République et canton de Genève

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PL 12348-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi de M. Eric Stauffer sur les constructions en zone aéroportuaire (Pour des constructions cohérentes dans la zone de l'aéroport)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IX des 16 et 17 janvier 2020.
Rapport de Mme Céline Zuber-Roy (PLR)

Premier débat

Le président. L'ordre du jour appelle le traitement du PL 12348-A en catégorie II, trente minutes. Madame Céline Zuber-Roy, rapporteure, à vous la parole.

Mme Céline Zuber-Roy (PLR), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. Le projet de loi 12348 vise à créer un périmètre inconstructible autour de l'aéroport de Genève. En commission, son traitement a immédiatement succédé - on peut même parler de doublon - aux débats que nous avons menés sur les projets de lois de déclassement de Cointrin-Est et Cointrin-Ouest. Lors du vote, une majorité a refusé le texte, confirmant sa position qui est de soutenir la densification dans ce secteur proche du centre et bénéficiant d'excellents accès et infrastructures.

Tout le monde connaît la suite, puisque les projets de Cointrin-Est et Cointrin-Ouest ont été rejetés en votation populaire. Ce fait nouveau depuis les travaux de commission ne change pas fondamentalement les choses. En effet, la décision du peuple implique que les lieux concernés resteront en zone villas, où les possibilités de construction sont déjà très limitées. Ainsi, il n'est pas nécessaire d'ajouter des restrictions en prévoyant une inconstructibilité complète pour ces quartiers, et c'est pourquoi la commission d'aménagement vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser ce projet de loi.

M. François Baertschi (MCG). Contrairement à Mme le rapporteur de la commission, le groupe MCG estime que ce projet de loi mérite d'être soutenu, parce qu'il résout une question qui n'a pas été complètement réglée par le vote sur Cointrin-Est et Cointrin-Ouest. C'est une problématique délicate: il y a la réverbération du bruit des avions contre les murs des immeubles, il y a la nécessité de protéger les habitants de cette région. Avec une législation relativement stricte, nous pourrions empêcher de nouvelles constructions. Même si ce n'est pas à l'ordre du jour actuellement, on peut imaginer, vu la pression sur l'immobilier à Genève, qu'une telle disposition ait toute son utilité à l'avenir. Certes, Mesdames et Messieurs, le texte a été présenté de manière, disons, expéditive en période électorale par son auteur, mais malgré cela, il soulève de bonnes questions, il apporte des réponses intéressantes, et nous vous demandons de voter oui.

M. Rémy Pagani (EAG). Mesdames et Messieurs les députés... (Remarque.) Voilà, Monsieur le président, j'ai mis mon masque ! En ce qui nous concerne, nous avions soutenu le déclassement et nous continuons à le faire. Intrinsèquement, c'est la question de l'aéroport qui se pose, c'est l'un des seuls qui soit à ce point enclavé dans la ville. Il y a soixante ans, il y avait encore des terrains agricoles autour du carrefour des Charmilles, puis l'aéroport s'est complètement urbanisé. Evidemment, cela engendre des problèmes sanitaires, mais on pourrait aussi s'interroger quant au nombre de bureaux et de gens présents dans la zone aéroportuaire, y compris sur le tarmac.

Cette industrie est polluante, on le sait, elle participe à la dégradation du climat. Il faut que nous réglions cela, et j'espère qu'un jour, une majorité déclarera cette infrastructure impropre à exister en plein centre-ville et se ralliera à d'autres aéroports. C'est nécessaire, Mesdames et Messieurs, il en va de notre santé, il en va de notre responsabilité. L'AIG contribue de manière importante non seulement à l'altération des conditions sanitaires de la population, mais également à celle de notre environnement. Le Conseil d'Etat se réfugie derrière le fait que 20% seulement des citoyens genevois utilisent cet aéroport, mais tous les passagers de Cointrin prennent part à la détérioration du climat de notre région, donc nous sommes face à un vrai problème.

Cela étant, nous sommes pour l'évolution de la ville, personne ici ne veut - ou même ne peut - la bloquer, donc nous nous opposerons à ce projet de loi qui vise à figer notre cité en l'état actuel - comme si c'était possible ! -, qui vise à bloquer le développement économique de notre canton, développement que nous défendons, rappelons-le, sans que l'aéroport représente forcément une contribution indispensable. Merci de votre attention.

M. Stéphane Florey (UDC). De notre point de vue, ce projet de loi va plutôt dans le bon sens, à savoir qu'il respecte la volonté populaire exprimée lors du fameux vote de février...

Une voix. 2020 !

M. Stéphane Florey. Février 2020, merci ! Il y a tellement de votations qu'on ne sait plus à quelle année se référer ! Il respecte en tout point la volonté populaire qui était de refuser le déclassement et l'importante densification de ce périmètre. Au final, il n'interdit pas de rénover les logements qui s'y trouvent déjà, il empêche simplement de densifier fortement la zone définie. Encore une fois, ce texte suit en tout point la décision du peuple qui consiste à ne pas densifier Cointrin-Est et Cointrin-Ouest, il respecte la volonté des habitants. C'est pour cette raison, Mesdames et Messieurs, que nous vous invitons à le soutenir. Je vous remercie.

Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, nous ne partageons pas ce qui vient d'être dit, nous ne sommes pas non plus d'accord avec le MCG concernant ce projet de loi de M. Stauffer - il est d'ailleurs le seul à l'avoir signé, il nous l'a plutôt jeté comme cadeau de départ - qui ne propose aucune solution sérieuse et dont les constats ne correspondent en rien à la réalité de notre territoire.

On veut déclarer la zone aéroportuaire inconstructible, on décrète qu'aucun édifice en hauteur ne peut être réalisé, mais on peut quand même développer des bureaux, des bâtiments administratifs et de la zone industrielle, c'est complètement contradictoire ! Alors d'abord il restera possible de construire, contrairement à ce qui est indiqué à l'alinéa 1, mais en plus on consommera du territoire, puisqu'il s'agit de ne pas produire en hauteur, mais de continuer à bien s'étaler, y compris pour des immeubles administratifs, ce qui constitue un total non-sens.

Très vite, la majorité de la commission, et Mme Zuber-Roy l'a parfaitement expliqué, a compris que ce texte non seulement n'apporte strictement rien, mais surtout ne correspond absolument pas aux normes d'aménagement actuelles. Nous vous invitons donc à l'enterrer dans la foulée et à passer au sujet suivant. Merci beaucoup.

Le président. Merci, Madame la députée. Je donne la parole à Mme Danièle Magnin pour une minute quinze.

Mme Danièle Magnin (MCG). Merci beaucoup, Monsieur le président. Mon sang n'a fait qu'un tour en entendant mon préopinant d'Ensemble à Gauche quasiment envisager la suppression de l'aéroport de Genève ! Je voudrais juste revenir sur son histoire en quelques secondes: en 1919, le Grand Conseil a voté un crédit pour l'achat des terrains, puis la SDN est venue s'installer dans notre canton précisément parce qu'il y avait la possibilité d'y venir en avion. Si vous supprimez l'aéroport, Mesdames et Messieurs, c'est la fin de la Genève internationale. Est-ce vraiment ce que vous voulez ? Merci.

Une voix. Très bien !

Une autre voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. Jean-Luc Forni (PDC). Sans surprise, le groupe démocrate-chrétien se ralliera à l'avis de la majorité et refusera ce projet de loi qui, comme on l'a entendu, n'apporte rien et n'éclaire aucunement le débat, même dans la succession des discussions qui ont eu lieu sur le déclassement de Cointrin-Est et Cointrin-Ouest. En fait, déclarer cette zone inconstructible avait pour but d'éviter que l'extension des activités de l'aéroport soit compromise par des actions visant à limiter les nuisances sonores, mais cela ne résout pas le problème, cela n'a pas de sens. Nous rejoignons dès lors la majorité de la commission qui a confirmé que la densification dans ce secteur, qui bénéficie d'excellents accès et infrastructures, est cohérente. Pour ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, nous refuserons l'entrée en matière sur ce projet de loi.

M. David Martin (Ve). Chers collègues, nous n'avions pas particulièrement prévu d'intervenir dans ce débat, mais j'aimerais tout de même réagir à certains propos, en commençant par dire à ceux qui font un immense détour en évoquant l'aéroport que ce n'est pas l'objet du projet de loi. Vous connaissez la position des Verts sur l'aéroport, nous appelons à réduire le trafic aérien, mais ce n'est pas le sujet ici; le but de ce texte est d'interdire les constructions autour de l'AIG.

Signalons qu'il existe déjà une limitation extrêmement importante du développement dans cette zone: les normes de l'OPB s'appliquent, et elles sont très strictes, ce qui fait qu'il est absolument impossible de construire du logement dans tout un périmètre. Par contre, il est très utile d'y bâtir des dépôts TPG comme celui d'En Chardon, juste sous la piste de l'aéroport, et j'aimerais savoir si les personnes qui sont en faveur de ce texte considèrent qu'il ne faut pas construire de dépôts TPG, M. Florey par exemple - vous transmettrez, Monsieur le président.

Et pour continuer avec les déclarations de M. Florey qui prétend de façon récurrente que la population entière s'oppose à toute forme de modification de zone, je rappelle que bon nombre de projets passent la rampe sans aucun problème, sont votés par l'UDC, sont votés par M. Florey, par exemple celui de Carantec, au Petit-Saconnex, que notre Grand Conseil a adopté à l'unanimité il y a un an ou deux, et il s'agit pourtant d'un quartier très proche de l'aéroport. Il faut quand même savoir nuancer son propos dans ce débat. Toujours est-il que nous refuserons le projet de loi. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. A présent, la parole va à M. Pfeffer pour une minute et trente-trois secondes.

M. André Pfeffer (UDC). Merci, Monsieur le président. Pour un bon voisinage entre les riverains et l'aéroport, il est évident qu'il ne faut pas densifier à proximité immédiate de celui-ci. Ce projet de loi n'est pas particulièrement contraignant; il propose qu'une zone aéroportuaire non constructible soit désignée par le Conseil d'Etat. En ce qui concerne les bâtiments administratifs, commerciaux ou industriels, le gouvernement peut octroyer des dérogations. L'unique exigence, soit l'interdiction de bâtir en hauteur, n'est pas définie clairement par l'auteur: il n'y a pas de critère, aucune hauteur précise n'est spécifiée. Pour ces raisons, notre groupe soutiendra ce projet de loi. Merci.

Le président. Je vous remercie. Monsieur Stéphane Florey, vous avez à nouveau la parole pour vingt-sept secondes.

M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Ça me suffira pour répondre à M. Martin que si l'UDC ne s'oppose pas à tous les projets, c'est parce que certains d'entre eux ne font pas polémique, même au sein de la population, même au sein des communes. Voilà pourquoi nous les soutenons, Monsieur, et je vous invite à ne pas mélanger tous mes propos. Merci.

M. Vincent Subilia (PLR). Je prends brièvement la parole, Monsieur le président, pour boucler la boucle, la rapporteuse de majorité issue des rangs du PLR ayant commencé le débat. Ce projet de loi paraît en effet sans pertinence, et je me réjouis de constater que la plupart des partis politiques de l'hémicycle l'ont relevé. Cela étant, je m'insurge contre les propos tenus sur l'aéroport, même si ce n'est pas le sujet direct du texte. L'AIG fait l'objet de critiques récurrentes de la part de certains qui oublient que la salle dans laquelle nous siégeons en ce moment même, que l'OMM nous prête gracieusement, n'aurait jamais été construite si Genève n'était pas doté d'une infrastructure aéroportuaire de qualité. Je vous invite dès lors, Mesdames et Messieurs, à rejeter cet objet avec fermeté. Merci.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Il n'y a plus de demande de parole, je vous propose donc, Mesdames et Messieurs, de vous prononcer sur cet objet.

Mis aux voix, le projet de loi 12348 est rejeté en premier débat par 71 non contre 19 oui.