est parfois difficile à comprendre.
C'est pourquoi la majorité de la commission des droits politiques, après quelques joutes oratoires sur la différence entre «impartial» et «neutre» et sur la position de certaines virgules, a décidé que, oui, un «Essentiel en bref» compris dans la brochure de votation était nécessaire, cela pour tout objet soumis à votation, et pas seulement pour ceux dont les explications prennent plusieurs pages, et que cet «Essentiel en bref» devait être une synthèse brève et neutre des objets soumis à votation. Ainsi, la majorité de la commission a décidé qu'il fallait que cet «Essentiel en bref» figure.
Un troisième sujet de friction a été de savoir qui allait rédiger ce texte, s'il était compris dans le commentaire du Grand Conseil ou s'il s'articulait autrement. Ce point, en l'occurrence, était relativement mineur pour nous, la seule chose importante étant de rendre cet «Essentiel» obligatoire.
Pour toutes ces raisons, la majorité de la commission des droits politiques vous propose d'accepter ce projet de loi.
M. Marcel Borloz (L), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, ce texte a été déposé par dépit, suite à l'annulation par le Tribunal administratif de la votation sur l'IN-134. A la suite de cette décision, les auteurs de ce projet ont estimé qu'il était nécessaire de mieux informer les citoyens sur les enjeux des votations. Ce projet de loi propose que nous trouvions, dans les brochures, une synthèse brève et neutre.
Il est évident que ce texte n'empêchera pas, à l'avenir, que le Conseil d'Etat soit désavoué par une prise de position un peu trop partiale dans la synthèse. Dès lors, il appartient au Conseil d'Etat de prendre toutes les mesures nécessaires dans la rédaction de la brochure explicative pour ne pas se mettre en porte-à-faux avec la loi. Aucune base légale n'est en outre nécessaire pour permettre la présence d'un résumé dans la brochure, la fréquence des rubriques «L'essentiel en bref» le démontrant.
Il serait absurde d'obliger les autorités à résumer en une page ce qu'elles viennent de dire en une page et demie. Une page du type de «L'essentiel en bref» ne se justifie qu'en présence d'objets lourds. Je pense que les citoyens, avec la multiplication des textes - rendant encore plus indigeste la lecture - ne seront plus capables de s'y retrouver. Il est évident que sur des sujets de grande importance, le Conseil d'Etat peut se fendre d'un résumé. De plus, même le Conseil d'Etat estime qu'il sera extrêmement difficile de faire preuve d'une objectivité absolue dans la rédaction de cette synthèse et qu'il vaut mieux résumer les prises de position.
Il faut également préciser qu'en distinguant la synthèse et le commentaire du Conseil d'Etat le projet de loi laisse entendre qu'ils ne seront pas soumis aux mêmes règles. C'est le cas, puisque, à teneur du projet de loi, le Conseil d'Etat soumet le commentaire au Bureau du Grand Conseil; la synthèse ne sera pas soumise.
Il est évident que la minorité n'est absolument pas contre la synthèse brève et neutre, mais contre l'obligation pour chaque sujet. Mesdames et Messieurs les députés, la minorité vous invite à refuser l'entrée en matière de ce projet de loi. Si elle devait être acceptée malgré tout, il aurait lieu de l'amender.
M. Charles Selleger (R). Comme l'a dit mon préopinant, le projet de loi qui vous est présenté, déposé le 3 décembre 2008, fait suite à l'annulation par le Tribunal administratif du scrutin de l'initiative 134. La raison de l'annulation portait sur la nature politiquement orientée de la rubrique «L'essentiel en bref». Dans les brochures explicatives adressées aux citoyens avec leur matériel de vote, l'avis des autorités, ainsi que celui des initiants et des référendaires selon les cas, fait l'objet de rubriques, les commentaires, qui sont actuellement définies dans la législation et qui ne sont pas remises en question. «L'essentiel en bref» est une rubrique supplémentaire, jusqu'ici non obligatoire et non définie dans la législation. Cette rubrique est néanmoins fort utile, comme vous avez tous pu vous en rendre compte, car elle apporte aux citoyens souvent peu désireux de se plonger dans les commentaires des partis, en quelques lignes facilement lues, les informations nécessaires à leur rappeler la nature de la question soumise au vote.
Le Conseil d'Etat ayant renoncé à rédiger cette rubrique, échaudé qu'il était par le désaveu du Tribunal administratif, il était devenu nécessaire de fixer dans la législation non seulement la présence de cette rubrique, mais sa nature obligatoirement neutre. C'est bien ce que définit le projet de loi, en précisant que les explications de vote doivent comporter «une synthèse brève et neutre» à laquelle on donnera le titre que l'on voudra. Pourquoi, d'ailleurs, ne pas retenir celui d'«Essentiel en bref» ?
Malheureusement, pour le rapporteur de minorité, les choses ne sont pas simples. C'est vrai que, à force de confondre les commentaires et la synthèse, tout devient «superflu, lourd et mal rédigé». Non, Monsieur Borloz, si l'intention du projet de loi est le maintien d'une rubrique présentant les objets soumis au vote d'une manière synthétique et neutre, facilement accessible à tous, il ne pouvait pas être rédigé de manière plus claire. Si les groupes minorisés veulent voir disparaître «L'essentiel en bref», qu'ils le disent clairement ! Sans essayer de brouiller les cartes, notamment par des amendements visant à inclure la synthèse dans le commentaire... Allez comprendre !
Pour notre part, le groupe radical se prononcera clairement en faveur du maintien de cette rubrique et votera l'entrée en matière de ce projet de loi.
M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs les députés, il est assez rare, l'expérience de chacun d'entre nous le démontre, qu'un projet de loi rédigé en réaction s'avère dans la durée une solution de choix. Or ici, c'est bien ce qui s'est passé. Le Conseil d'Etat, effectivement, a dérapé sur un commentaire. Que cela soit dans un résumé ou ailleurs que dans un résumé, cela n'y aurait rien changé. De toute façon, le Tribunal administratif aurait de la même manière décidé que le recours dirigé contre la brochure dans l'affaire en question était justifié et l'aurait admis.
Il est certes tentant de prévoir dans la législation le détail de ce que nous aimerions voir dans la brochure. C'est tentant, mais dangereux, parce qu'après avoir parlé ici de la synthèse, on s'intéressera ensuite aux paragraphes et on finira avec la typographie... Tout cela dans un contexte où nous avons voulu, lors de l'adoption de la disposition pertinente de la loi sur l'exercice des droits politiques, dire clairement que le Conseil d'Etat restait le maître de la rédaction de la brochure de votation.
Que demande ce projet de loi ? Une synthèse «brève» - ce qui est en principe la caractéristique des synthèses - et surtout «neutre». D'une certaine manière, il demande au Conseil d'Etat de faire appel à une sorte de rédacteur idéal qui n'existe que dans les rêves et qui est capable de tirer la substantifique moelle de la question posée à l'électeur en étant d'une telle objectivité que cela apparaît comme dépourvu de toute orientation politique. La personne qui peut faire cela, Mesdames et Messieurs, n'est pas encore née ! Ce n'est en tout cas pas le Conseil d'Etat, qui est un acteur de la vie publique, non une sorte d'instance de sages; il n'est pas le conseil de discernement de telle ou telle république orientale. Il est une autorité politique qui est là pour présenter un commentaire, certes objectif, mais dont la neutralité n'est pas la caractéristique première. Les libéraux estiment par conséquent que ce projet de loi, rédigé dans l'émotion d'une réaction, va trop loin dans le détail et qu'il manque sa cible.
Mais nous considérons surtout - et c'est là que j'aimerais en venir pour l'essentiel - que ce projet de loi est risqué. Il est risqué, d'abord parce qu'il va à l'encontre de ce que nous avons voulu dans ce parlement: que le Grand Conseil ait un regard sur la brochure rédigée par le Conseil d'Etat. Or soudain, on voudrait n'avoir le regard que sur la partie qui relève du commentaire et laisser le Conseil d'Etat sans aucun contrôle sur la partie synthétique, alors même que l'on exige précisément de cette synthèse des caractéristiques particulières, à savoir cette neutralité. Je ne suis pas d'accord, Mesdames et Messieurs, que l'on commence à démanteler maintenant ce que nous avons arraché il y a deux ans, ce regard sur la brochure du Conseil d'Etat, qui est un regard essentiel pour toutes les hypothèses où le parlement et le gouvernement ne sont pas d'accord sur la recommandation à donner sur un objet soumis à votation populaire.
Mais surtout, le deuxième point sur lequel je souhaiterais attirer votre attention est le fait que, dans toute la législation genevoise, il y a relativement peu de dispositions qui génèrent autant de recours que celle-là. N'est-ce pas ? La brochure de votation et élections est l'une des parties les plus «recourogènes» de l'ensemble de la législation genevoise. Cela signifie que toucher à cela ne doit se faire qu'avec une extrêmement prudence, en étant absolument certain des conséquences et en étant absolument certain que l'on ne va pas donner des armes supplémentaires à tous ceux qui, à chaque fois, ne sont pas contents de la façon dont les choses se passent. Or précisément, en créant une nouvelle catégorie, qui n'existe nulle part, dans aucune jurisprudence, ni du Tribunal administratif genevois, ni du Tribunal fédéral, on va engendrer une situation kafkaïenne dans laquelle les autorités judiciaire n'y comprendront plus rien et diront que c'est une fois de plus une genevoiserie que de vouloir distinguer la partie où les autorités disent ce qu'elles pensent de la partie où les autorités disent ce que quelqu'un de neutre devrait penser. Et cela, Mesdames et Messieurs, c'est un risque ! C'est un risque pour la sécurité de nos opérations électorales.
C'est la raison pour laquelle les libéraux n'ont pas accepté ce projet de loi en commission et ne voteront pas l'entrée en matière aujourd'hui. Cela n'empêche pas - et vous l'avez vu, puisque vous l'avez reçu sur vos tables - dans l'hypothèse où une majorité voudrait absolument dire au Conseil d'Etat qu'il doit mettre une synthèse brève et neutre, qu'alors nous le fassions au moins - au moins ! - d'une manière qui réduise au strict minimum le risque de complications juridiques, qui ne crée pas des catégories de textes différentes et qui ne prive pas ce parlement du droit de contrôle qu'il a obtenu de la dernière réforme. Tel est l'objet de l'amendement général que nous avons déposé.
Mesdames et Messieurs, je ne doute pas des intentions absolument pures des auteurs de ce projet de loi, qui ont décidé de réagir - à juste titre, parce que ce qui s'était passé était un dysfonctionnement. Mais encore une fois, ne réagissons pas d'une manière qui pourrait, par la suite, nous faire regretter d'avoir compliqué une matière qui, d'ores et déjà aujourd'hui, est singulièrement délicate.
M. Philippe Guénat (UDC). Monsieur le président, aux yeux de l'UDC, ce projet de loi n'est qu'une réaction à chaud et un pétard mouillé, une tentative malheureuse, une fois de plus, du parti radical et du parti démocrate-chrétien, qui a fait suite au cas de l'initiative 134, comme on l'a dit, traitant du cycle d'orientation, sujet hautement sensible.
Comme le député Borloz l'a mentionné dans son excellent rapport, s'il y a faute du Conseil d'Etat, le Tribunal administratif est à même de corriger le tir et de remettre le Conseil d'Etat à sa place. Avouez d'ailleurs que, depuis deux ans, il ne s'est pas gêné. Pour le reste, je ne reviendrai pas sur les lourdeurs de ce projet de loi et sa mauvaise rédaction, car le député Borloz s'en est déjà brillamment chargé. Par conséquent, l'UDC votera non et vous demande de refuser ce texte.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat vous invite à ne pas entrer en matière sur ce projet de loi. Il a pu arriver, en effet, plus par maladresse que par volonté de tordre la vérité, que nos brochures soient critiquables. Mais imaginez bien que la règle que vous êtes en train de vouloir édicter, que certains d'entre vous souhaitent, est la garantie absolue que toutes les brochures, sur tous les objets, iront toujours au Tribunal administratif ! On pourrait carrément tracer une ligne directe: le Tribunal administratif pourrait être chargé de rédiger la brochure ! Vous en conviendrez, ce n'est pas une bonne solution.
Malgré tous les efforts d'objectivité, de neutralité, de modération que l'on peut faire, il y a forcément, dans des matières très controversées, des gens qui vont trouver, à un moment où à un autre, que la neutralité de la formule n'a pas été respectée. Et même si, par hypothèse, le Tribunal administratif était très généreux à l'égard du Conseil d'Etat et qu'il ne casse que très rarement nos futurs «Essentiels en bref» neutres, objectifs et sincères, il y aurait néanmoins dans le processus trop de recours, et par conséquent une déstabilisation dans le système électoral.
Une fois encore, ce n'est pas la volonté de pouvoir écrire n'importe quoi qui guide le Conseil d'Etat. Vous savez qu'il soumet, avec la loi actuelle, tous ses textes au Grand Conseil. Vous avez pu constater aussi, dans les dernières brochures, le plus grand effort d'explications objectives à côté de la partie de purs commentaires, de la position politique de votre Conseil et du Conseil d'Etat. Mais de grâce, n'introduisez pas dans la législation genevoise une disposition qui va multiplier les conflits et qui ne va pas orienter mieux et davantage les citoyens qui lisent la brochure pour se faire une opinion.
Mis aux voix, le projet de loi 10415 est adopté en premier débat par 45 oui contre 21 non et 3 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. A l'article 53, nous sommes saisis d'une demande d'amendement général au projet de loi. La parole est à M. Jornot, auteur de l'amendement.
M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs les députés, comme je vous l'ai indiqué il y a un instant, avant le vibrant plaidoyer de M. Moutinot, il est important, si la majorité de ce Grand Conseil estime qu'il faut tenir la plume du Conseil d'Etat, de le faire d'une manière qui réduise les risques au minimum - au strict minimum. Or ces risques seraient gravement augmentés avec une formulation qui multiplie les catégories de textes. L'amendement général qui vous est proposé vise à rendre la synthèse obligatoire, je le dis aussi clairement. Il suit la volonté de la majorité. Le commentaire des autorités doit comprendre une synthèse brève et neutre à teneur de cet amendement.
Ce qui change entre cet amendement et le projet qui a été voté en commission, c'est qu'il inclut cette synthèse brève et neutre dans le papier des autorités, dans le commentaires des autorités, ce qui signifie que l'on ne va pas inventer une catégorie de textes particulière qui nous mettrait ensuite en porte-à-faux avec la jurisprudence des différents tribunaux appelés à statuer sur les recours qui ne manqueront pas de surgir, en espérant qu'il n'en surgisse malgré tout pas trop. Je vous recommande donc vivement, dans l'intérêt de la paix des ménages, de celle du Conseil d'Etat, mais aussi de celle de notre Grand Conseil, qui a intérêt à ce que les lois qu'il vote puissent être adoptées sans que les votations soient sans cesse renvoyées, d'accepter cet amendement.
M. Charles Selleger (R). La volonté des rédacteurs de ce projet de loi est d'avoir une synthèse facilement accessible à tous, à tous les citoyens qui prennent connaissance de la brochure de vote et qui ne veulent pas entrer dans le détail. Il importe donc que cette synthèse ne soit pas noyée dans le commentaire. Tandis que le commentaire peut s'étendre sur plusieurs pages, la synthèse ne fait pas une page, contrairement à ce que disait le rapporteur de minorité. C'est quelques fois deux lignes, peut-être dix, mais guère plus. Donc la synthèse ne doit pas être incluse dans le commentaire ! Dans ce sens-là, nous ne pouvons pas approuver l'amendement général qui nous est proposé.
Quant à savoir si cette synthèse doit également être soumise à la relecture du Grand Conseil, c'est une autre affaire. Il apparaît que, dans le cas de l'initiative 134, le tribunal a tranché pour le manque d'objectivité de ce que l'on appelait à l'époque «L'essentiel en bref». C'est une responsabilité du Conseil d'Etat de rédiger cette synthèse d'une manière brève et neutre. Il ne me semble pas qu'il faille avoir fait des études spéciales pour savoir ce que c'est que la présentation factuelle d'un projet sans y inclure une volonté politique sous-jacente.
Alors je crois que l'on peut faire confiance aux rédacteurs de cette synthèse pour qu'elle soit neutre et que, si un recours devait aboutir, ce soit, le cas échéant, les rédacteurs de cette rubrique qui soient réprimandés, plutôt que le Grand Conseil, qui n'est pas plus une instance neutre en soi que le Conseil d'Etat lui-même. Donc pour notre part, nous vous proposons de rejeter cet amendement.
Le président. Nous nous prononçons à présent sur cette demande d'amendement général au projet de loi. Il s'agit de l'article 53, alinéa 2, 2e phrase et alinéa 3, 2e phrase (nouvelle teneur). L'alinéa 2, 2e phrase, s'énonce comme suit: «Il comprend une synthèse brève et neutre de chaque objet soumis à votation, défend de façon objective le point de vue du Grand Conseil et indique le résultat du vote en mentionnant, le cas échéant, l'avis du Conseil d'Etat et d'importantes minorités.» Quant à l'alinéa 3, 2e phrase, il stipule: «Il comprend une synthèse brève et neutre de chaque objet soumis à votation, défend de façon objective le point de vue du Conseil municipal et indique le résultat du vote en mentionnant, le cas échéant, l'avis de l'exécutif et d'importantes minorités.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 59 oui contre 10 non.
Mis aux voix, l'art. 53, al. 2, 2e phrase et al. 3, 2e phrase (nouvelle teneur), ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).
Troisième débat
La loi 10415 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10415 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 52 oui contre 5 non et 15 abstentions.
Débat
Le président. Nous sommes au point 21 de notre ordre du jour. Le débat est de catégorie II: trois minutes par groupe. La parole est à Mme von Arx-Vernon.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC), rapporteuse. Permettez-moi tout d'abord, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, de remercier la commission et sa présidente, Mme Favre, de la grande qualité des travaux qui ont abouti à l'adoption, à l'unanimité, de cette motion. Permettez-moi également de remercier le service de la solidarité internationale, qui a contribué à l'éclaircissement des travaux de la commission et qui a pu montrer la rigueur et l'excellence de ses travaux dans l'étude des dossiers.
Je tiens à vous rappeler qu'en 2001 une très large majorité de ce Grand Conseil a voté une loi demandant que 0,7% de notre budget soit dédié à la solidarité internationale. Aujourd'hui, cela signifie, Monsieur le président, que, sur un budget de 7 milliards pour 400 000 habitants, nous avons les moyens d'attribuer 49 millions au soutien de projets concrets dans des pays défavorisés, dits pays du Sud. La motion demande que sept objectifs soient atteints, notamment: réduire de moitié la pauvreté dans le monde et la sous-alimentation chronique, assurer l'éducation primaire pour tous - 150 millions d'enfants ne sont pas scolarisés encore aujourd'hui - promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes, en particulier assurer la scolarité des filles, réduire la mortalité infantile, réduire la mortalité des mères, combattre les épidémies telles que celles du sida et de la malaria et assurer un environnement durable, notamment par l'accès à l'eau potable.
Ce fameux 0,7% dédié à la solidarité internationale est déjà dépensé, d'ailleurs, par certaines communes genevoises, visionnaires, qui ont bien compris l'intérêt d'investir dans la solidarité internationale. Et la commission a bien saisi l'importance de financer cette solidarité internationale, pour au moins trois raisons. Il y a bien sûr l'humanisme, l'esprit de Genève, la solidarité avec les plus pauvres de la planète; Genève est le berceau de la Croix-Rouge et des Conventions de Genève. Mais il y a aussi la prise de conscience que 1 F investi dans l'aide internationale rapporte 1,40 F en Suisse; donc c'est un réel retour sur investissement. Il y a en troisième lieu le fait que permettre aux ressortissants des pays du Sud, des pays les plus pauvres, de trouver un avenir et un travail sur place contribue aussi à réduire l'immigration clandestine, toujours dramatique.
Sept ans pour mettre en oeuvre une loi déjà votée en 2001, accordant ce 0,7% de notre budget à la solidarité internationale afin d'atteindre en 2015 les sept objectifs premiers que j'ai cités précédemment, la commission, à l'unanimité, a compris que c'était possible pour Genève, indispensable pour le développement du pays du Sud, et emblématique de notre volonté de nous engager en faveur d'une société plus juste entre les peuples défavorisés et nous. La commission a bien compris que ce rééquilibrage est la seule garantie de survie de notre humanité. En conclusion, la commission vous remercie de bien vouloir renvoyer cette motion au Conseil d'Etat, à l'unanimité.
M. Antoine Bertschy (UDC). Il convient tout d'abord de remettre les choses dans leur contexte. Ce chiffre de 0,7% ne sort pas de nulle part. Comme vous pouvez le voir dans l'intitulé de la motion, il y a beaucoup de «7», comme les portes de l'enfer, et l'enfer est pavé de bonnes intentions. Ce 0,7% provient des chiffres de l'ONU, qui demande que les gouvernements - nationaux - consacrent 0,7% à l'aide au développement. Or comme vous le savez, en tant qu'hommes et femmes politiques nous ne sommes pas un gouvernement national, mais cantonal ! Donc, nous n'avons pas à respecter ce chiffre de 0,7%. Cela dépend premièrement de notre volonté, il n'y a aucun accord international à ce niveau.
Avons-nous 0,7% à consacrer pour l'aide ? Certains disent que non. Je considère que l'aide n'est pas forcément directe, mais peut tout à fait être indirecte. Par exemple, combien de millions dépensons-nous pour aider les requérants d'asile ? N'est-ce pas une forme d'aide aux pays du Sud, comme le disait Mme von Arx-Vernon ? Oui, Mesdames et Messieurs, en aidant les gens qui viennent des pays du Sud pour chercher l'asile dans notre pays, c'est une aide que nous apportons à ces pays. Par ailleurs, lorsque nous accueillons des étudiants étrangers, la plupart des frais de leur formation sont pris en charge par le canton. Donc c'est une forme d'aide ! (Commentaires.) Le canton et la Confédération, Madame ! Nous formons les futures élites des pays du Sud; si cela n'est pas de l'aide, Mesdames et Messieurs, je ne sais pas ce qu'est l'aide !
Mesdames et Messieurs, vous avez certainement remarqué que l'UDC, plus exactement les commissaires UDC représentés dans la commission qui a voté cette motion, ont dit oui. Après mûre réflexion, l'UDC doit malheureusement - enfin non, heureusement - revenir sur sa position et dire non à cette proposition de motion.
M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, il y a quarante ans, en 1969, on a marché sur la Lune. Nous avons eu de la chance, parce que les astronautes avaient pris leur appareil photo avec eux. Et je vous rappelle ces images merveilleuses, que nous connaissons tous aujourd'hui, de la Terre; elles montrent simplement que nous avons une communauté de destin sur cette petite planète qui est la nôtre. Je dirai, comme Saint-Exupéry, qu'il y a quelque part sur une planète, la mienne, quelqu'un qui souffre, et que je suis concerné à partir de ce moment. Pourtant, malgré ce destin commun de l'humanité, cette reconnaissance que nous avons tous un destin commun, l'UDC nous raconte et nous redit à chaque votation sur le droit d'asile que nous ferions mieux d'aider les gens à rester chez eux. Les Verts ont aussi cette conviction: il faut que les immigrations soient choisies, non pas par les personnes de chez nous, mais par les gens qui ont ou n'ont pas envie d'immigrer. Or aujourd'hui, des personnes se trouvent souvent dans des situations les contraignant à émigrer. C'est donc un choix effectué de manière négative, rarement positive.
Nous pensons que nous avons une communauté de destin et que, avec notre place de privilégiés - parce que c'est ainsi aussi qu'il faut le voir, nous avons cette immense chance et ce plaisir de vivre dans ce si beau pays qui est le nôtre, mais qui nous donne une richesse, une opulence qui peut être quasiment scandaleuse par rapport au niveau de vie d'autres personnes - eh bien, demander 0,7% de notre budget ne nous semble pas exagéré. Je ne crois pas que ce soient seulement des textes internationaux qui nous le demandent, c'est la volonté de ce parlement qui l'avait inscrit dans la loi. Nous voulons simplement respecter nos propres lois, que nous avons adoptées nous-mêmes. Les Verts vous engagent donc à voter très fermement en faveur de cette motion. (Applaudissements.)
M. François Gillet (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, les démocrates-chrétiens ont toujours été convaincus qu'il était important de faire un effort pour la solidarité internationale. Notre ancien collègue, Pierre Marti, a été l'une des chevilles ouvrières de cette loi à l'époque. Et aujourd'hui encore, le groupe démocrate-chrétien soutiendra cette motion.
C'est vrai, Monsieur Bertschy, il n'y a pas d'obligation, selon le droit international, à suivre cette recommandation d'allouer 0,7% du budget. Cela dit, un canton comme Genève se doit d'être exemplaire dans ce domaine. Nous sommes connus, loin à la ronde, pour nos compétences en droit humanitaire et pour l'excellence de notre IHEID. Cette dernière, sous son ancienne appellation, IUED, a formé des centaines d'experts qui se retrouvent aujourd'hui dans les pays du Sud pour tenter de faire avancer leur pays dans une direction un peu meilleure, grâce aux compétences de Genève. Nous sommes également reconnus, loin à la ronde, pour notre chance d'avoir, à travers la FGC, une expertise dans le domaine des projets et du suivi des projets lancés dans les différents pays qui en ont besoin. Pour toutes ces raisons, si un canton se doit d'être exemplaire, c'est le nôtre, c'est Genève. Je vous rappelle au passage que les communes également s'engagent dans cette voie depuis de nombreuses années.
J'aimerais vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, que cette motion a tout de même la sagesse, même si elle nous demande simplement de respecter une loi, de préconiser que nous arrivions progressivement, c'est-à-dire en sept ans, à atteindre ce 0,7%. Je crois sincèrement, comme l'a reconnu la totalité des commissaires qui ont étudié cette proposition, qu'elle est sage. Et je souhaite, au nom du groupe démocrate-chrétien, que la même unanimité, même si l'UDC a annoncé son désaccord, se retrouve aujourd'hui au vote final.
M. Renaud Gautier (L). Monsieur le président, voici deux ou trois remarques concernant ce projet, d'abord pour rappeler ceci à mon éminent vis-à-vis: en 1969, l'homme n'a pas fait que marcher sur la Lune, Monsieur Bavarel, mais la Tchécoslovaquie a aussi été envahie. Je ne vois pas très bien le rapport avec la solidarité. Mais comme vous parliez de 1969, je tenais aussi à vous rappeler cela.
Deuxième remarque. Lorsque l'on parle de 0,7%, on oublie soigneusement le rôle des communes ! A Genève, les communes jouent un rôle cardinal dans le cadre de la solidarité, il ne faudrait pas l'oublier. Les communes, en règle générale, s'occupent de ce problème depuis plus longtemps que le canton.
Troisième remarque. Le 0,7%, c'est bien. C'est d'autant plus facile de parler de ce chiffre quand on n'a pas les moyens de se le payer, ce qui veut aussi dire que, à un moment donné, il faudra faire des choix. Si l'on veut dépenser 0,7% de l'argent que nous avons, cela ne pourra se faire qu'au détriment d'autres choses. Je vois là l'ouverture de grands débats intéressants.
Quatrième remarque. Personne, bien évidemment, ne saurait être opposé à la solidarité internationale en tant que telle. Par contre, un gros problème existe quant à la transparence. Le canton de Genève fournit actuellement un peu plus de 0,2%. On aimerait mettre 0,7% dans une entité dont le moins que l'on puisse dire est qu'elle n'est pas transparente, puisqu'une partie de cet argent va à la Fondation genevoise de coopération et que l'autre va à des projets qui sont pilotés par la très fameuse Direction générale des droits humains. On demande à toutes les entités subventionnées à Genève de nous fournir des indicateurs de performance et d'utilité. Or ce n'est toujours pas le cas pour ce secteur-là, et à titre personnel je le regrette. Je reste convaincu que, tant qu'il n'y aura pas une plus grande transparence quant à l'efficience de l'argent investi dans le cadre de cette solidarité, il sera difficile d'augmenter substantiellement les montants.
Ma cinquième remarque, enfin, n'est pas d'ordre tellement politique, mais plutôt philosophique. La question se pose de savoir le sens de la solidarité. C'est l'éternel débat illustré par ce célèbre proverbe: «Il vaut mieux apprendre à quelqu'un à pêcher que de lui donner du poisson.» Je ne suis pas toujours convaincu que l'ensemble des projets chapeautés par la solidarité internationale procède de cette démarche. Si l'on parle d'autonomie alimentaire - et l'éminent préopinant de tout à l'heure y est très favorable - on doit aussi se poser la question du choix des projets que l'on entend soutenir dans le cadre de la solidarité. Je ne suis pas toujours sûr que nous n'ayons pas un réflexe des «Sanglots de l'homme blanc» et que le choix des projets que nous entendons soutenir soit objectivement frappé au coin du bon sens, par exemple en termes d'autonomie alimentaire.
C'est l'ensemble de ces raisons - tout en reconnaissant le côté très sympathique, très «ouverture aux autres», de cette motion - qui m'amène à vous rendre attentifs à des problèmes de fond que nous n'avons jusqu'à ce jour pas résolus, et qui sont à mon sens le gage d'une augmentation sensible de la participation du canton lorsque nous les aurons résolus.
M. Claude Jeanneret (MCG). Chers collègues, nous débattons ici d'une motion intéressante. Je crois que c'est, pour des pays nantis comme le nôtre, non pas un devoir, mais tout de même une question d'éthique d'aider les autres dans la mesure du possible. Ce qui me gêne un peu avec ce 0,7%, c'est que les gens qui en parlent ne voient que l'argent ! Alors, si l'on veut parler d'argent, je dirai: «Allons plus loin, regardons tout ce que l'on fait et chiffrons-le !» Lorsque Genève offre des subventions aux associations de gens qui sont réfugiés chez nous, est-ce une aide assez payée ? En effet, lorsqu'ils sont réhabilités, ces gens peuvent apporter indirectement beaucoup à leur pays. Ils ont eu une formation ici, un travail ici, et peuvent aller chez eux pour montrer comment cela marche chez nous.
Concernant les subventions, on peut également penser à l'instruction. Beaucoup d'étudiants bénéficient d'une bourse à Genève et peuvent venir faire leurs études gratuitement, ce qui n'est pas mal. Et il ne faut pas dire que c'est la Confédération qui paie, c'est faux: c'est Genève ! Il faut donc aussi prendre en considération cet élément. Quant à l'hôpital, combien reçoit-il de personnes que l'on soigne gratuitement à Genève - gratuitement ! - en leur payant le voyage ? C'est une assistance - elle est normale - mais l'instruction, l'hospitalisation, etc., sont aussi une aide. Alors faisons le compte complet et on verra à combien on arrive.
Mais ne parler que de l'argent que l'on envoie... Comme disait notre excellent collègue Gautier, c'est en apprenant à pêcher aux personnes et non pas en leur envoyant du poisson que l'on réaliser faire quelque chose ! Or là, je crois sincèrement que nous sommes dans l'erreur en ne prenant en compte que des montants que l'on veut bien envoyer, et non pas tout le travail que l'on effectue ici. Chiffrons-le et regardons: on a peut-être dépassé les 0,7%. (Remarque.)
Mme Virginie Keller (S). Je voudrais tout d'abord remercier, au nom de mon collègue François Thion, député socialiste qui avait rédigé cette motion, les députés membres de la commission des affaires communales qui ont traité ce sujet avec beaucoup de sérieux, de sérénité et de respect.
Il est dommage que M. Renaud Gautier n'ait pas été présent lors des travaux de cette commission, car nous avons eu l'occasion de recevoir, non pas le service ou le département que vous citiez, Monsieur Gautier, mais Mme María Jesus Alonso Lormand, cheffe du service de la solidarité internationale, service habilité à gérer les projets, à les suivre et à les évaluer. Cela a été très intéressant, car nous avons pu constater que la direction que M. Gautier souhaitait donner à la solidarité internationale - apprendre à pêcher plutôt que de donner du poisson - est exactement celle que suivent toutes les organisations que nous avons eu l'occasion d'entendre dans le cadre de cette commission, nous l'avons vu à travers les projets très concrets qui nous ont été présentés: il s'agit de gens qui, par exemple, vont construire ou aider à construire des outils; ces derniers restent sur place et permettent à des villages entiers d'avoir accès à l'eau potable. L'aide apportée permettra également aux enfants d'aller à l'école, aux femmes de créer des entreprises, de sorte que les familles puissent manger, etc. Nous avons ainsi vu l'extrême sérieux avec lequel ces projets sont traités, suivis et évalués. Nous avons eu l'occasion de recevoir tous ces documents, et je propose que quelqu'un les remette à M. Renaud Gautier, qui a l'air de ne pas du tout savoir comment ce service fonctionne et comment ces projets sont traités en Suisse. La Suisse a tout de même - Monsieur le président, vous transmettrez à l'éminent membre du parti libéral, qui semble montrer une certaine méfiance envers notre façon de pratiquer la solidarité internationale - une très grande expérience dans ce domaine; elle est mondialement réputée et connue pour la qualité et le sérieux de ses projets. Et, alors qu'en commission l'ensemble des partis a véritablement reconnu cette manière de faire, cette qualité du travail et du regard suisses, je trouve dommage qu'aujourd'hui, en plénière, on entende des réflexions aussi désobligeantes par rapport aux gens qui travaillent sur le terrain. C'est un travail difficile, un terrain difficile. Il faut convaincre ici, ensuite encadrer là-bas, partir, vivre dans des conditions pas toujours très faciles, en tout cas pas celles des nantis de la république... Et nous étions heureux, en commission, de voir que le respect primait le reste.
Le deuxième élément que je voulais...
Le président. Il faudra terminer, Madame la députée.
Mme Virginie Keller. Oui, mais ce sera difficile, car j'ai encore deux ou trois choses à dire. Je fais vite ! Nous avons beaucoup discuté du montant, et M. Jeanneret en parlait tout à l'heure. Il est vrai que l'on peut - les services de l'administration l'ont reconnu - comptabiliser les choses de mille façons. Je crois que l'on peut calculer 0,1%, 0,2% ou 0,5% et que, selon la personne qui prendra les budgets, elle trouvera un chiffre différent. Cependant, il était très important que la commission ait fait un vote symbolique. En disant 0,7% en sept ans, on a dit vouloir augmenter ces budgets-là et donner une véritable impulsion lors de notre prochain budget. Et j'espère que ceux qui seront réélus ici se rappelleront que l'impulsion n'est pas de rester au même niveau...
Le président. Il vous faut terminer, Madame la députée !
Mme Virginie Keller. ...mais de continuer à augmenter, et qu'ils le feront.
Pour toutes ces raisons, je remercie la majorité - la grande majorité des députés - qui votera ce soir cette proposition socialiste, signée et soutenue par d'autres. Et nous nous réjouissons, lors du budget, de pouvoir augmenter ces moyens donnés à la solidarité internationale.
M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, comment la Genève internationale ne pourrait pas être intéressée par la solidarité internationale ?! On a compris les enjeux en entendant les interventions de cet après-midi. Les radicaux faisaient partie d'une belle unanimité en commission et continueront d'en faire partie. Nous sommes fiers de conserver cette belle unanimité et, bien évidemment, nous appuierons cette solidarité internationale. En outre, ce passage de 0,2% à 0,7% sur sept ans ne va pas mettre en péril les finances de notre république et c'est un beau geste.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous indiquer à tous ce que j'étais en train de dire à M. Gautier, parce que ses propos sur la solidarité internationale, ce service qui fonctionne fort bien, m'ont attristé. En effet, les rapports de la solidarité internationale vous sont adressés année après année, et ils ont fait, pour les deux derniers, l'objet d'appréciations - élogieuses ! - de votre Grand Conseil. Il y a eu, au début de législature, des remarques de l'Inspectorat cantonal des finances que nous avons prises en compte, certaines ont d'ores et déjà permis des corrections, d'autres sont en cours. Il y en a une que j'ai refusée, et j'ai demandé au Conseil d'Etat de trancher. (Remarque.) C'est exact, vous l'aurez dans le prochain rapport qui, ayant été adopté hier par le Conseil d'Etat sur l'année 2008, sera à l'ordre du jour de septembre. Pour les projets important, le choix est effectué par une commission composée de gens actifs et compétents en la matière; ensuite, les projets sont suivis. Dans certains cas, lorsque l'on a constaté que les projets n'évoluaient pas de la manière convenue, des demandes de remboursement ont même été présentées. Tout cela est par conséquent géré avec le plus grand sérieux.
Venons-en à la motion. Au fond, qu'est-ce que 0,7% de solidarité internationale ? Vous avez eu raison, Madame Keller, de dire que cela pouvait prêter à discussion. Les frais des requérants d'asile n'en font en tout cas pas partie. Mais il faut comprendre votre motion comme une volonté d'augmenter cette aide de solidarité internationale.
Si j'étais particulièrement taquin, je demanderais l'ajournement de cette motion au jour du vote du budget, parce que c'est bien là que l'on verra qui fait quoi ! Le Conseil d'Etat, lui, accueille votre motion avec respect et fera en sorte de la suivre le mieux possible. Mais il y a un moment où ce sera vous, Mesdames et Messieurs les députés, qui voterez. Je vous signale seulement que, si l'on admet - avec des variations dans les chiffres - que l'on se situe aujourd'hui à 0,2% et que vous voulez aller à 0,7% en dix ans, cela représente par année environ 5 millions d'augmentation du budget de la solidarité internationale. Je vous informe que dans le budget 2010 nous avons mis un million de plus par rapport à 2009, et je me réjouis de ce que ce malheureux million subsiste au vote final du budget ! (Applaudissements.)
Mise aux voix, la motion 1788 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 48 oui contre 9 non et 10 abstentions.
Débat
Le président. Nous sommes au point 22 de notre ordre du jour. Je rappelle que chaque groupe peut s'exprimer durant trois minutes. La parole est à Mme Captyn.
Mme Mathilde Captyn (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, juste deux mots. Cette motion commence à dater. A l'époque, il s'agissait d'une motion émanant de la commission de réexamen en matière de naturalisation... (Brouhaha.) ...parce que l'on s'était rendu compte que les fichiers de police qui étaient joints aux dossiers de naturalisation et qui comportaient des informations judiciaires... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...sur les requérants à la naturalisation prêtaient à confusion.
L'ensemble de la commission - à l'époque - a estimé qu'il fallait, si possible, rendre l'extrait du casier judiciaire suisse obligatoire dans le dossier de naturalisation. Nous avons donc souhaité que les communes soient régulièrement informées du contenu des dossiers de naturalisation, plus particulièrement quant à l'interprétation des rapports de police, afin que les décisions négatives ne se prennent pas seulement par une mauvaise interprétation des faits de police.
Je vous engage donc à accepter cette motion, éventuellement à la renvoyer directement au Conseil d'Etat.
Le président. Si la motion est acceptée, elle sera effectivement renvoyée au Conseil d'Etat, Madame la députée. La parole est à M. Bertschy.
M. Antoine Bertschy (UDC). Il faut bien avouer qu'en termes de naturalisation il y a un problème avec les dossiers de justice. J'ai siégé à la commission des naturalisations de la commune de Vernier pendant plusieurs années; nous recevions des rapports partiels qui indiquaient seulement que la personne avait été entendue dans le cadre d'une affaire, mais on n'en savait pas plus. Pourtant, on peut être entendu en tant que témoin ou en tant qu'accusé. En tant qu'accusé, on peut être innocenté ou condamné par la suite ! Malheureusement, les commissions des naturalisations et les dossiers transmis aux communes ne disposent pas de ce genre de détails, qui semblent essentiels.
Je suis pour ma part très favorable à cette motion, en tout cas à son renvoi en commission pour en discuter. De façon que les conseillers municipaux, qui sont ceux qui donnent leur avis sur les naturalisations, puissent se prononcer sur un dossier complet, Mesdames et Messieurs ! N'importe qui doit pouvoir travailler sur des dossiers complets, et non lacunaires. Donc oui, il faut l'extrait du casier judiciaire, afin que les conseillers municipaux puissent se prononcer en toute connaissance de cause et en ayant toutes les données entre leurs mains.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Wasmer, à qui il reste une minute.
M. Olivier Wasmer (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, pour ceux qui sont en mal de sensations fortes, de scoops, pour dénoncer l'UDC qui serait un parti raciste ou xénophobe, malheureusement vous faites tous fausse route - et je le dis également aux journalistes ici - car, s'il y a un parti qui a soutenu cette motion, c'est bien l'UDC ! Des députés ont appuyé la candidature d'une Turque dont la demande de naturalisation avait été rejetée, par la commune de Vernier précisément. Il faut savoir que la loi actuelle sur les naturalisations est parfaitement claire; elle stipule notamment que la personne candidate à la naturalisation ne doit pas «avoir été l'objet d'une ou plusieurs condamnations révélant un réel mépris de nos lois.» Or les naturalisations dans la plupart des communes n'étaient pas fondées sur l'extrait de casier judiciaire jusqu'à aujourd'hui - ou ne le sont pas encore, et c'est pourquoi on demande que cela change - mais simplement sur un dossier de police, duquel il ressortait que l'étranger qui était entendu avait participé à une rixe, avait été pris sur la voie publique dans le cadre d'une beuverie... Dans le cas présent, le mari de la candidate avait trafiqué de la drogue.
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est manifestement pas sérieux. La loi doit être appliquée ! Si l'UDC est prompte à mettre à la porte les étrangers criminels qui ne s'intègrent pas, elle sera au contraire la première à accepter l'intégration d'étrangers dont les moeurs se sont révélées être les mêmes que les nôtres et qui n'ont pas fait l'objet de condamnations pénales.
Pour tous ces motifs, l'UDC appuiera avec force cette motion, afin que ce ne soit dorénavant plus un dossier de police qui est remis aux autorités chargées des naturalisations, mais bien un extrait de casier judiciaire, dont il ressortira bien évidemment qu'il est vierge.
M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs les députés, cette question du degré d'information des autorités communales - puisque c'est d'elles qu'il s'agit - en matière de naturalisation nous a très fréquemment agités, souvent à juste titre d'ailleurs, et notamment à l'époque où nous étions autorité de réexamen des décisions prises par le Conseil d'Etat en la matière. Malheureusement, depuis que cette motion a été déposée en 2007, passablement d'eau a coulé sous les ponts et passablement de choses ont changé. Par exemple, s'agissant de l'extrait de casier judiciaire, un conseiller fédéral UDC, entre-temps non réélu, a fait adopter une ordonnance qui établit que l'intégralité des autorités chargées de la naturalisation ont accès «online» - comme on dit aujourd'hui - à ce casier, alors qu'effectivement, autrefois, les autorités n'avaient pas automatiquement accès aux données du casier judiciaire.
Mais au-delà de cela, il y a quelque chose de plus gênant, Mesdames et Messieurs, en ce qui concerne les invites 3 et 4. Vous avez vu que j'avais, il y a quelques lustres, déposé un amendement visant à les biffer, non pas qu'elles soient dépourvues d'intérêt, mais parce que nous y avons nous-mêmes répondu ! Et quand je dis «nous-mêmes», c'est ce Grand Conseil, lorsque nous avons voté la loi sur l'information du public et la protection des données personnelles, la célèbre LIPAD révisée, et que nous avons, dans la commission spécialisée, commission ad hoc chargée d'étudier ce projet de loi, réfléchi à la façon dont on pourrait améliorer l'information que les communes tirent des renseignements de police. Nous avons reçu la police, étudié la façon dont ces dossiers sont traités et examiné la meilleure manière pour que les autorités communales puissent avoir accès à des informations utiles, et qu'il ne soit pas indiqué «bataille», parce que c'est une vieille infraction genevoise entre-temps abolie, et que l'on ne sait pas si c'est vous qui avez donné le coup ou si vous l'avez reçu.
Le résultat est que, dans la loi sur les renseignements de police, ce Grand Conseil - ce Grand Conseil, Mesdames et Messieurs les députés ! - a introduit la possibilité pour toutes les autorités, et notamment pour les communes, de demander à la police une réactualisation de renseignements de police, avec indication précise sur le sort réservé à toutes les procédures. Autrement dit, il est indiqué si vous étiez là comme plaignant ou comme accusé - c'est-à-dire comme personne mise en cause - et si entre-temps vous avez été innocenté ou, au contraire, condamné. Cela signifie que cette question des renseignements de police expressément traitée aux invites 3 et 4 est réglée par un acte de notre propre parlement, et il serait pour le moins curieux que nous demandions au Conseil d'Etat de faire quelque chose alors que nous l'avons déjà fait.
Ce que nous pourrions en revanche demander au Conseil d'Etat - je le dis en passant, parce que ce n'est pas l'objet de la motion - c'est de bien vouloir mettre en vigueur la loi en question, qui malheureusement, depuis des mois, ne l'est pas. Et je suis certain que M. Moutinot nous rappellera tout à l'heure pourquoi cette loi, extrêmement importante pour la protection de la personnalité et de la sphère privée de nos concitoyens, est pour l'instant lettre morte.
M. Mario Cavaleri (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, je voudrais tout de même apporter quelques compléments par rapports aux propos tout à fait étonnants de nos collègues UDC qui viennent de s'exprimer. C'est quand même un peu fort, permettez-moi de le dire, que ceux-là mêmes qui ont utilisé des renseignements totalement tronqués ne voulant rien dire se sont appuyés sur ces arguments-là pour refuser des naturalisations ! Alors, chercher à se racheter une virginité au moment où ces questions ont d'ores et déjà été réglées, comme l'a dit mon collègue Olivier Jornot, cela semble, à mon sens en tout cas, déplacé.
Cela étant, nous suivrons la proposition d'amendement, la suppression des troisième et quatrième invites, dès lors que nous avons déjà fait le boulot. Et pour le reste, je m'en remets à votre sagesse, de manière que l'on puisse renvoyer au Conseil d'Etat une motion qui soit la plus simple possible, dont la rédaction de la réponse ne demandera que quelques minutes.
M. Michel Ducret (R). Mesdames et Messieurs les députés, quoi de plus honorable qu'une motion qui demande que des représentants d'une autorité saisis d'une question à laquelle ils doivent répondre soient informés le plus correctement possible au sujet de la personne requérante ? Eh bien, voilà exactement ce qui est demandé. C'est l'esprit de cette proposition, que nous vous invitons à suivre.
Nous avons bien entendu la demande d'amendement de M. Jornot, que nous pouvons appuyer: nous en comprenons les raisons. Il restera un principe simple, que notre Grand Conseil demande ici: une information objective, la plus précise possible, pour l'autorité chargée de trancher à l'égard d'un requérant. C'est la moindre de choses.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le titre de cette motion me choque. On demande «des enquêtes administratives plus justes en matière de naturalisation», comme si aujourd'hui elles étaient injustes. Ce titre, manifestement excessif, ne correspond d'ailleurs pas à ce que demande, au fond, la motion.
La motion comporte quatre demandes. La première est de rendre l'extrait de casier judiciaire obligatoire. C'est ce que nous faisons depuis février 2007, donc nous avons d'ores et déjà répondu à cette exigence.
La deuxième concerne les rapports de police et leur interprétation. Il faut distinguer un certain nombre de situations. Il est vrai que, grâce à la loi - qui entrera prochainement en vigueur, Monsieur Jornot - l'intéressé pourra, le cas échéant, faire corriger ce qui lui apparaîtra inexact. Mais ce que je pense ne pas être possible, c'est de charger l'administration elle-même d'effectuer une sorte de tri dans les informations de police et, en gros, de retenir ce qui lui paraît bon et de ne pas retenir ce qui ne lui paraît pas bon. Je pense qu'il est très notablement préférable que les conseillers municipaux, puisque c'est d'eux qu'on, soient dûment informés de ce que peuvent signifier les inscriptions qui figurent, qu'ils puissent effectivement - et c'est aujourd'hui possible - demander des compléments d'information, savoir ce qui s'est passé et comment cela s'est terminé. Je doute beaucoup qu'il soit très rationnel sur le plan bureaucratique et qu'il soit juste, au fond, que l'administration elle-même corrige les renseignements obtenus sur une personne pour faire un résumé plus ou moins facile à lire... Cela me paraît faux.
En revanche, il faut effectivement informer les conseillers municipaux, parce que la manière dont sont listés les différents points ne permet pas toujours de savoir si sous «rixe» - «bataille» est plus rare - on était une malheureuse victime ou, éventuellement, un vilain agresseur.
Je ne vois donc pas très bien dans cette motion ce qui reste aujourd'hui et qui me serait demandé d'être fait si vous me la renvoyez ! Je pourrai tout au plus vous répondre par écrit ce que je suis en train de vous dire par oral. Mais alors, franchement, dans le choix des titres, évitez de faire en sorte de jeter la suspicion, en parlant d'enquêtes injustes, sur une activité administrative qui, au contraire, est correctement effectuée.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes saisis d'une demande d'amendement qui consiste à garder les deux premières invites et à biffer les invites 3 et 4.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 58 oui (unanimité des votants).
Mise aux voix, la motion 1797 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 60 oui (unanimité des votants).
Débat
Le président. Pour ce point de notre ordre du jour, nous sommes toujours en débat de catégorie II: trois minutes de parole par groupe.
Mme Virginie Keller (S). A l'époque où cette motion a été rédigée, j'avais été interrogée, en tant que socialiste participant à cette commission, par des journalistes qui s'étaient étonnés de ce que les socialistes puissent signer un pareil texte. Eh bien, nous leur avons expliqué tout simplement ceci: ce n'est pas parce que nous étions socialistes que nous ne souhaitions pas avoir une justice exemplaire dans notre pays; que la question traitée par ce texte était importante; qu'elle ne relevait malheureusement pas des compétences de la police cantonale, puisqu'il s'agissait bien de pouvoir faire retourner dans leur pays une catégorie de personnes - des multirécidivistes responsables de délinquances plus ou moins graves - qui n'avaient pas l'autorisation de séjour dans le nôtre; que les autorités cantonales ne pouvaient malheureusement pas faire repartir ces personnes dans leur pays, car il n'y avait aucun accord de réadmission négocié par la Confédération avec les pays en question.
Nous avons eu une série d'auditions très intéressantes au sein de la commission; nous nous sommes rendu compte, finalement, du peu de marge de manoeuvre du gouvernement genevois sur ces questions-là. Il est alors très clairement apparu aux socialistes, comme à d'autres - car je crois me souvenir de ce que nous avons tous signé cette motion et l'avons étudiée ensemble en commission - que nous devions soutenir notre gouvernement dans sa volonté de faire appliquer la loi. C'est pourquoi nous avons pensé rédiger cette motion, invitant le Conseil d'Etat à intervenir auprès du Conseil fédéral afin qu'il s'attelle un peu plus vigoureusement à la conclusion d'accords et pour qu'il puisse enfin faire partir du sol suisse les personnes qui n'ont rien à y faire.
Les socialistes soutiennent évidemment cette motion - ils en sont signataires. Nous espérons qu'elle aura un effet et que le gouvernement pourra s'en saisir pour trouver de l'aide au niveau de la Confédération. Je vous le rappelle, c'est effectivement là que se déroulent les négociations de ce genre.
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, je tiens d'emblée à remercier et à féliciter les membres de la commission des affaires communales, régionales et internationales du sérieux de leur travail et de l'accueil qu'ils m'ont réservé, en tant qu'auteur de la résolution 525, pour que je puisse participer à l'élaboration de cette motion. En effet, je vous rappelle que ce nouveau texte parlementaire, invitant le Conseil d'Etat à intervenir auprès du Conseil fédéral afin de pouvoir rapatrier vers leur pays d'origine des délinquants étrangers multirécidivistes sous décision de renvoi entrée en force, est le fruit de la résolution 525 émanant du Mouvement Citoyens Genevois, votée à l'unanimité du Grand Conseil et renvoyée pour traitement à la commission précitée.
Aujourd'hui, nous ne pouvons que nous réjouir de cette prise de conscience de tous les députés, face à la criminalité galopante qui sévit dans notre canton. Cette motion, signée par l'ensemble des membres de la commission, est la démonstration même que les parlementaires genevois saisissent pleinement les préoccupations de leurs concitoyens en matière d'ordre public et de sécurité. En effet, il n'est pas tolérable que des centaines de délinquants étrangers multirécidivistes faisant l'objet de mesures d'éloignement de notre territoire ne puissent, pour des motifs d'ordre strictement administratif, être renvoyés hors de nos frontières. Actuellement, ces individus échappent à leur retour simplement en détruisant leurs papiers nationaux, puis en ne déclarant pas leur véritable nationalité. Devant cette situation, nous devons reconnaître le manque de collaboration des ambassades ou consulats de certains pays, qui rechignent à coopérer pour reconnaître leurs ressortissants, ce qui paralyse la délivrance de laissez-passer ou d'autorisations de rapatriement sous contrainte permettant leur évacuation vers leur pays d'origine.
La résolution 525 émanant de notre groupe invitait directement le Conseil fédéral à entreprendre des actions efficaces pour rapatrier vers leur pays d'origine les étrangers délinquants faisant l'objet de mesures d'éloignement, notamment en exerçant «des mesures de rétorsion d'ordre commercial et diplomatique à l'encontre des Etats étrangers refusant le retour de leurs ressortissants frappés d'une décision administrative d'éloignement prise par les autorités fédérales et cantonales compétentes.»
La commission des affaires communales, régionales et internationales a estimé que les invites de cette résolution étaient pour certaines excessives et, ainsi, pas suffisamment diplomatiques et qu'il était préférable de solliciter le Conseil d'Etat pour intervenir auprès du Conseil fédéral afin d'exposer cette situation calamiteuse empêchant de garantir une sécurité optimale pour nos concitoyens.
Dans un esprit consensuel, le MCG a accepté de participer à l'élaboration de cette motion en remplacement de notre résolution. De ce fait, nous pouvons considérer que les décisions prises par la commission des affaires communales, régionales et internationales...
Le président. Il faudra terminer, Monsieur le député.
M. Roger Golay. J'arrive au bout ! ...respectent partiellement l'esprit de notre résolution. Dès lors, je vous prie de prendre note, chers collègues, qu'à la suite du vote de la motion 1807, s'il est positif, nous retirerons notre proposition de résolution.
En revanche, le MCG souhaite la construction rapide d'établissements de détention affectés exclusivement à l'exécution des détentions administratives et en vue de refoulements. En effet, le MCG exige...
Le président. Vous devez conclure, Monsieur le député, vous avez dépassé votre temps !
M. Roger Golay. Je termine ! ...à l'instar du canton de Zurich, une politique plus ferme à l'encontre de ces délinquants, soit en les enfermant pour les mettre hors d'état de nuire, conformément à ce que nous permet la loi sur les étrangers.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion 1807, déposée en janvier 2008, est le fruit d'un travail unanime entre les députés, tous partis confondus, de la commission des affaires communales, régionales et internationales. C'est important de souligner le caractère sérieux, rigoureux, respectueux, qui a présidé aux travaux de cette commission, bien au-delà des clivages politiques, des tentations populistes et des récupérations politiciennes. Donc vous voyez, Monsieur le président, c'est possible.
C'est une évidence que des délinquants étrangers multirécidivistes pourrissent la vie des commerçants et des habitants de Genève; c'est une évidence qu'il n'est pas supportable qu'ils restent en liberté après avoir été arrêtés et qu'ils se retrouvent dans les rues de Genève; c'est une évidence que nous ne pouvons pas laisser croire que le laxisme est devenu une composante de notre démocratie; c'est une évidence que nous devons soutenir le Conseil d'Etat pour qu'il exige du Conseil fédéral le renvoi dans leur pays d'origine des délinquants étrangers, parce que cela relève effectivement de la compétence fédérale, comme cela a été dit. C'est aussi une évidence que nous ne devons pas nous laisser impressionner par le fait que des délinquants étrangers ne seraient pas réadmis, ne seraient pas acceptés dans leur pays d'origine, alors que des accords de réadmission sont passés, sont signés entre la Suisse et divers pays.
C'est une évidence que nous devons agir ensemble pour que ces voyous étrangers ne mettent pas en danger, Monsieur le président, nos valeurs d'hospitalité et de tolérance par leurs actes inadmissibles. Parce que, pour les démocrates-chrétiens, il est normal et juste de renvoyer la petite minorité criminelle étrangère, et cela évite de sombrer dans la tentation de la paranoïa xénophobe envers l'immense majorité des étrangers qui font Genève. C'est pourquoi nous vous invitons à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.
M. Michel Ducret (R). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais tout d'abord remercier Mme Keller, qui a été extrêmement précise en cadrant les personnes que cette motion concerne. C'est extrêmement important d'avoir cela à l'esprit, et cela explique aussi beaucoup de choses. Il en va de la crédibilité de l'autorité étatique, voilà ce qui est en jeu ! Et derrière cela, Mesdames et Messieurs les députés, il y a le découragement, voire le désespoir des représentants de l'autorité publique, que ce soit au niveau de la police, des autorités pénitentiaires ou des agents de notre justice, qui, faute d'exécutabilité des peines prononcées, renvoient les gens sur le trottoir, dans la rue, malgré le fait qu'ils ont été condamnés et sont sous le coup d'une expulsion. Or cette dernière n'est pas exécutée: on ne fait rien d'autre que de relâcher ces personnes, qui se retrouvent alors dans le circuit criminel. Cela ne va tout simplement pas !
Ce laxisme relativement involontaire, Mesdames et Messieurs, entraîne non seulement une opinion défavorable dans notre population par rapport à l'action de l'autorité publique, mais également une attractivité du tourisme criminel vers notre pays, et vers Genève en particulier. Imaginez donc être relaxé, faute de pouvoir être expulsé, après avoir été condamné plusieurs fois... Vous êtes un criminel notoire, or on vous remet gentiment, en paix, sur le trottoir, dans un pays où vous êtes sous le coup d'une mesure d'expulsion qui est inexécutable... C'est tout simplement extraordinaire ! Il y a peu d'endroits au monde où cela existe. Il faut donc urgemment, Mesdames et Messieurs, passer un message qui va plus loin que cette seule intervention auprès du Conseil fédéral, laquelle est indispensable.
Nous savons que le Conseil d'Etat est déjà intervenu auprès du Conseil fédéral, mais il faut qu'il insiste et qu'il sente qu'il a l'appui de ce parlement pour améliorer les possibilités d'expulsion de ces gens-là. Il faut également, Mesdames et Messieurs, réduire l'attractivité de ce tourisme criminel vers notre canton et vers notre pays. Et en ce sens, je rappelle aussi que nous avons la possibilité légale de mettre ces gens à l'ombre pour vingt-quatre mois, mais que nous n'en avons pas la possibilité physique. A Genève, elle manque ! Je rappelle aussi que le parti radical demande depuis plusieurs mois de pouvoir mettre ces gens à l'ombre. Car, plutôt que de les remettre sur le trottoir...
Le président. Il vous faut terminer, Monsieur le député.
M. Michel Ducret. ...eh bien, les mettre à l'ombre, en attendant la possibilité de pouvoir les expulser, leur rend la situation tout de même un peu moins gaie, donc un peu moins attractive.
Mesdames et Messieurs, nous souhaitons que cette motion soit acceptée et que la mise en rétention des gens qui sont en attente d'expulsion lorsqu'ils sont multirécidivistes et condamnés à l'expulsion puisse être appliquée à Genève.
M. Antoine Bertschy (UDC). Le groupe UDC tient tout d'abord à saluer la position du parti socialiste, qui soutient cette motion. Enfin le parti socialiste admet qu'il y a des problèmes de sécurité; enfin le parti socialiste admet qu'il y a un problème avec l'immigration ! (Rires. Remarque.)
Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle qu'il y a quelques années une conseillère fédérale PDC, Mme Metzler, avait tenté de faire ce que l'on pourrait appeler un «hub de réadmission» en Afrique de l'Ouest. Elle avait signé un accord avec un pays dont le nom m'échappe... (Remarque.) ...afin de recueillir tous les requérants d'asile déboutés en Suisse pour ensuite les dispatcher dans la région, Le pays en question avait signé, en compensation d'une promesse d'investissement de la part de notre pays; pour finir, il est revenu sur l'accord, et ce «hub» n'a pas pu exister.
Cela pose donc une question: pourquoi ces accords de réadmission sont-ils si difficiles ? Il y a une raison très simple, Mesdames et Messieurs ! Lorsque des délinquants partent de chez eux pour venir chez nous, ces pays ne vont pas s'empresser de dire: «Mais renvoyez-les-nous !» Au contraire, ils sont très contents de les voir chez nous plutôt que chez eux ! Alors oui, le groupe UDC soutient cette motion. Néanmoins, nous n'espérons pas grand-chose d'elle.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Catelain. Vous avez une minute et quinze secondes, Monsieur le député.
M. Gilbert Catelain (UDC). Je vais vous dire brièvement que le groupe UDC va soutenir cette motion de l'impuissance. Pourquoi «impuissance» ? Parce que nous sommes en bout de chaîne. Lorsqu'on demande à la Confédération de signer des accords de réadmission, c'est le résultat d'une perte de maîtrise du contrôle migratoire, puisque la Suisse a des accords de réadmission avec l'ensemble de ses voisins, et que, avant que ces personnes arrivent en Suisse, cette dernière a la possibilité de faire jouer ces accords avec la France, l'Italie, l'Allemagne, l'Autriche, l'Espagne, ou tous les pays que vous voulez par lesquels ces gens sont passés, pour autant que l'on puisse prouver qu'ils y ont séjourné dans les six derniers mois. C'est-à-dire que nous avons une fenêtre de tir de six mois pour renvoyer ces personnes.
Ce qui se passe en Suisse, d'autant que nous avons maintenant intégré un espace européen de sécurité qui devait nous garantir davantage de sécurité, c'est que nous avons totalement perdu cette maîtrise et que nous n'avons pas mis en place des structures nouvelles. Le directeur français de la police aux frontières, qui a travaillé à la frontière franco-genevoise, puisqu'il était directeur de la PAF à Prévessin - donc directeur national avec une expérience sur l'ensemble de la France et, respectivement, à l'étranger - eh bien, ce monsieur m'avait dit très clairement: «Si vous ne mettez pas en place une police spécialisée, vous êtes finis !» Et c'est ce qui se passe. Il faut savoir ce que font les Français...
Le président. Il faut terminer, Monsieur le député
M. Gilbert Catelain. ...ils ont renforcé... (Remarque.) ...leurs effectifs et ils ont la maîtrise partielle du problème. Ce n'est pas encore suffisant, c'est sûr... (Remarque.) ...mais nous ne nous en sortirons pas avec cette simple motion.
Le président. Il faut terminer. Votre temps est dépassé, Monsieur le député !
M. Gilbert Catelain. Je termine, comme M. Golay ! Ainsi que l'a souligné le groupe radical - qui a aussi dit qu'il fallait libérer Champ-Dollon des petites crapules pour faire de la place, donc c'est un double discours - il nous faut absolument créer des espaces de détention administrative pour que ces délinquants...
Le président. S'il vous plaît, Monsieur le député !
M. Gilbert Catelain. ...retrouvent la mémoire et leurs papiers !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Ducrot, à qui il reste une minute.
M. Jean-Claude Ducrot (PDC). Mesdames et Messieurs, l'UDC est en train, avec la sécurité, de se refaire une virginité, ou un leitmotiv pour les élections, alors que, sur le plan fédéral, on peut s'interroger quant au travail effectué par M. Blocher durant ses quatre ans de règne... Travail qui a conduit à cette inquiétude du peuple genevois eu égard aux problèmes que nous rencontrons à Genève. Je crois qu'il y a eu quatre ans de retard avec M. Blocher et je crois aussi que c'est maintenant que nous payons son attitude de M. Blocher au Conseil fédéral. Fort heureusement, il en a été écarté !
M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs, la principale vertu de cette motion est que tout le monde l'a signée ! C'est ce qui fait son intérêt premier, primordial, celui de voir des députés, qui d'ordinaire nous expliquent que les autres fantasment, admettre dans l'exposé des motifs, et souvent en des termes assez durs, une réalité d'insécurité à Genève. Des termes assez durs, parce que je me rappelle avoir moi-même reproché au MCG d'avoir utilisé des termes plutôt négatifs, de type «ces individus», que je retrouve ici, exactement de la même manière, dans l'exposé des motifs de la commission.
Bien entendu, les libéraux voteront, participeront à cet acte incantatoire demandant au Conseil d'Etat d'obtenir du Conseil fédéral ce que ce dernier n'arrive apparemment pas à obtenir, ou en tout cas pas en quantité suffisante pour résoudre les difficultés.
Néanmoins, il y a quelques interrogations. La première interrogation majeure, Mesdames et Messieurs, est de savoir pourquoi les auteurs de cette motion sont persuadés que les «délinquants étrangers multirécidivistes» narguent les forcent de l'ordre car ils savent qu'ils ne risquent rien. Mesdames et Messieurs, n'est-ce pas cela, la réalité du problème ? Lorsque l'on dit que des personnes qui commettent des infractions et qui multirécidivent, c'est-à-dire qu'elles les commettent au minimum trois fois, sont des gens qui, dans notre canton, ne risquent rien, le vrai problème est-il le renvoi ou la capacité d'appréhender et de punir en vertu des règles du droit pénal ?
Je suis très réceptif à tous les discours sur la détention administrative. Mais que l'on vienne m'expliquer pourquoi il serait plus important de pratiquer la détention administrative, qui par définition est injuste, puisqu'elle ne se fonde pas sur la faute, plutôt que de pratiquer la détention pénale sur des gens dont on dit qu'ils sont multirécidivistes et dont on dit que soit ils pratiquent le trafic de stupéfiants, qui jusqu'à preuve du contraire n'est pas encore légalisé, soit qui se livrent à des infractions plus graves, y compris des actes de violence. Alors je crois qu'il est utile de voter cette motion, mais il est aussi utile de se dire que nous avons d'abord une difficulté à résoudre par les voies du droit pénal les problèmes qui sont ici dénoncés.
Mesdames et Messieurs, cette motion, je l'ai dit tout à l'heure, a un caractère incantatoire. J'espère que le Conseil d'Etat, lorsqu'il s'adressera aux autorités fédérales, ne leur dira pas que les Genevois ne demandent que l'expulsion des ressortissants multirécidivistes, parce que je crois que, en la matière, même si le terme est peut-être le seul qui ait permis d'obtenir l'adhésion unanime de tous les groupes, ce serait une façon un peu réductrice d'appréhender le phénomène de la criminalité et de la sécurité. Votons cette motion, mais en sachant que, après l'avoir votée, il y aura encore beaucoup à faire, y compris dans ce parlement.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat vous remercie de cette motion et de votre unanimité à le soutenir dans ses efforts. C'est un geste politique que nous ne manquerons pas de faire valoir dans nos contacts avec Berne pour obtenir des possibilités concrètes de renvoi. D'ailleurs, certains pays changent d'avis. Parfois, on peut facilement procéder au renvoi, parce que le consul en poste à Genève considère que ces personnes sont une très mauvaise chose pour l'image de marque de son pays, et il les reprend. Mais ensuite, c'est un autre consul qui dit: «Non, alors moi, pas du tout, je ne suis pas dans cette logique-là, je ne les reprends pas.» Donc la situation change, et il faut bien voir qu'il n'y a pas que le droit, mais aussi la pratique. Mon secrétaire général a passé hier la moitié de la soirée pour renvoyer un étranger dangereux qui sortait de sept ans de prison; je vous épargne le délire administratif par lequel il a fallu en passer, toute la nuit, pour qu'il soit dans l'avion ce matin. Cela pour vous dire que cette motion ne résout effectivement pas tout, mais que nous ne lâcherons jamais - jamais ! - ce terrain-là et que nous entendons aller jusqu'à ce que le problème soit réglé.
Monsieur Catelain, vous avez raison d'évoquer l'espace intégré de Schengen. Parmi les bonnes nouvelles, nous avons pu renvoyer des étrangers en situation irrégulière qui étaient venus par ailleurs - plusieurs milliers depuis l'entrée en vigueur du système Schengen - et nous n'en avons repris dans l'autre sens que quelques dizaines. Contrairement à ce qui a été dit à certaines occasions, là, on est vraiment gagnants, d'une manière extrêmement nette !
S'agissant des multirécidivistes ou de ce genre de catégories, je suis évidemment totalement d'accord avec M. Jornot. Parce que de deux choses l'une: ou bien ce sont des délinquants, et ils sont en prison, ou bien ils n'en sont pas et, à ce moment, ils doivent partir. Alors certes, la rétention, la détention administrative peut aider au départ, pour s'assurer de la personne et éviter qu'elle disparaisse dans la nature. Je n'aime pas cela, mais cela fait partie des armes de l'Etat de droit, et je les utiliserai. Mais on ne peut tout de même pas être dans un pays où l'on rirait - il semble que cela se passe - des peines infligées pour un certain nombre de comportements ! Et cela, vous le savez, n'est évidemment pas de mon ressort.
Lors de la conférence de presse du 15 septembre, le Conseil d'Etat présentera la politique pénitentiaire qu'il entend mener en termes de constructions. Et dans ces constructions, il y aura évidemment un chapitre destiné particulièrement à la détention avant renvoi.
Mise aux voix, la motion 1807 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 64 oui (unanimité des votants).
Débat
Le président. Nous sommes au point 24. Cette motion sera également traitée en catégorie II. Je donne la parole à M. Jornot.
M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs, cette motion a été déposée en mai 2008 et elle attirait l'attention sur une préoccupation liée à la reprise par la police genevoise de la mission assumée par l'armée en matière de protection des ambassades. Comme vous le savez, depuis 2004, compte tenu d'un certain nombre de développements en matière de menace, l'armée a mis à disposition des troupes pour aider les cantons, à Berne, Zurich et Genève, à protéger les missions diplomatiques étrangères. Cela aboutissait, par exemple en mars 2007, à l'engagement de 286 militaires à Genève. Puis les autorités de ces cantons, y compris de celui de Genève, ont sollicité la possibilité de reprendre ce dispositif. Ils ont demandé à la Confédération de se retirer, affirmant qu'ils seraient capables de prendre sa place. Et en effet, dans le message du Conseil fédéral de 2007, qui propose au parlement de reconduire un dispositif, mais réduit, il est clairement indiqué que «les Corps de police du canton de Genève et de la Ville de Berne engageront des forces spécialement formées pour protéger les ambassades.» Autrement dit, le canton de Genève s'est engagé à reprendre le dispositif et à faire en sorte de disposer du personnel nécessaire pour ce faire.
Dans le courant de l'année 2008, j'ai déposé un interpellation urgente écrite pour demander au Conseil d'Etat par quel miracle il entendait faire surgir, par génération spontanée, les dizaines, voire plus, de policiers qui seraient nécessaires pour assumer cette tâche, partant du principe que, pour assurer la sécurité des ambassades, il faut un minimum de formation et de capacités, notamment techniques. Le Conseil d'Etat a répondu à cette interpellation urgente écrite en mars 2008 en disant, en gros: «Circulez, il n'y a rien à voir ! Tout est sous contrôle. Cinquante militaires professionnels de la Confédération seront mis à notre disposition et nous n'avons que cinquante personnes à engager, parce que l'on récupérera soixante membres de la police de sécurité internationale, et tout cela, bien entendu, d'ici au 1er janvier 2010.»
Cette réponse n'était pour le moins pas rassurante, parce qu'elle signifiait plusieurs choses. D'abord, il fallait obtenir tout d'un coup que des bataillons serrés de volontaires se pressent pour être formés en quelques mois, c'est-à-dire dans un délai impossible à tenir pour former du personnel policier; il y avait donc un problème de recrutement. De plus, cela impliquait de dégarnir la police de sécurité internationale précisément dans le domaine de son activité de protection mobile du secteur des organisations internationales. Mais en réalité, puisqu'aucune de ces deux variantes n'était satisfaisante, soyons clairs, ce risque implique d'utiliser des forces de police, de gendarmerie, qui du coup de sont pas utilisées pour répondre aux besoins de sécurité de la population genevoise.
C'est la raison pour laquelle cette motion, Mesdames et Messieurs, ne demande pas des choses bien extraordinaires. Elle ne demande pas la tête du responsable du département, elle demande simplement que l'on engage, pour cette mission de protection des ambassades, du personnel autre que du personnel de police; que l'on fasse, au moins à titre de solution transitoire, appel à des sociétés de sécurité privées, de telle manière que l'on puisse assurer cette mission de planton devant les ambassades et utiliser nos forces de police aux tâches pour lesquelles elles sont formées et pour lesquelles il est nécessaire d'avoir du véritable personnel policier.
D'autres solutions sont bien entendu envisageables. On peut parler d'auxiliaires de police, on peut parler de toutes sortes de solutions... Mais en tout cas, une solution n'est pas acceptable: celle qui consiste à laisser la Confédération se retirer sans avoir la solution de rechange, parce que là les Genevois en aurait à payer le prix.
Les libéraux vous demandent donc de renvoyer cette motion à la commission judiciaire et de la police, pour que puissent être envisagées les différentes solutions et que, le cas échéant, elle soit ultérieurement renvoyée au Conseil d'Etat.
Le président. Merci, Monsieur le député. J'ai pris bonne note de votre demande de renvoi en commission. La parole est à M. Losio.
M. Pierre Losio (Ve). Dois-je m'exprimer sur le renvoi en commission, Monsieur le président ?
Le président. Non, le renvoi en commission est voté à la fin, Monsieur le député.
M. Pierre Losio. Merci, Monsieur le président. En fait, nous avons ici affaire à un transfert de charge. La Confédération nous transfère une charge, et par-là même une responsabilité, que nous devons assumer vis-à-vis des organisations internationales et de la Confédération. Pour nous, il est hors de question de nous y soustraire, de sous-traiter, de déléguer voire d'abandonner la puissance de l'Etat à des officines privées. C'est la raison pour laquelle les Verts souhaitent que le canton assume ses responsabilités, et nous vous engageons à refuser d'entrer en matière sur cette motion.
M. Jean-Claude Ducrot (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe démocrate-chrétien est d'accord pour le renvoi de cette motion en commission, non sans auparavant vous faire part de certains bémols. Quand je lis: «Protection des ambassades: n'affaiblissons pas la sécurité des Genevois !», j'aurais tendance à rajouter: «N'affaiblissons pas non plus la sécurité des missions diplomatiques !» En effet, on veut accorder à des organes privés des pouvoirs de police sur la voie publique - et nous ne manquerons pas de dire que Genève est une place internationale - alors qu'il s'agit d'abord, Mesdames et Messieurs, d'une mission régalienne de l'Etat. Et en cela, nous ne pouvons pas passer à côté de ce qui est notre devoir et notre responsabilité.
M. Jornot a parlé de la police de sécurité internationale. Pourtant, Mesdames et Messieurs, la mission première de la police de sécurité internationale, qui auparavant s'appelait uniquement «police de l'aéroport», est bien évidemment une mission qui englobe maintenant non seulement l'aéroport, mais également les missions diplomatiques. Dès lors, je crois qu'il y a un point d'ancrage extrêmement fort ici, puisque la police de sécurité internationale a vu ses missions augmenter, et je pense qu'il faut faire confiance au Conseil d'Etat. Il faut que le Conseil d'Etat nous donne des garanties par rapport à la suite de la protection des organisations internationales. C'est précisément pour cette raison que le parti démocrate-chrétien souhaite le renvoi en commission, de manière que l'on puisse dresser l'état des lieux de la situation, avec le retrait de l'armée, car il y a là une mission régalienne, et nous ne pouvons pas nous prévaloir tout le temps de l'attrait des organisations internationales à Genève sans prendre nos responsabilités. Dès lors, nous sommes en faveur du renvoi de cet objet en commission, pour que le Conseil d'Etat nous donne toutes les orientations et les garanties à ce sujet.
M. Régis de Battista (S). Mesdames et Messieurs les députés, le parti socialiste est convaincu que les ambassades et missions étrangères doivent être protégées correctement, afin de permettre à leurs représentants de travailler correctement dans une ville internationale. Néanmoins, le parti socialiste pense que les moyens actuellement mis à disposition sont largement suffisants et que les explications que le Conseil d'Etat a données dans son rapport sont satisfaisantes. Aller solliciter une police privée n'est pas forcément nécessaire et peut se révéler délicat, au vu de dérapages possibles.
Soulignons qu'il ne faut pas peindre le diable sur la muraille, dans le sens où les ambassades à Genève sont des lieux d'expression de différents pays, forcément, mais qui doivent aussi avoir la possibilité de vivre l'aspect démocratique de la Suisse, c'est-à-dire la contestation sociale de la société civile. Et dans le cadre de manifestations de la société civile, par exemple, je crois que la police locale est beaucoup plus à même de régler ces types de problèmes qu'une police privée.
C'est la raison pour laquelle le parti socialiste refuse tant le renvoi au Conseil d'Etat, comme c'était prévu à l'origine, que le renvoi en commission.
M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, pour le parti radical, le travail de protection des ambassades doit être effectué par la force publique. Alors, même si de nombreuses entreprises de sécurité travaillent de manière très correcte, nous pensons que c'est réellement le rôle de l'Etat.
Toutefois, nous allons soutenir le renvoi à la commission judiciaire, car nous sommes bien conscients des problèmes d'effectifs, et nous nous réjouissons, en commission, d'étudier cette question, afin de trouver ensemble une solution. Voilà pourquoi nous soutenons le renvoi en commission.
M. Gilbert Catelain (UDC). Le problème soulevé par M. Jornot est fondé. Et je me rends compte, en lisant l'ordre du jour de ce Grand Conseil, que la plupart des députés sont inquiets du niveau de sécurité ou d'insécurité dans la république, qu'ils ne sont en tout cas pas satisfaits, et qu'une dizaine d'objets - même seize - sont pendants devant la commission judiciaire. Cela illustre le dysfonctionnement de notre parlement, puisque certains objets sont vieux de quatre ans. Or si nous renvoyons ces objets-ci devant la commission judiciaire alors qu'en quatre ans nous n'avons pas pu traiter les premiers objets, je pense que la prochaine législature n'en aura pas non plus le temps. Il convient alors d'étudier en urgence la résolution 588 déposée par M. Bertinat, qui prévoit la création d'une commission ad hoc pour s'occuper en bloc de ces objets.
En effet, nous rédigeons tous des motions ayant trait à des difficultés partielles relatives à un problème général qui a commencé, entre autres, au niveau fédéral avec le projet USIS, lequel a malheureusement été enterré sans redéfinir ce que la Suisse et les cantons voulaient comme système de sécurité dans ce pays, surtout avec l'introduction des accords bilatéraux et, aujourd'hui, avec l'association à l'espace Schengen. Je vous donnerai un exemple très simple concernant la répartition des charges entre la Confédération et les cantons. La Confédération a mis en place deux plans d'allégement budgétaire pour la police militaire, qui a réduit ses effectifs de 10%. J'observe que, en 1997, la Confédération avait attribué à Genève 100 militaires pour la surveillance de la frontière, effectif augmenté par la suite à 200, sauf erreur. Or aujourd'hui, on en est à 40 !
Nous sommes confrontés à énormément de problèmes, qui sont le fait d'une accumulation de décisions dont nous n'avons pas forcément la maîtrise et dont nous payons aujourd'hui le prix. Et le parlement refuse d'avoir la vue d'ensemble de cet objet. Je proposerai de ne pas traiter chaque motion comme un cas particulier, puisque tous ces problèmes découlent d'un problème général. Et il faudra que ce parlement prenne ses responsabilités. A mon avis, il conviendrait presque - c'est à la mode chez nos voisins - de créer des états généraux, un groupe d'experts auquel on confierait tous ces objets et qui nous livreraient un recueil de recommandations, parce que ce parlement - il ne faut pas se leurrer - n'aura ni la compétence, ni l'expérience pour traiter l'ensemble de ces questions. (Remarque.) Mais un groupe d'experts pourra nous livrer un rapport et des recommandations. A ce moment-là, le traitement se fera soit par la commission judiciaire, soit par une commission ad hoc.
En effet, je ne crois pas, si ce n'est pour des motifs électoraux, que nous puissions traiter en quelques semaines un ensemble de motions, dont certaines sont relativement vieilles - celle de M. Olivier Jornot date du 6 mai 2008 - et que nous arrivions à progresser, à trouver des solutions rapides, si, au bout de quinze mois, nous n'avons pas encore renvoyé cet objet en commission et qu'il risque d'y rester encore quatre ans. Mais l'UDC ne s'opposera pas au renvoi en commission; notre groupe souhaite simplement que vous souteniez par la suite la résolution 588.
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le MCG accepte aussi le renvoi de cette motion à la commission judiciaire, pour que l'on réponde à certaines interrogations. Notamment sur le fait que ces polices privées pourraient effectuer des contrôles d'identité sur la voie publique, ce que, pour notre part, nous ne pourrions pas accepter. Il y a aussi une question de coût, puisque c'est un transfert de charge. Qui payera ces agents de sécurité ? La motion n'en fait pas état, et nous aimerions aussi une réponse à ce sujet.
Si nous acceptons le renvoi en commission, c'est pour obtenir ces réponses.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le problème de la protection des ambassades, des sites internationaux et des sites diplomatiques fait évidemment partie des priorités du Conseil d'Etat pour la défense de la Genève internationale. M. Jornot et les signataires ont eu raison de vouloir en discuter. Je suis un peu embarrassé d'être catégorique aujourd'hui, parce que la matière évolue et que j'ai rendez-vous demain matin à 9h45 avec M. Ueli Maurer, précisément pour parler de ce sujet. Pourquoi ? Parce que nous avons un accord de principe selon lequel l'armée va nous venir en aide à partir du 1er janvier 2010, pour une période transitoire, jusqu'à ce que l'on ait effectivement - parce qu'on ne les a pas aujourd'hui, il faut être clair - les effectifs nécessaires, ce qui montre que la matière est mouvante entre la réponse de 2008 et aujourd'hui.
En gros, cela devrait pouvoir se passer ainsi: avec l'aide de l'armée fédérale, mais des détachements professionnels, nous devrions pouvoir faire la liaison jusqu'à ce que, à terme, nous ayons effectivement des assistants de sécurité - parce que l'on n'a pas besoin de policiers formés complètement pour des gardes statiques devant ce type d'objectifs - pour que nous puissions assurer nos obligations.
Parallèlement à cela, il y a un certain nombre de choses qui ont d'ores et déjà été faites aussi. La surveillance par vidéo est tout de même utile - je l'avais dit dans les débats précédents - plutôt que d'immobiliser deux personnes qui restent là pour attendre que rien ne se passe. Dans ce cas, la vidéosurveillance a un sens. Vous verrez aussi dans le rapport sur la réorganisation de la police que le transfert au Corps des gardes-frontière d'un certain nombre de tâches dans le domaine aéroportuaire correspond à la libération d'à peu près quarante EPT - équivalents plein temps - à la PSI, la police de sécurité internationale, qui actuellement - et on s'en réjouit beaucoup - voit son nombre d'heures supplémentaires non seulement ne plus augmenter, mais même diminuer drastiquement. Cela montre que, là aussi, on a une capacité de réponse.
Voilà ce que je peux vous dire aujourd'hui. J'espère ne pas avoir de mauvaises surprises demain et me réjouis de vous tenir, dans un bref délai, informés plus en détail devant la commission judiciaire.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1821 à la commission judiciaire et de la police est adopté par 35 oui contre 19 non.
Débat
M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs, cet après-midi, nous pouvons en quelque sorte dialoguer sur la sécurité. Nous avons dressé un constat, tous ensemble, lors de l'examen de la motion 1807. Nous savons tous, désormais, qu'il y a des problèmes de sécurité à Genève. Nous partageons tous la conviction qu'il y a ce fameux phénomène des délinquants multirécidivistes. Nous connaissons tous, parce que la situation s'est dégradée de manière considérable depuis le dépôt de cette motion il y a plus d'une année, les conséquences de la présence de ces délinquants dans certains quartiers sur les Genevois, sur les habitants et les commerçants de ces quartiers.
Nous pouvons donc partir de ce constat et nous demander ce qui a été entrepris depuis lors et ce qu'il faut faire. Nous savons par exemple que, pour les Pâquis, la police a mené des opérations de choc pour reprendre pied dans le quartier et déstabiliser la population criminelle qui y avait pris ses... quartiers, précisément. Ces opérations ont été répétées et ont abouti, en effet, à une amélioration de la situation; la population a été satisfaite de voir qu'elle n'était pas abandonnée. Mais nous savons tous - parce que cela a été critiqué au terme de chaque opération, à peu près - que ces opérations ne permettent pas l'arrestation en nombre des délinquants concernés. Et c'est assez normal: lorsque la cavalerie arrive en sonnant le clairon et en soulevant la poussière, il est clair que les indiens sont partis depuis longtemps, et que, par conséquent, on n'arrête plus grand monde !
C'est la raison pour laquelle il faut penser à d'autres solutions. Cette motion, Mesdames et Messieurs, a pour but d'être un aiguillon pour des réflexions de réorganisation et de réaffectation des moyens. Pourquoi ? Parce que, à l'époque, au moment où elle a été déposée, on venait d'apprendre que la task force drogue, pour reprendre cet épouvantable anglicisme, était dégarnie pour faire face à d'autres risques. Cela posait toute la question de savoir qui allait reprendre cette tâche de sécurisation des rues que cette task force remplit, puisqu'elle ne s'occupe pas vraiment seulement de trafic de stupéfiants. C'est la raison pour laquelle est venue l'idée de se dire: «Mais dans le fond, utilisons la police judiciaire, non pas simplement pour mener des enquêtes complexes, mais aussi pour être sur le terrain et pour, en civil, procéder à l'appréhension des criminels en question.» Parce que ce que je vous disais tout à l'heure, en soulignant qu'il n'est pas normal que l'on écrive dans un exposé des motifs d'une motion que les délinquants en question savaient qu'ils ne risquaient rien, appelle précisément une réponse. Cette réponse, c'est notamment la création d'une brigade anti-criminalité, comme on avait autrefois la brigade «voie publique», qui a permis de résoudre les problèmes de sécurité du Molard, il y a quelques années de cela, et que l'on a depuis, malheureusement, supprimée.
Mesdames et Messieurs les députés, lorsqu'en 2008 cette motion a été déposée, les libéraux se sont vu reprocher d'exagérer quelque peu la situation. Entre-temps, heureusement, le niveau de préoccupation des députés a - je le disais tout à l'heure - atteint un niveau relativement équivalent.
Par conséquent, je suis certain aujourd'hui que cette motion ne sera pas accueillie par les sarcasmes qu'elle avait essuyés parfois - parfois ! - à l'époque et que, conscients que nous sommes tous de la difficulté à laquelle nous devons faire face, vous accepterez de renvoyer aussi cette motion à la commission judiciaire, pour que nous puissions en quelque sorte, Monsieur Catelain, y avoir de «minis-états généraux» de la sécurité au terme desquels - j'aimerais rassurer M. le conseiller d'Etat - aucune tête ne roulera dans la corbeille.
M. Antoine Bertschy (UDC). Le député Jornot, qui a parlé avant moi, a dit: «C'est bien que nous dialoguions sur la sécurité.» Effectivement, c'est bien. Mais devons-nous le faire en plénière ? Mesdames et Messieurs les députés, j'ai l'impression que nous perdons notre temps avec un wagon de motions et un tender de résolutions à la fin du train, alors qu'une magnifique résolution vous a été proposée par l'UDC, la R 588, qui demande la création d'une commission ad hoc sur la sécurité. Nous avons demandé l'urgence de cette résolution à l'époque du dépôt, mais elle a été refusée. Et que se passe-t-il ? A l'heure actuelle, nous occupons notre temps en séance plénière à discuter de problèmes ponctuels de sécurité, alors que c'est un problème global, et nous n'avançons pas dans notre ordre du jour.
Mesdames et Messieurs, je regrette cet état de fait. J'espère que, au moment où nous arriverons au point 41 de notre ordre du jour, vous voterez en faveur de la création de cette commission ad hoc sur la sécurité, afin de ne pas surcharger la commission judiciaire, qui a déjà beaucoup à faire avec le pouvoir judiciaire, et pour que nous puissions parler spécifiquement des problèmes de sécurité dans une commission ad hoc.
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, contrairement à l'UDC, le MCG félicite toute initiative parlementaire qui vise à améliorer la sécurité à Genève. Néanmoins, cette motion pose des questions qui sont davantage d'ordre opérationnel, qui sont du ressort de l'exécutif et non des parlementaires. Vous le savez tous et cela a été relevé, aujourd'hui existe déjà la task force drogue, composée - et ce n'est pas un secret - de gendarmes et d'inspecteurs. Cette brigade a été créée pour lutter contre des problèmes essentiellement aux Pâquis, aux Eaux-Vives et à d'autres coins du canton.
Actuellement, l'organisation est bonne. Si vous voulez vider les postes où les gendarmes sont aujourd'hui surchargés, il n'y a qu'à créer une nouvelle brigade ! On peut tout faire, créer une brigade de 100 policiers affectés au secteur des Pâquis... Mais les habitants d'Onex, de Lancy et des autres communes verront leur poste de quartier se vider et en souffriront. Donc je ne pense pas que ce soit une bonne solution. Comme je l'ai dit, laissons l'organisation de la police à l'exécutif.
D'autre part, quand je lis qu'il faut créer «une brigade anti-criminalité», cela me fait sourire. Je pense que toutes les brigades de police judiciaire sont là contre la criminalité ! Il n'y a donc rien de nouveau dans cette motion, et le MCG la refusera.
M. Jean-Marc Odier (R). Mesdames et Messieurs les députés, nous appuierons cette motion qui, comme le projet de loi radical sur l'exclusion de zone que nous avons renvoyé en commission tout à l'heure, vise simplement à réduire l'insécurité à Genève. Donc il y aura un grand débat lors de la prochaine législature, mais d'ores et déjà il faut penser que ce soutien demandera le vote de moyens, d'effectifs, et le groupe radical appuiera également ces moyens.
M. Pierre Losio (Ve). Tout à l'heure, le député Jornot a employé le terme «incantatoire». Je dois dire que la batterie de textes que nous avons à étudier aujourd'hui relève, pour la plupart d'entre eux, de l'incantation. Quant à nous, nous soutiendrons tous les textes qui ont réellement un impact concret, immédiat et possible. Or que demande cette motion ? Que le parlement, en fait, s'immisce dans les décisions stratégiques et opérationnelles de la police. Nous pensons que ce n'est pas son rôle.
Nous ne négligeons pas le problème de la sécurité. Pour nous, celle-ci passe avant tout et par-dessus tout par un îlotage et une présence constante de la police dans les quartiers où des délits sont commis en quantité. Je répète: il faut une présence, un îlotage en permanence et en grande intensité.
D'autre part, la sécurité passe aussi par la revalorisation du travail de policier, et notamment par l'attractivité à l'entrée en fonction des nouveaux gendarmes. Nous soutiendrons - et fermement ! - avant la prochaine législature toutes les propositions du Conseil d'Etat qui viseront à atteindre le plancher légal du nombre de gendarmes et de policiers que nous pouvons avoir à Genève. Nous ne négligeons pas non plus qu'il conviendra que nos parlementaires fédéraux fassent également leur travail afin d'inciter les autorités fédérales à accélérer tous les processus qui permettent la réadmission des récidivistes.
Par conséquent, nous vous proposons de refuser cette motion, parce qu'elle est strictement opérationnelle et stratégique, et qu'elle relève directement du commandement de la police et de l'exécutif. Voilà pourquoi nous vous invitons à refuser d'entrer en matière.
M. Jean-Claude Ducrot (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, le groupe démocrate-chrétien soutiendra le renvoi en commission, non sans avoir un regard quelque peu critique sur cette motion. On pourrait presque dire qu'elle enfonce des portes ouvertes, car la mission première de la police n'est-elle pas précisément de préserver l'ordre public, de lutter contre la criminalité ? Si la police n'effectuait pas ces tâches, alors elle n'accomplirait pas sa mission ! Donc que je crois qu'il faut rester un brin sérieux et crédibles, quand bien même nous sommes en période électorale.
Cela étant, le groupe démocrate-chrétien, comme les Verts, soutiendra absolument, dans le cadre de la prochaine législature, la revalorisation de la fonction de policier. Et ce matin, j'ai relevé un élément important: un bon climat de confiance entre la police et ses autorités est un gage dans l'action policière.
Mesdames et Messieurs, au travers de cette motion un peu trompeuse, il semblerait que l'on oublie que Champ-Dollon a plus de 500 détenus ! Ces détenus ne sont pas tombés du ciel dans la marmite de Champ-Dollon ! Il y a bien eu, derrière, tout un travail de la police pour mettre fin à une criminalité dans le canton... Donc il faut tout de même être sérieux.
Le groupe démocrate-chrétien est favorable au renvoi en commission, afin que, dans l'organisation qui sera proposée par le Conseil d'Etat, nous puissions faire valoir un certain nombre d'éléments pour revaloriser la sécurité et les forces de l'ordre dans ce canton.
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes ont accueilli cette proposition de motion avec un sentiment partagé, entre, d'une part, la sensation qu'il était important de reconnaître les questions d'insécurité, dans laquelle certaines personnes peuvent se trouver dans notre canton, et, d'autre part, les réponses aujourd'hui éventuellement inadéquates que les forces de police donnent, peut-être parce qu'elles sont en nombre insuffisant, peut-être parce que certaines compétences doivent être exercées au niveau municipal. Mais en tout cas ce serait un très mauvais message que de dire que les problèmes n'existent pas.
Je pense que, à l'inverse, il faut éviter de prendre le premier fait divers dramatique qui survient pour généraliser et dire que les problèmes sont nouveaux. D'ailleurs, c'est ce qui gêne souvent les socialistes dans les propositions visant à faire de la criminalité et de la sécurité des thèmes électoraux. On sait que cela a fait le succès de M. Sarkozy... Cela fera peut-être le succès de certains partis de droite ici. Mais fondamentalement, cela ne résout pas les problèmes, et c'est donc bien cela qui gêne les socialistes.
Maintenant, à la lecture de cette motion, j'ai me suis fait les mêmes réflexions que M. Golay. C'est vrai qu'elle relève de l'opérationnel, et on s'étonne encore que l'on nous ne demande pas de choisir la couleur des chaussures des policiers, voire la quantité de munitions dans leur pistolet, ou que sais-je... Quoi qu'il en soit, cette proposition semble effectivement très opérationnelle. Nous, les socialistes, sommes favorables à la reconnaissance des problèmes pour y apporter des réponses. Cependant, les solutions ici évoquées ne nous semblent pas forcément les meilleures. Dans tous les cas, discuter en commission de vraies propositions susceptibles d'améliorer la qualité de vie des habitants victimes de nuisances dues à des délinquants qui n'ont rien à faire là, oui, nous y sommes favorables ! Donc, nous sommes pour le renvoi de cette motion à la commission judiciaire.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Catelain. Vous avez une minute et trente secondes, Monsieur le député.
M. Gilbert Catelain (UDC). Nous sommes cette fois saisis d'une motion de nature opérationnelle, effectivement, qui indique à la police comment elle doit agir. Le plus simple serait de fixer un contrat de prestations à la police; et, à partir du contrat de prestations, des objectifs qui lui sont fixés, elle adapterait son organisation. Mais ce serait prendre le problème par le petit bout de la lorgnette. Par ailleurs, nous ne nous opposerons pas au renvoi en commission.
J'aimerais simplement rappeler le problème de sécurité auquel nous sommes confrontés. Pour les PACA et l'aménagement du territoire, nous organisons des réunions transfrontalières où nous invitons les élus des communes frontalières concernées. En effet, notre problème de sécurité n'est pas simplement genevois, mais régional. C'est pourquoi nous devons absolument discuter toute cette question de manière régionale et avoir de vrais états généraux. En 2000, nous avions 300 collaborateurs pour surveiller le terrain clé - le terrain clé, dans un canton frontière, c'est précisément la frontière, et nous l'avons abandonnée. Aujourd'hui, les collaborateurs sont environ une centaine... Il faut regarder la réalité en face: à partir du moment où vous enlevez 200 collaborateurs pour effectuer des tâches liées à nos engagements internationaux, à savoir travailler pour les Européens à l'aéroport, cela a des conséquences directes pour le centre-ville et les communes. Et ce débat-là, nous n'y échapperons pas. Schengen prévoit d'ailleurs de renforcer la collaboration internationale d'ordre opérationnel. Nous devons absolument nous immiscer dans cette problématique, nous en imprégner, et travailler globalement, non pas par problèmes particuliers.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Stauffer. Vous avez une minute et trente secondes, Monsieur le député.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, pour corriger quelques propos de nos collègues UDC... (Commentaires.) ...qui parlaient de leur résolution, j'aimerais simplement leur dire que, le 19 mai 2006, le MCG avait déjà déposé une motion pour créer une commission. Et l'actuel président du Grand Conseil, député UDC, avait déclaré que la création d'une commission - c'est dans le Mémorial - était totalement inutile. Donc, si vous pouviez avoir un peu de cohérence dans votre ligne politique, cela serait mieux ! (Commentaires.) C'est la motion 1663, si certains d'entre vous veulent la consulter.
Maintenant, je crois que le parti libéral avait calculé son coup par rapport à une campagne électorale, puisque c'est vrai que vous enfoncez quelques portes ouvertes. Ce qui me dérange et me choque... (Remarque.) ...en tant que représentant du pouvoir législatif, c'est que vous vouliez entrer dans l'opératif. Il n'est pas nécessaire, effectivement, de dire quelle doit être la couleur des chaussures - pour reprendre les propos de M. Deneys - ou le nombre de balles dans les revolvers. Il faut simplement donner les impulsions politiques et laisser l'organisation de la police à la police. Mais avec une grande chance: nous aurons un nouveau chef du département des institutions, qui peut-être fera appliquer l'arsenal pénal à disposition de Genève, notamment en matière d'arrestation des personnes frappées de non-entrée en matière. Vous savez, ce sont précisément ces gens qui se moquent de la justice, qui sont arrêtés à 22h et libérés à 8h du matin, et que l'on retrouve à dealer de la drogue sur le même trottoir, devant le même commerce, à la rue de Lausanne notamment. Non !
Mesdames et Messieurs les députés...
Le président. Il faudra terminer, Monsieur le député.
M. Eric Stauffer. ...il faut quelqu'un de fort à la tête de ce département. La zone d'exclusion doit recouvrir l'entier du territoire genevois. Quant aux criminels et aux dealers de drogues, c'est en prison qu'ils doivent se trouver !
Une voix. Bravo ! (Brouhaha.)
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. J'aimerais simplement rassurer ceux qui pensent que la réorganisation de la police est un dossier de la prochaine législature: c'est un dossier de l'actuelle législature, et vous aurez les textes légaux cet automne. (Remarque.)
S'agissant de cette motion, plusieurs d'entre vous ont dit qu'elle était opérationnelle; c'est vrai. Si l'on reprend les vingt dernières années de l'histoire de la police, il y a toujours eu des tensions entre la gendarmerie et la police judiciaire pour savoir qui s'occupait de la rue et s'il fallait y aller en uniforme pour dissuader ou en civil pour attraper. Si on les envoie tous en même temps, on comprend facilement la chose... Je crois qu'il ne faut pas, évidemment, que votre Grand Conseil se lance dans l'organisation même de la police. Monsieur Jornot, vous avez dit que cette motion était un aiguillon de la réflexion. Cela n'a peut-être pas aiguillé M. Stauffer tout à fait dans la bonne direction, mais, pour le surplus, je suis d'accord que nous en discutions en commission, comme d'autres motions, d'ailleurs, qui disent des choses intéressantes mais ne sont pas forcément ni d'actualité ni de compétence législative.
Pour M. Catelain, j'aimerais simplement préciser que la dimension transfrontalière ne nous échappe pas. Il existe - d'ailleurs, M. Catelain doit le savoir - des contacts réguliers, systématiques, avec les forces de sécurité françaises, et nous en sommes pratiquement aujourd'hui à l'échange d'officiers de liaison pour que l'institutionnalisation soit constante et immédiate des deux côtés.
Je ne vais pas vous faire l'historique sur le groupe Tire, la task force et tous ces éléments qui sont au coeur de vos préoccupations. J'aimerais seulement dire, s'agissant de la task force drogue, ce que nous entendons faire et ce qui, en réalité, a toujours été le cas dès l'origine: être capables d'avoir des effectifs sur les problèmes les plus urgents, les plus immédiats, qui étaient à certains moments la drogue et qui sont restés la drogue dans certains endroits. Mais à un moment donné, on a eu les cambrioleurs géorgiens, on a mis tout le monde dessus, et vous avez vu le résultat: les cambriolages ont baissé de 30%. Donc, on a besoin de cette marge de manoeuvre. Elle est évidemment purement opérationnelle.
Le président. Nous sommes saisis d'une demande d'amendement. Le texte a été déposé sur vos places, il s'agit d'une nouvelle invite. Nous procédons au vote... (Commentaires.) Alors je vous lis le texte: «à inscrire au budget un montant destiné à engager du personnel administratif assermenté avec des prérogatives policières afin de décharger les agents de la police des tâches administratives.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 38 non contre 2 oui et 5 abstentions.
Le président. Nous nous prononçons à présent sur le renvoi de la motion 1829 à la commission judiciaire.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1829 à la commission judiciaire et de la police est adopté par 41 oui contre 14 non et 2 abstentions.
Débat
Le président. Nous sommes au point 26 de notre ordre du jour. Il s'agit encore une fois d'une motion à traiter en catégorie II: trois minutes de parole par groupe. Je donne le micro à Mme Fontanet, auteure de la motion.
Mme Nathalie Fontanet (L). Mesdames et Messieurs, j'aimerais d'abord vous dire le plaisir que j'ai à entendre, parmi les bancs de l'Alternative, la nouveauté: on ne parle plus ce soir de sentiment d'insécurité, ni d'insécurité économique, mais l'on reconnaît finalement que la situation en matière de sécurité s'est dégradée à Genève. C'est un réel plaisir d'entendre cela - et je ne me moque pas ! En effet, il me semble que, pour régler véritablement les problèmes que vit Genève actuellement - nos habitants sont inquiets quant au trafic qui a envahi nos rues, ils sont inquiets face à la violence et à la mendicité, même si cela doit être placé sous un autre plan - eh bien, il me semble que nous pouvons réaliser quelque chose tous ensemble, en décidant que les lois doivent être appliquées et que des mesures doivent être prises afin que la police puisse accomplir sa fonction première.
C'est dans ce contexte que les libéraux ont élaboré cette motion, qui n'est finalement qu'un rappel d'anciennes motions. Il n'y a rien de nouveau, mais le but est que la police puisse s'acquitter de ses tâches, faire respecter l'ordre public dans la rue, et qu'elle ne soit pas affectée à des tâches administratives, immobilisée dans les centres de police. Pour cela, Mesdames et Messieurs, nous souhaitons effectivement que des mesures soient prises. Nous relevons également qu'en termes purs d'organisation et d'économie une personne formée en matière administrative ne représente pas les mêmes coûts qu'un policier ni, non plus, n'en a les mêmes tâches. Donc, elle sera certainement beaucoup plus efficace.
Mesdames et Messieurs, le groupe libéral vous demande de renvoyer cette motion à la commission judiciaire.
M. Pierre Losio (Ve). Voilà enfin une motion qui, elle, n'est pas incantatoire, mais concrète, et qui s'attaque à un problème qui peut être résolu. Nous avons appris lundi, à la commission de contrôle de gestion, qu'un rapport allait être remis au Conseil d'Etat concernant la police et que la problématique soulevée par cette motion faisait partie de l'une des propositions du groupe de travail qui a planché sur la question. Nous pensons que cette motion mérite d'être appuyée, et nous la soutiendrons effectivement.
Par ailleurs, Monsieur le président, je vous fais courtoisement remarquer que l'amendement que vous nous avez fait voter tout à l'heure concernait bien cette motion, je le crains, puisqu'il demandait que soient alloués des postes administratifs pour la police. A moins que je ne me trompe... Si tel est le cas, je vous présente mes excuses, Monsieur le président.
Le président. Monsieur le député, j'ai correctement lu le numéro de la motion indiqué sur la demande d'amendement. Il s'agissait bien de la motion précédente. La parole est à M. Hohl.
M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, nous soutenons bien évidemment cette proposition de motion: «Déchargeons réellement la Police de ses tâches administratives !» C'est également l'une des préoccupations du parti radical depuis fort longtemps. Effectivement, il est extrêmement démotivant pour notre police de travailler trois, quatre ou cinq heures à rédiger des rapports concernant des criminels de rue et d'y retrouver ces derniers le lendemain ! Nous voulons que les policiers soient sur le terrain et qu'ils soient assistés par des professionnels, des assistants aux policiers. Donc, nous soutenons parfaitement ce renvoi à la commission judiciaire et nous nous réjouissons de travailler sur ce projet.
M. Jean-Claude Ducrot (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe démocrate-chrétien soutiendra le renvoi de cette proposition de motion à la commission judiciaire. Cela étant, ce sujet n'est pas nouveau. Guy Fontanet, ancien conseiller d'Etat démocrate-chrétien, avait déjà, à l'époque, sensibilisé votre Grand Conseil au problème des tâches administratives, qu'il était éminemment nécessaire de résoudre pour intensifier la présence des policiers dans la rue. Je crois qu'il ne faut pas l'oublier: Guy Fontanet a été un grand magistrat démocrate-chrétien, qui a mis sa patte très sensible... (Commentaires.) ...dans l'organisation de la police pendant douze ans et sous le règne duquel la sécurité à Genève était une évidence !
Cela étant, Mesdames et Messieurs, notre responsabilité, la responsabilité de notre Grand Conseil, sera conséquente en matière budgétaire. Il ne suffit pas de déposer des propositions de motions, encore faudra-t-il que, sur le plan budgétaire, elles soient suivies d'effets.
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, oui, cette motion va rejoindre la très longue série de celles qui ont déjà été déposées à ce sujet - cette motion le mentionne, il y en avait bien d'autres, en 1999 et 2004, et même auparavant.
J'espère simplement, de la part de nos collègues libéraux, qu'il ne s'agit pas en ce moment d'une gesticulation politique et, bien entendu, électorale... Car il faudra, comme cela a été dit, voter les postes budgétaires, ce que jusqu'à aujourd'hui vous n'avez brillamment pas fait, y compris dans d'autres secteurs où des renforts sont nécessaires ! Je pense à d'autres domaines, comme l'hôpital et l'instruction publique. (Commentaires.) Votre motion invite à augmenter le nombre de collaborateurs, alors soyez cohérents au moment de voter le budget ! Merci !
M. Antoine Bertschy (UDC). Il me semble que ce n'est pas parce que l'on est pour une augmentation des effectifs de la police que l'on est forcément en faveur d'une augmentation des effectifs au DIP. C'était une simple remarque, en réaction aux propos de mon préopinant.
Mesdames et Messieurs, le groupe UDC renverra cette motion en commission. Mais, encore une fois, nous débattons toujours de la sécurité, toujours avec des motions... Pourtant, la résolution que le groupe UDC a déposée, pour une commission ad hoc de la sécurité, figure toujours au point 41 ! (Brouhaha.) Si, à l'époque, vous aviez accepté l'urgence pour l'instauration de cette commission ad hoc de la sécurité, nous aurions pu y renvoyer toutes ces motions directement, et le traitement aurait été beaucoup plus rapide qu'il ne le sera avec un renvoi à la commission judiciaire.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Stauffer. Vous avez deux minutes, Monsieur le député.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai que le travail administratif de la police représente beaucoup, beaucoup, beaucoup d'heures... Laissez-moi, très brièvement, vous faire partager quelques moments, puisque j'ai eu le privilège de passer une nuit en observateur avec la brigade task force drogue. (Commentaires.) Et laissez-moi vous expliquer, Mesdames et Messieurs les députés, que lorsque cette brigade se met en oeuvre, elle doit arrêter ses travaux à 1h du matin si elle commencé à 17h... (Remarque.) ...et à 5h du matin si elle a commencé à 23h. En effet, avec la paperasse qu'il faut faire derrière les onze arrestations, les policiers ne peuvent plus être sur le terrain ! Voilà aujourd'hui quel est l'outil dévolu à la police genevoise pour combattre les dealers de drogue dans les rues.
Mesdames et Messieurs les libéraux, il est dommage que le «Zorro blanc» de ce parlement ne soit pas présent au moment où je vous parle, je veux dire l'éminent Dr Weiss, puisque c'est M. le député Weiss qui, à la commission des finances, s'est opposé au paiement des heures supplémentaires. On voit là une très belle contradiction avec la politique électoraliste que le parti libéral tente de mener à un mois et demi des élections, en disant: «Il faut plus de sécurité !» (Commentaires.) Mais lorsqu'il faut payer des heures supplémentaires, on ne retrouve plus le parti libéral et le paiement de ces heures supplémentaires est refusé. Je vous le dis: pour avoir une police forte, il faut une police qui ait les moyens financiers de se développer. Il faut engager du personnel administratif pour laisser la police combattre la criminalité dans les rues. Vous le savez, nous avons eu une vague de cambriolages...
Le président. Il vous faut terminer, Monsieur le député.
M. Eric Stauffer. ...quelque chose comme 150 cambriolages en l'espace de trois semaines. Il faut combattre cette criminalité, et pour cela des moyens sont nécessaires.
Alors, Mesdames et Messieurs, je vous prends à témoins - comme la population qui nous regarde: Mesdames et Messieurs les libéraux, votez les budgets ! Le budget sera voté dans peu de temps, et nous verrons quel est le maçon au pied du mur...
Le président. Il faut terminer, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. ...qui saura monter ce mur, ou qui, de nouveau, sera hypocrite et mentira à la population pour des raisons électoralistes !
M. Roger Deneys (S). Je ne suis pas sûr que la police ait pu travailler en s'occupant aussi de M. Stauffer toute la nuit... (Exclamations.) ...et à mon avis, c'est de nature à l'empêcher d'exercer son métier correctement. Mais enfin, si les députés veulent se payer des voyages, la nuit, avec la police, pour l'empêcher d'effectuer son travail, libres à eux de le faire. Je ne suis pas sûr que notre république y gagne...
Comme pour la motion précédente, l'idée d'assurer la sécurité de nos concitoyennes et concitoyens préoccupe évidemment les socialistes. La question des tâches administratives, de qui les accomplit au sein de la police, relève une fois de plus de l'organisation. Et il n'est pas certain que notre Grand Conseil puisse dire ici: «Le policier doit faire ceci mais pas cela, appuyer sur ce bouton, écrire ce message-ci mais pas celui-là...». Je ne suis pas convaincu, à nouveau, qu'adopter une telle motion soit la meilleure méthode pour résoudre les problèmes d'insécurité dans notre canton, mais cela mérite d'être étudié. Un équilibre est à trouver entre les tâches administratives et le temps que passe sur le terrain la police - y compris la police municipale - qui doit être présente dans les rues quand et là où c'est nécessaire. Il y a peut-être des questions plus larges, de placards dorés, de policiers qui seraient dans des bureaux et qui ne feraient pas leur travail... Mais c'est un autre problème qui mérite, je pense, d'autres débats.
Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais encore rappeler que les questions d'insécurité ne concernent pas que les agressions et la violence - elles ne concernent certainement pas la mendicité, qui vient compliquer la tâche de la police au lieu de la laisser exercer des tâches prioritaires en matière de sécurité publique - il s'agit aussi de questions de chômage, d'emploi, de perte d'emploi et de logement. Pour de nombreux Genevois et de nombreuses Genevoises, la sécurité, c'est d'abord survivre, avant de risquer d'être agressés. Il ne faut donc pas négliger cette dimension de la sécurité. (Commentaires.) On peut rajouter la sécurité routière, puisque qu'il y a de nombreux morts sur les routes genevoises chaque année.
Ainsi, la sécurité, ce n'est pas simplement les agressions relatées par la presse. C'est une notion bien plus large ! On ne peut pas se limiter à cette vision machiavélique de la sécurité. Et, de nouveau, le problème d'insécurité à Genève provient certainement aussi de nos voisins français: M. Sarkozy exporte sa délinquance. C'est aussi un résultat de la politique libérale exercée dans le pays voisin.
Mesdames et Messieurs les députés, pour assurer la sécurité publique - et je dirai ceci aussi aux électrices et électeurs - la meilleure des choses à faire est de garantir des recettes publiques suffisantes au canton de Genève, donc de refuser les baisses d'impôts le 27 septembre prochain ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Gautier. Vous avez une minute et trente secondes, Monsieur le député.
M. Renaud Gautier (L). Monsieur le président, vous savez comme moi que les conditions de travail de ce parlement sont difficiles, surtout lorsqu'il fait aussi chaud - il serait d'ailleurs grand temps que l'OCIRT vienne faire un tour ici pour vérifier si les conditions d'hygiène sont respectées... J'imagine que ceci entraîne cela. Dans la mesure où c'est très tendance actuellement, j'entends bien évidemment m'excuser auprès de la police des propos parfaitement délirants et stupides d'un préopinant de tout à l'heure, et redire que le groupe libéral se réjouit que cette motion soit renvoyée en commission pour qu'elle puisse être traitée sérieusement.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1830 à la commission judiciaire et de la police est adopté par 60 oui (unanimité des votants).
Le président. Mesdames et Messieurs, je suggère que nous prenions notre pause jusqu'à 17h05. Je rappelle à la commission des visiteurs officiels qu'elle se réunit maintenant à la salle des Deux-Cents. A tout à l'heure !
La séance est levée à 16h45.