République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 10 avril 2025 à 17h
3e législature - 2e année - 12e session - 64e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de M. Alberto Velasco, président.
Assistent à la séance: Mmes Nathalie Fontanet, présidente du Conseil d'Etat, Carole-Anne Kast et Delphine Bachmann, conseillères d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Thierry Apothéloz, Antonio Hodgers, Anne Hiltpold et Pierre Maudet, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Lara Atassi, François Baertschi, Alexis Barbey, Lionel Dugerdil, Amar Madani, André Pfeffer, Charles Poncet, Caroline Renold, Skender Salihi, Djawed Sangdel et Vincent Subilia, députés.
Députés suppléants présents: Mme et MM. Darius Azarpey, Céline Bartolomucci, Thomas Bruchez, Stéphane Fontaine, Patrick Lussi, Philippe Meyer, Daniel Noël et Frédéric Saenger.
Procès-verbal des précédentes séances
Le président. Le procès-verbal de la session du Grand Conseil des 20 et 21 mars 2025 a été adressé à tous les chefs de groupe. N'ayant fait l'objet d'aucune remarque, ce procès-verbal est adopté.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
Le président. La liste des projets de lois renvoyés sans débat vous a été transmise par messagerie.
Projets de lois renvoyés sans débat
Le président. La discussion immédiate est-elle demandée sur l'un de ces points ? Ce n'est pas le cas, ces projets de lois sont donc renvoyés dans les commissions indiquées.
De même, la liste des propositions de motions renvoyées sans débat vous a été transmise par messagerie.
Propositions de motions renvoyées sans débat
Le président. La discussion immédiate est-elle demandée sur l'un de ces points ? Ce n'est pas le cas, ces propositions de motions sont donc renvoyées dans les commissions indiquées.
Enfin, la liste des propositions de résolutions renvoyées sans débat vous a été transmise par messagerie.
Propositions de résolutions renvoyées sans débat
Le président. La discussion immédiate est-elle demandée sur l'un de ces points ? Je cède le micro à M. Jotterand.
M. Matthieu Jotterand (S). Merci, Monsieur le président. Le groupe socialiste sollicite la discussion immédiate et l'urgence sur la R 1061 «contre la ségrégation des élèves et pour des conditions d'apprentissage dignes et équitables».
Le président. Merci, Monsieur le député. Je lance la procédure de vote.
Mise aux voix, la discussion immédiate de la proposition de résolution 1061 est adoptée par 57 oui contre 30 non.
Mis aux voix, le traitement en urgence de la proposition de résolution 1061 est adopté par 49 oui contre 29 non.
Le président. Cet objet figurera sur la liste des urgences. Les autres propositions de résolutions sont quant à elles renvoyées dans les commissions indiquées.
Je vous informe que les points suivants seront traités ensemble: les PL 13416-A, P 2214-A et M 3005-A concernant les nominations au sein de l'administration publique ainsi que les PL 10843-C, P 1801-C et P 1879-B relatifs au projet des Corbillettes.
Nous passons aux modifications de l'ordre du jour. Tout d'abord, la commission législative et le Conseil d'Etat proposent le traitement en urgence du PL 12834-B «modifiant la loi sur l'organisation des institutions de droit public (LOIDP) (A 2 24)».
Mis aux voix, le traitement en urgence du rapport PL 12834-B est adopté par 89 oui (unanimité des votants).
Le président. Ce texte rejoint la liste des urgences. Par ailleurs, la commission des affaires communales, régionales et internationales demande l'ajout et l'urgence sur les R 1056-A, R 1057-A et R 1064 ayant trait à la Genève internationale.
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour du rapport R 1056-A et R 1057-A ainsi que de la proposition de résolution 1064 est adopté par 84 oui contre 2 non et 3 abstentions.
Mis aux voix, le traitement en urgence du rapport R 1056-A et R 1057-A ainsi que de la proposition de résolution 1064 est adopté par 84 oui contre 2 non et 3 abstentions.
Le président. Ces objets viennent s'ajouter à la liste des urgences. La commission des affaires communales, régionales et internationales sollicite également l'ajout à l'ordre du jour de la M 3098-A «Quelle Genève internationale pour demain ?».
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour du rapport M 3098-A est adopté par 84 oui et 1 abstention.
Le président. Ce texte complétera la liste des urgences et sera traité avec les R 1056-A, R 1057-A et R 1064. Nous poursuivons avec les demandes des députés, et je passe la parole à M. Alder.
M. Murat-Julian Alder (PLR). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, le groupe libéral-radical vous propose d'accepter l'ajout, la discussion immédiate et l'urgence sur le PL 13616 «modifiant la constitution de la République et canton de Genève (Cst-GE) (A 2 00) (Renforcement de la sécurité de proximité)». Nous vous prions d'en faire de même pour le PL 13613, afin que les deux textes puissent être traités ensemble.
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous votons d'abord sur le PL 13616, puis l'UDC formulera les demandes relatives au PL 13613.
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour du projet de loi 13616 est adopté par 46 oui contre 33 non et 8 abstentions.
Mise aux voix, la discussion immédiate du projet de loi 13616 est adoptée par 46 oui contre 41 non.
Mis aux voix, le traitement en urgence du projet de loi 13616 est adopté par 48 oui contre 39 non et 1 abstention.
Le président. Ce point vient s'ajouter à la liste des urgences. Je cède à présent le micro à M. Saudan.
M. Marc Saudan (LJS). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le groupe LJS souhaite l'urgence sur le PL 13364-B «modifiant la loi sur la remise à titre gratuit et la vente à l'emporter de boissons alcooliques, de produits du tabac et de produits assimilés au tabac (LTGVEAT) (I 2 25)». Mon groupe demande également le traitement en urgence de la M 3049-A.
Le président. Merci, Monsieur le député. Concernant votre deuxième requête, je vous redonnerai la parole par la suite.
Mis aux voix, le traitement en urgence du rapport PL 13364-B est rejeté par 53 non contre 39 oui.
Le président. Monsieur Blondin, vous avez la parole.
M. Jacques Blondin (LC). Merci beaucoup, Monsieur le président. Le Centre propose l'ajout, la discussion immédiate et l'urgence sur la R 1063 «NON au diktat américain, résilions le contrat des F-35 ! Une question de souveraineté et de défense des intérêts de la Suisse (Résolution du Grand Conseil genevois à l'Assemblée fédérale exerçant le droit d'initiative cantonale)».
Le président. Je vous remercie. Je lance la procédure de vote sur la demande d'ajout de ce point à l'ordre du jour.
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour de la proposition de résolution 1063 est rejeté par 51 non contre 41 oui.
Le président. Je passe maintenant la parole au député Ivanov.
M. Christo Ivanov (UDC). Merci, Monsieur le président. L'UDC demande l'ajout du PL 13613 «modifiant la loi sur les agents de la police municipale, les contrôleurs municipaux du stationnement et les gardes auxiliaires des communes (LAPM) (F 1 07) (Feux bleus: donnons les moyens aux APM d'accomplir leurs missions !)», qui est lié au PL 13616 pour lequel l'ajout, la discussion immédiate et l'urgence viennent d'être votés suite à la requête formulée par le PLR.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je prie l'assemblée de se prononcer sur cette demande.
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour du projet de loi 13613 est adopté par 49 oui contre 43 non.
Le président. Ce point sera donc traité avec le PL 13616. Monsieur Saudan, vous avez la parole.
M. Marc Saudan (LJS). Merci, Monsieur le président. Le groupe LJS sollicite l'urgence sur la M 3049-A «pour valoriser le football féminin auprès des jeunes à Genève».
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous sommes en procédure de vote.
Mis aux voix, le traitement en urgence du rapport M 3049-A est adopté par 94 oui (unanimité des votants).
Le président. Ce texte figurera également sur la liste des urgences. Je cède le micro à M. Martin.
M. David Martin (Ve). Merci, Monsieur le président. Le groupe des Vert-e-s... (L'orateur prononce «Vert tiret e tiret s». Exclamations.) ...demande l'ajout, la discussion immédiate et l'urgence sur la M 3116 «pour un renforcement des mécanismes de prévention et d'intervention face aux pollutions des cours d'eau genevois», en lien avec la pollution qui vient de survenir dans l'Aire. Il nous semble en effet très important que cette motion soit abordée dès ce soir, sans passage en commission.
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote.
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour de la proposition de motion 3116 est adopté par 85 oui contre 5 non et 1 abstention.
Mise aux voix, la discussion immédiate de la proposition de motion 3116 est adoptée par 84 oui contre 5 non et 1 abstention.
Mis aux voix, le traitement en urgence de la proposition de motion 3116 est adopté par 86 oui contre 5 non et 1 abstention.
Le président. Ce texte vient compléter la liste des urgences.
Communications de la présidence
Le président. Je vous informe que notre collègue député Thierry Cerutti fête aujourd'hui ses 55 ans ! (Vifs applaudissements.)
Correspondance
Le président. L'énoncé de la correspondance reçue par le Grand Conseil vous a été envoyé par messagerie. Cet énoncé figurera au Mémorial.
Rapport annuel 2024 de la commission de pilotage du dispositif d'encouragement à la médiation du Pouvoir judiciaire (transmis à la commission judiciaire et de la police) (C-4156)
Annonces et dépôts
Le président. Suite à l'arrêt du Tribunal fédéral du 28 février 2025, la loi 13030 «sur les estimations fiscales de certains immeubles (LEFI) (D 3 10)» est modifiée comme suit: l'article 2, alinéa 2 (LEFI), est annulé, de même que l'article 52, alinéa 5, 2e et 3e phrases, et alinéa 6, 2e et 3e phrases (LIPP).
Suite à l'arrêt de la Chambre constitutionnelle de la Cour de justice du 24 mars 2025, la loi 13036 «modifiant la loi générale sur les zones de développement (LGZD) (L 1 35) (Aidons notre classe moyenne à accéder à la propriété)» est annulée.
Par ailleurs, les projets de lois suivants sont retirés par leurs auteurs:
Projet de loi de Stéphane Florey, Christo Ivanov, Virna Conti, Patrick Lussi, André Pfeffer, Sébastien Thomas, Marc Falquet, Gilbert Catelain, Philippe Perrenoud, Thomas Bläsi, Guy Mettan modifiant la loi relative à la diminution de l'impôt sur le revenu des personnes physiques (LDIRPP) (D 3 06) (Face à la hausse du coût de la vie, redonnons du pouvoir d'achat à la population !) (PL-13283)
Projet de loi de Stéphane Florey, Christo Ivanov, Marc Falquet, Virna Conti, André Pfeffer, Sébastien Thomas, Gilbert Catelain, Philippe Perrenoud, Thomas Bläsi, Guy Mettan, Patrick Lussi modifiant la loi sur les centimes additionnels cantonaux (LCACant) (D 3 07) (Face à la hausse du coût de la vie, redonnons du pouvoir d'achat à la population !) (PL-13284)
Le président. La commission des travaux demande un préavis à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport sur le PL 13562 «ouvrant un crédit d'études et d'investissement de 42 500 000 francs en vue de la construction de 7 écoles de pédagogie spécialisée (ECPS) sur les communes de Vernier, d'Onex et du Grand-Saconnex». Ce préavis doit être rendu d'ici au 26 mai 2025.
De plus, les objets suivants sont également retirés par leurs auteurs:
Proposition de motion de Skender Salihi, Sandro Pistis, Arber Jahija, Gabriela Sonderegger, Sami Gashi, Daniel Sormanni, François Baertschi, Thierry Cerutti, Roger Golay, Jean-Marie Voumard, Christian Flury pour mieux valoriser les professions de la santé (M-2959)
Proposition de motion de Skender Salihi, Ana Roch, Gabrielle Le Goff, Christian Steiner, Jean-Marie Voumard, Christian Flury, Arber Jahija, Stéphane Fontaine : Vers une meilleure régulation des manifestations publiques et un financement équitable (M-3099)
Proposition de résolution de Skender Salihi, Amar Madani, Gabrielle Le Goff, Arber Jahija, Christian Flury, Thierry Cerutti pour en finir avec les frais disproportionnés de radiation d'une poursuite (Résolution du Grand Conseil genevois à l'Assemblée fédérale exerçant le droit d'initiative cantonale) (R-1045)
Proposition de résolution de Alexandre de Senarclens, Francine de Planta, Murat-Julian Alder, Fabienne Monbaron, Thierry Oppikofer, Jacques Béné, Pierre Nicollier, Joëlle Fiss, Jean-Pierre Pasquier, Jean-Marc Guinchard, Jacques Blondin, Alia Chaker Mangeat, François Wolfisberg, Anne Carron, Sébastien Desfayes, Cédric Jeanneret, Uzma Khamis Vannini, Julien Nicolet-dit-Félix, Yves de Matteis, François Erard, Marjorie de Chastonay, Jean-Pierre Tombola, Nicole Valiquer Grecuccio, Jean-Charles Rielle, Thomas Wenger, Pierre Eckert, Grégoire Carasso, Sophie Demaurex, Angèle-Marie Habiyakare, Vincent Canonica, Souheil Sayegh, Celine van Till pour la défense et la promotion de la Genève internationale (Résolution du Grand Conseil genevois à l'Assemblée fédérale exerçant le droit d'initiative cantonale) (R-1056)
Proposition de résolution de Sébastien Desfayes, Jacques Blondin, Thierry Arn, Patricia Bidaux, François Erard, Jean-Marc Guinchard, Souheil Sayegh, Anne Carron : Réaffirmons le rôle majeur de la Genève internationale pour la Suisse et pour le monde (Résolution du Grand Conseil genevois à l'Assemblée fédérale exerçant le droit d'initiative cantonale) (R-1057)
Le président. Les pétitions suivantes, parvenues à la présidence, sont renvoyées à la commission des pétitions:
Pétition : Un Etat civilisé ne peut pas être malveillant envers ses citoyens, ni violer les conventions internationales sur les droits des enfants et fondamentaux, ni discriminer en toute-puissance (P-2246)
Pétition pour un renforcement de la sécurité du chemin du Curé-Desclouds (P-2247)
Le président. La liste des élections vous a été envoyée par messagerie. Il en est pris acte.
Premier débat
Le président. Mesdames et Messieurs, l'ordre du jour appelle le PL 13509-A, que nous examinons en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole à la rapporteure de majorité.
Mme Celine van Till (PLR), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi a pour objectif d'abaisser le quorum des élections proportionnelles des 7% actuels à 5%. De quoi parle-t-on ? Dans un système proportionnel, le quorum est un taux minimum de suffrages de liste requis pour obtenir des sièges dans une assemblée. A Genève, un quorum de 7% a été institué en 1912 pour l'élection du Grand Conseil: les listes qui ne remportent pas ce minimum ne participent pas à la répartition des sièges. Le législateur de l'époque craignait en effet déjà l'entrée de groupes politiques de petite taille et à l'espérance de vie comptée. Il a donc tempéré le système proportionnel par un quorum, et cette recette perdure depuis plus de cent ans ! Pourquoi alors changer ?
Venons-en au projet de loi. Son auteur explique que les suffrages obtenus par des listes n'atteignant pas le quorum sont des voix perdues pour la démocratie. Il parle d'un problème éthique et d'un possible découragement du corps électoral. Certes, mais le système du quorum offre une stabilité à notre système démocratique.
Force est de constater que la multiplication des partis dans un parlement, en particulier celle des petits partis dont la durée de vie n'excède souvent pas une législature, conduit toujours à des débats houleux et à des votes aléatoires - les exemples sont nombreux. Il en ressort une instabilité parlementaire et politique nuisible au bon fonctionnement de la démocratie. La fragmentation politique aboutit à une dispersion du pouvoir politique entre de nombreux groupements de nature si différente qu'il devient extrêmement compliqué de trouver des consensus et d'arriver à des majorités claires.
Une autre conséquence de l'abaissement du quorum serait la difficulté de répartir les sièges dans les commissions parlementaires: l'équation deviendrait difficile à résoudre.
N'oublions pas non plus que l'existence d'un quorum au Grand Conseil a un impact sur la composition de nombreux conseils de fondations, de régies publiques et autres institutions, puisque selon la loi, chaque groupe siégeant au Grand Conseil y désigne un représentant. On peut d'ores et déjà imaginer la pagaille qui surviendra dans le fonctionnement de ces conseils.
Rien ne prouve par ailleurs qu'un quorum à 7% constitue une cause de l'abstentionnisme, comme le soutient l'auteur du projet de loi, ni même qu'il dissuade les électeurs de voter pour de petits partis. Il l'affirme, mais sans qu'aucune étude le montre.
La multiplication du nombre de groupes politiques au sein du parlement risque d'entraîner une instabilité dans l'assemblée, instabilité dont la démocratie n'a pas besoin, surtout dans le contexte actuel.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
Mme Celine van Till. Notre société doit reposer sur des institutions fortes et stables, auxquelles le peuple peut se référer avec confiance. Sachons raison garder et ne jouons pas aux apprentis sorciers ! Notre démocratie est un bien précieux qu'il nous faut préserver à tout prix, et nous devons nous battre pour la stabilité et le bon fonctionnement de nos institutions. Ne nous laissons pas hypnotiser par le chant des sirènes de ceux qui attaquent sans cesse les fondements de notre société sous prétexte de renforcer la démocratie ! Ne cédons pas à la tentation de l'affaiblissement démocratique. La démocratie a un prix et un quorum à 7% en constitue le juste prix ! Je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à vous prononcer en faveur de la stabilité démocratique et à rejeter avec force ce texte destructeur. Merci.
M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, en préambule, je remercie la rapporteure de majorité qui a pris sur son temps pour exposer tous les arguments que j'allais vous présenter afin d'arriver évidemment aux conclusions inverses: le but n'est bien sûr pas, comme il a été suggéré, de détruire les fondements de la démocratie, mais bien plutôt de les renforcer.
On voit qu'effectivement le taux de participation est excessivement faible et que les institutions se démènent pour parvenir à le rehausser. Des semaines de la démocratie, des concours CinéCivic, etc., sont organisés, mais peut-être faudrait-il commencer par le début: que le vote des citoyennes et des citoyens soit respecté et qu'une quinzaine de pour cent des voix ne finisse pas à la poubelle après chaque élection.
Depuis plusieurs élections proportionnelles, au Grand Conseil mais également aux Conseils municipaux (on est en période d'élections municipales), une quantité non négligeable de votes, qui a tendance à croître, n'est pas attribuée, ce qui décourage nécessairement les électeurs de participer aux élections. Il n'y a en effet rien de plus frustrant que de voter pour des gens qui, en définitive, ne sont pas élus, alors qu'ils ont un score pour le moins honorable.
Evidemment, c'est une bataille à contre-courant, ça a été tout à fait expliqué. Au titre d'une forme de conservatisme, de maintien des élus et des notables en place, on trouve des arguments qui sont souvent des arguties et visent à éviter que de nouveaux arrivants puissent acquérir une petite parcelle de pouvoir. Il s'agit d'une antienne récurrente, et tous les débats en faveur de davantage de démocratie et d'une plus grande participation des minorités ou des groupes discriminés se sont opposés à ces mêmes arguments conservateurs. On peut faire référence à la très longue lutte des femmes pour obtenir les droits civiques, mais également à celle des étrangers, des personnes en situation de handicap ou d'autres groupes discriminés qui luttent pour davantage de reconnaissance civique.
On est dans un monde politique où les groupes minoritaires sont de plus en plus fréquents, qu'on le veuille ou non; on peut le regretter, mais la réalité nous montre que la politique, comme de nombreux domaines sociaux et culturels, va en se fragmentant, que l'offre se fragmente, se diversifie. Il est absolument nécessaire d'en tenir compte.
Ça a été très bien dit également, ce quorum de 7% date de plus de cent ans, Mesdames et Messieurs. Il remonte à 1912, à l'époque où Genève était un canton plutôt progressiste, parce qu'il avait décidé de passer à la proportionnelle pour l'élection du Grand Conseil. Depuis 1912, rien n'a bougé ! Seul le terme employé dans la constitution a été modifié à la faveur de la nouvelle constitution: on parlait alors de tempérer par un quorum de 7%, ce qui indiquait bien cette volonté - cela a été soulevé - d'éviter que des trublions ou des gens qui ne faisaient pas partie de ce groupe de bien nés puissent participer au monde politique.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Julien Nicolet-dit-Félix. Lors des travaux de la Constituante, il a été proposé de baisser le quorum à 5%. Le groupe UDC, par exemple, était tout à fait en faveur de cela - je vous renvoie au très beau discours de Michel Amaudruz en faveur de cette baisse à 5%. Malheureusement, en dernière lecture, ça n'a pas pu être fait, et depuis, nous nous trouvons dans une situation de blocage.
Les effets qu'on présente comme potentiellement dramatiques sont en réalité totalement anodins. Si l'on passe de 7% à 5%, on réalise aisément que siégerait peut-être un groupe de plus, dans certains cas deux groupes de plus. Par ailleurs, le projet de loi comporte un alinéa qui permet au législateur de limiter les groupes soit par leur taille minimale soit par leur nombre.
Dans d'autres cantons, au Tessin, par exemple, le quorum est de facto à un nonantième du parlement, donc à 1,1%, à Neuchâtel il est à 3%. Or, que je sache, ces cantons ne se trouvent pas dans un état insurrectionnel où la démocratie a perdu tous ses droits. Bien au contraire: on parle beaucoup moins des pataquès politiques tessinois ou neuchâtelois que de ceux qui se passent dans notre canton. Pourquoi cela, Mesdames et Messieurs ? Simplement parce que la composition du Grand Conseil que nous avons aujourd'hui ne correspond pas exactement au corps électoral, on le sait bien. Certains groupes qui ont eu des résultats plus qu'honorables ne sont pas représentés, car il existe ce couperet fixé à 7%: vous avez obtenu 7,1%, vous vous retrouvez avec 8, 9 ou 10 députés, vous avez obtenu 6,9%, vous avez 0 député. C'est profondément injuste et choquant, et ce projet permet de corriger cela.
Je termine avec les résultats des dernières élections municipales. Vous le savez, plusieurs groupes n'ont pas atteint le quorum dans de nombreuses communes, et j'invite les représentants des partis concernés, l'UDC à Chêne-Bougeries, à Onex et à Veyrier, le MCG à Carouge ou à Thônex, LJS en Ville de Genève évidemment, mais aussi à Plan-les-Ouates et à Versoix, et Le Centre à Vernier... Ils ont obtenu des scores extrêmement bons (5 à 6%, voire plus pour certains), mais n'ont aucun conseiller municipal du fait de ce quorum qui pose un véritable problème démocratique. Vous avez l'occasion, Mesdames et Messieurs, de l'abaisser de façon très modeste - on avance par petits pas. Pour toutes ces raisons, nous vous invitons bien sûr à voter ce texte. Je vous remercie.
M. Yves Nidegger (UDC). La commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil, que j'ai l'honneur de présider, siège peu, parce que peu d'objets lui sont envoyés. Il faut rendre gloire aux auteurs du projet de loi - à l'auteur principal et aux cosignataires -, dans ce cas et dans d'autres que nous examinerons plus tard, de donner du travail à une commission qui sinon souffrirait du chômage technique, ce qui serait évidemment mauvais pour le budget familial des députés concernés.
Cela étant, la majorité n'est pas entrée en matière sur cette proposition, essentiellement parce que celle-ci repose d'une part sur une contre-vérité et de l'autre sur un sophisme. La contre-vérité, c'est l'idée que les voix données à un parti n'atteignant pas le quorum sont jetées à la poubelle et n'auraient strictement aucun effet - ça équivaudrait au fait de ne pas avoir voté. C'est faux: les voix données à un parti qui n'obtient pas le quorum sont redistribuées (ce sont les restes) dans un deuxième calcul, dans la proportion du résultat de ceux qui ont récolté suffisamment de voix pour obtenir des sièges et dont le résultat a été embelli par ce vote-là. Il s'agit d'un recyclage: c'est normalement une vertu de gauche et on l'apprécie beaucoup, mais il est en l'occurrence curieusement boudé. En tous les cas, on ne peut pas dire que ces voix vont à la poubelle.
Quant au sophisme, le voici: la grande idée derrière ce projet de loi est d'augmenter la représentation proportionnelle de tous et de toutes par un abaissement du quorum. En d'autres termes, s'il n'y avait pas du tout de quorum - les auteurs nous disent: «On va abaisser le quorum à 5% avant de le descendre plus bas» -, eh bien avec 1%, on pourrait avoir un représentant.
En soi, l'idée d'avoir une meilleure représentation de tous et toutes, de manière inclusive et sans le point médian, n'est pas mauvaise, simplement ce n'est pas ce qui se passe; les auteurs du projet reconnaissent dans la phrase suivante que s'il y avait une grande quantité de groupes, plus que ce que nous avons aujourd'hui, la gestion du parlement serait impossible. Ils proposent par conséquent que les petits groupes soient forcés d'adhérer à un plus grand groupe, par un système qui n'est plus le quorum permettant d'obtenir des sièges, mais délimitant un nombre de groupes maximal. C'est un quorum des groupes, si vous voulez. On aurait par conséquent une représentation, avec des assistants politiques, avec une vie interne au groupe, qui agrégerait les perdants à des groupes plus importants dans lesquels ils seraient dissous. On n'aurait donc évidemment pas au final la prétendue augmentation de la représentation proportionnelle promise par les initiants. Pour ces raisons, le groupe UDC refusera l'entrée en matière.
M. Jean-Louis Fazio (LJS). Chères et chers collègues, ce projet de loi demande qu'un quorum de 5% soit institué pour des élections cantonales et municipales. Régulièrement, certains partis qui ont de la difficulté à passer le cap des 7% tentent de l'abaisser afin d'entrer dans les parlements cantonaux; ils sont soutenus par des partis qui ne rencontrent pas ce problème et qui veulent montrer leur largeur d'esprit démocratique. C'est dangereux: la proportionnelle est un atout démocratique, mais comme pour tout, il ne faut pas en abuser.
Dans certains pays où le quorum est trop bas, ce sont des petits partis, souvent extrémistes et belliqueux, qui jouent les charnières et paralysent le pays en optant pour des politiques délirantes. Les exemples ne manquent pas, vous les connaissez.
LJS a obtenu le quorum pour siéger au Grand Conseil (j'en suis la preuve vivante), mais, récemment, pas en Ville de Genève. C'est le jeu de la démocratie. Les mauvais perdants poussent à l'abaissement du quorum, pas nous. Pour notre part, nous refuserons ce projet de loi. Je vous remercie.
M. Jean-Pierre Pasquier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, sous prétexte d'améliorer la représentativité démocratique, ce texte risque de fragiliser nos institutions et d'aggraver des dysfonctionnements déjà observés.
Premièrement, abaisser le quorum de 7% à 5% ne résoudra pas le problème des voix dites perdues. Les simulations présentées montrent que cet abaissement n'aurait permis qu'à un ou deux partis supplémentaires d'entrer au parlement lors des dernières élections; cela ne justifie pas pour autant une réforme constitutionnelle aussi lourde.
Ensuite, la fragmentation politique que ce projet engendrerait est un danger réel. Genève est déjà le canton le plus fragmenté de Suisse du point de vue du système de partis, et ajouter davantage de groupes au Grand Conseil compliquerait la formation de majorités stables, ralentirait les processus décisionnels et augmenterait les risques de blocages institutionnels. Nous devons privilégier l'efficacité de nos institutions, et non leur paralysie.
Par ailleurs, l'argument selon lequel le quorum actuel découragerait l'innovation politique est fallacieux. Les nouveaux partis qui ont su convaincre les électeurs, comme Libertés et Justice sociale en 2023, ont réussi à franchir la barre des 7%: ce n'est donc pas le quorum qui freine l'innovation, mais l'incapacité de certaines listes à rassembler un soutien suffisant.
En conclusion, cet objet ne répond pas aux véritables enjeux démocratiques de notre canton, mais il risque d'agrandir la fragmentation, de ralentir le fonctionnement du parlement et de créer des incohérences institutionnelles. Pour ces raisons, le groupe PLR vous invite, Mesdames et Messieurs, à refuser ce projet de loi et à préserver la stabilité et l'efficacité de nos institutions. Merci, Monsieur le président.
M. Patrick Dimier (MCG). Pour prolonger ce que vient de dire M. Pasquier avec pertinence, soit il y a un quorum, soit il n'y en a pas, mais le fixer à 5, 7 ou 3%, c'est vraiment faire du blabla pour faire du blabla. Soit on est avec un système qui a un quorum, soit on est avec un système qui n'en a pas. Prenons le cas de systèmes qui n'en ont pas. Deux exemples me viennent à l'esprit: Israël et la Belgique. Ni l'un ni l'autre ne représentent des modèles de stabilité politique. Il suffit d'une seule députée ou d'un seul député, peu importe, pour que le système bascule. Ce n'est pas ça, la stabilité politique.
Cela étant, nous pouvons discuter du taux, 3, 5, 7%; c'est un autre sujet, mais en l'occurrence nous débattons d'un quorum qui serait sauf erreur abaissé à 5%. Or, ça ne changera rien: on restera avec un système qui suscitera toujours des mécontents, c'est la loi de la démocratie. Soutenons la démocratie et non le désordre, maintenons par conséquent la loi telle qu'elle est.
M. Diego Esteban (S). J'apprécie l'évolution de ce débat, du déluge biblique que nous annonçait la rapporteure de majorité en cas d'acceptation de ce texte aux considérations beaucoup plus sensées qui ont été avancées. Je souhaite toutefois répondre à certaines de ces dernières.
M. Pasquier dit que l'efficacité consiste à instaurer un quorum, j'irai pour ma part encore plus loin: l'efficacité, c'est ne pas avoir de démocratie. Vous l'aurez compris, depuis au moins le début du XIXe siècle, l'efficacité n'est pas l'objectif poursuivi par nos constituants, car le but de la démocratie est tout d'abord la représentativité de la voix du peuple. Si l'on prend même le plus petit parti siégeant dans cette enceinte, 7000 de nos concitoyennes et concitoyens sont représentés; si l'on devait comparer avec les résultats de 2009 par exemple, qui constituent l'exemple récent le plus évocateur, on se retrouve avec un total de voix perdues en raison du quorum qui, dans l'enceinte parlementaire actuelle, aurait été très près de la troisième place, donc le quatrième groupe en nombre de voix au sein de ce Grand Conseil. Voilà donc le poids considérable de la non-représentation de personnes qui se sont déplacées pour aller voter à l'urne, sachant que les personnes qui votent représentent malheureusement encore et toujours une minorité de la population. On ne voit pas vraiment ce que perdrait notre canton en matière de représentativité.
L'argument du chaos a été avancé. C'est celui qu'a évoqué M. Dimier; ce dernier va chercher des exemples qui, sur le principe de l'absence de quorum... Ces exemples peuvent être cités, mais il en existe un beaucoup plus proche de chez nous: le Tessin. Or, je n'ai pas l'impression que ce canton soit un modèle d'instabilité politique et démocratique dans notre Confédération, ça me suspendrait; du reste, pendant les travaux de commission, on n'a pas remarqué qu'au Tessin la situation serait absolument incontrôlable.
Le groupe socialiste aurait préféré que les travaux avancent avec des propositions de variantes, d'amendements concernant la baisse du quorum à 5%. On demande pourquoi 5%. C'est un seuil arbitraire. S'agissant du taux de 7%, exactement le même raisonnement peut être appliqué quand on en recherche la genèse. Pourquoi 7% ? Peu d'explications sont à ce jour avancées. Ce serait donc faire un bien mauvais procès à ce taux de 5% si l'on n'appliquait pas la même réflexion aux règles actuellement en place. Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste vous encourage à voter l'entrée en matière. Merci beaucoup.
Mme Alia Chaker Mangeat (LC). Tout d'abord, je tiens à dire que le texte part d'une prémisse discutable, à tout le moins en partie. Les signataires évoquent le fait que les électeurs ayant voté pour un parti ou mouvement qui n'a pas obtenu le quorum ne sont pas représentés au sein de ce parlement. Ce n'est pas tout à fait juste, parce que de nombreuses petites listes ne défendent pas forcément une idéologie ou un programme clair. Si l'on prend l'exemple de la liste Femmes en 2018, qui a recueilli 3,26% des voix, elle a eu l'énorme mérite - c'est vrai - de mettre en lumière la question de la sous-représentation des femmes en politique et les enjeux d'égalité, mais elle ne proposait pas un programme clair sur l'ensemble des thèmes politiques qui nous préoccupent au Grand Conseil, par exemple la fiscalité, la politique sociale, l'aménagement du territoire ou d'autres. Cette liste a néanmoins permis de faire élire davantage de femmes au sein de tous les groupes politiques en 2018, et c'était un beau succès dans ce sens; elle est de fait représentée dans notre parlement.
La question est la suivante: est-ce toujours en raison d'un quorum trop élevé que certaines listes n'ont pas obtenu de sièges ? Eh bien, vous connaissez la réponse, et les cas des partis d'extrême gauche sont à ce titre particulièrement parlants. Y a-t-il des différences idéologiques majeures entre solidaritéS, le parti du Travail, Défense des aînés et j'en passe ? Eh bien non ! Je suis convaincue qu'ils auraient voté comme une seule femme depuis le début de cette législature... (Rire.) ...et leur division interne est essentiellement due à des conflits de personnes et non à des différences programmatiques majeures. La démocratie n'a aucune raison de changer ce système de quorum uniquement en raison de querelles personnelles.
Aujourd'hui, le Grand Conseil est passablement fragmenté et, Mesdames et Messieurs, le risque déjà présent est que nous, les partis qui avons obtenu le quorum, ne représentions plus nos propres électeurs. On le voit avec la fragmentation du parlement: au lieu de trouver des consensus intelligents, des solutions qui emportent une large adhésion, ici, mais aussi auprès de la population, et d'éviter ainsi l'écueil du référendum, nous sommes tentés de marchander telle ou telle motion contre tel ou tel projet de loi, tels des marchands de tapis, avec des alliances fragiles de circonstance. Ce n'est pas ce qui fait la richesse et la particularité de la démocratie suisse.
Je le dis d'autant plus facilement que nous formons un petit parti et que nous sommes également exposés à cette limite du quorum qu'il nous est aussi arrivé de perdre. En Ville de Genève, notre liste commune avec les Vert'libéraux nous a permis d'augmenter le nombre d'élus du bloc centriste, en le faisant passer de huit à dix avec cinq élus centristes et cinq issus de la liste Vert'libérale. On se réjouit d'avoir ensemble gagné deux sièges, même si, au sens strict, Le Centre a perdu deux sièges. Ce qui compte, c'est que cette alliance permettra de défendre avec succès notre vision commune de la Ville. La réserve de voix, Mesdames et Messieurs, se trouve parmi les abstentionnistes, qui représentent aujourd'hui 60% des voix - il y a donc largement de quoi atteindre le quorum. Merci.
Le président. Je vous remercie. La parole revient à M. Nicolet-dit-Félix, qui dispose exactement de quarante-huit secondes.
M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Je félicite le courage des groupes qui flirtent avec le quorum et s'opposent à ce texte. C'est tout à votre honneur ! Je reprends l'épisode de la liste Femmes, qui doit sans doute se réjouir d'avoir vu ses trois et quelques pour cent répartis de manière proportionnelle, notamment entre des groupes dont la fibre féministe les conduit à lutter contre les points médians et les burkinis. C'est évidemment abusif de penser que ça a renforcé le féminisme dans ce parlement.
Je finirai en disant à celles et ceux qui estiment que le parlement actuel est particulièrement stable et fonctionne sans anicroche que nous avons, sauf erreur, déposé neuf référendums depuis le début de la législature; ils ont tous été couronnés de succès dans les urnes. C'est la preuve la plus évidente que ce parlement n'est pas représentatif, pour la simple et bonne raison qu'un voire deux groupes n'ont pas pu accéder à cette enceinte, en raison de l'existence du quorum entre autres. Avec un parlement plus équilibré, sans doute parviendrons-nous à proposer à la population et à défendre des projets de lois plus pondérés. Je vous demande une dernière fois de voter ce texte. Merci.
Le président. Merci bien. Mesdames et Messieurs les députés, nous votons sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 13509 est rejeté en premier débat par 58 non contre 28 oui.
Premier débat
Le président. C'est le tour du PL 13595. Nous sommes en catégorie II, trente minutes, et je donne la parole à l'auteur, M. Sylvain Thévoz.
M. Sylvain Thévoz (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'UNRWA est indispensable à la survie de millions de personnes au Proche-Orient. Cette agence est aujourd'hui confrontée à de graves contraintes financières suite au retrait des financements provenant des Etats-Unis et de la Suède ainsi qu'à l'incertitude concernant le soutien de la Suisse, ce qui accentue encore l'instabilité dans toute la région.
Ce déficit de financements frappera l'UNRWA dès juin 2025, entravant inévitablement sa capacité à fournir des services d'urgence et des prestations essentielles telles que l'éducation, les soins de santé, le soutien social et l'aide humanitaire pour des millions de personnes.
Dans ce contexte, une contribution du canton de Genève aurait un impact important sur les opérations menées par l'UNRWA dans la région et enverrait un message politique fort de soutien à cet office de l'ONU; elle constituerait également un exemple pour d'autres cantons suisses, villes et régions d'Europe.
Dans la bande de Gaza, l'UNRWA représente une bouée de sauvetage pour plus de 2 millions de personnes. La reprise des bombardements israéliens dans la nuit du 17 mars a fait grimper le bilan des morts à plus de 50 000 personnes depuis le début de la guerre, selon le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires, et provoqué le déplacement de 124 000 personnes supplémentaires. Depuis plus de quatre semaines maintenant, tout secours humanitaire, tout approvisionnement est à nouveau bloqué, précipitant Gaza dans une crise alimentaire aiguë. Plus d'un million de personnes souffrent de pénurie alimentaire, et la flambée des prix locaux aggrave encore la situation.
L'UNRWA, pourtant, reste sur le terrain, continue à exécuter son mandat. Au 21 mars, l'organisation gérait 116 centres d'hébergement à travers Gaza, accueillant temporairement environ 148 000 personnes déplacées, dont de nombreuses familles fuyant les bombardements. Environ 730 000 personnes traumatisées, dont plus de 520 000 enfants, ont bénéficié des activités de soutien psychosocial de l'UNRWA depuis le début du conflit.
Cet engagement de l'agence est fondamental pour la reprise de l'apprentissage à Gaza. Après des mois sans école, l'UNRWA a rétabli un enseignement en présentiel pour plus de 50 000 enfants. Par ailleurs, plus de 260 000 enfants sont inscrits sur sa plateforme de formation en ligne. Actuellement, seule cette structure est en mesure de relancer l'éducation à grande échelle pour les enfants de Gaza.
L'UNRWA, Mesdames et Messieurs, constitue le principal acteur de santé dans la bande de Gaza, prenant en charge plus de la moitié des personnes ayant reçu des soins médicaux depuis le 7 octobre 2023. L'office a assuré près de 8 millions de consultations médicales à Gaza depuis le début de la guerre, son personnel a directement vacciné plus de 200 000 enfants contre la poliomyélite, en collaboration avec l'UNICEF et l'OMS.
Malheureusement, tous les services de l'UNRWA sont au bord de l'effondrement alors que cette agence est la seule à pouvoir agir à grande échelle. Tous les efforts humanitaires, y compris ceux d'autres organisations, dépendent de la présence historique de l'UNRWA, de son vaste réseau d'infrastructures, de sa flotte de véhicules, du nombre inégalé de professionnels qu'elle emploie et qui assurent la continuité des opérations. La suppression brutale de son activité risque d'entraîner l'effondrement des prestations dans toute la région, un scénario qui se révélerait apocalyptique.
A ce jour, il n'existe aucune alternative crédible à l'UNRWA. Soutenir cet office, c'est empêcher la région de sombrer encore davantage. L'UNRWA est un atout précieux pour la communauté internationale afin d'assurer une transition politique viable qui réponde durablement à la question palestinienne. L'intégration de l'agence dans un processus politique contribuera à protéger les réfugiés palestiniens et à préserver les chances de paix dans les territoires palestiniens occupés.
Dans l'immédiat, l'UNRWA a un besoin impératif de financements. Nous souhaitons que le canton de Genève participe à ses services de développement humain et d'urgence dont tant de personnes dépendent désespérément au Proche-Orient. Le présent projet de loi propose une subvention ciblée de 5 millions de francs suisses qui permettrait de combler un vide critique à un moment de risque existentiel pour l'UNRWA, de réaffirmer le leadership de Genève dans les affaires humanitaires mondiales ainsi que son engagement envers le multilatéralisme et le droit international. Ce soir, Genève a l'opportunité de lancer un appel fort en soutenant l'UNRWA, non seulement par des mots, mais surtout par des actes.
Une telle contribution constituerait une affirmation publique de la place de Genève en tant que capitale humanitaire, une défense du multilatéralisme et des droits humains, cela au moment où l'UNRWA fait l'objet d'attaques politiques coordonnées et de campagnes de désinformation. Un engagement clair de notre canton représenterait également un signal stabilisateur important pour l'ensemble des donateurs internationaux.
Pour conclure, Mesdames et Messieurs, soutenir l'UNRWA, ce n'est pas opter pour une organisation au détriment des autres, c'est choisir de préserver l'architecture humanitaire dans son entier, car cette agence constitue la colonne vertébrale de l'écosystème humanitaire à Gaza. Soutenir l'UNRWA, c'est soutenir toutes les habitantes et tous les habitants de Gaza de même que l'intégralité des entités présentes; c'est surtout préserver un chemin vers la paix et maintenir l'espoir d'un futur viable pour Gaza. Merci d'accepter ce projet de loi. (Applaudissements.)
M. Sébastien Desfayes (LC). Nous, centristes et toujours fondamentalement démocrates-chrétiens, dans ce terrible conflit, prendrons le parti de l'humanité, de la responsabilité et de la paix. Nous soutiendrons par conséquent ce projet de loi, avec ou sans l'amendement du Conseil d'Etat.
Je parlais d'abord d'humanité. Depuis octobre 2023, l'UNRWA est en première ligne pour venir en aide aux réfugiés, à la population palestinienne à Gaza, mais aussi en Cisjordanie, au Liban et dans d'autres lieux. Et quand je dis que l'UNRWA est en première ligne, il ne s'agit pas que d'une formule, sachant que plus de trois cents de ses employés ont été tués depuis le début du conflit. Plus de trois cents.
L'UNRWA assure un service essentiel d'alimentation, de santé, d'éducation, d'aide sociale à des centaines de milliers de réfugiés, procure plus de la moitié de l'aide humanitaire à Gaza - cela a été souligné - et appuie, par ses infrastructures et ses douze mille collaborateurs locaux, l'autre moitié de l'assistance dispensée sur place. Ses services sont irremplaçables, l'agence est indispensable, comme l'a démontré le fameux rapport Colonna: sur le terrain, il n'y a pas d'alternative à l'UNRWA.
Ce rôle est encore plus vital aujourd'hui vu la rupture du cessez-le-feu et la reprise des bombardements. Nous ne pouvons pas rester insensibles devant une telle tragédie et devons apporter - Genève doit apporter ! - notre contribution pour que cette action cruciale puisse continuer.
J'évoquais ensuite la responsabilité. En effet, notre responsabilité commande de voter ce projet de loi, parce que l'existence même de l'UNRWA est aujourd'hui remise en cause, en raison notamment (mais pas seulement) des coupes budgétaires décidées par les Etats-Unis et de certains pays européens.
Contrairement à d'autres organisations, l'UNRWA dépend essentiellement de financements publics, ce qui rend cet office d'autant plus fragile. Nous ne pouvons pas nous passer de son activité, il n'y a aucune autre alternative. Sans l'UNRWA, nous assisterions très certainement à une tragédie humanitaire d'une ampleur inédite.
Je conclus avec mon troisième mot: la paix. Au fond, certains reprochent à l'UNRWA d'exister, mais si cet organisme est toujours actif, septante-cinq ans après sa création, c'est parce que la communauté internationale n'a pas trouvé de solution pour régler la question palestinienne. Là aussi, Genève aura son rôle à jouer, et ce soutien à l'UNRWA traduit la volonté du canton de s'impliquer dans la paix. Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)
M. Marc Saudan (LJS). Mesdames et Messieurs les députés, comme l'a déclaré mon préopinant, on ne peut pas ignorer le drame qui se joue à Gaza et l'aide de toutes les organisations impliquées, le travail exemplaire qu'elles accomplissent. Cependant, nous pensons que le canton ne peut pas soutenir systématiquement chaque entité, l'une après l'autre, avec des subventions spécifiques.
C'est la raison pour laquelle le groupe LJS tient à saluer l'amendement du Conseil d'Etat qui élève quelque peu la portée de ce texte: il ne s'agit plus simplement d'un financement de l'UNRWA, mais d'une aide humanitaire et d'un message fort du canton de Genève. Voilà pourquoi nous accepterons cette proposition de même que le projet de loi s'il est ainsi amendé. Merci.
M. Guy Mettan (UDC). Depuis le début des affrontements le 7 octobre 2023, l'UDC s'est toujours montrée fidèle à sa ligne, faisant savoir qu'elle s'abstiendrait d'intervenir dans ce conflit. En effet, nous défendons pour notre part les principes d'impartialité et de neutralité; pour nous, la meilleure option consiste - et ceci est également valable dans le cadre du sujet qui nous est soumis ce soir - à nous abstenir.
Je rappelle qu'aussitôt après le 7 octobre, nous avions été saisis d'une motion, me semble-t-il, qui défendait Israël et attaquait la Palestine - avec certaines raisons, d'ailleurs, puisque de nombreux Israéliens étaient morts, victimes de l'agression commise contre des camps de jeunes en Israël, des centaines de victimes avaient été déplorées -, mais de notre côté, nous avons maintenu notre position avec fermeté: nous nous sommes toujours abstenus, y compris à l'occasion de ce texte, quand il s'agissait de soutenir Israël et de critiquer les Palestiniens.
Aujourd'hui, c'est le contraire qui nous est proposé: il s'agit de soutenir les Palestiniens, et cela pourrait être - légitimement - perçu par le camp israélien comme une prise de parti. Nous estimons que ce n'est pas là notre rôle, même si on invoque des prétextes humanitaires - des raisons humanitaires, pas des prétextes, parce que je pense que l'état d'urgence est réel; nous considérons que nous devons rester fermes et qu'il ne revient pas au Grand Conseil de prendre position dans cette affaire.
En ce qui concerne la situation humanitaire, l'UNRWA effectue un travail reconnu, c'est vrai, mais l'agence est également sujette à de multiples critiques; certaines vidéos montrent par exemple des employés de l'UNRWA avec des otages israéliens, ce ne sont pas des choses acceptables. Surtout qu'il existe des alternatives: le CICR, d'autres organismes peuvent intervenir, comme le Maguen David Adom, le Croissant-Rouge palestinien, d'autres entités peuvent remplir cette mission.
Maintenant, Mesdames et Messieurs, encore un petit mot sur l'amendement du Conseil d'Etat. Effectivement, cette proposition élargit le champ du projet de loi et, partant, est intéressante; à titre personnel, je pourrais la soutenir, mais elle ne change pas non plus fondamentalement la donne. C'est la raison pour laquelle, in fine, quelle que soit l'option que vous retiendrez, nous nous abstiendrons.
M. Murat-Julian Alder (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, selon l'article 2, alinéa 4, de la Constitution fédérale, la Confédération «s'engage en faveur de la conservation durable des ressources naturelles et en faveur d'un ordre international juste et pacifique».
Notre propre constitution prévoit ceci à son article 146: «L'Etat soutient la vocation internationale de Genève en tant que centre de dialogue, de décision et de coopération internationale, fondé sur la tradition humanitaire et le droit, ainsi que sur les valeurs de paix et de solidarité. Il mène une politique de solidarité internationale soutenant la protection et la réalisation des droits de l'homme, la paix, l'action humanitaire et la coopération au développement. A ces fins, il prend toute initiative utile et met des moyens à disposition, en coordination avec la Confédération.»
Le groupe PLR accueille le présent projet de loi avec bienveillance et remercie son auteur. Ce texte appelle toutefois un certain nombre de questions. La première a trait au timing, si vous me permettez cet anglicisme. Un processus au niveau fédéral était déjà en cours au moment où l'objet a été déposé. On peut dès lors s'interroger: cette proposition fait-elle encore sens alors que la Suisse a décidé de maintenir son financement à l'UNRWA ?
La deuxième question que le projet de loi suscite est celle de la répartition des compétences en la matière entre le canton et la Confédération. A cet égard, notre charte fondamentale s'avère très claire: il est question de «coordination avec la Confédération». Cette coordination a-t-elle eu lieu ? Bien sûr que non, puisque le texte en est pour l'instant au stade du débat en plénière.
Enfin, la troisième question soulevée concerne la problématique de l'aide que nous pourrions offrir à d'autres organisations mobilisées sur le terrain. Le groupe PLR vous invite d'ores et déjà à accepter l'amendement du Conseil d'Etat visant à élargir la portée du texte à d'autres structures qui, elles aussi, sont actives dans la région et tout aussi précieuses pour l'action humanitaire menée par la communauté internationale dans un secteur où, aujourd'hui, par dizaines de milliers, des personnes vivent malheureusement dans des conditions d'insalubrité, de pauvreté et de destruction tout à fait intolérables.
Pour l'ensemble de ces raisons, Mesdames et Messieurs, je vous recommande de soutenir l'amendement du Conseil d'Etat. S'agissant du vote final, le groupe PLR a décidé d'accorder à ses membres la liberté de vote, au vu de la sensibilité particulière du sujet. Merci de votre attention.
Mme Sophie Bobillier (Ve). Depuis septante-cinq ans, l'UNRWA est bien plus qu'une agence humanitaire: elle constitue le pilier indispensable du soutien aux Palestiniens. Il s'agit de la seule organisation en mesure d'assurer une aide d'urgence multisectorielle tout en garantissant des services publics essentiels: éducation, aide médicale, soutien psychosocial.
L'UNRWA exerce des fonctions régaliennes là où aucune autre institution ne peut intervenir. Alors que Gaza traverse une crise humanitaire sans précédent qui ne fait que perdurer, l'UNRWA fournit plus de 50% du secours humanitaire sur place et supporte l'autre moitié en mettant à disposition ses infrastructures et douze mille employés locaux; ses cliniques sont aujourd'hui indispensables, ses écoles représentent l'unique espoir de continuité éducative pour plus de 650 000 enfants.
Or la crise financière qui la secoue actuellement - et dont le fondement politique est indéniable - pousse cette structure au bord de l'effondrement. Ce n'est pas préoccupant uniquement pour les 2 millions de Gazaouis, mais également pour les 6 millions de réfugiés palestiniens qui dépendent de l'UNRWA dans les pays voisins: en Cisjordanie, au Liban, en Syrie, en Jordanie.
Contrairement à d'autres organismes, l'UNRWA ne dispose ni de financements privés conséquents ni de capacités de levées de fonds alternatives, mais dépend quasi exclusivement des Etats donateurs. Aujourd'hui, l'office n'a plus qu'un mois de visibilité financière et risque une fermeture, ce qui impliquerait un désastre humanitaire supplémentaire.
Genève joue un rôle crucial et central dans le système de solidarité internationale. Par ce projet de loi, nous réaffirmons la vocation humanitaire de notre canton. L'UNRWA fait figure de socle sur lequel repose l'activité de toutes les autres entités - cela a été souligné; soutenir cette agence, c'est garantir un accès à l'éducation, à la santé et surtout le droit à la dignité pour tous les Palestiniens.
L'amendement du Conseil d'Etat dilue la portée du texte initial, affaiblissant une aide ciblée en faveur de l'UNRWA. Cela étant, au vu de la gravité de la crise humanitaire qui se joue aujourd'hui, laquelle nécessite le déploiement de moyens substantiels en faveur de la paix et de la protection des civils, le groupe Vert s'abstiendra sur cette modification pour éviter de mettre à mal une subvention indispensable au fonctionnement de l'office.
Je rappelle qu'en octobre 2023, le groupe Vert avait déposé un projet de loi destiné à financer l'ensemble des organisations mentionnées dans cet amendement et qui remplissent un rôle primordial aux côtés de l'UNRWA, à savoir le Programme alimentaire mondial, le CICR, Médecins sans frontières.
L'UNRWA traverse une crise inédite et infiniment plus grave que les autres organismes évoqués; la prise d'assaut de six de ses écoles pas plus tard que mardi dernier, empêchant huit cents enfants de terminer l'année scolaire, en est un triste exemple. Genève doit réserver un plein soutien à l'UNRWA. C'est la raison pour laquelle je vous invite, avec le groupe Vert, à adopter ce projet de loi. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole va à M. Mizrahi pour une minute.
M. Cyril Mizrahi (S). Merci, Monsieur le président. Rapidement, pour répondre d'abord à M. Mettan, soutenir l'UNRWA, ce n'est pas prendre le parti de la Palestine ou des Palestiniens contre les Israéliens, c'est simplement défendre les civils, comme nous devons nous y employer pour n'importe quel conflit, donc cela ne revient pas du tout à enfreindre la neutralité.
Par ailleurs, je trouve très dommage qu'on utilise comme prétexte le fait que quelques personnes se soient peut-être rendues coupables de comportements répréhensibles pour mettre à mal le financement d'une organisation dans son ensemble.
L'UNRWA, c'est l'aide et les services publics non seulement à Gaza, mais également dans d'autres pays où ont fui des réfugiés palestiniens et palestiniennes. C'est pourquoi nous, les socialistes, allons privilégier la version originale du projet de loi, car c'est bien cette agence qui est aujourd'hui ciblée par les attaques et ne dispose pas de financements alternatifs. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
Le président. Merci bien. Monsieur Alder, vous souhaitez intervenir à nouveau ?
M. Murat-Julian Alder (PLR). Oui, Monsieur le président, merci. Afin de clarifier toutes ces questions, je propose de renvoyer cet objet à la CACRI. (Commentaires.)
Le président. Très bien. Madame Nathalie Fontanet, vous avez la parole.
Mme Nathalie Fontanet, présidente du Conseil d'Etat. Je ne me prononce pas sur le renvoi, Monsieur le président, n'est-ce pas ? (Remarque.) Voilà, très bien, sur l'amendement. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat a en effet déposé un amendement, clairement pas dans l'objectif de diluer l'action du projet de loi, mais de compléter celle-ci, parce que le Conseil d'Etat ne remet aucunement en question le rôle absolument essentiel que joue l'UNRWA dans la région.
A mon sens, c'est un raccourci de penser qu'en soutenant l'UNRWA, on prend le parti des Palestiniens contre les Israéliens: ce débat est dépassé. Sans l'intervention de cette agence, des populations entières ne pourraient pas survivre, un accès à l'éducation ne serait pas donné, des soins de santé ne seraient pas assurés.
Le Conseil d'Etat est simplement d'avis, et ses services également, que cette organisation ne peut pas tout faire toute seule et que l'idée du projet de loi n'est pas de secourir l'UNRWA, mais bien une population. Or dans cette perspective, même si un soutien à l'UNRWA demeure fondamental - d'ailleurs, notre amendement lui accorde 3 millions de francs -, le Conseil d'Etat estime que la collaboration est également importante, soit le fait d'inclure d'autres entités pour couvrir les besoins humanitaires de l'ensemble des habitants affectés par ce conflit.
Par conséquent, nous souhaitons intégrer dans la subvention un montant de 1 million pour le PAM, de 500 000 francs pour le CICR et de 500 000 francs pour MSF Suisse. Le Conseil d'Etat est convaincu que cette répartition permettra de favoriser une prise en charge des besoins humanitaires de toutes les personnes concernées dans la région.
Depuis le début des affrontements à Gaza, le Conseil d'Etat n'a eu de cesse de proposer des soutiens, d'essayer de dépolitiser le débat, de faire en sorte d'aider les populations touchées; il considère que son amendement permet de mieux y parvenir, d'appréhender plus globalement la situation qui a cours actuellement à Gaza et dans les régions avoisinantes. Dès lors, Mesdames et Messieurs, il vous recommande d'adopter son amendement. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Merci, Madame la présidente du Conseil d'Etat. J'ouvre maintenant la procédure de vote. Nous allons d'abord nous prononcer sur la proposition de renvoi à la CACRI émise par M. Alder; en cas de refus, je mettrai aux voix le projet de loi ainsi que ses amendements.
Mis aux voix, le renvoi du projet de loi 13595 à la commission des affaires communales, régionales et internationales est rejeté par 55 non contre 21 oui et 10 abstentions.
Mis aux voix, le projet de loi 13595 est adopté en premier débat par 69 oui contre 4 non et 11 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. Nous sommes saisis d'un premier amendement du Conseil d'Etat:
«Art. 1 But (nouvelle teneur)
La présente loi vise à assurer une contribution humanitaire d'urgence afin de soutenir les activités de l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), du Programme alimentaire mondial (PAM), de Médecins sans frontières-Suisse (MSF-CH) et du Comité International de la Croix-Rouge (CICR) en faveur des populations affectées par le conflit dans la bande de Gaza.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 41 oui contre 20 non et 26 abstentions.
Mis aux voix, l'art. 1 ainsi amendé est adopté.
Le président. Le gouvernement nous soumet une deuxième demande d'amendement que voici:
«Art. 2 Financement (nouvelle teneur)
Une subvention pour un montant total de 5 millions de francs est accordée par l'Etat à l'UNRWA, au PAM, à MSF-CH et au CICR en faveur des populations affectées par le conflit dans la bande de Gaza.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 39 oui contre 8 non et 38 abstentions.
Mis aux voix, l'art. 2 ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'art. 3 est adopté, de même que les art. 4 et 5.
Le président. Nous votons à présent sur l'article 6 «Clause d'urgence». Je rappelle que selon l'article 142 de la LRGC, pour être adoptée, la clause d'urgence doit être votée par le Grand Conseil à la majorité des deux tiers des voix exprimées, les abstentions n'étant pas prises en considération, mais au moins à la majorité de ses membres.
Mis aux voix, l'art. 6 est adopté par 70 oui contre 13 non et 4 abstentions (majorité des deux tiers atteinte). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 13595 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 65 oui contre 8 non et 14 abstentions (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Premier débat
Le président. Nous poursuivons nos travaux avec le PL 13416-A, la P 2214-A et la M 3005-A. Le débat est classé en catégorie II, trente minutes. Je signale que les deux premiers textes font l'objet d'un rapport de M. Guy Mettan; s'agissant du dernier point, M. Thierry Oppikofer est rapporteur de majorité et M. François Baertschi rapporteur de minorité, remplacé ici par Mme Ana Roch. Monsieur Mettan, c'est à vous.
M. Guy Mettan (UDC), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, vous vous en souvenez peut-être, il y a deux ans, la presse et le Grand Conseil s'étaient inquiétés de situations relatives à ce qu'on a appelé du népotisme, c'est-à-dire au fait que dans des établissements - certains établissements - publics, des personnes ou des proches de la famille du directeur ou de cadres supérieurs avaient été embauchés; c'était notamment le cas aux SIG, puisque quatre membres de l'entourage du responsable de l'époque y avaient été engagés.
Il ne s'agit pas de personnaliser la problématique: il y a eu d'autres cas ailleurs, dans des départements de l'Etat, tant et si bien que M. Dugerdil avait déposé, au nom de l'UDC, un projet de loi dans le but de mettre fin à ces pratiques qui nous paraissaient discriminatoires vis-à-vis de tous les autres candidats à des postes au sein de la fonction publique ou d'institutions de droit public qui se voyaient écartés parce qu'ils n'avaient pas la chance de bénéficier de liens privilégiés avec de hauts dirigeants. De plus, cela nous semblait porter ombrage à la bonne réputation, à la crédibilité de l'administration.
Le problème a été reconnu, la commission sur le personnel de l'Etat a examiné ce texte pendant de nombreuses séances; elle s'est notamment attachée à définir les liens de parenté possibles, ce qui était susceptible ou pas de relever du népotisme, etc. La commission a réalisé un bon travail de fond; elle a auditionné le Conseil d'Etat à plusieurs reprises, à savoir Mme Fontanet, responsable du personnel de l'Etat.
A l'issue des discussions, les commissaires ont adopté un amendement général. C'est vrai qu'il a été compliqué de trouver la bonne formule, mais finalement, la commission s'est unanimement rangée derrière un amendement de Mme Caroline Marti, à qui je rends hommage, car elle a mis toute la commission d'accord autour de sa proposition.
A partir de là, en ma qualité de rapporteur, je ne peux que vous encourager à adopter le projet de loi tel que sorti des travaux de commission. Je reviendrai peut-être ensuite sur la pétition et la motion, mais voilà ce que je voulais dire en préambule, Monsieur le président.
M. Thierry Oppikofer (PLR), rapporteur de majorité. La M 3005 a été déposée le 14 mars 2024 par des députés MCG, soit la veille du dépôt du projet de loi dont on vient de parler, qui porte sur le même sujet et qui, à une exception près, était signé par des membres de l'UDC.
Mon rapport de majorité porte sur la proposition de motion, laquelle contient des termes assez vifs: «républiques bananières», «tour de passe-passe», «complicité de l'exécutif», «confusion lamentable». Il s'agissait en fait d'une réaction à la nomination du père de la magistrate Delphine Bachmann à la direction de l'OCSIN, juste après l'élection de sa fille à l'exécutif du canton.
Voici ses invites au Conseil d'Etat: renoncer aux pratiques de népotisme; s'engager, par une déclaration sur l'honneur, à ne pas embaucher de personnes ayant des liens de parenté avec l'un ou l'autre de ses membres; enfin, faire annuler toutes les décisions prises précédemment en contradiction avec cet engagement. Bien entendu, cet effet rétroactif a suscité des débats animés au sein de la commission.
Lors de son audition, la première signataire a évoqué «une manière médiévale d'accéder à des postes importants au sein de l'Etat». La notion plutôt vague de liens de parenté a troublé plusieurs commissaires. Dans le cadre de son audition portant sur le projet de loi, la pétition et la proposition de motion, la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet a notamment souligné l'illégalité de la troisième invite, celle sur la mesure rétroactive.
M. Charles Pict, directeur du service d'audit interne de l'Etat, a pour sa part expliqué qu'au sein de l'administration, un problème pouvait se poser si un membre de la famille d'un cadre hiérarchique direct était engagé, mais que s'il ou elle travaillait dans un autre service, cela semblait admissible. Dans le cas de Mme Bachmann et de son père, il a précisé que les décisions avaient été prises de manière neutre, sans la présence de la magistrate, que des situations comme celles qui avaient motivé les deux textes - motion et projet de loi - étaient très rares et qu'il en avait vu extrêmement peu en vingt-cinq ans de carrière.
Il existe par ailleurs une fiche MIOPE - il faudrait peut-être songer un jour à changer cet acronyme ! -, pour «mémento des instructions de l'office du personnel de l'Etat», qui réglemente ces incompatibilités; celle-ci pourrait certainement être renforcée.
Lors des travaux, alors que nous étions tombés d'accord sur le projet de loi, on a assisté à de louables efforts du groupe MCG pour sauver sa motion; il a tenté d'abord de reformuler la deuxième invite, puis de supprimer la déclaration sur l'honneur et enfin de remplacer la troisième invite par une proposition plus générale, à savoir: «à améliorer la gestion des ressources humaines».
Mme Fontanet a souligné que ces amendements ne modifiaient en aucun cas la position du Conseil d'Etat; ne considérant pas qu'il existe des pratiques de népotisme au sein des ressources humaines, celui-ci restait opposé à la motion, amendée ou non.
Après une discussion finale où la nouvelle version de la troisième invite a été retirée par les motionnaires, le vote de la commission s'est avéré limpide: l'amendement général du MCG réduit à deux invites a été rejeté par 11 non contre 3 oui, et la M 3005 dans sa version originale n'a obtenu qu'une seule voix, celle du MCG.
Dès lors, malgré l'acharnement thérapeutique dont il a fait l'objet de la part de nos respectables collègues du MCG, la large majorité de la commission vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, de refuser ce texte qui n'a aucune utilité eu égard au projet de loi qu'on vient d'évoquer et sur lequel nous nous apprêtons à nous prononcer dans ce Grand Conseil. Merci, Monsieur le président.
Mme Ana Roch (MCG), rapporteuse de minorité ad interim. La majorité a soutenu que le texte ne servait à rien, était mal formulé et que les différents amendements que nous avions déposés ne respectaient pas la légalité. Nous avons essayé de les modifier; cela n'a pas plu à la commission, puisque, comme cela a été mentionné, une large majorité s'est formée pour les refuser.
Il n'empêche que cette motion a donné lieu à un certain débat, a permis en tout cas d'apporter un éclairage quant aux pratiques liées à l'engagement de membres d'une même famille au sein de l'Etat. Pour cette raison, nous pensons qu'elle avait encore toute sa valeur. Merci.
M. Jean-Louis Fazio (LJS). Chers collègues, le projet de loi vise à rectifier la pratique suite à certains recrutements qui ont défrayé la chronique et ébranlé la confiance que le peuple doit avoir envers nos institutions; il met l'accent sur la transparence et l'éthique qui doivent présider à l'engagement de fonctionnaires. Il s'agit réellement d'une question de bon sens politique.
Le groupe LJS soutiendra ce projet de loi ainsi que les amendements socialistes, qui nous paraissent adéquats et équilibrés. Par ailleurs, nous voterons le dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil et refuserons la motion du MCG. Je vous remercie de nous suivre.
M. Alexandre de Senarclens (PLR). Ce projet de loi tout comme cette motion sont vraiment dans l'air du temps, c'est-à-dire que toute émotion, toute éventuelle erreur du Conseil d'Etat doit mener à une réponse législative. De toute évidence, le gouvernement a commis une erreur - et je pense qu'il a compris la leçon -, non pas que la personne qui a été nommée ne disposait pas des compétences requises - elle les possède certainement -, mais parce qu'effectivement, cette décision donne une mauvaise image ou peut générer un certain soupçon.
Toutefois, la réaction politique est complètement disproportionnée. Encore une fois, c'est vraiment dans l'air du temps, c'est-à-dire qu'on estime que tout faux pas politique doit conduire à une mesure législative: il faut légiférer, il faut réguler, il faut corseter l'action de l'Etat. On ne supporte plus un quelconque risque, donc on doit inscrire l'entier des possibilités dans la loi, comme si toute question devait trouver une réponse légale.
Et ce faisant - il s'agit d'un vrai débat philosophique que l'on amène ici -, on déresponsabilise les acteurs politiques, on ne leur permet plus de faire preuve d'un comportement éthique ou moral, puisque tout doit être prévu dans la loi. Ce qui figure dans la loi est autorisé, ce qui n'y figure pas n'est pas autorisé. On déresponsabilise ainsi les personnes. A l'avenir, le Conseil d'Etat appliquera scrupuleusement les lois alors qu'au contraire, il devrait faire appel à sa responsabilité, à sa jugeote et éviter ce genre de décision.
Ce projet de loi est mal foutu, car il ne prévoit pas la question du concubinage ni celle des liens d'amitié importants. Il faudrait plutôt réglementer ces cas par le biais de la fiche MIOPE, et c'est d'ailleurs ce qu'a fait le Conseil d'Etat. On peut effectivement réfléchir à des modifications de cette fiche MIOPE, mais ce n'est pas par des dispositions légales qu'il faut gérer ce type de problématique. Voilà pourquoi le groupe PLR vous invite à rejeter tant le projet de loi que la proposition de motion. Je vous remercie, Monsieur le président.
Mme Louise Trottet (Ve). Beaucoup de choses ont déjà été dites, en particulier sur le projet de loi. Effectivement, cet objet s'inscrit dans un contexte politique récent. Il convient toutefois de rappeler qu'il se concentre sur les relations entre le Conseil d'Etat et les hauts fonctionnaires, et ne traite pas du tout de situations similaires entre d'autres échelons à l'intérieur de l'administration.
Par ailleurs - et cela a été signalé par mon préopinant -, ce texte élude la question des liens d'intérêts qui concerneraient par exemple des amitiés, des liens amoureux plus officieux, etc., mais on peut imaginer que dans ces cas de figure, le bon sens joue en général son rôle, la loi ne peut pas et ne pourra jamais tout régler.
Le projet de loi d'origine était complètement excessif: son périmètre portait jusqu'à des parents du troisième degré, par exemple un arrière-petit-enfant, et concernait toute l'administration: l'arrière-petite-fille d'un conseiller ou d'une conseillère d'Etat n'aurait pas pu aspirer à un quelconque poste au sein de l'Etat, y compris probablement à l'hôpital ou dans d'autres régies publiques.
Cette aberration du champ d'action comme des postes visés a heureusement été corrigée par un amendement socialiste qui rend le texte plus réaliste. Partant, le groupe Vert vous invite à accepter ce projet de loi ainsi modifié.
S'agissant de la motion MCG sur le même sujet, comme cela a été relevé, elle est inacceptable, tant sur le plan de ses invites que des considérants, qui sont assez limite. En particulier, la demande de ne pas nommer de personnel ayant des liens de parenté est trop vague et pose problème sur le plan du recrutement à l'Etat. Quant au fait de renoncer aux pratiques de népotisme, cette proposition n'a pas sa place dans une motion: elle relève davantage du niveau moral que normatif et législatif.
Par conséquent, les Verts ne soutiendront pas cette motion et voteront également le dépôt de la pétition des Vert'libéraux sur le bureau du Grand Conseil. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, il me semble que les membres de la commission sur le personnel de l'Etat convergeaient sur plusieurs points, et c'est également la position du parti socialiste. Le premier élément, c'est que les processus de recrutement à l'Etat, a fortiori quand il s'agit de hauts fonctionnaires, doivent être irréprochables. Cela nécessite évidemment de la transparence, mais aussi l'assurance d'une absence totale de favoritisme ou de décision pouvant être perçue comme tel, même si ce n'est pas fondamentalement avéré. Il s'agit d'une question de crédibilité pour l'Etat et de confiance des citoyens envers les institutions.
Le deuxième point de convergence, c'est que dans l'idéal, on ne devrait pas avoir à légiférer sur ce sujet, parce que cela comporte certains risques, cela requiert de faire une sorte d'inventaire à la Prévert qui serait inscrit dans la loi. Or quand on liste un certain nombre de conflits d'intérêts ou d'engagements qui seraient potentiellement prohibés, on a toutes les chances d'en oublier ou de tomber à côté dans certaines situations.
Ce qu'on a constaté, dans le cadre de nominations récentes qui ont poussé au dépôt de ces différents objets parlementaires, c'est que le Conseil d'Etat avait l'air de considérer que ce qui n'était pas formellement interdit par une loi ou un règlement était autorisé et donc légitime. Or le Grand Conseil n'a pas cette même appréciation, et c'est la raison pour laquelle la majorité de la commission a malgré tout décidé de légiférer pour instituer un cadre à l'engagement de hauts fonctionnaires, en particulier s'agissant des liens d'intérêts qui peuvent exister avec des conseillers et conseillères d'Etat.
Le troisième principe sur lequel nous étions également toutes et tous d'accord, c'est que le projet de loi tel que rédigé à l'origine n'était pas applicable: il était bien trop extrême et aurait conduit à des situations tout à fait arbitraires, comme l'a démontré Mme Trottet tout à l'heure.
Dès lors, nous avons déposé des amendements afin de réglementer l'embauche de proches de conseillers et conseillères d'Etat, mais également du chancelier ou de la chancelière, de manière à éviter les potentielles situations de conflit d'intérêts ou présentant l'apparence de conflits d'intérêts.
Il est important de préciser que cette nouvelle version ne comporte pas d'effet rétroactif. En effet, il est absolument hors de question de remettre en cause des décisions qui ont été prises précédemment, décisions prises dans la légalité, même si elles ont pu être contestées.
Enfin, je rappelle - M. de Senarclens a eu raison de le mentionner - qu'il n'est pas possible de lister l'intégralité des cas de figure qui pourraient mener à un conflit d'intérêts. Aussi ce texte n'exempte-t-il pas le Conseil d'Etat de faire preuve de prudence, d'analyser non seulement la légalité, mais également la légitimité d'une candidature et, le cas échéant, d'y renoncer s'il peut y avoir une suspicion de conflit d'intérêts.
Mesdames et Messieurs, nous vous invitons à accepter le projet de loi, à voter le dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil - elle n'a plus d'objet, puisque le problème est réglé à travers le projet de loi - et à refuser la proposition de motion qui, comme l'ont indiqué nombre de mes préopinants, est vraiment extrême. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Souheil Sayegh (LC). Chers collègues, par souci de transparence, il est important de rappeler de quoi il est question: on ne parle pas de l'engagement d'un nouveau collaborateur, mais bien d'une personne qui, à l'époque des faits, officiait déjà à l'Etat, était numéro deux de son département et, par la force des choses, aurait très bien pu finir numéro un si la magistrate à laquelle on se réfère (et que je ne nommerai pas) avait été élue un an après.
Que s'est-il passé ? Le chef du département de l'OCSIN, qui était le numéro deux, est passé numéro un, mais le hasard de la temporalité a voulu que l'élection du gouvernement ait lieu avant et que sa fille devienne conseillère d'Etat. Pour cette seule et unique raison, ce fonctionnaire n'aurait pas dû obtenir le poste que le temps lui aurait accordé de toute façon. Il ne s'agit pas là d'un quelconque favoritisme, mais d'un hic de temporalité lié au scrutin. Encore une fois, on ne parle pas d'un nouvel engagement, mais d'une personne qui était déjà en fonction, donc le conflit d'intérêts est ici moyen.
Comme on a eu l'occasion de l'évoquer en commission... Le directeur du service d'audit interne de l'Etat est venu nous expliquer que le Conseil d'Etat a procédé correctement en nommant cet individu, la conseillère d'Etat concernée s'étant récusée lors du vote, étant sortie de la salle. Le bon sens a primé lors du processus. Le Centre n'y voit aucun problème sur le plan de la procédure.
Graver les conditions d'élection ou de nomination des membres de la fonction publique dans le marbre d'une loi, lister les liens familiaux et déterminer jusqu'à quel degré de parenté une personne pourrait ou non être autorisée à travailler au sein de l'Etat, c'est s'immiscer finalement dans la vie privée des gens, c'est décider: aujourd'hui, telle personne n'est pas en couple ou en ménage avec telle autre, ça passe, mais si elle entre en concubinage avec untel, ça ne passe plus.
Je rappelle que Genève est un tout petit canton de 500 000 habitants, tout le monde se connaît. Il est illusoire de croire que les gens ne se connaissent pas, n'entretiennent pas de liens d'amitié ou de relations privées et, le cas échéant, de vouloir éliminer certains candidats. Comme l'a souligné Mme Trottet tout à l'heure, quelqu'un pourrait se voir refuser une position à l'hôpital en raison d'une personne en fonction à un autre poste ailleurs, ça deviendrait problématique.
Il existe aujourd'hui une fiche MIOPE qui est effectivement perfectible, et tout l'intérêt qu'ont eu ces textes, c'est que nous avons eu l'occasion d'en discuter. Pour ces raisons, Le Centre a choisi de rejeter le projet de loi, de déposer la pétition sur le bureau du Grand Conseil et de refuser la proposition de motion; le bon sens vous commanderait de faire de même. Je vous remercie.
Mme Ana Roch (MCG), rapporteuse de minorité ad interim. Nous estimons que le projet de loi reflète une réalité plus large et que certains engagements, justifiés ou non, suscitent une mauvaise appréciation de l'opinion publique. Il est important que l'Etat montre l'exemple et donne une direction claire, surtout en période de grande exclusion du marché du travail de certains de nos résidents. Même si ce texte ne résout pas tous les problèmes, il est crucial de faire un effort pour agir de manière exemplaire et signifier que l'Etat joue un rôle central.
De plus, grâce aux amendements, nous considérons que l'approche est nuancée et tient compte des nécessités opérationnelles de l'Etat. Il ne faudrait pas aller trop loin et risquer de compromettre le bon fonctionnement des institutions en interdisant à certaines personnes de travailler simplement en raison de leur proximité avec un conseiller d'Etat.
Genève est une petite communauté où il est difficile d'éviter des liens dans certains domaines de la fonction publique ou activités étatiques. En l'état, avec la mesure que propose l'amendement général, nous pouvons soutenir le projet de loi. Merci.
M. Guy Mettan (UDC), rapporteur. Je voudrais rebondir sur les propos de M. de Senarclens. D'ordinaire, l'UDC est assez proche des soucis manifestés par M. de Senarclens, c'est-à-dire que nous n'aimons pas non plus augmenter la bureaucratie et gêner le pouvoir exécutif dans sa tâche, disons... (Remarque.) ...régalienne, absolument ! Merci, Madame la présidente !
C'est vrai que cet argument a son intérêt, mais il n'empêche qu'on a tout de même constaté de nombreuses situations douteuses. Alors il s'agit peut-être d'une pure coïncidence temporelle, mais en l'espace de quelques mois, plusieurs affaires sont sorties. Dès lors, je crois qu'il est légitime de s'interroger, car comme je l'ai indiqué, il faut faire en sorte que la fonction publique soit au-dessus de tout soupçon !
Et c'est vraiment dans cet esprit de concertation que la commission a oeuvré. Mme la conseillère d'Etat nous a annoncé qu'elle n'était pas favorable, sur le principe, au projet de loi, mais les travaux ont été effectués en collaboration avec elle: elle nous a guidés dans la mesure de ses possibilités, donc il y a eu un bon travail de coopération entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Voilà, je tenais juste à préciser ces points.
Enfin, voici la position de mon parti sur la pétition: comme cela a été noté, la pétition a vu ses buts réalisés grâce au projet de loi, donc il faut voter en faveur de son dépôt sur le bureau du Grand Conseil. Concernant la M 3005 du MCG, tout a été dit à ce sujet; notre groupe préconise l'abstention par amitié et respect pour la contribution du MCG au débat.
Mme Nathalie Fontanet, présidente du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, vous le savez, le Conseil d'Etat était - et est toujours - formellement opposé au projet de loi tel qu'il avait été déposé et dont la portée était excessive: dans un canton de taille modeste comme Genève, il empêchait toute personne ayant un lien familial, même extrêmement éloigné, avec quelqu'un au Conseil d'Etat ou ailleurs, d'être embauchée dans l'administration, c'était tout à fait problématique.
Le texte tel qu'amendé à l'issue des travaux de commission a fait l'objet de nombreuses discussions. Le Conseil d'Etat, par ma voix, a confirmé qu'il pouvait vivre avec, que contrairement au projet initialement déposé, la nouvelle version était applicable.
Le Conseil d'Etat relève toutefois que la politique des ressources humaines de l'Etat est basée sur la compétence et l'expertise, que les choix se portent sur les meilleurs dossiers suite à un processus impliquant le responsable direct et les responsables RH, garants de la procédure, que lors des recrutements, les postes sont publiés, un comité de sélection est souvent constitué.
Celles et ceux qui entretiennent des liens personnels, ne serait-ce qu'au sein du comité de sélection - et là, on ne parle pas encore du Conseil d'Etat qui doit nommer un haut cadre -, doivent se récuser, quitter le groupe de travail pour éviter tout conflit d'intérêts.
En ce qui concerne les fonctions dirigeantes, nous veillons par ailleurs à ce que les comités de sélection comprennent des cadres d'autres départements. C'est ainsi que nous avons procédé pour la nomination qui fait l'objet des différents textes soumis ce soir à votre Conseil.
L'amendement adopté - et Mme Marti l'a rappelé, je pense que c'est important - n'exonérera pas le Conseil d'Etat de ses responsabilités. Je rappelle que les membres du Conseil d'Etat doivent se récuser lorsqu'ils ont un intérêt personnel direct dans le dossier traité, selon l'article 24, alinéa 1, du règlement pour l'organisation du Conseil d'Etat de la République et canton de Genève; cette disposition prévoit également que l'article 15 LPA s'applique aux membres du Conseil d'Etat lorsque celui-ci intervient en tant qu'autorité administrative.
Mesdames et Messieurs, tout cela pour dire qu'on aura beau instituer dans la loi toutes les cautèles possibles et imaginables, on ne pourra jamais anticiper l'ensemble des cas susceptibles de se présenter. Si demain un conseiller ou une conseillère d'Etat a différents amants ou maîtresses, ces derniers ne seront pas identifiables ni connus, et ils pourraient être embauchés au sein de l'administration à de hauts postes.
Il est important d'insister sur cet élément, parce que légiférer pour un cas précis ne permettra pas d'éviter toutes les situations potentielles. Personne ne sait avec qui les conseillères et conseillers d'Etat couchent... (Commentaires.) ...et dans ce contexte, il serait possible de nommer à certaines fonctions des personnes entretenant des liens d'intérêts avec eux.
Mesdames et Messieurs, ne créons pas de loi sur la base d'une affaire spécifique. Le Conseil d'Etat est responsable. Dans le cadre de la nomination dont il a été fait mention, la conseillère d'Etat directement concernée s'est bien entendu récusée: elle n'a participé ni au débat ni à la prise de décision. L'entier du processus de recrutement a été assuré par un autre conseiller d'Etat et ses équipes.
En réalité, ce que vous êtes en train de combattre, ce que vous souhaitez régler - et je l'entends tout à fait -, c'est le dégât d'image, c'est la perception tronquée que peut avoir le citoyen vis-à-vis des autorités. Manifestement, nous évoluons aujourd'hui dans un monde où cette vision a plus d'importance que les faits, prend le pas sur la réalité.
Pendant les débats en commission, Mesdames et Messieurs les députés, j'ai indiqué que le Conseil d'Etat ne pouvait pas cautionner le projet de loi dans sa première mouture, mais qu'en revanche, il pouvait vivre avec sa version amendée, même s'il n'estimait nécessaires ni le dépôt d'un tel texte ni son ajustement par un amendement. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs.
Le président. Merci, Madame la présidente du Conseil d'Etat. Nous commençons la procédure de vote avec le PL 13416.
Mis aux voix, le projet de loi 13416 est adopté en premier débat par 53 oui contre 30 non et 2 abstentions.
Le projet de loi 13416 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 13416 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 52 oui contre 30 non et 2 abstentions (vote nominal).
Le président. En ce qui concerne la P 2214, je mets aux voix le préavis de la commission, à savoir le dépôt.
Mises aux voix, les conclusions de la commission sur le personnel de l'Etat (dépôt de la pétition 2214 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 83 oui (unanimité des votants) (vote nominal).
Le président. Enfin, Mesdames et Messieurs, nous nous prononçons sur la M 3005. Avant de lancer le vote sur sa prise en considération, je vous remercie de vous déterminer sur l'amendement général présenté par la minorité. Il s'agit de remplacer toutes les invites du texte par les suivantes:
«- à renoncer définitivement aux pratiques népotiques dans la gestion étatique des ressources humaines;
- à ne pas nommer du personnel ayant des liens de parenté avec l'un ou l'autre de ses membres.»
Mis aux voix, cet amendement général est rejeté par 65 non contre 10 oui et 10 abstentions.
Mise aux voix, la proposition de motion 3005 est rejetée par 65 non contre 9 oui et 10 abstentions (vote nominal).
Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission des finances.
Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission fiscale.
Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission des finances.
Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission des finances.
Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport.
Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport.
Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève.
Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission des finances.
Cette proposition de motion est renvoyée sans débat à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport.
Cette proposition de motion est renvoyée sans débat à la commission d'aménagement du canton.
Cette proposition de motion est renvoyée sans débat à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève.
Cette proposition de motion est renvoyée sans débat à la commission d'aménagement du canton.
Cette proposition de motion est renvoyée sans débat à la commission législative.
Cette proposition de motion est renvoyée sans débat à la commission des transports.
Cette proposition de résolution est renvoyée sans débat à la commission fiscale.
Cette proposition de résolution est renvoyée sans débat à la commission de la santé.
Cette proposition de résolution est renvoyée sans débat à la commission de la santé.
Le projet de loi 13283 est retiré par ses auteurs.
Le projet de loi 13284 est retiré par ses auteurs.
Ce projet de loi est renvoyé à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport, avec un délai au 26 mai 2025, pour préavis à la commission des travaux qui rendra son rapport au Grand Conseil.
Suite à l'arrêt du Tribunal fédéral du 28 février 2025, la loi 13030 est modifiée comme suit:
L'art. 2, al. 2 (LEFI), est annulé.
L'art. 52, al. 5, 2e et 3e phrases, et al. 6, 2e et 3e phrases (LIPP), est annulé.
Suite à l'arrêt de la Chambre constitutionnelle de la Cour de justice du 24 mars 2025, la loi 13036 est annulée.
La proposition de motion 2959 est retirée par ses auteurs.
La proposition de motion 3099 est retirée par ses auteurs.
La proposition de résolution 1045 est retirée par ses auteurs.
La proposition de résolution 1056 est retirée par ses auteurs.
La proposition de résolution 1057 est retirée par ses auteurs.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, étant donné que c'est l'une de mes dernières séances en tant que président, je vous octroie quinze minutes de pause supplémentaires ! (Exclamations. Applaudissements.) Nous nous retrouvons à 20h30 pour la suite des travaux. Bon appétit !
La séance est levée à 18h45.